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À Propos Du Suicide Assisté Et De L’Euthanasie Aujourd’Hui
À Propos Du Suicide Assisté Et De L’Euthanasie Aujourd’Hui
À Propos Du Suicide Assisté Et De L’Euthanasie Aujourd’Hui
Ebook973 pages15 hours

À Propos Du Suicide Assisté Et De L’Euthanasie Aujourd’Hui

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About this ebook

A propos du suicide assiste et de l' euthanasie aujourd' hui.

Leuthanasie reste encore un sujet dactualit dans nos socits modernes. Chaque socit essaie dorganiser la coexistence de diffrentes thiques, qui, toutes, prtendent avoir une lgitime prtention de dire ce qui est bien et ce qui est mauvais. La proccupation de lauteur dans ce travail est de poursuivre le dbat sur leuthanasie en rpertoriant les rflexions des uns et des autres. Leuthanasie a perdu son sens initial de bonne mort. Elle devient une mort provoque par personne interpose. Laccent dans le dbat fut mis un moment donn de lhistoire sur la manire de mourir ; et actuellement le dbat porte surtout sur la dignit humaine quil faudrait prserver jusquau dernier soupir. Ce dernier volet du dbat reflte lhritage de la longue histoire de lglise catholique qui a marqu presque toute la tradition occidentale et mme au-del. Pendant que le dbat fait rage dans certaines socits, deux pays europens, la Hollande et la Belgique, ont lgalis leuthanasie. Ce que lon avance le plus souvent dans le dbat, cest la gestion de la souffrance des malades. Le patient peut-il choisir de manire dlibre la mort ? Le fait que l'on soit malade, n'enlve en rien la responsabilit de celui-ci face aux nombreux problmes qui se posent. Il est une personne capable de traiter les informations le concernant directement. dfaut, cest le tuteur ou les parents qui agissent la place de lenfant malade ou de ladulte incomptent. tre malade avec toutes les souffrances physiques et mentales qui s'en suivent n'ouvre pas ncessairement la porte courter la vie. Les soins palliatifs sont indiqus et semblent tre une alternative crdible pour les personnes malades se trouvant en phase finale de leur maladie. Il faudrait cheminer avec ces malades tout en se gardant de tomber dans lacharnement thrapeutique.

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(English Translation)

The Situation of Assisted Suicide and Euthanasia Today

Euthanasia remains a topical subject. Any community deems it wise to organize a peaceful coexistence of its different ethical theories which claim to have the right solution to all debatable problems. The main concern all along is to outline the variety of stances in the euthanasia debate. The initial notion of euthanasia, i.e. good death, is no longer in use. Instead, the current meaning lays stress on death caused by a third party especially a doctor. The accent was in a certain time in the debate stressed on the way each human being has to pass away. Nowadays the accent is more stressed on human dignity which any patient has to protect until death occurs. The use of human dignity in the debate reflects the influence of the Catholic Church that stood out in the long Western tradition and even beyond. Taking into account certain conditions euthanasia is legalized in the Netherlands and in Belgium. The core of the whole debate stands on the management of the physical suffering of the patient. How to cope with the patients great pain? Some say euthanasia is the best answer; others bring forward palliative care by minimizing to prolong life by any technological means. The debate goes on.

LanguageFrançais
PublisheriUniverse
Release dateAug 13, 2013
ISBN9781491702505
À Propos Du Suicide Assisté Et De L’Euthanasie Aujourd’Hui
Author

Basile Ekanga

Professor of Ethics and Bioethics, has a Ph.D. degree in Theology (University of Munich - Germany 1985) and in Philosophy (Ghent University - Belgium 2002). Has previously published two books, Social Justice and Democracy (2005) and Der Einfluss der Fruchtbarkeit in der afrikanischen Familie (1997).

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    À Propos Du Suicide Assisté Et De L’Euthanasie Aujourd’Hui - Basile Ekanga

    Copyright © 2013 by Basile Ekanga.

    All rights reserved. No part of this book may be used or reproduced by any means, graphic, electronic, or mechanical, including photocopying, recording, taping or by any information storage retrieval system without the written permission of the publisher except in the case of brief quotations embodied in critical articles and reviews.

