enoît Huen et Lucie Lepage-Depreux ont le goût du risque. C’est dans leur dernier projet de restaurant, Kubri, ouvert depuis quelques jours à peine à Paris qu’ils donnent rendez-vous. Si certains détails restent à fignoler, ils sont plutôt satisfaits du résultat, de leurs tables et banquettes maçonnées et de leurs murs chaulés: un dialogue qu’ils expérimentent pour la première fois. Mais ne nous y trompons pas, malgré une esthétique radicale, décrypte Lucie Lepage-Depreux. Pour Kubri, comme pour toutes leurs réalisations, avoue la jeune femme avec un sourire complice. Des « laboratoires » destinés au grand public bien souvent, puisque Mur.Mur s’est fait connaître avec des projets signatures comme le restaurant Gros Bao, dans le X arrondissement de Paris, avec sa terrasse suspendue, sa laque rouge du sol au plafond et une surabondance de lampes… Si chaque projet est unique, un fil conducteur guide le duo, notamment le travail de la façade, toujours soigneusement étudiée, et le séquençage des espaces, même les plus petits, en plusieurs zones. Chez Dizen, une micro-adresse de israélienne à Pigalle, c’est la devanture moderniste qui attire l’œil. Les deux professionnels sont respectivement diplômés de l’École nationale supérieure d’architecture de Paris-La Villette et de l’École nationale supérieure des arts appliqués et des métiers d’art Olivier de Serres. Après diverses expériences en agence, ils décident de s’associer sur tous leurs projets, parmi lesquels nombre de maisons et d’appartements: Un exemple? Le bar en miroir de Kubri a d’abord été imaginé pour refléter la lumière du jour. Une habitude qui vient de leur parcours très technique: lui a développé des gares à l’étranger, un univers rappelle-t-il, et elle a démarré sa carrière comme maître d’œuvre dans une entreprise générale de bâtiment. Leur premier projet commun a été la boulangerie Liberté, à Paris, près du canal Saint-Martin, un quartier qui deviendra l’épicentre de leur carrière. Là-bas, ils ont tout désossé et percé pour retrouver l’âme (nue) du lieu: se souvient Lucie Lepage-Depreux, qui explique leur riche expérience dans la restauration par le lien étroit qui rapproche la cuisine et l’architecture. détaille Benoît Huen, qui avoue utiliser la matière avec parcimonie, Ce regard radical au service de boulangeries, de poissonneries ou de fromageries, ils estiment qu’il est facile à porter aujourd’hui: résume l’audacieux duo, maintes fois copié, qui refuse désormais de nombreux chantiers. explique Lucie Lepage-Depreux qui cite des paysages et ambiances de films comme autant de pistes. Et si l’on connaît surtout Mur.Mur pour ses restaurants, l’agence met aussi en œuvre ses compétences pour des particuliers, ce qui leur permet de revenir à l’architecture : une maison qu’ils ont dessinée ex nihilo dans les Landes, pour laquelle ils jouent avec l’orientation du soleil, et une autre qu’ils ont transformée et agrandie à Saint-Denis, au nord de Paris… L’éclectisme nourrit ce duo boulimique.
