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Le ballet : Les cygnes de Preljocaj

Quel challenge que de reprendre ce monument de la danse !

Oui, c’est un Everest pour un chorégraphe! On m’avait commandé une courte création pour le bicentenaire de la naissance de Marius Petipa à Saint-Pétersbourg. J’ai réalisé ce ballet, Ghost, où j’ai imaginé Petipa visité par les fantômes de ses cygnes pendant qu’il créait son Lac… J’ai pris un tel plaisir à travailler sur la musique de Tchaïkovski, je me suis alors lancé un vrai beau défi et j’ai plongé dans cette aventure folle!

C’est aussi un conte et l’on sait votre goût pour la narration dans la danse.

Depuis une trentaine d’années, j’alterne des projets abstraits, radicaux, avec des ballets narratifs. J’aime raconter des histoires. Souvent les œuvres abstraites nourrissent les ballets de narration et inversement. Cela m’est très important dans mon équilibre artistique. Parfois, à cause ou grâce à la narration, je suis contraint d’inventer des choses que je n’aurais sans doute pas faites hors de ce contexte. Je me refuse à la pantomime. Je m’exerce surtout à faire parler les corps. C’est à travers l’engagement des corps que va surgir le sens du récit.

Quel est votre personnage préféré ?

Odette/Odile, bien sûr, personnage totalement ambigu. Dans l’histoire, ce sont deux femmes différentes, mais pour l’interprète, quel rôle exaltant. C’est la douceur, le romantisme, l’émotion amoureuse contre la séduction pure, le vénéneux, la noirceur. C’est un Docteur Jekyll et Mr. Hyde féminin. C’est aussi la démonstration magistrale de tout ce que peut faire un corps de ballet. Et y injecter une virtuosité contemporaine est absolument passionnant.

C’est aussi le ballet aux multiples remakes. Les versions successives des chorégraphes, des danseurs. Les films… est comme un palimpseste où chacun apporte son geste, un ballet qui évolue. J’ai voulu le connecter à notre époque, aux préoccupations sociétales et environnementales. Les lacs qui s’assèchent, l’eau polluée, les milliers d’espèces végétales et animales qui disparaissent… Cela se passe de nos jours, ce ne sont pas des princes et des princesses. On le voit dans les partis pris scénographiques avec un apport important de la vidéo. Une identification plus forte à travers des costumes actuels.

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