Historique L’enfant volé

Hortense épongea le front fiévreux de Clémence qui, le visage convulsé dans les affres de l’enfantement, s’accrocha à sa main de toutes ses forces.

– Courage, Clémence, tu seras bientôt délivrée.

Clémence se redressa alors sur sa couche et un long râle jaillit de sa poitrine. Elle retomba haletante sur l’oreiller.

– C’est comme si la main griffue d’un démon me lacérait les entrailles ! Je vais mourir, Hortense, je le sens bien. Hortense alla au pied du lit et releva le drap.

– Tu ne vas pas mourir. Pousse encore, je le vois ton bébé, il est engagé. – Je veux bien mourir, si cela est ma punition, mais je veux que mon bébé vive, il n’a pas à payer pour mes péchés, souffla Clémence dans un rictus.

Elle poussa un long hurlement puis sa mâchoire se serra au point qu’Hortense put entendre grincer ses dents. L’enfant parut alors, tout rougi du sang de sa mère et les lèvres violacées.

Clémence tenta de voir, par-dessus le drap, l’enfant qu’elle venait d’expulser de son ventre.

– Que se passe-t-il, Hortense, pourquoi ne pleure-t-il pas ? Est-ce un garçon, une fille ? Je veux voir mon bébé, donne-le-moi !

– Hélas, ma Clémence, Dieu te l’a déjà repris, il ne respire pas. – Non, ce n’est pas possible, il bougeait dans mon ventre !

Hortense enveloppa le bébé dans un linge et recouvrit son visage. Puis elle se dirigea vers la porte de la chambre.

– C’était un garçon, mais il vaut mieux que tu ne le voies pas. Je l’ensevelirai demain.

Comme elle disparaissait dans le couloir, Clémence se leva pour lui reprendre le bébé, mais elle était si faible qu’elle ne parvint à faire que quelques pas avant de perdre connaissance.

Hortense traversa le jardin, son petit fardeau dans les bras.

Il n’était pas mort, mais il fallait faire vite et elle connaissait tous les gestes. Henri ne devait jamais savoir qu’il était père.

Elle aimait Henri et il allait l’épouser un jour, même s’il l’ignorait