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Une Chanson pour Julia
Une Chanson pour Julia
Une Chanson pour Julia
Ebook516 pages6 hours

Une Chanson pour Julia

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About this ebook

Crank Wilson a quitté sa famille du sud de Boston à 16 ans pour créer un groupe de punk rock et crier sa rage à la face du monde. Six ans plus tard, il est toujours en désaccord avec son père, un flic de Boston, et ne parle même plus à sa mère. La seule relation qui lui tient à cœur est celle qu’il a avec Sean, son frère cadet, mais s’occuper de celui-ci peut s’avérer un boulot prenant.

La seule chose que Crank désire dans la vie, c’est qu’on lui fiche la paix pour pouvoir écrire sa musique et mener son groupe au succès.

Julia Thompson a laissé derrière elle à Pékin un secret qui a explosé en scandale à Washington, menaçant la carrière de son père et impactant la vie de sa famille. Maintenant en dernière année à Harvard, elle est hantée par une voix du passé et a pris la décision de ne plus jamais se laisser dominer par les émotions, surtout quand il s’agit d’un garçon.

Quand Julia et Crank se rencontrent à une manif anti-guerre à Washington à l’automne 2002, la connexion entre eux est si puissante qu’elle menace de tout détruire.

LanguageFrançais
PublisherBadPress
Release dateJan 11, 2016
ISBN9781507128947
Une Chanson pour Julia

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    Une Chanson pour Julia - Charles Sheehan-Miles

    CHAPITRE UN

    Princesse des banlieues chics (Crank)

    26 octobre 2002

    Peut-être que c’est juste moi. Mais j’aurais pensé qu’une fille se tenant au milieu du plus grand rassemblement pacifiste depuis la guerre du Vietnam ne serait pas une coincée pareille. Mais non... Elle était là, ses lèvres remuaient mais je ne compris pas un mot. Pour être honnête, elle était canon... bizarrement canon, à la façon d’une mère de famille de banlieue chic. Vêtue d’une jupe à fleurs qui lui arrivait au genou et d’un pull couleur pastel, avec ce qui ressemblait à un millier de bracelets à son poignet. Ses yeux bleus très pâles faisaient un contraste incroyable avec ses cheveux blonds châtain sombre. Ce flot de mots se déversant hors de ses lèvres sexy me fit reculer, à la fois irrité et sur la défensive.

    — Pardon, quoi ? demandai-je, dans l’espoir que le torrent de mots s’arrêterait.

    Elle prit une profonde inspiration et ferma les yeux. Je souris.

    — Je disais, vous ne pouvez pas vous installer ici déjà maintenant. Mark Tashburn est sur le point de commencer... ensuite il y a une pause de quinze minutes. Vous pouvez vous installer après.

    Je levai les yeux au ciel.

    — Et on enchaîne à la fin des quinze minutes ?

    Elle sourit, apparemment soulagée de s’être fait comprendre. Je ne crois pas qu’elle m’aimait tellement. Et son sourire avait l’air faux. Ces yeux de glace ? Son sourire ne montait pas si haut. Je me demandai à quoi ressemblerait un authentique sourire de sa part.

    — C’est exact.

    — Ça ne va pas marcher, dis-je. Il faut plus de quinze minutes pour s’installer.

    Elle soupira.

    — Et pourquoi, dites-moi, on apprend ça seulement maintenant ?

    — Eh, ce n’est pas ma faute. Je ne sais pas qui a organisé le timing de ce truc, mais c’est vraiment n’importe quoi. Si vous vouliez qu’on joue dans trente minutes, on aurait eu besoin de commencer à s’installer il y a une heure. Ça prend du temps de mettre en place l’équipement et de faire la balance du son.

    Elle fit un peu la tronche.

    — Très bien. Si possible… essayez de ne pas trop déranger le public.

    Mon Dieu… Comme tu veux.

    Elle était accourue vers nous le moment où on avait commencé à mettre le matériel sur la scène. La foule ne faisait pas attention à nous de toutes façons, il devait y avoir cent mille personnes. Une bande de hippies et tordus pacifistes et ce qui ressemblait à des espèces de mères de famille. Pour la centième fois, je me posai la question de savoir comment j’avais pu me faire embrigader à jouer à une manif anti-guerre.

    Bien sûr c’était l’engagement le plus important qu’on n’avait jamais eu. Mais sérieusement, jusqu’ici les intervenants n’avaient fait que rabâcher des arguments des années 1960. Je ne savais pas si on pouvait faire plus déconnecté de la réalité.

    Bref. C’était une idée de Serena. Elle était à fond dans le mouvement anti-guerre. Et quand Serena faisait quelque chose, le groupe suivait. On n’avait pas de manager, mais elle était tout comme. Elle chantait en duo avec moi, jouait de la guitare rythmique et avait un super instinct quant à ce qui pouvait marcher ou pas en musique.

