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PanaÏt Munteanu

LE ROMAN DE MA VIE
LE ROMAN DE MA VIE

de

Panait Munteanu

Je suis né sans être désiré.


Ce fait a marqué toute ma vie
et c’
c’est négativement réverbéré,
dans le temps, sur mon entier etre,
sur tout ce que j’j’ai voulu réaliser.
Introduction

J’ai écrit ce livre dans le désir de montrer au lecteur les événements qui ont eu lieu et
qui se sont déroulés sur le chemin de ma vie bouleversée. Rien n’est pas imaginaire.
Toutes les étapes de ma vie que j’ai vécues et qui sont décrites dans mon roman se sont
passées en réalité. J’ai essayé de rendre, le plus fidèlement possible, l’histoire de ma
vie avec ses ascensions et ses pentes, les inquiétudes et les incertitudes, avec les joies
et les ennuis spécifiques, en outre, a chaque personne.
Les personnages qui apparaissent dans cette oeuvre sont également réels et les uns
d’entre eux sont encore en vie. Je suis convaincu qu’ils vont se retrouver dans les pages
de mon roman, comme ils ont vécu et ont participé, d’une manière ou d’une autre, plus
ou moins, aux événements qui se sont déroulés dans ma vie, pendant la période entre
les années 1938 et jusqu’au présent.
Les descriptions et les dialogues mentionnés respectent dans leur grande majorité la
vérité historique et si ceux qui vont lire ce livre vont constater peut-hêtre l’existence
d’une erreur, je veux leur dire, dès le début, que j’ai considéré a mentionner les mots ou
les expressions utilisées, pas mot à mot, mais seulement pour exprimer l’essentiel des
dialogues et des idées qui ont résulté d’eux, comme ils ont eu lieu.
Mon livre décrit et mentionne seulement les principaux événements marquants qui se
sont déployés dans la période indiquée par ce qu’en réalité, leur réel volume étant très
grand, il fallait que j’écrive les actions de mon roman dans trois ou quatre volumes.
Cette oeuvre est mon premier livre et peut-être même le dernier. Donc, je veux spécifier
que, en n’étant pas un écrivain consacré, je n’ai pas la prétention que mon livre doit
rester dans la bibliothèque nationale. En même temps, je veux souligner que ce livre, je
l’ai traduit en français, d’après mon roman original écrit en roumain et donc certains
paragraphes n’expriment pas exactement le sens que j’ai donné en roumain.
Mon livre est consacré en grande partie à tous ceux qui ont vécu les événements de la
période communiste en Roumanie et qui, ensemble avec leurs familles, leurs parents,
leurs amis et leurs connaissances, ont enduré avec stoïcisme les horreurs de ce régime.
Je tiens à apporter un hommage à tous ceux qui, dans mes difficiles moments, m’ont
aidé et encouragé pour dépasser les périodes les plus noires de ma vie.

L’auteur
Chapitre 1

La naissance

Ma mère, Elena Munteanu avait perdu son troisième enfant, Ionel, qui est décédé à
l’âge de cinq ans à cause d’un cancer à l’estomac. Ses deux autres enfants, deux
fillettes jumelles de deux et trois mois seulement, Ioana et Ana sont décédées à cause
d’une maladie inconnue après qu’elle a fait à leurs naissances une septicémie
généralisée.
Elle a survécu du fait que le docteur Robitu, une grande sommité en médecine, lui a
appliqué un traitement spécial connu seulement par lui et qu’il l’a appris en France où il
a fait ses études. Le docteur Robitu était un ami et un admirateur de mon père, Zamfir
Munteanu, connu sous le nom de Nicu, grand champion de cyclisme à cette époque. Le
docteur Robitu a pratiqué la médecine toute sa vie dans sa ville Braïla, étant connu et
apprécié partout comme un grand praticien.
Terrifiée de ce qui s’est passé avec ses autres enfants, ma mère, après être tombée
enceinte de nouveau, a décidé d’avorter son bébé. Elle disait qu’elle est maudite et
qu’elle n’a pas le pouvoir de naître un quatrième enfant qui, peut-être, va avoir le sort de
ses trois autres enfants. Elle ne voulait plus, elle ne désirait plus naître encore un être
condamné dès le début à mourir.
C’était une journée sombre d’hiver, le 23 février 1938, quand ma mère est entrée chez le
docteur Robitu pour avorter. Elle est entrée dans le pavillon de la clinique au moment
qu’un puissant vent, qui dispersait la neige, a donné un coup violent dans la porte de
l’entrée faisant un bruit assourdissant. Complètement bondée de froid et perturbés par le
bruit de la porte, après avoir tiré son souffle, ma mère s’est époussetée de neige qui lui
est entrée dans ses cheveux, ses oreilles, partout, elle s’est assise sur une chaise et a
attendu, dans l’antichambre, à peu près cinq minutes. Le docteur Robitu est apparu
avec un sourire sur ses lèvres et il l’a invité à entrer dans son cabinet de consultation.
- Qu’est-ce qui t’amène chez moi, chère Madame, sur ce mauvais temps ?
- Monsieur le Docteur, je n’ai plus la force à résister que je naisse un quatrième
enfant et à cause de cela, j’ai décidé de l’avorter. Je suis maudite, je ne sais pas
de qui et pourquoi.
Le docteur l’a regardé longtemps avec douceur et après, il a répondu sur une tonalité
caressante :
- Sais-tu, Madame Elena, que prendre la vie d’un bébé est une punition de Dieu ?
Veux-tu que ce sacrilège qu’il te marque toute ta vie ? C’est vrai que jusqu’à
présent, tu as eu seulement des problèmes avec tes enfants, mais j’ai
l’assurance que tout est terminé et qu’à partir de maintenant tout va bien. Avant
de prendre une telle décision, il faut que tu en penses, que tu en médites plus.
D’autres femmes auront donné et fait n’importe quoi pour avoir un enfant, mais
toi, tu veux l’enlever. En qualité de docteur courant, je ne te conseille pas à faire
une telle chose. Un enfant est un cadeau de Dieu. Il est le fruit de l’amour de
deux êtres. C’est la liaison viable qui unit les deux êtres et qui consolide leur
relation conjugale, à vie. Veux-tu certainement à détruire cette liaison ? Je crois
que non. Hier, j’ai parlé avec Nicu, ton mari et il m’a dit que tu as décidé d’avorter
ton bébé. Il était très fâché, bien sûr sur vos problèmes, mais aussi pour le fait
que tu ne veux plus avoir un autre enfant. Veux-tu, par cet acte, que tu l’éloignes
pour toujours de lui ? Les hommes sont très sensibles dans telles situations. Tu
es jeune, tu as devant toi toute ta vie et j’ai la conviction que tout va finir très
bien. Je m’occuperai étroitement de toi pour que la naissance de ton bébé aille
se dérouler dans les meilleures conditions.
Ma mère l’a regardé avec scepticisme et, avec tristesse dans son âme, a croquis un
sourire et après lui a dit :
- Je veux y penser !
Après son départ, ma mère se dirigea pour arriver chez elle. Elle pensa et était
préoccupée, d’un côté de tout ce que le docteur lui a dit et de l’autre côté du fait que
dans son âme se donner une lutte sur la vie et la mort, parce que l’image de ses
enfants, qui étaient morts, la poursuivait partout. Elle pensait que l’enfant qu’elle portait
dans son ventre pourrait avoir le même sort que les autres et cette chose la marquait et
lui donnait des frissons.
En même temps, elle pensait que quelqu’un l’a maudit et se demandait pour qui et
pourquoi, parce qu’elle n’avait pas fait du mal à personne. Elle aimait Nicu et se rendait
compte que, si elle va avorter son enfant, sans son consentement, celui-ci peut-être va
s’éloigner d’elle, surtout, à cause de son caractère instable. Elle avait la conviction que
Nicu l’aimait, mais à sa manière.
Elle comprenait son amour autrement, non seulement comme une matérialisation d’une
union de deux âmes, mais comme l’air qu’on respire, comme la lumière et l’énergie
qu’on les reçoit du Soleil, sans lesquelles on ne peut pas vivre.
L’amour pour elle consistait dans son désir à donner ce qui lui appartenait pour
quelqu’un d’autre et de sentir que sa béatitude lui appartient. Être amoureux de
quelqu’un concernait pour elle beaucoup plus que d’être le maître d’un sentiment
accablant, signifiait à prendre une décision, à faire un jugement, à t’engager avec une
promesse. Si l’amour avait été un sentiment instable, il n’aurait existé aucune base pour
le mot d’aimer quelqu’un sur la vie entière.
C’est pourquoi, elle a décidé, à parler avec Nicu et en fonction de ce qu’ils vont discuter,
elle va avorter ou pas.
Environ six heures de l’après-midi, Nicu est arrivé à la maison. Ma mère l’attendait et
après qu’elle lui a donné à manger a dit :
- Nicu, aujourd’hui je suis allé chez le docteur Robitu pour l’avortement. J’ai
discuté beaucoup avec lui et il a essayé à me convaincre de ne pas avorter, mais
il n’a pas réussi que la moitié. Les malheurs que nous avons vécus tous les deux
à cause de la mort de nos enfants m’ont déterminée à penser et à réfléchir si
c’est bien ou pas de naître une âme qui pourrait suivre le sort des autres. C’est
pourquoi je veux connaître ton avis et en fonction de ce dont nous discuterons et
conviendrons, maintenant, je procéderai ou pas à cet avortement.
- Ma chère bien-aimée, tu sais bien que moi, depuis toujours, j’ai désiré que nous
ayons des enfants. Tu dois comprendre que notre vie ne s’arrête pas ici. Il faut
que nous pensions à enlever le passé qui ne peut jamais revenir et que nous
espérions que le futur va être mieux avec nous et que Dieu va jeter son regard
sur nous. Ton inquiétude que tu serais, peut-être, maudite, sont des pensées de
moment, qui ont pris naissance à cause de tout ce que nous avons vécu. Je
veux que tu saches et que tu es convaincue que je t’aime et que cet amour va
durer jusqu’au moment, quand nous quitterions notre terre pour une vie
impérissable. C’est pourquoi, je désire de tout mon coeur que tu n’avortes pas et
que peut-être celui-ci ou celle-ci qui va se naître va rompre ta malédiction, en
nous donner la béatitude que nous avons voulue tellement.
Ce moment-là a été le facteur décisionnel qui a convaincu ma mère de ne pas avorter.
Mais, son hésitation a influencé comme un fluide et pour toujours la vie et l’existence du
nouveau-né en le stigmatisant pour toute sa vie.

Braïla, la ville de ma naissance, était à l’époque en plein développement et


effervescence florissante. Port au Danube et très proche de la Mer Noire, la ville était
pleine de mouvement et d’agitation spécifique de grands ports, jour et nuit. Les gens
étaient heureux de la prospérité de leur ville et après une journée active de travail, ils en
finissaient dans un des petits restaurants qui marquaient le port, à une table pleine de
petites saucisses (mititei) et de la bière froide. Les chansons des violoneux
accompagnaient les clients, jusqu’au tard, en nuit et dans ce temps-là la Lune se cachait
parmi les nuages comme une fillette ludique et reflétait avec fascination son regard sur
le chemin tranquille du fleuve.
La beauté de la Ville était connue et appréciée par les habitants locaux ainsi que par les
visiteurs. Les rues propres faisaient que les passants sortent pour se promener tous les
jours et le Grand Jardin, proche du port, était tout le temps plein de vie. Les
commerçants vantaient leurs marchandises arrivées des quatre coins du monde en
attirant la foule qui se précipitait à les visiter sur la Grande Rue ainsi que dans les lieux
spécialement aménagés en style oriental. Sur les banques du Petit Jardin, les retraités
lisaient tranquillement leurs journaux ou se jouaient avec leurs petits-enfants qui
couraient autour d’eux sous le brillant soleil de l’été.
Vers le soir, dans le crépuscule d'un rouge ardent, les amoureux qui siégeaient dans de
petits avirons flottaient parmi les vagues qu’ondulaient sur l’eau lente du Danube, en
respirant le parfum suave des roseaux en fleur. Souvent, le brouillard obturait l’horizon
en faisant disparaître les petites lumières de la ville et quand celui-ci se dissipait les
lumières de la ville réapparaissaient dans toute sa splendeur. De grands bateaux
flottaient ou étaient ancrés dans le port et semblaient être des géants mythologiques
prêts à attaquer les vagues qui se cassaient en contact avec leurs corps métalliques.
De l’autre côté du Danube, la « Grande balta » de Braïla, avec ses merveilleuses
superficies aquatiques, pleines des cachées déguisées, se déroule sur quelques
kilomètres et où Terente, le célèbre hors-la-loi, amenait des filles qu’il les volait de ses
parents. Un violoniste anonyme lui a écrit même une chanson intitulée « Terente vole
des filles » qui circulait, à l’époque, sur les lèvres de ceux qui l’aiment.
Après la barrière de la ville, à quelques kilomètres, se trouve la merveilleuse forêt située
au bord du « Lac salé » lieu préféré et de réunions de dimanche des habitants et des
visiteurs de la ville.
Étant située pas loin de la Mer Noire et de certains chemins croisés internationaux,
Braïla a été une terre préférée pour beaucoup de groupes ethniques qui ont vécu en
harmonie avec les habitants roumains de cette ville. Grecques, Turques, Bulgares,
Russes, Juifs, ont trouvé ici un mode de vie près de leurs traditions et leurs coutumes,
en faisant qu’ils s'installent dans cette ville, ce qui on a conduit à leur intégration dans la
vie culturelle et spirituelle de Braïla, influençant, à leur tour, les traditions des citadins
d'origine.
La gloire et beauté de la ville a été mise en évidence par de grandes personnalités de la
culture et science roumaine comme romanciers, peintres, musiciens, poètes et savants.
Panaït Istrate, écrivain d’expression française, qui est né et a vécu à Braïla, a décrit
avec haut art, dans ses œuvres, la vie de cette ville médiévale. Haricléea Darclé,
dénommée « la grande soprano du monde », a chanté et interprété des mélodies sur les
grandes scènes mondiales, ce qui a amené à la réputation de la ville. Panaït Cerna,
poète reconnu comme le chanteur des beautés morales, a écrit des poésies avec des
éléments de la vie des habitants de Braïla, en arrivant d’atteint leur fierté. Mihail
Sebastian, romancier et écrivain de pièces de théâtre, a évoqué dans son œuvre la vie
sentimentale des habitants de Braïla, surtout dans son roman « La ville avec des
caroubiers ».
La gloire de la ville a été évoquée par d’autres personnalités comme Anton Bacalbasa,
Theodor Constantin, Gheorghe Banea, Mircea Stefanescu, Elena Teodorini, Maria Filotti,
Ana Aslan ainsi que d’autres personnalités de cette époque.
Dans cette merveilleuse ville, se sont connus et ont vécus, une partie de leur vie, mes
parents qui ont donné naissance, par leur amour et après une lute acharnée, à l’être
humain qui va devenir le héros de ce roman.

Elena Munteanu, avec son nom de fille, Elena Grozea, est née à Bucarest, le 13 janvier
1913 dans une famille du quartier « Damaroaia », qui avait encore deux filles, Maria et
Ioana. Ses parents, Ana et Petre Grozea, qui la gâtaient avec le nom de « Lenuta »,
avaient une petite maison dans ce quartier éclairé avec des lampes à méthane. Leur
situation matérielle était assez modeste, ce qui a fait, lorsqu’Elena a eu cinq ans, ses
parents ont accepté qu’elle soit légitimée par la sœur de son père, Zoïa Rugina, qui
habitait à Braïla et qui était mariée avec un riche marchand sous le nom d’Ion Rugina.
Zoïa ne pouvait pas avoir des enfants et c’est pour cela qu’avec son mari ont décidé
qu’elle soit légitimée par eux.
Au printemps de l’an 1918, à la fin du mois de mai, Zoïa Rugina est allée à Bucarest
pour légitimer et amener avec elle, Elena à Braïla. De la gare, elle a pris un cabriolet et
environ trois heures de l’après-midi, elle est arrivée au logement de sa belle-sœur.
Lorsque Zoïa est entrée dans la cour, elle est restée impressionnée par la beauté de la
maison où la petite Elena habitait. Sa belle-sœur Ana, était mariée avec son frère, Petre
Grozea, qui travaillait aux Chemins de fer roumains.
Pendant 12 ans, les deux belles-soeurs ne se sont pas visitées à cause de la grande
distance qui les séparait ainsi que Zoîa était, tout le temps, occupée avec le restaurant
qu’elle et son mari l’eussent. Elles ont continué à correspondre par des lettres et par
elles, sont arrivées à s’entendre pour légitimer la petite Elena. Les époux Rugina ont
choisi Elena parce qu’elle était très belle contrairement à ses deux sœurs qui en étaient
jalouses.
La cour de la maison de sa mère était pleine de fleurs et de légumes qui avaient fleuri,
depuis pas longtemps, en parfumant avec leurs odeurs l’air frais du printemps. Il
n’existait pas de la canalisation, mais l’eau la sortait d’une fontaine qui se trouvait au
fond de la cour où se trouvait aussi la maison.
Après qu’elles se sont embrassées, les deux belles-sœurs sont entrées dans la maison
et ont commencé à parler d’Elena qui se jouait dans la cour.
- Chère Ana, je suis arrivée pour amener Elena avec moi à Braïla. Tu sais que je
ne peux pas avoir des enfants et c’est pour cela qu’avec Ion, nous avons décidé
qu’elle soit légitimée par nous, afin d'alléger une partie dès vos difficultés que
vous avez avec vos trois filles. En même temps, moi avec Ion, nous désirons
avoir à côté de nous une âme d’enfant qui plus tard, après notre décès, va
hériter la totalité de notre fortune.
- Zoïe chérie, mon âme se rompt quand je pense que je ne pourrai pas voir ma
petite Elena à côté de moi, mais pour son bonheur, je suis prête à tout faire. Elle
est une fillette dévouée et obéissante et je suis convaincue qu’à côté de vous,
elle ne va pas sentir notre absence. C’est pour ça que je vous la confie avec tout
mon cœur et mon amour.
- Alors, nous nous sommes entendues. Moi, j’ai déjà commencé à faire les
formalités d’adoption et demain matin je veux partir avec Elena à Braïla où on
m’attend autre mille travaux domestiques.
Le lendemain, Elena est parti à Braïla accompagnée de sa nouvelle mère, Zoia, au
domicile de celle-là, où ses parents adoptifs, qui habitaient dans la rue « Calarasi »,
avaient un restaurant, une boulangerie et un grand magasin d’épicerie.
Après son arrivée à Braïla, ses parents adoptifs l’ont habillé avec de beaux vêtements,
dignes de leur position sociale et l’ont installé dans une chambre préparée à l’étage de
leur maison. Ici, dans son univers de jeune fille, Elena a levé et conservé de nombreux
souvenirs de son enfance et son adolescence. Au départ de Bucarest, elle avait apporté
une boîte où elle gardait les photos de ses parents et ses sœurs et aussi de petits
souvenirs de ses premières années de sa vie. Plus tard, il commença à écrire dans un
carnet secret, des souvenirs et réflexions de sa jeunesse, surtout après qu’elle était
tombée amoureuse de son futur mari, Nicu
Elena s’est habituée vite à sa nouvelle situation et après un an, ses parents adoptifs
l’ont envoyée à l'école à l’âge de six ans où elle a suivi les cours d’une pension de
religieuses. Ici, la petite Elena a appris l’alphabet de la vie et le comportement dans la
société, ainsi que beaucoup d’autres choses qui ont servi plus tard dans sa vie familiale
et sociale.
Toute son enfance dans la ville de Braïla, elle l’a passé pendant la journée parmi les
religieuses et le soir dans le restaurant de ses parents, en servant les clients qui
envahissaient le célèbre restaurant de son beau-père.
Après l’âge de 13 ans, dans une soirée du mois de septembre de l’an 1923, le jeune
sportif, Zamfir Munteanu, a rencontré Elena pour la première fois dans le restaurant de
son beau-père où elle servait aux tables des clients. Il venait de remporter une course
cycliste et célébrait cet événement avec des amis. La beauté et la jeunesse de la fille,
aux yeux bleus et de cheveux longs bruns, qui s’agitait parmi les tables des clients,
faisait qu’elle soit regardée et admirée par tout le monde.
Lorsque leurs regards se sont croisés pour la première fois, c’est déclenché, comme un
éclat, un coup de foudre qui a marqué le début de leur amour. À ce moment-là, leur vie
et leur destin se sont liés, pour toujours.

Pendant ce temps-là, Zamfir Munteanu faisait du sport. De son enfance, il a aimé la


bicyclette et sa passion pour le cyclisme dépassait n’importe quelle limite. Son père, Ion
Munteanu, était mort pendant la Première Guerre mondiale de 1916, en laissant sa
femme, Elena, avec quatre enfants orphelins, dont trois filles et un garçon.
Né le 17 septembre 1905, unique garçon et cadet de sa mère, Zamfir où Nicu, comme
tout le monde lui disait, a passé son enfance et l’adolescence à côté de sa mère qui,
après la mort de son mari et poussée par les besoins de sa famille, est devenue
commerçante dans la Place Centrale de Braïla où elle vendait des légumes frais.
Chaque soir, après avoir fini ses devoirs d’école, Nicu travaillait tout le temps et il
assemblait seul ses vélos et quand il finissait il courrait sur sa rue Mihai Bravu avec
d’autres adolescents de son âge en se surpassant avec eux.
Sa passion pour la bicyclette a fait qu’il gagne, avec le temps, la sympathie et la
confiance de Fotti Valerianu, homme riche et propriétaire d’un club de cyclisme de
Braïla. Celui-ci lui a donné la possibilité de courir dans des courses organisées de
cyclisme, premièrement au niveau de la ville et après au niveau de région où il a gagné
la majorité des courses. Après, il a gagné le championnat de Roumanie, plusieurs fois et
il a couru en étranger à côté des célèbres coureurs français Galien et Mercier.
Beau garçon et athlétique, Nicu était adoré par des femmes. Après chaque course
gagnée, beaucoup de femmes l’acclamaient et versaient une larme, furtivement, s’il ne
les prenait pas en compte. Les unes lui écrivaient des lettres d’amour et quand il
pénétrait dans le bordel de luxe « Chez tante Elvira », de centre-ville, toutes les filles,
qui se trouvaient là-bas, lui donnaient de doux baisers.
Entiché de sa future femme Elena, Nicu arrivait, à peu près chaque soir au restaurant de
Rugina, souvent seulement pour la regarder. Lorsqu’il entrait dans le restaurant, le
patron le rencontrait avec joie en lui disant :
- Bienvenue Nicu. C’est un honneur pour moi de te recevoir dans mon modeste
restaurant. Où veux-tu t’asseoir ? Qu’est-ce que nous pouvons t’offrir ? Et après,
il le conduisait à une table qui se trouvait à côté de la porte qui donnait dans la
cuisine et par qui circulait Elena continuellement.
- Ce soir, je veux boire à la santé d’une belle fille qui vous appartient et c’est elle
que je voudrais me rendre service.
- Avec plaisir, dis le patron et après il appela Elena : Lenuta vient et sert notre
invité d'honneur avec notre vieux Murfatlar qui se trouve dans le deuxième
plateau de la cave.
Elena, en entendant ce que son père lui a dit, s’approcha de la table de Nicu et rouge
dans son visage, lui dit avec émotion.
- Que désirez-vous manger et boire ce soir ?
- Ce que je veux, le patron n’a pas ici à vendre. Je suis venu seulement pour te
regarder et admirer tes bleus yeux magnifiques. Je t’en prie, dit à l’orchestre
qu’elle chante ma mélodie préférée « Est-ce que tu te rappelles, madame ? » qui
me souvient du jour où je t’ai rencontré pour la première fois. Je veux que tu
croies que ta présence ici, près de moi, me fascine continuellement et je sens
que je ne peux pas vivre sans toi si je ne te vois pas seulement un moment par
jour.
La fille se retourna vers lui et sourit sans répondre. Son cœur commença à battre, elle
se tourna sur ses talons et après se dirigea vers l’estrade de l’orchestre et commanda la
mélodie de Nicu. Puis, avec de grands pas, elle entra dans la cave pour apporter le vin
de Murfatlar, pendant que l’orchestre commença à chanter la mélodie de son amoureux.
Après avoir interprété sa chanson, Nicu fut généreux avec les violoneux qui ne
cessaient plus de le remercier. Nicu, après avoir bu le vin qu’Elena a apporté, est resté
dans le restaurant encore quelques moments et en s’attardant, a demandé la permission
du patron pour qu’il se promène un petit peu en compagnie d’Elena.
- Monsieur Rugina, dans votre restaurant j’ai découvert la plus merveilleuse fille de
cette ville, Elena, votre fille. Je sais qu’elle est la pupille de votre famille et par
respect pour elle et pour vous je vous demande la permission pour faire
ensemble avec elle une petite promenade dans les environs, après qu’elle finit
son travail. Nous y resterons pas plus une heure. Je vous promets de veiller sur
elle pour qu’elle lui n’arrive rien.
- Monsieur Nicu, une petite promenade avec ma fille est possible, mais je veux
avoir votre promesse que tu vas respecter sa pureté et son intégrité. Elena est
une fille sage et elle a appris de nous, seulement de bonnes choses jusqu’au
présent. J’en suis d’accord, mais seulement une heure.
- Je vous remercie de tout mon cœur et je vous assure de toute ma sincérité, a dit
Nicu.
Dans ce temps-là, Elena écoutait, à côté de la table de Nicu, la conversation des deux
hommes. Lorsqu’elle a entendu, que son père a accepté, elle est devenue rouge et a dit
à Nicu :
- Je m’en vais pour me changer et je reviens en cinq minutes.
Pendant quelques minutes, l’atmosphère crée a fait que les deux amoureux se
dépêchent pour se rencontrer, chacun d’eux en se résolvant rapide ce qu’ils avaient
encore à faire. Nicu a payé sa consommation et Elena, après avoir changé sa toilette,
est réapparue dans une robe vert pal à la table de Nicu en lui disant :
- Je suis prête.
Ils ont quitté le restaurant et, main à main, ils se sont dirigés vers la « Grande
Rue ». Après, ils ont continué jusqu’au « Petit Jardin » et se sont assis sur une
banquette devant l’imposante montre qui surveillait comme un cerbère le jardin et le
centre de la ville. La soirée était calme et le ciel était clair avec des millions d’étoiles qui
brillaient. Dans les environs, des chorales de cigales chantaient à leurs guitares. Les
odeurs des fleurs du jardin, dans laquelle régnait « la reine de la nuit », parfumaient
tous ceux qui se trouvaient là-bas. De temps à autre, un oiseau de nuit volait en
essayant de manger un moustique ou un bourdon qui, malheureusement, se trouvaient
près du gourmand oiseau.
Les deux amoureux enveloppés par la beauté de l'endroit et du fait qu’ils pouvaient être
seuls, à côté l’un de l’autre, ils s’étreignirent et s’embrassaient.
Ils y sont restés pendant environ une heure et après ils se sont dirigés vers la demeure
d’Elena. Ils étaient heureux et dans ces moments-là, personne et rien ne pouvaient pas
les déterminer de renoncer à leur amour.
Pendant une année, Nicu a courtisé Elena, en arrivant chaque soit au restaurant et
après que leur amour s’est cimenta il l’a demandé en mariage pour devenir sa femme..
Elena avait à l’époque seulement 15 ans et cinq mois. Pour se marier, Elena a fallu
obtenir une autorisation spéciale parce qu’elle n’avait pas encore 16 ans pour avoir le
droit de se marier. La cérémonie de mariage se déroula au restaurant de ses parents
adoptifs. Comme son beau-père était, un homme riche est connu partout, la majorité des
commerçants de la ville sont venus au mariage. Le cortège était formé de 30 coupées et
20 calèches. Un nombre de trois prêtres ont officié la messe. Trois jours et trois nuits, la
fête a duré pendant que le couple a juré de s’aimer toute leur vie.
Le trousseau d’Elena valait beaucoup d’argent et il incluait, en dehors d’argent, literie et
lingerie de lit en soie, ustensiles de cuisine et couvert en argent et beaucoup d’autres
choses qui ensemble valait environ un quart de million de lei (monnaie roumaine),
somme qui était considérée à l’époque une vraie fortune.
Nicu, qui provenait d’un milieu modeste, il a fallu qu’il demande l’aide de ses beaux-
parents pour acheter ses vêtements de mari et ça, à cause de sa difficile situation qu’il
avait. La majorité de son argent qu’il gagnait avec les courses cyclistes, il le donnait à sa
mère et ses sœurs. Il gardait pour lui seulement une petite somme et, à cause de ça, il
ne pouvait pas faire d’autres dépenses.
Après leur mariage, l’heureux couple a établi leur domicile au logement d’Elena qui
disposait d’un bel appartement situé à l’étage supérieur du restaurant de ses parents.
Nicu a continué à courir comme cycliste et pendant les soirées il travaillait dans le
restaurant de ses beaux-parents. Cette dernière activité, ne lui pas plaisait surtout qu’il
fallait suivre les ordres de sa belle-mère, qui était une femme énergique et qui aimait
s’imposer.
Avec le temps, ses relations avec ses beaux-parents se sont détériorées, ainsi qu’après
une année il a déménagé avec sa femme chez son domicile natal de sa famille, situé
dans la rue Mihai Bravu.
Ce changement a influencé, d’une certaine manière, la vie de leur couple. Nicu a
continué à courir comme cycliste dans des compétitions organisées et après, avec ses
amis et ses admiratrices, il s’en allait pour se distraire, en s’absentant de temps en
temps même des journées entières, pendant qu’Elena, entourée de la famille de son
mari, se sentait seule et maladroite.
Ici, elle partageait son domicile et habitait ensemble avec sa belle-mère, quatre belles-
sœurs et leurs enfants qui vivaient dans un milieu pauvre et médiocre, radicalement
opposé à sa situation d'avant son mariage.
Entichée de son mari, Elena a accepté de vivre ici, dans ce milieu étrange pour elle. En
raison de cette situation, elle souffrait et acceptait avec humiliation toutes les privations
avec lesquelles elle n’était pas habituée. Elle ne se plaignait à personne, mais ceux qui
l’entourée, la voyait et comprenait sans avoir la possibilité de l’aider. Même si elle
possédait une grande fortune que sa famille a donnée à l’occasion de son mariage,
Elena n’a pas su, jamais, qu’est-ce que s’est passé avec son argent que Nicu a utilisé
après leur mariage.
Au début, Nicu était très attentif avec elle, en essayant de compenser, par son attitude,
l’atmosphère dans laquelle ils vivaient. Avec le temps, son caractère dur a vaincu et a
conduit finalement à une certaine dégradation de leurs relations conjugales.
Le fait que Nicu était un homme bien, un vrai homme qui était adoré par des femmes,
celui-ci a commencé à s’absenter de la maison, souvent des journées entières et quand
il revenait il trouvait sa femme soit en pleurant, soit triste où songeuse.
- Nicu, où as-tu été ? Tu t’absentes depuis quelques jours et tu n’as pas donné
signes de vie. Je suis inquiète et j’ai pensé peut-être que tu as eu quelque chose
de mal.
- Tu sais très bien où je suis allé. J’ai couru avec ma bicyclette. Où crois-tu que je
pourrais être ? Et pour changer de sujet, il continua : d’ailleurs, je t’annonce qu’on m’a
proposé un bon travail à l’usine « Malaxa » de Bucarest. Si ça va faire mon affaire, nous
y allons déménager où nous commencerons une nouvelle vie, la nôtre, sans
l'intervention de quelqu'un. J'ai pris cette décision, d'une part, parce que je ne sais pas
combien de temps je pourrais courir avec la bicyclette et, d'autre part, pour renforcer ma
situation professionnelle de travail dans un métier qui va pouvoir nous apporter un
revenu stable.
Elle acceptait avec souffrance ses explications, mais elle savait qu’il ment. À toutes
celles-ci, se sont ajouté la mort, de ses trois enfants, qui a bouleversé sa vie et par la
suite lui a donné une dépression qu’elle n’a pas pu s’en sortir qu’après longtemps. La
mort de ses enfants a fait le deuil non seulement pour elle et son mari, mais aussi pour
les familles qui l’entouraient.
Entre temps, Elena est tombée enceinte pour la quatrième fois et après l’intervention du
docteur Robitu et aussi après une discussion avec son mari, elle a décidé de garder son
enfant.
Chapitre 2

L’enfance

Je suis né le 15 septembre 1938 à l’hôpital où le docteur Robitu travaillait. À ma


naissance, j’ai pesé quatre kilos et j’avais les yeux bleus qui n’ont pas changé la couleur
toute ma vie. C’était une belle journée d’automne tranquille. Les arbres avaient
commencé à jaunir et les couleurs de ses feuilles ferrugineuses laissaient réfléchir leur
beauté dans les rues de la ville et dans les eaux du Danube.
Quinze jours avant de ma naissance, ma mère a eu un beau rêve. On se faisait que la
Sainte-Marie est apparue et elle a dit : « tu vas naitre un garçon » et après elle a
disparu. Après son réveil, ma mère a raconté son rêve à mon père qui a réagi avec un
éclat de joie et il a commencé à l’embrasser et en même temps à lui reprocher pour
l’erreur qu’elle pouvait faire si elle avortait.
Après, ils se sont habillés et ont commencé à chercher dans des magasins, toute sorte
de vêtements et jouets pour un garçon, en étant convaincus de la réalité du rêve que ma
mère l’a eu. Le rêve de ma mère a renforcé sa confiance et son espoir sur Sainte-Marie,
qui lui a été, la guide de son entière vie.
Après ma naissance, mon père a fêté cet événement pendant deux jours avec ses amis.
Le 17 septembre, lorsqu’il s’est rappelé qu’il faut m’enregistrer à la mairie, étant encore
sous l’influence de sa beuverie, a déclaré la date de ma naissance le 17 au lieu du 15
septembre quand j’ai été né, en réalité.
Arrivée de l’hôpital, où cette fois-ci elle avait eu une naissance difficile, ma mère
partageait son temps, dans sa grande majorité, à mes soins et quand ses pouvoirs sont
revenus, elle s’en allait, tous les jours, au cimetière qui n’était pas trop loin de sa
demeure où était enterré mon frère et mes deux sœurs. Ma mère était encore sous le
choc de la mort de ses enfants.
Mon baptême religieux a eu lieu à l’église « Saints Constatin et Elena » et j’ai eu comme
parrain Panait Maïna, un Grec riche, ami de mon père, qui possédait une carrière de
marbre et plusieurs ateliers pour la fabrication des croix et monuments funéraires. Mais
ma mère a aimé le nom de « Puiu » qui est resté pour toujours mon diminutif.
Après ma naissance, l’état de ma santé était un peu fragile parce que ma mère, qui était
passée par des problèmes de santé et chocs psychiques, était, elle aussi, malade. Elle
veillait tout le temps pour que ne m’arrive quelque chose et sursautait au plus petit bruit
que je faisais.
Un jour, tandis que ma mère se promenait avec moi, étant installé dans une belle
poussette, elle a rencontré une voisine et, de l’une à l’autre, elle a raconté son
inquiétude.
- Bonjour, Madame Ionescu. Je suis heureuse de vous revoir. Voua avez une belle
allure et surtout vous êtes très élégante, a dit ma mère.
- Ah, bonjour. Comment ça va ? Tu ne te montres pas depuis longtemps parmi les
gens !
- Mon garçon, Puiu, est très maladif et il faut que je m’occupe surtout de sa santé.
Comme vous le savez, la mort de mes trois enfants m’a profondément
bouleversé et tout le temps je tremble à la pensée que Puiu pourrait suivre leur
destin. On me poursuit en permanence, l’idée que quelqu’un m’a maudit et, à
cause de ça, mes enfants meurent.
- Écoute, Lenuta, ma mère après mon accouchement avait les mêmes problèmes
que toi. Quelqu’un lui a dit que si elle va vendre symboliquement son bébé à une
gitane en pleine santé et avec beaucoup d’enfants, la santé de sa fille va
s’améliorer et la prétendue malédiction va être éloignée. Je crois que cette
chose-là est vraie parce que, me voilà, je suis en forme et en pleine santé.
- C’est très intéressant ce que vous avez dit ! Je veux essayer, moi aussi, la même
chose. Je vous remercie infiniment pour votre idée.
Après le départ de Madame Ionescu, ma mère a commencé à s’intéresser pour trouver
une gitane qui pouvait faire la même chose pour elle. Dans la même rue où mes parents
habitaient demeurait une famille de gitanes qui avaient dix enfants. Tinca, la conjointe du
gitan Patraulea, était une femme robuste et en pleine santé qui avait donné naissance à
des enfants en pleine santé. Ma mère, a pris des informations sur l’histoire de cette
famille et finalement a décidé d’essayer ce que Madame Ionescu a dit. Elle est allée
chez Tinca et lui a raconté sa préoccupation :
- Madame Tinca, je vois que Dieu vous a donné dix enfants beaux et en pleine
santé. J’ai une demande à vous faire, bien sûr si vous voulez. Je voudrais vous
vendre Puiu, symboliquement, parce que j’ai la conviction que par cette
transaction, mon enfant va échapper de la fragilité de sa santé et moi, je ne serai
pas terrorisée par l’idée que, moi et mon bébé, nous sommes maudits. Êtes-vous
d’accord ?
Tinca la regarda avec ses yeux noirs pénétrants et avec simplicité lui a dit :
- Bien sûr Madame Lenuta ! Encore un enfant ce n’est pas la peine surtout que ton
bébé est très joli. Je te donne cinq bani (petite monnaie roumaine équivalente
d’un sou français) et la transaction est faite. Qu’est-ce que tu dis ?
- Que Dieu te bénisse pour le bien que tu me fais a dit ma mère et après elle est
partie à la maison pour m’amener chez Tinca.
Une fois arrivée, ma mère a voulu me donne à Tinca, mais celui-là a refusé en lui
disant :
- Madame Lanuta, conformément au rituel, tu dois me donner ton enfant sur la
fenêtre et non comme ça à l’intérieur de ma maison. Toutes ces choses-là
doivent être respectées pour que les mauvais esprits que ne lui fassent pas de
mal. Sorte de ma maison et donnez-le-moi sur cette fenêtre et non pas comme tu
as voulu.
Ma mère est sortie de la maison et m’a donné à Tinca sur la fenêtre qui était largement
ouverte. En me prenant dans ses bras, Tinca murmura un désenchantement et après
elle m’a donné un baiser en me disant :
- Bienvenue beauté chez moi ! Maintenant, tu fais partie de ma famille et après,
elle a continué vers ma mère : ton bébé doit rester chez moi une journée entière.
Maintenant, prenez ces cinq bani que je te donne en échange de lui.
Ma mère a pris la monnaie de cinq bani et heureuse a pris au revoir de Tinca et puis,
avec de grands pas, est partie chez elle.
Le lendemain vers midi, ma mère est allée chez Tinca pour me prendre. Au moment où
elle est entrée, Tinca me changeait de couches.
- Bonjour Madame Tinca ! dit ma mère, comment ça va mon petit bébé ?
- Il est très obéissant. Il a dormi sans rêves toute la nuit, surtout, après que je l’ai
désenchanté à minuit. Voilà, il me paie maintenant pour le bien, que je lui ai fait !
Après avoir fini avec les changements de mes couches, que ma mère lui a données un
jour avant, Tinca me donna à ma mère qui m’a pris dans ses bras. Après, elle s’assied
sur une chaise, à l’invitation de son hôtesse et commença à parler avec elle. Dans ce
temps-là, Tinca mit au feu une bouilloire pour préparer un café après une recette qu’elle
connaissait de sa mère.
En étant l'heure du déjeuner, les enfants de Tinca commençaient à entrer dans la
maison pour le déjeuner. La table était déjà préparée à recevoir la foule d'enfants qui, en
riant et en se bousculant, s'asseyaient en attendant les plats préparés par leur mère.
Après quelques minutes, ma mère a fait adieu à Tinca et puis elle lui a donné une
enveloppe qui contenait de l’argent dont le contenu le savait seulement elle.
Depuis, quand Tinca me rencontrait, elle murmurait à mon oreille :
- Comment vas-tu, mon petit prince ?
Le temps passait et moi, je commençais à grandir. Les premières années de ma vie, je
les ai passées au sein de ma famille, en étant entouré aussi des quatre sœurs de mon
père qui habitaient dans la même cour, à la même adresse avec ma grand-mère.
Moi, je n’ai jamais oublié ma grande mère qui m’a aidé à faire mes premiers pas dans la
vie. Elle était une femme douce et affectueuse qui a aimé avec passion ses enfants et
ses petits-enfants. Son image est restée pour toujours dans ma mémoire. C’était une
femme de petite taille avec les cheveux blancs toujours couverts d’une couette noire.
Elle avait les yeux noirs et un regard d'esprit vif, mais doux. Sur son front ridé, on lisait la
volonté de mettre sur pied une vie meilleure. Ses vêtements étaient simples et propres :
elle portait une robe noire et un tablier grisonné. Quand elle arrivait du marché, elle
m’apportait des fruits frais et dans la période des cerises elle me gâtait avec de petits
bouquets de cerises en forme de boucles d'oreilles qu’elle me les suspendait sur mes
oreilles en me disant que je suis « sa boucle d'oreille dorée ».
Dans la même cour habitait une des sœurs de mon père, tante Mandica, comme tout le
monde lui disait. Elle était mariée avec Barzuca, un homme sérieux et bon mari. Celui-ci
était cordonnier et possédait un magasin de chaussures de luxe au centre-ville.
Pas longtemps après ma naissance, un mois et demi environ, tante Mandica a donné
naissance a un garçon avec des cheveux dorés qui a été baptisé avec le nom de
Mircea. Il était le quatrième enfant de la famille Barzuca ; tante Mandica avait encore
deux filles et un garçon beaucoup plus âgés que Mircea.
Comme, celui-ci était à peu près de mon âge, Mircea a été mon premier vrai ami de mon
enfance. Mon père lui disait « le Russe » parce qu’il était blond et avait le visage
semblable à un citoyen russe d’origine. Il riait tout le temps et devenait triste quand je ne
le prenais pas en compte.
Tous les deux, nous nous jouions toujours ensemble dans la cour, devant un chapiteau
où nous faisions du théâtre. La passion de Mircea pour le théâtre s’est développée dès
ses premières années de vie et cette passion, pour l.’art et beauté, a duré toute sa vie.
Plus tard, il est devenu magistrat juge à Bucarest et en parallèle avec son activité
professionnelle, a continué à activer sur la ligne des arts, étant un disciple de la grande
femme peintre et écrivaine Margareta Sterian, à qui a consacré une grande partie de sa
vie.
Après un certain temps, mes parents sont partis à Bucarest. Mon père avait trouvé un
bon poste aux Usines Malaxa, département d’outillage où il fallait s’engager comme
tourneur. Il était devenu un bon mécanicien et s'est spécialisé dans ce métier. Jusqu’à
son embouche et à trouver un logement, je suis resté chez ma grand-mère.
Entre-temps, mes grands-parents de ma mère sont décédés, l’un après l’autre, à un
intervalle de quelques mois et ils ont été enterrés à côté de mon frère et mes sœurs.
Leur fortune a été héritée par ma mère, mais celle-ci n’a pas pu être fructifié à cause de
mon père. Encore une fois, mon père a été l'auteur de cette destruction de richesse
parce que, en dehors du fait qu’il gaspillait de l'argent aux femmes et aux restaurants, il
aimait à parier sur des courses de chevaux.

