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Prends garde à la garce
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Prends garde à la garce
Ebook307 pages4 hours

Prends garde à la garce

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About this ebook

Accro à la cocaïne, Françoise pour payer ses doses, pique dans la caisse du casino « Le Saïgon ». Quand son employeur le vieux Roland Doménico s'en aperçoit, elle échappe au licenciement grâce à Christian, son fournisseur qui arrange le décès du patron. Le fils aîné Pierre dont elle la maîtresse, prend la suite. Elle trompe Pierre avec son frère Philippe qui lui est marié. La situation devient délicate. Elle quitte le Saïgon, se fait embaucher dans une discothèque, épouse le propriétaire, Michel Sibéria, truand d'envergure. Tout se passe bien, jusqu'à ce que Christian ne demande un petit service et que le hasard lui fasse rencontre les frères Doménico. C'est la fuite en avant.

LanguageFrançais
Release dateMar 19, 2018
ISBN9782490413027
Prends garde à la garce
Author

Maurice, Américo LEAO

Je suis né en mille neuf cent quarante-sept, à Ambarés 33, commune sur l’estuaire de la Gironde. D’un père Portugais et d'une mère Béarnaise. Après Une carrière en gendarmeries où j’ai occupé divers postes, depuis enquêteur en section de recherches, jusqu’à commandant de brigade, en France et outre-mer, je me suis trouvé confronté au milieu avec ses magouilles et ses crimes crapuleux. Quelques-uns d’entre eux m’ont motivé pour en faire le récit. Ce sont aujourd’hui plusieurs titres qui figurent à ma bibliographie. Si les lieux où se déroulent les faits sont réels, les personnages sont de pures fictions. Les événements sortis de leur contexte d’origine pour être romancés se déroulent principalement en Gironde, Lot et Garonne mais aussi à la Martinique et en Espagne. Laissez-vous conduire sur les traces de ces mauvais garçons qui prennent vie au cours de ces affaires où gendarmes et policiers ne gagnent pas toujours et se terminent par des règlements de comptes entre gens du milieu. Beaucoup d’enquêtes ne sont jamais résolues, en douteriez-vous ?

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    Prends garde à la garce - Maurice, Américo LEAO

    Roman policier

    Écrit par

    Maurice, Américo LEAO

    Du même auteur

    Chez Midi-presse et Amazon

    Meurtre à la palombière.

    La sorcière de la porte Rendesse et la vengeance du mage noir.

    Chez Amazon et Kobo

    Si tu prends mon cœur.

    La fille du ferrailleur.

    Les oubliés de l’histoire. (Tome I Les noces de Mariette).

    Les oubliés de l’histoire (Tome II) L’Exode, l’occupation.

    Les oubliés de l’histoire (Tome III) Œil pour œil.

    Palmyre.

    Maman viendra payer.

    Ha la gueuse.

    Souvenirs.

    Ceci est une œuvre de fiction.

    Toute ressemblance avec des personnes existantes

    ou ayant existé

    des lieux ou des événements réels

    ne serait que le fait du hasard

    Prends Garde à la Garce

    Première édition. 19 mars 2018.

    Copyright © 2 018 Maurice, Américo LEAO.

    ISBN : ISBN 978-2-9 560 948-9-0

    Epub 978-2-490 413-01-0

    Dépôt légal 25 avril 2018.

    Par Maurice, Américo LEAO

    Prends Garde à la Garce

    1

    ––––––––

    Je m’en doutais, s’exclame Roland, Doménico installé devant son écran. J’ai eu raison de faire installer cette caméra dans son bureau.

    Depuis déjà quelque temps, il soupçonne Françoise Orion, la secrétaire comptable du Casino « Le Saïgon », de détourner de petites sommes d’argent. Profitant de ses jours de congé de fin de semaine, depuis la fin du mois de mai deux mille huit, il a fait installer une petite caméra de surveillance, dissimulée dans le lustre exactement au-dessus d’elle.

    Lui seul a accès à l’écran de surveillance, installé dans un placard, de son bureau. Le reste de l’établissement est aussi sous vidéo, mais les écrans se trouvent dans une pièce spéciale sous la responsabilité du chef de la sécurité. Là, sous ses yeux, relevant sa robe, Françoise Orion vient de glisser une liasse de billets dans sa petite culotte. Cela ne semble pas être une grosse somme, mais cela dure depuis déjà un certain temps, et le préjudice s’accumule.