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    ISBN: 978-1-4917-0244-4 (sc)

    ISBN: 978-1-4917-0250-5 (ebk)

    iUniverse rev. date: 08/08/2013

    TABLE DES MATIÈRES

    Introduction générale

    0.1 L’état du problème, but, méthode et objectif de la recherche

    0.2 Les arguments contre ou pour l’euthanasie:

    0.3 Plan du travail

    PREMIÈRE PARTIE: État actuel de l’euthanasie dans la société moderne

    Chapitre I Que veut dire l’euthanasie?

    1.1 Définition

    1.2 Différentes sortes d’euthanasie

    1.2.1 L’Euthanasie passive et active

    1.2.2 Euthanasie volontaire et involontaire

    1.2.3 L’Euthanasie directe, indirecte et le suicide assisté

    1.3 Evolution

    Chapitre II L’euthanasie dans l’histoire

    2.1 En Grèce et à Rome

    2.2 La période postclassique et le siècle des Lumières

    2.2.1 David Hume (1711-1776)

    2.2.2 Immanuel Kant (1729-1804)

    2.3 L’euthanasie utilitariste

    2.4 L’euthanasie dans le contexte culturel de notre époque

    2.4.1 L’eugénisme de l’Allemagne nazie

    2.4.2 La sécularisation de la pensée et de la vie, le scientisme rationaliste et humaniste, ainsi que le déséquilibre entre le progrès de la médecine et l’humanisation renforcent l’euthanasie

    Chapitre III L’euthanasie dans l’histoire

    3.1 Le suicide dans les Écritures Saintes

    3.2 Dans l’enseignement et dans les documents de l’Église

    3.3 Fractures dans les preuves théologiques et les orientations médicales

    3.4 Dans les documents théologiques et du Magistère de l’Église

    3.4.1 Décret du Saint-Office du 27 novembre (2 décembre) 1940 et les discours du pape Pie XII du 24 février et du 24 novembre1957

    3.4.2 La « Déclaration sur l’euthanasie » de 1980 et « L’Évangile de la vie » de 1995

    Chapitre IV La situation légale de l’euthanasie.

    4.1 Le contexte social

    4.1.1 L’individu et la société

    4.1.2 Faut-il légiférer sur l’euthanasie? Les différents types de droits

    4.2 La pente savonneuse

    4.2.1 La signification légale et la terminologie

    4.2.2 Deux versions de l’argument logique

    4.2.3 Le contexte légal

    4.2.4 L’argument empirique

    4.3 Les conséquences possibles des droits issus de la formalisation de l’euthanasie

    4.3.1 Échec à fournir de solutions concernant la complexité des problèmes sociaux

    4.3.2 Interrogation sur des hypothèses sous-jacentes

    Chapitre V L’état de l’euthanasie et du suicide assisté dans certains pay

    5.1 La situation générale

    5.2 La justification de nécessité aux Pays-Bas

    5.2.1 L’histoire de l’euthanasie jusqu’à sa légalisation

    5.2.2 Les dispositions du Code Criminel et le conflit des devoirs

    5.2.3 La codification

    5.2.4 Des problèmes?

    5.3 L’euthanasie par compassion en France

    5.3.1 Comment insérer la proposition du CCNE dans le droit pénal, et sur quoi se base-t-il?

    5.3.2 Quel avenir?

    DEUXIÈME PARTIE: Le patient face à sa mort douce

    Chapitre VI Les droits du patient

    6.1 Projet de loi sur les droits du patient et la nécessité de ces droits

    6.2 Le droit à l’information

    6.2.1 Quelle information et à qui donner?

    6.2.2 Les différentes normes: professionnelle, objective et subjective

    6.2.3 Comment mieux dire des mauvaises nouvelles au patient?

    6.2.4 Faut-il dire toute la vérité au patient?

    6.3 À propos du consentement et de la contrainte du malade face aux soins

    6.3.1 Le problème

    6.3.2 Le sens de la liberté

    6.4 Refus des informations et des soins

    Chapitre VII Les relations médecin – patient

    7.1 La confidentialité

    7.2 Le respect et le droit d’égalité des traitements

    7.3 Les relations professionnelles

    7.4 Les relations verticales: le paternalisme et la dépendance

    7.5 Les relations horizontales autonomes

    7.5.1 Les relations démocratiques et d’autodéterminations

    7.5.2 Les relations d’indépendance et de responsabilité

    7.6 Les relations d’entreprise audacieuse

    Chapitre VIII La décision prise par un adulte compétent (L’autonomie)

