Personne ne m’écoute

J’ignore depuis combien de temps je suis enfermé ici.

Des jours, des mois, peut-être des années. Je suis seul et j’ai peur. Allongé dans mon coin, j’attends que quelqu’un vienne me délivrer mais, d’après ce que j’entends, nul n’a l’intention réelle de me sortir d’ici. Je ne comprends toujours pas comment j’en suis arrivé là. Qu’ai-je fait pour mériter ça ?

Evidemment, rien ne se serait produit si je n’avais pas été chercheur. Mais pourquoi, où, comment ? Les questions affluent, les réponses ne me parviennent pas.

Cette prison est atroce.

Mes gardiens m’observent sans jamais s’adresser à moi. Suis-je devenu une quantité négligeable ? Possible. Quantité négligeable mais pas négligée, je vous assure, à voir l’intérêt que certains me portent.

Les heures passent, les visites sont rares. En réalité, je ne les remarque pas toutes : il m’arrive trop souvent d’être « absent », sans doute drogué, affaibli par des piqûres et autres sérums… Mes gardiens se succèdent. Ils ne sont pas méchants. Disons plutôt indifférents. A leurs yeux, je suis aujourd’hui ce type qu’ils sont chargés de conserver en bon état, à défaut de lui rendre sa conscience. Alors ils font leur travail, sans entrain, sans passion, sans envie.

Parmi eux, il y a Guillaume, une cinquantaine d’années, le front bas, physiquement comme intellectuellement, plutôt brutal dans ses mouvements. Il ne me ménage pas et me traite comme une marchandise, une sorte de paquet qu’il déplace si nécessaire. Jamais un mot à mon intention. Son unique côté humain : il sifflote parfois entre ses lèvres serrées. J’imagine qu’il ne doit jamais sourire. Ici, à son travail, c’est normal, mais chez lui, en famille ou avec ses amis, il doit tirer la même tronche revêche, j’en suis sûr.

Il y a aussi Angèle, son alter ego féminin, l’adjudante de service. La moindre de ses paroles est un ordre que les autres exécutent aussitôt. Angèle, c’est la cheffe, respectée à défaut d’être aimée. Elle est crainte par tous –