    Françoise Orion est chargée de compter et vérifier le lundi matin les gains obtenus par l’établissement entre le vendredi et le dimanche précédent. Tous les jours, à la fermeture du casino, chaque responsable de jeux, établit un bordereau des gains et des pertes, et glisse l’enveloppe par la fente d’un coffre-fort, dont Roland Doménico et son fils aîné Pierre détiennent la clé et le code. Il en est de même pour la recette du restaurant et du bar qui fonctionnent le soir dans l’établissement. Vers onze heures le lundi matin, Françoise Orion a terminé les vérifications, relevant presque toujours des erreurs dans les comptes rédigés par les responsables de jeux.

    La différence trouve refuge, bien au chaud, dans sa petite culotte. Alors qu’elle est occupée à rédiger le compte rendu de ses vérifications, le téléphone intérieur sonne.

    — Sitôt que vous aurez terminé, Françoise, vous passerez me voir à mon bureau pour m’apporter tout cela.

    — J’ai bientôt fini, Monsieur Doménico, j’arrive.

    Quelques minutes plus tard, après avoir frappé à la porte du patron, Françoise Orion, porteuse des documents de vérification et d’une cassette métallique contenant l’argent fait son entrée.

    C’est une jeune femme de vingt-cinq ans, blonde aux yeux verts, bien faite de sa personne. Avec assurance, elle dépose les documents et la cassette sur le bureau de Roland Doménico, en se plaignant.

    — Certains responsables de jeux se sont encore trompés dans leurs comptes, j’ai une différence de cent vingt euros.

    — C’est possible, reprend son patron. Il va me falloir les motiver pour qu’ils apportent davantage de sérieux dans leur travail.

    — Oui, dit Françoise Orion, il me semble que cela ne leur ferait pas de mal.

    — Voulez-vous me présenter les comptes, Françoise ?

    La jeune femme pousse dans sa direction la liasse des documents établis par les responsables de jeux ainsi que le récapitulatif de vérification qu’elle vient de rédiger.

    — Effectivement, déclare-t-il, je constate une différence de cent vingt euros. Mais je pense que j’ai une idée d’où provient l’erreur.

    — Vous pensez réellement, s’étonne Françoise.

    — Oui, regarder cela.

    Tout en parlant, il remet en marche l’écran de surveillance vidéo. D’abord confuse de se voir prise en flagrant délit, de dissimuler une liasse de billets dans sa petite culotte. La jeune femme retrouve tout son aplomb.

    — Ce n’est pas grave, Monsieur Doménico, je vous rembourse ce que j’ai emprunté. Tout en parlant, Françoise, Orion, glisse la main dans sa petite culotte pour en retirer l’argent qu’elle y a dissimulé, et le jette sur le bureau. Puis s’approchant de son patron, sa robe toujours relevée, dévoilant une petite culotte, qui ne dissimule plus que peu de choses de son anatomie, elle s’offre :

    — Monsieur Doménico, tout peut s’arranger, il suffit d’un peu de bonne volonté.

    — Écoutez, Françoise, j’ai passé l’âge de ses compensations physiques. Soyez raisonnable et rhabillez-vous.

    Voyant que sa tentative de séduction ne fonctionne pas, elle déchire le haut de sa robe et se met à hurler. Au secours, au viol !

    — Ne vous donnez pas tout ce mal, Françoise. Depuis votre arrivée dans mon bureau, notre conversation est enregistrée, et filmée, dites-vous bien que je ne suis pas tombé de la dernière pluie.

    Asseyez-vous, et rajustez vos vêtements. Je sais de plus que vous entretenez une relation avec mon fils Pierre. Je désire que vous y mettiez un terme, moyennant cela, au lieu de déposer une plainte à votre encontre et vous licencier pour faute grave, ce qui vous priverait du bénéfice de l’allocation-chômage, je vous propose un licenciement économique, vous partirez dans trente jours. Cependant, vous n’exercerez aucune fonction en contact avec la recette du casino, vous vous contenterez du secrétariat.

    — Je suppose que je n’ai pas le choix, soupire Françoise, Orion.

    — Non, vous n’avez pas le choix. En plus de tout cela, je sais que vous consommez des stupéfiants. Et cela, je n’en veux pas chez moi. Vous acceptez mon offre, ou bien c’est la prison. Je pense être clair !