    8.1 Que veut dire l’autonomie et de quelle autonomie s’agit-il pour un patient?

    8.1.1 L’autonomie comme droit de disposer de soi-même

    8.1.2 L’autonomie comme étant contraire au paternalisme et au moralisme

    8.2 L’autonomie dans la perspective psychologique

    8.2.1 L’autodétermination de l’individu dans son environnement

    8.2.2 Jusqu’à quel point la personne malade reste-t-elle autonome?

    8.3 L’autonomie selon Joel Feinberg

    8.4 L’autonomie du malade selon C.E. Schneider

    8.5 L’homme autonome face à sa propre mort

    8.6 Conclusion: Que pouvons-nous dire sur l’autonomie du malade? Vers une éthique de l’interdépendance

    Chapitre IX La décision prise au nom des enfants en bas âge et des adultes non compétents (le paternalisme)

    9.1 Le paternalisme: faire le choix pour les autres

    9.1.1 C’est quoi le paternalisme?

    9.1.2 Peut-on justifier le paternalisme? Les arguments pour et contre

    9.2 Le cas des enfants et l’infanticide

    9.2.1 Le contexte historique et anthropologique

    9.2.2 La situation actuelle de l’infanticide dans le débat sur l’euthanasie

    9.3 Le cas des adultes non compétents

    9.4 Le médecin face à l’autonomie réduite et à la capacité restreinte du patient

    9.4.1 Que signifie une autonomie réduite chez un patient?

    9.4.2 La capacité et l’incapacité dans le langage médical et légal

    9.5 L’intervention du médecin

    9.6 L’intervention du médecin au profit du tiers

    9.6.1 L’intervention du médecin au profit de ceux qui ont des obligations fiduciaires

    9.6.2 L’intervention du médecin au profit de ceux qui n’ont pas d’obligations fiduciaires

    9.7 Conclusion

    Chapitre X Jusqu’où vont les responsabilités du médecin?

    10.1 Une responsabilité partagée?

    10.2 L’attitude du médecin

    10.4 « Faire mourir ou laisser mourir? »

    10.5 Le principe du double effet

    10.6 Vers une troisième voie? Le refus de l’hydratation et de l’alimentation

    Chapitre XI Faut-il préserver la vie à tout prix

    11.1 La vie est-elle un bien relatif?

    11.1.1 « Le bien est à faire et le mal à éviter » et les biens primaires

    11.1.2 Les biens secondaires

    11.2 Au regard de la valeur de la vie humaine

    11.2.1 De la qualité de vie

    11.2.2 Sainteté de la vie

    11.2.3 La vie humaine possède une valeur spéciale (La dignité)

    Chapitre XII Les cures normales, les soins palliatifs, acharnement thérapeutique et la dysthanasie

    12.1 Les cures normales

    12.2 Les soins palliatifs

    12.2.1 Les origines

    12.2.2 Les définitions

    12.2.3 L’organisation des soins palliatifs

    12.2.4 Les buts intrinsèques et extrinsèques des soins palliatifs

    12.3 L’acharnement thérapeutique et la dysthanasie

    Conclusion générale: L’utilisation des moyens ordinaires et extraordinaires en fin de vie