Après l’embouche de mon père à l’usine et la location d’un logement, dans la rue
Agricultori de Bucarest, dans un quartier résidentiel d’ouvriers, pas très loin des Usines
Malaxa, mes parents sont revenus à Braïla pour me prendre avec eux à Bucarest.
La séparation de ma grand-mère et de mon unique ami et cousin Mircea a été
émouvante. Nous pleurions tous et je ne voulais pas partir ; moi, je priais mes parents
pour qu’ils me laissent là-bas.
Finalement, je suis parti à Bucarest chez ma nouvelle demeure qui, à la première vue,
me semblait petite comme une caverne dans un espace hostile. Nous avions une seule
chambre avec une petite cuisine dans une cour longue avec beaucoup de locataires. La
majorité des locataires était des gens simples et pauvres, des travailleurs dans des
fabriques, des retraités dont leurs pensions ne couvraient pas un mois entier, des
femmes sans occupations que celles d’épouse et une grande foule d'enfants.
La vie commune de ces gens-là était souvent perturbé de querelles et même de rixes
générées des pénuries alimentaires, de la jalousie qu’une famille mangeait mieux
qu’une autre, des situations dans lesquelles la femme d’un homme se couchait avec un
autre et inverse, ainsi que d’autres motifs, souvent minores, que je les voyais, mais, à
cause de mon âge, je ne les comprenais pas.
Mon arrivée à Bucarest se déroula sur le début de la Seconde Guerre mondiale. À peu
près chaque jour, les sirènes annonçaient, avec leur hurlement lugubre, le début d'un
nouveau bombardement pendant que les avions de l'ennemi volaient à faible hauteur,
en bombardant les maisons et en tuant les gens et les animaux.
Leur objectif prioritaire était les Usines Malaxa qui se réadaptaient pour la fabrication
d'armes militaires. Moi avec ma mère, nous nous cachions sous une table de cuisine, en
disant qu’ainsi nous allons échapper à la mort.
Le Bucarest était devenu inhabité. Partout, on se voyait des décombres, de la misère,
de la mort et de la désolation. Les ambulances et les pompiers ne faisaient plus face
aux appels après chaque bombardement.
En raison des attaques répétées, de l’aviation ennemie sur les Usines Malaxa, les
dirigeants de celles-ci ont décidé de détacher temporairement une partie de son
équipement militaire en province, dans le village Urlati, le département Sibiu.
Le village était situé dans une vallée protégée par les montagnes Carpati et à cause de
ça, ce territoire a été choisi pour le déplacement des installations de l’usine.
L’équipement sélectionné pour la fabrication de bombes de guerre a été embarqué dans
des wagonnets de marchandises. De plus, ont été attachés au train huit wagonnets du
même type où se sont installés des matelas de paille pour les salariés qu’il fallait
surveillaient les outillages jusqu’à leur arrivée à Urlati de même que pour ceux qu’il fallait
y travailler. La majorité du personnel envoyé là-bas était des gens mariés et donc ils
sont partis avec leurs familles.
Parce que mon père avait été nommé chef d’équipe, il a fallu qu'il aille en même temps
avec les outillages pour la fabrication d’armement de guerre, pour une période de temps
d’environ une année. Moi avec ma mère, nous l’avons suivi là-bas.
Souvent, je me souviens de mon voyage à Urlati. La route de Bucarest jusqu’au lieu de
destination a duré 10 jours dans les wagons de marchandises infectés. Tout le monde
dormait sur des matelas de paille et la plupart d'entre nous, nous nous étions remplis de
poux. Le train a fait de fréquentes haltes pendant des heures à la suite de l'attaque de
l’aviation ennemie. Étant en hiver et très froids, nous n'avions rien pour nous dégeler. Je
tremblais de froid, même sous les couvertures de mes parents qu'ils amenaient et nos
nécessités on les faisait dehors, dans le champ, lorsque le train arrêtait sur un froid
épouvantable.
Une fois à l'intérieur du village et après notre hébergement, ma mère m'a fait un grand
bain et m'a enlevé les poux. Le village était petit et traversé par une rivière claire comme
une larme. La maison où j'ai vécu appartenait à une famille de paysans avec le nom de
Gheorghi qui avait une fille et un garçon. Pour notre famille, on nous a attribué une
chambre dans cette maison, payée par les usines Malaxa.
La maison était située sur le rivage gauche de la rivière qui avait des saules de côté et
de l’autre. Moi, je me jouais, tout seul, sur le rivage gauche. Ma place préférée était
une vieille branche de saule qui s'allongeait jusqu'à la surface de l'eau. Chaque fois,
lorsque j'arrivais à mon saule, comme je le disais, je grimpais sur une de ses branches
et je restais pendant des heures au-dessus de la rivière, en essayant de pêcher une
truite qui nageait comme un éclat parmi les pierres et les vagues de la rivière.
Un jour, après que ma mère a fait la lessive pour nos vêtements, elle les a pris en les
mettant dans un pétrin et pour les sécher, elle est sortie de la maison et se dirigea vers
le lieu où j’avais grimpé dans mon saule. Moi, j’attendais avec impatience pour attraper
un poisson. La place était une belle grande pelouse située sur la rivière où les femmes
du village métraient leur linge pour les sécher sur l'herbe. Après que ma mère a mis nos
linges au soleil sur la pelouse d'herbe verte, elle se dirigea vers mon saule où je me suis
grimpé et elle m’a dit :
- Puiu, n’es-tu pas fatigué en restant suspendu sur cette branche ? Sois attentif
parce que la branche peut se briser et en conséquence tu peux tomber à l’eau.
- Non, maman, la branche est solide et elle ne se rompe pas. Même si je tombe à
l'eau, moi, je sais nager. Tu sais... papa m'a enseigné. Depuis ce matin, je
suis préoccupé à attraper une truite et elle ne veut pas se prendre dans mon
crochet même si j'ai mis le plus gras ver.
- Mais qu’est-ce que tu crois... la truite est un poisson intelligent. Surement, il a vu
que tu es là-bas suspendu au-dessus de l'eau et il ne s’est pas approché de ton
ver, même s’il salive d’appétit. Descends de ton arbre et fixe bien la ligne de
pêche pour ne pas la prendre le courant de la rivière et après cache-toi derrière
ton saule pour qu’il ne puisse pas te voir.
Tu vas voir que ta truite va s’accrocher dans ton fil.
- Bien maman, je ferai comme ça.
Après, j’ai descendu de mon arbre et j’ai commencé à faire ce que ma mère a dit. Dans
ce temps-là, une voisine se reprocha de notre endroit et commença à mettre ses linges
sur la pelouse, pour les sécher. Puis elle s’approcha de ma mère et a dit :
- Bonjour, voisine, quel merveilleux soleil pour sécher nos linges ! Aujourd’hui
nous allons finir plus tôt.
- Bonjour, comment ça va ? ma mère a dit.
- Ton garçon reste toute la journée dans cet arbre et il croit qu’il va pécher tous les
poissons de cette rivière. Pourquoi il ne se joue pas avec les autres enfants du
village ?
- Dans son esprit, il est plus solitaire et il n’aime pas se mêler avec la foule.
- Mais, cette chose-là n’est pas bonne. Il doit être plus vif pour consommer
son énergie.
- Oui, vous avez raison, mais il préfère les endroits solitaires et tranquilles. Vous
savez, il est né à Braïla, au bord du Danube et chaque fois quand je me
promenais avec lui sur la plage du fleuve, j’observais qu’il était attiré et admirait
les oiseaux et les bateaux qui passaient devant nous. Il me demandait souvent

quelle est la profondeur du fleuve et combien de poissons sont dans l’eau. Je lui
disais qu’il y a des eaux plus grandes et profondes que le Danube et que celles-ci
s’appellent mers et océans. Il aimait quand je lui racontais des contes et il
adorait celles qui fessaient référence au mystère et l’inconnu des mers et des
océans.
Oui, ma mère avait raison. Moi, j’aimais le Danube et les eaux des mers et des océans
parce que je suis né là-bas, dans leur royaume et chaque fois quand je m’approchais
d’une rive un frisson inexplicable m’enveloppait, en me créant un état d’extase. Par
conséquent, toute ma vie, j'ai admiré et aimé les superficies aquatiques qui m’ont produit
toujours un sentiment d'équilibre, de force et de stabilité alors quand j'étais autour d'eux.
Peut-être qu’en étant seul à mes parents, je n’avais pas à qui me confesser en ce qui
concerne mes petits secrets de mon enfance.
La femme me regarda avec ses yeux fatigués de travail, pendant que moi, je restais
tranquille à la rôder et puis elle me reprocha :
- Écoute mon garçon. Ne perds pas ton temps avec les poissons. Il vaut mieux
que tu te joues avec mon enfant. Puis elle s’adressa à ma mère :
- Écoute voisine, j’ai entendu dire que les Russes entreront dans notre pays et je
crains qu’ils viennent même ici. Le mari de Nica, ma sœur, dit que les Russes
font des désastres par où ils passent. Je ne sais pas ce qu’on va faire, surtout j’ai
craint pour nous, les femmes, parce qu’ils vont se moquer de nous.
- Oui, vous avez raison. Moi, aussi j’ai entendu la même chose. Ils sont des bêtes
qui se vengent aux gens et aux femmes sans défense quand ils les rencontrent.
- Que Dieu et Sainte-Marie nous protègent.
Pendant que les deux femmes parlaient, moi, j’ai commencé à crier :
- Maman, maman, j’ai attrapé un poisson, viens vite pour te le montrer !
Ma mère tourna son regard envers moi qui me tourmentais à enlever le crochet et puis
elle m’a dit :
- Est-ce que tu as vu si tu m’as écouté ? Tu as déjà attrapé un poisson ! Mais,
qu’est-ce que tu vas faire seulement avec un tel poisson aussi petit ? Il vaut
mieux le jeter dans l’eau parce qu’il est un être vivant comme nous.
Moi, j’ai regardé le poisson qui se luttait dans mes mains et puis je me suis approché de
la rivière et je l’ai lancé dans l’eau avec un peu de regret
- Maman, je l’ai laissé vivre parce qu’il est petit et peut-être que sa maman le
cherche et le pleure.
Notre voisine finit avec ses linges et elle a dit qu’elle va partir chez elle pour préparer le
repas de midi. Elle n’avait pas peur que quelqu’un ait voulu voler ses linges parce que
jamais une telle chose n’arrivait pas encore dans leur village. Les gens étaient honnêtes
et respectueux entre eux.
Un mois après, les troupes armées soviétiques ont pénétré sur le territoire de notre pays
en occupant les villes et les principaux objectifs stratégiques. Une fois l’occupation
arrivée, les Russes ont déclenché un processus de persécution aux ennemis réels ou
imaginaires aux communistes. Les armées soviétiques se sont comportées comme des
armées d’occupation, même si leur statut était des alliées aux Roumains, dans leur lutte
contre la Germanie Naziste, en capturant et arrêtant n’importe qui était considéré
« fasciste » où « antisoviétique ».
Dans cette période de temps, mes parents ont reçu des lettres de nos parents de Braïla
qui se plaignaient de l’invasion des Russes parce qu’ils avaient occupé avec la force
plusieurs chambres de leur maison, en les forçant à demeurer dans des conditions
difficiles. Leur invasion était aussi grande que tous les bâtiments du centre-ville et aussi
une grande partie de la périphérie a été réquisitionnée en faveur des Russes. Même, le
parc « Grand Jardin » de la ville a été transformé en logement pour eux qui ont creusé
des huttes dans lesquelles ont habité une partie des soldats avec un grade inférieur.
Bientôt, après l’occupation soviétique, les ethniques Allemands, qui habitaient en
Roumanie depuis 800 ans, ont été déportés au travail dans les mines de charbon de la
région de Donbas en Russie.
Malgré les protestations du roi qui attirait l’attention sur les violations du droit
international, plus de 70.000 hommes et femmes d’ethnie allemande ont été forcés de
quitter leurs villages et leurs villes, depuis 1945, même avant que la guerre soit finie.
Les Allemands ont été forcés à être transportés dans des wagons d’animaux et ils ont
été obligés à travailler dans les mines soviétiques pour des périodes de temps jusqu’à
10 ans, comme « réparations de guerre ».
Après peu de temps, un bataillon de soldats est entré dans le village Urlati. Ils ont établi
leur quartier général à côté où se trouvaient les outillages de l’usine Malaxa. Les
Russes, une fois stationnés là-bas, la vie du village est devenue insupportable. Les
soldats russes se promenaient ivres sur les petites ruelles en tirant des feux avec leurs
armes. Puis ils pénétraient dans les maisons des paysans où ils violaient les femmes
devant leurs maris. Après, ils volaient tout ce qu’ils trouvaient plus valeureux dans les
maisons et partaient en laissant derrière eux désastre et tristesse. Les femmes ont
commencé à se cacher dans les greniers des maisons, dans les caves et même dans
les granges de paille, où elles restaient souvent des journées entières.
Deux semaines après, un groupe de soldats ivres ont pénétré, le soir dans la maison du
maire du village. Celui-ci quand il les a vus, il les a accueillis avec politesse et il a dit :
- Bonsoir mes amis, quel vent vous apporte chez moi ?
Les Russes qui ne comprenaient pas le roumain, ils l’ont poussé et après ils ont
commencé à chercher dans la maison et à voler tout ce qu’ils trouvaient plus valeureux,
Au moment donné, ils ont entendu un bruit derrière une porte qui communiquait à la
cave. L’un d’entre eux, avec un pistolet dans sa main a ouvert la porte et a vu deux
femmes qui tremblaient de peur.
- Ah, des femmes ! a prononcé lui en russe, venez, venez, a dit-il à ces deux
femmes.
Les femmes, qui ne comprenaient rien de ce que le Russe a dit, ont continué à rester et
à trembler. Alors, le soldat les a tiré de leurs chevaux et a fait sortir les deux pauvres, de
là-bas. À l’aide d’encore deux soldats, les Russes ont dépouillé les deux femmes et ils
ont commencé à les violer. Les femmes les imploraient de les laisser en paix et criaient
« au secours » avec leur force. La fille du maire, qui avait seulement 11 ans, est tombée
inconsciente dans les bras d’un soldat qui la violait. Terrifié, le maire a voulu tuer le
Russe qui violait sa fille, mais un autre soldat a tiré avec son pistolet sur lui et celui-ci est
tombé mort.
Après cet odieux meurtre, les Russes ont laissé les deux femmes dans un état
d’inconscience et ont quitté la maison.
La nouvelle s’est propagée comme un éclat dans tout le village. Les gens ont mis la
main sur les axes et fourches et se sont dirigés vers le quartier général des Russes, en
demandant la punition avec la mort des auteurs de ce crime. Le commandant russe est
sorti de la caserne et il a assuré les paysans qu’il va prendre des mesures drastiques
contre les auteurs de ce massacre. C’est vrai qu’après cet incident les choses se sont
un peu calmées, mais les criminels n’ont jamais été punis.
Peu de temps après cet incident, la direction de l’usine Malaxa a décidé le retour de
leurs outillages à Bucarest. Dans ces conditions, ma famille est retournée dans la
capitale et ainsi que nous sommes revenus chez nous de la rue Agricultori.

Le quartier, dans lequel nous habitions, était peuplé, dans sa grande majorité, de
travailleurs qui travaillaient dans des fabriques et usines qui se trouvaient en voisinage,
ainsi que d’un grand nombre de gitans qui vivaient dans des petites maisons insalubres.
Leur vie se déroulait, d’un côté, aux lieux de leur travail ou dans des activités illicites et
de l’autre côté, le soir, ils s’entassaient dans des bistros ou restaurants où ils
dépensaient leur dernier argent. Une fois à la maison, ils se querellaient ou se battaient
avec leurs épouses toujours mécontentes de leur vie ordinaire et putain. La misère et la
promiscuité fessaient bon ménage avec eux. Pour faire face aux besoins, certains
d’entre eux ont commencé à voler et d’autres ont commencé à s’occuper avec des
affaires douteuses, comme ventes de produits de spéculation, prostitution et beaucoup
d’autres qui finalement les conduisaient en prison.
Le nouveau gouvernement communiste, dirigé par Petru Grozea, qui s’était installé avec
l’aide direct de Stalin, cherchait à renforcer sa position en faisant des concessions
gratuites aux Russes. À cette époque-là, avaient apparu les entreprises SovRom qui
visaient à déposséder la Roumanie de ses principales ressources naturelles et qui
étaient envoyés gratuitement ou à des prix fixés par les Russes,, en URSS, comme le
pétrole par Svrom-Petrol, le gaz naturel par Sovrom-Gaz, le bois par Sovrom-Lemn et
de nombreuses autres ressources naturelles qui, avant la guerre, situaient la Roumanie
parmi les premières places dans le mode.
De plus, les Russes ont dévalisé aussi le trésor roumain, en envoyant à Moscou des
dizaines d’autres objets précieux et une énorme quantité de lingots d’or, au-delà de ceux
qui ont déjà été envoyés pendant la Première Guerre mondiale à l’initiative de la reine
Maria qui était la cousine du tsar de la Russie, pour les défendre des Allemands.
La russification a été une autre méthode de l’adoption de la langue russe en Roumanie
avec une prédominance dans les écoles et les institutions publiques. Elle a été pratiquée
de deux façons : politiquement et culturellement.
Du point de vue politique, elle s’est abouti par la nomination des Russes dans les postes
administratifs importants des institutions nationales, dans le but de l’asservissement de
la Roumanie vers la domination russe. Du point de vue culturel, la russification avait,
comme but, la domination de la langue russe dans les affaires officielles et son influence
sur la langue nationale roumaine.
La cohabitation du gouvernement Petru Groza avec le roi Mihai I a été particulièrement
difficile parce que le roi Mihai n’était pas satisfait de la direction du déplacement
politique du gouvernement et en conséquence il a tenté, à plusieurs reprises, de forcer
Petru Groza de démissionner par son refus de promulguer n’importe quel décret élaboré
par le gouvernement. À son tour, Petru Grza a choisi un chemin d’accès pour appliquer
ses décrets-loi, sans avoir la signature du roi Mihai.
Après les élections du 9 novembre 1946, les résultats officiels ont crédité les
communistes parce que ceux-ci, en étant au pouvoir, ont produit de graves fraudes
électorales exposées par tous les partis de l'opposition. Toutefois, la domination du
gouvernement, soutenue par les Soviétiques, a augmenté, ainsi que le 30 décembre
1947 le roi Mihai a été forcé de démissionner.
Les premières années de gouvernance communiste ont été marquées par de nombreux
changements d'orientation politique et des vagues successives d'arrestations, en raison
des combats entre différentes factions dans la lutte pour le pouvoir. Ce temps-là,
l'économie du pays a été appauvrie par les entreprises mixtes SovRom. Dans tous les
ministères ont été placés « conseillers » soviétiques, qui étaient subordonnés
directement à Moscou et ont eu vraiment le pouvoir de décider. Au cours de cette
période a commencé l'infiltration d'informateurs des services de sécurité à tous les
niveaux et dans toutes les couches sociales.
Au printemps 1948, on a adopté les premières mesures de « collectivisation » forcée de
l’agriculture, qui est devenue, en peu de temps, un processus marqué par la violence et
les abus, tandis que les paysans plus aisés, inclus dans la nomenclature de « koulaks »,
n’étaient pas désireux à livrer, sur une base volontaire, leur propriété agricole. La
résistance des paysans a été vaincue par batailles, arrestations et condamnations
arbitraires ou par expulsions.
Le 11 juin 1948 a été adoptée la nationalisation de toutes les entreprises privées en
Roumanie. Tandis que le régime communiste devenait plus confiance en soi, le nombre
d’arrestations a augmenté. Les victimes des abus communistes provenaient de toutes
les couches de la société roumaine, mais les plus vulnérables étaient ceux qui
appartenaient à l'élite roumaine, respective les intellectuels, les religieux, les
enseignants, les anciens hommes politiques, même ceux avec des vues de gauche et,
plus généralement, toute personne qui pourrait se joindre à la lutte contre les noyaux de
résistance anticommuniste.
Les prisons déjà existantes ont été remplies, jusqu’au refus, avec des détenus
politiques, en étant mis en place un nouveau réseau de camps de travail et des prisons,
comme le « goulag soviétique ». Un projet fantaisiste de construction du canal Danube-
Mer Noire a été utilisé comme un prétexte pour la construction à plusieurs camps de
travail. Parmi les prisons avec la plus triste réputation sont ceux de Sighet, Gherla,
Pitesti et Aïud.
Parmi les mesures de style stalinien prises par le gouvernement communiste ont été les
expulsions de paysans de Baragan à Banat, action débutée à la mi-juin 1951. Près de
45.000 personnes ont eu deux heures, à leur disposition, pour récupérer leurs bagages,
après quoi ils ont été chargés dans des wagons de marchandises et de bétail et, sous
de strictes gardes militaires, ont été « colonisés » sur les terres arides de l’est du
Baragan. Cette tactique visait à intimider le reste des paysans pour la finalisation de la
collectivisation forcée de l'agriculture.
La vie après la guerre était très difficile. La nourriture et les vêtements étaient distribués
sur des cartes d'identité, ce que l'on appelait « des points ». Jamais mes parents ne
pouvaient pas couvrir entièrement les besoins de nourriture ou des vêtements et donc ils
faisaient appel à des achats « au noir » avec le sacrifice des paiements de sommes
d'argent exorbitantes.
L'hiver était une catastrophe. La quantité de bois ou de charbon affectée par famille était
de loin inférieure au minimum d’existence. Les gens avaient commencé à brûler leur
ameublement, de couper des arbres et même de voler du combustible pour le
chauffage. Les rues délabrées et maux éclairés, recouverts de neige et non pelés
pendant l'hiver étaient pathétiques. Au printemps, après la fondue des neiges sur les
trottoirs se trouvaient des restes d'ordures qui remplissaient avec leur odeur
insupportable l’atmosphère du Cartier. Les salaires des travailleurs sont devenus de plus
en plus petits tandis que l'inflation gagnait du terrain sur le frontispice des sacrifices
humains.
Dans ce climat, j'ai passé mes premières années de mon enfance, en assistant
impuissant aux pénuries de ma famille, aux querelles de mes parents et mes voisins
dans notre cour ou de quartier et de tous les problèmes qui avaient apparu comme un
cyclone sur la population roumaine. À mon âge, je ne comprenais pas grand-chose de
toutes les transformations qui se sont passées en Roumanie. Le fait qu'il n'y avait rien à
manger ou avec quoi s'habiller, moi, je me demandais toujours pourquoi cette
catastrophe s’est abattue sur nous. Souvent, j’interrogeais mes parents, mes voisins de
notre cour ou mes amis qui avaient le même sort que moi, sur cette question. Leur
réponse était la même : la guerre, l’invasion russe et le gouvernement communiste
arrivé au pouvoir.
Dans l’impossibilité d’appuyer les nouvelles conditions de travail que la nouvelle
direction de l'usine Malaxa a imposé à ses travailleurs, à la suite du changement de
régime politique et l'arrivée des communistes au pouvoir, mon père a quitté l'usine et a
ouvert un petit atelier de tournage dans un taudis situé près de notre maison. Il s'était
profilé sur la fabrication des segments pour voitures. Après la guerre, il ne s’agissait pas
sur des achats de voitures neuves. Les gens réparaient leurs voitures en remplaçant les
anciennes pièces avec des improvisations fabriquées sur place.
Ce changement a permis d'améliorer, dans une certaine mesure, le budget de ma
famille, mais ensuite, il s’est répercuté négativement sur moi parce que mon père a été
inclus de la catégorie sociale de « travailleur » étant classé comme « petits bourgeois »
dont le nouveau gouvernement communiste l’a décrété. Pour cette raison, j'ai été refusé
à plusieurs reprises, pour m'inscrire à des cours des écoles que je voulais suivre.
Avec tous les ennuis que j’ai soufferts, à cause de la situation difficile dans laquelle mes
parents se trouvaient ainsi que l'ensemble de la population, j’ai essayé de vivre mes
moments spécifiques de mon âge, à l'école ou au-delà.
En temps de guerre, lorsque les alarmes commençaient à sonner, au lieu de me cacher
pour échapper aux attaques de l’aviation ennemie, à l’aide d’un fusil confectionné de
moi, je tirais sur ces avions pour les abattre. Après la fin des attaques, sans réaliser les
graves conséquences qui pourraient s'ensuivre, je me promenais avec mes amis sur
des endroits où des bombes avaient été lancées par l'aviation et sortais l’explosif
(trotyle) de celle-ci que je l’utilisais plus tard pour le mettre, dans de petites quantités,
sur les rails des tramways et après je m’amusais quand celui-ci explosait.
Souvent, pour regarder des certains films qui roulaient dans les jardins de salles de
cinéma de mon quartier, je grimpais aux murs avec d’autres enfants et non pas une fois
je suis tombé de murs, en me blessant et même j’ai été poursuivi par les gardiens des
cinémas.

J’ai commencé à fréquenter mon école primaire à l'âge de sept ans et j’ai été inscrit à
l'école des garçons « Arhereul Calist » qui se trouvait près de ma maison. Les quatre
premières années de l'école, j'ai été sous la supervision de la professeure Elena
Brezeanu qui était mariée avec un prêtre qui enseigne la religion, à son tour, dans la
même école.
Un jour, à une heure de religion, que le prêtre Brezeanu nous apprenait, il nous
expliquait, à un moment donné, comment Jésus-Christ était habillé, à cette époque.
Entre autres choses, il a dit que Jésus portait des chaussures, nommées « sandales ».
Moi, je n'étais pas à l'écoute de trop près, car je me sentais tellement mal. En constatant
que mon attention est dispersée, le père Brezeanu s’adressait à moi en me disant :
- Munteanu, je vois que vous n'êtes pas trop attentif à l’heure. Pouvez-vous me
répéter ce que Jésus-Christ portait comme chaussures dans ses pieds ?
Moi, je me suis précipité et j’ai fait un signe à mon collègue de banque pour me dire la
réponse. Celui-ci a chuchoté en me disant le mot « sandales », mais moi, je n’ai pas
bien compris. Et puis, sans réfléchir, j’ai répondu au professeur avec haute voix :
- « Sarmales » mon père ! ( sarmales est un plat traditionnel roumain).
L’ensemble de mes collègues éclata dans un rire hystérique et l’enseignant nerveux m’a
dit :
- Asseyez-vous pauvre indiscipliné et une autre fois, soyez plus attentif ! Écoutez
mes enfants, quelle réponse ? Après Munteanu, Jésus-Christ portait
« sarmales » dans ses pieds … et il a fait le signe de sa croix.
De ma professeure Brezeanu, j'ai appris beaucoup de choses utiles, qui m’ont servi plus
tard dans ma vie. J'étais un garçon diligent, tranquille et sans prétention ce qui a attiré la
sympathie de mon enseignante. J'aimais la poésie et la prose fantastique en lisant des
livres de tous genres et spécialement je préférais les histoires du capitaine Nemo.
Lors de la première célébration de la remise des diplômes de la première année
d'enseignement, ma professeure m'a choisi pour réciter un poème qui s’appelait « le
petit oiseau » et qu'il s'agissait d'un oiseau qui a été tué par un malveillant enfant. Après
la récitation de la poésie, qui a eu un effet favorable sur le public, j'ai commencé à
pleurer, pour la pitié de l’oiseau de ma poésie.
Après avoir obtenu mon diplôme de quatre classes au primaire, la même année, le
nouveau gouvernement communiste a décrété une nouvelle loi de l'éducation. Par cette
loi, les écoles primaires de quatre classes sont devenues écoles primaires de sept ans,
alors que je suis resté à mon ancienne école qui a changé son nom de « Arhereul
Calist » en « École primaire de sept ans ». Bien entendu, le cours de religion a été
supprimé pour être remplacé par un cours de langue russe, que je n’ai jamais aimé.
Mon aversion pour cette langue est due aux événements que j'ai vécus pendant la
période quand ma famille a été envoyée dans le village Urlati où se sont déroulées des
atrocités qui ont été effectuées par des soldats russes qui y étaient stationnés.

J’étais déjà en septième année de l’école et, à un cours de langue russe, l'un de mes
collègues, Corneliu Cautis, un beau garçon et bien formé, qui admirait toujours son
sexe, à un moment donné, il a attaché une corde à son pénis et a commencé à tirer
doucement d’elle, en murmurant :
- Dii., dii., mon petit poney ! Vole comme le vent, envers madame Alexeeva (notre
professeure de langue russe), entre dans sa forêt noire et pénètre dans son
palais.
La professeure a observé que celui-ci bougeait dans sa banque. Elle a quitté sa chair et
est allée vers Corneliu qui a commencé à se précipiter quand il a vu que madame
Alexeeva venait vers lui.
- Que faites-vous, Cautis ? Pourquoi tu n’es pas attentif à ma leçon ? Que faites-
vous avec cette corde ? Puis elle a saisi un bout de la ficelle et a commencé à
tirer.
- Ah.. Madame, ne tirez pas, s'il vous plaît…
À cause du court intervalle, il n’a pas eu le temps nécessaire pour déverrouiller sa
chaîne.
- Donnez-moi cette chaîne, pour que je voie pourquoi vous jouez avec elle ! et elle
a commencé à tirer à nouveau.
Corneliu à cause de la douleur et avec un geste désespéré a montré son pénis attaché.
Celle-là a fait sortir un cri et a dit :
- Vilain garçon !, n'as-tu pas honte ce que tu fais ? Je veux porter plainte auprès
du directeur pour te sanctionner !
Puis elle a laissé tomber la chaîne de sa main et elle est sortie de la classe dans
l'agitation des étudiants qui riaient et applaudissaient. Elle s’est rendue au bureau du
directeur en l’annonçant ce que c’est passé. Corneliu a été éliminé par le directeur de
l'école pour une semaine et madame professeure de russe l’a laissé corrigent.
Après des années, Corneliu Cautis a suivi la faculté de médecine et il est devenu
médecin. Beaucoup plus tard, je l'ai rencontré d'ailleurs, chez une de mon amie et
ensemble, nous nous sommes souvenus avec nostalgie des années passées à l'école
primaire.
Pendant les années de mes études jusqu'à la fin des sept classes, je n’ai pas eu
beaucoup d'amis. Je me suis fait un ami avec un garçon, Richard Marcheli, qui était mon
collègue de ma banque et qui était le fils d'un ingénieur allemand de Transylvanie. Son
père s’est établi à Bucarest, après qu’il a été prisonnier en Russie pour quatre ans.
Richard était un garçon éduqué dans le style allemand et très intelligent. Je me sentais
bien avec lui et tout le temps nous étions partout ensemble.
Après nos heures d'école, nous allions au cinéma ensemble et nous regardions des
films avec Pat et Patachon ou Stan et Bran. Lorsque nous sommes devenus plus
grands, parfois nous prenions le tram et nous nous arrêtions aux maisons de rendez-
vous dans le quartier « La croix de pierre », où de jeunes filles montraient leurs sous-
dessous et même leur sexe aux passants. Nous les regardions avec intérêt et puis nous
jetions des cailloux dans les fenêtres des établissements tandis que les dames faisaient
amour avec leurs clients. Pas une seule fois, nous avons été suivis des hommes de
garde des « maisons de rendez-vous » et parfois, nous nous sommes réveillés même
avec des malédictions de la part des filles qui étaient dérangées dans leur activité.
La mère de Richard était une Allemande maigre et mondaine qui, après que nous
devenions plus âgés, nous racontait comme elle fessait amour avec son mari. Nous
écoutions excités ses explications et dans notre esprit nous nous demandions comment
pouvait être.

Dans la cour, où j'ai vécu avec mes parents, habitait une famille, mari et femme,
nommée Ionascu. Ils n’avaient pas d'enfants parce que, Sanda, la femme de Gheorghe
Ionascu avait un problème de l'utérus et ne pouvait donc pas rester enceinte. Avec eux
habitait aussi la mère d’Ionascu qui était une femme âgée et malade et qui est restée
veuve de sa jeunesse et qui était torturée en permanence par Sanda, la femme de son
fils.
En raison de l'influence de son épouse, George Ionascu tortura, à son tour, sa mère qui
était dans une situation de misère inconcevable. Sanda ne lui donnait pas de la
nourriture, mais elle disait à son mari que sa mère ne veut pas manger sa nourriture
parce qu’elle avait été empoisonnée. La pauvre femme vivait par la pitié de ses voisins
et avant de mourir elle a maudit son fils et son épouse. Après des années, Sanda est
devenue aveugle et son mari a attrapé un cancer de côlon.
À leur tour, le fait qu’ils ne pouvaient pas avoir un enfant qu’ils le souhaitaient
également, cette famille a jeté leurs yeux sur moi parce que j'étais un garçon joli, sage et
tranquille. George Ionascu, ou Gica, comme lui disait, Sanda, sa femme, travaillait au
Ministère de l'Intérieur comme secouriste, mais il disait à tout le mode qu’il est
zincographe dans une imprimerie. Sanda n’avait pas d’emploi, mais à cause des
relations de Gica, elle avait été nommée par les communistes, telle que déléguée de
rue, avec le but de voir, d’entendre et de communiquer à ceux-ci tous les suspects qui
sont contre le régime au pouvoir.
En raison de leur comportement ostentatoire et de leurs occupations, cette famille n'était
pas agrée par les gens d’autour d’eux. Moi, j'étais la seule personne qui avait accès à
leur domicile. Gica était très doué en dessin et quand il revenait de son travail il me
dessinait toute sorte d’images avec qui je me jouais.
Pas depuis longtemps, ma mère avait acheté pour moi un petit théâtre de marionnettes,
de type jouait, pour lequel Gica dessinait mes décores. J'étais très fier de lui et j’utilisais
mon théâtre pour donner des représentations aux enfants du quartier qui payaient
l'entrée avec cinq lei, quand l'argent était compté en millions.
Un jour, quand j'avais presque onze ans, j'ai trouvé par hasard un journal intime, que ma
mère le gardé caché dans un tiroir. Dans ce journal, j'ai appris beaucoup de choses dont
je ne les savais pas et d’autres s’étaient passés en ma présence, sans pouvoir me les
expliquer. Ainsi, j'ai appris que mon père a fait amour avec Sanda et ma mère les a
surpris dans une soirée quand Gica était parti à son travail. Pour ne pas dire à son
homme qu’est-ce que se passer, Sanda a demandé à ma mère de la pardonner en lui
promettant de l'argent et aussi de m'envoyer pendant l’été dans une colonie de
vacances à la Mer Noire.
Peu de temps après, le comité de la rue, dont le président était Sanda, a proposé au
secteur du parti, l'envoi d'un nombre de 15 enfants du quartier, dans une colonie de
vacances à Eforie Sud, pendant trois semaines. Sanda a inscrit mon nom sur la liste, en
leur disant que je suis son petit-fils, de sorte que, au début d'août de 1949, je suis allé à
la mer avec un train spécialement affecté pour cette action.
C'était la première fois que je voyageais seul, mais l'image de la mer et surtout dans les
histoires de ma mère, m’attirait irrésistiblement. En arrivant à la destination, j'ai été
déposé avec les autres enfants, dans une belle villa au bord de la mer, pas loin de Eforie
Sud, qui avait appartenu à un membre de la famille royale. La nourriture était très bonne
et suffisante et en discordance avec ce que je mangeais à la maison, quand n'arrivait
jamais à me saturer à cause de la pénurie de la nourriture. Tous les jours, je faisais des
séances de soleil sur la plage et je participais à diverses activités de la colonie. Dans la
soirée, on s’allumait un feu de camp et tout le monde chantait des chansons
« révolutionnaires ».
Un soir, mon voisin de chambre qui était un garçon un peu plus âgé que moi est venu
près de moi et m'a dit que notre instructeur allait presque tous les soirs dans le cabinet
médical de la colonie et, après la fermeture des lumières, faisait y amour avec notre
infirmière. Pour me convaincre, il m’a dit d'y aller avec lui cette nuit pour regarder par la
fenêtre qui donnait sur la cour. J'ai accepté, mais j'avais peur des conséquences
possibles si quelqu'un nous découvrait. Mais, par curiosité, après la fermeture des
lumières de nuit, je suis parti avec lui, en nous faufilant jusqu'à la fenêtre du cabinet
médical et nous nous sommes assis dans la position d'attente.
Bientôt, notre instructeur est entré dans le cabinet médical et, après quelques étreintes,
a commencé à faire l'amour avec notre infirmière. À ce moment, nous regardions par la
fenêtre et riions à la vue. À un moment donné, un chien qui était par là, s'approcha de
nous et se mit à aboyer, puis a couru à mon collègue en lui mordant sa jambe. Mon
collègue a commencé à crier de douleur et pour l'écarter, nous avons commencé à jeter
des pierres sur le chien. Le bruit a alerté les deux amants qui sont sortis pour voir ce qui
se passe. En nous voyant, bien sûr qu’ils ont commencé à nous questionner pourquoi
nous sommes sortis de la chambre à minuit.
- Qu'est-ce que vous faites ici et à cette heure, mes garçons ? Pourquoi avez-vous
quitté votre chambre après la fermeture des lumières ? Vous savez que ce n'est
pas autorisé à quitter votre chambre après dix heures du soir ?
- Nous avons quitté notre chambre pour admirer la pleine lune et alors ce chien a
commencé à aboyer, a dit mon collègue.
- Mais que fais-tu ici et non sur la terrasse où vous pouvez regarder la lune et la
mer ? D’ici on ne peut pas voir la lune !
- Eh bien, nous avons entendu un bruit dans le cabinet médical et nous sommes
descendus pour voir ce qui se passe ici.
- Et vous avez regardé par la fenêtre, n'est-ce pas ? dit l'instructeur.
- Oui et nous vous avons vu quand vous embrasiez, avec puissance, notre
infirmière et qui, la pauvre, criait et se débattait dans vos bras à cause de la
douleur que vous lui avez provoqué, j’ai dit.
- Quelle impertinence ! Entrez dans votre chambre immédiatement et je vais vous
punir de ne pas quitter demain votre chambre pour vous rendre à la plage.
- Comment vous pensez ! dit mon collègue, mais ensuite nous allons nous
plaindre au directeur de la colonie que vous nous avez punis injustement.
En entendant cette menace, l'instructeur a immédiatement changé d'attitude et avec une
voix calme, nous a dit :
- Écoutez mes gars ! Je crois qu'il est opportun de ne pas mentionner au directeur
qu’est-ce que vous avez vu ici et, pour conclure cette discussion, je vous
promets que je ne veux plus vous punir. Par contre, demain je veux vous donner
un complément alimentaire et je vous laisse plus de temps à rester dans l'eau de
la mer. Promettez-vous de ne pas dire au directeur ce que vous avez vu ici.
- Oui ! nous avons dit et puis nous avons couru dans notre chambre.
À compter du jour suivant, notre instructeur nous a protégés jusqu'à la fin de notre
séjour, en nous donnant des compléments alimentaires, en nous laissant sur la plage et
dans l'eau pendant plus longtemps et en nous exonérant du service de nettoyage des
légumes dans la cuisine.
À la fin du camp de la mer, je me suis engraissé et bronzé visiblement. Le souvenir de
ce camp est resté profondément dans la mémoire, car le contact avec la mer, on m’a
donné un sentiment inexplicable de bien-être qui aussi, en d'autres occasions, elle m’a
influencé à aimer et à admirer son mystère et son immensité.
Chapitre 3

Mon adolescence

Après avoir obtenu mon diplôme de l'école primaire de sept classes, je suis devenu un
mince garçon avec allure sportive, aux cheveux bruns et les yeux bleus. Quand les filles
passaient à côté moi, elles rigolaient et me regardaient avec intérêt. Ni moi, je n'étais
pas indifférent, car je sentais en moi un changement qui me faisait frémir quand je
m'approchais d'une fille. Mais j'étais timide même si l'inconnu m’attirait. Mon début de
ma puberté, spécifique à l'adolescence disait son dernier mot et m’influençait.
Mon premier amour a été Nusa Mateescu, une fille du même âge que moi et qui vivait
dans la même cour où j’habitais avec mes parents. Elle était la fille d’une famille de
Suceava qui s’est temporairement installée à Bucarest, en raison de la sécheresse, qui
a porté préjudice à long terme à la région de Moldavie, à cette époque. Elle était brune,
avec les yeux bleus, sourcils magnifiquement arqués avec un corps mince et souple,
bien taillée et un buste particulièrement provocatrice.
Je me sentais bien avec elle parce qu’elle avait aussi commencé à me plaire comme
moi d'ailleurs. Tous les jours, nous flânions dans les rues, nous allions au cinéma et le
dimanche nous nous alitions à « Mosi » un parc d’attractions situé sur une parcelle dans
le périmètre de la « Barrière Vergu », où ont été installés des carrousels et d'autres
attractions, dans lesquelles des artistes ambulanciers donnaient des spectacles à ciel
ouvert. Nous achetions des bonbons avec de l'eau froide, colorée et nous nous
balancions dans de petits bateaux où nous tirions avec un fusil dans des poupées
mouvantes.
- Puiu, que faisons-nous aujourd'hui, où allons-nous ? Nusa a dit. Je voudrais que
nous allions au cinéma. J'ai entendu dire qu’il y a un bon film qui s’appelle
« Moissonne le vent sauvage » au cinéma « Milano ». Que dis-tu, on va y aller ?
- Oui, bien sûr, mais premièrement donne-moi un baiser !
- Tu es odieux, chaque fois que je te demande quelque chose, je dois d'abord te
récompenser. Je pense que ce n’est pas juste ! Quand tu veux quelque chose de
moi, est-ce que je te demande de me payer en premier ? Vous les garçons, vous
êtes tous, une eau et une terre. Tout le temps, vous voulez, vous voulez… sans
rien donner en échange !
- Qu’est-ce que c’est mal dans cette chose-là ? Un petit baiser ne coûte rien. Mais
à propos, est-ce que tu as de l’argent pour le cinéma, parce que moi, je ne sais
pas si ce que j'ai dans ma poche est suffisant pour s’en aller tous les deux. Mon
père ne m’en donne pas trop. Ma seule source est ma mère, mais elle ne
dispose pas de plus. Elle me donne de l'argent de ses économies, à l’insu de
mon père.
- Tu vois, tu me demandes encore quelque chose ! Il faudrait que moi aussi te
pose une condition, mais je ne peux pas, c’est comme ça que je suis. Tout ce
que j’ai dans ma poche et tout ce que tu as aussi, nous allons pouvoir aller au
cinéma !
Ensuite elle se dirigea vers moi, elle a pris ma tête entre ses mains douces et m’a donné
un baiser. À mon tour, j'ai répondu en la prenant dans mes bras et en la caressant sur
ses cheveux.
- Attention ! Nusa a dit, on va nous voir nos voisins. Veux-tu que j’aille des
problèmes avec ma mère ?
- Tu ne voix pas qu’il n’y a personne dans notre cour ! Et même si c'est le cas, je
m’en fiche !
Nusa s’arracha de mes bras et a commencé à compter son argent. Elle en avait assez,
même pour tous les deux. Elle se leva puis se dirigea vers sa maison pour informer sa
mère qu’elle va aller au cinéma avec moi. À son retour, elle a pris ma main et tous deux
nous avons démarré au cinéma. Le film a été une tragédie et à cause de ça Nusa a
pleuré tout le temps. Tous les deux, nous restions coller l’un de l’autre et, de temps en
temps, nous nous embrassions passionnément. Nous étions jeunes et nous nous
sentions heureux. Rien ne comptait dans ces moments-là.
Notre liaison et amitié est devenue de plus serrée afin que, dans une soirée, en étant
seuls à la maison et excités par nos baisers et nos caresses, nous ayons eu pour la
première fois un contact sexuel, qui nous a bouleversé tous les deux. Ni moi, ni Nusa,
nous n’avions pas eu une telle relation et son inconnu nous nous a captivés. Les deux,
nous avions un sentiment que nous ne pouvions pas nous l'expliquer, de bien-être, de
satisfaction, de réalisation et en particulier un sentiment d’un profond amour. Nos corps
humides de nos étreignes et frémissements formaient un tout unitaire, un seul corps,
une seule âme, un seul amour.
Depuis, quand nous avions une occasion, nous nous cachions dans des entrepôts ou
dans des parcs et faisions l'amour avec la passion de notre adolescence.
Notre amitié a duré presque un an, parce que, après cette période de temps la famille
de Nusa s’est rendue à Suceava et après, je ne l'ai jamais revu, même si j'ai essayé à
plusieurs reprises d’obtenir des contacts avec elle par le biais de lettres à qui Nusa n’a
jamais répondu.
Son départ m'a vraiment touché et énormément bouleversé et il a fallu passer beaucoup
de temps jusque l'oublie s’est laissé sur cet épisode de mon adolescence.

Après avoir terminé mes études de sept classes, j'ai décidé avec mes parents, que je
m’inscrire à la Licée Sanitaire, parce que mon rêve, depuis toujours, était de devenir
médecin.
Ma passion pour la médecine s’est développée dès mon enfance. Je faisais des
injections avec de l'eau à l’aide d’une seringue que j’ai trouvée aux poupées de Nusa
pour les sauver de maladies imaginaires. J’assistais à la naissance et aux soins des
chiots et chatons nés par leurs mères de ma cour et du voisinage.
Je disséquais les mouches ou autres bestioles pour voir ce qui se cache sous leurs
vêtements et, plus tard, je faisais même des injections à des gens pauvres qui ne
pouvaient pas ou n’étaient pas en mesure de payer quelques « lei » pour une injection à
une infirmière.
J'ai même acheté un livre d'anatomie descriptive et quelques ossements humains
donnés par un étudiant voisin qui avait terminé la première année de médecine et à
cause de ceci j’ai eu même des problèmes avec la police. J’ai échappé de ma poursuite
après que la police a constaté que les os étaient objets d'étude médicale.
À l'automne 1952, je suis entré à l'examen d'admission à la Licée Sanitaire. Je me suis
préparé tout l'été et j’étais convaincu que je réussirais, bien que je vinsse un sentiment
sombre qui flottait et me poursuivait ces derniers temps.
Je me suis présenté dans la salle d'examen écrit et j’attendais avec les autres candidats
la communication du sujet, quand, à un moment, la secrétaire de la commission est
entrée en classe et a clamé mon nom :
- Munteanu Panait, s'il vous plaît, quittez la salle d'examen !
- Mais pourquoi ? J’ai répondu sans souffle.
- Vous ne pouvez pas passer notre test de l'école parce que vous êtes fils d'un
petit bourgeois. Seuls les fils de travailleurs et des paysans qui ont été
collectivisés ont la bonne voie à suivre cette école.
Je suis sorti de la salle d'examen en pleurant et en me déchaussant sur mes pieds. Ma
mère, qui était également présente dans la cour de l'école, je l’ai trouvé en pleurant. Elle
avait appris tout avant moi. Nous sommes partis tous les deux à la maison sans nous
dire un mot. Mes parents ont fait après une contestation, mais elle a été refusée.
La stigmatisation de ma vie m’avait donné son premier coup.

Après ce malheureux incident et en n'ayant pas le droit de m’inscrire à une autre Licée,
mon père m'a proposé de m’enseigner le tournage. Au début, il m’a donné la tâche de
poncer à la pierre les segments qu’il coupait à son tour. Chaque jour, je ponçais des
dizaines de segments qu’ils m’avaient détruit, dans le temps, les doigts de mes mains.
J'avais des blessures, des cloques et des plaies et la noirceur de la poussière de fonte
s’est imprégnée profondément dans ma peau, même si je essayais de la supprimer avec
tous les types de solvants.
En outre, il fallait que je maintienne aussi la propreté de l'atelier, l’arrangement des outils
en place après leur utilisation, la participation de l'approvisionnement et de coltiner les
matériaux de fonte, dont leur poids, surpassaient parfois ma force physique.
Même s’il avait promis de m’apprendre le tournage, mon père m’utilisait seulement aux
travaux auxiliaires. Le soir, après le travail accompli, je tombais mort de fatigue et je
n'avais pas envie de rien faire. Je me sentais affaibli, perdu et j’avais mal à toutes mes
articulations. Seul et sans avenir, sans aucun ami ou petite amie, je me suis senti
submergée et pensait que ce cauchemar ne sera jamais terminé. Je ne voulais plus rien
et je me suis retiré dans ma coquille, où je me tenais là avec mes pensées.
À un moment donné, j'ai pris la décision de refuser de travailler dans l’atelier de mon
père. En réponse, il m’a battu jusqu'à ce que je sois tombé inconscient. C'était la
première fois quand il me battait, mais a été le dernier. Je suis resté au lit pendant une
semaine pleine de mal et des douleurs dans les côtes. Pendant six mois je n'ai pas parlé
à mon père. Le matin, je partais et je me baladais dans les rues sans un objectif précis,
presque tous les jours. Le peu d'argent de poche que ma mère me donnait de ses
économies à l'achat de nourriture me souffrirait seulement pour acheter quelques
bretzels ou quelques bonbons.
Pendant une année, mon père ne m’a donné aucun argent, ni pour mes poches, ni pour
mes vêtements. Mes vêtements étaient pleins de pièces cousues par ma mère et mes
chaussures s’étaient détruites de sorte qu’il fallût couvrir les trous avec du papier
journal. Quand il pleuvait, je ne pouvais pas sortir de ma maison parce que l'eau
pénétrait à travers les trous et inondait mes chaussures.
Une fois, il fallait que je m’en aille au bureau d'un médecin ophtalmologiste lors d'un
rendez-vous, en raison d’une conjonctivite qui ne guérissait plus. Comme je n’avais pas
de chaussures, j'ai demandé à Gica Ionascu de me prêter une paire de chaussures pour
aller à la consultation. Il m'a donné, mais ils étaient beaucoup plus grands que ma
mesure. Je les ai pris parce que je n'avais pas le choix.
Je suis allé à prendre le tram et le moment d'y entrer, une chaussure a glissé de ma
jambe et elle est tombé exactement sur le rail de tramway alors que lui démarrait. Je
suis descendu à la prochaine station, j'ai enlevé l’autre chaussure et aux pieds nus, je
suis retourné à récupérer la chaussure qui avait glissé de mon pied. Je l’ai trouvé sur le
rail de tram écrasé. Bien entendu, je ne suis plus allée chez le médecin.
Le soir, l’oncle Gica a fait une morale sévère à mon père ainsi que le lendemain, il a
donné de l'argent à ma mère pour m’acheter une paire neuve de chaussures.
Mon père était devenu très avare. À ma mère, il ne lui donnait pas d'argent qu’en petite
quantité et après ses achats, il demandait la justification de toutes les dépenses. Une
petite partie de son argent le gardait sur lui et le reste le cachait dans des endroits
connus seulement par lui. En 1952 quand le gouvernement communiste a décrété la
première stabilité monétaire, mon père a perdu beaucoup d'argent. Des billets d’un
million de lei, que mon père les avait cachés et qui n'avaient plus de valeur, j’ai fait des
cerfs-volants avec qui je me jouais. Plusieurs fois, ma mère a proposé à mon père
d'investir son argent dans des objets de valeur qui pourraient être ultérieurement vendus
à des prix qui pouvaient couvrir et même dépasser l'investissement réalisé. Mais mon
père n'a jamais suivi son conseil, car il aimait avoir son argent en espèces seulement.
Pour cette raison, il a perdu beaucoup d'argent dans cette période, surtout après la
stabilisation monétaire et même plus tard quand l'argent a été dévalué.