    — C’est très clair. Licenciez-moi, je partirai à l’issue du délai de préavis.

    — Bien, puisque nous sommes d’accord, vous pouvez retourner à votre bureau. Et n’oubliez pas que tout ce que nous venons de nous dire a été enregistré.

    — Aux environs de midi, Roland Doménico demande à Françoise Orion de téléphoner à l’aéro-club d’Éden Les Pins, pour que le mécanicien prépare son avion pour jeudi après-midi, à quatorze heures.

    ***

    Âgé de vingt ans à peine, Ange Doménico quitte Bastia en mille neuf cent trente, pour s’installer à Saïgon, où parrainé par la communauté corse solidement installée, il prend la gestion d’un café qu’il baptise « Les Calanques ». Dix ans plus tard, il épouse Li, une jeune Vietnamienne avec laquelle il a un unique enfant : Roland le sept février mille neuf cent quarante-quatre.

    Le quartier où se trouve le café « Les Calanques » au bas de la rue Caninat, à proximité du port, est calme. Pourtant, à quelques centaines de mètres, les grenades éclatent à la terrasse des cafés. La sûreté française ainsi que les diverses milices vietnamiennes se livrent à de sordides règlements de comptes contre les partisans du « Doc Lap » qui militent pour l’indépendance.

    En décembre mille neuf cent quarante-cinq, à paris, le ministère des Finances fixe le cours de la piastre en métropole à dix-sept francs, soit deux fois sa valeur réelle en Indochine. Il en est de même pour l’or, le gramme vaut cinq cent quatre-vingt-six Francs à Paris et mille trois cents à Saïgon.

    Moyennant quelques complicités faciles à s’assurer, le trafic de la piastre et de l’or bat son plein.

    Ange Doménico et son frère Mathéo, qui exploite à Marseille un bar à hôtesses, ne tardent pas à mettre sur pied, avec l’aide des matelots servant sur les paquebots de la ligne Marseille Saïgon, un très juteux trafic.

    En mille neuf cent cinquante-trois, Ange Doménico comme beaucoup d’autres de ses compatriotes sent que les événements leur sont défavorables. En mai, le gouvernement révise le taux de change de la Piastre. Les contrôles deviennent beaucoup plus rigoureux. Le pire reste à venir. En mai mille neuf cent cinquante-quatre, le désastre de Diên Biên Phu, sonne le glas de la présence française dans le pays. Il est temps pour Ange Doménico sa femme et son fils Roland, de songer au retour en France. Lui et son frère Mathéo sont à la tête d’une petite fortune. Les attentats anti-occidentaux se multiplient dans la ville.

    En traversant son quartier pour faire ses adieux à sa famille Li trouve la mort dans le lancer aveugle d’une grenade. Le petit Roland vient juste d’avoir dix ans, son père et lui rentrent en métropole.

    À Marseille, c’est la cohue, il y règne une guerre des clans qui dissuade Ange de s’y installer. En mille neuf cent cinquante-cinq, à Éden Les Pins, une petite ville du littoral Atlantique, près de Bordeaux, le casino de la ville est en vente. Les relations politiques de Mathéo, permettent à son frère Ange d’en faire l’acquisition, il le rebaptise « Le Saïgon ».

    Géré de main de maître, l’affaire ne cesse de croître. Après des études sérieuses dans les meilleurs établissements de Bordeaux, Roland assiste son père dans la gestion de leurs affaires.

    Ils ont acquis deux autres établissements sur la côte.

    En mille neuf cent soixante-quinze, Ange décède de maladie contractée en Indochine. Roland à trente et un ans, il assume la succession. De petits démêlés avec la justice lui vaudront de légères condamnations. Cinq ans plus tard, il épouse une chanteuse venue se produire au casino. Il en aura deux enfants, Pierre l’aîné et Philippe le cadet avant que lassée d’une vie sédentaire, elle ne reprenne sa liberté.

    Blottie au fond d’une baie, Éden les Pins, est une ville de moyenne importance d’environ cinquante mille habitants. C’est une station balnéaire à la mode sur la côte atlantique de la Gironde.

    Tout le gratin des environs se doit d’y posséder un pied-à-terre à défaut d’une résidence principale. Son port, bien abrité à l’intérieur des terres, est l’un des mieux organisés de la côte. Il regorge de bateaux de plaisance, tous plus beaux et plus chers les uns que les autres. Les lieux de plaisir ne sont pas en manque. Son aéroclub et l’un des mieux fréquentés de la côte.