    Bibliographie

    À la mémoire de monsieur Pierre, Kebos et Jean-Marie

    Introduction générale

    0.1 L’état du problème, but, méthode et objectif de la recherche

    Le problème de l’euthanasie n’est pas avant tout un problème médico-technique concernant le temps ou la possibilité d’utiliser tel médicament ou telle technique. Ce n’est pas non plus un problème socio-économique portant sur la vie et la mort, une question des finances ayant rapport à une débilité prolongée ou à une maladie en phase terminale; il ne s’agit pas d’une situation sociale où il est question de donner des soins intensifs continus ou même d’un spectacle face à une souffrance indigne. Il n’est pas question finalement d’un problème qui se concentre sur des légalités en jeu. Sans aucun doute, toutes ces questions sont des problèmes importants et pertinents. Cependant, avant tout autre considération, le problème de l’euthanasie est fondamentalement philosophique en rapport avec la mort volontaire. Comme telle, il comprend en son sein plusieurs aspects philosophiques importants: comment savoir si et jusqu’à quel point une personne possède le droit à disposer de sa vie; la nature morale des relations interpersonnelles entre les personnes; leurs droits vis-à-vis de leurs sociétés respectives dans son ensemble. En gros, cela implique tout simplement la question de la personne intégrale. C’est seulement lorsque l’euthanasie a affaire avec des personnes plutôt qu’avec des organismes biologiques que se pose le problème. C’est uniquement après avoir déterminé et retenu qu’il est moralement défendable de rappeler un patient dans le choc vers une existence atrocement insupportable comme un cancéreux et le tenir aussi longtemps que possible en vie – si c’est nécessaire, même contre sa propre volonté, que cela donne un sens de considérer la manière dont il faut mettre en pratique cette décision médicalement ou de soutenir cette décision légalement. C’est seulement après avoir trouvé moralement acceptable de garder en vie par tous les moyens un individu dont le cerveau a été gravement et irrémédiablement endommagé ou de mettre fin à la vie d’un nouveau-né atteint de trisomie 21 et d’ulcère duodénal qu’il devient nécessaire de se tourner vers les nombreuses questions médicales et légales, surtout sur les comment et les pourquoi. C’est seulement après avoir examiné et résolu de manière éthique toute la situation que l’on peut décider si quelqu’un doit mourir ou le laisser vivre.

    Le but de notre recherche est de procéder à un état de lieu et de faire le point sur le problème actuel de l’euthanasie. Jusqu’à présent le débat s’est limité à l’alternative pour et contre. Y a-t-il, cependant, moyen de réconcilier les deux points de vue et de trouver une solution médiane qui satisfasse tout le monde? On n’en est pas encore là, il est vrai, et long est le chemin à parcourir. C’est pourquoi nous nous proposons de passer au peigne fin toutes les positions susceptibles d’éclairer ce débat.

    Le problème que nous pouvons qualifier de central dans l’euthanasie est le sens que l’homme donne à la vie. On naît, on grandit et on doit mourir un jour. On meurt à tous les âges et on meurt de plusieurs façons. Certains meurent paisiblement sans douleur à un âge respectable et avancé; d’autres passent par des souffrances inouïes avant de rendre le dernier soupir. C’est souvent pour ces derniers et pour ceux qui les assistent: médecins, proches parents ou amis que se pose avec acuité le problème de l’euthanasie. Assister, de manière impuissante, à la souffrance d’un être aimé, pousse certaines personnes à la compassion qui va jusqu’à leur faire prendre quelquefois des décisions irréversibles.

    Dans l’histoire, surtout dans la tradition occidentale façonnée par le christianisme, la règle d’or en la matière est et reste que c’est Dieu qui donne la vie et que c’est lui seul qui peut la reprendre. La vie de l’homme est sacrée et il faut, jusqu’au bout, la respecter. L’évolution des mentalités et surtout la sécularisation de la société, le progrès de la médecine, l’ouverture aux autres cultures du monde, tout cela et beaucoup d’autres raisons encore font que cette règle tombe, de plus en plus, en désuétude. Ce n’est plus Dieu qui règle la vie des hommes et se préoccupe de leur sort; c’est l’homme lui-même, à l’aide de sa liberté, qui doit décider du sort de sa vie. C’est ainsi que dans certains pays, nous trouvons déjà des législations qui laissent aux malades en phase terminale de leur maladie la possibilité de prendre une décision finale pour l’euthanasie. Et cette tendance est en augmentation constante.

    Quelle méthode utiliser pour un travail de recherche exploratoire sur l’euthanasie? En l’occurrence, nous partons de la définition de l’euthanasie pour voir, à travers l’histoire jusqu’à nos jours, sa pratique. La décision de mettre fin à une vie est prise soit par l’intéressé lui-même, soit par le médecin, soit par une autre personne de son entourage. La décision peut-être active ou passive, c’est-à-dire faire mourir ou laisser mourir. Face à notre mort prochaine, que nous soyons sur un lit d’hôpital ou malade à la maison, nous devons connaître nos droits et savoir à quoi nous en tenir face au médecin. Nous pouvons être adulte et autonome, enfant en bas âge ou adulte non compétent et nous retrouver confrontés au paternalisme d’un tuteur, mais, tout bien pesé, nous devons nous prononcer ou laisser la charge au médecin. Faudrait-il par tous les moyens préserver la vie?