J’avais déjà 16 ans et pratiquement je n’avais aucune perspective. Un jour, l’oncle Gica,
c’est comme ça que je lui disais, m’a appelé et m’a dit :
- Écoute Puiu, j'ai une connaissance au bureau de ressources humaines de la
Banque d'Investissement qui pourra t’aider à commencer à y travailler, d'abord
sans rémunération dans un poste d'administration, après que, plus tard, qu’il
t'embouche dans un petit post, après que tu vas te familiariser avec le travail de
la banque. Dans ces conditions, tu peux t’inscrire à une école, au cours de la
soirée et de suivre ces cours, comme, d'ailleurs, de nombreux jeunes de ton âge
le font.
- Bien sûr que je veux parce que, comme vous le savez, je suis maintenant sans
aucune perspective.
Deux jours après, Gica Ionascu m'a dit de me présenter, le lendemain, à la Banque, au
Bureau de ressources humaines, où comme chef, c’était un Juif nommé Joseph
Schwartz, grand communiste à l’époque. Le jour arrivé, je me suis présenté à son
bureau et après qu’il m'a questionné pendant une heure, il m’a mis à signer un
engagement de travail sans rémunération.
- Tu as de la chance, a dit-il, parce que je connais bien Ionascu, qui est un homme
de confiance. Sinon, avec ton dossier de fils de petit bourgeois, tu n’auras
aucune chance.
- Merci beaucoup pour votre aide. Je viendrai tous les jours au travail sans aucun
retard et je ne manquerai jamais. Je m'efforcerai d'apprendre tous les travaux de
bureaux qu’on va me les donner et je ferai tout pour m’intégrer à ma place de
travail.
Avant de quitter la maison, j'avais appris par ma mère à remercier le camarade
Schwartz et de lui dire les mots stéréotypes qui étaient utilisés à cette époque.
- Bon, alors au travail. Tu vas travailler au Bureau d'administration, a dit-il.
Après cela, j'ai glissé une enveloppe avec de l'argent que ma mère m’a donné pour lui.
Bien entendu, il l’a pris et l’a mis immédiatement dans sa poche.
Le même jour, j'ai commencé à travailler dans le Bureau d'administration et j’étais
chargé de tenir les évidences des chauffeurs, de rédiger les feuilles de parcours et de
gérer la distribution des fournitures de bureau pour les bureaux de la banque.
Dans le bureau respectif, travaillaient encore deux femmes, l’une plus âgée, la
camarade Viorica Nicolescu, qui était proche du retrait et qui fumait chaque jour deux
paquets de cigarettes « Nationaux » et l’autre, une jeune fille de 20 ans, mince et agile,
qui s’appelait Ghimbara Cornelia. Tout le monde l’appelait Cornelus. Elle était toujours
de bonne humeur et courait d’ici là en laissant après elle une odeur de bouquet de lilas
que je l’inspirais avec plaisir quand Cornelus passait près de moi.
Dans les pauses du midi, elle mangeait toutes sortes de bonnes choses, car elle était la
fille d'un grand patron et parfois elle m'offrait de son paquet quelque chose de sa
nourriture. Je ne pouvais pas lui offrir la même chose parce que mon paquet était
toujours très mince et sans de bonnes choses.
Les jours passaient et avec le temps nous avons commencé à ne mieux connaître en
devenant de bons amis. Elle fréquentait un homme, une connaissance de sa famille,
mais elle disait que ne l’aimait pas. Son père, cependant, voulait qu’elle l'épouse. Je n'ai
jamais insisté à ce sujet parce que je me sentais gêné et surtout qu'elle était plus âgée
que moi avec quatre ans de plus.
Un jour, dans une pause, lorsque nous mangions, elle m'a demandé :
- Puiu, as-tu une petite amie ?
- Non, j’ai répondu et en rougissant j'ai mis ma tête plus profondément dans mon
assiette.
- Comment, dit-elle, un garçon si sympathique que toi, tu n'as pas une petite
amie ? Je ne le crois pas !
- C'est la vérité, j’ai répondu confus.
- Je pense toutefois que tu as eu ou tu as une connaissance féminine, n'est-ce
pas ?
- Oui, j'ai eu une petite amie qui a quitté Bucarest et elle s’est installée à Suceava
avec ses parents. Nous ne portons plus du courrier, depuis longtemps, parce
qu'elle n'a plus répondu à mes lettres. Je ne sais pas pourquoi, même si ici nous
étions en très bonnes relations.
- Qui sait, peut-être qu’elle y a un autre ami.
- C’est possible, mais à mon avis, elle devait m’annoncer. C’est comme ça qu’il
fallait être normal et correct.
- Comment s’appelle ton ex-petite amie ? Étiez-vous du même âge ?
- Elle s’appelle Nusa et nous sommes du même âge.
Mais, j’ai évité de lui dire mon âge, car Cornelia ne savait pas que moi, j’avais seulement
16 ans, même si mon physique robuste et sportif me montrer beaucoup plus âgé. Après
cette conversation, j'ai remarqué qu'elle me regardait avec plus d'intérêt et quand j'étais
seul, elle s’approchait près de moi soi-disant pour voir ce que je travaillais et puis elle
me serrait la main ou se collait, comme un flocon, de mon corps en me faisant vibrer.
J'étais perplexe et je ne savais pas quoi faire. Je bégayais, tremblais, pendant qu’elle,
avec son sourire, s’écartait en laissant derrière elle la même odeur de lilas que je
l’inspirais avec avidité.
Ainsi, se sont passés deux mois et après, un jour, Cornelia est venu à mon bureau et a
dit :
- Puiu, j’ai deux billets pour l'opéra, pour demain soir. Virgile, mon petit ami, ne
peut pas venir parce qu’il part pour quelques jours à Constanta. N’as-tu pas
envie d’y aller avec moi ? Se joue opéra Rigoleto de Verdi.

- Bien sûr, j’ai répondu. J'ai assisté à de nombreux spectacles d'opéra, mais pas à
celle-ci.
Je mentais, parce que je n'avais jamais été à l’opéra.
Le lendemain, nous nous sommes rencontrés devant l'entrée de l’Opéra. C’était en
automne et elle est arrivée vêtue d'une robe superbe lilas avec de discrètes petites
feuilles ferrugineuses qui étaient saupoudrées avec de paillettes scintillantes dans la
même tonalité de couleur. Elle avait l’air d’une nymphe flottante, qui laissait derrière elle,
son parfum préféré de lilas.
Après avoir terminé le spectacle, je l'ai invité à une pâtisserie à proximité de Capsa.
Nous avons mangé une glace au chocolat et puis nous avons bu du café. Nous avions
commencé à nous sentir bien et on semblait que tout le monde est le nôtre.
Ensuite, je l’ai conduit chez elle, à pied, sur « Calea Victoriei », parce qu'elle habitait
avec ses parents pas loin du « Marché Amzei ».
Lorsque nous sommes arrivés chez elle, avant que je la quitte, j'ai pris une brève
décision et je l’ai embrassé longtemps. Le plaisir qui a laissé ce baiser m’a bouleversé
profondément, en restant longtemps dans mon âme, ce qui a fait de ne pas dormir toute
la nuit.
Le lendemain, lorsque nous nous sommes rencontrés au bureau, j'avais l'air hébété à
cause de mon insomnie. Je lui ai dit pourquoi et elle, avec son beau sourire, m'a
embrassé et m’a donné un petit baiser sur ma joue. Au déjeuner, nous avons mangé
ensemble de sa nourriture qui cette fois-ci était plus généreuse et puis, à mon invitation,
nous avons bu un café dans la cafétéria dans la rue de l'Académie, devant notre
banque.
Après les heures de bureau, nous avons commencé à marcher presque tous les jours,
pendant des heures, dans le parc « Cismigiu », au cinéma pour regarder de bons films,
dans une petite pâtisserie pour manger un merveilleux gâteau. Les jours couraient et
nous devenions de plus en plus proches. Un jour, après les heures de bureau, Cornelia
m'a dit :
- Tu sais, j'ai rompu ma relation avec Virgil. Il n’est pas un mauvais garçon, mais il
est très jaloux et je n’accepte pas cette chose-là. Tout le temps, il m’espionnait
ce qui donnait une sensation très désagréable. D'autre part, mon père insiste
encore pour me marier avec lui. À mon âge, je ne suis pas encore prête pour un
tel pas. Je veux conserver mon indépendance, me distraire encore un petit peu
et faire passer mes examens pour une faculté que je désire suivre et non pas à
commencer à faire des enfants.
- Bon, mais alors... Veux-tu rester seule ? Je sais que c’est la solitude et je ne te
conseille pas de suivre mon exemple.
- Je ne veux pas rester seule, je suis avec toi et tu es mon amour !
En entendant ces mots, mon sentiment d’amour pour elle éclata et j’ai voulu l'embrasser.
J'étais heureux parce que mon instinct de jalousie que me provoquait la présence dans
sa vie, de cet homme, a été fondu soudainement, comme une boule de glace au soleil.
Dans le même temps, j'ai commencé à m’agiter et de me faire des problèmes parce que
je ne pouvais pas lui donner quoi que ce soit en palpable, à l'exception de mon amour.
En outre, j'étais beaucoup plus jeune qu’elle et mon avenir était nul.
J'ai alors décidé de suivre les cours dans un lycée aux cours de soir. J'ai obtenu un
certificat de service de la part du Bureau de ressources humaines pour prouver que je
suis salarié. Pendant ce temps-là, le camarade Schwartz, m'avait trouvé un poste de
caissier, qui en retour, je devais lui payer un montant mensuel de 50 lei. J'en ai accepté
parce que je n'avais pas d'autre choix.
Je me suis inscrit au Lycée « Spiru Haret », pas loin de la Banque, qui était classé
comme une institution d’enseignement parmi les meilleurs. Le jour, je travaillais à la
Banque et le soir je suivais les cours du Lycée, sans retourner chez moi. J'étais fatiguée,
mais j'ai toujours dit et je me suis moi-même encouragé dans ce sens que cette situation
ne peut durer éternellement.
Pendant ce temps-là, mes parents ont acheté une maison dans la rue « Popa Nan », où
j'avais maintenant ma chambre avec une entrée séparée. La maison était grande et
solide en utilisant comme combustible le gaz méthane, ce qui a fait de ne pas acheter
du bois de chauffage. Maintenant, j’étais en mesure d’amener Cornelia chez moi et bien
entendu de faire amour ensemble.
Ma relation avec Cornelia a continué six mois, après qu’un jour, elle n’est pas venue au
travail. Comme c’était la première fois qu’elle s’absentait, j'ai demandé à madame
Nicolescu, notre collègue de bureau, qui la connaissait très bien, que se passe avec
elle :
- Madame Nicolescu, pourquoi Cornelia n’est-elle pas arrivée aujourd'hui au
travail ? Elle ne s’absente jamais !
- Elle est malade et hospitalisée.
- Mais que c’est-il passé qu’elle a fallu être hospitalisée ? j'ai demandé en étant
surpris et perplexe.
- Elle a coupé ses veines de ses mains et a été transportée d'urgence à l'Hôpital
Central.
- Comment cela ? Pourquoi ?
- Avant hier soir, elle a eu une discussion très chaude avec son père parce qu'elle
a refusé continuellement de se marier avec Virgile, son petit ami. Son père l’a
frappé et ensuite il l’a fait sortir de la maison. Le soir, elle a profité que son père
s’absentait et est entrée dans la maison, après quoi elle a coupé ses veines de
ses mains, dans sa chambre. Lorsque sa mère est entrée chez elle pour lui
apporter une tasse de thé, elle l’a trouvé dans une flaque de sang et presque
morte. Elle a immédiatement alerté les secours et a annoncé son mari. Après, les
ambulanciers lui ont donné les premiers secours et ils l’ont transporté d'urgence
à l’Hôpital Central où elle est en fait sous surveillance médicale. Je suis très
préoccupée parce qu’elle est dans une telle situation et c’est la première fois qui
lui arrive une chose pareille. Elle était très équilibrée et moi, je ne l’ai jamais vu
d’être en colère ou en état de tension.
- Qu'est-ce que vous dites, c’est terrible ! Pourrais-je lui faire une visite ?
- Je ne pense pas que tu réussisses, car elle est enfermée dans un pavillon pour
les malades agitées et elle n’a pas le droit de recevoir de la visite.
Je suis simplement resté bloqué, stupéfait de ce que j'ai entendu. Je ne venais pas à
croire que cette fille tellement heureuse, qui n’a jamais donné un signe de faiblesse
mentale, était tombée dans une telle situation qu’elle a décidé de se suicider.
Cornelia n’est jamais revenue au travail. Personne ne savait plus quelle était sa
situation.
Après un an, je l'ai rencontrée dans un restaurant dans un état lamentable. Elle était
seule, à une table, avec un visage d’alcoolique. Elle avait donné dans le don de
l’ivresse.
Je me suis assis à sa table et j’ai tenté d’avoir une explication avec elle sur les
événements qui se sont passés. Elle me regardait et me répondait comme si c'était la
première fois qu’elle me voyait. De temps en temps, elle avait des moments de faiblesse
et puis se mettait à pleurer après quoi elle avait de retour un état d'agitation.
J'ai décidé de sortir avec elle de cet environnement hostile et je me suis engagé de
l’amener chez elle, mais elle a refusé obstinément.
Je suis sorti du restaurant désorienté et confus à cause de la situation crée qui m’a
bouleversé pour un bon bout de temps. Après cette triste rencontre, je ne l’ai jamais vu.
Chapitre 4

Ma jeunesse

Le lycée « Spiru Haret » est situé dans la rue « Italiana », pas loin du carré « Rosetti ».
Cette école a été fondée en 1903 et s’appelait « Le College National Spiru Haret », en
commençant son activité comme un gymnase. Plus tard, en 1920, il est devenu lycée à
plein temps quand il a commencé à être fréquenté, au cours de son histoire, de grandes
personnalités roumaines de l'époque comme : Ion Magheru, diplomate, Radu Titeica,
physicien, Mircea Eliade, écrivain, Nicolae Teodorescu, mathématicien, Alexandru
Teodorescu, philologue, Radu Patruliu, architecte ainsi que des autres personnalités qui
ont contribué au développement et l'expansion de la science roumaine, à la fois dans le
pays et à l'étranger.
En 1948, le gouvernement communiste a aboli le lycée en étant considéré comme
« lycée bourgeois ». Plus tard, cependant, on est revenu à cette décision, parce que
cette institution d'enseignement, qui a formé, au fil du temps, des générations
d'étudiants qui sont devenus plus tard des professionnels dans tous les domaines
d'activité, a démontré qu'il ne s’agit pas d’un lycée « bourgeois », mais d'un
établissement de culture pour toutes les catégories d’élèves.
Dans le moment où j'ai commencé à fréquenter ce lycée, le gouvernement communiste
a imposé un régime d'austérité, par vérifications, en système communiste, des
programmes d'éducation, par l’introduction de disciplines d'endoctrinement, par le
recrutement des enseignants pour enseigner des sujets rompus de réalité. Cependant,
la tradition et la renommée de ce lycée ont été préservées, parce que les enseignants et
les étudiants ont collaboré continuellement, pour le maintenir.
Sur le plan politique, après la liquidation des fractions qui régnaient à l’intérieur du Parti
communiste, respectif les trois fractions appelées historiquement : la fraction
« moscovite » dirigée par Ana Pauker, Vasile Luca et Teoharie Georgescu, la fraction
des « communistes de la prison » dirigée par Gheorghe Gheorghiu-Dej et la fraction des
« communistes du Sécretariat du Parti » dirigé par Lucretiu Patrascanu, le dirigeant
moscovite Gheorghe Gheorghiu-Dej est arrivé au pouvoir, avec le soutien direct de
Staline, après une bataille acharnée entre les trois fractions.
Après la mort de Staline, le 4 mars 1953, Gheorghe Gheorghiu-Dej, un stalinien dur,
n’agréait pas les réformes de Nikita Hrusciov et le processus de « déstalinisation » initié
par celui-ci. Dej s’est opposé à la réalisation des objectifs économiques de CAER par
laquelle la Roumanie avait été transformée en « le grenier à blé » du bloc soviétique, en
initiant, à son tour, un ambitieux programme de développement de l'industrie lourde. Il a
fermé les plus grands des camps de prisonniers politiques, a abandonné les travaux du
Canal Danube-Mer Noire, a aboli le système des rations alimentaires et a augmenté les
salaires des travailleurs.
Il a pris également des mesures pour limiter l'influence de la culture russe dans le pays :
la langue russe a cessé d'être sujet d'étude obligatoire dans les écoles de tous les
grades et la maison d’édition « Livre russe » a été fermée.
Toutes celles-là, combinées avec les ressentiments liés de l'occupation des certaines
provinces historiquement roumaines par les Soviétiques, respectif la Bucovine du Nord,
une région transformée en RSS d'Ukraine et la Bessarabie jointe à RSS Moldavie et
RSS Ukrainiene, ont conduit inévitablement la Roumanie communiste sur le chemin
relativement indépendant et nationaliste.
Gheorghiu-Dej, un stalinien convaincu, considérait que le régime libéral de Hruciov
menace de saper son autorité. Dans un effort visant à renforcer sa position dans le
pays, Dej a décidé d'aborder la coopération avec tous les États, indépendamment du
système économique et politique, fondé sur des principes d'égalité internationale et de
non-ingérence dans les affaires intérieures. Cette politique a conduit à resserrer les liens
avec la Chine, qui était également le promoteur d’auto détermination nationale.
Sur le front international, en 1958, le gouvernement a réussi, par la voie diplomatique, à
retirer les troupes de l'Armée rouge de Roumanie, ce fait en étant accompli par l’apport
d’Emil Bodnaras, le ministre de la Défense nationale, qui, après quelques
commentaires de coulisse, a grisé, à la cave de « Cotnari », Nikita Hrusciov et a profité
de cette occasion pour obtenir le retrait souhaité.
Sur le plan interne, le gouvernement roumain a pris des mesures pour apaiser les
mécontentements populaires par la réduction de l'investissement dans l'industrie lourde,
l'augmentation de la production de biens de consommation, la décentralisation de la
gestion économique, la croissance des revenus de la population et l'introduction des
éléments d’auto-administration ouvrière. Les autorités ont renoncé au système des
quotas obligatoires imposés aux agriculteurs privés, mais ont accéléré le programme de
la collectivisation de l’agriculture dans le mi sixième décennie.
Comme tout jeune passionné, désireux de transformation radicale, j’ai salué au
commencement les modifications et l’orientation qui ont eu lieu dans la vie politique et
culturelle du pays. Je pensais que la tyrannie des politiciens communistes arrivés au
pouvoir, à qui j’avais assisté, avait pris fin. J'ai commencé à croire en mon étoile et en
même temps d'aspirer à une vie meilleure, plus humaine. Je savais que ce n'est qu'un
début, mais j’espérais que les gens vont se réveiller et de prendre en leurs propres
mains le sort du pays pour le bien-être de ses habitants. Malheureusement, mes espoirs
ont été déçus, dans le temps, parce que cette période n'a pas été qu’un pont de
passage à d’autres oppressions et d'autres ennuis qui ont empoisonné plus la
population de ce pays, sous le régime communisme.
Dans ce contexte général, j'ai commencé à suivre des cours du lycée Spiru Haret.
Le premier an de lycée, je l’ai commencé en automne 1953. J'ai été affecté dans une
classe de 25 élèves, tous des employés dans de différents domaines d'activité. Mes
collègues, dans la plupart majorité, étaient plus âgés que moi, certains étaient même
mariés, avec des familles et des enfants. Parmi eux se trouvaient cinq jeunes étudiants
qui se connaissaient et se fréquentaient avant leurs inscriptions à l'école. Leurs noms
étaient : Ivan Gheorghe, surnommé Gelu, Lascar Valeanu, Frank Sommer, Balasan Ion
et Iancu Apostol dont le diminutif était « le Majeur », car il était dans l'armée comme
soldat et à cause de sa tresse sur ses épaulettes il a été bâtisse comme ça par ses
amis. Ces jeunes gens étaient toujours ensemble, apprenaient bien et blaguaient en
permanence.
À un moment donné, j'ai aimé leur accompagnement et progressivement, nous sommes
devenus amis et dans ce contexte-là je suis entré dans leur groupe. Le soir, après nos
cours de lycée, nous nous arrêtions à la brasserie du carré Rosetti où, devant d’un verre
de bière, nous blaguions et racontions des histoires et anecdotes avec « Bula ».
- Écoutez les garçons, disait Gelu, je veux vous dire une autre histoire avec Bula
que je l'ai entendu pas depuis longtemps. « Un jour, Bula était en retard à l'école
d’une demi-heure. Quand il est arrivé en classe, son professeur l’a demandé :
Bula, pourquoi es-tu en retard ? J'ai aidé une vieille femme pour la faire
descendre du tram, dit-il. Mais comment, une demi-heure ? s’étonna le
professeur. Eh bien, parce qu’elle ne voulait pas descendre ! réagit-il, de façon
très claire ».
Nous nous sommes mis à rire tous, pendant que Gelu se préparait à raconter une autre
anecdote.
- Attendez, arrêtez-vous que je me suis souvenu d'une autre histoire : « Bula
parlait avec ses amis dans un restaurant. À un moment donné, l'un d'eux lui
demanda : Bula, lorsque tu t’es marié, ta femme était-elle vierge ? Certaines
gens disent que oui, d'autres que non a répondu Bula sans hésiter » et de
nouveau nous nous sommes posés à rire.
- Écoutez, j'ai oublié de vous dire, dit Lascar. Hier, après l’heure de chimie, je suis
allée à la pharmacie pour acheter de l'aspirine. À un moment donné qui pensez-
vous qu’y est entré? « La Molecule » (notre enseignante de chimie) continua
Lascar. Je me préparais à payer et je l'ai entendue demandant : avez-vous des
préservatifs ? Que pensez-vous de cela ? a dit Lascar étonné.
- Eh bien, elle est combinée depuis longtemps avec « Ulysse » (notre enseignant
d’histoire), dit Frank. Elle ne veut pas tomber enceinte pour ne pas avoir de
problèmes avec son mari, dont on parle qu’il est impotent.
Après avoir terminé à rire de notre enseignante de chimie, nous avons commencé à dire
d’autres blagues.
- Maintenant, je veux vous dire, moi aussi, une autre anecdote dit le
Majeur : « Deux vieilles femmes étaient assises sur une banquette dans un
cimetière. L'une d'elles demande à l’autre : écoute ma sœur, quel âge as-tu ? 97
répondit-elle. Eh bien et tu veux rentrer à la maison ? s’étonna l’autre surprise ».
C’est comme ça que nous nous passions, parfois, notre temps quand nous sortions de
notre lycée.
Les samedis et les dimanches soir, nous nous rencontrions à l’horloge de l'Université
après que nous mettions à la même place tout l'argent que nous avions sur nous et en
fonction de la grosseur du paquet, nous entrions soit dans un restaurant pour danser ou
de regarder un spectacle de théâtre ou d'opéra. Souvent, nous participions à des
réunions ce qu'on appelle « réunion de thé » au domicile à l'un d'entre nous, chacun
apportant quelque chose, comme du vin, de la nourriture ou des gâteaux. Nous
écoutions ou dansions d’après des plaques de gramophone que Gelu les apportait d’où
il travaillait à la « Maison des disques Electrecord ». Tout le monde avait une petite
amie, mais pas moi.
Un soir, Lascar a amené à notre rencontre une voisine nommée Cici Steinberg qu’il
voulait me la présenter. Elle était jolie, très sympathique et bien habillée. D'origine, elle
était juive et recevait des paquets de l’étranger de ses parents. Cici, de qu’elle m’a vu,
elle m’a aimé immédiatement et moi, à mon tour, je l'ai trouvée intéressante.
- Cher Puiu a dit Lascar, je suis venu avec Cici, une voisine de la mienne et une
amie de ma famille. J’ai compris ce que tu veux la connaître et, par conséquent,
là-voilà, en chair et en os ! Cici, je te présente mon ami Puiu Munteanu qui m’a
toujours battu à la tête pour te présenter à lui dès qu’il a vu ta photo.
- Bonjour Cici, j'ai dit, je suis enfin heureux de te connaître. Depuis un mois, j’ai
toujours dit à Lascar de t’amener avec lui dans notre groupe et chaque fois il a
dit soit qu’il a oublié, soit que tu es occupée. Je pense qu'il veut te tenir comme
une poupée dans une jolie boîte en carton et de ne pas te montrer à personne.
- Écoute Lascar, a dit Cici, pourquoi dis-tu des mensonges à ce garçon ? J'ai été
toujours disponible et j’ai toujours voulu continuellement connaître ton groupe
d’amis.
- Ça suffit ! Gelu a dit, laissez les querelles ! Vous vous êtes connu et maintenant,
c’est terminé ! Ne perdons pas notre temps dans la rue avec des caquetages. Ce
soir, je veux aller au restaurant « Cina », a dit-il et, en consultant sa montre, il a
continué : d’ici quelques minutes le programme commence. Je suppose que
vous savez qui chante ? Gica Petrescu et Mara Malineanu dans un programme
avec des chansons d’autres fois. Je veux également danser et donc ... en route !
Notre groupe d'amis se mit en marche et pas plus tard nous étions installées à une table
dans le jardin du restaurant « Cina ». À 22 heures environ, le spectacle est commencé
et tour à tour Gica Petrescu et Mara Malineanu ont chanté leurs chansons préférées
d'autrefois, en étant applaudies par le public présent. Pendant ce temps-là nous avons
commandé une grillade accompagnée de la salade de tomates et de concombres, sauf
moi que j'ai commandé du poisson. Comme apéritive on a bu de la « Tuica » de prunes
et après, comme boisson, on a commandé le vin maison qui n’était pas mal du tout.
Lorsque la nourriture est arrivée, Gelu m'a demandé :
- Hé, monsieur l’amoureux, pourquoi as-tu commandé du poisson et pas une
grillade comme tout le monde ?
- Parce que j'aime le poisson de plus que ta viande, je lui ai dit.
- Je sais pourquoi, est intervenu Frank, puisque le poisson que Puiu a commandé
est aphrodisiaque !
- Alors… et en abordant le serveur, Gelu lui a dit : pour ce monsieur, apportez-lui
encore une portion de poisson de plus parce qu’il en a besoin de ce soir !
Tout le monde se mit à rire et ils ont rigolé sur moi. J'étais rouge comme un crabe bouilli
et je ne savais quoi faire pour les apaiser.
Après avoir terminé le programme, la danse est commencée. Moi, j’ai invité Cici à la
danse et pendant le rythme de la musique nous sommes restés sur le ring de danse
jusqu’à la pause. Cici et moi, nous formions un couple parfait ; elle dansait
exceptionnellement et moi aussi. Au cours de la danse, nous avons commencé à nous
embrasser et de temps en temps je lui donnais des petits baisers sur son visage. Au
début, Cici semblait contrariée et même elle a essayé de garder une certaine distance
entre nous. Au fil du temps, cependant, elle a commencé à s'approcher de mon corps,
en enchaînant ses bras autour de mon cou.
À deux heures du matin, notre groupe se dispersa. J'ai pris un taxi et j'ai conduit Cici
chez elle. Dans la voiture nous nous sommes embrassés tout le temps, en nous disant
que la soirée a été un succès et nous nous sentons satisfaits et heureux.
De ce soir-là, Cici et moi, nous étions toujours ensemble et partout. Au fil du temps,
notre relation est devenue de plus en plus étroite et on semblait qu'elle ne pourrait
jamais se briser. Quand je la rencontrais, j'avais toujours un sentiment étrange. Même si
j'avais des problèmes, or j'étais fatigué ou en colère quand je la voyais, mon cœur
s’amollissait comme un morceau de beurre sur une tranche chaude de pain grillé. Je me
rendais compte que j’étais tombé amoureux d’elle et pas une fois je pensais que, peut-
être, un jour, malheureusement elle va disparaître comme toutes mes autres amies qui
sont passées dans ma vie.
Cici était une fille voluptueuse et elle faisait l’amour avec une passion qui me
bouleversait. Elle avait une façon d’agir que je ne pouvais lui pas résister. Parfois, nous
avions ensemble deux ou trois rapports sexuels, après que, le lendemain, nous les
reprenions. Nous avions commencé à maigrir et parfois, nous étions épuisés, mais pas
longtemps après, notre jeunesse gagnait et nous passions de nouveau à l’attaque.
Moi, j’étais devenu plus mature et en même temps plus téméraire. J'ai commencé à
m'habiller mieux et surtout avec du gout, car maintenant, j’étais salarié et je n’appelais
plus à mes parents pour l’argent.
Au cours de l'hiver 1954, je suis allé avec notre groupe de filles et de garçons à Predeal
pour passer nos vacances de Noël et Nouvel An. Nous nous sommes installés dans une
cabane qui avait des lits communs. Le jour, nous faisions du ski ou glissions avec des
petites luges sur les pentes de neige spécialement aménagées et le soir nous passions
dans le restaurant de la cabane, en dansant ou en chantant.
Cici et moi, nous étions inséparables. Après l'arrêt de la musique et de la danse, nous
allions au coucher et bien que fatigué, nous nous immergions dans l’abîme de nos
étreintes, sans nous soucier que nous dormions avec les autres touristes en commun.
Cette période-là, a été la plus belle de ma jeunesse et je ne l’ai jamais oublié.
Ma liaison avec Cici a duré jusqu'en été 1955, quand elle a définitivement quitté le pays,
avec ses parents, en s’installant en Israël. Nous avons continué à nous écrire une année
après que Cici a cessé de répondre. Elle s’est mariée avec un officier de marine.
Dans ses lettres, avant son mariage, Cici me confessait que moi, j'étais le seul homme
qu'elle a aimé vraiment à ce moment-là et si notre destin va changer, peu importe ce qui
arrive, elle restera fidèle, toute sa vie, à nos souvenirs d’amour et à nos moments
passés ensemble.
En restant seul à nouveau, je me suis immergé dans une sorte de mélancolie qui ne me
donnait pas la paix. La nuit, j'avais des cauchemars et pendant la journée ma tête
tournait à cause de l'insomnie et de mon état général d'agitation. J'ai commencé à
prendre toutes sortes de pilules pour dormir et pour me débarrasser des maux de tête.
Je me sentais mieux en présence de mes amis, mais quand j’arrivais chez moi, le
cauchemar reprenait.
Pour me débarrasser de ce stress, j'ai commencé à fréquenter, le plus souvent, toutes
sortes de femmes dont je les changeais comme on change les gants. Aucune ne
m’attirait pas. Aucune n’a réussi à me faire vibrer. Il y avait quelque chose de
mécanique, comme une sorte de vengeance tacite.
Mes amis ont commencé à être préoccupés par mon état général, mais ils ne pouvaient
rien faire. Ils ont essayé de me présenter d’autres filles, ils me faisaient toutes sortes de
concessions, mais j’en refusais obstinément. Je ne pouvais pas oublier Cici et son
absence me marquait profondément.
Cet état de choses a duré plus de dix mois après que, progressivement, j'ai commencé
à me revenir et à me préoccuper intensivement de la stabilité de ma situation.
Le père de Balasan, mon ami de groupe, travaillait au Ministère de la construction de
machines et d'équipement lourd, comme ingénieur. Par l'intervention de cet homme, j’ai
réussi à changer mon emploi de la Banque d’Investissement aux « Usines 23 août », les
anciennes « Malaxa », respectif au chantier de construction qui était affilié à la Section
mécanique en chef de l'usine.
À la Banque d’Investissement, où j'avais travaillé avant, j’ai toujours eu des problèmes
avec Schwartz, le chef du Bureau de ressources humaines, qui me demandait toujours
plus d'argent. J'ai quitté la Banque par démission parce que Schwartz a refusé de me
donner le transfert aux Usines 23 août.
À mon nouveau travail et en tant qu'économiste, je m'occupais du recrutement des
travailleurs pour le chantier de construction, afin de tenir les comptes de leurs travaux et
d'autres tâches collatérales.
Les Usines 23 août, à la même période, avait obtenu des importants fonds
d’investissement pour le développement des sections de production. Dans ce contexte a
été ouvert un chantier de construction annexé à la Section mécanique en chef dont le
chef était un ancien travailleur nommé Iscru Vasile, sans éducation, mais communiste
d’illégalité.
La vie sur ce chantier était spécifique, avec des fluctuations importantes de travailleurs
non qualifiés qui étaient, pour la plupart d’entres eux, des paysans qui habitaient dans
les environs de Bucarest qui venaient ici pour échapper à la collectivisation forcée et en
même temps pour bénéficier d'une qualification au travail. Par conséquent, le travail
accompli par eux était de mauvaise qualité et on ne pouvait pas mettre base sur leur
résistance. Le chef de chantier, Marinica Ion et l’atachamentiste du chantier Varzaru
Nicolae, prenaient de l'argent des travailleurs pour les inscrire sur des travaux fictifs. Pas
une fois, j’ai assisté à l’exécution de mauvais travaux et plusieurs fois j’ai vu des murs
achevés qui tombaient le lendemain, comme dans la légende du Maître Manole.
Peu de temps après mon embouche, le chef de chantier de construction Marinica est
venu à mon bureau où je travaillais et il m’a dit :
- Camarade Munteanu, demain matin, il est nécessaire d’embaucher encore 50
travailleurs non qualifiés qui vont travailler pour élever le mur principal de la
Section des outillages, prévue dans le plan de développement de l’usine. Alors, à
la première heure du matin, vous allez à la deuxième porte de l’usine et vous
allez choisir 50 personnes. Il faut voir qu’ils possèdent leur bulletin d’identité pour
que le Bureau de personnel puisse leur faire les formes d’embauches.
- Bon, mais il y a une semaine, nous avons embauché 60 travailleurs pour le
même travail.
- Oui, mais de ces 60 travailleurs, 25 ne sont plus venus au travail et 25 autres, je
les ai mises à pied parce qu’ils ont cassé quelques-unes des œuvres et à cause
de ça nous sommes encore en retard avec le plan de travail.
- Alors, pourquoi n’embauchons-nous pas de travailleurs qualifiés, par spécialités,
pour ne pas avoir beaucoup de fluctuation et que le travail soit fait de qualité.
- Dans la région de Bucarest, a répondu Marinica, les travailleurs qualifiés en
constructions travaillent en équipe. Chaque équipe est dirigée par un chef qui est
généralement le plus qualifié. Il s’occupe de la formation de son équipe, du
nombre de travailleurs, avec les catégories d'œuvres et de l'argent que son
équipe doit gagner. Maintenant, il est difficile d'embaucher des travailleurs
qualifiés, car ils veulent parfois plus d'argent que le travail qu'ils effectuent.
- Bon, mais comment peuvent-ils collecter plus d'argent si le montant de la main-
d'oeuvre effectué est inférieur à ce qu’ils ont fait en réalité ? Après tout ce que j’ai
vu, moi ici, le camarade Varzaru s’occupe d’établir la valeur des travaux et de la
main-d'œuvre exécutés et avec l’encadrement d’eux dans les normes de travail.
N'y a-t-il pas du contrôle ?
- Voyons, vous êtes encore jeune et vous ne savez pas grand-chose dans le
métier de construction. J’en travaille de plus de 30 ans et j'ai vu toutes sortes de
situations. Plusieurs fois, j'ai été obligé de fermer mes yeux pour garder mes
équipes qualifiées. Si vous ne leur donnez pas l'argent demandé par eux, ils
partent et me laissent avec le travail inachevé. Maintenant, en Roumanie, la
demande de main-d'oeuvre qualifiée est très élevée en raison de la
reconstruction et du développement du pays et ils le savent.
- Alors, pour les travaux qui demandent des travailleurs qualifiés sont-ils effectués
par des travailleurs non qualifiés ? C'est pourquoi on travaille si mal !
- Bien entendu, je dois faire toute sorte d’exhibitions pour la reconstruction de
l'usine tandis que le camarade Iscru Vasile, notre chef, il s’en fut de tout ce que
se passe ici. Quand je vais le voir pour lui dire la réalité, il commence avec la
formule « vive le parti communiste roumain » et alors il me bloque. Il ne sait pas
quoi que ce soit dans le domaine de construction. Il a été nommé chef de la
Section de mécanique en chef parce qu’il est membre du parti d’illégalité et pas
pour sa compétence. En matière de profession, c’est une nullité.
- Qu'est-ce qu’on fait alors avec les documents d’embauches des travailleurs qui
ne travaillent plus maintenant sur le chantier de construction ? On va leur fermer
les dossiers ?
- Non, vous savez, peut-être qu’ils vont revenir s'ils ne trouvent pas du travail
ailleurs.
- Alors, nous allons rester accrochés avec un nombre plus grand de travailleurs
enregistrés qu'ils sont en réalité.
- Oui, c’est vrai. Qu’il vienne le camarade Iscru pour résoudre les problèmes ici !
Le lendemain matin, je me suis présenté à la porte de l'usine. Un groupe d'environ 300
personnes, essentiellement des paysans, attendaient, avec leur carte d'identité, prêts à
être employés. Tous n'avaient aucun métier ou qualification. C’étaient des paysans qui
voulaient se sauver de la collectivisation forcée et ils cherchaient ici un débouché. Tout
le monde se plaignait que les communistes ont pris leur terre, les oiseaux et les animaux
et même les légumes cultivés dans leurs jardins. À la collective, il fallait travailler tous
les jours du matin à cinq heures jusqu’au soir, à huit ou neuf heures. Quand la récolte
était prête, ils recevaient seulement un sac de blé, souvent pas complètement, qui ne
leur suffisait pas plus d'un mois. Ceux qui avaient de grandes familles, non plus. Et
alors, ils partaient pour chercher du travail.
J'ai choisi de cette foule un nombre de 50 personnes non qualifiées et je suis allé avec
eux au service du personnel de l'usine, dans la désolation de ceux qui étaient restés
sans emploi. Certains d’entre eux ne savaient plus comment me remercier et ils me
proposaient même de l'argent que j'ai toujours refusé. Je savais qu’ils sont des gens
malheureux et je ne voulais pas profiter de leur pauvreté, moi-même j’avais eu
beaucoup de problèmes sur cette ligne.
Après leur embauche, les gens ont été pris et distribués sur des points de travail par le
chef de chantier Marinica. Après quelques jours, d'autres travaux ont été mal exécutés,
d'autres murs tombaient.
Les documents pour les payements des salaires étaient calculés par deux
fonctionnaires. L'un d'eux, nommé Constantin Niculescu, y incluait, en plus, en dehors
des travailleurs qui travaillaient dans le chantier, un certain nombre de travailleurs qui
étaient partis. Généralement, il y incluait des travailleurs non qualifiés qui travaillaient en
régie pour que quelqu’un ne soit pas en mesure de vérifier ce qu’ils avaient fait en
réalité. Il modifiait les pontages et quand on payait les salaires qui étaient faits par lui-
même, il encaissait les sommes en espèces, en question, en signant, en faux pour eux.
Tous les jours, il était ivre et pendant les soirées il buvait, avec d’autres travailleurs, des
boissons alcoolisées dans une taverne à proximité du chantier.
Jusqu’alors, je n’avais pas vu une telle chose et il semblait que le tout fût un chaos en
comparaison avec la discipline qui régnait dans la banque d'investissement, où j’avais
activé auparavant. Dans ce chantier, j’ai travaillé une année après que je suis parti dans
armée, pour faire mon stage militaire.

Mon départ dans armée a eu lieu en automne 1958 après avoir atteint l'âge de 20 ans.
J’ai été incorporé pour une période de deux ans à une unité militaire la transmission de
Timisoara dans la caserne « Oituz », où il y avait d'autres spécialités militaires. Après
trois mois, quand j’ai fini le stage nommé « période de l’individu », le chef d'état-major de
l'unité, le capitaine Constantin Niculescu, m’a pris sous sa protection et m’a nommé
« fourrier » à son bureau. J'avais une bonne orthographie, je savais taper à la machine à
écrire et j’avais des connaissances liées pour la tenue des registres, grâce à mes
activités passées. En outre, j'étais très sérieux et en même temps correct avec tout ce
que je faisais.
La plupart de mes collègues d'armes étaient jaloux sur moi parce que j'avais certains
avantages. Je pouvais sortir de la caserne quand je voulais, je ne faisais plus
d’instruction et en étant ami avec le cuisinier je mangeais de la nourriture préparée pour
officiers.
Dans mon temps libre et après le départ des officiers, je lisais toutes sortes de livres et
parfois, le soir, je quittais la caserne pour visionner des films au cinéma ou de théâtre et
d'opéra au « Grand Théâtre d'Opéra et de Ballet » dans le centre de Timisoara. Les
dimanches, lorsque j'avais plus de temps libre, je me suis habitué à m’en aller au Bain
central où je faisais des sudations à vapeur chaude, puis je nageais dans la piscine à
l'eau froide. Je me sentais bien et j’avais commencé à me renforcer. En outre,
cependant, j’aimais tirer à l'arme à feu et non pas une fois, j'ai reçu la qualification de «
très bon » dans une série de compétitions organisées au sein de l'armée.
Vis-à-vis de la caserne Oituz, se trouvait un bâtiment construit en style du Banat où,
parmi d’autres locataires, résidaient deux femmes, relativement âgées, d’environ 45-50
ans.
Ces femmes, qui avaient été nommées par les soldats, tante Marioara et tante Zula,
avaient été, dans leur jeunesse, des dames de consommation dans un bordel. Étant
donné qu’elles n’avaient pas oublié leur ancien métier, elles continuaient à rendre
heureux les pauvres soldats, en échange de petites sommes d'argent, quelques boîtes
de conserve de haricots ou de porc, ou un certain nombre de paquets de cigarettes que
les soldats les appelaient "boom boom ".
À un moment donné, l’officier responsable avec l'alimentation des soldats a observé que
des dizaines de boîtes de conserve, différentes quantités de fromage et de cigarettes
disparaissaient de la chambre des aliments sans se retrouvaient dans les menus
quotidiens. Après avoir fait un contrôle par sondage, il a constaté que les produits en
question ont été volés par deux cuisiniers et vendus à des soldats qui, à leur tour, les
donnaient, sous forme de troc, aux deux femmes. Elles, bien sûr que, ne pouvaient pas
manger toute la quantité de nourriture reçue des soldats et alors l'excédent elles le
vendaient à une cantine en ville.
Un soir, je suis allé moi-même à ces femmes. J’ai frappé à leur porte et après quelques
secondes est apparue tante Marioara qui m'a accueilli avec son sourire.
- Regardez, quel garçon ! Mais, je ne t’ai pas vu auparavant chez nous. Es-tu un
nouveau recru ?
- Non, je lui ai dit. Je travaille comme fourrier à l’État majeur et de mon bureau je
vois beaucoup de mouvement dans votre appartement.
- Entre, s'il vous plaît, pour bavarder un petit peu !
Je suis entré dans un corridor où à l’intérieur il y avait deux portes qui donnaient dans
deux chambres séparées. Au fond du corridor, il y avait une petite cuisine et une salle de
bain utilisées par les deux locataires. Mon hôtesse m'invita à entrer dans la première
chambre où il y avait un lit, un chevet, une table et quelques chaises. Tante Marioara
vêtue d'une robe de chambre décolletée m’a invité à m'asseoir sur une chaise et après,
elle se jeta sur son lit et a laissé voir ses jambes.
- Alors, tu es fourrier et tu connais certains secrets de ton unité militaire !
- Je ne connais aucun secret. J’exécute seulement les ordres que je reçois de
mes supérieurs. Peut-être que les officiers connaissent certains secrets.
- Voyons, voyons, laisse que je sais comment ont marchent les choses chez vous.
Depuis que tu es arrivé à la caserne es-tu allé aux femmes ? As-tu ici une petite
amie ?
- Non, j’y n'ai pas été depuis longtemps et je n'ai pas d'amies à Timisoara. J'ai eu
une amie à Bucarest, d’où je suis, mais elle est partie en étranger pour toujours.
- Quel dommage ! Je n’ai jamais aimé les séparations. Mais qu’est-ce qu’on peut
faire, c'est la vie. Et donc, tu as décidé de nous rendre visite ? As-tu apporté
quelque chose comme conserves ou cigarettes ?
- Non, en échange, j’ai de l'argent. Combien coûte une visite chez vous ? Vous
savez, je n'ai jamais été à une dame comme vous.
La femme a commencé à rire et elle a répondu :
- Pas grande chose. Combien as-tu dans tes poches ? Je sais que vous n'avez
pas d'argent et c’est pour cela que, toujours, je fais une aumône avec vous. Moi,
je ne suis plus jeune et donc je ne peux plus prétendre quelque chose de plus,
de vous. Si tu avais su que je faisais à ton âge... mais oui... le temps, passe.
Allez, déshabille-toi et viens à côté de moi pour te réchauffer. J'imagine que tu es
êtes comme un cheval affamé.
Je me suis vite déshabillé et je suis entré sous le plaid où madame Marioara m'attendait
nue. Je me suis collé de son corps chaud et, maladroit, j'ai posé ma main sur sa poitrine
en le caressant. Mon souffle a commencé à s’accélérer et pendant que mon corps
vibrait, j'ai eu deux orgasmes, l'un après l'autre, sans interruption.
- Mon Dieu, mais je ne savais pas que tu es si ardent, tellement passionné, a dit-
elle. On voit que tu n'as pas été depuis longtemps aux femmes. Tu sais que
j’aime ça.
- Je t’ai dit que je n’ai pas eu depuis longtemps une relation avec une femme.
- Mais alors, qu'as-tu fait ? As-tu fait dans tes pantalons ? et elle a commencé à
rire.
Après un certain temps, je me suis habillé et je lui ai donné un billet de 50 lei. Alors, elle
a dit :
- Tu peux venir quand tu veux !
Depuis, j'ai fréquenté tante Marioara jusque j’ai accompli mon service militaire. Elle a
toujours été gentille avec moi et parfois, elle a reporté ses clients en ma faveur.
Les deux femmes savaient tout ce que bougeait dans la caserne, car chez elles
venaient aussi de nombreux officiers. Elles savaient tout sur les équipements militaires,
savaient à l'avance la date et l'heure quand avaient lieu les exercices d'alarme et elles
annonçaient en même temps les soldats, pour qu’ils soient prêts, afin de s’en bien sortir,
savaient quand on commence les applications et les manœuvres militaires de même
que l’équipement utilisé. Elles savaient tout, absolument tout. Si elles avaient travaillé en
espionnage, n’avaient pas été en mesure d'obtenir tant d'informations.
Vers la fin de la première année de mon stage militaire, dans la caserne a éclaté une
épidémie d'hépatite épidémie en raison de l'absence de contrôle et de l'hygiène. J'ai
aussi contracté cette maladie et j’ai été interné à l'Hôpital militaire de Timisoara, où j'ai
passé un mois et demi après que, j'ai obtenu mon congé de maladie de 30 jours que je
l’ai passé à Bucarest, chez mes parents.
Lorsque je suis retourné à mon unité militaire, j’ai appris qu'un camarade d'armes,
nommé Chitescu Constantin, qui était aussi mon ami, a été envoyé à un bataillon
disciplinaire de deux ans parce qu’il avait tiré avec une arme à feu, de la fenêtre de
l’entrepôt d'armes qu'il gérait, dans une chambre du bâtiment de vis-à-vis où faisait
amour un couple, l'homme et femme, devant leur fenêtre qui donnait dans la direction
d’entrepôt d’armes de notre compagnie militaire, dans lequel se trouvait Chitescu.
Il était un bel homme, brun, avec une mince moustache, aux yeux verts et lumineux et
toujours souriant. Il était grand de 1,80 mètre, avec un corps athlétique et Spartan, à
cause des exercices qu’il faisait chaque jour.
Il était tombé amoureux, depuis un certain temps, de la femme qui faisait amour avec
son mari à sa fenêtre et qui l’avait rencontré dans le marché Oituz, pas loin de notre
caserne, pendant qu’il faisait quelques achats à un charcutier. La femme était belle et
elle est devenue rapidement son amie.
Parce qu’il l’aimait follement, par jalousie et parce que, la dernière fois, elle n’a pas
voulu se coucher avec lui, Chitescu, pour se venger a tiré avec son arme deux coups de
feu, pas pour les tuer, mais seulement pour leur faire peur. Les deux balles sont entrées
par la fenêtre et ont pénétré dans un mur de leur chambre.
Alarmé par cet incident, le couple a annoncé la milice qui, après des recherches, a
constaté l'endroit d’où Chitescu avait tiré et, en collaboration avec le commandant de
l'unité, a envoyé le pauvre Chitescu au bataillon disciplinaire.
J'ai trouvé l’adresse de l'unité du bataillon disciplinaire, où il poursuivait sa peine et je lui
ai écrit une longue lettre dans laquelle je l’accusais pour sa folle idée. Je savais qu’il ne
pouvait pas s’abstenir, car il était assez violent quand quelqu'un s’accrochait de lui, sans
avoir raison. Je lui ai dit qu'il a fait une grave erreur dans sa tentative de s’imposer et de
se venger contre la femme qu’il aimait, mais qu’elle ne l'acceptait plus. Il fallait s’en
séparer comme un homme civilisé et non pas de lui imposer, par la force, son amour. Il
pouvait avoir une malchance de la tuer et alors sa vie avait pu se dissiper pour au moins
20 ans de prison.
Il a répondu avec humiliation et il m'a dit qu'il regrette son geste, mais qu’il n’a pas pu
s’en abstenir. Elle, disait-il, a voulu me rendre jaloux et elle a réussi. Il a réagi sans
contrôle et le résultat a été son incarcération. Tout comme moi, il rêvait d'avoir une
femme affectueuse et de lui être loyale toute leur vie. Il voulait fonder une famille et
surtout d’avoir des enfants. Je ne sais pas ce qui s’est passé après avec lui parce que je
n'ai jamais correspondu avec lui après avoir fini mon stage militaire.
Quand je suis entré dans la deuxième année de militaire, j'ai été transféré à Cluj, au
grand état-major de l'Armée en tant que fourrier personnel du chef de cette unité. J'ai
travaillé ici près de huit mois et après je suis retourné à Timisoara, à mon ancienne unité
militaire, d’où j'ai été libre avec le grade de caporal. Tante Marioara a pleuré quand je
suis allé chez elle pour lui dire adieu. Elle m'a embrassé et m’a souhaité avoir de la
chance dans ma vie. Cette fois-ci, elle n’a pas pris de l'argent.