    On s’installa donc en quatrième vitesse sans alarmer les indigènes ou hippies ou je ne sais quoi. On finit en un temps record, et on ne dit pas merci à l’aspirante mère de famille qui se tenait sur le côté de la scène avec un bloc-notes, disant aux gens où aller.

    Entre l’installation, la balance et le début, j’eus à peine quinze secondes pour reprendre mon souffle, et déjà je me lançai dans les premiers accords. Les étudiants dans le public se mirent tout de suite à danser, mais les seniors et les mères de famille... et bon sang y en avait beaucoup... nous regardèrent comme si on était radioactifs. J’accentuai spécialement mon chant et mon jeu de guitare pour eux, en chantant la version originale de notre chanson Fuck the War, qui était plus grivoise, au lieu des paroles sensibles qu’on avait spécialement enregistrées en studio et qui avaient été publiées.

    Je ne veux pas vous induire en erreur. Morbid Obesity n’est pas vraiment un groupe punk, plutôt du rock alternatif avec un côté tendancieux. Je suis le côté tendancieux. À ce jour, notre chanson la plus populaire était Fuck the War, qu’on avait sortie en mini-album il y a quelques mois. C’était une chanson d’amour, sur mes parents, mais il fallait vraiment écouter les paroles pour s’en rendre compte. J’y avais mis beaucoup d’émotion quand je l’avais écrite et j’y mettais aussi beaucoup d’émotion quand je la chantais.

    J’en étais au deuxième refrain quand, en regardant vers la droite de la scène, je vis la Miss Princesse. Elle bougeait avec la musique. Ses lèvres remuaient légèrement, entr’ouvertes, d’une façon qui me coupa le souffle. Des lèvres pulpeuses. Des lèvres à embrasser. Je me trouvais un peu bête car elle n’était pas du tout mon genre. Bon, à part le fait que c’était une femme et qu’elle était assez sexy. Mais pas mon genre.

    Quand j’étais au lycée, à cause d’un incident quelconque, le système scolaire public de Boston avait envoyé un groupe de gosses de riches de Back Bay à notre lycée public du sud de la ville. Quelle rigolade. Ça n’avait duré qu’un an, bien que je ne savais pas si on avait modifié les zones scolaires ou si les parents avaient tous retiré leurs enfants des écoles publiques. Mais cette fille me faisait penser à certains de ces gosses. Impérieux. Supérieurs. Certains d’entre eux regardaient les jeunes comme moi comme si nous étions de futurs criminels.

    Je me demandais si c’était à cause de ça qu’elle me faisait cet effet ?

    Ça me donna envie de la taquiner un peu, alors au deuxième couplet, je me mis à chanter carrément pour elle et pour elle seule. J’en étais à la seconde phrase quand ses yeux rencontrèrent les miens. Je soutins son regard. Ses yeux, si distants et si bleus, étaient captivants. Elle remarqua que je chantais pour elle : elle s’immobilisa quasiment sur place, comme un daim pris dans les phares d’une voiture. J’adorais quand les filles réagissaient comme ça. Ça montrait qu’elle était humaine. Si on était à Boston, je l’aurais faite venir sur scène, mais ça n’aurait pas été bien reçu avec ce public.

    La seconde suivante, cependant, elle fit un sourire rusé, comme pour dire « Je vois ce que tu es en train de faire. » Je souris en retour, tout en beuglant les paroles. La basse et la batterie étaient si puissantes dans cette chanson qu’on ne pouvait pas rester sans bouger. Je rompis le contact visuel et me déplaçai sur la scène un instant. Puis je me lançai dans un solo et criai les paroles au moment du crescendo, menant la chanson jusqu’à sa fin abrupte.

    Malgré le choc des mères de famille et des lobbyistes dans la foule, les étudiants avaient adoré et crièrent pour avoir la suite. La princesse des banlieues chics applaudit avec un sourire mystérieux. Et soudain j’eus envie de la connaître mieux.

    Malheureusement ça n’allait pas se produire. C’était une manif contre la guerre, pas un concert avec rencontre avec les fans après. Aussitôt la chanson finie, on commença à démonter la scène. La fille en or sauta au micro et cria « On applaudit Morbid Obesity et leur hit Fuck the War ! » Je m’interrompis pour la reluquer.

    La foule cria à nouveau, ce qui était sympa. Entendre le titre de ma chanson prononcé par ces lèvres encore plus. Mais cinq secondes plus tard, elle présentait la suite des intervenants, un groupe de vétérans traumatisés par la guerre du Vietnam et la guerre du Golfe que les organisateurs de cette parade avaient été chercher pour lui donner une certaine crédibilité.