    Cela étant, la presque totalité des livres et des travaux utilisés dans ce travail est de langue anglaise. Il ne s’agit pas là d’un choix délibéré de notre part. Nous avons constaté, tout au long de nos recherches, que la plupart des travaux étaient effectués de l’autre côté de l’Atlantique aux États-Unis ou en Grande-Bretagne. À cela s’ajoute le fait de la présence, dans ces pays, des grands centres de recherche et des bibliothèques spécialisées. Ces possibilités et ces moyens sont presque inexistants en Europe continentale.

    Ce travail ne se focalise pas uniquement sur le problème de l’euthanasie dans un pays spécifique. Il recense bien sûr tout ce qui se passe en Europe et en Amérique. Cela ne veut pas dire que le problème de l’euthanasie ne se pose pas ailleurs, mais cet état de choses est surtout dû au manque de recherches approfondies et d’une littérature adéquate en la matière. Pour ne pas fausser les résultats des recherches, ce travail ne privilégie pas une position particulière sur l’euthanasie. Les arguments avancés de deux côtés, le contre et le pour, se valent en pratique les uns comme les autres.

    Le problème qui est posé, ici, n’est pas celui de résoudre ou de supprimer la souffrance et la mort, mais bien de trouver un moyen acceptable pour mourir dans la dignité. L’euthanasie pose problème, parce que l’on arrête brusquement et volontairement la vie, même si celle-ci se trouve dans une phase finale de maladie. Comment arriver à résoudre ce problème? On pourrait arriver à un consensus du fait que l’on choisit une position au détriment d’une autre ou tout simplement on reste sur le statu quo. Une autre solution serait d’étudier cas par cas et d’implémenter l’euthanasie pour les appropriés. C’est ce qui se fait actuellement dans des pays comme la Hollande ou la Belgique.

    0.2 Les arguments contre ou pour l’euthanasie:

    Contre:

    1. La fin de la vie se présente comme étant sous le seul contrôle de Dieu. Les hommes ne doivent pas s’ingérer dans ce domaine.

    2. Il existe une tradition presque universelle qui est contre la mise à mort d’une vie innocente par des moyens visibles. Il serait une erreur d’abandonner cette tradition.

    3. La réponse humaine que l’on peut donner à une personne qui souffre est de s’occuper de ses besoins et non de la faire mourir. On peut alléger les souffrances¹ sans toutefois mettre fin à la vie d’un patient. Faire mourir quelqu’un représente une expérience inhumaine à la fois pour celui qui met en œuvre l’action et pour celui ou celle qui est tué(e).

    4. Tout le monde a le devoir de se garder de commettre le suicide. Chaque vie humaine, même celle se trouvant en fin de vie, possède de la valeur et de la dignité.

    5. C’est difficile, voire impossible de vérifier si, oui ou non, la décision pour l’euthanasie est raisonnable et bien fondée. La plupart des gens qui sont très malades sont aussi des gens très déprimés. En outre, ces malades sont souvent face à la pression de la part des membres de leur famille ou des amis qui bénéficieraient de leur mort.

    6. L’implication des médecins et des infirmiers dans l’euthanasie directe et active sape les bases éthiques de la médecine et de la profession d’administration des soins de santé.

    7. En pratiquant l’euthanasie, nous serons obligés de mettre en place des dispositions horribles et déshumanisantes.

    8. L’euthanasie légalisée ajouterait de la peur du côté des malades et des mourants qui se sentiraient être victimes de l’euthanasie positive involontaire.

    Pour:

    1. La prééminence de Dieu est sans importance pour les non-croyants. De surcroît, certains croient en un Dieu qui ne voudrait pas que la mort puisse tarder à venir.

    2. La civilisation occidentale est une civilisation parmi tant d’autres. L’épreuve de toute culture réside dans sa capacité à changer et à s’adapter aux problèmes de son temps.