Après mon arrivée à Bucarest, j’ai végété un mois environ, période pendant laquelle j'ai
commencé à chercher un emploi. Je me suis rencontré avec mes vieux amis, à
l'exception de Frank Sommer, qui était juif et qui était parti en Israël. La première chose
qu’on m’a frappée chez eux était leur sobriété. Ils étaient plus retenus, plus calmes. Ils
ne faisaient plus de blagues comme dans le temps que nous étions ensemble au lycée.
C’est vrai, moi aussi j’avais changé, mais je ne pouvais pas me rendre compte.
En une soirée, la petite amie de Lascar, Olga Constantinescu, est venue vers moi et m'a
demandé :
- Puiu, mon père a un poste de comptable à l’entreprise qu’il la conduit. La
personne qui occupait ce poste est décédée subitement. Veux-tu t’y engager
comme comptable ?
- Bien sûr que je veux. Mais, tu sais... je ne connais pas de la comptabilité et je ne
sais pas si je peux y faire face.
- Ne faites pas de soucis ! Tu crois que tous ceux qui travaillent dans la
comptabilité ont des études de spécialité ? Je parlerai à mon père pour que te
donne plutôt quelque chose de facile jusque tu va t’habituer à travailler comme il
faut.
- D'accord, mais comment pourrais-je faire pour obtenir ce poste ?
- Je prendrai pour toi un rendez-vous avec mon père et puis après ton embouche
tu vas commencer à travailler à l'usine.
Le lendemain soir, Olga m'a appelé et m'a dit de me présenter dans deux jours au
bureau du directeur de l'usine de chaussures « Stefan Gheorghiu » du quartier Dudesti-
Pantelimon, à son père.
Le jour fixé, je suis arrivé avec une demi-heure d’avance et je me suis rendu au bureau
du directeur Constantinescu qui m’a reçu peu de temps après.
- Ma fille m'a dit que vous avez fini votre stage dans l’armée et que vous voulez
travailler pour nous. Qu'est-ce que vous avez étudié ? Avez-vous travaillé dans la
comptabilité ?
- J'ai terminé les cours du lycée Spiru Haret de Bucarest, mais, dans la
comptabilité, je n'ai pas travaillé. J'ai travaillé, en échange, à la Banque
d'investissements comme caissier et au chantier de construction de l’Usine 23
août, comme économiste et après fourrier au bureau pendant mon stage
militaire.
- D’accord, si j'entends bien, vous n’êtes pas étranger des ouvrages de bureau et,
par conséquent, vous pouvez travailler aussi pour nous, d'autant plus que vous
avez obtenu votre diplôme de lycée Spiru Haret qui est un établissement
d'éducation bien côté.
- Je donnerai tout, de mon mieux, pour ne pas vous décevoir, je lui ai dit.
Le directeur a mis sa main sur le téléphone et a appelé le chef de service du personnel.
Il a fait les présentations et ensuite accompagné par celui-ci, je suis allé à son bureau.
Par la suite ont suivi les formes d'emploi et trois jours plus tard, j'étais embouché comme
comptable à cette entreprise.
Ici, je travaillais dans un bureau avec six autres comptables. Je m'occupais de
l'enregistrement des immobilisations et des investissements. Chef de service était une
femme de 30 ans environ avec le nom de Hargalas Emilia, très sympathique et qui m'a
aidé beaucoup, jusqu'à ce que j’ai commencé à entrer dans les secrets de la
comptabilité.
Le service de comptable était en contact étroit avec le service financier, dont le chef se
nommait Ivan Constantin. Cela, un type joufflu, avec un visage rouge et toujours plein de
sueur et aussi avec des cheveux roux et rares, d'environ 40 ans et avec une marche de
mademoiselle, s'occupait, en plus de ses fonctions de service, avec l'équipe artistique
de l'entreprise. Hargalasa, ma chef, avec son mari, était amie et rendait visite à Ivan
Constantin, dont le surnom était Bomby.
Un jour, Bomby, dont j’ai appris, plus tard, qu’il était homosexuel, m’a appelé dans son
bureau et m'a dit :
- Cher Puiu, Hargalasa est très amoureuse de toi, mais elle n’ose pas te montrer,
surtout qu'elle est ta chef. Toujours elle vient dans mon bureau et soupire. Faites
quelque chose... pour la consoler. Au diable... ne t’en rends-tu pas compte ? Si tu
veux, je peux organiser chez moi une partie à qui je peux l’inviter avec son mari
et où éventuellement tu peux danser avec elle et la serrer dans tes bras. Dis,
veux-tu ?
J'ai commencé à rire parce que je n’en pensais pas et ne m'attendais pas à une telle
proposition. La vérité était que j’avais observé quelque chose, un changement, dans son
comportement, mais je n’ai jamais pensé à une telle situation. Moi, je l’ai respecté et
j’étais gentil avec elle parce qu’elle était ma chef et surtout elle était plus âgée que moi,
avec dix ans.
- Que puis-je te dire ? Honnêtement, je suis un peu gêné pour te donner une
réponse plus rapidement parce que je ne me suis jamais attendu à une telle
proposition. Il faut que j’en pense. Moi, je connais la mentalité des femmes de
son âge qui sont toujours changeantes et je n’en voudrais pas avoir des
problèmes plus tard.
- Tu n'en auras pas de problème, a dit Bomby. Je connais bien Hargalasa qui est
une femme très discrète. Qu'est-ce que tu veux, elle est tombée amoureuse de
toi et maintenant elle veut t’avoir dans son lit. Comment peux-tu refuser une telle
offre ?
- D’accord, mais si quelque chose se passe, ultérieurement, alors c’est toi qui va
payer tout à la fin.
- Oh là là... J'ai toujours payé pour tout le monde, y compris les pots cassés !
Par la suite, Bomby commença à rire et avec un geste féminin m’a servi avec un café.
Le lendemain, Bomby m'a informé que son parti aura lieu dimanche prochain, autour de
six heures de l'après-midi à son domicile.
Le jour indiqué, je suis allé chez Bomby qui vivait avec sa mère dans la rue Orzari, pas
loin de ma maison. La table était déjà servie et remplie de toutes sortes de préparations:
poisson en aspic, dinde à l’orange, salade de boeuf, oeufs farcis aux champignons et
plusieurs sortes de sandwichs. Bomby était habillé en style féminin avec une chemise
brodée en soie naturelle et parfumé avec Chanel 5.
- Puiu, aimes-tu ce que j’ai préparé ? Je l'ai préparé tout seul avec mes mains !
- Tu m’as fait une vraie surprise. Je croyais que tu prépares quelque chose de
simple. Bien sûr, ça m’oblige à mon tour.
Tout en parlant, les invités ont commencé à arriver. La grande majorité était des
hommes de l’entreprise où je travaillais.
La famille Hargalas est arrivée en dernier. Elle est arrivée dans une robe noire, très
décolletée et serrée sur son corps, ce qui lui mettait en relief son corps. Elle était brune
avec des yeux en amande et des mouvements ondulés. Son mari était court de stature,
aux cheveux sombres, maigre et avec une figure de paysan collectiviste, même s'il était
ingénieur.
Après les présentations de rigueur, tout le monde s’assit à la table. On a mangé et bu
toutes les bonnes choses qui se trouvaient sur la table. Les esprits ont commencé à se
réchauffer et ensuite la table a été mise de côté et la danse a commencé.
Moi, j'étais très réservé et j'ai refusé de danser, même si Bomby toujours me poussait
de l'arrière. À un moment donné, le conjoint de Hargalasa, qui avait consommé
beaucoup de boissons, s'est endormi sur un fauteuil. Ensuite, elle se leva de sa chaise,
m’a pris de mon bras et nous avons commencé à danser.
Bomby, immédiatement, a mis une plaque de phonographe avec une chanson lascive,
tandis que Hargalasa a enchaîné ses mains autour de mon cou et se colla de mon
corps. Nous sommes restés longtemps embrassés dans le son et le rythme lent des
chansons.
Il était tard et à un moment donné il a fallu que nous partions, car le lendemain
commençait une nouvelle journée de travail. L’un d’invités est resté dormir chez Bomby.
Il était son amant. Je suis rentré chez moi avec des maux de tête et à la région
pubienne. Il a fallu que j’utilise de la glace pour me calmer.
Le lendemain, au bureau, quand j'ai repris mon travail, tout était comme avant.
Hargalasa se comportait comme si rien ne s'était passé. Le même sourire, la même
retenue de sa part. À mon tour, je me suis porté de même. Une semaine est passée et
rien n'a changé.
Au moment donné, en étant dans le service financier, je me suis dirigé vers le bureau de
Bomby et je l’ai demandé :
- Bomby, qu’est-ce qui se passe ? Ai-je eu tort ?
- Tu n'as pas fait quelque chose de mal. Elle est vraiment folle de toi, mais elle
veut que tu fasses le premier pas.
- Quel pas dois-je faire ? Elle veut peut-être que je tombe à genou devant elle et
de la supplier à se coucher avec moi. Rappelles-tu qu'elle est ma chef, est
mariée et a aussi un enfant. Je ne veux pas avoir des complications qui vont
tourner, peut-être, ultérieurement, sur moi. J'ai eu assez de problèmes jusqu’au
maintenant. Je ne tiens pas à en ajouter un autre, à mon actif.
- Écoute, je parlerai avec elle pour vous faciliter une rencontre. Sois plus actif et
éteins-la, au diable...
Je suis retourné à mon bureau et j’ai commencé à travailler. J'ai regardé avec la queue
de mes yeux vers son bureau et je l’ai surpris quand elle me regardait aussi. Je me suis
senti très gêné et même humilié. Je me suis levé du bureau et je suis sorti pour prendre
l'air.
Après deux jours, Bomby m'a appelé à nouveau de son bureau et a dit :
- Je lui ai parlé. Son mari part après-demain à Timisoara pour une semaine en
intérêt de service. C'est maintenant le temps. Je veux vous arranger un rendez-
vous et puis faites ce que vous voulez.
- D’accord, je lui ai dit. Mais, sois très discret !
D’ici deux jours, Bomby m'a téléphoné dans mon bureau et m'a dit :
- Allo, Puiu ? Ton oiseau va y arriver demain soir à six heures à la cafétéria qui se
trouve sur le coin de la rue de Calarasi et Popa Nan. Sois ponctuel et apportez-
moi aussi un gâteau ! Bye, chanceux-le !
- D’accord, j'ai répondu.
Le lendemain, à cinq heures et demie, j’étais installé dans la cafétéria, qui n'était pas
trop loin de ma maison. À six heures exactement, elle est entrée sur la porte et se
dirigea directement vers le comptoir de la cafétéria en passant à côté de ma table, puis
elle se retourna vers moi et m'a dit :
- Quelle surprise ? Je suis venu pour acheter des gâteaux pour ma fille, toi, que
fais-tu ici ?
- Je t'attendais !
- Comment cela ?
- Écoute, Bomby m’a dit de venir ici, à six. N'est-il pas parlé avec toi ?
- Oui, mais je tenais à te taquiner, puis, en riant, elle s'assoit à ma table.
- Écoute Émilia, dis-moi ce que veux-tu de moi ? Et ne me joue pas en feuilles de
vigne.
- J'aime te taquiner, pour voir que tu souffres, a-t-elle répondu.
- Mais pourquoi ? T'ai-je fâché avec quelque chose ? Tu m’as fait tant d'avance
chez Bomby et maintenant comme d'ailleurs toute la semaine, tu n’as pas voulu
me regarder.
- Je ne veux pas tomber amoureuse de toi, a dit-elle.
- Si tu ne désires pas, pourquoi es-tu venu ici ? C’était plus juste de me dire
directement quelles sont tes intentions et tout avait été comme avant.
- Oui, tu as raison. Je suis stupide !
Puis, nous avons servi du gâteau et du café. En sortant, elle a acheté une boîte de
gâteaux pour sa fille. En descendant dans la rue, je l’ai dit :
- J’habite, pas trop loin d'ici. Si tu veux, nous pouvons écouter quelques mélodies
et boire un Vichy. Dis ! es-tu d'accords ?
- Oui, a-t-elle dit.
Nous avons pris ensuite la direction de ma maison et une fois à l'intérieur, elle a
enchaîné ses bras autour de mon cou et m'a embrassé passionnément. Je ne sais pas
quand nous nous sommes déshabillés. Nous avons fait l'amour deux fois. Puis, j’ai mis
le gramophone à chanter et nous avons bu un petit verre de Vichy.
En étant à côté dans mon lit, nous avons commencé à discuter :
- Émilia, dis-moi, pourquoi as-tu fallu faire tant de tapage pour que, finalement,
nous arrivions à faire ce que réellement tu as voulu. Je me demande ce qu’as-tu
trouvé chez moi et pourquoi tu mets en danger ta vie de famille ? As-tu de
problèmes avec ton mari ? Ne t’aime-t-il plus ?
- Au contraire, il m'aime passionnément et c’est pour cela qu’il est très jaloux. Il est
très violent et même capable de me tuer si je l’avais trompé.
- Alors, pourquoi as-tu le fait et pourquoi as-tu choisi ma personne. Tu es une
femme en pleine maturité et je ne pense pas que ton mari te néglige.
- Je t'aime depuis quand je t’ai rencontré, pas pour ton allure, mais pour ton
caractère que tu as et que, malheureusement, à mon mari lui en manque. J'ai
ressenti le besoin de me rapprocher de toi et d'explorer votre âme. J'ai toujours
voulu que mon partenaire de ma vie qu’il soit comme toi, mais malheureusement
je n’ai pas eu cette chance. Je ne suis pas une femme qui tombe amoureuse et
veut coucher avec le premier venu. Je voulais tout simplement me sentir bien et
non pas stressée comme je suis toujours avec mon mari qui, même au cours de
nos relations intimes, m’interroge si je me couche avec d’autres hommes et que
s’ils sont mieux au lit que lui. Or, toutes ces choses-là me blessent profondément
et alors je me suis dit qu'il va falloir, effectivement, le tricher pour être en mesure
de lui répondre affirmativement à ses questions.
- Et donc, tu m’as choisi pour te venger contre ton mari ! Quelle idée stupide !
- Ne parle pas comme ça ! Tu ne sais pas comment je suis arrivée jusqu’ici. En
outre, c'est la première fois que je trompe mon mari. S'il te plaît, crois-moi que je
ne suis pas désolé pour mon geste et peut-être plus tard, qui sait, je pourrais le
regretter.
Émilia est restée chez moi deux heures environ et après je l’ai conduit au tram. Elle était
heureuse et, je peux dire même, bouleversée et tout le temps elle me serrait de mon
bras.
Le lendemain matin, Bomby m’a cherché et dans son bureau il m’a servi un café.
- Eh bien, dis-moi comment s’est-il passé ? Je suis très curieux. Toute la soirée j’ai
pensé seulement à vous. Est-elle venue à la rencontre ?
- Oui, je lui ai répondu.
- Et ? Et ? Le miracle s'est-il produit ?
- Nous avons été très sages tous les deux. Nous avons mangé chacun un gâteau
et ensuite, chacun de nous est allé chez lui.
- Oh, tu m’as déçu !
- Pourquoi ? Qu’est-ce que tu voulais ?
- Je voulais que vous soyez heureux !
- Tout le monde est heureux à sa manière et ce fait n'apparaisse pas par accident.
Le bonheur ne se gagne pas à la loterie ou par hasard. Il faut que tu lutes pour
lui.
- Bon, on va parler une autre fois à ce sujet.
Ma relation avec Émilia a duré trois mois et s'est terminée abruptement. C'était un
samedi. Bomby est venu dans notre bureau et parce que nous étions tous seuls, il s’est
adressé à tous les deux, à la fois :
- Écoutez mes enfants ! Moi, cet après-midi, je veux acheter un parfum et
quelques cravates. Pourriez-vous venir avec moi pour me donner une
suggestion ? Tout ce que j'ai acheté jusqu’au présent je ne les aime plus. Dites-
moi que vous voulez ? S'il vous plaît...
Ni moi ni Emilia, nous n’avons pas réalisé, pour le moment, qui était en effet l'objet de
cette invitation.
- Oui, nous avons dit, en même temps.
Après le programme de travail, nous sommes partis tous les trois avec le tram jusqu’aux
Halles Traian. Ici, nous sommes entrés dans une droguerie et Bomby a acheté un
parfum et deux cravates.
- Oh, je suis content parce que j'ai acheté quelque chose de nouveau. J’attends
avec impatient de les porter. Venez mes enfants que nous allions à cette
brasserie pour boire une pinte de bière froide. C’est moi qui vais payer. Quelle
chaleur fatigante !
Nous y sommes entrés et Bomby a commandé la bière. Nous avons bavardé une
dizaine de minutes, puis il a dit :
- Excusez-moi deux minutes parce que je veux téléphoner à ma mère, à la
maison, pour ne pas oublier de prendre ses médicaments. Dernièrement, elle a
commencé à oublier.
Il est allé au téléphone et a parlé quelque chose. Puis, en revenant, il nous a dit :
- Il faut que je m’en aille chez moi, car ma mère ne trouve pas ses médicaments et
elle doit les prendre immédiatement. Vous pouvez y rester. Finisez votre bière.
Bye et à demain. Soyez sages mes enfants !
Après son départ, environ 10 minutes, qui croyez-vous qui est apparue dans le
restaurant devant la porte ? Hargalas, le mari d’Emilia. Il nous cherchait avec son regard
et quand il nous a vus, se dirigea vers nous et, en s’adressant à Émilia, lui a dit très
nerveux :
- Putain, salope ! Puis il a pris Émilia de son bras et l’a fait sortir de restaurant.
Le téléphone, que Bomby a donné, était adressé à Hargalas, pas à sa mère.
Le lendemain, Émilia ne s’est plus présentée au bureau. Elle s’est absentée plus d’une
semaine. À son retour au bureau, elle portait des lunettes de soleil pour cacher les
meurtrissures de ses yeux.
Dans une semaine, j'ai été transférée au service de contrôle financier interne au sein de
la même entreprise. Avec Bomby j’ai cessé à parler pour toujours. Quand je le voyais je
le contournais et je me faisais que je ne le vois pas.

Mon nouveau lieu de travail se trouvait dans un bâtiment voisin avec le pavillon
administratif. Dans mon bureau, travaillait encore un réviseur-comptable qui, comme
moi, avait la tâche principale de travail à faire des inventaires des gestions de matériaux.
Le travail n'était pas trop difficile parce que la manipulation des matériaux était faite par
les gestionnaires et les personnes affectées pour cette action.
À un intervalle de trois mois, chacun d'entre nous, nous étions cooptés, pour un délai
d'un mois, dans les équipes de contrôle financier interne (C.F.I.) du Ministère. Parfois
même, nous partions dans la province, à diverses entreprises qui appartenaient à ce
ministère.
La Direction du contrôle financier interne du Ministère était organisée par services.
Chaque service couvrait et vérifiait une fois par an, les entreprises qui faisaient partie du
ministère respectif l'industrie du cuir-tannerie, chaussures, articles en cuir et des gants.
L’entreprise dans laquelle je travaille faisait partie de l'industrie de la chaussure et donc
elle était vérifiée par le service CFI de cette branche.
Le chef de service CFI pour l’industrie de chaussures et articles en cuir était un
quelconque Gamalet Constantin, âgé de 50 ans, grand membre du Parti communiste
roumain d’illégalité qui a joué plus tard un rôle important dans ma vie.
Au cours de la période où j'ai travaillé à l'usine « Stefan Gheorghiu », j'ai été coopté à
plusieurs reprises dans les équipes du ministère. Chaque fois, j'ai reçu des honneurs
parce que les contrôles que j’ai faits ont été côtés avec un bon niveau. Je me suis profilé
sur l’activité d'investissement et de construction parce que je connaissais bien ce
secteur, à la suite de mes activités précédentes à la Banque d'investissement et aux
Usines 23 août.
En même temps, j'ai décidé d'entrer à la faculté, cours sans fréquence, à l'Académie des
études économiques, Faculté de Cybernétique économique et informatique.
Mon option préférée, la médecine, il a fallu que je l’abandonne, car il n'y avait pas de
cours sans fréquence et aux cous réguliers je n'avais aucune chance en raison de mon
origine de petit-bourgeois de mon père et de manque d'argent pour mon entretien. Mon
père ne me donnait plus de l'argent depuis longtemps. J'ai passé les examens de la
faculté et en étant accepté, j'ai réussi à obtenir une moyenne assez élevée.

Académie d'Études économiques (A.S.É.) de Bucarest se trouve dans « Piata


Romana » et a été fondé en 1913 en vertu d'une loi promulguée par le roi Carol I. À
l’époque, elle s’appelait « Académie de Hautes Études commerciales et industrielles » et
avait la tâche de former des spécialistes dans le domaine de l'économie du pays.
En 1967, le nom a été changé à celui qu'il porte aujourd'hui. Elle a été et elle est la plus
prestigieuse institution d'enseignement supérieur de Roumanie, avec profile économique
et d'administration publique, en étant également qualifiée comme l'une des premières
universités en Europe, qui a formé au cours de son histoire, des milliers de spécialistes
dans le domaine économique, par le contenu et le processus de l'éducation moderne et
l'implication dans des relations de partenariat stratégique avec les plans économiques et
sociaux, nationales et internationales.
Académie des Études économiques a toujours été attaché à la tradition de la libre
pensée, la liberté académique et de la suprématie de la loi.
La coupole de l’édifice de l’Académie est liée par la « légende de la bille », qui fait partie
du folklore des étudiants. On dit que, la bille, qui se trouve au sommet de cette coupole,
n'est pas une, n’importe quelle bille. Elle tombera de son socle lorsque la première
étudiante « vierge » sera diplômée de cette institution. Or, depuis que l’édifice a été
construit, elle n’est pas tombée jusqu'à aujourd'hui.
La bille a été le point de départ pour réalisation des fresques de la salle de lecture de
l'Académie qui ont été réalisées par le peintre Sabin Balasa, l’initiateur de la
Renaissance artistique et de culture de Roumanie. Selon sa théorie, « la Renaissance
ne se consomme pas historiquement, dans une période de réévaluation des valeurs,
mais elle accompagne, comme un état d'esprit, la démarche du créateur de culture ».

Une fois entré à la Faculté, j'ai été promu comme réviseur comptable principal agréé et
transféré de l'usine « Stefan Gheorghiu » au Ministre, au Bureau C.F.I, dirigé par
Constantin Gamalet.
Il était un homme endoctriné, communiste d’illégalité, en tant que membre du Parti
communiste roumain. Grâce à sa fonction, de même qu’aux hautes relations dont il les
avait, Gamalet abusait continuellement de ses employés dans sa subordination, en les
rendant des jours amères pour toutes sortes de problèmes imaginaires. En même
temps, il profitait aussi des cadres d’administration des entreprises contrôlées, en leur
demandant de lui faciliter certains avantages personnels notamment lorsque ces unités
étaient contrôlées par ses équipes. Dans une situation, dans laquelle ils refusaient, il les
menaçait avec leurs licenciements ou de les sanctionner, ce qu’eux, de peur, lui
satisfaisaient toutes ses demandes. De ce fait, personne ne l’agréait et tous l’évitaient
comme par le diable. En outre, il n'était pas licencié en études supérieures qui étaient
une condition obligatoire pour son emploi, il fonctionnait avec une dérogation
ministérielle.
En ce qui concerne sa vie personnelle, il était buveur, coureur de jupons et il souffrait
d’épilepsie. Il n'était pas marié.
Le service qu’il conduisait est composé de huit réviseurs-comptables, la plupart avaient
des études supérieures et hautement qualifiées de point de vue professionnel.
J'ai commencé à travailler dans le service C.F.I., d'abord en tant que membre des
équipes ministérielles et, plus tard, en tant que chef d'équipe, à la suite de mes bons
résultats dans cette activité. Je partais, très souvent, dans la province où j’y restais
environ 30 jours et après, je retournais à Bucarest et je délivrais à Gamalet mes
constatations contenues dans un rapport avec lequel Gamalet faisait des propositions,
au ministre, pour l’amélioration des activités vérifiées, ou en cas d'irrégularités pour
appliquer des sanctions ou licenciements du personnel d’administration.
Parfois, je restais à Bucarest, dans le ministère, quelques jours seulement au cours du
traitement de mes rapports, puis, de nouveau, je partais à une autre entreprise, en
province ou en capitale.
Tout le temps, j’avais mes bagages faits. Ma vie personnelle avait commencé à se
détériorer, car le temps affecté pour elle était très petit. Dans la plupart des cas, je
travaillais 10, 12 ou même 14 heures par jour dans les entreprises vérifiées et pendant
le temps qui restait je dormais pour me récupérer.
Lorsque parfois, j’avais plus de temps libre, je visitais la ville dans laquelle je me trouvais
ou ses environs, en admirant toutes les beautés que je voyais dans ma route. La
meilleure chose que j'ai aimée pendant mes voyages, c'était que j’avais la possibilité de
connaitre mon pays et les habitudes des lieux visitées.
Dans de nombreux cas, je vivais à l'intérieur des entreprises vérifiées, parfois dans de
mauvaises conditions pour économiser le misérable montant de 18 lei par jour quand je
n’habitais pas dans un hôtel.
Le salaire que je gagnais, de fois, ne couvrait pas la totalité de mes dépenses. L'un est
d'avoir un emploi stable et une autre est de travailler tout le temps avec la valise derrière
toi. Par conséquent, j’ai été toujours incapable de mettre à côté de l'argent.
En outre, cependant, il était nécessaire d’apprendre et de passer mes examens à
l'université, ce qu’essentiellement, mon temps libre était presque comblé.
Quand j'étais à Bucarest, je continuais à me rencontrer avec mes amis soit à une bière
soit à un film ou à un « parti de thé » tenu par l'un d'eux. J'étais toujours seul, sans une
copine stable, parce que mon temps de travail professionnel ne pas me donnait le droit
d'avoir une relation relativement longue.
Je ne pouvais pas m’attacher à une femme et de faire amour avec elle par
correspondance. Par conséquent, la plupart de mes relations féminines ont été de
courte duré.
Les femmes, par leur nature, quand elles aiment, veulent que leur homme soit toujours à
leurs côtés, à les caresser, de les protéger, de communiquer et surtout de faire amour
avec elles. Par conséquent, j'ai commencé à penser de trouver une femme stable, mais
sans trop d'obligations.
Au début du mois d’août 1964, j'ai participé à un parti de thé organisé par Gelu, mon
ami. Lors de cette partie, est arrivé, en qualité d'invités, une paire, homme et femme,
des connaissances de mon ami. L'homme s’appelait Valentin et sa copine Otilia.
Valentin, semblait et était en fait beaucoup plus jeune que son amie Otilia. Elle était
d'environ 40 ans, mais cela ne semblait pas avoir son âge, à cause de son parfait
maquillage et de son élégance. Elle était relativement belle et habillée avec bon goût.
Au cours de la partie, j'ai dansé avec elle à plusieurs reprises et à son départ, elle m’a
glissé une petite note avec son numéro de téléphone. Ma curiosité d’homme m'a fait de
lui téléphoner le jour suivant :
- Allo, bonne soirée... Madame Otilia ?
- Oui, dit-elle. Qui est à l'appareil ?
- Je suis Puiu Munteanu, la personne avec qui vous avez dansé à la partie de
Gelu
- Oh, Monsieur Munteanu ! Quel plaisir de vous entendre !
- Vous savez, je me suis permis de vous appeler à la suite de la note que vous
m’avez donnée au moment de votre départ de Gelu.
- Oui, je me souviens... Vous m’avez fait une bonne impression, et c’est pour cela
que j’ai voulu parler avec vous.
- La même impression est aussi pour moi !
- Vous êtes sympathique...
- Gelu est l'un dès mes meilleurs amis et nous nous comprenons très bien
ensemble. Malheureusement, ces derniers temps nous n'avons pas eu le temps
de nous voir parce que par la nature de mon emploi, je suis presque toujours
parti en province.
- Mais, que faites-vous ?
- Je travaille dans le Ministère de l'Industrie légère comme réviseur-comptable
agréé.
- Oui, c'est un travail fatigant et de responsabilité !
- Pour être honnête, je suis entré dans cette activité pas pour mon plaisir, mais
pour la nécessité de gagner ma vie. Mon rêve de ma vie a été de devenir
médecin, mais en raison de certaines circonstances défavorables pour moi, il a
fallu que j’en renonce.
- Quel dommage ! Vous savez, mon mari est médecin et il travaille dans une ville
près de Bucarest.
- Oh, vous êtes marié ? Mais, qui est le monsieur qui vous a accompagné hier
soir ?
- Valentin ? C’est mon ami ! Vous savez, mon mari est toujours parti et je reste
toujours seule. En outre, ni les relations entre nous ne sont pas les meilleurs.
Mon mari est combiné avec une autre femme, qui l’a attiré dans sa toile
d’araignée et donc, à cause de cela, il me néglige, non seulement moi, mais
aussi mon petit garçon. Par conséquent, je me suis fait un ami parce que je me
sens parfois seule et j'ai besoin d’avoir quelqu'un à côté de moi pour me parler
gentiment, pour me respecter et me protéger. Malheureusement, ni Valentin n’est
pas l'homme que je voulais avoir. Même s'il est attrayant, Valentin est également
toujours très jaloux et il me demande de divorcer de mon mari. Pour vous donner
un exemple récemment, lorsque j'ai quitté hier soir la maison de Gelu, Valentin
m’a donné deux gifles et m'a brutalisé parce que j’ai dansé avec vous. Par
conséquent, je pense que je mettrai fin à ma relation avec lui. Par ma nature, je
suis une femme très sensible à tout ce qui m'entoure et j'ai toujours opté pour
avoir un homme qui respecte ma sensibilité et en même temps, qu’il soit aussi
sensible comme moi. Or, ce désir de ma vie est très difficile à atteindre. Dans un
autre ordre d'idées, je ne peux pas divorcer, parce que j’ai 40 ans et donc je ne
suis plus à l'âge laquelle je pourrais refaire ma vie. En outre, j’ai aussi un garçon,
que j'aime et je ne veux pas qu'il me juge, plus tard, que j'ai rompu avec son père
biologique. Voici donc, en quelques mots, qui je suis !
- Oui, c’est très triste votre histoire. Ni moi, je n'ai pas eu trop de chance dans ma
vie. Peut-être qu'un jour, je vais vous dire les difficultés que j’ai traversées dans
ma vie. Aujourd'hui, dans ma vie il n'y a pas de femme, mais j'ai toujours voulu.
Comme vous, je suis un homme tempéré, sensible et avec la même intention
d'en avoir une femme, à côté de moi, qu’elle me respecte est que je la respecte
sincèrement, mais sans beaucoup d'obligations que je ne peux pas tenir, à
l'heure actuelle, parce que par la nature de mon emploi je suis toujours absent
pour de longues périodes de temps. Je voudrais être ami avec vous parce que
j’ai l’impression que nous avons les mêmes points communs. D'autre part, mon
désir ma vie est de fonder une famille et avoir des enfants. Or, dans nos
conditions, une telle option est exclue. Je ne voudrais pas m’engager avec vous
dans une relation qui, plus tard, va se rompre, parce que, par hasard, un jour, je
me marierai avec une femme pour que je réalise le rêve de mon existence. Je ne
voudrais pas qu’après cela que nous ne nous saluions plus ou que nous soyons
des ennemis. Je voudrais que nous restions de vrais amis, mais chacun de nous
va suivre son destin.
À un moment donné, j'ai entendu un soupir dans le téléphone et on semblait qu’Otilia
pleurait :
- Il me semble ou en réalité, pleurez-vous ? Ai-je dit quelque chose qui vous a
bouleversé ?
- Oh, non, non... au contraire, je suis très touché par vos paroles ! Je voudrais si
c’est possible de nous revoir et de continuer notre discussion. Ça m’a fait du
bien !
- Moi, je suis libre demain et je pourrais être en mesure, dans la soirée, de vous
rencontrer. Où pensez-vous que nous pouvons nous revoir ?
- J'ai une voiture et je peux venir chez vous à vous prendre, puis nous pouvons
aller pour nous promener en dehors de Bucarest. Je veux bien respirer un peu
d’air pur !
- Bien sûr, j’habite 178, rue Popa Nan. Il s'agit d'un bâtiment avec des fenêtres qui
donnent à la rue et dans ma chambre je peux vous voir quand vous êtes arrivée.
Alors, à quelle heure environ allez-vous venir chez moi ?
- À six heures, est-ce bien ?
- Bien sûr. Alors, je vous attends à six heures !
- Au revoir et à demain !
Après avoir fermé le téléphone, je suis resté méditatif. J'étais impressionné par la
discussion que j’ai eue avec Otilia et je pensais que peut-être cette femme peut me faire
sortir de mon quotidien. Peut-être qu’avec elle je pourrais trouver la paix que j'ai toujours
désirée. Le lendemain, au moment convenu, Otilia est arrivé et a klaxonné de sa voiture.
J’ai rapidement descendu les quelques marches de ma maison et je me suis embarqué
près d’elle.
Une fois arrivés à la « Chaussée », nous nous sommes arrêtés au restaurant « Bordei »,
où nous avons commandé de la bière et de petites saucisses (mititei - une spécialité
roumaine) et puis nous avons commencé à parler. Otilia était venue dans un deux-
pièces vert pâle, très élégant et portait un collier d'ambre assorti avec ses boucles
d'oreilles en forme de semi-lune. Ses mouvements étaient très lents et étudiés.
- Quelle jolie ambiance c’est ici, a dit Otilia. J'ai toujours aimé venir ici, où j’ai
trouvé tout le temps un coin tranquille exactement ce dont j’en ai besoin.
- Oui, en effet. Il est très agréable.
- Quand j'étais petite-fille, mes parents venaient ici et dans les environs, avec moi
et depuis je suis resté dans mon image avec les allées du parc « Herastrau », le
lac et les oiseaux que je voulais les prendre, en courant après elles, mais jamais
je ne pouvais les capturer. Comment le temps passe-t-il si vite !
- Dites-moi Otilia, quelle est ta profession de base ? Travailles-tu ou restes-tu à la
maison ?
- Je suis décoratrice au Théatre Nottara et dans mon temps libre je fais des
traductions de l'allemand, l'anglais et le français. Mes parents se sont occupés
assidu de mon éducation, mais depuis que je me suis mariée, je n'ai pas pu
continuer mes études. J'aime les arts en général et parfois je fais de la peinture.
Quand je fais de la peinture, je préfère les paysages parce qu'ils me donnent un
sentiment de force et de liberté.
- Oui, il est très beau ce que tu me dis. Malheureusement, je n'ai pas eu ta chance
pour que mes parents prennent soin de mon éducation. Je me suis débattu seul
dans la vie pour obtenir une petite place dans la société. J'avais d'autres
aspirations qui, malheureusement, ne se sont pas matérialisées.
- Pourquoi parles-tu comme ça ? Tu es encore jeune et tu as assez de temps à
faire ce que tu n’as pas pu réaliser !
- Peut-être, mais présentement, il existe certains obstacles de qui, pour l'instant, je
ne peux pas m’en débarrasser.
- Quels sont ces obstacles ?
- Je t’en dirai une autre fois. Je ne veux pas gâcher ce soir. Je me sens très bien
ici, avec toi.
- Eh bien, je n’en insiste pas. Quand tu vas considérer, je t’écouterai avec plaisir
et, qui sait, je pourrais être en mesure de te donner un conseil aussi. N'oublie
pas que je suis plus âgée que toi. Puis Otilia a commencé à rire.
- Otilia, je lui ai dit, demain, malheureusement, je dois aller à Brasov avec une
équipe de réviseurs-comptables à la fabrique de chaussures. Comme tu peux le
voir, ma chance ne me sourit pas trop. Puis-je t’appeler quand je serai là ? Peut-
être, qui sait, tu pourras t’en aller avec ta voiture à Brasov et, éventuellement,
que nous fassions un tour sur la montagne de « Tampa », parmi les pins de là-
bas. Tu peux avoir aussi un sujet de peinture...
- Bien sûr, tu peux m'appeler à tout moment. Très bien que tu me l'as dit, pour que
je puisse m’arranger, à mon tour, pour un jour ou deux.
- Alors, nous nous sommes entendus. Quand j’y arrive, je t’appellerai dès que
possible pour te dire où je suis hébergé.
- Bien, elle a dit.
Après que nous avons fini de manger, j'ai payé et Otilia m'a conduit jusque chez moi.
Avant de partir je l'ai embrassé long temps dans la voiture. J’ai voulu l’inviter chez moi,
mais immédiatement j'ai changé d'avis. Je ne voulais pas forcer les choses. Je voulais
qu’elle fasse le premier pas.
Dans environ une demi-heure, Otilia m'a appelé et m'a dit qu'elle est restée
profondément impressionnée par mon comportement et que je suis un homme comme
elle l'a toujours rêvé.
Le lendemain, je suis allé à Brasov. Après m’avoir installé dans un hôtel à côté de
Tampa et j'y ai résolu certains problèmes qui faisaient l'objet de ma venue, j'ai appelé
Otilia et je l'invite à Brasov. Elle m’a dit que va arriver samedi prochain et qu’elle y
restera jusqu'au lundi matin. Je lui ai donné l’adresse de mon hôtel et un numéro de
téléphone à qui elle pouvait m’appeler quand elle arrivera à Brasov.
À ce jour-là, près de cinq heures de l'après-midi, Otilia m'a appelé et m'a dit qu'elle est
arrivée et qu’elle se trouve dans le hall de l'hôtel. Je suis parti immédiatement avec une
voiture à l'hôtel, où elle m’y attendait. Nous sommes montés dans ma chambre et nous
avons commencé à nous embrasser, pendant que nous nous arrachions nos vêtements.
Nous avons ensuite plongé dans notre amour profond abîmé. Elle m’a fait le don de soi
sauvagement, mais en même temps, avec beaucoup de délicatesse. Au cours de notre
étreinte, Otilia pleurait et me baisait, en murmurant dans mes oreilles pour que je ne la
quitte jamais.
Le soir, nous sommes sortis ensemble et nous avons mangé dans un restaurant du
centre-ville, après quoi nous sommes retournés à l'hôtel et nous avons fait l'amour à
nouveau, jusqu'au matin.
Le lendemain, aux environs de midi, après un sommeil réconfortant, nous avons mangé
vite au restaurant de l'hôtel et puis nous sommes montés sur Tampa.
Pendant la nuit, il a plu un peu. Les gouttes de pluie qui ont été restées suspendues sur
les branches des pins s’évaporaient lentement sous le soleil de l’après-midi et se
transformaient en ondes de vapeur qui se mélangeant, dans l'atmosphère ozonée, avec
l'odeur des arbres et la végétation. Nous respirions ce parfum, en écoutant les chorales
d'oiseaux qui ne s'arrêtaient pas de chanter que si quelqu'un les coupées. De temps en
temps, on nous coupait notre chemin un cerf nomade ou un écureuil qui se grimpait sur
une branche d'arbre et nous regardait avec ses yeux petits et curieux. Dans la féerie du
décor, Otilia a fait quelques croquis sur quelques feuilles de papier qu’elle les eût dans
son sac. L'un d'eux, qui était, après moi, le meilleur et qui représentait un écureuil monté
sur un arbre, elle me l'a donné et je le garde toujours, même aujourd'hui.
Otilia est resté à Brasov jusqu’à la fin du lundi. Avant de partir, nous sommes allés
ensemble à l'atelier de création de l'entreprise où j’étais détaché et je lui ai acheté une
paire de chaussures et un sac en cuir jaune, très bien faits. Otilia est resté très
impressionné par mon geste et m'a remercié. Lorsque nous nous sommes séparés,
avant d’entrer dans sa voiture elle m'a dit :
- Puiu, ne m'oublie pas !
Quand je suis retourné à Bucarest je l’ai rencontré à nouveau, mais cette fois-ci, chez
moi. Otilia m'a dit qu’elle a brisé sa relation avec Valentin. C’était le début de septembre
et j'ai commencé à me préparer pour passer mes examens à l'université.
Dans une soirée, Otilia a organisé avec son mari, chez eux, un parti où j'ai été aussi
invité. Comment je ne pouvais pas aller seul pour ne pas être suspect par son mari,
Otilia, m'a proposé que je dois être accompagné par Eugenia, ma cousine, qui vivait
chez mes parents et de qui Otilia avait connaissance.
Eugenia, avec son nom de famille Cristea était une parente de ma mère, qui avait perdu
ses parents et en étant seule à un âge proche de la mienne, habitait maintenant avec
nous. Elle n’avait aucun autre parent pour avoir soin d'elle.
Dans la soirée respective, accompagnée par Eugenia je suis allé chez Otilia, où de
nombreux invités étaient présents à cette réunion. Otilia était très élégante et en qualité
d’hôte était en train d’inviter les personnes qui s’y trouvaient déjà, à dîner.
Quand elle m'a vu en arrivant, accompagné par ma cousine, est venu nous accueillir et
en même temps, elle nous a présenté à son mari comme une famille qu'elle connaissait
au théâtre où elle travaillait et où, apparemment Eugenia était également employée. Son
mari était en train de s’entretenir avec un de ses collègues à qui j'ai reconnu
immédiatement Corneliu Cautis, mon camarade de classe primaire qui a eu l'incident
avec la professeure de langue russe. Bien sûr que Corneliu m'a reconnu aussi et dans
une pause, nous nous sommes souvenus avec nostalgie de farces que nous les faisions
lorsque nous étions étudiants.
Après que les invités se sont assis à la table, à côté du mari d’Otiliei s’est installée une
dame plus jeune qu’Otilia, qui était visiblement préoccupée de son mari, en lui servant
des hors-d'œuvre et seulement lui du vin. De plus, elle gesticulait et faisait toutes sortes
de mauvaises blagues sur la personne d’Otilia qui se faisait qu’elle ne l’entend pas. Elle
était une femme d’environ 30 ans, châtaigne avec de cheveux longs, des sourcils
arqués, longs cils et les yeux verts. Elle était très belle et avait une tenue élégante. Elle
portait une robe à paillettes en couleur ambrée et ses mouvements étaient gracieux. De
temps en temps, elle jeta son regard sur moi et me souriait avec charme. Je me
demandais qui est cette femme qui me regarde avec tant d’insistance.
À un moment donné, après que le repas a pris fin, Otilia s’est approché de moi et a
murmuré que la dame concernée était la maîtresse de son mari et que son nom est
Carmen Popovici. Dans le même temps, elle m'a demandé de l'inviter à une danse et de
lui proposer une rencontre afin de donner une leçon à son mari.
Otilia avait discuté plusieurs fois avec son mari sur sa maîtresse et lui, sans se gêner, a
dit qu'en effet, qu’il l’aimait et qu’il était en amour avec elle depuis un certain temps. Son
mari avait commencé à négliger sa femme et même, il avait l'intention d’en divorcer. En
même temps, il avait presque oublié qu’il a un enfant, en le négligeant à tous points de
vue.
Quand j'ai entendu parler de ce complot, d'abord, j'ai refusé, car je ne voulais pas me
mettre dans une situation pénible devant le mari d’Otiliei et en même temps de lui
donner l'impression que j'étais un imbécile.
Après tout, à l'insistance d’Otilia, j'ai accepté ce jeu parce que je connaissais certaines
choses sur cette question dont Otilia m’avait parlé auparavant. À un moment donné,
quand la dame en question a cessé de danser avec Valmar, le mari d’Otilia, je l'ai invité
à danser.
- Bonsoir, j'ai dit, auriez-vous l’obligeance de m’accorder cette danse ?
- Avec plaisir, a dit-elle et nous avons commencé à danser.
- Je me permets de vous faire un compliment, je lui ai dit. Vous êtes une femme
très belle et très élégante.
- Vous êtes gentil, mais je pense que vous exagérez. Je suis une femme comme
les autres.
- Et, j’ai continué, je pense que vous avez cassé de nombreux cœurs des
hommes.
- Soyons sérieux ! Je ne fais pas partie de la catégorie qui casse de cœurs,
comme vous le dites. Je suis une femme qui, en effet, j'aime la compagnie des
hommes, mais seulement dans la mesure où leur comportement est civilisé.
- Êtes-vous marié ? Je l'ai interrogé à nouveau.
- Non, pas encore et je préfère pour le moment de garder mon indépendance.
- Quelle est votre occupation ?
- Je suis infirmière et je travaille avec le docteur Valmar d’environ quatre ans à
Titu.
- Êtes-vous de Bucarest où vous habitez à Titu ?
- J'habite à Bucarest et j’ai fait la navette à Titu avec le train, long temps, mais,
quand j'ai découvert que le médecin Valmar habite très proche de mon domicile,
à son invitation, nous avons commencé à aller ensemble avec sa voiture, au
travail.
- Parce que la danse est terminée, je lui ai dit, je voudrais que nous continuions
notre discussion, mais pas ici, parce que tout le monde nous voit et nous
espionne. Êtes-vous disposée à nous rencontrer quelque part en ville, peut-être
dans un restaurant ? J'ai aimé votre compagnie et la discussion avec vous et je
désire à vous rencontrer de nouveau et de continuer à parler.
- Mais, monsieur, vous êtes marié !
- Oui, en effet, mais une discussion entre deux amis ne fait pas de mal à
personne.
- Je déteste que je m’introduise dans la vie de quelqu'un, surtout s'il est marié.
- Mais, il ne s’agit pas de choses plus graves. Seulement une discussion amicale
sans autre conséquence. Je vous promets !
- Eh bien, moi aussi, j'ai aimé parler avec vous et si vous insistez tant, j’accepte de
nous revoir, mais pas de faire ma cour !
- Je vous promets ! et j’ai mis la main sur mon cœur.
- Quand et où pouvons-nous nous revoir ? a-t-elle demandé.
- Je propose de nous revoir le samedi suivant devant l’entrée du restaurant Lido
autour de huit heures du soir.
- D'accord, mais je vous prie me donner un numéro de téléphone pour vous
informer si je ne peux pas venir.
- La chose même, je vous demande pour moi.
Après avoir dansé à plusieurs reprises, sous l'œil attentif de Valmar, le mari d’Otiliei,
nous avons échangé nos numéros de téléphone, dans la cuisine, pour ne pas être vus
par les personnes présentes.
Au départ, j’ai annoncé Otilia que ma tentative de complot avait réussi et qu'elle devait
m’appeler plus tard pour que je lui donne quelques informations supplémentaires. Peu
de temps après mon arrivée chez moi, Otilia m'a appelé et je lui ai communiqué le lieu,
la date et l'heure de la rencontre, de même que le numéro de téléphone de madame
Carmen.
Otilia, m’a dit aussi que son mari avait effectivement l'intention de divorcer d’elle et de se
marier avec Carmen, son assistante. En outre, il a même cessé de contribuer
financièrement à l'entretien de leur enfant ce qui a fait qu’Otilia de subventionner la
quasi-totalité des dépenses de la maison. En public, son mari s’est présenté très
courtois avec elle, devant leurs amis, mais dans le dos, parfois, il passait sans au moins
la regarder. Depuis longtemps ils ne dormaient plus ensemble, dans le même lit. Étant
donné qu’Otilia ne voulait pas se séparer, pas qu’elle n’aimait plus son mari, mais pour
leur fils, à qui elle ne voulait pas lui mutiler son enfance. Elle a pensé à moi pour
m’utiliser comme un intermédiaire afin de déterminer son mari de rompre sa relation
avec cette femme.
Le lendemain soir, à l’heure indiquée, j'ai rencontré Mme Carmen et, ensemble, nous
sommes entrés dans le jardin du restaurant Lido.
Pendant ce temps, Otilia a demandé à son mari de la faire sortir de la maison pour une
promenade et puis de s’en aller au restaurant, en lui disant qu’elle désire à voir le
programme de nuit à Lido. De plus, lui a dit qu’elle est d'accord pour divorcer, mais,
jusque-là, elle ne souhaite pas donner l'impression à ceux qui les entourent qu’ils sont
sur le point de briser leur mariage.
Pendant ce temps-là, j'ai commencé à danser avec ma partenaire, quand, Otilia et son
mari ont fait leur apparition dans le restaurant. Comme ils ont dû se déplacer à côté de
la piste de danse, Valmar nous a vus. Il a laissé Otilia et imprudemment il a giflé Carmen
deux fois et après il a quitté le restaurant seul, en y laissant Otilia.
La situation a été très gênante pour tout le monde. Je suis retourné à la table et j'ai payé
la consommation, tandis que Mme Carmen presque évanouie s’assit sur une chaise.
Ensuite, je l’ai pris par son bras et l'ai amenée à un taxi qui a démarré sans moi. Otilia, à
son tour, a pris un autre taxi et elle est partie chez elle.
Après cet incident, je n'ai jamais appris d’Otilia ce qui s'est passé entre elle et son mari
dans cette soirée-là, car elle a refusé de me le dire. Beaucoup plus tard, Otilia m'a dit
que son mari a rompu sa liaison avec sa maîtresse et il lui a demandé pardon, mais
sans me donner trop de détails.