    Mark et moi, on traîna la plupart du matériel hors de la scène, tandis que Pathin démontait la batterie et Serena débranchait les moniteurs et les câbles. Alors que je descendais de la scène pour la dernière fois, la princesse des banlieues chics vint me retrouver au bas des escaliers. Je trébuchai sur la dernière marche et me retrouvai à moins de quinze centimètres d’elle, mon regard plongeant dans ces yeux fantastiques.

    — Vous avez été plutôt bons, dit-elle la tête légèrement en arrière, les yeux dans les miens. Merci d’avoir participé.

    Je haussai les épaules et souris.

    — C’était sympa.

    « Plutôt bons ? » c’est tout ?

    Et mon Dieu, elle était si près de moi. Je pouvais sentir son parfum, une odeur légère et agréable.

    — Donc... dit-elle, me regardant droit dans les yeux.

    Silence gêné.

    — Il y en a encore pour combien de temps ? demandai-je.

    — Une demi-douzaine d’intervenants, puis une marche autour de la Maison-Blanche. Peut-être encore une heure.

    Mark passa juste au moment où elle répondait. Il était notre bassiste, un grand type qui aurait pu être joueur de football américain dans un univers alternatif où les joueurs de football fument des joints et traînent en ville.

    — Alors, quand ce sera fini, on pourrait aller manger un morceau ?

    Les yeux de Mark s’agrandirent. Elle ouvrit la bouche. Comme si elle était en état de choc. Je sais que je ne porte pas de costume en tweed, mais je suis quand même quelqu’un de bien.

    — Allez, dis-je. C’est juste un repas. Je ne ferai rien de trop déplacé.

    — Je ne crois pas qu’elle soit ton genre, Crank, dit Mark sur un ton sarcastique.

    Elle ferma la bouche, les yeux lançant des flèches vers Mark. Avec ses yeux rétrécis et ses lèvres pincées en une ligne fine, je crus une seconde qu’elle voulait le frapper. Cette fille était explosive. J’aimais bien ça.

    — Bien sûr, où ?

    Je haussai les épaules.

    — Euh... je ne connais pas le quartier.

    Elle eut l’air pensif un instant.

    — Le Georgia Brown’s au coin de la 15e rue et K Street. On peut s’asseoir en terrasse. On s’y retrouve... à quatre heures ?

    Oui ! C’était moi ou elle s’était un tout petit peu rapprochée ?

    Mark laissa échapper un gloussement et s’éloigna.

    — Très bien, on se retrouve à quatre heures, répondis-je, la regardant dans les yeux encore une fois.

    Je ne sais vraiment pas ce qui m’avait pris.

    Les gentils garçons perdent toujours (Julia)

    Je ne sais pas ce qui m’avait pris.

    Sauf que quand le bassiste fit un commentaire en passant, selon lequel je ne serais pas son genre, cela m’agaça. Mais sérieusement, il n’était vraiment pas mon genre, même si la musique était fantastique. Je suis une vraie snob en matière de musique, avec des goûts éclectiques, et j’adore le punk. Ce groupe était différent et original. Il y avait quelque chose dans cette ligne de basse et la voix de Crank la couvrant... Sa voix était... rocailleuse, profonde, mélodieuse. Une voix que je pourrais écouter toute la journée. Ce n’était vraiment pas normal pour moi. Je ne sortais pas avec quelqu’un sans d’abord y réfléchir. Je ne sortais avec personne.

    J’avais prévu d’aller avec quelques-uns des autres organisateurs à une réunion après la marche et d’aider à la préparation de la prochaine manifestation. Et d’être disponible pour parler à la presse. Mais quand il dégringola de la scène et atterrit à presque huit centimètres de moi, je ne pus dire non. Je ne pouvais tout simplement pas. Je ne pouvais pas dire non parce que pendant les quelques premières secondes, je ne pouvais même plus respirer.

    Ce n’est pas bien, pensai-je. Je n’étais pas venue à Washington pour rencontrer des garçons. En particulier des garçons qui s’appelaient Crank, jouaient de la guitare et se droguaient probablement. J’étais ici pour une cause dans laquelle je croyais.

    Mais je l’avais regardé s’éloigner alors qu’il portait sa guitare et son lourd ampli. Et d’une certaine manière, je perdis mon enthousiasme pour la création d’autres slogans pacifistes. Empêcher la guerre était important. Mais croyais-je sérieusement que cela arriverait ici ? Pas vraiment. La marche avait été organisée par International ANSWER, un groupe qui était une aile connue du parti des travailleurs ou quelque chose de ce genre. Mon père aurait eu une crise cardiaque s’il avait connu mon implication ici, surtout étant donné les organisateurs. Mais je n’avais pas demandé l’opinion de mon père.

    — Julia !

    J’entendis une voix m’appeler. Je cherchai autour de moi. Oh… Brittany. Elle allait à la Boston University maintenant parce qu’elle n’avait pas réussi sa première année, mais nous étions restées en contact. Elle nous disait amies. Mais je n’avais pas d’amis. Brittany m’avait demandé de m’impliquer en recrutant d’autres étudiants de Harvard pour la marche.