    3. Mettre fin aux souffrances est moins mauvais que de les prolonger. Nous devons répondre à ceux qui souffrent et aux mourants qui nous le demandent avec beaucoup d’attention.

    4. La vie d’une personne qui souffre peut devenir inutile, et c’est justement à ce moment-là qu’il faut avoir le courage de l’arrêter.

    5. Il faut donner à chaque personne la possibilité de réaliser ses propres choix. Les gens déprimés peuvent aussi faire des choix rationnels et ainsi permettre aux membres de leurs familles d’être soulagés par leur décès.

    6. Les médecins et les infirmiers sont mieux placés pour aider les malades en phase finale à mourir comme il faut. Pour ceux qui n’ont pas de scrupules en ce qui concerne la pratique de l’euthanasie, il ne faudrait pas qu’ils soient empêchés de le faire à l’aide des codes professionnels ou des droits civils.

    7. Prévoir le temps, le lieu et la manière dont on va mourir ne semble pas du tout inhumain. Cela serait éprouvant, mais on ne pourrait pas nier que la mort soit une expérience éprouvante. Il vaut mieux avoir affaire à la fin des souffrances d’un être aimé plutôt que d’assister impuissant à ses souffrances atroces.

    8. Les personnes malades seraient dans une situation confortable si elles pouvaient avoir la possibilité de gérer elles-mêmes leur mort.

    Voyons de plus près ce que ces arguments veulent dire.² Commençons par le premier argument contre l’euthanasie: « La fin de la vie se trouve sous le contrôle de Dieu. Les hommes ne doivent pas s’ingérer dans ce domaine. » Cet argument laisse entendre qu’il existe un temps pour mourir, et que Dieu seul en connaît les tenants et les aboutissants. Les patients qui sont en phase terminale de leur maladie ou les personnes qui savent qu’un mauvais diagnostic a été prononcé à l’égard de l’un des leurs et qui posent la question au médecin de savoir combien de temps ce dernier a encore à vivre, reçoivent presque toujours la même réponse, à savoir, que personne ne sait avec exactitude ni l’heure ni le jour. Et l’homme doit respecter le rôle mystérieux de Dieu en ce qui concerne le moment ultime de la vie d’une personne.

    Par contre, pour les non-croyants, partisans de l’euthanasie, « la prééminence de Dieu est sans importance. De surcroît, certains croient en un Dieu qui ne voudrait pas que la mort puisse tarder à venir. » Cette objection met en avant le fait que nous vivons dans des sociétés profanes et pluralistes dans lesquelles les affaires civiles ne devraient pas être décidées sur base des croyances religieuses de certains ou même de la plupart des citoyens. Par conséquent, modifier l’éthique médicale et les droits civils pour que l’euthanasie devienne acceptable ne devrait pas être entravé sur base des sentiments religieux.

    Cette dernière objection nous propose d’examiner le concept sous-jacent de Dieu et laisse entendre que peut-être Dieu serait moins intéressé à voir la vie se dérouler de cette manière jusqu’au dernier souffle plutôt qu’une libération miséricordieuse des souffrances de ces personnes qui sont en train de mourir. Cet argument voudrait montrer que Dieu serait plutôt du côté de ceux qui favorisent l’euthanasie que du côté de ceux qui s’y opposent.

    Le deuxième argument contre l’euthanasie fait recours à la tradition pour laquelle il existait « une tradition qui est presque universelle et qui est contre la mise à mort d’une personne innocente par des moyens manifestes. Ce serait une erreur d’abandonner cette tradition. » Cet argument cherche à transmettre l’impact de la distinction qui existe entre les vies innocentes et les vies non innocentes. C’est ainsi que nous trouvons dans les sociétés occidentales la considération que la personne humaine mérite du respect, de l’honneur et l’idée que la vie des personnes innocentes doit être protégée. Les personnes qui ne sont pas innocentes comme les criminels, les agresseurs injustes ou les soldats ennemis peuvent être défendus même lorsque l’on utilise la force. Permettre des actions qui peuvent conduire à la mort, serait, en tout cas, prendre des mesures injustifiables qui conduiraient vers une pente savonneuse. Celle-ci veut tout simplement dire, dans ce contexte, qu’il ne serait pas une suite majeure qui nous mènerait de l’euthanasie des gens innocents qui la demandent vers l’euthanasie des gens innocents qui ne la demandent pas comme les enfants, les attardés mentaux et les personnes âgées et fragiles. Pour le bien de la société, le tabou contre le meurtre des innocents doit rester en place.