    ***

    Si tôt après avoir téléphoné à l’aéro-club, pour demander que l’avion de son patron, un CAP 10, acquis d’occasion, soit prêt pour le jeudi suivant, Françoise Orion forme le numéro de son amie Goby, Yvette, dont le mari, Christian lui procure les doses de cocaïne qu’elle consomme régulièrement. Sitôt qu’elle décroche, elle se plaint d’avoir été découverte.

    — Allô, oui, c’est moi !

    — Que se passe-t-il ?

    — Le vieux s’est aperçu pour les sous.

    — Ah, bon, et, tu n’as pas tenté de faire comme avec son benêt de fils ?

    — Si, bien sûr, mais cela n’a pas marché, il m’a licenciée.

    — Aie, cela va être difficile pour payer tes doses.

    — Ne parle pas de cela au téléphone. Christian sera-t-il chez toi ce soir ?

    — Oui, en principe, parce qu’avec lui on ne sait jamais.

    — Bon, je passerai en débauchant.

    Le reste de la journée s’écoule lentement, Françoise n’a plus rien à faire, puisque interdite de comptabilité, et de contact avec l’argent.

    ***

    Comme annoncé, en quittant le Saïgon, Françoise se rend chez son amie Yvette. Elle n’a plus de cocaïne, et pas d’argent pour payer sa dose. Elle espère bien que Christian Goby lui fera crédit pour cette fois. Après, il sera toujours temps de voir venir. Il semble n’y avoir personne au domicile d’Yvette. Françoise, sonne une nouvelle fois, en restant appuyée longtemps sur le bouton. Enfin, la porte s’ouvre sur Christian.

    — Ah ! C’est toi, que s’est-il passé avec le père Doménico ? Tu as été assez conne pour te faire piéger.

    — Oh, ça va, pas la peine de me faire la leçon. Je me suis fait avoir. Ce vieux con avait fait installer une caméra de surveillance juste au-dessus de mon bureau, alors tu penses bien qu’il m’a vu planquer le fric dans ma culotte.

    — Et alors, il fallait lui faire voir de plus près ta culotte, la lui faire sentir. Tout cela serait arrangé.

    — Pas du tout, à croire qu’il ne bande plus. Heureusement qu’il y a encore Pierre. Lui, c’est autre chose. Il est amoureux. Mais maintenant que le vieux m’a virée, ce n’est plus pareil.

    — C’est bien dommage, car Pierre, tu en faisais ce que tu voulais.

    — Oui, il est amoureux. C’est son père que j’aurais dû embobiner. Et dire qu’il est plein de fric. Il m’a encore demandé de faire préparer son avion pour aller se promener.

    — Ah, oui, c’est vrai qu’il a toujours aimé voir les autres de plus haut. Tout en faisant cette remarque, une idée tortueuse vient à l’esprit de Christian. Tout en continuant la conversation, elle fait son chemin.

    — Je l’ai toujours connu avec cet avion reprend Françoise.

    — C’est bien le CAP 10 qui se trouve à l’aéro-club d’Éden Les Pins, celui qui est peint en beige clair avec le liseré bleu.

    — Oui, c’est bien celui-là. Mais qu’est que cela peut te faire. Il ne t’amènera pas faire un tour.

    — J’en ai rien à foutre d’un tour dans son avion. C’est moi qui vais lui en faire un de tour, et il n’en reviendra pas.

    — C’est juste. Il n’y a pas de raison qu’il soit plein de fric. Mais au fait, tu vas pouvoir me dépanner le temps que je retrouve une combine pour me faire du fric. Et que veux-tu faire à son avion ?

    — Ouais, ne t’inquiète pas, mais ce n’est pas gratos. C’est juste une avance.

    Pour son avion, dis-toi bien qu’aucun encore n’est resté dans le ciel. Soit ils atterrissent, soit ils se plantent.

    — Tu as raison, Christian. Si ce vieux con se plante, je garde ma place. Personne ne sait qu’il m’a virée.

    Yvette, l’épouse de Christian, abonde dans leur sens.

    — C’est vrai quoi, il y en a qui sont plein de fric, et d’autres comme nous qui galérons à longueur d’année. Mais comment tu vas t’y prendre pour qu’il se plante avec son avion ?

    — Alors ça, c’est mon affaire, mais ne t’en fait pas, il va se planter ; ça, c’est moi qui te le dis.