    Cela avait été un défi plus difficile à relever que je n’aurais pensé. La plupart de mes pairs s’en fichaient, et la plupart de ceux qui ne s’en fichaient pas soutenaient le président. J’étais sûre que Willard ne se risquerait jamais à un tel événement, bien qu’il pourrait tout à fait participer à une marche en faveur de l’invasion de l’Irak. Il croyait profondément en... eh bien, je ne sais pas. En pas grand-chose.

    C’était donc dans cet état d’esprit que je me retrouvai sortant d’un taxi à McPherson Square à quatre heures de l’après-midi en cette magnifique journée d’octobre à Washington. Je l’aperçus immédiatement, assis à l’une des tables en terrasse. Il était détendu, assis en arrière dans son jean déchiré, les jambes étendues, un verre devant lui. Son t-shirt noir sans manche affichant un crâne en flammes révélait des tatouages élaborés sur les deux bras, et ses cheveux étaient peroxydés et hirsutes.

    Alors que j’approchai, il se leva.

    — Eh vous voilà, j’avais peur que vous ne veniez pas.

    Je le regardai avec curiosité.

    — Pourquoi ça ?

    Il haussa les épaules.

    — Des types bizarres vous invitent à manger dans une ville inconnue...

    J’inclinai la tête légèrement de côté en le contemplant.

    — Eh bien, vous avez l’air bizarre, je le reconnais.

    Il sourit, puis avança une chaise pour moi. Un geste inattendu pour quelqu’un à l’apparence légèrement dangereuse.

    — Reprenons à zéro. Nous ne nous sommes pas présentés comme il faut. Je suis Crank Wilson.

    — Julia Thompson. Quel est votre vrai nom ?

    Il pouffa.

    — Mon vrai nom est Crank. C’est ce qui est écrit sur ma carte d’identité et mon permis de conduire. C’est tout ce que vous devez savoir.

    — Serait-ce déplacé de ma part de demander à quoi pensaient vos parents ?

    — Julia est un prénom un peu démodé, non ?

    — Mes parents sont démodés.

    — Les miens aussi, en fait. À tel point que j’ai dû aller en justice pour faire changer mon nom.

    — Pourquoi Crank ?

    — Ça me va bien, pas vrai ?

    Je pris du recul sur ma chaise et le regardai. Je le regardai vraiment. Crank mesurait 1 mètre 80 environ et avait des traits anguleux. Plusieurs tatouages couraient le long de ses bras bien musclés, mais ils ne ressemblaient à aucun tatouage que j’avais déjà vus. Sur le côté droit, un rouleau gravé de notes de musique se déroulait le long des muscles près de son coude. Sur le bras gauche, il y avait du barbelé et une vilaine cicatrice, longue de huit centimètres, sur son biceps.

    Je pouvais comprendre le besoin de changer de nom. Changer qui on est. Disparaître.

    — Je suppose que ça vous va, au moins en me basant sur les premières impressions.

    La serveuse approcha et je commandai un thé glacé.

    — Alors qu’est-ce qu’une gentille fille comme vous fait au milieu d’une manif contre la guerre aussi improbable ?

    — Improbable ? Ce n’est pas improbable du tout. Aller en Afghanistan après le 11 Septembre était une chose. Envahir l’Irak... c’est tout à fait différent et il n’y a pas de bonne raison de faire ça. Beaucoup de gens vont mourir. Alors, oui, je me suis impliquée.

    Il haussa les épaules.

    — Sur le principe, je suis d’accord. Mais pour être honnête, je ne vois pas à quoi ça va servir de marcher en rond à Washington.

    Je soupirai.

    — J’ai des doutes moi aussi. Mais je ressentais que je devais faire quelque chose.

    Il hocha la tête sans répondre.

    Je me penchai en avant.

    — Et vous ? Vous étiez d’accord pour jouer gratuitement à la manifestation.

    — Eh bien, tout ça c’est à cause de Serena. C’est notre chanteuse et guitariste. Elle est très politisée.

    — Et vous non ?

    — Je ne suis pas un grand fan de la politique. Bien que je dois admettre, c’est génial de jouer devant une foule de cette taille. D’habitude on fait des clubs.

    — Dans le coin ?

    — Non, surtout Boston et Providence.

    Je pris une inspiration.

    — Boston ?

    — Ouais, c’est là que je vis. Et vous ?

    Ok, ce n’était pas du tout une bonne idée. Je devrais lui mentir et dire que je vivais en Sibérie, ou en Alaska, ou en Alabama.

    — Je vis à Boston aussi, à Harvard ?

    Ma voix monta un peu à la fin de la phrase, comme si je posai une question, comme si je n’étais pas sûre d’où je vivais. Ma propre incertitude m’irrita.

    Il se mit à rire.