    L’argument pour l’euthanasie nous rappelle que « la civilisation occidentale est une civilisation parmi tant d’autres. L’épreuve de toute culture réside dans sa capacité à changer et à s’adapter aux problèmes de son temps. » Il est sans doute vrai que dans la civilisation occidentale, on trouve, à un moment donné, une tendance qui défendait à tenir compte du meurtre des gens non innocents alors qu’il existait une prohibition absolue et générale de ne pas prendre pour cible des gens innocents. Cette tradition représente un effort salutaire pour sauvegarder le droit à la vie de la personne innocente. Ce droit défend aux autres d’agresser ou de s’en prendre à cette vie. Cependant, cette tradition ne devrait pas être interprétée de manière à signifier que les individus ne possèdent pas le droit de choisir librement de mettre fin à leur vie lorsque celle-ci devient trop pénible à cause des afflictions, de la fragilité et surtout à cause du fait que l’on se trouve en phase finale de la maladie. La recommandation biblique «Tu ne tueras pas » a toujours été qualifiée comme étant une exception. Pour que la société puisse souscrire encore à une autre exception afin de tenir compte de l’euthanasie positive volontaire, cette disposition n’ébranlerait pas toute la civilisation, mais ajouterait plutôt à sa légitimité en mettant à l’épreuve son humanité et sa faculté d’adaptation.

    Le troisième argument contre l’euthanasie se trouve du côté de la personne qui souffre.

    « La réponse humaine à une personne qui souffre est de s’occuper de ses besoins et non de la faire mourir. On peut alléger les souffrances sans toutefois mettre fin à la vie d’un patient. Faire mourir quelqu’un représente une expérience inhumaine à la fois pour celui qui met en œuvre l’action et pour celui ou celle qui perd la vie. » La vie humaine est marquée par sa finitude. Les hommes possèdent un contrôle limité de leur vie; mais en définitive, ils sont forcés d’accepter les phénomènes auxquelles ils ne peuvent porter aucun changement. La maladie et la mort tombent dans cette catégorie. La réponse humaine à une personne qui est en train de mourir est de lui tenir compagnie et de soulager son malaise. Il n’y a aucune raison médicale ou éthique pour priver une personne de tout traitement médical dont elle a besoin pour soulager ses douleurs et la maintenir dans une situation agréable. On pourrait même, pour la majeure partie des gens, établir un régime des soins palliatifs dans les installations des soins de santé ou à la maison. Tenir compagnie à un mourant et prendre soin de ses besoins immédiats est une tâche difficile, mais pas une tâche dépourvue de bienfaits. Face à la mort, il arrive que l’on puisse s’ouvrir et établir une communication réelle. Certains gardiens des malades racontent fréquemment comment leurs expériences avec les patients se trouvant en phase finale de leur maladie, avec leurs membres de famille ou leurs amis les ont aidés à accepter finalement leur propre mort à eux.

    Étant donné le fait que la nature possède ses propres lois, ainsi chaque vie humaine se termine par la mort. Les personnes mûres peuvent accepter ce fait qui fait réfléchir et chercher l’achèvement de leur développement humain en y associant un visage humain à ce processus inévitable de la mort. Si nous décidons que notre rôle face à la mort n’est pas d’être seulement témoins pendant que nous donnons des soins aux mourants, mais celui plutôt de pouvoir nous attribuer le droit de tuer ces mourants, alors nous aurons pris des dispositions regrettables. Si on arrivait à accepter l’euthanasie, on devrait se poser la question de savoir ce qui arriverait à ces individus qui se trouvent sur leur lit de mort et, le moment venu, à nous-mêmes. On pourrait avancer comme réponse à cette question que la vie de ces mourants se terminerait par ce que l’on serait en mesure d’appeler peut-être à tort une agression. Les choses seraient vraisemblablement même pires pour les vivants qui se chargeraient de mettre à mort les malades et les faibles, parce qu’ils devraient vivre avec leur conscience pendant qu’ils essaient de justifier, à maintes reprises, ce que les sociétés civilisées et l’éthique médicale ont depuis longtemps condamné. Il est difficile de rationaliser un rôle de meurtrier et encore plus difficile de vivre avec des conséquences psychologiques provenant du fait que l’on aura assumé ce rôle.