Mon chef, Gamale était très curieux par sa nature et chaque fois quand il me rencontrait
il me questionnait continu pour savoir comment je passe mon temps libre.
- Puiu, j'ai remarqué que tu es toujours seul. Je pense, cependant, que vous avez
une petite amie ?
- Oui, j’ai répondu, mais je n’ai pas le temps de me voir avec elle, que seulement
fugitif. Comme vous le savez, notre travail demande beaucoup de temps.
- Tu as raison... c'est pour cette raison que je ne me suis pas encore marié.
Maintenant, à mon âge, je n’ai pas de femme et je vis comme un vieux
célibataire. J'ai commencé à m’habituer avec cette vie et parfois je me querelle
moi-même pour le fait que j’ai mis trop de passion pour mon activité
professionnelle et, en même temps, j'ai négligé ma vie personnelle. Maintenant, il
est trop tard pour faire des sérénades. Comment fais-tu avec tes cours à la
faculté et aussi quand es-tu en province ?
- Assez difficile et, parce que vous avez ouvert la parole, je vous demande de
sorte que, le mois prochain, de me donner la possibilité de rester à Bucarest
pour passer mes examens à l'université.
Quand il a entendu ma demande, a dit que ce n’est pas possible, mais finalement a
accepté. Il était jaloux de moi parce que j’étais étudiant à l’Université, alors que lui, avec
ses 50 ans, il avait seulement le lycée. Après cela, il a dit :
- Tu sais, je pense qu’il faut que je m’inscrive à la faculté, a-t-il dit, parce que,
peut-être plus tard, je pourrais avoir des problèmes avec ma dérogation
ministérielle.
- C'est une bonne idée, j’ai répondu. À mon université, il y a beaucoup de gens qui
sont plus âgés que vous.
- Oui, tu as raison ! Je veux m’intéresser à quelle faculté je peux passer les
examens, plus facilement. En tout cas, pas à Bucarest, parce que les
enseignants sont très exigeants. Probablement à Iasi ou Cluj, où j'ai de certaines
connaissances dans les universités concernées. J’ai arrêté depuis longtemps
mes études et j’aurais besoin de quelqu'un pour me mettre à jour avec les cours
requis pour l'admission à la faculté. Peut-être, qu’en penses-tu à m'aider, surtout
que tu as dans ta mémoire les matières demandées fraichement installées ?
- Moi, je n'ai jamais enseigné, jusqu'à présent, mais je pourrais être en mesure de
vous aider si mon temps le permet.
- Je vais le corriger, de façon dont tu vas avoir plus de temps libre.
- D’accord. Lorsque vous vous décidez, il faut m’en dire d’avance pour avoir le
temps de me préparer !
À l’époque, je ne me suis pas imaginé que Gamalet va profiter de moi d’une manière
abjecte et sans aucune reconnaissance.

Le lendemain, je suis allé à Timisoara, à la fabrique de gants, qui devait être vérifiée.
L'équipe était constituée par trois réviseurs : Cornel Ionescu, le chef d’équipe, Samson
Victor et moi-même. Une fois à l'intérieur de la fabrique, nous nous sommes présentés
au directeur de la fabrique qui, immédiatement, a convoqué, dans son bureau, tous les
chefs de départements et services. Après avoir présenté notre équipe, le directeur a
donné la parole à Cornel Ionescu qui a communiqué notre objectif et a sollicité de la part
de tous de s’impliquer et aider notre équipe pour préparer et faciliter le contrôle, en
bonnes conditions.
Après avoir terminé la réunion, nous sommes partis à l'hôtel Victoria où nous avions
déjà réservé une chambre avec trois lits. Une fois installés, nous sommes allés dans un
restaurant voisin et nous y avons mangé.
Je connaissais bien Timisoara depuis la période où j’ai fait mon stage militaire et j'étais
heureux que j'aie l'occasion de revoir les lieux où j’y ai passé deux ans. À la fabrique de
gants, c'était la première fois, que j’y étais. Les deux autres de mes collègues, plus âgés
que moi, avaient été à plusieurs reprises à Timisoara pour le contrôle des diverses
entreprises et donc ils n’étaient pas étrangers de cette ville.
En nous rendant à notre hôtel, chacun de nous a rangé ses bagages et, ensuite, nous
nous sommes reposés jusqu'à l'après-midi.
Vers le soir, le directeur de la fabrique a téléphoné à l’hôtel et nous a invités à nous
rendre au restaurant Lido où une table était réservée pour nous. À notre arrivée, nous
avons trouvé l'ensemble du personnel d’administration de la fabrique, respectif le
directeur, l’ingénieur en chef et le comptable en chef, avec leurs épouses. Après les
présentations de rigueur, les serveurs ont apporté toutes sortes de plats et de vins,
d’après un menu choisi par le directeur de la fabrique. Avant de commencer à manger,
le directeur a toasté à notre santé et nous a demandé d’être plus indulgents dans notre
contrôle.
La soirée s'est déroulée dans une atmosphère ambiante jusqu'au moment où Cornel
Ionescu, qui avait assez bu, a commencé à s’agiter, en disant :
- Écoutez monsieur le directeur, n’ayez pas l’impression que, si vous m'avez
donné une grillade et un verre avec du vin, je fermerai mes yeux à toutes vos
saletés. Je sais plus sur vous que vous vous imaginez. Vous avez transformé
l’atelier de création dans un centre de distribution gratuite de gants pour les
organes du parti, la milice et la sécurité et même pour le comité d’administration
du ministère pour vous renforcer vos postes. Tous ceux, inclusivement leurs
familles et leurs amis bénéficient gratuitement de vos gants. Afin de couvrir, vos
pertes délibérées, le gaspillage, vous avez majoré artificiellement les normes de
consommation pour la fabrication des gants. Même le paiement de cette fête
vous l’enregistrez sur les dépenses de fabrication et non pas sur votre poche.
Vous savez bien que c’est interdit de le faire. Je sais beaucoup plus de choses
sur vous, même privées, mais je me sens gêné de vos dames, pour leur dire
maintenant, la vérité.
Toutes les personnes présentes à la table sont devenues muettes, pendant que le
directeur, tout en essayant d'améliorer l'atmosphère, a dit :
- Camarade Ionescu, soyez plus calme ! Nous sommes venus ici pour nous
détendre et non pas pour faire une réunion d’analyse du travail ! C’est vrai que,
parfois, nous sommes contraints par la nature de notre travail, en certaines
situations, de donner un petit cadeau ici et là, car sinon, nous pouvons avoir des
problèmes avec nos camarades d’extérieur. Non seulement nous le faisons. Tout
le monde. C'est le système. Vous, qui vous êtes un ancien réviseur-comptable
dans le ministère et très bien côté, n’avez-vous pas vu, aussi ailleurs, des
situations similaires que la nôtre ? Je pense que oui. Mettez-vous à notre place
et je suis curieux que feriez-vous ?
- C'est ça le problème, a dit Ionescu. Je suis parfois à contrecoeur et je déteste
travailler comme réviseur-comptable quand je vois tant de malhonnêtes choses
sur lesquelles, parfois, il faut que je ferme mes yeux et ça, à cause de mes chefs
qui, eux aussi, sont impliqués jusqu'au cou dans ces sales affaires. Avant de
quitter le siège du ministère, j'ai vu Gamalet en enlevant un colis avec des gants
dont il l’a reçu de votre part. N’est-ce pas que vous l’avez envoyé gratuitement
pour que nous fermions nos yeux pendant notre contrôle ? Je les ai reconnus
d’après les étiquettes de votre fabrique. Je vais vérifier demain si Gamalet a
payé ces gants que vous avez envoyés.
- Je dis que vous avez raison ! Par contre, vous devez comprendre que… nous
n’avons pas le choix.
La situation crée, a fait que tout le monde soit resté indisposé. Pendant plusieurs
minutes, personne n’a dit un seul mot. Ensuite, le directeur a demandé l’addition et le
comptable en chef a payé, tout en introduisant la note dans sa poche. Au départ, Cornel
Ionescu a demandé de nouveau des excuses aux dames et puis, tous les trois, nous
avons quitté le restaurant, en nous rendant à notre hôtel.
Le lendemain matin, nous sommes allés à la fabrique. Le directeur nous a réservé un
bureau à côté de la sienne. Cornel Ionescu, après qu’il nous a partagé les tâches de
vérification, a demandé à la secrétaire du directeur de faire du café :
- Chère madame-camarade, nous avons une demande de faveur à vous faire,
pour nous préparer du café, mais non pas mélangé avec de l'orge. Vous savez,
vous, du café naturel que monsieur directeur boit avec ses invités. Du café
naturel que vous le procurez sous la table de la part des Serbes. Donnez-moi
aussi un cachet d'aspirine Bayer parce que telles Roumaines n'ont pas
d'influence sur moi. J’ai un mal à la tête insupportable.
- Mon Dieu, camarade Ionescu... Pourquoi parlez-vous ainsi ? Nous n'avons pas
ici du café d'orge ou d'autres mélanges artificiels qui sont commercialement
disponibles. Nous utilisons pour nos invités d'honneur, seulement du café
naturel. Honnêtement, je ne sais pas d’où notre bureau d’approvisionnement le
procure.
La secrétaire a quitté notre bureau et peu de temps après, elle est revenue avec trois
cafés naturels et deux aspirines Bayer qu’elle les a mis sur une table à côté du bureau
où Cornel Ionescu travaillât. Après un certain temps, Ionescu nous a adressé :
- Eh bien les gars, je vais à l'hôtel pour dormir un peu parce que j’ai mal à la tête
qui ne cesse pas du tout. Vous allez commencer le contrôle sur les tâches que je
vous ai donné. Si Gamalet sonne, dites-lui que je suis dans une section de
production et après, vous me téléphonez à l’hôtel.
- D’accord chef, a dit Samson. Reposez-vous bien sans vous soucier de rien !
Peu de temps après le départ d’Ionescu à l'hôtel, Samson se leva de son bureau et m'a
dit qu’il s’en va en ville parce qu'il y a un travail à faire. Mais moi, je savais quel sort de
travail avait Samson.
Celui-ci était un réviseur-comptable aussi vieux qu’Ionescu. Très bien instruit, en termes
de formation, il termina rapidement ses tâches de vérification et après fréquentèrent de
femmes dans de différentes villes où il se déplaçât et qui les ont connues de
précédentes occasions. Bien souffrant de poumon et même avoir une opération sur le
poumon gauche, Samson était un grand coureur de jupes. Quand il était en
déplacement, en province, il s’absentait, parfois, du travail des journées entières et
lorsqu’il revenait récupérait le travail du contrôle plus rapidement que d'autres collègues.
En général, il était un bon garçon, mais il avait une série de bizarres habitudes gardées
pendant qu’il a vécu à l'orphelinat. Il était un enfant illégitime et ne connaissait pas ses
parents biologiques. Les femmes le plaisaient, pas parce qu'était beau ou bien instruit,
mais parce qu'il avait un grand et gros sexe.
Après le départ de Samson, je suis resté seul dans le bureau et j’ai travaillé
jusqu’environ quatre heures de l’après-midi, après quoi je suis allé à l'hôtel.
Vers la fin du contrôle Gamalet il est arrivé à Timisoara pour faire, allégué, un super
contrôle. En fait, il est venu ici pas pour donner des directives ou de vérifier ce que nous
avons fait, mais de résoudre une série de problèmes personnels. Il est arrivé avec une
valise vide et il est parti avec… pleine.
Il est allé à l’intérieur de la fabrique, puis directement à la section de création. En retour,
il est venu dans notre bureau et il a importuné Ionescu, en lui disant :
- Écoute Cornel, le directeur m'a dit que tu l’as mis dans une situation délicate
devant sa femme et ses collègues de service, lorsque vous êtes allé au
restaurant, ensemble. Après moi, ces discussions ne se font pas publiquement,
en particulier, avant le contrôle. Voulez-vous qu’il se plaigne directement au
ministre et après tu peux perdre ton pain. Tu sais, dans telles situations je ne
peux pas t’aider. Il faut que tu sois plus diplômé, avoir plus de tact. Celles-ci sont
connues par nos organes de parti et tu ne dois pas leur parler à haute voix.
Sache également que j'ai payé les gants que j'ai reçus du directeur. Ils sont des
produits déclassés et voici... j’ai aussi une facture.
Il a introduit sa main dans sa poche et a montré à Ionescu une facture datée du jour de
son arrivée à Timisoara, dans laquelle était inscrit un nombre de 15 paires de gants,
mais beaucoup moins cher qu’une seule paire de gants ordinaires.
Ionescu n’a rien dit et s'assit à son bureau, en introduisant sa tête parmi ses papiers. Il
savait qu’il ne pouvait avoir des problèmes, parce qu’il les avait tous à sa main. Il en
savait trop pour ne pas être expulsé du ministère.
Après cette conversation, Gamalet est parti en ville et il est revenu à l’hôtel, pendant la
soirée, ivre comme un porc, où il avait déjà réservé une chambre pour lui seul.

Moi, en dehors de mon activité professionnelle, j’activais aussi dans le Comité de l’Union
de la Jeunnesse Communiste (en roumain UTC) du ministère. Mon entrée, dans ce
comité, a été faite par une proposition de la secrétaire du Comité UTC du ministère et
qui se nommait Adela Marcovici. De point de vue professionnel, celle-ci occupait la
fonction de chef de cabinet du ministre Bazac Ion.
Adela me plaisait et pas une fois elle a essayé d’entrer dans mes grâces, en prétextant
toutes sortes de tâches telles que d'UTC, qui en réalité, était des invitations masquées
pour qu’elle soit près et avec moi. Elle m’appelait pour que je vienne au siège de
l’organisation d’UTC ou dans le bureau du ministre où elle travaillait pour lui donner,
allégué, les rapports rédigés par moi, après qu’elle m'offrait des sandwichs à la viande
fine, café naturel, des cigarettes et boissons étrangères, ainsi que plus encore. Souvent,
elle me prenait avec la limousine du ministre et nous nous rendaient ensemble au
Comité central de l'UTC pour y déposer de divers documents et avant notre retour, nous
nous arrêtaient au restaurant de celui-ci et mangeaient gratuitement toute sorte de
bonnes choses.
Ma tâche officielle dans ce comité était de vérifier les organisations d’UTC des
entreprises où j'allais à les vérifier sur la ligne professionnelle, dans tout le pays. Mes
rapports étaient remis à Marcovici Adela qui, à son tour, en informait au Comité central
de l'UTC.
Pas une seule fois, j’ai constaté, dans mes voyages, toutes sortes d'abus qui étaient
faits par les élus d’UTC dans des entreprises, à côté des comités du parti.
Habituellement, les secrétaires d’UTC et du parti des entreprises fonctionnaient, de point
de vue professionnel, sur des postes fantôme avec de gros salaires, sans rien faire. Des
journées entières, ils s’absentaient de leur emploi en prétextant qu’ils sont sollicités par
leurs chefs sur la ligne de parti. Ils mangeaient gratuitement dans les cantines
d'entreprises où ils étaient servis, dans des chambres séparées, avec des plats
préparés spécialement pour eux, pour que les autres salariés ne les voient pas.
Souvent avaient lieu des partis aux sièges des organisations d’UTC ou de parti donnés
par les organisations du secteur ou de la ville, où y étaient invités les secrétaires d’UTC
et de parti avec leurs familles et où avaient lieu de véritables orgies. Ils s’enivraient,
cassaient la vaisselle et les verres, jetaient les aliments préparés sur le plancher ou
même se battaient avec ceux-ci.
Je ne parle plus du fait qu’ils apportaient dans leurs entreprises toute leur famille ou
leurs connaissances dont ils les facilitaient des emplois avec de gros salaires, sans avoir
la formation ou la compétence pour les postes occupés. Les aliments et les vêtements,
pour eux-mêmes et leurs familles, les achetaient auprès des ménages du parti à des
prix extrêmement bas et quand ils partaient en vacances, ils avaient priorité aux billets
gratuits à la montagne ou à la mer.
Tout le monde savait ou voyait ce qui se passe, mais personne n’avait le courage de
parler ou de protester parce que le lendemain ils étaient mises à pied, même au risque
d’aller en prison. Même s’ils faisaient appel aux syndicats ces-ci ne les aidaient pas,
avec rien. Les syndicats étaient seulement des organismes pour recueillir les
contributions d’argent des travailleurs, autrement, ils n'avaient pas de pouvoir et rien à
dire. À leur tour, ils étaient coordonnés, contrôlés et totalement à la merci du Parti
communiste.
Le mois d’août 1966, le Comité UTC du ministère a organisé un voyage dans le « Delta
du Danube – en roumain Delta Dunarii » pour une semaine au cours de laquelle j'ai
aussi participé à l’invitation d’Adela Marcovici, la secrétaire de l'UTC. Les personnes qui
sont parties dans ce voyage faisaient partie du ministère et tous étaient des jeunes qui
travaillaient dans de différents services et, en même temps, ils activaient sur le plan
politique dans l’organisation d'UTC.
La distance entre Bucarest et Tulcea, nous l’avons parcourue dans deux élégants
microbus du ministère. À notre arrivée au port de Tulcea, on nous attendait un navire de
croisière, très élégant, qui appartenait aussi au ministère. Ce navire a été acheté par le
ministère des fonds d'investissement et il figurait dans ses évidences comptables, pas
comme le navire de croisière, mais comme un navire de transport pour la livraison de
cuirs crus de bovins et de moutons achetés à l'étranger. Selon la documentation de
financement, ce navire il fallait à transiter les cuirs crus à partir du port de Constanta, sur
le Danube, jusqu'à Tulcea et à d'autres villes d’où, ils étaient transférés à diverses
entreprises pour être transformés en cuir naturel.
Le navire avait été aménagé, avec des dépenses très élevées, à recevoir des
personnalités du ministère et leurs invités ainsi que d'autres organes d’État ou de parti.
L'intérieur du navire avait des cabines très chics et une petite salle à manger très
élégante. Tapis persans, vaisselle et couvert plaqués en or, meubles en bois sculptés,
outils de pêche et de nombreux autres accessoires très coûteux faisaient partie de
l'inventaire du navire.
Après le transfert des passagers des deux microbus sur le navire, ceci est parti en
croisière. Les deux microbus sont restés à Tulcea en attendant le retour de ceux qui ont
participé à l’excursion et qu’il fallait nous ramener à Bucarest.
Le voyage a duré une semaine. Le navire a flotté sur les trois bras du Danube, Chilia,
Sulina et Saint-Georges, en s'arrêtant ou en faisant des escales dans les coins les plus
pittoresques du Delta. Deux cuisiniers préparaient continuellement d’excellents plats des
aliments qui se trouvaient dans deux géants réfrigérateurs ainsi que des poissons
capturés par nous. Le plat le plus apprécié a été la soupe de poisson bouillie à l'eau du
Danube dans lequel se trouvaient de grands morceaux de poisson de toutes les sortes.
Le seul inconvénient était les moustiques qui remplissaient, surtout en soirée, les
cabines et la salle à manger même s’il existait des appareils spécialement aménagés
pour les tuer.
En retournant à Bucarest, tous les passagers avaient dans leurs sacoches, du poisson
de toutes les catégories, qui a certainement fait le bonheur de leurs familles.
Chapitre 5

La maturité

Après la mort de Gheorghe Gheorghiu-Dej, le 19 mars 1965, qui a eu lieu dans des
circonstances très floues et après une brève lutte pour le pouvoir, en tête du parti, est
arrivé, un militant du deuxième rang, Nicolae Ceausescu.
Autour de la maladie qui a causé la mort de Gheorghe Gheorghiu-Dej, on a tissé, dès le
début de sa disparition, un mystère. On a dit qu'il avait été irradié au cours de sa
dernière visite à l'étranger, à Varsovie. Il n'y a encore aucun document attestant une telle
variante. Passant en revue les témoignages des certains proches de Gheorghiu-Dej, on
met en évidence deux versions : d'abord, on considère que la mort a été causée par
irradiation ou par un traitement erroné d’une tumeur cancéreuse. La deuxième version
prétend que la mort a été naturelle, étant une conséquence d’un cancer et celles subies
en prison, dans les années 1930.
La variante selon laquelle Dej a été assassiné avec préméditation, par l’ordre du
Moscou, a deux partisans : Ion Mihai Pacepa et Dumitru Popescu. Le premier, ancien
général dans la Direction des informations externes de la sécurité sous le régime
communiste, affirme que l'assassinat a été causé par rayonnements avec un dispositif
fait par KGB. L'appareil avait été installé dans le bureau de Gheorghe Gheorghiu-Dej.
Dumitru Popescu, ancien rédacteur en chef du journal « Scanteia » et secrétaire avec la
propagande du CC des PMR, affirme que c'était une tumeur maligne et métastase au
foie, non traité comme il faut, intentionnellement, par les médecins qui l’ont opéré et
supervisé. La principale source de cette histoire est un certain professeur-docteur
Garbea médecin qui, en janvier 1965, a demandé la permission de Gheorghe
Gheorghiu-Dej de lui faire une consultation. Le verdict donné par celui-ci a été vérifié
ultérieurement : métastase au foie, mais la conclusion est venue trop tard.
Si la politique de Gheorghiu-Dej était considérée conservatrice stalinienne par rapport à
la nouvelle ligne politique hrusciovienne, Ceausescu est apparu comme un réformateur
par rapport à la politique néo-stalinienne de Leonid Brejnev.
Nicolae Ceausescu a été élu secrétaire général du PCR à la Plénare du Comité central
du 22 mars 1965. Au moment de son élection, on ne savait pas grand-chose sur lui.
Au cours de son règne, on est revenu à la dénomination du parti communiste et le nom
officiel du pays a été changé pour la République socialiste de Roumanie. Après une
courte période de tentative de réformes et de renforcement des liens avec l'Occident,
Nicolae Ceausescu en 1971, a établi un fort culte de la personnalité et a accumulé des
positions clés dans le parti et l'État. Spécialement pour lui a été créé le poste de
président du pays en 1974.
Ceausescu a toujours accordé plus d'attention à la matière que l’homme, aux stratégies
politiques plutôt que le bien-être de la population.
Dans les années qui ont suivi, Ceausescu est devenu de plus en plus isolé dans le
camp communiste et on semble qu’il ignore totalement la situation catastrophique dans
laquelle le pays est. Il fait référence dans ses discours au « niveau de vie élevée »
réalisé sous sa direction, sans précédent dans l'histoire et la télévision nationale montre
des images du dictateur visitant des magasins spécialement approvisionnés pour les
caméras, avec des étagères pleines de produits alimentaires. Pour masquer la crise
alimentaire, Iulian Mincu, le médecin personnel de Ceausescu, a inventé un programme
de « l'alimentation rationnelle », en faisant valoir qu'un adulte en bonne santé doit
consommer pas plus de 3000 calories par jour. Les aliments de base (sucre, huile,
viande) sont rationalisés à un kilogramme par mois et par personne et les gens passent
par des moments très difficiles, en restant debout de nombreuses heures par jour, dans
des files d'attente interminables devant les magasins d'alimentation qui n’ont rien à offrir.
L'importation de produits, comme le café, sont remplacés par des substituts (nechezol).
Les produits alimentaires destinés à l'exportation sont remplacées sur le marché
intérieur avec des substitutions (salami de soja) ou des produits d'exportation sans être
sollicités (tête et pattes de porc, ironiquement appelé par le peuple « adidassi de
Scornicesti » et « calculatrices ».
Les perturbations de l'approvisionnement en eau, électricité, gaz naturel deviennent très
fréquentes et les blocs de logements sont chauffés seulement de temps en temps par le
système public de chauffage. L’essence est bien rationalisée et devient très rare. La
politique économique de planification centralisée conduit à des aberrations prix, sans
aucun lien avec la réalité économique. La production est orientée vers des
investissements industriels mégalomaniaques, les biens de consommation sont produits
en quantités insuffisantes.
Plus importantes que de l'argent sont les « relations », les marchandises sont vendues
« en dessous de la table », une crise morale frappe l’entière société. On circule une
parole qu’une « relation » dans le communisme est plus précieuse qu’un « domaine »
dans le capitalisme. La nomenclature et les militants du parti, font leurs achats dans des
magasins et des maisons pour des commandes spéciales, dont les gens ordinaires, y
compris les membres du parti, n'ont pas accès.

Au cours de l'été 1967, au début du mois de juillet, j'ai demandé à mon chef Gamalet de
m’envoyer à une entreprise à Bucarest, parce que j'avais un examen à passer à la
faculté, dans le but de me préparer pour lui. Malgré son approbation qu’il a promise,
lorsque j'ai à passer des examens, je resterais dans une entreprise à Bucarest, Gamalet
a refusé.
Face à cette situation, par l’intermède d’Otilia, qui connaissait le Dr Valeriu Mirontov, le
directeur de l'hôpital psychiatrique de Balaceanca, je me suis interné à sa clinique, afin
de rester à Bucarest et de soumettre mon examen. J'ai pris mes livres avec moi à
l'hôpital et j’ai commencé à étudier.
Dans une soirée, lorsque je me promenais dans le jardin de l'hôpital, une infirmière s'est
approchée de moi et m’a demandé :
- Monsieur, vous avez les yeux rouges ! Avez-vous plaint ?
- Non, je lui ai dit, j'ai une conjonctivite rebelle qui me donne toujours des
problèmes.
Elle a souri, puis, comme un flocon, elle s’est éloignée lentement de moi. Je l’ai suivi
longuement avec mon regard jusqu’au moment où elle a disparu dans un bâtiment
rattaché au pavillon central. Elle était une mince jeune femme avec des grands yeux, en
forme d'amandes et brillants, avec des cheveux noirs, longs, qui tombaient en vagues
sur ses épaules et avait une tenue de reine.
Le soir, je l'ai rencontrée à nouveau dans la cour et je l’ai demandé, pourquoi n’est-elle
pas partie chez elle. Elle m'a répondu qu’elle était de garde à l’hôpital.
Après le repas du soir, je suis sorti de ma chambre et je me suis dirigé vers le pavillon
où la belle infirmière est disparue plus tôt. C’était le laboratoire d’analyses de l'hôpital où
elle travaillait.
Elle a semblé surprise par mon arrivée et m'a demandé :
- Oh, vous ? Avez-vous besoin de quelque chose avec qui je peux vous aider.
- Je n'ai pas besoin de quoi que ce soit. Je suis venu pour vous parler, bien sûr, si
je ne vous dérange pas avec ma présence.
Elle a souri et m'a offert une chaise. Nous avons commencé à parler et, entre-temps,
elle m'a servi avec un café. Après avoir bu de café, je l’ai demandé :
- Voulez-vous que je vous devine dans votre café ?
La belle infirmière a souri avec charme et m’a dit :
- Savez-vous deviner dans le café ? Intéressant. Je suis curieuse de savoir ce que
vous pouvez me dire sur moi ?
Je ne savais rien sur elle et, surtout, je n'avais aucune connaissance en matière de
deviner. J'ai commencé à lui dire tout ce que passait dans ma tête et je ne sais pas
comment c’est arrivé que presque tout ce que je lui ai dit, ce fût vrai.
- Vous avez une tasse très intéressante ! j’ai dit. Je vois ici quelques routes que
vous faites régulièrement. Je vois aussi deux lettres S et V qui semblent être vos
initiales. Après tout ce que je vois dans votre tasse, vous n’êtes pas d’ici, vous
être de loin. Vous êtes célibataire et vous vous préoccupez de votre stabilité.
Bientôt, vous rencontrerez un homme qui va vous demander en mariage, un peu
plus tard et l’on semble que vous allez accepter.
En la regardant, j'ai observé que son visage est devenu un peu perturbé pendant la
mesure dont je parlais.
- Je suis très contrariée, a-t-elle dit. Est-ce que tout ce que vous voyez dans ma
tasse pouvez-vous le lire ? Je veux voir les deux lettres ! et elle s’approcha de
moi et puis regarda à l'intérieur de la tasse. Oui, en effet, il semble que vous
avez raison.
- Bien entendu que j’ai raison parce que votre tasse ne ment jamais...
- Mais, d’où savez-vous deviner dans le café ?
- J'ai appris de ma mère qui est une experte dans la lecture du café.
- Très curieux... mais, vous avez dit la vérité, à l'exception de mon prochain
mariage, parce que je n’ai pas l'intention de me marier bientôt. Je suis du comté
de Dambovita, d'un village sur le bord de la rivière « Arges » qui s’appelle
Zavoiu. J'ai terminé le lycée sanitaire, la section de laboratoire et j’ai été attribué
à travailler ici. J’habite à Bucarest chez un parent et je fais la navette tous les
jours avec le train. En vérité, je suis seule et je n’ai aucun petit ami. Mon nom est
Virginia Stanciu, mais tout le monde m’appelle Virginica.
J'ai parlé avec elle, presque, jusqu'au matin et avant de partir je l’ai demandé :
- Moi, demain matin, je m’en vais chez moi. Le docteur Mirontov m’a donné la
permission de m’en aller chez moi, les samedis et les dimanches, mais je dois
revenir, tous les lundis matin, à l'hôpital. J'adorerais que nous fassions demain
après-midi, une balade à la « Sosea » bien sûr si vous n’avez pas un autre
programme.
- En effet, je n'ai pas de programme précis. Alors, où pensez-vous que nous
pourrions nous rencontrer ?
- Après moi, la meilleure place est devant le cirque, vis-à-vis de l'Université, à la
station de trolleybus sur Magheru. De là-bas, nous pouvons aller directement à la
« Sosea ».
- C'est une bonne idée, a dit-elle, parce que je n’ai plus besoin de changer
d'autres moyens de transport.
Dans la journée de dimanche, je l’ai attendu long temps dans la station de trolleybus.
Elle est arrivée avec un retard d'une heure, le moment exact où je voulais m’en aller, en
s’excusant que le trolleybus avait un grand retard, en raison du match de football du
stade 23 août. J'ai été un peu fâché par son retard, mais je me suis immédiatement
rétabli quand je l'ai vu. Nous avons pris le trolleybus et puis nous nous sommes arrêtés
au restaurant « Bordei » à la « Sosea ».
Après avoir déjeuné, je lui ai dit :
- Dès mon enfance, j'ai admiré la mer qui m'a toujours fasciné. Quand je peux ou
quand je suis en vacances, je préfère y aller, au bord de la mer. Cette année, je
n'ai pas pris encore mes vacances et je voudrais m’en y aller. J'ai lu dans un
journal, pas depuis longtemps, que des places y sont disponibles en maisonnette
à Eforie Nord. J'ai même gardé l’annonce. Voudrais-tu y aller ensemble pour
deux semaines ? Pourrais-tu obtenir tes vacances de l’hôpital ?
- Ni moi, je n’ai pas fait mes vacances cette année, a dit Virginica. Par contre, je
suis planifiée les prendre, le mois prochain. Je pense que je peux y aller à moins
que quelque chose d'autre n’intervienne pas
- Tu m’as rendu heureux ! En général, je m’en vais seul à la mer, mais cette
année, j’ai senti le besoin de partager les beautés de la mer avec quelqu'un.
Elle a souri et m'a regardé avec curiosité. Sur son visage, on pouvait lire sa joie et en
même temps son étonnement. Elle ne savait pas quoi croire sur moi. Elle ne me
connaissait pas et peut-être qu’elle se questionnait si elle fait bien de venir avec moi à la
mer. Je l'ai regardée et dans l'ombre de la soirée elle avait l’air d’une divinité avec de
lents mouvements qui me fascinait et m’attirait. Après ma sortie de l'hôpital, j'ai obtenu
un congé de maladie d'un mois, au cours duquel j'ai rencontré Virginica presque tous les
jours et j'ai préparé notre départ vers la mer.
Au cours de la première soirée de notre arrivée à la mer, après avoir mangé un délicieux
repas et nous avons fait une promenade au bord de la mer, nous sommes revenus à
notre maisonnette où, dans le parfum salé de la mer nous nous sommes immergés dans
l’abysse de notre amour. À un moment donné, Virginica a commencé à pleurer et puis je
l’ai demandé :
- Pourquoi pleures-tu ? Que s'est-il passé ?
- Je ne sais pas pourquoi. Ça m’est arrivé si soudainement… et en s’approchant
de mon corps a mis son oreille délicatement sur ma poitrine, puis elle a continu :
ton cœur bats très fort ! Je me sens tellement bien ici, avec toi et je désirerais
que cette nuit ne finisse jamais. Il est tellement si beau et si romantique ici.
Entends-tu le bruit des vagues de la mer ?
- Oui, en effet, c’est très agréable. C’est pour celle-là que je viens à la mer parce
que je suis amoureux d’elle.
- L'aimes-tu plus que moi ? Et tout à coup, elle a pincé mon bras avec pouvoir.
- Oh, pourquoi me pinces-tu ? Je pense que tu m’as fait un bleu.
- S'il te plaît, pardonne-moi, mais j'ai été jalouse quand tu m'as dit que tu aimes la
mer, plus que moi.
- Tu sais, pour moi, la mer représente un symbole, une créature imaginaire qui me
donne de la force et de la confiance. Son étirement et son inconnu m’ont toujours
fasciné et même quand j’étais petit enfant, la mer, le Danube, où je suis né, j’ai
senti leur influence et depuis je me sens plus fort et plus stable et que je peux
frapper avec plus de force les obstacles de ma vie, tout aussi forte que les
vagues déchaînées au cours d’un tempête. C’est pour ça que je suis tellement
attaché d’elle !
- Que c’est joli ! Alors, je n’en suis plus jalouse !
Virginica a englobé ma tête et m’a embrassé longtemps. Nos corps se sont enchaînés et
de nouveau nous avons plongé dans le frisson de notre amour, tandis qu’à l'extérieur on
entendait le bruit des vagues qui se brisaient contre le rivage de la mer.
Il y avait quelque chose de divin, inconcevable. Il semblait que tout le monde est le nôtre
et le fait que nous étions là-bas, où la mer se perd dans son étreinte avec le ciel, nous
avons senti en nous un sentiment de bonheur, de profondes béatitudes. J'ai ensuite eu
la sensation et la conviction que, après de nombreuses années, j'ai trouvé, enfin, l’être
de mes rêves.
Un soir, Mircea, mon cousin, qui se trouvait aussi à la mer, s’est rencontré avec nous sur
la falaise, pendant qu’il se promenait. Après les présentations de rigueurs, Mircea a
murmuré :
- Puiu, tu n'as jamais eu une petite amie, si jolie !
Par la suite, tous les trois, nous sommes allés à danser sur la terrasse du restaurant
« La perle de la mer ». Le restaurant est situé au bord de la mer, en ayant un décor de
rêve. J'ai commandé de la morue grillée avec une sauce à base du beurre et du citron et
après, nous avons bu le célèbre vin de « Murfatlar ». Lorsque la danse est commencée,
nous nous sommes déchaussés et, à pied nus, nous avons dansé, tous les trois, jusqu’à
la clôture du restaurant.
La durée de notre séjour, nous l’avons passée en faisant, tous les jours, de la plage au
soleil au bord de la mer. Parfois, nous nous réveillions tôt du matin pour regarder le
soleil levant et la nuit, la lune, avec ses lances de feu qui les jetaient sur la mer
tourbillonnante. Après des promenades au bord de la mer, nous nous arrêtions dans un
petit restaurant et nous dansions jusqu'à la fermeture. Nous nous couchions vers le
matin, embrassés dans le mystère de notre puissant amour.
Après notre arrivée à Bucarest, j'ai repris mon travail. J’ai passé avec succès mon
examen à la faculté et j'ai continué à rencontrer Virginica, tout en raréfiant les rencontres
avec Otilia.
À un moment donné, j'ai commencé à m’inquiéter parce que je me rendais compte que
je ne pouvais plus maintenir ma relation avec mon Otilia. Bien sûr, elle s’attachait de moi
et m’avait donné de beaux moments, mais dans le même temps, je me rendais compte
que ma vie a changé radicalement depuis quand j’avais connu Virginica et que mon rêve
de fonder une famille semblait être fait. Il me semblait équitable qu’elle le sache, surtout
que depuis le début de notre relation, je l’ai mis en garde que je veux fonder une famille
et avoir des enfants. Or, avec elle, la réalisation de cet objectif de ma vie, ne pouvait se
réaliser jamais. Dans ces conditions, j'ai décidé de lui dire la vérité. Je lui ai téléphoné et
je lui ai demandé de passer chez moi parce que je voulais lui dire quelque chose
d'important.
Le lendemain, Otilia est arrivé autour de six heures de l'après-midi, un peu inquiétée.
Après que nous nous sommes embrassés, je l'invite à s'asseoir sur une chaise et je lui
ai dit :
- Chère Otilia, je veux te dire quelque chose d’important et je ne sais pas comment
je pourrais commencer. C'est quelque chose que nous avons déjà discuté
lorsque nous nous sommes connus. Si tu te souviens, je t’ai dit à l’époque que
notre amitié ne durera pas éternellement, car un jour, peut-être, notre destin va
changer. D'autre part, tu m'as dit que tu ne divorceras jamais de ton mari, à
cause de votre enfant et donc nous deux ne pourront pas continuer indéfiniment,
notre relation. Voici donc que ce jour-là, dont nous avons parlé, est arrivé. J'ai
rencontré une jeune fille que j'aime et je sens que, ce que j’ai toujours rêvé
d’avoir une famille, il est en train de se réaliser. Je ne lui ai rien dit de mes
pensées et mes intentions, mais je pense que je vais le faire, bientôt. C'est
pourquoi je t’ai demandé à parler parce que je ne veux pas te mentir que
présentement dans ma vie, n’existe que toi.
- Puiu, depuis un certain temps, j’ai senti un changement de ta part. Je me suis dit
que peut-être à cause de ta fatigue tu as commencé à diminuer nos rencontres.
Ensuite, je me suis rendu compte que ce n'était pas cela et que c’est autre chose
que tu caches. J’ai décidé d’attendre jusqu'au moment où tu vas prendre ta
décision de me confier ton secret. Je peux te dire que maintenant, je te connais
très bien et je sais ce que tu penses. Je savais qu'un jour tu vas me quitter et
voilà que ma crainte est en train de se réaliser. La seule chose que je peux te
dire, c'est que je t’ai toujours aimé et que je t’aime encore. Je sais, je suis une
folle sentimentale, mais c’est comme ça que je suis. Par conséquent, j'accepte
ton verdict avec le désir que tu es heureux et que tu vas trouver le vrai amour
que tu as toujours cherché. Je ne peux pas dire que je ne suis pas un peu
jalouse, mais que pourrais-je faire ? Rien et donc, c'est la vie !
Otilia a commencé à pleurer et se leva de sa chaise et m’a embrassé. Par ce geste, elle
a accepté mon verdict avec sa dignité et l'élégance de son âme.
Ensuite, nous avons eu une dernière étreinte et nous nous sommes séparés, dans très
bonnes relations, comme deux vieux amis, même si elle m'aimait passionnément.
Nous sommes restés amis jusqu'au jour où elle a quitté le pays, pour toujours, avec sa
famille en Allemagne.

À un moment donné, d’un banal motif je me suis fâché avec Virginica et plus d'une
semaine, nous n’avons plus parlé. J'étais vraiment bouleversé et je n’avais pas envie de
rien. Son absence, même au téléphone, me donnait un sentiment d'agitation. Tout le
temps, je pensais à elle et je me querellais tout seul, en me disant que je suis un idiot.
De mon genre, j'étais une personne que je m’échauffais rapidement, parfois de rien,
mais aussi vite je me revenais. D'un certain point de vue, j'avais hérité mon père.
Je l’ai appelé finalement et je lui ai demandé pardon en la priant de reprendre sa relation
avec moi.
- Allo, Virginica ? Je t’ai téléphoné parce que je désire, de tout mon cœur, de me
réconcilier avec toi. J'ai eu l'impression que cet inconnu te regardait avec trop
d’insistance et que tu lui as répondu avec ton regard. Par ma nature, je ne suis
pas jaloux, mais parce que je t’aime vraiment, j’ai l’impression continuellement
que quelqu’un veut me te voler. Je t'aime vraiment et je ne veux pas te perdre.
Depuis que nous nous sommes querellés, je ne peux pas dormir ni manger.
Honnêtement, je veux te dire que tu me manques. S'il te plaît, pardonne-moi et
tu as ma promesse que cela ne va pas se reproduira de nouveau.
- Puiu, je suis restée très surprise par ton attitude. Je n’ai jamais vu cette
personne. Nous étions assis, tous les deux, à notre table et soudain, j'ai eu
l'impression que quelqu'un me regarde. J'ai tourné la tête en arrière et pour une
fraction de seconde je l'ai vu de mes yeux qu’il me mesurait avec son regard.
C'est tout. Ce n'est pas un crime de regarder quelqu'un. N'as-tu jamais regardé
une femme ? Désolé, mais je suis très découragée !
- Virginica, s'il te plaît, pardonne-moi encore une fois et pour te prouver à quel
point je t'aime, je veux t’épouser. Dis-moi que tu es d’accord.
On a suivi un long moment de silence, après lequel Virginica a répondu :
- Puiu, je ne sais pas ce que se passe avec toi. Je ne sais pas si tu es sérieux or
tu as dit seulement comme ça. Tu ne peux pas te jouer avec ces mots. Je n’ai
jamais pensé à ça, au moins pour le moment. Pur et simple, tu m’as bloqué et
donc je ne peux pas te donner ma réponse immédiatement. Il faut que je pense
et j’ai besoin du temps pour réfléchir. Le mariage n'est pas un morceau de papier
qu’on puisse l'écraser ou jeter à la poubelle quand on veut. Il est l'expression
suprême de l'amour, la force qui unit les deux êtres et qui, ensemble, vont bâtir
un tout unitaire fondé sur la confiance mutuelle, le respect et l'entraide
réciproque, sans haine, sans discorde et surtout sans suspicion. C’est comme ça
que je comprends le mariage ! Pense-toi bien à ce que j'ai dit et donne-moi ta
réponse une autre fois.
- Virginica, j'ai pensé assez et je me suis rendu compte que sans toi ma vie ne
signifie plus rien. La seule chose que je te demande, c'est d'accepter d'être ma
femme et je te promets que cela n'arrivera jamais ce que j'ai fait.
Virginica ne m'a pas donné sa réponse immédiatement. Le jour suivant, après mon
appel téléphonique, elle a accepté. À son tour, elle m’aimait et souhaitait que cette union
soit faite, ce qui lui apportera son bonheur.
Virginica avait de nombreuses qualités. Elle était une femme cultivée, qui aime la
poésie, non seulement de lire ou réciter, elle-même écrivait des poèmes. Elle avait un
cahier dans lequel elle avait écrit la plupart de ses poèmes. En les lisant, je suis resté
profondément ému, en particulier d’une intitulée « Ombres folles » où il s'agissait d'une
personne atteinte d’une maladie mentale qui avait perdu sa personnalité et internée
dans un sanatorium, ne réalisait pas où elle se trouvait, en étant entourée d’ombres des
autres personnes comme elle.
Virginica aimait également le théâtre, la musique et lisait beaucoup de littérature. Les
fleurs étaient sa passion. Elle était calme, compréhensive et adorait les enfants. Elle
mettait beaucoup de passion dans tout ce qu'elle faisait.
La reprise des relations avec Virginica m'a donné un élan et un bonheur que je n'ai
jamais vécu. Jusqu'à notre mariage, nous étions ensemble, tous les jours. Nous nous
promenions comme deux tourtereaux et nous nous embrassions où nous passions,
dans les rues, les parcs, les cinémas, partout. Nous nous rendions de plus en plus à la
campagne, à ses parents, d'abord seule, puis avec mes parents, où nous mangions à
l'automne, des poulets brochés, légumes frais du jardin et de la « tuica - brandy de
prunes » faites par le père de Virginica. Puis nous nous rendions au bord de la rive
« Arges » et admirions la beauté des lieux où nous nous baignions dans l'eau claire et
rapide de celle-ci.
Dans ces conditions, l’automne est passé et en hiver, ses parents nous recevaient avec
du pain chaud cuit dans le four avec de la « tuica » brouillée et beaucoup, beaucoup
d’autres bonnes choses. Ensuite nous nous baladions avec une « troïka » traînée par
deux chevaux, en nous rendant jusqu’à « Gaiesti » où nous faisions nos courses dans le
marché.
Au printemps 1968, nous avons commencé les préparatifs pour notre mariage. Les
parents de Virginica nous ont fait cadeaux deux alliances épaisses en or massif et ils ont
marqué nos noms à l'intérieur.
Le 16 mars 1968, moi et Virginica, nous nous sommes mariés à la mairie du secteur 4
de Bucarest. Nous avons célébré l'événement chez moi où Virginica avait déjà
déménagé. Le premier jour, nous avons reçu nos parents et le lendemain, nous avons
célébré le mariage avec mes amis que j'ai rencontrés au lycée. Un peu plus tard
Virginica a été transféré pour son travail de l'hôpital psychiatrique de Balaceanca à
l’hôpital « Brancovenesc » de Bucarest.
Le temps passait et je travaillais dans le même ministère, en parallèle avec mes études
à la faculté. Au cours de cette période, il y a eu une réorganisation des ministères et la
mise en place des centrales industrielles. Le service CFI du ministère a été transféré à
la nouvelle centrale industrielle de cuir et de chaussure, qui avait maintenant son siège
central au Combinat de caoutchouc Jilava où directeur général a été nommé l’ingénieur
Gheorghe Popa.
Suite à ces organisations, Gamalet, de peur pour ne pas perdre son emploi, a passé
l'examen d'admission à Iasi, à la Faculté de comptabilité, bien sûr avec mon aide, tel
que nous avons convenu. Il avait craint qu'il soit remplacé parce que les nouvelles
conditions exigeaient avoir des études supérieures pour être maintenu sur son poste.
Gamalet est allé à Iasi avec moi et au cours de ses examens j’y suis resté pour l’aider à
soutenir ses examens.
En été, la même année, je suis allé avec Virginica, en vacances, à Constanta. Nous
avons rencontré à nouveau la mer avec ses beautés qui nous a rappelé notre première
étreinte. Nous avons habité à une dame, la conjointe d'un marin qui avait sa résidence à
proximité de la plage et c’était elle qui nous préparait nos repas. Lorsque nous arrivions
de la plage, nous trouvions les repas prêts avec toute sorte de bonnes choses et surtout
des plats de poisson. Moi, j’adorais les « guvizi » des petits poissons enfilés sur des
cure-dents et grillés dans l’huile brûlante et arrosés avec de l'ail et jus de lime. Ensuite,
nous dégustions un verre de Murfatlar, froid et parfumé. Après cela, nous nous
reposions embrassés et heureux, enveloppés dans notre amour. Nous sommes restés
ici deux semaines, après que nous sommes partis à Bucarest, en nous séparant avec
regret des lieux de notre bonheur.
Après notre arrivée chez nous, dans environ un mois, Virginica a annoncé la grande
nouvelle : était enceinte. Mon bonheur était maintenant complet.

