Pour que leur vie soit plus belle
Emmitouflée dans sa doudoune, Véra semble toute frêle.
On dirait que le vent qui souffle va l’emporter. Pourtant, elle avance, obstinée, sur le chemin boueux menant au campement qui jouxte la voie ferrée, où se sont établis les Roms chassés de la cité voisine.
Cela fait maintenant dix ans que Véra, véritable mère courage, arpente les bidonvilles de sa commune d’adoption pour convaincre Petru, Ioana, Rupi et tous les autres d’inscrire leurs enfants à l’école.
La plupart du temps, les plus petits accompagnent leur mère jusqu’à la gare du RER où ils s’installent, à même le trottoir humide, près de l’unique distributeur de billets, pour mendier quelques pièces. Les plus grands participent aux tâches quotidiennes.
Les garçons escortent leur père, leur oncle ou leur aîné qui se rendent près de la décharge pour y recueillir des métaux qu’ils revendront à des ferrailleurs. Les filles aident aux travaux ménagers, en attendant ceux qui feront d’elles – très tôt, beaucoup trop tôt – des épouses et des mères.
Chaque accord des parents pour scolariser un enfant est pour Véra une victoire.
La vaillante femme ne baisse jamais les bras, même lorsqu’un camp est démantelé et ses habitants expulsés. De temps en temps, pourtant, il lui arrive de craquer. Comme le jour où elle a vu Mihaï, le plus doué de sa classe, s’éloigner entre ses deux parents, portant un sac trop lourd pour lui dans lequel il avait entassé à la hâte ses maigres trésors.
Où allaient-ils tous dormir cette nuit-là ?
En tout cas, Mihaï ne fréquenterait plus son école. Pourtant il s’y était fait un ami qui le défendait lorsqu’il se faisait malmener par les fortes têtes de la classe qui se moquaient de ses ongles sales et de ses vêtements tachés. Ils ignoraient que Mihaï vivait dans une masure de tôles, sans eau courante.
Ce jour-là, Véra avait pleuré à chaudes larmes,
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