    — J’aurais dû deviner. Harvard.

    — Que voulez-vous dire par là ?

    — Ben vous n’êtes de toutes évidences pas le genre de fille que je fréquente d’habitude.

    Je n’aimais pas la tournure que prenait la conversation, mais il semblait que je n’étais pas capable de contrôler ma bouche.

    — Et quel genre de fille est-ce donc ?

    Il me regarda longuement.

    — Des groupies. Des pétasses. Des filles qui traînent dans les bars des quartiers sud. Pas votre genre.

    Je me mordis la lèvre. Je n’avais pas grande estime pour un homme qui parlait ainsi des femmes.

    — Alors pourquoi m’avoir invitée à déjeuner ?

    Il haussa les épaules.

    — Parfois il faut faire bouger les choses. Ce n’est pas ce que vous faites ?

    — Je suppose. Vous n’êtes pas le genre de garçon que je fréquente habituellement non plus.

    — Vous fréquentez quel genre de garçon, Julia ?

    Il avait posé la question sur un ton à la fois taquin et sérieux. Je le regardai puis répondis avec confiance.

    — Je ne fréquente pas de garçon. Mais je pense que quand c’est le cas, ce sont des garçons ayant de l’ambition. En droit ou en finances. Des garçons en costume-cravate. Des garçons qui finiront au Sénat ou patron d’entreprise. Mmm... des garçons que mon père approuverait.

    Crank me reluqua et se pencha soudain vers moi.

    — Vous voulez dire que votre père ne m’approuverait pas ?

    Je regardai dans ses yeux et pris une profonde inspiration. Ils étaient bleus et clairs, très clairs. Ses cheveux blonds platine les faisaient ressortir d’une façon qui me donnait envie de les regarder toute la journée. Il me fixait comme s’il voulait voir en moi. Je déglutis, ma gorge soudain sèche.

    — Mon père ne vous approuverait absolument pas.

    Il sourit, un sourire enfantin en coin qui fit battre mon cœur un peu plus vite, et pour la première fois je remarquai qu’une de ses dents du bas était légèrement de travers. C’était adorable.

    — Quand rentrez-vous à Boston, Julia ?

    — Je rentre par le train de demain matin.

    Il cligna de l’œil.

    — Vous connaissez la ville ? Je ne suis jamais venu ici avant. Vous voulez me montrer Washington ? On va bien s’amuser.

    — Je ne sais pas si c’est une bonne idée.

    Je savais que ce n’était pas une bonne idée. J’avais une règle assez dure et stricte. Je me tenais le plus loin possible des hommes qui m’attiraient.

    Son sourire qui devenait de plus en plus insupportable s’élargit.

    — Je sais que ce n’est pas une bonne idée. C’est pour ça qu’on devrait le faire.

    Mes yeux se rétrécirent.

    — Et qu’est-ce que nous allons faire durant ce temps ?

    — On va commencer par des margaritas et on va voir où elles nous emmènent.

    Je ne pus m’en empêcher. Je ris et acquiesçai. Puis je ris encore quand il serra son poing et s’exclama « But ! »

    — Vous n’êtes pas très subtil, n’est-ce pas ?

    Il haussa les épaules, un mouvement qui d’une certaine façon impliqua tout son torse.

    — J’ai l’air subtil ?

    — Les apparences ne sont pas tout.

    Il me regarda à travers ses yeux mi-clos.

    — Ok, voyons combien les apparences révèlent. Nous ne savons rien l’un de l’autre... alors devinons. À propos l’un de l’autre.

    Je refrénai un rire. Puis la serveuse revint, et il commanda des margaritas pour nous deux, tandis que je commandais une salade.

    — D’accord, mais on commence avec vous.

    Il sourit.

    — Ok. Voyons voir... je sais que vous allez à Harvard. Et vous vous habillez de façon sérieuse. Je pense que vous ne vous détendez pas beaucoup... vous ne sortez pas tellement vous amuser. Enfant unique. Vous êtes de... Californie ou peut-être de l’Oregon, d’après votre accent. Votre père... hum... un cadre ? Dans une banque peut-être. Vous n’avez jamais fumé de joint. Et ce piercing dans votre nez était un acte important de rébellion.

    Je gloussai. Oh mon Dieu. Glousser, vraiment ? Il était ridicule.

    — C’est tout ?

    — Hum... Je devine que vous n’avez jamais manqué un jour d’école de votre vie, à moins d’une urgence. Mais à l’intérieur, il y a une partie de vous qui veut s’échapper... et faire un truc fou.

    Il sourit.

    — Ok, j’ai deviné juste ?

