“La voix que je cherchais”
QUI A DIT QUE LE ROCK, AU SENS LARGE, EST UN MILIEU MACHO? En réalité, on compte dix fois plus de grandes chanteuses que de grands chanteurs. Ronnie Spector fait sans problème partie des cinq premières. Ce n’est sans doute pas la plus impressionnante au niveau de l’étendue de sa palette, mais il y a ce timbre unique et cette voix, inoubliable. Un phrasé implacable, ce placement magistral et ce truc bien à elle: le vibrato… Le vibrato, en général, peut être pénible et faire passer les interprètes pour des chèvres (voir, chez nous, Julien Clerc ou Véronique Sanson, qui en abusent avec des résultats invariablement terrifiants).
Bref, un procédé à fuir, le truc cassegueule par excellence. Deux femmes sont parvenues à le magnifier en l’utilisant à la perfection: Ronnie Spector d’abord, et Chrissie Hynde ensuite. Normal: la seconde était fan de la première. Ronnie avait donc ce truc reconnaissable entre mille. Elle qui ne vieillit pas, que l’on peut entendre chez Spector ou dans la BO de “Quadrophenia” et que l’on peut réécouter au vingt-et-unième siècle avec le même délice. Mais c’est un genre, par définition, daté. Comme le rockabilly ou le ska. Il n’y a d’ailleurs jamais eu de revival girl group: impossible de recréer les productions de Spector pour Philles ou de Shadow Morton pour Red Bird. Ronnie ne se serait sans doute pas lancée dans la soul, comme les anciens ténors du rockab se sont réfugiés dans la country. Elle ne semblait guère intéressée par le genre. Qu’aurait-elle pu faire dans les î