Notre premier enfant, Florin, est né le 8 avril 1969 à la maternité « Caritas », sous la
supervision de l'éminent docteur Dragotescu Emil, médecin et spécialiste en ce domaine
qui a été obligé de faire à Virginica une opération de césarienne parce que l'enfant
n'avait pas la position de naissance normale. Suite à cette situation, Virginica a dû rester
beaucoup plus à l'hôpital pour éviter tout risque.
Après avoir quitté l'hôpital, la santé de notre enfant était un peu fragile, ce qui a perturbé
une bonne partie du temps le silence de la maison. Pendant la nuit, il ne dormait pas,
avait des crampes tout le temps, alors que Virginica et moi le veillions par rotation. Nous
étions tous les deux fatigués, épuisés et nerveux.
Après son congé de maternité, Virginica a repris son travail. La surveillance de Florin
est tombée à la charge de mes parents qui n’étaient pas trop heureux de leur nouvelle
tâche. Mon père qui commençait à vieillir est devenu à un moment donné maussade et
très irritable. Nous commencions à nous quereller avec lui parce qu’il nous reprochait
toutes sortes de niaiseries et plus tard, les rancunes se transformaient en scandales.
Un soir, après une chaude dispute, j'ai pris ma famille et nous sommes allés à Zavoiu où
vivaient les parents de Virginica. J’ai laissé là-bas Florin et les jours suivants, nous
avons déménagé dans une chambre à loyer à « Balta Alba », un cartier dans les environ
de Bucarest. Puis, j'ai engagé une jeune fille de Transylvanie pour la surveillance de
Florin.
Après un certain temps, Virginica est restée de nouveau enceinte. Les conditions et la
situation de notre vie étant très difficiles et parce que de la précédente césarienne avait
passé pas beaucoup de temps, une nouvelle grossesse pourrait mettre en danger la
santé de Virginica et de son bébé. Compte tenu de cette situation, nous avons décidé
ensemble que Virginica doit l’avorter. Je ne me souviens pas pourquoi je n’ai pas été en
mesure de l'accompagner à la maternité. Elle est allée chez le médecin toute seule et a
interrompu sa grossesse en extirpant un garçon. À son retour, elle était irascible et on
pouvait lire sur son visage le regret de l’acte accompli. Elle a toujours aimé
passionnément ses enfants et surement le vide provoqué par cet avortement l’a marqué
énormément.
Après environ un an, mes parents ont commencé à nous tâtonner et à nous prier de
revenir chez eux. Au départ, j'ai refusé, mais Virginica m'a convaincu de les pardonner,
en me disant qu’ils étaient vieux et ils avaient seulement nous. Nous sommes revenus,
mais après un certain temps, mon père a repris ses anciens reproches.

Au cours de la période qui a suivi, Gamalet me donnait de plus en plus de tâches et


quand il fallait passer ses examens à la faculté, il m’amenait avec lui pour l’aider à Iasi,
en enregistrant ma présence au sein d'une équipe qui fonctionnait à une entreprise de la
ville. En réalité, je le préparais pour ses examens et ce n’était pas un problème si lui
était un homme normal et réceptif.
Le fait qu’il avait interrompu ses études depuis longtemps, qu’il était devenu un
alcoolique et en raison de sa maladie (épilepsie), il n’avait pas la capacité de retenir ses
leçons, ce qui me mettait dans une situation où il fallait que je lui répète des dizaines de
fois, la même chose et à mon tour, toutes celles-là me causaient de la fatigue et de
l'irritation persistante. Pas une seule fois, il m'a forcé à l’aider, même pendant la période
de mes vacances, sans aucune compensation ou rémunération et non pas une fois, il a
fallu que je renonce à mes obligations familiales pour le préparer.
D'autre part, Gamalet a tenté, à plusieurs reprises, de m’utiliser aux fins de ses buts, en
m'obligeant à rédiger des procès-verbaux pour mettre en lumière ce que l'on appelait
« des irrégularités » provoquées par un certain nombre de personnes qui
l’incommodaient et qu’il fallait a dû être sanctionnées ou licenciées de leurs fonctions. Il
visa à agrandir sa suprématie sur ces « ennemis », sans qu’il apparaisse sur la scène,
en premier plan.
Dans le cadre de ce climat, j’ai décidé de quitter le service CFI et respectif Gamaleţ.
En finissant ma faculté avec la notation de dix à l’examen d’état et suite de la création
au sein de la centrale industrielle à un bureau d'informatique, j’ai posé ma candidature
pour le poste de chef de ce bureau. Pendant ce temps-là, je suis devenu membre du
parti, pas pour le fait que j’avais été devenu communiste pendant la nuit, mais pour
pouvoir occuper une fonction correspondante à mes études, qui, à l’époque, était une
condition sacrée pour être nommé dans un poste d’administration.
Lors de l'acceptation de ma demande, j'ai été nommé à la tête de ce bureau, en étant
directement subordonné au directeur général adjoint de la centrale industrielle,
l’ingénieur Pintilie Ion. Ma nouvelle fonction m'a donné la possibilité de me spécialiser
dans mon domaine d’activité où je travaillais et, en même temps, de finir avec toutes les
corvées imposées par Gamalet.
Finalement, Gamalet a atteint la fin de ses études à Iasi, non pas par son intelligence,
mais en raison d'une série de cadeaux et de l'argent à de nombreux enseignants, ainsi
qu’à l'aide accordée par moi gratuitement et désintéressée.
Le fait que je l'ai quitté, Gamalet n'en a jamais oublié et au moment opportun, plus tard,
m'a frappé impitoyablement, sans être coupable dans la mesure décrétée par lui.

Au cours de l'été 1970, le mois d’août, je suis allé en vacances avec Virginica et Florin,
de nouveau, à la mer. Cette fois-ci, en ayant notre fils avec nous, nous ne faisions plus
les folies des années précédentes. Nous étions plus sobres, plus stables, même si nos
coeurs jeunes languissaient d’après les jours lorsque nous admirions le coucher du
soleil, or la merveilleuse lune. Nous passions par des lieux que nous les avons visités au
cours des années précédentes et qui nous rappelaient des détails qui ont contribué à la
cimentation de notre amour.
Nous nous sentions bien, nous nous jouions sur les plages avec Florin et lui
construisions des châteaux de sable décorés avec de petits coquillages recueillis sur les
bords de la mer. Parfois, les vagues moussées de la mer effaçaient ou détruisaient les
petits châteaux construits et alors Florin commençait à pleurer et ne terminait pas
jusqu'à ce que, à nouveau, nous lui construisions un autre.
À la fin de nos vacances et après notre arrivée à Bucarest, Virginica avait des états de
vertiges et de vomissements, de temps en temps. Elle était tombée enceinte, à
nouveau. Nous nous sommes tous les deux décidés de garder le bébé, même si mes
parents n'étaient pas trop heureux de la nouvelle reçue.
Le 14 avril 1971 à l'hôpital où est né aussi Florin, à l’aide du même médecin Dragotescu,
Virginica a accouché, par césarienne, une belle et sage fille qui contrastait avec Florin
dans la même période de sa naissance.
Je l'ai baptisée Ioana, comme un hommage à la soeur de Virginica, qui a le même nom
et parce que cette noble parente, Ioana Dobrinoiu, docteur en médecine dentaire, nous
a toujours aidés et soutenus.
Onuta, comme nous lui disions, était une sage fillette, qui dormait toute la journée et qui
n’a dérangé personne, pendant la nuit, tel que Florin le fessait au même âge. Elle avait
commencé à croître et à devenir une jolie fille. Elle aimait jouer avec Florin et pleurait
quand celui-ci lui volait ses joujoux ou lui donnait une chiquenaude, subrepticement.

En juillet 1971, par décret présidentiel, a été créée dans le quartier « Drumul Taberei »
de Bucarest la première entreprise du pays pour la fabrication de cuir synthétique, utilisé
dans l'industrie des chaussures et articles en cuir. Cette société, enregistrée à l'adresse
49, rue « Compositeurs », secteur 6, Bucarest, est issu d'une station pilote qui était
annexée à l'Entreprise des boutons situés dans son voisinage.
La nécessité de mettre en place cette entreprise a été dictée par le fait que, à l'échelle
nationale, la quantité de cuir véritable, qui était produite dans les tanneries ne couvrait
pas le nécessaire pour les usines de chaussures destinées à la population et pour
exportation. En outre, certaines des usines du secteur se sont développées et par
conséquent elles produisaient de grandes quantités de chaussures qui nécessitaient, à
leur tour, de plus en plus du cuir.
Dès le départ, le directeur général de la Centrale industrielle a nommé la direction
d’administration et à son tour, celle-ci a commencé à recruter du personnel administratif
et d'embaucher des travailleurs qui suivaient à se spécialiser dans cette nouvelle
industrie.
Parce que le cuir synthétique était un nouveau produit, le directeur général, Gheorghe
Popa, a eu l'idée de désigner à la tête de cette usine, une direction composée de jeunes
professionnels, où le directeur a été nommé ingénieur-chimiste Victor Negreanu, très
bien préparé pour les problèmes de chimie macromoléculaire, ingénieur en chef, Marcel
Diaconu avec la même spécialité et comptable en chef, c’est moi qui ai été nommé. Mon
élection pour le poste en question a été acceptée en raison de mon passé et de ma
contribution faite par moi dans une série d'actions au niveau de Centrale industrielle et
du Ministère.
Après ma nomination au poste de comptable en chef de l'entreprise de cuir synthétique,
j'ai profité du décret présidentiel qui a mis en vente par l'État des appartements propriété
personnels et j'ai acheté à un prix forfaitaire un appartement dans le quartier « Drumul
Taberei » dans la rue « Pascani ». Le nouveau logement était près de l'entreprise où je
travaillais, ce dont j’ai été exempté de faire la route, tous les jours, de mes parents
jusqu’à mon travail. De cette façon, j'ai fini, pour toujours, avec les discussions que
j’avais auparavant avec mon père et en même temps, je me suis approché de mon
travail. Maintenant, j’étais en mesure de travailler plus tard et en même temps je pouvais
me mettre au point plus facilement avec la technologie de fabrication de cuir
synthétique, ce qui m’a donné la possibilité de comprendre mieux la méthodologie de ce
nouveau produit pour traduire ses informations dans l’évidence comptable.
La technologie de fabrication du cuir synthétique a été développée sur la base d'une
invention brevetée par l'Institut roumain pour la recherche chimique, à Bucarest, dont le
directeur général était Elena Ceausescu, l'épouse du Président de la Roumanie, Nicolae
Ceausescu.
En tête de principaux auteurs du brevet était, Elena Ceausescu, qui en réalité et des
récits du personnel subordonné, n'a pas contribué, avec rien, à l'invention respective. Ce
sont les spécialistes de l'Institut de recherche chimique à Bucarest qui ont réalisé en
exclusivité le nouveau produit, mais qui n’ont jamais pu produire un cuir comparable
avec le même produit qui se trouvait déjà sur le marché international, et ça, à cause du
prix et d’autres éléments que je les développerai dans les paragraphes suivants.
L’ambition d’Elena Ceausescu était si grande, pour devenir, d’ici au lendemain, une
grande savante de réputation internationale dans le domaine, qu'elle a tout fait pour
cette invention, pour être acceptée et mise en pratique, quels que soient les résultats
désastreux qui ont eu lieu après.
Les principales caractéristiques de l'invention ont été copiées après des technologies
existantes à l'étranger par un certain nombre de spécialistes qui faisaient espionnage
industriel.
Après l'homologation du brevet et de la technologie, testé sur une station pilote qui n'a
jamais été en mesure de faire un cuir correspondant aux normes internationales, le
problème du cuir synthétique a été transféré à l'Institut de recherches et de conception
pour l'industrie légère et subordonné au Ministère de l'Industrie légère.
Cet institut a déplacé, dans le cadre d’un contrat, un groupe de spécialistes qui ont testé
la technologie approuvée et ont formé, sur une longue période de temps, les travailleurs
qui devaient se spécialiser dans la fabrication de celle-ci. En même temps, une partie
des chercheurs se sont déplacés à l'étranger et ils ont essayé à copier certaines
fonctionnalités du produit déjà fabriqué par plusieurs entreprises de profil.
Les outillages et les appareillages nécessaires à la fabrication du nouveau produit ont
été achetés de l'Allemagne, de la compagnie « Bruckner », sans technologie, celle-là
étant réalisée dans le cadre du brevet approuvé par Mme Elena Ceausescu. La plupart
des matières premières ont également été acquises des sociétés étrangères de Shell,
Bayer et d'autres.
Les entreprises étrangères qui ont rendu à la Roumanie les machines, les équipements
et les matières premières pour la fabrication de cuir synthétique ont montré, dès le
départ, qu’on peut faire un cuir correspondant aux normes internationales, mais elles
n'ont pas révélé le secret de fabrication du produit, que la Roumanie a refusé d'acheter
et de payer la technologie étrangère, celle-ci étant appliquée dans le pays sur la base du
brevet de madame Ceausescu.
De ce fait, jamais, l'Institut de recherches et de conception pour l'industrie légère (IPIU)
n'a pas réussi à réaliser et à valoriser un produit compétitif.
Un autre problème particulier au cuir roumain a été son prix. Celui-ci, en réalité, était
beaucoup plus élevé que les prix du même produit acheté à l'étranger. Par conséquent,
le Ministère et la Centrale industrielle ont été forcés, même obligés, de faire toute sorte
d’arrangements pour réduire artificiellement le prix du cuir, en prenant des certains coûts
relatifs au produit fabriqué par l’entreprise de cuir synthétique et puis distribués, dans le
secteur de la fabrication des chaussures, à d’autres entreprises de profil.
Ils ont utilisé et détourné en permanence des fonds de nouvelles techniques et
d'investissement pour couvrir le déficit et, parfois, ils ont payé une grande partie des
salaires de travailleurs de l’entreprise de cuir synthétique des fonds des salaires
destinés à d’autres entreprises du secteur de chaussures.
En ce contexte, on a embauché, maintenu et payé une partie des travailleurs qui ont
effectivement travaillé dans l'entreprise de cuir synthétique, des fonds de salaires à
d’autres entreprises du secteur des chaussures.
Les matériaux de base ont été achetés à l'étranger, pas en fonction de la qualité, le prix
et les caractéristiques nécessaires à la fabrication du nouveau produit, mais en fonction
des sommes d'argent et des cadeaux que les entreprises étrangères les offraient aux
certains représentants du ministère, de la Centrale industrielle ou des entreprises de
commerce extérieur. L'étude comparative, des offres des produits en question, a été
rédigée de manière à donner l'impression que ce qui était proposé de s’acheter était la
meilleure alternative. Personne ne contrôlait la documentation d’étude comparative, car
personne ne savait quoi que ce soit sur le cuir synthétique, à l'exception de ceux qui
étaient intéressés à acheter des matières premières dans les conditions indiquées. Par
conséquent, des quantités importantes de matières ont été détruites par incinération ou
tout simplement jetées à la poubelle ou aux égouts, au lieu d'être retournés aux
fournisseurs, soient pour les échanger ou soit pour la restitution des sommes
encaissées par eux.
Le représentant de la compagnie Bayer, Walter Klein, venait souvent à l’entreprise de
cuir synthétique et offrait des matériaux qui faisaient partie de la nomenclature du cuir
synthétique, mais qui n’étaient pas testés et approuvés dans le cadre de la technologie
en fonction. En échange de certains cadeaux très importants à ceux qui avaient le droit
d'approuver les matériaux en question, Walter obtenait les avis nécessaires ce qui lui
donnait le « feu vert » pour livrer les marchandises, sans l’avis des entreprises de
commerce extérieur et sans étude comparative des offres. Dans de nombreux cas,
après les testes des matériaux concernés, on constatait qu'ils ne sont pas bons pour le
cuir synthétique et, ensuite, une grande quantité de ces matériaux étaient détruites et
enregistrés ultérieurement sur les coûts de fabrications, ayant comme base les procès-
verbaux rédigés par les technologues de l’entreprise
Le plus éloquent exemple a été l'acquisition du produit de « diméthylformamide »,
hautement toxique, qui entrait dans la composition du cuir synthétique. Très souvent, ce
matériel quand on constatait que sa qualité n'est pas correspondante, était jeté, en
quantités de l’ordre des tonnes, dans le canal et déversées par les pipelines
correspondants dans les eaux de la rivière « Dambovita », en l’infestant. Le résultat était
désastreux parce que les eaux de Dambovita étaient empoisonnées par ce produit, ce
qui faisait que la flore et la faune de la rivière étaient détruites. En outre, comme le
Bucarest était approvisionné avec de l'eau potable de cette rivière, à l'époque, a été
retrouvée, par le ministère de la Santé, une augmentation anormale du nombre
d'infertilités masculines, car ce liquide avait comme effet et produisait cette maladie
caractéristique aux hommes dans situation dans laquelle la diméthylformamide venait en
contact direct avec le corps humain.
En outre, ce matériel produisait de cancers aux femmes et pas une fois certaines
salariées qui travaillaient aux outillages pour la fabrication du support non tissé, ont été
contaminées et contraints de suivre des thérapies anticancéreuses et par la suite leurs
cheveux chutaient et avaient sur leur peau de nœuds spécifiques à cette maladie. Tous
les organes concernés en savaient, mais personne n'a pris de mesures pour protéger la
santé publique.
Avec tous les efforts, visant à protéger le nom de Mme Elena Ceausescu, auteure
principale et officielle du brevet de cuir synthétique, jamais, on n’a pas pu atteindre un
niveau élevé de qualité pour le cuir synthétique et en particulier avec un prix compétitif.
La qualité du cuir synthétique produite dans les conditions mentionnées était déplorable
et les produits toujours refusés par les usines de chaussures, ce qui provoquait des
manques majeurs de fonds de financement et qui affectaient les ressources financières
de l'entreprise. Parmi d’autres livraisons, l'entreprise il fallait assurait pour la Réserve
d'État une grande quantité de cuir synthétique. Les ballotes de cuir, scellés qui portaient
la vise du contrôle technique de qualité, cachaient sous un bel emballage, tous les
rebuts qui ne pouvaient plus être utilisées ou valorisés par l'entreprise.
Après une période de six mois, lorsque le stock de cuir synthétique était remplacé à la
Reserve d’État, les quantités initiales de cuir qui avaient été vendues et retournées à
l’entreprise, étaient déclarées des pertes, alléguées, par leur stockage non-
correspondant.
Par la suite, on rédigeait des procès-verbaux qui servaient à leurs enregistrements sur
les coûts de fabrications. En même temps, on envoyait de nouveau à la Réserve d’État
d'autres ballotes de cuir rebutées ou déclassés sous le même bel emballage.
Dans ce contexte catastrophique, avec l'approbation tacite du Ministère et de la
Centrale industrielle la direction d’administration de l’entreprise a été forcée d'acheter et
de distribuer sous forme de cadeaux, une gamme de produits de consommation afin
d'obtenir certaines approbations de la part des institutions de qui dépendaient le
fonctionnement normal de l'entreprise, comme la Banque d'investissement, le Comité
d’État de la planification, le Comité l'État pour les prix, les bases d'approvisionnement,
les entreprises de commerce extérieur et même le Secteur de parti.
Très souvent, les trois membres de la direction d’administration de l’entreprise se
réunissaient et examinaient les résultats désastreux obtenus par l'application du brevet
de Mme Elena Ceausescu :
- Aujourd'hui, déclarait le directeur Negreanu Victor, j'ai été informé par le chef de
la section de support non tissu que d'autres quantités de ce matériel ont été
rebutées et presque je ne sais plus quoi faire avec eux. Nous avons dépassé
depuis longtemps les normes admissibles. Il va falloir probablement les détruire
comme les autres. La Centrale industrielle me dérange toujours de prendre des
mesures visant à améliorer la qualité des produits. Il y a des abrutis qui ne
parviennent pas à se rendre compte que notre produit est déjà mort pendant sa
naissance.
- Hier, disait l'ingénieur en chef Marcel Diaconu, l'Institut (IPIU) a tenté à nouveau
une autre forme de la combinaison du support non tissu. Le résultat a été le
même : rebut total. C’est pour la vingtième fois qu’ils ne réussissent pas faire un
bon non tissu. Vous devriez en parler à la Centrale ou même au ministre
d'intervenir personnellement à se renoncer à la technologie actuelle et de
s’acheter un brevet à l'étranger. Il s'agit d'un crime pour ce qu'il est. Ils ont
dépensé des dizaines de millions de dollars pour acheter les outillages et ils ne
veulent pas payer un supplément de deux ou trois millions pour la technologie de
fabrication étrangère.
- Hier, je leur ai dit, j'ai fait une synthèse de la valeur des produits rebutés et
déclassés enregistrés jusqu'à présent par notre entreprise. Si je vous dis le
montant, vous allez défaillir. Environ 46 millions de lei, qui transformés en
monnaie étrangère de 15 lei pour un dollar, sur la base du taux en circulation,
donne un moyen de plus de trois millions de dollars, ce qui est exactement le
montant dont nous avons besoin à acheter une technologie à l'étranger, comme
vous le dites Marcel. Si on prend en compte d'autres éléments qui n'affectent pas
les coûts de fabrications telles que les sommes accordées par le ministère pour
de nouvelles technologies ou d’investissements qui ont été effectivement
dépensées pour le produit, le total aurait été beaucoup plus élevé. Voici la vraie
réalité.
- Malheureusement, dit Negreanu, nous sommes trop petits pour décider de
l'avenir de cette entreprise.
- Oui, nous sommes petits, dit Marcel, mais s’il est une enquête, qui va répondre ?
Nous ! Popa (le directeur général de la Centrale industrielle), nous a loué que
nous sommes jeunes et très bien préparé, qu’il a choisi la meilleure équipe pour
cette entreprise, mais dans une autre situation il va s’enfuir comme un lapin. Ce
n’est pas nous les coupables, mais eux qui veulent faire le jeu à madame
Ceausescu. J'ai entendu parler qu’elle veut maintenant avoir le titre
d’académicienne à côté d’autres titres qu’elle les a présentement, respectif :
docteur en chimie, professeur d'université et directeur général de l'Institut de
recherche en chimie, avec ses quatre ans d’école primaire. C’est une parodie !
Tous les trois, nous avons commencé à rire de la remarque de Marcel et après un
moment il a continué :
- Je propose de faire une documentation basée sur des chiffres réels des
entreprises et non sur la base des rapports qui cachent tous les malheurs de
l’entreprise. On va la signer, tous les trois et après on va l’envoyer à la Centrale
industrielle ainsi qu’au Ministère.
- Puiu, a dit Negreanu, montre-moi les calculs que tu les as fait pour m'inspirer
dans la rédaction du document que je veux le faire. La Centrale nous a approuvé
un autre fond de nouveaux techniques avec lequel nous pouvons jongler, pour
acheter des cadeaux qu’on va les donner à nos camarades de lutte qui nous
aide à résister encore un peu. De plus, nous avons obtenu des fonds pour des
repas au restaurant, qu’on va les dépenser pour les non-mangés de la banque et
du Comité d'état pour les prix et peut-être pour d'autres. Dans les
documentations de justification de ces dépenses, on va introduire d’autres
personnes en plus que ceux qui vont prendre effectivement part à la table, parce
que, comme tu le sais, on ne peut pas dépenser plus de 60 lei par personne. Or,
nous ne pourrions jamais nous encadrer dans l'échelle de ce montant, lorsque
nos camarades vont commander du champagne et du caviar. Je te donnerai la
liste de ceux qui vont apparaître dans la documentation des dépenses. Et
maintenant, au travail, parce que l’ivrogne de Gamalet va venir et va nous
menacer à nouveau avec notre licenciement.
C’est comme ça que se déroulaient nos conversations et pas une fois, chacun de nous il
a fallu cacher la vérité pour que quelqu’une là-haut, à qui on ne pouvait pas l’atteindre
soit applaudie sur les grandes scènes des universités internationales et déclarée
« Docteur honoris causa ».
La documentation proposée par l'ingénieur Marcel Diaconu a été envoyée au Ministère à
qui on n’a jamais reçu de réponse.

Parmi nos employés étaient ou avaient été recrutés, dans le temps, des informateurs,
par la sécurité, la milice et le Secteur de parti. Ils avaient la tâche d'informer les organes
intéressés sur tout ce qui bougeait dans l'entreprise et en échange ils recevaient de gros
sommes d'argent.
Parmi ceux qui avaient été recrutés se trouvaient un employer du service
d’approvisionnement qui se nommait Nicolae Constantin et qui avait la tâche principale
d'informer la sécurité et la milice sur les cadres d’administration de l’entreprise tant à
l’intérieur qu’à l'extérieur de l'usine. Cet informateur se réunirait régulièrement, en
dehors des heures de bureau, avec le déléguer de la sécurité qui s’appelait Ion Ionita,
soit dans une résidence privée d'un autre informateur ou d'un secouriste à la retraite ou
dans un parc ou un restaurant. Chaque fois, Nicolae, ainsi que les autres informateurs,
qui avaient des nommés conspirateurs, donnaient les informations par écrit ou
oralement.
Parmi d’autres tâches, Nicolae s’occupait sur la ligne professionnelle avec
l’approvisionnement du latex nécessaire à la fabrication du support textile non tissu. Ce
produit était approvisionné d’importe étant emballé dans de grosses tonnes en plastique,
qui suite à leur déversement étaient après stockées pour être ultérieurement vendues.
Dans de nombreux cas, un certain nombre de tonnes se détérioraient par manipulation.
Dans de tels cas, Nicolae dressait des procès-verbaux pour leurs destructions et leur
transport vers des endroits où se trouvaient les déchets collectés de Bucarest. Après,
les procès-verbaux étaient approuvés par le directeur et enregistrés dans l’évidence
comptable.
À un moment donné, j'ai remarqué que dans les procès-verbaux, Nicolae inscrivait un
plus grand nombre de tonnes détériorées que dans la réalité. Dans ces circonstances,
j'ai commencé à poursuivre étroitement l’activité de Nicolae en constatant, après un
certain temps, qu’il sortait les tonnes et les vendait sur le Marché Moghiorosi du quartier
« Drumul Taberei ». J'ai immédiatement informé le directeur Negreanu Victor, qui a
décidé de le mettre à pied, sans informer les organes de poursuite pénale. La décision
de ne pas le mettre en prison a été guidée par l'idée qu'il pourrait déclencher une
nouvelle enquête de la part de Gamalet qui attendait depuis longtemps une telle
occasion.
Après avoir annoncé Nicolae de la décision du directeur, il a immédiatement pris contact
avec l'agent de sécurité à laquelle il donnait ses rapports et par la suite le directeur a
reçu un appel du Ministère de l'Intérieur, d'un haut gradé, qui lui a dit d'annuler sa
décision contre Nicolae. En même temps, il a dit que si le directeur refuse, il va avoir des
problèmes avec son passeport lorsqu’il va voyager en étranger. Bien entendu, Negreanu
a immédiatement annulé sa décision de mise à pied en donnant à Nicolae d'autres
tâches. Étant donné que celui-ci savait d’où venait l'information vers le directeur, il a juré
de se venger contre moi et plus tard, il m’a frappé impitoyablement.
Le Secteur de parti avait également un informateur qui s’appelait Paun Ion, un noble
gitan, qui a été nommé chef du service du personnel et plus tard secrétaire du Parti.
Paun profitait pleinement de ses fonctions, en prenant toujours soin d'exiger aux
nouveaux employés des montants d'argent ou des biens de consommation en nature,
telle que poules, oeufs, légumes, etc., si les nouveaux employés étaient venus de la
campagne.
En dehors de ceux-ci, il recevait de l'argent pour d'autres services qu’il faisait comme
l’obtention des bulletins de Bucarest et des logements du fond de l'État, ainsi que bien
d'autres.
Un jour, près des fêtes d'hiver, Paun est entré dans mon bureau et m'a dit, parmi
d’autres choses, que ceux du Secteur du parti auraient désiré avoir un « souvenir » de
notre entreprise.
- Je pense, dit-il, qu’il serait bien d'acheter de belles chaussures ou quoi que ce
soit d'original pour les donner aux camarades du Secteur de parti. Comme vous
le savez, le camarade Chitimia (le premier secrétaire du Secteur de parti) nous a
toujours aidés à résoudre de divers problèmes avec succès et, par conséquent,
je voudrais profiter des fêtes d'hiver pour en leur faire un petit cadeau. Je vous
dis très franchement que je suis gêné, lorsque je me rencontre avec eux au
Secteur de parti et en particulier avec Chitimia qui, quand il me voit, me dit : «
Eh bien Paun, vous vous ne pensez plus à nous, pour nous donner un petit
cadeau de ce qui fabrique votre institut de cuir ? ». En fait, j'ai aussi parlé avec le
camarade directeur Negreanu qui a été entièrement d'accord avec ma
proposition. Que pensez-vous ?
- Camarade Paun, que puis-je dire ? Vous savez que nous sommes sur le point de
nous dissoudre à cause de l’application du brevet imposé par… vous savez
qui… et en raison de cette violation de la loi nous continuons à fabriquer un cuir
non correspondant aux besoins des entreprises de l’industrie de chaussures et,
en même temps, nous utilisons nos fonds à d'autres activités. La situation est
très dangereuse et je ne sais pas comment résoudre cette équation, à la fin.
- Oh, camarade comptable en chef, pourquoi parlez-vous comme ça ? Vous
pensez que nos camarades du Secteur de parti vont cesser à nous aider ? Le
camarade Chitimia est un homme d'honneur et je ne pense pas qu'il ait pu faire
quelque chose de mal. Par conséquent, après que je me conseille avec le
camarade directeur, c’est moi qui va préparer tous les documents pour les
cadeaux que je veux donner aux camarades du Secteur de parti. Je vous
promets que vous n’aurez aucun problème.
- Si le camarade directeur ou ingénieur en chef approuve les procès-verbaux
rédigés par vous, je ne peux rien dire et il faut que je doive me conformer.
- Bon, nous avons convenu, dit-il, je vais personnellement faire les achats de
cadeaux !
Plus tard, j'ai appris que Paun a acheté aussi d'autres objets de valeur qui ne se
retrouvait plus dans les procès-verbaux rédigés par lui.
Au début de l'automne, dans un samedi, je voulais aller avec ma femme à la campagne,
à ses parents pendant deux jours. Je suis allé au directeur de lui notifier cette décision,
car la règle était d’annoncer quand quelqu'un du conseille d’administration quittait
l’entreprise en dehors de la ville, en laissant le numéro de téléphone et l’adresse pour
éventuellement le rejoindre en cas d’urgence. Quand je suis entré au bureau du
directeur, celui-ci parlait avec Paun, le secrétaire du parti. En m’adressant à tous les
deux, je leur ai dit que je voulais m’en aller à la campagne après avoir terminé le
programme de travail et que j’y resterai deux jours. Après, je suis retournée dans mon
bureau et peu de temps après Paun est venu chez moi et a dit :
- Alors, camarade comptable en chef, vous allez à la campagne aux poulets rôtis à
l'ail avec de chaudes « mamaliga » et au vin avec « bardaca » (grande pinte).
- Oui, en effet, parce que je veux amener mes enfants chez moi. Ils y sont depuis
longtemps et je veux les préparer à temps pour la nouvelle année scolaire.
- Et vous dites qu'il fait beau là-bas ? Je suppose que maintenant, on recueille les
cultures d'automne et on remplie les granges avec oignons, pommes de terre,
carottes et « tuica » de prunes. Vous savez... à la fin de cette semaine, je suis
seul chez moi parce que ma femme et ma fille sont parties à la montagne.
Voudriez-vous me prendre avec vous pour que je puisse respirer un peu d’air
frais de campagne ?
J'ai fait une pause parce que je ne m'attendais pas à une telle proposition. Si je refusais,
je ferais un ennemi dans la personne du Paun, qui ne m'avait trop à son coeur parce
que j'ai refusé, à plusieurs reprises, de lui accorder un certain nombre d'avantages
personnels que Paun m’avait sollicité. Puis j’ai pensé qu’une personne de plus n’aura
pas dérangé ma famille qui a toujours été très polie avec mes invités.
Puis, en m'adressant à Paun, je lui ai dit :
- Si vous n’avez quelque chose à faire, je n'ai rien contre. Ma famille, ainsi que les
parents de mon épouse sont très accueillants avec tout le monde.
- Avec quoi on va nous y rendre, avec le train ? a-t-il demandé.
- Oui, jusqu’à la station de gare « Matasaru » et après à pied vers le village
« Zavoiu ». Dans une demi-heure, nous y sommes.
- Je veux vous faire une proposition. Y allons avec ma voiture. Nous arrivons plus
rapidement !
- Votre idée n'est pas mauvaise, mais je veux vous payer l’essence consommée.
- Oh, camarade Munteanu, le plaisir est pour moi. Après que vous me prenez avec
vous et que j’y reste deux jours avec de bonnes nourritures, que je pense, il faut
que vous deviez aussi me payer l'essence. Cela ne se peut pas !
Après notre discussion, j’ai convenu avec Paun à nous rencontrer dans deux heures
après le programme de travail. Paun suivait se rendre chez moi avec sa voiture pour
aller à Zavoiu.
À l’heure fixée, Paun est arrivé et ensemble, avec aussi ma femme, nous sommes tous
allés à Zavoiu. Après notre arrivée, Paun a commencé à inspecter tout ce qui y était : la
maison, l'entrepôt, le jardin de légumes et même le verger de pruniers, en disant qu'il
aime la ferme de mes beaux-parents. Pendant les deux jours que Paun y a passés, il a
mangé et bu tout le temps que tout le monde croyait qu’il va faire une attaque de cœur.
Au départ, Paun m’a dit qu'il voudrait prendre un peu de pommes de terre et quelques
oignons pour sa famille. Comme mes beaux-parents n’avaient pas chez eux une
quantité suffisante d’oignon, ils m'ont dit que je pourrais en prendre pour Paun
directement, à partir de leur lot de terre qui se trouvait près de la route. Une fois y arriver
Paun a commencé à déraciner une grande quantité d'oignons et la mettre dans un
grand sac qui l'avait porté au départ de Bucarest. Comme justification, il a dit :
- Laissez camarade Munteanu, que vos beaux-parents n’appauvriront pas pour
quelques oignons de moins que j’ai pris !

Au cours de l'été 1973, il y a eu lieu d'autres réorganisations des Centrales industrielles


et entreprises par la fusion des unités industrielles, par la suppression des bureaux et de
services, en leur sein.
Suite à cette action du gouvernement, l’ingénieur Surcel Gheorghe, directeur dans la
Direction d’exporte de la Centrale Industrielle, a été nommé directeur de notre entreprise
de cuirs synthétiques, Negreanu Victor, ex-directeur a été nommé ingénieur en chef et
moi, j’y suis resté comme comptable en chef.
Le nouveau directeur était bien préparé du point de vue professionnel et il avait
beaucoup de relations à travers lesquelles l'entreprise pouvait se raccommoder avec
des fonds de courte durée, en utilisant le système de cadeaux mentionnés ci-dessus.
Il lui arrivait souvent de se rendre à l'étranger, non pas pour les affaires de l'entreprise,
mais pour d'autres actions qui étaient organisées, suivies et gérées par la sécurité
roumaine. Son agent de liaison du Ministère de l'Intérieur était un grand homme
d'environ 1,80 mètre, maigre, aux cheveux foncés, visage d'olive et très bien habillé.
Dans notre entreprise il était surnommé par nos fonctionnaires « l’homme en noir »
parce qu’il portait toujours des vêtements sombres.
Lors de son arrivée à l'usine, le directeur Surcel afin de ne pas être dérangés par
personne, même pas par son épouse, il bloquait son bureau et parlait avec son invité
parfois pendant des heures.
Les réunions de Surcel avec ce personnage avaient lieu, chaque fois, peu de temps
avant son départ à l'étranger, où il y restait parfois, même un mois. Ultérieurement, on a
appris que Surcel fonctionnait comme espion de la sécurité roumain à l'étranger.
Ma relation avec Surcel a été très bonne parce qu'il me connaissait à partir du moment
où je travaillais comme réviseur-comptable agréé dans le ministère, puis à la Centrale
industrielle.
Pas une seule fois, nous sommes allés ensemble avec nos femmes, à des restaurants
et théâtres. Surcel aimait la vie, les femmes et le steak tartare préparé à la viande de
veau crue. Parfois, il me consultait sur des questions économiques et il disait qu’il ne me
changerait pas, pour rien au monde, avec personne.

Au printemps de 1975 ont eu lieu en Roumanie des élections pour la Grande Assemblée
nationale, sous la direction du Front démocratique et de l'Unité nationale. Ce « Front »
mis en place et orchestré par la direction du Parti communiste roumain était une version
déguisée et imposée à la population pour que les personnes qui avaient été désignées
comme candidats soient élues d'office avec ou sans l’appui des gens. Les données
publiées après l'élection, elle-même confirme que les élections en Roumanie
communiste ont été dirigées par le Centre du Parti communiste. Ainsi, du total des votes
exprimés de 14.894.185, seulement 593 votes ont été annulés, la différence étant
accordée aux communistes, en n’étant enregistré aucun vote contre le Parti
communiste. Cette mascarade.électorale a pu être possible parce qu'en Roumanie, il n'y
avait pas d'opposition politique et donc le Parti communiste faisait ce qu'il voulait, sans
que personne ne pût s'opposer à la fraude électorale qui a eu lieu chaque fois.
Le 9 mars 1975, j’ai fait partie d'une commission électorale qui a travaillé dans une école
dans le Secteur 6 de la capitale. Paun, notre secrétaire de parti a été nommé président
de cette commission et moi, j'ai été nommé le secrétaire de la commission. Après la
fermeture des élections et après le comptage des votes, plus de 60 % des suffrages
exprimés étaient opposés à la nomination du candidat proposé par le Parti communiste
et donc il fallait annuler les élections dans cette circonscription. La plupart des votes ont
été exprimés contre le candidat du Parti et sur les votes enregistrés étaient inscrites des
insultes contre le Parti communiste et certains ont même été contaminés par des
excréments humains.
Dans cette situation, Paun, le président de la commission électorale a téléphoné au
Secteur 6 de parti et peu de temps après est arrivé à la place le secrétaire du parti du
secteur 6, Chitimia Costica qui a apporté de nouveaux formulaires de votes non remplis.
La commission a remplacé les suffrages exprimés contre, par ces formulaires. Comme
le temps ne permettait plus que les nouveaux formulaires de votes apportés par Chitimia
soient marqués comme des votes en faveur des communistes, ils ont été scellés tel quel
avec les autres bulletins de vote dans des boîtes conçues pour préserver les suffrages
exprimés sans être marquées et même pas pliées.
Après avoir terminé le rapport rédigé par le Président de la commission, Paun Ion a
noté 100% en faveur du Front de la Démocratie et de l'Unité socialiste et il m'a donné
les votes exprimés contre le Parti pour les détruire en les brûlant. Le fait que j'étais à
l'intérieur d'une école et pour ne pas éventuellement provoquer un incendie, j'ai décidé
par moi-même de ne pas bruler ces votes et à ce titre je les ai jetés derrière un armoire
qui se trouvait dans le couloir principal de l'école où étaient exposés à une série
d'animaux empaillés.

Après cet événement, au cours de l'été 1975, j'ai remarqué que Surcel n'était plus
l'homme que j'ai connu auparavant. Il était toujours inquiet, nerveux, indifférent aux
débats et souvent il faisait de mauvaises gaffes, en arrivant au travail mal habillé, sale et
non rasé ce qui était contraire à ses habitudes d’avoir toujours une tenue élégante et
impeccable.
Au cours de cette période de temps, souvent il venait dans mon bureau, s’asseyait dans
un fauteuil et en soutenant sa tête avec ses mains, soupirait, en me disant :
- Je me sens très fatiguée et découragée. Depuis quelque temps, je me réveille
pendant la nuit à cause des certains cauchemars qui me suivent toujours. J'ai
essayé toutes sortes de méthodes, de même le yoga pour m’en débarrasser. Je
suis allé même aux médecins, mais rien. Pas les problèmes d'usine me
troublant, mais d'autres plus graves.
- Que peut-on si mal ? je lui ai dit
- Il y a des choses que je ne peux pas dire à personne et, malheureusement,
personne ne peut m'aider. Ils vont me tuer !
- Que de choses sinistres, tu dites ! Qui va te tuer et pourquoi ? Ici, nous ne
sommes pas dans la jungle ou dans les romans avec cowboys !
- Que sais-tu... nous sommes plus mauvais que tu t’imagines. Ici, d’autres
personnes décident nos destins, avec ou sans notre gré !
- Pourquoi ne prends-tu tes vacances à la mer ou à la montagne pour échapper à
cette marotte ?
- Peut-être pour le mois prochain, mais je ne sais pas exactement où y aller. Je
pense qu’à la fin, je me rendrai aux monastères dans le nord de la Moldavie où
j’y allumerai dans chaque église une bougie afin que Dieu aille jeter son regarde
sur moi.
Surcel a fait une pause et puis il a poursuit :
- As-tu vu ma nouvelle voiture ? J'ai suivi tes conseils et je l’ai achetée en couleur
verte. Elle est vraiment plus esthétique que les voitures qui sont présentement
sur le marché !
- Oui, je l'ai vu et l’ai constaté que tu as fait quelques améliorations.
- Oui, je l'ai acheté directement de l'usine. J'y ai quelques amis qui m'ont aidé à ne
pas attendre six mois pour l'achat. Puis il se mit debout et a dit : bon, maintenant
je te laisse pour travailler et on va continuer notre conversation, une autre fois.
Après cette conversation, en moins d'une semaine, après son arrivée au travail, vers 10
heures du matin, Surcel est parti avec l’automobile de notre entreprise dans le quartier
« Militari » où se trouvait l’autre section de l'entreprise.
L’entreprise de cuir synthétique avait deux sections : l'une située dans le quartier
« Drumul Taberei », l'emplacement de « Ghencea », où se produisait le support textile
non tissu et où se trouvait aussi le pavillon d’administration et une autre section dans le
quartier « Militari » où se finissait le cuir synthétique.
Lorsque Surcel est arrivé à la porte du département « Militari », a dit à son chauffeur
pour y attendre quelques minutes et non pas d’entrer à l'intérieur de l'usine, car il ne va
pas y retarder.
Après cela, il se dirigea au fond de la cour et il est sorti du périmètre de l'usine en
direction d'un chemin de fer qui n'est pas trop loin de l'emplacement de la section, selon
qu’on a déclaré quelques travailleurs qui l’ont vu. Son chauffeur a attendu environ une
heure et ensuite il est allé le chercher en regardant à travers l'usine, dans la cour, à la
centrale thermique, partout, mais il ne l’a pas trouvé, nulle part. Surcel avait disparu.
Immédiatement, son chauffeur a alerté la direction de la section et a téléphoné au siège
central de l'usine. Ingénieur en chef Negreanu se trouvait à l'étranger, en Allemagne.
Peu de temps après, sont arrivés le comptable en chef de l'entreprise, le directeur
général de la Centrale industrielle, des représentants de la police et de la sécurité.
Surcel a été cherché pendant deux jours, partout. Ils ont fait des recherches
approfondies. Des chiens spécialisés y ont été amenés qui ont perdu sa trace près de la
voie de chemin de fer ainsi que du matériel de détection. Finalement, il a été retrouvé
mort, dans un bassin d'eau qui alimentait la centrale thermique.
Son autopsie a constaté que Surcel n’avait pas de l'eau dans ses poumons et par
conséquent, il avait été tué avant d'être jeté dans le bassin. Par la suite, on a appris, de
sources non officielles, que Surcel a été tué par la sécurité roumaine. L’agent de la
sécurité qui venait à Surcel, « l'homme en noir », n’a jamais mis son pied à l'intérieur de
l'entreprise après cet événement.
La période qui a suivi a été très difficile pour moi parce que j'étais le seul dirigeant de
cette entreprise avec tous les problèmes sur ma tête. Negreanu est revenu au pays plus
tard, après environ 20 jours, au cours du lequel je suis toujours resté dans l'entreprise.
L'enquête instituée a alerté tous ceux qui avaient profité à partir de notre entreprise. Peu
de temps après ce triste événement a été nommé un nouveau directeur dans la
personne d’Oprisan Ion qui avait occupé la même fonction, mais à l’entreprise de
boutons située dans le voisinage.
Dans telle situation, la Centrale industrielle et le Ministère ont pris leurs mains sur
l’entreprise. On véhiculait l'idée que quelqu'un aurait saboté l’entreprise. On recherchait
un coupable pour couvrir le désastre qui a eu lieu dans notre entreprise.
Pour échapper à leurs accusations et s’en sortir de leur merde, les vrais auteurs du
drame du cuir synthétique ont donné feu vert à Gamalet pour faire une enquête et
trouver un coupable qu’il fallait répondre pour tout. Gamalet, suite à son enquête, a jeté
l’entière responsabilité sur mon dos, sans tenir compte de rien et comme si moi, j’étais la
seule personne qui a travaillé et a pris de décisions dans cette entreprise. Gamalet, par
cet acte s’est vengé contre moi parce que j’ai eu le courage de le quitter sans son
autorisation et en même temps, de lui refuser ces demandes, pour l’aider à renforcer sa
position et son pouvoir à l'encontre, soi-disant, de ses « ennemis » qui ont voulu le
remplacer, pour son incompétence.
La cible de Gamalet contre moi, a été très facile à réaliser et toucher, parce que je
n'avais aucune protection, de nulle part, en opposition avec les autres qui avaient leur
dos bien protégé à tous les niveaux. Moi, j'ai occupé le poste de comptable en chef par
mes propres forces et par le travail fort que j’ai fait pendant des années, sans aucun
soutien, comme avaient les autres. Gamalet, qui savait tout cela, m’a crucifié seulement
moi, avec beaucoup de facilité, sans crainte qu'il peut ensuite payer s’il impliquait
d'autres personnes qui étaient, en réalité, les vraies coupables et qui avaient leur dos
assuré et soutenu par des relations. Par cet acte, Gamalet est apparu à leurs yeux
comme un sauveur de leurs intérêts, en gagnant ainsi la confiance de ces personnes, ce
qui lui a permis de renforcer encore sa position sociale et personnelle.