    — Fais gaffe quand même à pas te faire baiser, temporise Yvette.

    ***

    Dans la nuit de mercredi à jeudi, une ombre se glisse silencieusement dans le hangar de l’aéro-club d’Éden Les Pins. Il n’y a pas de garde et il est facile pour Christian Goby, habitué des lieux, de se glisser jusqu’au CAP 10 de Roland Doménico. À l’aide d’une petite lampe torche, il se rend jusqu’à l’appareil. L’habitacle est facile d’accès, la verrière n’est pas verrouillée. Sous le siège du pilote, à l’aide de deux fils métalliques façonnés à l’avance, il fixe un objet bricolé à partir d’une boîte à sucres. Elle est lestée de quelques cailloux pour l’empêcher de bouger. La fermeture est assurée par un simple petit ressort à lame, et d’un plomb qui fait contrepoids. La fermeture n’est assurée que le temps où la petite boîte se trouve en position horizontale.

    Roland Doménico a deux passions, ses affaires, qui maintenant sont menées avec ses fils, et plus particulièrement l’aîné Pierre, et le pilotage de son petit avion. C’est son seul plaisir, aussi plusieurs fois par semaine, il fait vérifier le moteur, le plein de carburant et les commandes par le mécanicien de l’aéroclub. Cette opération est toujours réalisée la veille. Puis il survole la région pendant une heure ou deux avant de revenir se poser à Éden les Pins.

    Ce jeudi à treize heures quarante-cinq, il gare sa voiture devant le garage des avions, son CAP 10 est déjà sorti, le moteur en marche en train de chauffer. Il salue le mécanicien, monte dans l’appareil, et se pose le casque sur les oreilles. Le temps de régler le son, le contact est pris avec la tour de contrôle. Il lui est impossible d’entendre un petit bruit qui provient de dessous son siège. Le bruit du moteur, ainsi que le casque sur les oreilles l’en empêchent.

    La tour de contrôle signale que la piste est libre. C’est à son tour de s’y engager. Roland Doménico lève le pouce droit, le mécano retire les cales qui bloquent les roues avant. Il pousse la manette des gaz, l’avion construit pour la voltige, entraîné par un moteur surpuissant s’élance ; doucement d’abord, puis s’immobilise en bout de piste pour faire le point fixe. Roland Doménico donne alors tous les gaz, l’appareil prend de la vitesse, puis quitte le sol. Comme à son habitude, la montée vers les nuages est accélérée.

    Dessous son siège, la petite boîte, retenue par ses fils de fer a juste un peu glissé en l’arrière. Le couvercle, articulé sur la partie haute, à peine retenu dans sa partie basse par le ressort à lame, vient de bouger. Grisé par l’ascension de l’appareil, il n’a d’œil que pour les instruments de bord. Pendant ce temps, entraîné par le plomb de contrepoids, le couvercle de la petite boîte vient de s’ouvrir presque complètement. Il ne s’est encore aperçu de rien.

    Derrière son dos, sur le plancher de l’avion, un petit essaim de quelques guêpes commence à se réveiller de la léthargie dans laquelle Christian Goby avant de poser sa boîte, les avait plongées à l’aide d’un produit spécial.

    L’avion prend encore de l’altitude, les instruments indiquent cinq cents mètres. Derrière lui, les insectes, devenus fous par le bruit du moteur, commencent à tourbillonner. La première guêpe plante son dard derrière l’oreille droite. De la main, il écrase l’insecte, le retenant entre ses doigts.

    — Ah, eh bien merde, ça alors, une guêpe !

    Déjà, il sent la douleur augmenter d’intensité. Le mieux pour lui est de faire demi-tour immédiatement. Alors qu’il commence la manœuvre, d’autres guêpes viennent à leur tour le piquer, à la figure, aux mains, partout où la peau est à nue. Malgré ses mouvements des bras pour se débarrasser des insectes, ceux-ci semblent innombrables. Le pilotage de l’avion s’en ressent. Serrant les dents pour résister à la douleur lancinante provoquée par les multiples piqûres, il approche de la piste pour atterrir. Il entrevoit le bout de son calvaire, lorsque tout à coup, devant ses yeux, c’est le voile noir.