    — Eh bien, je ne suis pas de Californie, ou de nulle part en fait. Mais je suppose que ça compte car ma famille y vit maintenant. Je ne suis absolument pas un enfant unique, j’ai cinq sœurs... Carrie est en dernière année de lycée, Alexandra a douze ans, les jumelles huit ans et Andrea cinq ans. Et... non, je n’ai jamais fumé d’herbe. Mon père est un ambassadeur à la retraite, donc j’ai passé la majeure partie de ma vie un peu partout dans le monde. Et... me rebeller n’a jamais été mon truc. J’ai une vie assez belle, il n’y a rien contre quoi se rebeller.

    C’est incroyable le nombre de choses tout à fait vraies que l’on peut dire tout en cachant complètement la vérité. J’étais experte dans ce genre de chose. J’avais passé ma vie à dérouler un écheveau de demi-vérités, une armure tissée de mots qui ne faisaient que dissimuler.

    Il sourit et hocha gentiment la tête.

    — Rien contre quoi se rebeller ? Rien du tout ?

    — Non, répondis-je.

    À part ma mère peut-être, qui contrôlait chaque instant de ma vie. Mais c’était plus que je ne voulais révéler.

    — C’est triste, dit Crank. Tout le monde devrait avoir un truc contre quoi se rebeller.

    Je fronçai les sourcils.

    — Je n’ai jamais entendu quelque chose d’aussi dingue de ma vie. Comment pouvez-vous dire ça ?

    Il haussa les épaules, se renversant dans sa chaise, les mains dans les poches.

    — Les choses contre lesquelles on se rebelle sont les choses qui nous définissent.

    — C’est une attitude plutôt adolescente, vous ne trouvez pas ? Je préfère me définir moi-même.

    Il me lança un sourire narquois.

    — Vous n’êtes pas la première fille à me traiter d’adolescent.

    — Cela ne me surprend pas.

    Il plissa les yeux.

    — Ça vous plaît de m’insulter.

    — Pas du tout.

    — Si, c’est clair. Fais-moi confiance, bébé... Harvard n’est pas la seule voie vers une vie heureuse.

    — Appelez-moi bébé encore une fois et vous allez recevoir le contenu de mon verre. Et je n’ai jamais dit ça de Harvard.

    J’étais soudainement sur la défensive. Étais-je condescendante ? Je n’en avais pas l’impression. Certes, j’étais fière de ce que j’avais accompli. Mais je savais bien que le monde était vaste et qu’il y avait beaucoup de façons différentes de vivre. Au contraire, récemment j’avais souvent pensé que j’avais besoin de trouver une voie différente. Plus je me rapprochais de la remise des diplômes, plus je ressentais ma vie se refermer sur moi comme les mâchoires d’un piège.

    — Je le vois bien, dit-il. Vous me comparez dans votre tête à un costard-cravate, pas vrai ? Un futur patron ou sénateur.

    Je répondis vivement.

    — C’est mieux qu’être comparée à une pétasse ou une groupie.

    — Ouch, dit-il en prenant une grande gorgée de margarita.

    — Alors je suppose que c’est mon tour de deviner.

    Il sourit d’un air suffisant. C’était vraiment un crétin. Mais un crétin diaboliquement attirant. Qu’il soit maudit ! D’une certaine façon tordue, c’était amusant. À Boston, je devais faire attention car les gens à qui je parlais seraient là le lendemain, et cela voudrait dire que je devrais me cacher.

    — Ok, vous affichez une façade tape-à-l’oeil. Cuir noir, t-shirts déments et paroles en colère. Mais je devine que vous venez en fait d’une gentille famille de banlieue. Vous vous êtes débrouillé au lycée mais n’étiez pas motivé pour aller à l’université, et vous avez créé un groupe pour draguer les filles. Le look, les cheveux et les tatouages, tout vient de là. Je parie que vous êtes un garçon plus gentil que vous ne laissez paraître.

    Il sourit, l’air mécontent.

    — Faux, faux et faux. Je viens des quartiers sud, foyer brisé et tout. J’ai été viré de l’école parce que je me bagarrais souvent, et je ne suis pas un gentil garçon.

    — Pourquoi pas ?

    — Pourquoi pas quoi ?

    — Pourquoi vous n’êtes pas un gentil garçon ?

    Il se renversa en arrière et m’étudia en silence. Alors que ses yeux passaient sur mon visage, je sentis mes joues s’empourprer. C’était comme s’il était assis là à m’imaginer sans mes vêtements, et je commençai à respirer plus rapidement parce que d’habitude, ce genre de regard me donne la chair de poule. Mais là, cela ne me faisait pas cette sensation. En fait, tout mon corps réagissait à lui de façon involontaire, ma poitrine soudain sensible, une sensation dans l’estomac. Une pensée fortuite me traversa l’esprit, vite refoulée, me demandant comment il serait au lit. Pas du tout comme Willard, j’en étais sûre.