La stigmatisation de ma vie m’avait frappé, à nouveau, avec tout son pouvoir.

Peu de temps après, j'ai été arrêté chez moi. À la perquisition menée par les organes de
milice, ils n’ont rien trouvé au sujet de mon arrestation, pas d'argent et aucun produit.
Selon l'acte d'accusation, ils ont posé sur mon dos des accusations et allégations très
graves comme : le sabotage de l'économie nationale, de grands détournements de
fonds de l’entreprise par l’ordre des millions, de faux et usage de faux, de fraude,
d'incitation à la fraude et de nombreuses autres accusations, qui étant additionnées, il
fallait que je prenne une peine d’au moins deux vies.
En première instance, l'enquête a été dirigée par le major Scuturici Alexandru enquêteur
à la Section 12 de milice. Après mon arrestation, j’ai été conduit et emprisonné dans le
sous-sol de cette section, dans une cellule, où étaient encore dix autres prisonniers de
droit commun. Après avoir été mis au courant, en grand, avec le contenu de la
vérification menée par Gamalet et les accusations portées contre moi, dans une
première déclaration écrite, j’ai nié tout. Alors, le majeur Scuturici a dit :
- Laisse, que tu vas dire tout et m’a giflé deux fois.
Rentré dans ma cellule, je suis tombé dans un état d'agitation et de dépression. Je me
récapitulais tous les événements que j’ai vécus à l'usine, tous les problèmes et difficultés
à qui j’ai assisté impuissant, sans droit d’appel, générés par ces personnes qui, au
début, ils m’admiraient et me flattaient et, finalement, ils m’ont jeté dans le trou
d’ordures.
Je réalisais ma grande erreur de ne pas quitter ma fonction et mon usine où j’y ai
constaté le désastre du cuir synthétique. J’exprimais mon étonnement tacite, comment
c’est arrivé que seulement moi, j’ai été inculpé, même si les principaux et réels
responsables étaient en toute liberté et librement par n'importe qui. Bien sûr que j’avais,
moi aussi, une culpabilité parce que je n'ai pris aucune position contre les délites qui y
se sont déroulés.
Je me suis laissé entraîné dans la vague des problèmes, mais j'ai toujours dit que si
quelque chose se passe, non seulement moi, je serai accusé, mais aussi les autres, qui
en réalité, c’étaient eux qui ont produit le vrai désastre et pas moi.
Tous ceux qui ont participé à la catastrophe du cuir synthétique avaient leur dos couvert
et protégé par des relations élevées, pendant que moi, je n'avais personne. À cause de
ça, seulement moi, j’ai été inculpé.
Après plusieurs jours, j'ai été, de nouveau, amené de ma cellule devant Scuturici. En
étant ivre, il m’a dit :
- Écoute Munteanu, tu n'as plus aucune chance d'échapper à la suite de la
vérification et du rapport rédigé contre toi. Tu vas prendre au moins 25 ans de
prison et tes os vont putréfier dans les cellules des prisons. Honnêtement, je te
dis, je m’en fiche de ta personne et je ne donne aucun sou sur tes décorations.
Alors, je te demande de dire tout, pour finir très rapidement.
- Monsieur l’enquêteur, dans les conditions où vous m’avez arrêté et amené ici,
sans connaître les réelles accusations posées sur mon dos, je ne peux pas les
accepter et je ne me considère pas comme coupable de tout ce que vous m’avez
dit en ce qui concerne mon arrestation. Une seule chose je peux dire que je ne
suis pas coupable et si éventuellement va se constater mon implication dans une
actionne qui a généré le désastre du cuir synthétique, vous devez savoir que je
n’étais pas seul dans l’entreprise et que les décisions prises ont été soumises à
l’approbation générale avec la bénédiction de la Centrale l'industrie, du ministère
et d'autres organismes décisionnels, y compris le Secteur du parti
- Eh bien enculer, comment oses-tu accuser les camarades de la direction du
ministère et du parti. Toi, crapule de merde, avec moi tu ne peux rien faire. Je
sortirai de toi tout le lait que tu as sucé de ta mère ! Prête l’oreille loin, merdier !
Scuturici, puis, a appuyé sur un bouton de sonnerie qui se trouvait sur son bureau et
non pas longtemps après, un milicien est apparu et m’a amené dans ma cellule avec
des menottes aux mains.
Une semaine avait passé et personne ne donnait aucun signe de vie. L'atmosphère de
la cellule où j’ai été emprisonnée était la même : terrible indigence, les cafards
grouillaient partout, les paillasses percés permettaient d'entrer par elles, les bandes de
fer des lits endommagés, la fumée des cigarettes des autres détenus pouvait être
coupée avec un couteau et son odeur insupportable pénétrait dans les vêtements, les
matelas et tout ce qui était là-bas. Pour l'éclairage, existait une seule ampoule, fermé
dans un mur qui brûlant jour et nuit. La nourriture était misérable : le matin, on donnait
un petit morceau de pain noir, souvent moisi et une tasse avec des résidus qui, selon
eux, était du café, à midi une soupe noire avec un goût amer (certains détenus disaient
que c’est du bromure qui avait été ajouté) avec une assiette de choux dite choucroute
très salée et si l’on mangeait te passait des soudeurs et des douleurs à l'estomac,
pendant la soirée la même chose que le matin et en plus une assiette de haricot blanc
avec des vers qui flottaient abondamment.
Les deux premiers jours, je n'ai rien mangé. Je sentais et j’avais des états de
vomissement lorsque j’essayais de mettre quelques choses dans ma bouche. Dans le
troisième jour, un prisonnier m’a donné un très petit morceau de lard et un morceau de
pain de son paquet. Je n'avais pas le droit d'en avoir un. Scuturici m’avait coupé ce
droit, même plus tard, tout au long de ma détention, sans aucune raison.
Après deux semaines ont commencé mes interrogatoires. Scuturici me posait les
mêmes questions de dizaines de fois pour vérifier si je les mélange. Si je n’écrivais pas,
ce qu’il voulait me giflait ou me brulait avec sa cigarette en me disant, en dérision, qu’il a
fait ça par erreur. Les jurons et les insultes étaient à l'ordre du jour.
Pendant ce temps-là, je suis tombé malade d'une grave diarrhée due à l'alimentation
que j'ai été forcé à manger. Chaque jour je marchais à la toilette de 14-15 fois et après
trois jours j’ai commencé à enlever du sang. Ils ont amené un médecin qui est resté
surpris par la gravité de mon état dans lequel j'étais. J'ai reçu plusieurs médicaments et
ils ont changé ma nourriture avec quelque chose de mieux pour une courte période de
temps. Après un certain temps, à cause de la résistance de mon corps, la maladie a
commencé à redescendre.
Après deux mois, Scuturici s’est rendu compte que je ne suis pas le seul coupable et
pour se débarrasser de moi et de mon dossier il m’a envoyé à l'Inspectorat général de la
milice dans la rue « Calea Victoriei ».
Dans son rapport sur l'affaire pénale portée contre moi et envoyée à l'Inspectorat
général de la milice, Scuturici a écrit : « Compte tenu du fait que dans le dossier de
poursuite pénale numéro… engagé contre Munteanu Panait, il y a un certain nombre de
personnes occupant des postes de responsabilité dans l’appareil d'État et de parti, que
je ne peux pas les interroger, je décline ma compétence et j'envoie ce dossier à
l’Inspectorat général, pour de plus amples recherches ». Signé : Scuturici Alexandru.
Dans ces circonstances, j'ai été envoyée à l'Inspectorat général de la milice de la
capitale. Ici, j’ai été pris en compte par le lieutenant-enquêteur Bacanu Gheorghe qui
était dirigé, dans l'ombre, par son chef, un colonel dont le nom, je ne me rappelle plus.
Dans la première phase, on a repris mes interrogatoires écrits de dizaines de fois pour
la même chose. Bien que ce lieutenant-enquêteur avait un comportement plus humain, il
faisait ce que son chef disait. J'en ai continué à nier mon implication et dans ces
circonstances, j'ai été envoyé devant le commandant de l'Inspectorat général, qui m’a
dit :
- Monsieur Munteanu, j'ai lu le rapport de l'enquête de la Centrale industrielle et je
considère que c'est un bon rapport. Les faits qui sont imputés contre vous
démontrent votre implication intégrale dans les détournements et les fraudes
financières à des fins personnelles. Selon le rapport, vous êtes la seule personne
responsable de tout ce qui est arrivé à l'usine et vous devez admettre que j’ai
raison. Nous sommes en train de vérifier votre implication dans l'assassinat de
Surcel et je pense que vous pourriez aussi être accusé et de ce crime.
Maintenant, dites-moi si j’ai raison ou pas ?
- Monsieur le Général, je lui ai dit, les allégations que je reçois sont très sérieuses
et je pense qu’ils constituent le fruit d'une pensée et imagination d’un fou qui a
voulu se venger contre moi parce que j'ai refusé à l'aider à parvenir dans la
société. Il s’appelle Gamalet Constantine et c’est lui l’auteur de mon dossier
criminel. Pour prouver mon innocence, je sollicite votre coopération afin
d’apporter et confronter avec moi toutes les personnes impliquées dans l'affaire
du cuir synthétique et dont leurs noms apparaissent dans toutes mes
déclarations, y compris Mme Elena Ceausescu. En votre présence, je vais leur
poser une série de questions auxquelles ils auront à répondre avec des données
précises et d'honnêteté requise par la loi. Vous m’avez dit, tout à l’heure, que le
rapport que vous avez lu, c’est un bon document. Qu'est-ce que vous comprenez
par le mot « bon » ? Bon, dans le sens dont Gamalet a réussi à m’inculper seul,
dans cette cause ? Est-il possible que tout ce qui s'est passé à l'usine ait été
causé uniquement par ma personne ? Vous êtes un homme de profession et un
spécialiste en enquêtes et vous pouvez discerner si dans le cas respectif une
seule personne a pu faire tout ce qui est écrit dans le rapport. Je ne crois pas
que vous ne réalisez pas que tout ce qu’on a été mis sur mon dos, c’est une
tentative de masquer les véritables coupables qui, maintenant, se voient en
dehors de cette enquête et qui a été dirigée seulement contre moi. En ce qui
concerne l'assassinat de Surcel et soi-disant ma participation, je dis que cette
nouvelle charge est encore une preuve que l'un ou ceux qui sont de véritables
auteurs, coupables de sa mort, essaie maintenant de jeter l'entière responsabilité
sur moi. Ils profitent de mon affaire criminelle pour justifier et fermer le dossier de
Surcel qui met en évidence de nombreuses questions. Dans ce contexte, je
sollicite également une confrontation avec le haut gradé de la sécurité qui visitait
souvent Surcel dans la période où il était directeur à l'usine et qui est disparu
soudainement, après la mort de Surcel. Je ne sais pas son nom, mais vous
pouvez vous en informer par les employés de l'usine qui le connaissent et
l’avaient surnommé « l’homme en noir ». Dans une situation où vous refusez ma
demande, je vous avertis que je déclarerai la grève de la faim jusque ma
demande sera satisfaite. Je suis prêt à mourir parce que je ne me sens pas
coupable et peut-être Dieu va écouter ma prière et va punir les vrais criminels. Je
vous prie me communiquer dans un terme acceptable votre décision pour que je
puisse ou non de mettre en application, ma décision.
Le général a gardé le silence environ une minute et puis a dit :
- Votre demande sera étudiée et vous allez recevoir une réponse bientôt.
Après cette réunion, j'ai été conduit dans ma cellule où j'étais emprisonné. Cela se
trouvait au sous-sol au deuxième niveau, dans une pièce de quatre mètres carrés
partagée avec huit autres détenus, sans lumière naturelle, la cellule étant illuminée par
une ampoule qui brûlait jour et nuit.
Dans la cellule n’existait pas de WC, de sorte que nous faisions nos nécessités dans un
seau qui était vidé tous les deux jours et dégageait une odeur insupportable. Nous
avions le droit à la salle de bain une fois par mois, sous une douche endommagée avec
de l’eau froide comme la glace. Du savon n'existait pas, seulement si on recevait de
l’extérieur, de la famille. Étant donné que, je n’avais pas le droit au paquet, il fallait que
j’appelle à la bienveillance des détenus. La nourriture était misérable. Parfois, je trouvais
des mouches ou des vers morts dans de minuscules morceaux de viande flottant dans
une soupe noire. Souvent, je refusais la soupe dans laquelle je savais qu’il y a ces
bestioles. On se donnait une seule tranche de pain par jour et parfois moisi.
Dans ces conditions et après plusieurs demandes faites au lieutenant-enquêteur
Bacanu, pour avoir une réponse à ma demande, qui jamais n’a pas été satisfaite, après
un délai de sept mois d’incarcération, mon énergie et ma psychique se sont écroulées.
Ensuite, j'ai déclaré la grève de la faim et je n'ai pas donné de déclarations écrites et
verbales au sujet de mon enquête. À la suite de cet événement, j'ai été emprisonné
dans une autre cellule, seul, qui avait un lit où je suis resté cinq jours après que j'ai été
transféré à la prison de Jilava, à l’hôpital de psychiatrie. Ici, je recevais des injections
avec des substances narcotiques et des décharges électriques.
Étant à la fin de mon épuisement, j'ai essayé de me tuer. Les pilules que j'ai cachées
dans mon anus, dans un petit flacon, qui provenait d'un prisonnier en échange de
quelques paquets de cigarettes, n’ont pas actionné pleinement et, après deux jours de
sommeil continu et un état comateux, je me suis réveillé avec des douleurs à la tête, des
étourdissements, vision trouble et des vomissements.
Après 15 jours, un procureur de la Procurature Générale est venu me voir, qui, entre
d’autres choses, m'a dit que je serai libéré prochainement.
Peu de temps après, j'ai été transféré du pénitencier à l'Inspectorat général de la milice,
mais cette fois, à une section dans la route « Grivita ». Pendant cette période, on m’a
introduit dans ma cellule des détenus-informateurs nommés par les autres emprisonnés
« gazouilleurs » qui avaient la tâche, en échange d'un paquet de nourriture, d’être à
l’écoute et d’informer après sur des détenus surveillés. L'un d'eux se nommait Soare
Gheorghe et avait été directeur à l’entreprise pour de la collecte des métaux en étant
arrêté et condamné pour détournement de fonds de cinq millions de lei.
Ici, après presque un mois et demi, j'ai été invité à donner une déclaration écrite, par
laquelle je m’engageais de ne pas divulguer le traitement auquel j’ai été soumis tout au
long de mon incarcération et de ne pas porter des accusations contre des personnalités
politiques et économiques qui avaient bénéficié de cadeaux et de l'argent de la part de
l’entreprise de cuir synthétique.
Au cours de la période de ma détention, j'ai été témoin, en dehors du traitement
inhumain appliqué par ceux qui ont eu la tâche de ma surveillance, aux dégradations
humaines qui se produisaient dans des cellules par des détenus qui s’y trouvaient. Un
certain nombre d'entre eux se sont automutilés en avalant de divers objets incisifs faits
empiriquement dans la cellule, en coupant leurs veines des mains ou des pieds, en se
fessant « harakiri » à l’aide d’une queue de cuillère qui avait été polie et transformée en
couteau, en frappant leur tête sur les murs jusqu’au sang. D'autres pratiquaient la
sodomie en ayant des relations sexuelles entre les hommes, se battissent entre eux
jusqu'au sang ou s’estropiassent pour un morceau de pain ou une cigarette.
Après un an et deux mois d'incarcération, j'ai été libéré, suivant que mon procès avoir
lieu, quand même.
Ils ont ainsi décidé, pour justifier ma période de détention et d’effacer définitivement
l’implication des vrais coupables, de l'Institut de recherche chimique dirigé par Elena
Ceausescu, du ministère de l'Industrie légère dirigé par le ministre Bazac Ion, de la
Centrale industrielle et l'Institut de recherches pour l'industrie légère dirigée par le
Directeur général Gheorghe Popa, de la Direction de CFI dirigée par Gamalet
Constantin, du Secteur de partie dirigée par le premier secrétaire Chitimia Costica et de
nombreuses autres institutions qui ont participé délibéré à la fiasque du cuir synthétique
roumain.
Au cours de la période de ma détention, j'ai prié et imploré Dieu de les punir
impitoyablement pour tout ce qu’ils ont fait, contre moi.
Avant de commencer mon procès, dans le journal « Romania Libera » est apparu un
article signé par un rédacteur-collaborateur et à la merci du Secteur 6 de parti de
Bucarest qui faisait le jeu du premier secrétaire Chitimia Costica, l'un des principaux
directement impliqués dans l’affaire du cuir synthétique pendant la durée de mon
enquête qui a dirigé dans l’ombre, à côté de Gamalet, toutes les étapes de ma
destruction. L'article énumérait une série d'allégations qui figuraient dans l'acte
d'accusation, sans poser la question naturelle, comment un homme a pu faire tant de
choses mauvaises, décrites en détail, sans que quiconque à participer directement ou
indirectement, à tout ce qu’ils ont mis sur mon dos.
L'article en question a été écrit pour avoir une incidence négative sur l'opinion publique
et a constitué toujours une base pour ma condamnation.

Le procès de ma poursuite a commencé peu de temps après ma sortie de détention. J'ai


eu comme avocat monsieur Amzuta Gheorghe qui était spécialisé dans les affaires
pénales et qui, plus tard, après mon procès, a eu des problèmes avec son cabinet
d'avocats. On lui a interdit de plaider et d'être avocat à Bucarest, étant transféré en
province parce qu’il a accepté de me défendre, en rejoignant ma cause dans le
dévoilement des crimes commis par les véritables auteurs.
Contrairement à ma déclaration que j’avais signé avant d'être libérés et par qui je
m'engage à ne pas divulguer les noms des personnes qui ont été en fait les véritables
coupables de tout ce qui s'est passé dans l’entreprise cuir synthétique, dans une grande
salle, pleine de monde, devant le président de la cour qui était en même temps le
président du tribunal, j’ai condamné avec véhémence, leur implication directe, en
révélant leur nom, leur rang et ce qu'ils ont fait. Je n'avais plus rien à perdre parce
j’avais perdu tout, parce qu'ils m’avaient détruit.
Après la fin de mon interrogatoire, qui a duré trois heures, les séances suivantes ont eu
lieu dans une petite salle d'audience, à huis clos et sans accès du public, ainsi que les
réunions, ont été mentionnées dans le registre des procès-verbaux et dans mon dossier
qu’ils étaient publics.
Le Président du tribunal s’est débarrassé immédiatement de mon dossier en le plaçant à
une juge qui, bien sûr qu’elle exécutait « à la lettre » les instructions de son patron. À
son tour, le président du tribunal avait été averti par Chitimia Costica, le premier
secrétaire du Secteur de parti, pour me donner une peine « exemplaire ».
La magistrature roumaine pendant le règne de Ceausescu suivait avec fidélité toutes les
indications du parti et en particulier celles qui concernaient les actions contrent les
organes d’administration de celle-ci. Étant membres du parti, les magistrats étaient à la
merci du parti afin que leurs décisions ne reflétassent pas les règles de droit, mais les
décisions et les indications prises en dehors des salles de tribunaux, ainsi que dans le
cas de mon procès.
Les témoins de mon accusation étaient certains individus sans importance de
l’entreprise de cuir synthétique qui ne connaissaient rien sur les vrais coupables, à
l'exception de Paun, le chef du service personnel et secrétaire du parti. Il savait tout ce
qui est arrivé à l'usine, mais a refusé de dire la vérité quand il a témoigné au procès.
J'ai alors demandé par mon avocat, d'être convoqués et traduits en justice pour
témoigner, ceux qui ont effectivement été impliqués et responsables, que j’ai révélés leur
nom, dans le cadre de mon premier interrogatoire. Ma demande a été refusée sans
aucune explication.
Dans le maintien de ma demande, je suis arrivé jusqu’à la Cour Suprême qui, à son tour,
a rejeté ma demande, car ce n’était pas possible que Mme Elena Ceausescu soit
accusée et à comparaître devant un tribunal pénal.
.Après de longues et interminables séances, lors même que j’ai prouvé mon innocence,
le procès a pris fin et après deux semaines, j'ai été condamné à cinq ans de prison avec
sursis et un paiement d'une somme extrêmement élevée comme dommages-intérêts en
faveur de l’entreprise de cuirs synthétiques, que j’ai payés après, pendant plus de dix
ans.
En n’étant pas réconcilié avec le verdict du tribunal, j’ai essayé d'attirer l'attention de
l’opinion publique et des organes supérieurs ayant la force de décision dans l'État. J'ai
envoyé par écrit, des lettres, en dénonçant les injustices, faites contre moi, à des
rédacteurs en chef des principaux journaux publiés en Roumanie, au cabinet du ministre
de l’industrie légère, au Procureur général de la République, au Conseil des ministres et
enfin, au Comité central du PCR directement à Nicolae Ceausescu. De nulle part, je n'ai
pas reçu, aucune réponse écrit où verbal. Les véritables coupables ont été blanchis,
acquittés, sur les épaules de mon malheur.
Après ma condamnation, après un intervalle d'environ un mois, Paun qui avait été
secrétaire de parti à l'usine, m'a appelé et m'a dit qu'il voulait me rencontrer pour
discuter quelque chose avec moi. J'ai accepté et je suis allé chez Paun où il m'avait
invité. Le moment de notre rencontre a été très pénible, parce que, pendant mon procès,
Paun a refusé d'admettre qu'il a préparé tous les documents de preuve pour les
cadeaux qui ont été distribués au Secteur de parti. En outre, tous les documents
respectifs qui avaient été enregistrés dans l’évidence comptable de l'entreprise et qui
constituaient la base de leur enregistrement sur les dépenses de l’entreprise ont été
volés. Après que je suis entré dans son appartement, Paun m'a dit :
- Monsieur Munteanu, je vous ai invité pour bavarder un peu et en même temps, je
veux vous présenter mes excuses pour ce qui s'est passé. Aujourd'hui, je ne
travaille plus à l'usine et donc je ne suis plus secrétaire d'un parti. Maintenant, je
travaille dans une entreprise de transport comme simple fonctionnaire. Après le
début de votre enquête à l'usine qui a conduit à votre arrestation, j'ai été appelé
par Chitimia (le premier secrétaire du Secteur de parti Bucarest), qui m’a
ordonné de faire quoi que ce soit pour disparaître tout ce qui était compromettant
à sa personne ainsi que pour les autres membres du Secteur de parti qui avaient
reçu des cadeaux. En même temps, il a dit que, après la récupération des
documents en cause, je dois quitter l’entreprise à ma demande et dans la
situation que j’en refuserai, j’aurais « des jours difficiles ». De plus, il m’a averti
qu’au procès, je ne dois rien reconnaitre et que je ne parle pas de lui et ses
collaborateurs. Peu de temps après, par son intervention, j'ai été embauché
comme fonctionnaire avec l’évidence du transport des marchandises aller-retour
de et à l’étranger dans l’entreprise où je travaille présentement. Honnêtement, je
veux vous dire que j'ai eu peur de prendre la moindre décision, car je connais
bien Chitimia qui est un homme odieux. Dans un autre ordre d'idées, je tiens à
vous dire que Nicolae, du service d’approvisionnement, qui ne vous aimait pas
du tout à cause du problème des tonnes vendues par lui dans le marché «
Moghioros » a toujours collaboré avec la milice à laquelle il leur a donné toute
sorte de déclarations contre vous. Je ne sais pas ce qu'il a écrit dans ses
déclarations, mais je l’ai entendu, parlant dans l'usine, en disant que « J’ai mis
bien Munteanu là où il fallait être, qui a essayé de me mettre à pied ».
- Monsieur Paun, vous avez été l’un de ceux qui savaient tout à propos de cette
usine, tous les ennuis et les malheurs qui se sont passés là-bas. Toutefois,
permettez-moi de vous dire que vous n'avez rien fait, pour que la vérité soit mise
en lumière. Vous aviez une fonction importante dans l'usine et votre mot pouvait
être entendu et interprété comme il faut, par ceux qui étaient en droit. Vous avez
fui comme tout le monde et vous vous êtes caché comme des lapins après vos
oreilles. Est-ce que, au cours de la période où j'ai été déshonoré, torturé et
maltraités par la milice, par les enquêteurs et les gardiens de prison, avez-vous
fait « mea culpa » ? Là encore, vous vous êtes éveillé pendant la nuit à cause
d'un cauchemar dont il vous rendrait coupable ? Vous n'avez jamais demandé à
Dieu de pardonner vos péchés ? Je suis très attristé parce que, par ma nature,
j'ai toujours eu confiance aux gens qui, très souvent, ils se sont moqués de moi.
Mes bonnes intentions ont été, par la suite, transformées en armes avec
lesquelles ceux, en qui j’ai eu confiance, m’ont cloué et détruit, sans que j’aie
coupable dans la mesure où j’ai été vendu. Si, vous qui me connaissez très bien,
vous avez procédé ainsi, que pourrais-je dire de Nicolae et d'autres qui ont
respiré librement après mon départ de l’usine.
- Monsieur Munteanu, le fait que je vous ai sollicité de venir ici et que je me suis
excusé est la preuve que je regrette de tout mon coeur ce qui s'est passé, mais
je n'ai pas eu le choix parce que ma vie et la situation de ma famille étaient en
jeu. Vous ne connaissez pas, peut-être, beaucoup de choses, mais j'ai vécu
parmi ces gens qui sont d’une dureté et férocité que vous ne pouvez pas
imaginer. J’ai fait leur jeu, parce que, dans la fonction que j'avais, je ne pouvais
pas faire autrement.
- Pensez-vous qu’une simple excuse est-elle suffisante ? Pensez-vous pouvoir
éponger tout, avec un simple mot ? Malheureusement, il est maintenant trop tard
pour réparer quelque chose. Même si je fais une nouvelle demande à la Cour
Suprême de casser et reprendre l'enquête, suite à votre déclaration, je ne jamais
pourrai avoir gain de cause, car il est impossible que le nom d’Elena Ceausescu
à apparaître au premier plan sur le frontispice de ce dossier pénal. Par
conséquent, je cherche à me résigner et en même temps que j’espère que, peut-
être, un jour, Dieu fera justice, car il est le seul qui peut punir maintenant tous
ceux qui ont voulu chercher ma destruction. Honnêtement, tout le temps je me
suis demandé pourquoi j'ai été inculpée seulement moi ? Gamalet, que j'ai aidé
pendant des années, sans me dire même un merci, m'a accusé et m’a
emprisonné par vengeance et seulement parce que je l'ai quitté à un moment où
il avait besoin de moi plus que jamais. Après mon départ, ainsi que les autres
anciens réviseurs du ministre, le monde a compris que lui est zéro. Que, c'est un
homme parvenu qui a toujours atteint et fait son chemin dans la société, pas par
son intelligence, ni par ses propres forces, mais par fourberie, par conspiration et
par mensonge. Si ce fou a réagi afin d'exercer ses représailles et de se venger,
pourquoi les autres n’ont pas fait quelque chose, ne se sont pas unis à détruire
ce ver ? Voilà donc, c’est la vraie réalité et à cause de ça, je ne serai jamais
réconcilié !
Paun n’a rien répondu parce qu’il n’avait plus de quoi répondre. Beaucoup plus tard, j'ai
appris de mon avocat Amzuta, qui m'a défendu au procès, que Paun a fait appel à ses
services parce qu'il avait été inculpé dans un dossier pénal, ouvert par son employeur,
en étant accusé de vol, faux et usage de faux.
Suite à une vérification, on a constaté que les tirs de l'entreprise de transport où Paun
travaillait, à leur retour de l'étranger, apportaient de diverses marchandises qui n'étaient
pas déclarées à leur arrivée dans l'entreprise, en étant partagées et volées par leurs
chauffeurs et par Paun qui rédigeait les documents de réception. À la suite à son procès
pénal, Paun a été condamné et emprisonné. Il a été ainsi puni non seulement pour ce
qu'il avait fait à son nouvel emploi, mais aussi pour tous les abus, les saletés qu’il a
faites pendant des années, à l’entreprise de cuir synthétique.

Après environ dix jours, de ma rencontre avec Paun, vers midi, je suis parti de chez moi
pour faire quelques achats pour mes enfants. Je suis allé à la station de trolleybus et
j’attendais qu'il arrive. À un moment donné, dans la station est arrivée Mme Maria
Negoiescu qui travaillait dans le service financier de l'usine et elle voulait aussi prendre
le trolleybus. Quand je l’ai vu, je me suis tourné vers elle et je l’ai salué :
- Bonjour Madame Negoiescu. Comment allez-vous ?
- Ah, Monsieur Munteanu, je suis heureuse de vous voir ! Moi, comme vous le
savez, comme ci comme ça. Mais vous ?
- Si je dis « bien », c’est sûr que je mentirais. Alors, je dis que Dieu a jeté son œil
sur moi.
Pendant ce temps, le trolleybus est arrivé. Nous y avons monté et nous avons continué
notre discussion :
- Allez-vous au centre-ville, Monsieur Munteanu ?
- Non, je m’en vais faire des courses pour mes enfants.
- Sachez que j'ai toujours pensé à vous et, comment vous avez été accusé.
Comment est-il possible que votre ami Gamalet ait pu vous faire une telle
chose ? Je savais que vous n’aviez pas des « amis » pour vous protéger comme
les autres l'ont. Par conséquent, il a été très facile pour eux de vous accuser,
seulement vous seul ! Quelle saleté !
- Oh, Madame Negoiescu, la stigmatisation de ma vie m’a frappé et non pas les
gens. Ils ont été utilisés par elle pour me déshonorer et à me détruire.
- Qu'est-ce que vous dites ? Les gens sont de plus en plus mauvais et
destructeurs, plus que les fauves. Peut-être que vous ne connaissez pas, mais
Nicolae a joué un rôle important dans votre arrestation. Il voulait se venger de
vous, parce que vous avez voulu le mettre à pied. Il est main dans la main avec
la police et la sécurité auxquelles il donnait de faux renseignements sur vous.
C’est Mme Émilia Stoianov, la gestionnaire, qui m’a dit de tout cela. Elle était
combinée avec Nicolae, mais maintenant elle l’a quitté parce qu’elle avait peur
de lui. Vous devriez être plus décidé et il ne fallait pas suivre les indications et les
conseils de Negranu et Paun. Vous avez vu qu’eux, lorsque le contrôle est
commencé, qu’ils se sont enfuis comme des lapins et ils n’ont pas voulu vous
aider. Je ne parle plus du pauvre Surcel qui a été assassiné par la sécurité lors
même qu’il avait beaucoup d’amis et connaissances très influents. Par rapport à
lui, vous avez eu de la chance que cela pourrait vous arriver, la même chose que
lui, sans être coupable. Nous vivons des jours difficiles et je ne sais pas combien
toutes celles-là vont durer encore. Mais voilà, je suis arrivée et il faut que je
descende. Je vous souhaite beaucoup de chance et de santé et que Dieu vous
aide à surmonter cette période critique !
- Je vous remercie pour vos paroles d'encouragement.
Mme Negoiescu est descendue du trolleybus et moi, je me suis mis à réfléchir sur le fait
qu'il existe encore, dans le monde, des gens honnêtes et qui n’approuvent pas les
saletés des uns qui ont créé leur chemin par le malheur des autres. Malheureusement,
les gens corrects et honnêtes ne pouvaient rien faire à cause du système communiste
dans lequel nous avons vécu et qui a toujours réprimé toute tentative de découvrir et de
mettre en évidence la vérité.

La fin de mon procès et de ma condamnation a conduit à la période la plus sombre de


ma vie. Je n’avais pas d’emploi et le salaire gagné par Virginica, ma femme, était
beaucoup moins inférieur que les besoins de ma famille, ce qui était attribuable à
l'augmentation de nos dettes. Les enfants étaient stressés et ils se demandaient
pourquoi les autres enfants du quartier et à l'école, les détournent. Je ne sais pas ce
que nous nous serions fait si nous n’avions pas été aidés par mes parents et les parents
de Virginica, qui nous envoyait de la nourriture, des vêtements et d'argent pour
l'entretien de nos enfants. Pendant les vacances d'été, les enfants partaient à la
campagne chez mes beaux-parents pour que moi et ma femme peut faire face aux
dépenses de la maison. Des mois entiers, j'ai couru à la recherche d'un emploi, mais
toujours j’étais refusé avec la même réponse :
- Nous ne pouvons pas vous emboucher !
Je marchais dans les rues et j’étais terrorisé et convaincu par l'idée que quelqu'un me
suit. Je changeais de deux ou trois fois le tram ou trolleybus quand je m’en allais dans la
même direction pour une interview. J'étais nerveux, surexcité et personne ne m’entrait
librement. Je m’allumais pour rien et je versais mon feu sur ma femme, sur mes enfants.
J’étais terrorisé par l’idée que ma femme m’a trompé au cours de ma détention et qu’elle
continue à le faire. Ma relation avec Virginica commençait à se dégrader très fortement.
Nous ne dormions plus depuis longtemps ensemble, en nous séparant aussi du point de
vue financier. Dans ces circonstances et après beaucoup de discussions interminables,
mon épouse a introduit une action en divorce.
On a suivi la période de notre divorce que je ne veux plus me rappeler. Le 30 septembre
1985 le divorce a été prononcé et Virginica, ma femme, a tout gagné et moi, je suis resté
seul et sans rien, sans même le droit de voir mes enfants.

La stigmatisation de ma vie m’avait donné, de nouveau, un autre coup.

Après des mois de recherche, par chance, j'ai lu dans un journal qu’une unité du
Ministère de la Santé, nommée la Station pour la vérification et l’entretien des
appareillages médicaux (SVIAM) organisait un concours pour occuper un poste
d'économiste principal dans le bureau de la comptabilité. Je me suis inscrit en déposant
ma candidature pour ce poste. En compétition, il y avait 11 candidats, avec moi. Après
avoir terminé mon examen, écrit et oral, j’ai été choisi en premier lieu, en occupant ce
poste.
Cette unité avait comme tâche principale l'entretien et la réparation d’appareillages
médicaux dans le système de la santé et le stockage de sureté de nouveaux appareils
pour le pays qui était directement contrôlé par le Ministère de la Santé. Le directeur de
cette unité était l'ingénieur Ion Ceausescu, un parent de loin du Président de la
Roumanie, Nicolae Ceausescu. La grande majorité des salariés de cette unité était
composée d'ingénieurs et de techniciens, hautement qualifiés, qui se rendaient dans les
hôpitaux pour l’entretien ou réparation de leurs équipements.
Au début, j’ai été reçu avec suspicion par le personnel de l'unité, parce que tout le
monde savait mon histoire. Après des mois et des mois suite à ma sérieusement et la
solution, avec succès, des certains problèmes économiques, que SVIAM faisait face
depuis un certain temps, j'ai commencé à gagner la confiance de mes collègues et de la
direction de SVIAM. J’avais un bon salaire, mais pendant plus de dix ans j’ai payé ma
dette vers l’entreprise de cuir synthétique suite à ma condamnation pénale.
Plus tard, après que ma femme a obtenu son divorce j'ai commencé à payer aussi la
pension alimentaire pour mes enfants, ainsi que le reste de mon revenu a été réduit à un
très petit montant d'argent utilisé seulement pour mon entretien. Étant donné que
Virginica a gagné aussi notre appartement commun, il a fallu que je déménage chez
mes parents.
À mon nouveau travail, j'ai commencé à travailler dans le service de comptabilité en tant
qu’économiste principal. J’avais comme chef le comptable en chef Petrescu George, qui
était un homme près de mon âge. En termes de formation professionnelle, il était bien
préparé, mais du point de vue personnel et humanitaire était très égoïste, caché dans
tout ce qu'il faisait et, notamment, était plein de soi, infatué. Le directeur ne pouvait pas
le souffrir parce qu’il trouvait toujours quelque chose pour s’opposer à ses décisions. Ni
le reste du personnel ne l’agréait pas à l’exception d’une salariée nommée Mateescu
Elena, qui travaillait comme fonctionnaire au bureau de personnel et qui disait qu’il est
un « beau garçon », même si elle était à peu près de l’âge de retraite. Petrescu était
marié, mais il n'était pas en bonnes relations avec sa femme et donc il sortait toujours
seul dans la société.
Ma relation avec cet homme était, à première vue, relativement bonne, lors même qu’il
n’agréait pas trop ma franchise, parce qu’après mon embauche, j’ai mis en place une
série de documents qui ont conduit à une meilleure organisation de l'activité
économique, ce qu'il n’a pas fait auparavant. Dans son intérieur, il appréciait ma
contribution, mais il ne m'a jamais dit si c’est bon ou mauvais ce que j'ai fait. Toujours, il
laissait les choses à trainer volontairement jusqu'au moment où une activité commençait
à avoir des difficultés et alors il apparaissait avec une solution pour démontrer aux
autres que l’unité ne fonctionne pas sans lui. J'ai immédiatement saisi ce style de travail
et je lui ai prouvé qu'il n’est pas correct, en lui laissant champ libre à comprendre que j’ai
dépisté son système de travail.
Même s’il semblait être un homme intransigeant avec tout le monde, lorsqu’il avait la
possibilité de prendre quelque chose de l'unité avec titre gratuit le faisait sans y penser.
Son lieu de prédilection était la gestion des équipements médicaux pour le stockage de
sureté du Ministère de la Santé. Ici, arrivaient souvent de divers appareils et des
produits d'importation pour des essais libres dans le système de santé, enregistré
(erroné), sans valeur. Lorsque Petrescu trouvait quelque chose qui pourrait lui être utile
en particulier, tout simplement, il le prenait et puis il rédigeait un procès-verbal de
cassation signé par lui sans approbation du directeur. À un moment donné, sont arrivés
d'importations dix plaids sanitaires en pure laine pour être testés dans des unités de
santé. Sur les dix plaids, six ont été envoyées à trois hôpitaux et les quatre autres sont
restés dans la gestion. Après un certain temps parce que personne n’a plus sollicité les
quatre plaids qui étaient en gestion, Petrescu a dressé un procès-verbal de cassation
signé par lui-même. Il a donné deux plaids au gestionnaire et les deux autres, il les a
pris pour lui et les a utilisés comme couverture de protection aux sièges de sa voiture.
Un jour, le directeur a vu par hasard les deux plaids à l’intérieur de la voiture de
Petrescu et alors il a donné l’ordre pour se vérifier la manière dont les plais ont été
enregistrées dans la comptabilité. En constatant, en outre, le vol et la contrefaçon des
documents par lesquels Petrescu a pris ces produits, le directeur a annoncé la Direction
de personnel du ministère et, après deux semaines Petrescu a perdu son poste de
comptable en chef, étant transféré à une autre unité disciplinaire de Bucarest en tant
que simple économiste. Il a toutefois eu de la chance de ne pas être envoyé en justice
parce qu’il connaissait au ministère une directrice générale qui a étouffé l’affaire.

De point de vue personnel, j’ai eu une période très difficile. Je n'avais plus d'amis parce
que mon groupe se dispersait, par la suite du changement de leur vie et leurs familles.
Mes parents vieillissaient de plus en plus en devenant maussades. Je n'avais aucune
amie pour partager ma vie.
À un moment, j'ai rencontré par hasard une ancienne connaissance de mes parents,
une dame qui s'appelait Nana Samarian et qui avait été mariée avec le célèbre joueur
d'échecs Samarian Valentin.
De l’un à l’autre, je lui ai dit, en bref, mes aventures et puis elle m'a dit que je pouvais
venir chez elle, bien sûr si je voulais, où j’avais la possibilité de rencontrer et de discuter
avec de diverses personnes dont elle les recevait.
Cette femme, très intelligente et instruite, avait organisé dans son appartement, situé
près de la Gare du Nord, une sorte de club littéraire dans laquelle un certain nombre de
personnes, hommes et femmes, de toutes les sphères d'activité, comme médecins,
ingénieurs, enseignants, gens de l'art et de culture, se rencontraient ici, où jouaient
pinacle, écoutaient de la musique symphonique, faisaient commentaires des nouvelles
de la journée, exercices de yoga et même assistaient aux séances de spiritisme.
Nana, comme tout le monde lui disait s’occupait aussi de la réalisation des horoscopes
personnels, à partir desquelles elle gagnait un peu d'argent, en plus de sa pension.
J'ai commencé à fréquenter ce cénacle où j'ai participé à presque toutes ses activités. À
l’intérieur de ceci on n'a jamais discuté de la politique ou fait des remarques et
commentaires à l’adresse des personnalités de la vie économique et politique du pays.
Chacun venait ici pour se détendre, à bavarda et de trouver un soutien moral.
Dans une soirée, j'ai rencontré à ce cénacle, une dame de mon âge (j'avais à l’époque
presque 48 ans) qui avait commencé à assister à ce cercle de personnes, pas depuis
longtemps.
Elle s’appelait Tacu Vasilica, mais tout le monde savait que son nom et Vasila. Elle
travaillait dans le domaine de la biologie à l’Institut des recherches « Cantacuzino ». Elle
habitait un appartement, près de « Casa Scanteii » dans la rue « Dridu ». D’origine, elle
était grecque et n’était pas mariée. Ses parents et son frère vivaient en Grèce, dans un
village nommé Paleo Milotopus, près de Salonique.
J’avais commencé à rencontrer Vasila régulièrement à ce cénacle et à un moment
donné, nous sommes devenus amis. Elle n'était pas trop belle, mais elle était
intelligente, parlait plusieurs langues, était très calme et retenue. Nous commencions à
nous rencontrer aussi en dehors de ce cénacle en fréquentant théâtres, expositions de
peinture et surtout concerts symphoniques qu'elle aime. Puis j'ai commencé à la
rencontrer chez elle où elle avait une belle bibliothèque, de précieux tableaux et une
discothèque avec musique symphonique. Elle était une bonne ménagère et parfois
quand j’arrivais chez elle, elle me préparait, entre autres, une tarte aux épinards et
fromage fêta, une spécialité grecque. Notre relation a commencé à se conturer de plus
en plus plus, mais sous l'égide du respect mutuel et de notre âge.
Après un certain temps, de commun accord, j'ai quitté la maison de mes parents et je
me suis installé chez elle. Notre vie était calme, sans beaucoup de changement et nous
nous sentaient bien ensemble.
Au cours de l'été 1985, je suis allé en vacances au bord de la mer à la suite de
l'obtention d'un billet avec réduction par le syndicat. Petrescu avait obtenu un billet pareil
dans la même période, de sorte que, nous sommes partis ensemble avec sa voiture. Je
lui ai payé la moitié de la valeur de l’essence consommée jusqu’à Eforie Nord où nous
avons partagé la même chambre dans le même hôtel.
Vasila n'a pas pu obtenir que quelques jours de congé, car elle n'était pas prévue de
prendre ses vacances dans le mois lorsque j'ai eu mon billet par syndicat. Elle est
arrivée seulement pour un week-end après mon arrivée là-bas. Nous nous sommes
promenés partout et comme toujours j'ai admiré la mer et la beauté des lieux que je me
suis rendu à plusieurs reprises. La nuit n'était pas trop tendue, car en partageant notre
chambre avec Petrescu nous ne pouvions pas nous détendre que lorsque mon collègue
n'était pas dans la chambre.
Vasila avait encore deux tantes à Bucarest. L'une s’appelait Lenca Tacu qui était un peu
plus âgée et veuve et l’autre Tana Maitec qui était mariée avec Ovidiu Maitec, sculpteur
en bois. Tana s’occupait de peinture et possédait un atelier près de la Television
roumaine. Très souvent, je me rendais avec Vasila chez les deux tantes où nous
parlions, écoutions de la musique, jouions aux cartes et participons à des soirées
données par elles et, en particulier, aux soirées de la famille Maitec où étaient invités
peintres, sculpteurs, écrivains, etc. Ovidiu Maitec était né dans la ville d’Arad et il était
diplômé de l'Institut des Beaux-Arts « Nicolae Grigorescu » de Bucarest. Il a été
président de l'Association des Artistes plastiques de Roumanie et possédait une
impressionnante galerie de sculptures et de peintures qu'il a faites dans un atelier près
de sa maison.
Parce que l’appartement de Vasila était tout près de la maison de la famille Maitec, à un
moment donné, moi et Vasila allions presque tous les jours chez eux où vivait aussi le
père des deux tantes, Tana et Lenca qui était un homme vieux et malade et que Vasila
s’occupait très souvent de lui. Les Maitecs avaient un garçon nommé Stefan Maitec, qui
était marié avec à une danseuse de l'Opéra et vivait avec ses parents. Stefan était un
type sympathique, mais il ne s’occupait pas de sa situation matérielle parce que ses
parents lui payaient toutes ses excentricités.
Le fait que moi et Vasila, nous allions très souvent chez eux, Tana, avait commencé à
me faire plus souvent des compliments ce qui a attiré l'attention de son mari, Ovidiu.
Moi, en échange, je ne prenais pas au sérieux ses avances, en me fessant que je ne
comprends pas et surtout j’ai toujours évité d’avoir une discussion appropriée avec cette
dame. Un jour, quand je me trouvais avec Vasila chez eux, Ovidiu m'a invité dans une
pièce à côté pour me montrer, allégué, sa dernière sculpture qu’il avait faite. Je l'ai suivi
et en y arrivant, il m’a dit :
- Monsieur, je vous ai appelé ici pas pour vous montrer ma sculpture, mais de
discuter et de mettre au point une question qui, d’un certain temps, me
préoccupe. J'ai remarqué que ma femme, Tana, s’intéresse plus qu’il faut de
votre personne. Nous sommes mariés depuis longtemps et je continue à l'aimer.
Je ne sais pas si vous avez remarqué cette chose-là, mais je connais très bien
ma femme. Je vous supplie de ne pas accepter ses avances et à garder une
certaine distance dans votre relation avec elle. Je ne peux pas vous interdire de
venir chez nous, car d'un point de vue particulier, nous sommes parent. S'il vous
plaît, ne donnez pas une autre interprétation à mon intervention, parce que je
considère qu'il est préférable d'en discuter avec les cartes sur la table.
- Monsieur Ovidiu, je lui ai dit. Je suis très surpris de ce que vous dites. Je n’ai
jamais pensé à ce sujet et s'il vous plaît, soyez convaincu de ma sincérité. Moi,
j’estime votre femme en tant que partie de la famille de Vasila et je n’ai jamais
pensé à lui faire une avance. Chaque fois que je suis arrivé ici, j'ai été reçu
comme un ami et serait une impolitesse de ma part de procéder autrement. Vous
avez tout mon respect et soyez convaincu que n'aura pas lieu dans l'avenir, de
telles discussions entre nous.
- Je vous remercie pour tout ce que vous avez dit et s'il vous plaît ne pas parler de
notre conversation à Vasila.
- Soyez convaincu que je ne parlerai pas, avec personne sur cet incident.
Après ma discussion avec Ovidiu, je suis allé seul à la maison, en disant à Vasila que je
ne me sens pas bien et si elle veut y rester, elle peut la faire, ce qu'elle a fait. J'ai
commencé à réfléchir à une possibilité de ne pas retourner chez les Maitecs et puis j’ai
pensé à une idée que j’ai mise en pratique.
Lorsque Vasila est rentré chez nous, j’ai commencé une discussion avec elle que j’avais
préparée plus tôt :
- Chère Vasila, je tiens à te parler d'un problème que j’ai toujours pensé. Il est vrai
que nous n'avons pas trop d'amis et c'est assez souvent que nous fréquentons
les deux de tes tantes. Honnêtement, j'ai commencé à penser que, pas toujours
elles aiment nos visites, à peu près chaque jour chez elles, mais parce que tu
fais partie de leur famille, elles nous acceptent avec ou sans leur gré. J'ai donc
décidé de ne pas m’en aller aussi souvent chez elles. Normalement, il faudrait
qu'elles viennent chez nous, dans la même mesure, comme nous le faisons,
mais au moins depuis que je suis ici, elles sont très rarement venues. Peut-être
que tu t’es habituée avec cette situation et à cause de cela tu ne te rends pas
compte qu'elles ont le droit d'être seules avec leur famille, sans notre présence
là-bas, tous les jours. Que penses-tu ?
- Puiu, j'ai toujours été très proche de ma famille et je pense que je n’accepterai
pas de ne pas les rendre visite. J'ai été seule si longtemps et je pense que je
serais devenue folle si je restais ici seulement entre les quatre murs de ma
chambre. C'est pourquoi je me suis fait une habitude de m’en aller chez elles. Je
ne sais pas pourquoi cela te gêne ?
- Cela ne me dérange pas du tout, le fait que tu t’es habituée pour leur rendre
visite si souvent. Je veux te dire seulement qu'elles, comme nous, ont le droit
aussi comme nous d'être seules, sans avoir des gardiens à leurs portes. Si tu
veux les visiter aussi souvent, je ne peux pas t’en empêcher, mais tu devras
penser si ce système n’affectera pas, à un moment donné, notre relation.
Après cette discussion, Vasila a diminué ses visites à ses deux tentes, vers ma
satisfaction. En revanche, nous avons commencé à nous en aller plus souvent aux
spectacles ou à se promener, le soir, à pied, sur la « chaussée ».
Les discussions entre moi et Vasila, en dehors de celles habituées s’axaient sur des
commentaires de livres de littérature, peinture et musique symphonique que nous
écoutions pendant des heures. Vasila pratiquait aussi le yoga et elle a commencé à
m'habituer avec les exercices de respiration et de méditation.
Après environ six mois, de vie commune, nous nous sommes mariés le 20 novembre
1985. Après notre mariage, pas de temps après, sont arrivés les parents de Vasila, en
visite de la Grèce et ils sont restés chez nous, presque deux mois.
Avant leur départ, ils m'ont fait une invitation, par leur consulat à Bucarest, à les rendre
visite en Grèce, l'année prochaine. Pendant ce temps-là, j'ai fini à payer ma dette vers
l'entreprise de cuirs synthétiques et ensuite j’ai obtenu ma réhabilitation criminelle.
Ensuite, j'ai demandé un passeport, au Ministère de l’Intérieur, dont j'ai obtenu avec
beaucoup de difficultés, un an plus tard.
Sur la ligne d’emploi, au bout d'un moment j'ai été promu à la tête du bureau
d’approvisionnement et puis comme chef du compartiment d’informatique, nouvellement
créé, à la suite de l'achat de l'étranger, à un impressionnant ordinateur. Il fallait que je
fasse la programmation de la production de SVIAM et dans ce but, j’ai suivi une série de
cours de spécialisation.
Toutefois, avec mon visible retour à une vie plus normale, je n’étais pas encore content
et je continuais d'être souligné par mon passé par les événements que j’ai vécus. J'étais
convaincu que ma vie ne serait plus jamais comme avant de mon arrestation. J'étais
encore terrorisé à l'idée que quelqu'un est toujours sur les traces de ma personne et
qu’il veut toujours me faire du mal. Dans la compagnie de Vasila, souvent je lui révélais
ma crainte et parfois mes pensées. Je m’imaginais que, loin de là, quelque part dans un
autre pays, où personne ne me connaissait, je pouvais être en mesure de restaurer ma
vie et de m’équilibrer.
D'autre part, les Roumains vivaient de lourds jours. Les restrictions imposées à la
population en discordance avec le luxe et la mégalomanie de la famille de Ceausescu et
de ses proches ont conduit, à un certain moment, à une pénurie de nourriture, de
vêtements et d’autres nécessités de vie, sans précédent dans l’histoire de la Roumanie.
Les magasins étaient vides, on ne se trouvait rien. Les aliments de base manquaient ou
étaient distribués en quantité insuffisante sur la base de tickets. Lorsque les gens
apprenaient que dans un magasin sont arrivés, soi-disant, « tacamuri » c'est-à-dire des
pieds de poules, non décortiqués, se formaient des queues dès le soir jusqu'au
lendemain matin et lorsqu’elles étaient distribuées, pas tous ceux qui étaient restés à la
queue, avaient eu la chance d'acheter un paquet. En rentrant chez eux, les gens étaient
déçus et ils ne savaient pas ce qu’ils pouvaient donner aux enfants, à manger.
Tous portaient sur eux continuellement des sacoches, en espérant qu’au long de leur
chemin, va trouver, peut-être, quelque chose à acheter, pour manger.
Au cours de la période où j'ai travaillé à SVIAM, lorsque quelqu'un annonçait qu'un
magasin de proximité avait reçu des produits de nourriture ou d’autres nécessités de vie,
tout le monde quittait les bureaux et les ateliers et s’assoirait à la queue, dans l’espoir
qu’ils vont pouvoir acheter quelque chose pour eux et leur famille.
Dans ces circonstances, j'ai décidé de profiter de cette invitation des parents de Vasila,
pour la Grèce et d'y rester de façon permanente et plus tard, ma femme suivra à me
rejoindre là-bas.
Je n'ai pas parlé à personne, même avec Vasila, sur mon projet et en secret, je me suis
préparé assidu pour ce voyage difficile. J’ai caché mes diplômes et un certain nombre
de documents prouvant mon innocence sur mon arrestation, dans un compartiment
spécialement aménagé dans une ancienne sacoche que je pensais à apporter de la
nourriture pour ma route. J'ai payé toutes mes dettes, que j’avais encore et puis avant
mon départ pour la Grèce, je me suis acheté un billet de train jusqu’à Salonique et non
pas par avion, parce que les bagages ne sont pas vérifiés aussi strictement que si on
voyage par avion.
Avant mon départ du pays, je suis allé à une église et j'ai prié pour la réussite de mon
projet pour bien aller en Grèce. Dans le même temps, j'ai prié pour que Dieu punisse
tous ceux qui ont fait tant de mal sur moi et qui avaient détruit ma vie.
Beaucoup plus tard, j'ai appris que la majorité, de ceux concernés, a perdu leur emploi,
ont été mises à pied, certains ont même fait de la prison ou de leurs enfants sont morts.
Gamalet a été trouvé mort dans son logement en état de putréfaction après 25 jours de
sa mort. Ma prière et ma malédiction avaient été accomplies.