    Le nombre de piqûres des insectes a eu raison de sa résistance. Il n’y voit plus. Au jugé, par la force de l’habitude, il tire le manche à balai vers lui pour essayer d’arrondir la descente et aborder le sol le plus doucement possible. La vitesse est encore trop élevée, les roues avant heurtent le sol avec force, et l’appareil fait « cheval de bois ». Des flammes commencent à sortir du moteur.

    Les secours de suite sur les lieux ne peuvent empêcher l’incendie de gagner. Lorsqu’il est circonscrit, Rolland Doménico brûlé sur tout le corps est décédé.

    La petite boîte à sucres n’a été que partiellement léchée par les flammes, quant aux guêpes...

    Le personnel de la brigade de gendarmerie des transports aériens effectue la procédure d’usage d’accident aérien. Aucun indice ne leur permet d’orienter leur enquête en dehors de la piste du malaise. Néanmoins, un expert est missionné pour examiner l’épave de l’avion. Le constructeur dépêche l’un de ses ingénieurs.

    Depuis le bar de l’aéroclub où il déguste une bière, Christian Goby assiste en direct au résultat de sa visite nocturne de la nuit. N’écoutant que son courage, il est l’un des premiers à se précipiter vers les lieux de l’accident pour porter secours. Sur le chemin du retour pour regagner son domicile, depuis une cabine publique, il compose le numéro de téléphone de Françoise Orion, qui, cantonnée dans les seules fonctions de secrétaire, fait toujours acte de présence au « Saïgon » il prononce simplement quelques mots.

    — Ce soir, passe à la maison. Puis il raccroche.

    C’est Yvette, cette fois, qui ouvre la porte à Françoise Orion. Elle a les traits tirés, très pâle.

    — Entre vite, il est au salon.

    — Que s’est-il passé, Christian, les gendarmes sont venus cet après-midi, annoncer la mort du patron. Son avion s’est écrasé à l’atterrissage !

    — Assieds-toi, et prends donc un verre de whisky, cela te fera du bien. Je t’ai bien dit que je lui en ferai faire un tour moi, à ton patron.

    —Comment, c’est toi ? Tu as saboté son avion ?

    — Mais non, je n’ai rien touché à sa mécanique. Tu ne cherches pas à comprendre, et tout ira bien.

    — N’empêche qu’il est mort. Puis, prenant conscience tout à coup que personne n’est au courant de l’entrevue du lundi, où elle s’est fait piéger, elle reprend : mais alors, je vais pouvoir y rester au « Saïgon ».

    — Absolument, tu vas pouvoir y rester, et même faire mieux qu’avec le vieux puisque ce nigaud de Pierre est amoureux.

    — Tu as raison, Christian, tu es génial, et je ne vais pas me priver.

    — Oui, bien sûr, mais fais gaffe à son frère. Philippe, j’ai l’impression qu’il n’est pas aussi con.

    2

    Le Procureur de la République a demandé qu’une autopsie soit pratiquée sur le corps de Roland Doménico. Les obsèques ne se dérouleront que le mardi suivant. Les cousins de Marseille sont montés. Certains soupçonnent un meurtre, mais comment le prouver ? En tous les cas, le cousin Félix, celui-là même qui poursuit l’exploitation du bar à hôtesses sur les quais prodigue ses conseils aux deux frères.

    — Méfiez-vous de toutes propositions de rachats de vos affaires. Cela confirmerait mes doutes sur un meurtre. Si c’est le cas, prévenez-moi immédiatement, je pense pouvoir me rendre utile.

    Pendant que les trois hommes discutent dans le bureau de Roland, qui désormais devient celui de Pierre, Françoise, Orion met une dernière touche à sa toilette de deuil. Pierre l’a présentée aux Marseillais, comme étant la secrétaire comptable de Roland, et qu’elle est au courant de leurs affaires. Puis vient l’heure d’aller à l’église. Habilement, elle se glisse à côté de Pierre, le frôlant le plus possible, étouffant un soupir, épongeant une larme, comme si elle était très touchée du décès de son patron. Au cimetière, au moment de la descente du cercueil dans la fosse, elle laisse échapper un gros sanglot, se retenant en même temps au bras de Pierre.

    Lorsqu’elle a eu connaissance de l’accident d’avion, elle s’est empressée d’aller chercher, sans succès, dans le placard du bureau de son patron, le cédérom contenant l’enregistrement où elle dissimule une liasse de billets dans sa petite culotte. De même, elle ne réussit pas à trouver celui sur lequel figure

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