La suppliciée de Lanvénégen
MARIE-DOMINIQUE LELIÈVRE Envoyée spéciale Lanvénégen (Morbihan)
Le 6 août 2020. Sur une prairie d’un vert éclatant, les massifs à profusion dévalent vers la rivière comme pour fleurir celle qui fut suppliciée ici il y a soixante-quinze ans. Anne-Marie Perron avait 40 ans. Sa petite-fille Maryse ne l’a pas connue. Un minuscule chien coincé sous l’aisselle, celle-ci nous ouvre gaiement la porte d’une maisonnette au bord de la N790 reliant Le Faouët (Morbihan) à Quimperlé (Finistère). Retraitée, elle y habite avec Fifine, son « antidépresseur », au hameau de Beg-en-Allée. De cette maison de Lanvénégen (Morbihan), le 6 août 1944, des FFI* ont arraché sa grand-mère qui donnait le sein à un enfant. Anne-Marie, qu’on appelait Marie, y vivait seule avec ses deux filles de 16 et 4 ans et une chèvre. Sol en terre battue, ni eau courante ni électricité, comme partout alors. Les types de 1944, Maryse Pichon ignore leur identité. Elle aimerait savoir. Quelle que soit la vérité, savoir.
Une même phrase revient en boucle : « Après, on n’en a plus jamais parlé »
L’histoire d’Anne-Marie Perron, torturée et exécutée le 6 août 1944 par des résistants qui l’accusaient de… de… on ne sait toujours pas, Maryse cherche encore malgré une interminable omerta. Lorsqu’à l’automne dernier l’historien Grégoire Kauffmann a publié (Flammarion), livre sur son propre grand-père chef des FFI de Quimperlé, il a consacré quelques pages à Marie, surnommée « Marie Belles-Dents ». Pour Maryse, un premier soulagement : sa grand-mère échappait au néant. On l’avait jetée à la fosse commune, mais sa petite-fille a fait graver une plaque : « En mémoire d’Anne-Marie Perron, torturée et fusillée le 6 août 1944. » L’ouvrage de Kauffmann a fait
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