Dans la soirée du 11 juillet 1987, dans un samedi, j'ai quitté Bucarest avec un train direct
de la Gare du Nord, en traversant entièrement la Bulgaire et je suis arrivé à Salonique le
lendemain soir, où j’étais attendu par mon beau-père.
À mon départ de la Gare du Nord, j'ai été accompagné seulement par Vasila parce que
personne d'ailleurs ne savait que je quitte le pays, même pas mes parents. Notre
séparation a été très émouvante, nous avons pleuré tous les deux et lorsque le train
s’est mis en marche, j'ai suivi avec mon regard jusqu'à ce que la silhouette de Vasila a
disparu dans la brume qui était tombée dans l'obscurité de la soirée.
Au passage de la frontière de la Roumanie, j’ai eu des émotions parce que j'ai été
contrôlé avec très grand soin dans mes bagages et sur ma personne, à l'exception de
ma sacoche avec de la nourriture et où j'avais caché tous mes documents importants
relatifs à mes études et ceux qui prouvaient mon innocence.
Une fois arrivés en Grèce, j'ai commencé à m’intéresser comment je pouvais d'y rester.
Étant donné qu’en Grèce les immigrants ne sont pas reçus, je suis allé à Athènes et j'ai
postulé à immigrer en France, après l'obtention de mon statut d’immigrant politique. Les
documents que j’y avais apportés et par qui je prouvais mon innocence, m’ont facilité
mon acceptation en tant qu’immigrant politique.
Vers la fin de mon séjour en Grèce, j’ai communiqué à mes beaux-parents ma décision,
en leur disant que j'ai l'intention de rester à l'étranger et, après un certain temps, je veux
aussi y rendre Vasila. Après m’avoir écouté, ils ont dit qu'ils ne peuvent pas m'aider avec
quelque chose et finalement ils m’ont dit de quitter leur maison.
Leur situation en Grèce était très modeste, mes beaux-parents ayant une très petite
pension. Leur fils Stere, qui vivait avec eux n’aimait pas travailler, en préférant vivre de
la pension de ses parents, même s’il était ingénieur agricole. Tous les jours, il faisait des
exercices de yoga et fumait comme un Turc. Stere était marié en Roumanie, à partir de
laquelle il a eu deux enfants : un garçon et une fille. Il les a quittés comme d'ailleurs sa
femme pour vivre en Grèce, avec ses parents.
Lorsque j’étais en Roumanie, je me suis rendu avec Vasila à l'appartement où vivant sa
belle-sœur avec ses enfants, pour leur apporter un peu de nourriture. Quand je suis
entré dans leur appartement, je suis resté stupéfié par la misère dans laquelle vivaient
ces enfants. Les coquerelles grouillaient partout, dans la cuisine, la salle de bains et
même dans leur literie. Le désordre était indescriptible dans la cuisine et les plats
n’étaient pas lavés pendant environ une semaine. Quand j'ai demandé pourquoi sa
belle-sœur ne nettoie pas chez elle, Vasila a répondu qu’elle est malade mentalement et
qu'elle laisse tout ça à la latitude de ses enfants.
Tout au long que j’ai vécu chez mes beaux-parents, en Grèce et même après mon
départ d’eux, je les ai aidés avec de l'argent et des biens de l'usine où j'ai été embauché
plus tard.
Dans le village où mes beaux-parents résidaient, Paleo-Milotopus, on parlait la langue
« armâna », un dialecte grec très similaire avec la langue roumaine et que je l’ai
enseigné rapidement.
Grâce à un voisin, que j’y ai fait connaissance, j'ai été embouché dans une fabrique de
fromage et de produits laitiers comme ouvriers dans la ville de Ianitza, près de
Salonique.
J'étais bien payé, avec 80.000 dinars par mois plus la nourriture et le logement. Du
Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés à Athènes, j’ai obtenu de plus la
somme de 20.000 drachmes, afin que le total des 100.000 dinars par mois, ce fût
suffisant pour mieux vivre. Au cours de la période que je suis resté en Grèce, j'ai envoyé
de l'argent, des colis avec nourriture et d’autres biens de consommation à Vasila, à mes
parents et à mes enfants.
Après avoir déposé mes documents d'immigration à l’Ambasade de France à Athènes
et après une période de six mois, j’ai reçu l'autorisation d'immigrer en France.
Tout au cours de la période que j'ai vécue en Grèce, j'ai visité les principales attractions
touristiques de ce pays, j’ai admiré la beauté et la culture millénaire de ce peuple
pacifique et hospitalier, en me séparant à peine des gens qui m’ont aidé et m'ont
encouragé, tout au long de la période de mon séjour en Grèce.

Le 9 août 1988, j'ai quitté le territoire de la Grèce et je suis arrivé à Paris par l'aéroport
Charles de Gaulle. Mon arrivée à Paris, un mardi après-midi, il y a eu une averse de
pluie, ce qui a fait que je retarde mon départ de l'aéroport vers Paris, au cours de
laquelle j'ai perfectionné le visa de douane et d'émigration.
Au cours de mon voyage en avion, j'ai eu une voisine, une femme française, d’à peu
près mon âge, jolie, mince et bien habillée, qui rentrait d'un voyage à travers l'Europe.
Pendant le vol vers Paris, j’ai parlé avec elle, en lui disant, finalement, le but de mon
arrivée en France.
Son nom était Mireille Bobois et vivait à Paris dans le quartier de Clichy. Elle était
secrétaire du professeur-docteur Alain Deloche, médecin spécialiste en chirurgie
cardiaque.
Après l'atterrissage de l'avion, nous avons pris congé et elle m'a donné une carte de
visite, en me disant que si je rencontre quelques difficultés après mon établissement à
Paris, elle pourrait m'aider, parce qu’elle avait de nombreuses relations par la nature de
son emploi.
Lorsque la pluie a cessé, j’ai pris un taxi et je me suis dirigé vers un centre de transit
pour les immigrants dans quartier « La Defance » à Paris, où j'étais attendu. J'avais un
peu d'argent d’à côté de Grèce. Au centre de transit, j’ai habité sept jours et après, j'ai
été affecté à un autre centre de longue durée dans le boulevard Victor Hugo,
arrondissement 17 Clichy.
Une fois arrivé et installé dans ce centre, qui était très propre et bien organisé, j'ai
commencé à visiter le Paris. Je me baladais partout et je m'émerveillais de la beauté de
cette ville. Le soir, c’était une féérie. Des millions d’ampoules et de publicités en couleur,
éclairaient les rues, les palais et les bâtiments dans cette grande ville. Les Parisiens
sont très joviaux à leur façon, courtois et tous se baisent quand ils se rencontrent. Leur
humour est proverbial et toujours, ils sont en bonne disposition.
La seule chose qui m'a choqué désagréablement après mon arrivée à Paris ont été les
prix et les loyers qui étaient très élevés comparés à ceux de la Grèce et de ce fait, je ne
me suis pas permis de faire de grosses dépenses. Toute foi, j'ai acheté une petite TV
couleur à qui je regardais des diverses émissions de télévision et films.
Dans cette période, j'ai commencé à courir partout pour trouver un emploi. Les Français,
en plus de leur caractère de gens ouverts sont, dans la plupart des cas, nationalistes et
ils défendent leur travail et à cause ça, la majorité des immigrants n'ont pas grand
succès pour trouver un emploi. Paris grouille d'Algériens et des immigrants africains, de
nombreux clandestins établis ici après l'indépendance de leur pays par la France.
Après une période de temps, dont j’ai eu que des échecs dans la recherche d'un emploi,
j'ai téléphoné à Mireille, la dame avec laquelle je me suis entretenu dans l'avion qui m'a
amené à Paris. Elle a répondu et a été aimée surprise de mon téléphone :
- Bonsoir Madame Mireille, je lui ai dit, peut-être que vous vous souvenez de moi.
Mon nom est Puiu Munteanu et nous avons voyagé ensemble d’Athènes, dans
l’avion à destination de Paris.
- Oh, oui, quelle surprise ! Comment allez-vous, monsieur Munteanu ?
- Et de bonnes et de mauvaises ! Je vous ai appelé pour entendre votre voix et de
vous demander comment vous allez.
- Toujours au travail ! J’en suis assez occupée et je n’ai pas vraiment le temps de
prendre soin de ma personne, à l'exclusion des week-ends.
- Si vous vous souvenez, à notre séparation de l'aéroport, vous m’avez donné
votre carte de visite et vous m’avez dit que je peux vous appeler.
- Oui, en effet ! Est-il arrivé quelque chose de grave avec vous ?
- Rien de grave, mais je souhaiterais, si possible, de nous rencontrer, un jour,
parce que je veux vous parler à l’égard de certains problèmes qui me troublent,
ici à Paris.
- Oui bien sûr, restez un petit peu à l’appareil, parce que je veux consulter mon
agenda.
Après avoir quitté le téléphone, pendant environ deux minutes, elle est revenue et m’a
dit :
-Après-demain, à partir de six heures du soir, je suis disponible.
-Alors, où pouvons-nous nous rencontrer ? je l’ai demandé.
-Le plus proche lieu de mon travail est une pâtisserie qui se trouve à intersection
de l'avenue des Champs-Élysées et la rue de Washington, au centre-ville.
D’ailleurs, c’est la seule là-bas. Pouvez-vous vous débrouiller pour arriver à la
destination ?
- Bien sûr, j'ai un guide de Paris.
- Parfait. Alors, après-demain !
Ce jour-là, je me suis déplacé à la place de rencontre et je l’ai attendu à une table de la
confiserie. Elle est arrivée dans une robe duveteuse de couleur de la paille et avait un
gros collier jaune assorti avec ses boucles d'oreilles.
- Bonjour, a dit-elle, je crois que vous n'avez pas eu de difficultés à arriver ici ?
- Non, pas une. Mais, permettez-moi de vous faire un compliment : vous êtes très
élégante et avec du bon goût !
- Oh, a dit-elle en souriant, j’arrive directement de mon emploi et ne sont pas
habillés avec des choses distinctes. Vous êtes très gentil ! Je suis curieuse de
savoir quels sont les problèmes qui vous inquiètent ?
- Vous savez, depuis mon arrivée à Paris, j'ai toujours essayé de trouver un travail.
Malheureusement, jusqu'à présent, je n'ai pas eu que des échecs. Je vous ai
contactés dans l'espoir que, comme vous m’avez promis d’ailleurs, vous pouvez
m'aider dans ce sens. Je suis prêt à faire n’importe quel travail.
- Oui, ici il est très difficile de trouver quoi que ce soit, mais ne vous inquiétez pas
parce que j'ai un carnet rempli de connaissances et je suis convaincue que je
peux trouver quelque chose pour vous. Donnez-moi quelques jours pour
communiquer avec mes amis. Mais attendez, quel genre de travail vous êtes
intéressé à faire ?
- De profession, je suis un économiste, mais je peux travailler sur des petits
emplois, tels que fonctionnaire, commis-comptable. D’ailleurs, pas importe,
n’importe quoi, seulement pour trouver du travail.
- Il faut que j’en m’intéresse. Si je trouve quelque chose, où puis-je vous
contacter ? Avez-vous un numéro de téléphone ?
- Oui, au centre d’hébergement où je vis et je lui ai donné le numéro de téléphone
dont je l’avais déjà inscrit sur un morceau de papier.
- Maintenant que j’ai fini mon gâteau, je voudrais m’en aller. Vous habitez dans
quelle direction ?
- Ma maison est située sur la rue Victor Hugo arrondissement 17 quartiers Clichy.
- Oh, là là, mais nous sommes voisins ! Moi, j’habite, pas trop loin de Victor Hugo.
Alors, nous avons la même direction. Quel temps magnifique ! Je voudrais aller
un peu dans les Champs-Élysées et de prendre un bus près de l’Arc de
triomphe.
- C’est une idée géniale ! Moi aussi, j’avais l’intention de faire une promenade
aujourd’hui.
J’ai payé les gâteaux et puis, lentement, nous avons commencé à marcher dans les
Champs-Élysées. Le temps était superbe. Le soleil était sur le point de se coucher en
fessant place à un crépuscule rouge qui diffusait des lumières pâles qui se mélangeaient
avec les lumières des ampoules et qui avaient commencé à s’allumer. À un moment, les
derniers rayons du soleil s’étaient éteints et par miracle des millions de feux se sont
allumés sur le boulevard, en inondant avec leurs forts feux tout ce qu’était dans leur
chemin. Nous marchions côte à côte dans un large trottoir, planté de deux cotés, avec
d'arbres et semblaient être des soldats mis à la garde pour surveiller les beaux édifices
baignés dans une éblouissante lumière. Pas loin de la station de bus, nous nous
sommes arrêtés devant une boutique du fleuriste et nous avons admiré les centaines de
fleurs exposées. Mireille a dit qu’elle aime les tulipes jaunes. J’ai voulu lui acheter des
fleurs, mais elle a refusé. Lorsque nous sommes arrivés à la station de bus, nous nous
sommes montés, après environ deux minutes, dans le bus qui se rendait vers le quartier
de Clichy. Une fois arrivés dans la station, nous nous sommes rendus devant son
domicile et après que nous nous sommes dit au revoir, Mireille a dit qu’elle va m'appeler
en fonction des résultats de ses interventions.
Après quatre jours, Mireille m'a appelé et nous avons fixé un rendez-vous pour le
lendemain à sept heures du soir, cette fois-ci à son domicile, en me disant que va venir
un monsieur, un de ses amis, qui était architecte et coauteur du projet de l'Opéra de la
Bastille, en cours de construction. À l’heure indiquée, je me suis présenté chez elle avec
un grand bouquet de tulipes jaunes. Elle a été très impressionnée par mon geste et
dans l'attente de son invité, qui est arrivé au bout de dix minutes, j’ai porté une
conversation protocolaire.
Après l'arrivée de ce monsieur qui s’appelait Victor Marois, j'ai eu une conversation avec
lui et je lui ai dit, brièvement, sur moi et sur ma formation professionnelle. Mireille dans
cette période nous a servi avec du café et Dubonet, un vin rouge alcoolisé et un peu
doucereux.
Après m’avoir écouté, l’invité de Mireille a dit que le chef de chantier de l'Opéra en
construction a un poste de comptable et, s’il va constater que je ferai face au travail, il va
m’engager. Pour commencer à travailler à temps plein, j’avais un délai de deux
semaines avec le salaire minimum pour vérifier si j’ai la compétence requise.
Le lundi suivant, je me suis présenté au chef du chantier de l'Opéra, l’ingénieur Philip
Boyer qui était déjà au courant de ma demande. On m’a fait les formes d'emploi et une
brève formation de la protection du travail et puis je me suis présenté, le lendemain, à
un centre médical où j'ai fait mes analyses de sang et une consultation générale.
Après avoir rempli les formalités, j'ai commencé à travailler. Mes tâches consistaient à
préparer certains documents avec les matériaux utilisés sur le chantier, de calculer leurs
valeurs et ensuite de les répartir sur des points de travail. C’était très facile pour moi.
Après avoir réussi le teste de travail, j'ai été embauché de façon permanente.
Je gagnais maintenant une petite fortune et je me permettais maintenant de partir du
centre d’hébergement et de louer une petite chambre. Dans le cadre du contrat que
j’avais signé à mon arrivée à Paris, il fallait que je quitte le centre dans une situation où
je trouvais du travail, ce que j'ai fait. J'ai ensuite trouvé une petite chambre dans la rue
de Bercy, près de l'endroit où je travaillais. Le loyer, en échange, était très élevé. Près
de la moitié de son salaire. Mais, il me restait assez d'argent pour m’entretenir et je ne
dépensais pas d’argent pour le bus. Le soir, je mangeais à un petit bistro à proximité de
l'Opéra où je préparais chez moi divers plats que j’aimais, surtout des sandwichs
« Croque monsieur », très croquants et très bons au goût, fait avec un mélange de
jambon et du fromage suisse.
À un moment donné, sur la fenêtre d’un petit restaurant près de chez moi, j'ai lu une
annonce dans laquelle on demandait un aide-cuisinier, le soir, à temps partiel. Comme
moi, en particulier, j’étais un homme qui aimait la cuisine et j’aimais préparer mes
propres plats préférés, en connaissant de différentes recettes, j'ai pensé, peut-être que
j'aurai la chance d'être embauché. Je me suis présenté au patron et après avoir appris
qu’elles étaient mes tâches, après trois jours d'essais, j'ai été embauché.
Le matin, je débutais la journée au chantier de l'Opéra jusqu'à cinq heures de
l’après-midi et le soir je travaillais au restaurant de sept heures jusqu'à minuit. Il a été un
peu difficile au début, mais quand même, je me suis habitué. En échange, j’avais la
nourriture gratuite du restaurant où je travaillais. Les samedis et les dimanches, je les
avais libres. J'ai commencé à économiser de l'argent et j'ai continué à envoyer des colis
avec de la nourriture et de l'argent à mes enfants, mes parents et pour Vasila.
Dans un samedi matin, j’ai téléphoné à Mireille pour la remercier de tout ce qu’elle a fait
pour moi. Elle était en train de sortir pour s’en aller à une piscine couverte, où
généralement dans ses jours de congé, elle nageait. Elle m'a demandé si je veux y aller
avec elle.
Dans une demi-heure, j’étais chez elle et nous sommes partis ensemble, à la piscine
avec sa voiture. Nous y sommes restés environ deux heures. Elle était une très bonne
nageuse et elle m’a impressionné comme elle nageait. Ensuite, nous avons pris une
petite collation au bord de la piscine et après, nous sommes partis en voiture à la
promenade à travers Paris. Nous sommes retournés en fin de soirée et quand nous
sommes arrivés chez elle, Mireille m'a invité l'intérieur. Nous y sommes restés jusqu'au
matin. Le lendemain après-midi, nous nous sommes rencontrés, de nouveau, et nous
avons continué notre promenade à travers Paris.
Les jours passaient et j’ai commencé à rencontrer Mireille, presque régulièrement, tous
les samedis et dimanches. Notre relation était timide, mais pleine d'affection et de
douceur. Avec elle, je me suis rendu à ce qui était le plus beau à Paris et à un certain
nombre de villes telles que Lille, Le Havre, Caen, Calais et d'autres, la plupart étant sur
la côte atlantique. Ensuite, j’ai visité en sa compagnie un certain nombre de châteaux
médiévaux et palais royaux à travers le fleuve de Loire.
Mon séjour en France est terminé en été 1989. Un collègue roumain, avec qui j'ai
partagé la chambre où je vivais au centre d’hébergement de Paris, m’a écrit une lettre
de Montréal, où il m’a dit qu'il s’est établi au Canada parce que la vie y est bien
meilleure qu’en France et il m’a donné un certain nombre d'exemples probants. Je me
suis assis et j’ai bien pensé, j'ai revu toutes mes possibilités matérielles et financières et,
finalement, j'ai décidé de m’en aller au Canada.
Je me suis présenté à l'ambassade du Canada à Paris et j'ai postulé pour y aller, en
déposant ma demande d’immigration. Après cinq mois et une très longue interview, j'ai
été accepté d'immigrer dans ce pays.
Mon départ pour le Canada, à Montréal, a été fixé au 19 juillet 1989. Mireille m’a conduit
à l'aéroport et au moment de notre séparation elle m'a donné une enveloppe en me
priant de ne pas l’ouvrir qu’au moment de mon arrivée à Montréal.
J’étais un peu contrarié parce que je ne savais pas de quoi il s’agit, mais à la fin, j'ai
promis que je ferai comme elle a dit et j'ai gardé ma promesse. Lorsque je suis arrivé à
Montréal, j'ai ouvert l'enveloppe et j’ai trouvé une somme de 5000 dollars canadiens en
dix billets American Express de 500 dollars chaque et une petite note écrite qui disait
« Je t'aime ». J'ai immédiatement écrit une longue lettre, mais Mireille n'a jamais
répondu.

Une période de temps, j'ai été à nouveau touché par des situations et des événements
qui se sont passés dans ma vie personnelle. Toutes les femmes que j’ai rencontrées et
que j’ai eues confiance, ont disparu d'une manière ou d'une autre, en me laissant seul,
avec quelques souvenirs heureux que j’aie passés ensemble. Je me suis fermé à
nouveau dans ma coquille et j'ai juré de ne rien faire quelque chose sur cette ligne et
que je laisse mon destin de décider pour moi, mais pas toujours j’ai tenu ma parole.
Moi, dans ma vie, j'ai aimé les femmes, mais dans la plupart des cas, je me suis habitué
avec elles difficilement. Dans un premier temps, la curiosité m'a incité à explorer leurs
pensées, leurs sentiments et leur manière d'être et, plus tard, quand j'ai découvert qu'il
existe une similitude de pensée et des points de vue matériellement communs, j'ai
commencé à les aimer. Mon amour a été au début par tendresse, par devoir et par la
nécessité de savoir qu’elles sont heureuses. Ensuite, en m’habituant avec elles, avec
leur sourire et avec leur voix telle qu’on t’habitue avec un paysage où une belle peinture,
progressivement, leur présence journalière m’a accaparée et m’a fait que je devienne
leur esclave.
J'ai toujours eu confiance dans les gens et cette caractéristique m’a fait, parfois, que je
regrette, parce que j’ai déposé trop de cœur et de trop d'énergie à entretenir une amitié
ou même un amour.
Plusieurs fois, j'ai fait des plans pour l'avenir sur la base de leurs besoins et leurs
préférences, je courais après des succès pour obtenir leur sourire, j’ai construit, pièce
par pièce, celle symbiose affective qui s’appelle l'amour et qui, avec le temps, m’a
subjugué.
L'amour a aussi des risques. Après moi, le plus important risque, lorsqu’on aime, c'est
de ne pas plonger trop dans son Abyss, car il peut avoir la non-chance à constater, plus
tard, qu’on ne peut plus atteindre la surface pour respirer et, par conséquent, à vivre. Ce
phénomène s’est produit plusieurs fois, aussi pour moi et le résultat a été une déception
totale.
La vie est belle, mais il faut savoir comment vivre ainsi. On ne doit pas te laisser
submerger par ses difficultés et ses inconvénients qui apparaissent dans une certaine
période de temps matériellement déterminée. On doit te battre et surtout d’insister pour
dépasser les moments cruciaux et le résultat de victoire va apparaitre, sans aucun doute
et certainement, tôt ou tard.
Quand j'étais jeune et je pensais que tout ce qui vole on mange et quand je ne me
rendais pas compte que le temps court, au détriment de la jeunesse et de la vie en
général, j’étais à la recherche de petits plaisirs et des satisfactions de moment qui ne
laissait pas leur empreinte sur mon âme, seulement tant qu’ils couvraient mes besoins
dans une étape strictement déterminée. Au fil du temps, j’ai compris que tous ces-ci ne
sont pas suffisants pour me rendre heureux et puis j'ai commencé à penser plus, plus
analytique sur les questions de la vie. Malheureusement, j'ai eu une vie tumultueuse,
pleine de surprises et d’inattendue que, avec le temps, m’ont altéré au détriment de ce
que j’ai pensé et j’ai voulu réaliser.
Je n’ai pas été un pessimiste, mais, au contraire, un optimiste. Le fait que j'ai quitté mon
pays, à l'âge où d'autres prennent leur retraite et ils n’aiment plus faire quoi que ce soit,
respectif à 50 ans, c’est la preuve sûre, de risque et de confiance dans l'avenir pour
laquelle je me suis battu toute ma vie. Dans l'absence d'une cible précise et sans argent
dans mes poches, j'ai décidé de refaire ma vie, de la prendre depuis le début et à
construire avec mes propres forces une autre étape de ma vie, meilleure et plus digne,
plus sûre et plus équilibrée. Je ne sais pas si j’ai réussi tout ce que j'ai pensé au début,
mais je peux dire que, autant que je l'ai fait et surtout dans un temps relativement court,
j’ai réalisé des choses qu’en Roumanie, je ne pouvais pas les faire, ni dans une seconde
vie.
La société d’ici, du Canada, elle te permet de t’intégrer vite dans son mode de vie, bien
sûr si tu as la volonté de t’adapter progressivement et sans à la hâte à son mécanisme.
L'argent ici, ne pousse pas sur les arbres, mais on l’obtient dans le travail quotidien, par
persévérance et continuité. Pour arriver à l’avoir il faut faire des sacrifices et de ne pas
être désolé qu’on ne peut pas le faire autant qu’on veut. Il ne doit pas convoiter aux
biens des autres, mais, au contraire, on doit méditer de manière à atteindre les
exigences minimales de vie et, de l'excédent, s’il existe, il faut aider les autres comme
les autres ont contribué à tes besoins, dans les moments cruciaux, par lesquels, moi
aussi, je suis passé.
Je n’ai jamais été un égoïste et un avare. J’ai toujours partagé tout ce que j'ai fait avec
d'autres, en me réjouissant que je sois capable de les rendre heureux ou, qu’ils aient
échappé d’une chose qui les a empoisonnés leur vie. Très souvent, toutefois, pas tous
ceux à qui j'ai offert mon aide désintéressée, ils ont répondu dans la même mesure, plus
tard, quand, à mon tour, j'ai eu besoin de leur aide.
Certaines personnes sont devenues, surtout à notre époque, avides du pouvoir et de
l'argent qui ont les à aveugler, à un point tel qu'ils ne se rendent plus compte des réalités
de la vie et ils deviennent les esclaves de leurs propres personnes et leurs désirs,
d'avoir plus rapidement et de plus en plus ce qu'ils pensent. Malheureusement, pas tous
ont réussi à faire ce qu'ils avaient à leur esprit et le résultat a été un fiasco que, parfois,
a conduit à leur suicide.
Voici donc, mon opinion sur la vie, en général et sur la façon de vivre, en particulier.
Chapitre 6

Le crépuscule

Une fois arrivé à Montréal, le même après-midi du 19 juillet 1989, en étant un mercredi
et sur une petite pluie, je me suis présenté au bureau de l'immigration où j'ai fait mes
formalités nécessaires à mon établissement au Canada. Je suis ensuite allé à Montréal
dans une voiture, accompagné par un représentant des autorités de l'immigration et j’ai
été logé à l'hôtel « Europe » où j'ai passé quatre jours. Dans cet intervalle de temps, on
m'a donné plusieurs adresses de logement et finalement j'ai choisi un petit appartement
meublé à Montréal-Nord sur le boulevard Henri-Bourassa, parce qu'il était moins cher et
très propre. En outre, la plupart des habitants étaient de nationalité roumaine.
À une distance de 200 mètres de ma maison, il y a même maintenant un beau parc qui
se termine sur la Rive-Sud de la « Rivière des Prairies » où je marchais souvent dans
mes heures libres.
Pendant un an, le loyer de mon appartement et de mon entretien a été payé par le
Ministère de l'Immigration du Canada.
Entre-temps, j'ai essayé d’équivaloir au Ministère d’enseignement mes études au niveau
de mes diplômes, mais je n’ai pas réussi que partiellement, pour le premier cycle
académique, parce que le Canada n'a pas signé les protocoles d’équivalence avec la
Roumanie.
Dans ces circonstances, j’ai passé les examens pour l’admission à l'Université de
Montréal, Département des hautes études commerciales, Faculté Master Business
Administration (MBA) où j’ai suivi ses cours pendant deux ans. Malheureusement, j'ai dû
interrompre mes études parce que, à un moment donné, je n'ai pas été en mesure de
payer les honoraires d’inscriptions et les manuels scolaires, qui étaient assez élevés par
rapport à mon budget.
Suite à cette situation, j'ai commencé à travailler comme comptable dans diverses
institutions et entreprises de Montréal pour un salaire relativement faible.
Depuis quand j'étais à Paris, mes relations avec Vasila, mon épouse légitime, ont
commencé à se détériorer et ce, probablement en raison des influences de ses parents.
Même si j’avais insisté à plusieurs reprises par des lettres et des appels téléphoniques,
pour qu’elle me suive à l'étranger, elle n'a jamais donné une réponse claire et précise à
ce problème. D'autre part, je lui ai dit et j'ai même écrit que je ne reviendrai jamais en
Roumanie en raison de mes souffrances et mes échecs de là-bas.
Après mon arrivée au Canada, Vasila a complètement cessé de m'écrire et évitait de
répondre au téléphone. Pendant un an, je n’ai pas eu de nouvelles d'elle et je ne savais
pratiquement pas ce qui s'est passé.
Un jour, j'ai trouvé, dans ma boîte aux lettres, dans une enveloppe envoyée par Vasila,
la décision de divorce qui a été prononcé le 6 mars 1991 par le Tribunal du Secteur
numéro 1, en sa faveur. Mais d’elle, aucun mot, même si je me suis comporté avec elle
comme un gentleman à époque quand nous étions ensemble en Roumanie et après
mon départ en étranger, quand j'ai régulièrement envoyé de l'argent, des colis
alimentaires et d’autres choses. De plus, Vasila a reçu une somme importante d'argent
représentant la valeur de l'appartement partagé avec Virginica, mon ex-épouse, après
ma procédure de divorce, montant qui est resté en sa possession, car je ne pouvais pas
prendre cet argent, avec moi, lorsque j'ai quitté le pays.
Déçu une fois de plus, de tous les échecs de ma vie personnelle, je me suis fermé dans
ma coquille encore une fois, au cours de laquelle j’ai connu des moments noirs de
souvenir.
Au fil du temps, j'ai commencé à me réconforter cependant et je pensais que tout ce que
j'avais dans ce monde était mes enfants, dont l'absence me marquait visible et continue.
J'ai commencé à les écrire plus souvent et à parler avec eux par téléphone. Je les ai
envoyés des petites attentions et un jour j’ai envoyé une lettre d'appel pour me rendre
visite avec l’idée, de les garder près de moi. En même temps, j'ai envoyé de l'argent en
leur nom et un certain nombre de dispositifs électroniques, qui étant vendus en
Roumanie pourraient couvrir le prix de leurs billets d’avion, jusqu’à Montréal.
Le 11 mai 1990, mes enfants, Florin et Ioana, sont arrivés à Montréal après une escale à
New York. Je les ai préparés des surprises et une table pleine de bonnes choses. Ils ont
surtout apprécié certains fruits exotiques, qu’ils n’ont jamais mangés, car ils n’existaient
pas en Roumanie.
Peu de temps après, et avec leur permission, j'ai demandé pour mes enfants leur
parrainage au Ministère de l'Immigration du Canada. Après beaucoup de course, j’ai
obtenu l'autorisation pour eux de rester en permanence au Canada.
Le temps passait et à un certain moment j’ai remarqué que Florin et Ioana ont
commencé à penser de plus à leur mère, leurs grands-parents et leurs oncles. Ils se
souvenaient qu’avec Virginica, ils partaient à la campagne, à Zavoiu et dans le
pittoresque de ce petit village, se promenaient sur les collines pleines de la
richesse de la terre, se baigneraient dans l'eau claire et froide du fleuve « Arges »,
cueillaient des fruits et légumes frais, tandis que leur grand-mère les inciter avec du pain
frais et chaud, poulet grillé qu'ils mangeaient ensuite avec le plaisir de leur jeunesse.
Ils me racontaient que leurs oncles, Jean et Ioana Dobrinoiu, les faisaient toutes sortes
de plaisirs et en même temps, ils les guidaient sur la bonne direction de la vie, pour
qu’ils deviennent des gens honnêtes, corrects et travailleurs.
Au cours de cette période, j'ai commencé à penser que peut-être le temps avait effacé
les divergences qui ont conduit à mon divorce, avec Virginica. Je pensais qu’elle
regrette aussi parce que nous nous sommes aimé avec la passion de notre jeunesse qui
a fructifié la naissance de nos enfants. Je me disais que je n’ai pas le droit de la séparer
de ses enfants, car ils sont aussi à elle.
Pour ne pas précipiter les choses, j'ai pris la décision de discuter, premièrement, avec
mon ex-beau-frère, Jean Dobrinoiu et sa femme. De cette façon, je leur ai envoyé une
invitation d’hébergement et après un certain temps, ils sont arrivés à Montréal. Par cet
acte, j’ai donné la possibilité à mes enfants pour voir leurs oncles.
Dans la période où ils sont restés à Montréal, j’ai parlé beaucoup de Virginica et ils m'ont
assuré qu'elle aimerait se réconcilier avec moi, si je voulais être d'accord. Comment je
l'aimais et j’ai toujours voulu revenir avec elle, j'ai demandé à mon ex-beau-frère, à se
faire mon messager et de parler en mon nom, avec Virginica. D'autre part, je lui ai écrit
plusieurs lettres et je lui ai demandé si elle veut venir à Montréal.
Deux mois après le départ de mon beau-frère de Montréal, mon père Zamfir Munteanu
est décédé. Quand j’ai appris la triste nouvelle, je me suis immédiatement allé à
Bucarest pour ses funérailles.
Mon arrivée en Roumanie a eu lieu après la révolution nationale, par laquelle le couple
Ceausescu a été enlevé du pouvoir dans les conditions connues. Même si la révolution
a été spontanée, elle a été mûrie par la structure des organes de sécurité qui a été
impliquée en profondeur dans le désastre et la corruption instaurée pendant la dictature
communiste. J’ai trouvé un pays et une population en pleine effervescence qui essayait
de faire des efforts pour sortir à la surface après la tempête qui s’est abattue et avait
détruit tout. Malheureusement, il n'y avait rien organisé, chacun faisait presque tout ce
qu'il voulait et à cause de cela les anciens agents de la sécurité qui avaient conduit de
l’ombre la révolution ont tiré pleinement profit du chaos instauré pour s’enrichir. Ceux qui
ont eu à gagner ce moment-là ont été le groupe terroriste de la sécurité qui savait tout
sur les subterfuges du pouvoir, leurs comptes bancaires et les codes à déchiffrer avec
lesquelles ont pu gagner presque tous et sont devenus millionnaires immédiatement.
Ceux-ci, une fois enrichis, ont commencé à acheter de l'état, à des prix ruineux, les
principaux moyens de production (usines, mines, terres agricoles, etc.) qui ont été
vendus plus tard à des prix exorbitants, à des compagnies basées sur capitaux
étrangers, situation qui a conduit à la formation d'une oligarchie qui ne reflétait plus
l'esprit et les idées de ceux qui ont été sacrifiés à la révolution. Les partis politiques se
sont formés sur le squelette de certains existants avant la prise, par les communistes,
du pouvoir politique en Roumanie après-guerre. Dans ces conditions, a commencé une
lutte acharnée pour le pouvoir dans laquelle s’est impliqué un certain nombre de
nouveaux riches afin de multiplier leur richesse et de trouver des ressources
supplémentaires pour leurs zones d'influence. La grande majorité de la population est
restée, malheureusement, dans la situation existante dans la période communiste. Pour
donner l'impression que les gens sont libres et que la nouvelle société est engagée avec
eux, on a légiféré la possibilité que les citoyens peuvent voyager à l'étranger, on a
adopté une constitution fondée sur la démocratie capitaliste dans laquelle les citoyens
ont des droits qui n'étaient pas prévus dans les lois communistes, lois qui ont été
fondées par la privatisation des secteurs économiques de la société, mais qui ont
bénéficié de ces ci-dessus, a été la nouvelle oligarchie.
À cette époque, on a fait l’apparition dans la politique un ancien marin nommé Traian
Basescu qui dans la période communiste a été commandant d’un navire commerciale et
en même temps il a fait partie du clan des secouristes sous recouvrementŽ qui ont été
au pouvoir. Après la révolution, le clan des secouristes l’a poussé vers de hautes
fonctions politiques pour faire leurs jeux. Avide de pouvoir et de l'argent, il a avancé
rapidement sur les échelles du pouvoir politique et dans quelques années à venir a
occupé des hautes fonctions politiques jusqu’au post du président de la République.
Une fois installé au pouvoir, Basescu a commencé une campagne d'incertitude politique,
a fondé le pillage du budget de l'État, des scandales politiques, l’extorsion financière et a
incité les gens les uns contre les autres, a intensifié la xénophobie, le népotisme, des
menaces pénales après avoir tendu lui-même l’appât. Dans ces conditions, la société
roumaine s’est divisée et plus tard on a eu lieux des manifestations dans la rue par la
population qui a été soumise à des mesures d'austérité imposées par lui. On a même
instauré, plus tard, une dictature personnelle fondée sur les principes de la dictature
communiste.

Après mon arrivée à Bucarest, mon ex-beau-frère m'a aidé pour enterrer mon père à
Zavoiu où ils ont construit un caveau commun et pour ma mère qui suivra à y être
enterré, après sa mort.
L'initiative de la construction du caveau à Zavoiu a été à ma mère qui a toujours voulu y
aller parce qu’elle s’y est toujours bien sentie, étant convaincue que quelqu'un va se
charger d'allumer une bougie pour eux, de temps en temps.
La rencontre avec ma mère a été émouvante, après toutes ces années. Elle était vieille
et malade au lit. Nous avons beaucoup parlé et elle m'a dit que, après mon départ à
l’étranger, Vasila n'a jamais passé chez eux, même si elle m'a dit par ses lettres qu'elle
s’en va régulièrement à les voir et de les aider. Que les seules personnes qui sont
venues chez eux pour les aider ont été mon ex-femme Virginica, mes ex-beaux-frères
Jean et Ioana Dobrinoiu ainsi que mon cousin Mircea Barzuca, même s’ils n'avaient
aucune obligation à l'égard de mes parents.
Après la cérémonie funéraire de mon père, j'ai embauché une femme pour donner des
soins en permanence à ma mère. Au cours de cette période, Virginica a toujours été
avec moi, en nous rappelant, dans les moments de paix, les heureux moments passés
ensemble.
Avant mon retour à Montréal, j’ai assuré Virginica que je ferai tout pour qu’elle puisse
arriver au Canada où elle va y vivre avec moi et nos enfants.
Après une semaine de mon retour au Canada, ma mère est morte elle aussi. C’est mon
père qui l’a appelé à partager ensemble leur seconde vie éternelle après 65 ans de vie
terrestre.
Au moment où j'ai appris de cette triste nouvelle, j’ai sauté dans l'avion et je me suis
rendu immédiatement à Bucarest où j’ai enterré ma mère à côté mon père. Après son
enterrement, je suis resté encore quelques jours et je me suis remarié avec Virginica le
12 décembre 1991, sans cérémonie, suite à la mort de mes parents. J’ai fait ce pas
immédiatement de sorte que Virginica peut arriver plus rapidement au Canada.
La maison de mes parents a été vendue et avec l'argent que j’ai fait, j'ai acheté dans
une petite ville, pas loin de Montréal, une petite maison entourée de verdure et de fleurs.
Le 23 avril 1992, Virginica est arrivée au Canada. Virginica a vendu son appartement à
Bucarest et avec l'argent qu’elle a obtenu, nous avons remboursé une partie de notre
dette à la banque qui nous a financé la petite maison.
Nos enfants qui sont devenus adultes sont maintenant à leurs maisons. Ioana est
devenue médecin dentiste et notre fils, Florin, est devenu informaticien et après avoir
travaillé pendant longtemps dans une grande entreprise de télécommunications, Bell, a
ouvert sa propre entreprise.
Notre vie se poursuit maintenant au Canada, dans ce pays hospitalier et généreux, où
nous nous sommes établis pour toujours et où nous vivons intensivement, les moments
que nous avons encore à vivre, sans haine et sans discorde.
Depuis que je suis arrivé dans ce pays, j’ai suivi en permanence l'évolution politique et
économique en Roumanie, en constatant avec douleur que ce peuple pillé pendant des
siècles n'a pas pu créer une réelle indépendance et une base de puissance économique
afin d'offrir un niveau de vie décent de la population, en étant à la merci de la finance
internationale. La situation créée est due à l'implication dans la vie politique et de la
structure économique du pays aux anciens cadres de sécurité formés dans le régime
communiste, qui ont pris le pouvoir et ils ont établi un nouveau contexte basé sur en-
richement personnel.
Je ne regrette pas que j'aie quitté la Roumanie même si mon cœur est resté pour
toujours sur les terres de ma jeunesse. Je suis parti avec mes pensées et l’idée de
pleine liberté et j’ai trouvé ici un Nouveau Monde où les gens sont respectés et aidés à
vivre décemment et en pleine sécurité.
J’ai trouvé ici tout ce que j’ai rêvé dans ma jeunesse, c’est-à-dire une société moderne
et réelle, en dehors de l’aspect institutionnel, construite sur la participation de chacun à
la vie publique avec l’implication directe sur les décisions politiques et économiques de
l’État de droit, une société qui défend et promeut les intérêts de la population basée sur
le respect réciproque, des gens qui travaillent honnêtement et qui aident leur proche,
sans divergence sur la race, la religion, l’appartenance politique, économique et
culturelle, des gens qui aiment la vie et qui donnent à la société tout ce qu’ils ont de
mieux en promouvant la justice, la loyauté, l’honnêteté et l’amour pour leur pays.
En ce contexte, je tiens à apporter un hommage et un grand merci pour les conditions
de vie qui m’ont été accordés par les gouvernements de la Grèce, la France et le
Canada et en échange desquels je ne pourrais jamais me récompenser.
Dans ces moments, quand j’essaye de finir ce livre qui m’a fait vivre les principaux
moments de ma vie, souvent agités et bouleversés, je suis paisiblement tranquille et
dans mes longues réflexions, je me rappelle les quelques moments heureux de ma vie
et j'attends réconcilié et en paix, le grand voyage vers les lieux où la mer rencontre et
s’embrasse avec le ciel, dans leur mystérieux infini.
Bibliographie

1. Encyclopédie Wikipedia, les chapitres la République Populaire Romaine et la


Republique Socialiste Romaine.

2. Encyclopedia Universalis, chapitre Nicolae Ceausescu

3. Le Rapport de la Comission présidentielle pour l’l’analyse de la dictature


communiste de Roumanie.

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