    À la fin, il dit : « Parce que les gentils garçons perdent toujours. »

    Je ne promets rien (Crank)

    « Parce que les gentils garçons perdent toujours. »

    Je regrettai presque ces mots après les avoir dit, parce que soudain elle écarquilla ses yeux sexy. Vraiment écarquillé. Elle se redressa sur sa chaise et avait l’air extrêmement mal à l’aise. C’est alors que je réalisai que ce n’était pas à cause de moi du tout : quelqu’un s’approchait de notre table.

    C’était une dame plus âgée, au style masculin, mâchoire carrée, larges épaules et cheveux courts et décolorés. Avec une veste de cuir, elle n’aurait pas eu l’air déplacé dans certains des clubs où je jouais. Elle affichait un sourire faux.

    — Julia Thompson... je savais que c’était vous.

    Julia posa ses mains à plat sur la table, l’expression figée. C’était comme si toute vie s’était retirée d’elle, ne laissant qu’un mannequin de plastique. Je ne savais pas qui était cette dame mais c’était clair que Julia la connaissait, et elle n’était pas heureuse de la voir.

    — Bonjour, dit-elle.

    La femme me salua de la tête, puis elle ajouta, la voix chargée de sous-entendus :

    — Vous devriez me présenter à votre petit ami, Julia.

    Le visage de Julia afficha un vrai dégoût.

    — Ce n’est pas mon petit ami, en fait. Une connaissance. Marie Clawson, je vous présente Crank Wilson. Vous devriez nous excuser maintenant, nous sommes en train de manger et vous nous dérangez.

    Marie plissa les yeux. Je ne sais pas si elle était offensée par les mauvaises manières de Julia, mais moi je l’étais. Je l’avais pensée plus élégante... elle était impolie, envers nous deux. Je me penchai.

    — C’est un plaisir de vous rencontrer, Marie. Et n’écoutez pas Julia... elle est toujours un peu gênée vis-à-vis de nous deux.

    Je tendis la main au-dessus de la table et la posai sur celle de Julia. Celle-ci arracha sa main de la mienne immédiatement.

    Marie eut un large sourire.

    — Je vois ! Depuis combien de temps vous connaissez-vous ?

    — Madame Clawson, interrompit Julia.

    Je me mis à parler plus fort en la regardant un peu lascivement.

    — A peu près quatre heures. Mais ça a été très intense, si vous voyez ce que je veux dire.

    — Espèce de connard ! explosa Julia, attirant l’attention de tout le monde à la terrasse.

    Je lui fis un clin d’œil lubrique.

    — Oh mon Dieu, fit Marie. Je suppose que je ferais mieux de vous laisser tranquille tous les deux.

    — C’est ça, oui, dit Julia d’un ton sarcastique. Pourquoi n’allez-vous pas répandre votre poison ailleurs ?

    Marie lui fit un sourire compassé et s’éloigna l’air satisfait.

    — Eh ben alors ? demandai-je.

    Ses yeux se tournèrent vers moi, étincelant d’une authentique colère.

    — Pourquoi avoir fait ça ?

    — Fait quoi ? C’était juste pour s’amuser un peu.

    — Marie Clawson est une chroniqueuse people, Crank.

    Une chroniqueuse people ?

    — Sérieusement ? Je ne savais même pas que ça existait encore. On s’en fiche, je ne suis pas si célèbre après tout.

    Ses yeux se rétrécirent un peu alors qu’elle me dévisageait.

    — Ce n’est pas pour vous que je m’inquiète, espèce d’idiot prétentieux, c’est pour moi.

    — On a honte d’être vu en ma compagnie ? demandai-je, un peu mécontent.

    — Elle a passé des années à calomnier ma famille chaque fois qu’elle a pu.

    — Eh bien, qu’elle aille se faire foutre.

    Et là je fis quelque chose que je n’aurais probablement pas dû faire. Je me levai, notant au passage que Marie était retournée à la dernière table au bout de la terrasse, où elle discutait avec une sorte de petite vieille aux cheveux bleus.

    — Eh Marie ! criai-je, attirant l’attention de tout le monde, y compris du sans-abri assis de l’autre côté de la rue. Ouais... va te faire voir, espèce de pétasse à scandale !

    Julia se cacha le visage.

    — Oh mon Dieu, marmonna-t-elle entre ses mains. Êtes-vous dingue ?

    — Oui, chérie, je le suis. Venez, on se tire d’ici.

    Je pris mon porte-feuille et posai deux billets de vingt sur la table alors que le manager approchait. Me tournant vers lui, j’ajoutai :

    — Ouais ouais, on s’en va. Pas besoin de faire un caca nerveux.

    Julia gémit.

    — Je ne le connais pas, murmura-t-elle.

    Je pouffai.

    — Que diriez-vous d’aller du côté de la Maison-Blanche ?

    — Vous allez nous faire jeter dehors là-bas aussi ?

    — Je ne promets rien.

    Je lui fis un sourire, fis un geste amical à Marie Clawson qui avait l’air de s’étouffer et la guidai vers le trottoir.

    CHAPITRE DEUX

    C’est nul pour toi (Julia)

    C’était officiel. Crank était dingue. Captivant, intéressant et sacrément mignon. Mais dingue.

    C’était dommage vraiment. Il était amusant. Mais je savais déjà que quand cette journée serait finie, je ne le reverrais jamais. Lundi je serais de retour à la fac, de retour dans ma vie. Cela allait déjà bien assez mal se passer avec ce que Marie Clawson avait l’intention d’écrire. Et il n’y avait aucun doute dans mon esprit qu’elle écrirait quelque chose à ce sujet. C’était une occasion de calomnier mon père. A cause de moi. Je n’étais pas vraiment en colère contre lui après son numéro. Comment pourrais-je l’être ? Marie Clawson, même sans me connaître, s’était servie de moi pour ruiner la carrière de mon père, et, dans la foulée, avait presque détruit ma vie. Il aurait pu faire bien pire et cela ne m’aurait pas dérangée.

    Nous marchâmes vers le sud sur la 15e rue, puis tournâmes à angle droit dans Vermont Avenue, en direction de la Maison-Blanche. De nombreux hommes et femmes peuplaient les rues, la plupart habillés de façon confortable. Un lundi, les gens auraient tous été en costumes ou tailleurs, allant et venant entre les divers bureaux gouvernementaux, sociétés commerciales et lobbies. Pour le moment, c’était le domaine des touristes et visiteurs de la ville, en même temps que des sans abris qui peuplaient ce quartier. Le ciel avait pris une teinte orange brillant tandis que le soleil descendait à l’ouest. Il ferait sombre bientôt.

    Nous nous arrêtâmes sur Pennsylvania Avenue, juste au bord de la foule encore en train de crier et brandir des pancartes à l’intention de la Maison-Blanche.

    D’une certaine façon, j’eus le sentiment qu’à l’intérieur, personne n’y prêtait la moindre attention.

    — Mon père fait partie de la Garde nationale, dit Crank sans préavis.

    Je le regardai, très surprise.

    — Vous ne pensez pas qu’il serait appelé pour ça, n’est-ce pas ?

    Il haussa les épaules.

    — Je ne sais pas. Il a servi pendant un certain temps après le 11 septembre. Mon frère a dû aller vivre avec notre grand-père un moment. Ça…. ne s’est pas bien passé. Je sais que j’ai l’air d’un je-m’en-foutiste, mais j’étais à fond en jouant à cette manif. On fait ce qu’on peut.

    Il regardait la Maison-Blanche avec une expression sérieuse. Le soudain changement dans le comportement de Crank était perturbant : jusqu’à maintenant, il n’avait pas semblé sérieux à propos de quoi que ce soit. Il regardait la Maison-Blanche la mâchoire serrée, les lignes de son visage laissant paraître de la colère.

    — Ça a dû être dur.

    — Ouais, ben, les gens ne comprennent pas que ce genre de truc affecte la vie de vraies personnes. C’est rien que des banderoles, des manifs et de la politique, mais quand faut passer aux choses sérieuses, ce sont des types comme mon père qui sont en première ligne. Ça me fout en rogne.

    — Vous et votre père êtes proches ?

    Il secoua la tête, avec une grimace amusée.

    — On ne peut pas se sentir.

    Je ne sus que répondre. Je connaissais tout des conflits avec ses parents, mais n’en discutais avec personne. Jamais.

    — Tout ça est trop sérieux. Et je n’ai pas assez bu.

    — Vous avez trop bu, si j’en crois ce qui s’est passé tout à l’heure.

    Il pouffa.

    — Pardonnez-moi, Julia.

    Je haussai les épaules.

    — C’est me faire pardonner de mes parents qui sera un tour de force.

    Je me mis à marcher sans but vers la 14e Rue. Il me suivit.

    — Sérieusement ? Ça va vous faire du mal à quel point ?

    Je soupirai.

    — La nomination de mon père à l’ambassade de Russie a été différée pendant presque deux ans… en partie à cause des choses qu’écrivait cette femme.

    Il s’étouffa.

    — Votre père est ambassadeur en Russie ?

    Je fis signe que non.

    — Il ne l’est plus. Il a pris sa retraite cette année et la famille est rentrée à la maison à San Francisco.

    — Alors vous êtes une sorte de… fille de la haute. Une héritière.

    — Quelque chose comme ça.

    — C’est super hot.

    Je trébuchai, essayant avec difficulté de ne pas rougir, et n’y arrivant pas.

    — Quoi ?

    Il laissa échapper un gros rire.

    — Je plaisante.

    Il y a quelques années, cela m’aurait énormément déstabilisée. Mais je n’avais plus dix-huit ans et il fallait plus qu’un garçon flirtant avec moi pour me perturber.

    — Sérieusement, qu’est-ce qui est hot ? Le côté héritière ou le

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