    Venons-en maintenant à l’argument pour l’euthanasie qui s’appuie sur les souffrances. « Mettre fin aux souffrances est moins mauvais que de les prolonger. Nous devons répondre à ceux qui souffrent et aux mourants qui nous demandent la libération avec beaucoup d’attention. » Si une personne refuse d’endurer les souffrances lorsque l’on se trouve face à la mort, cela n’a pas de sens de vouloir forcer cette personne à subir ces souffrances uniquement pour satisfaire les scrupules éthiques d’une autre personne. Quiconque s’oppose à l’euthanasie ne peut se mettre à l’appliquer; et il n’y a pas de danger à se faire euthanasier contre sa propre volonté. Répondre à une personne qui désire mettre fin à ses jours en lui assurant que vous allez lui donner assez de cachets contre les souffrances et que vous allez lui tenir compagnie, cela ne serait pas nécessairement convenable. Pour certaines personnes, il faut reconnaître qu’il s’agit d’un petit pourcentage, aucune médication contre les souffrances ne sera suffisante. Pour les autres, la demande pour la libération par l’euthanasie n’est pas faite à cause des souffrances physiques que l’on endure, mais plutôt à cause d’autres raisons comme le manque de dignité provenant de la fragilité et du fait que l’on ne serait plus capable de gérer son hygiène personnelle. En plus, beaucoup de ces personnes en phase finale de leur maladie ne sont pas réconfortées en ayant des soigneurs et des membres de leur famille à leurs côtés; elles désirent terminer le plus tôt possible le dernier chapitre de leur vie par l’euthanasie. La réponse compatissante à une demande libre et fondée sur la libération par l’euthanasie est d’aider le mourant à mourir rapidement et sans souffrance.

    Le quatrième argument contre l’euthanasie met l’accent sur la valeur et la dignité de la vie humaine. « Tout le monde a le devoir de se garder de commettre le suicide. Chaque vie humaine, même celle se trouvant en fin de vie, possède de la valeur et de la dignité. » La responsabilité que l’on a de ne pas commettre le suicide est une obligation qui s’étend pour toute la vie; cette exigence ne s’arrête pas lorsqu’une personne devient très fragile ou qu’elle entame la phase finale de sa vie. Il y a une obligation éthique de respecter et d’apprécier aussi bien sa propre vie que celle des autres. Cette obligation éthique est renvoyée dans la sphère légale par des lois qui font qu’il est illégal de commettre le suicide ou d’aider une autre personne à commettre le suicide. Le résultat que nous avons de cette tradition éthique et de la sanction légale est la falsification de l’opposition constante envers le suicide. En maintenant que cette valeur et cette dignité étaient intrinsèques à chaque vie, même une vie se trouvant en fin de parcours, nous nous efforçons de respecter et d’honorer les personnes se trouvant à la fin de leur vie en les aidant à vivre pleinement leurs derniers jours.

    L’argument pour l’euthanasie s’appuie sur les souffrances pour dire qu’il faut arrêter au plus vite cette vie. « La vie d’une personne qui souffre peut devenir inutile, et c’est justement à ce moment-là qu’il faut avoir le courage de l’arrêter. » Les personnes encore en mesure de produire et en bonne santé ont un devoir de contribuer à la société, et, par conséquent, elles doivent tout faire pour ne pas arriver à commettre le suicide. Celles qui sont en phase finale de leur maladie et fragiles, n’ont plus rien pour continuer à contribuer pour la société; elles n’ont ainsi aucune obligation à continuer à vivre. Cela a tout un sens à ce que les institutions sociales comme le système légal puissent renforcer leur combat contre le suicide et le suicide assisté. Une telle argumentation aide certainement beaucoup d’adolescents et d’adultes productifs à ne pas mettre fin à leur vie. Mais pour les personnes dont le temps à vivre est bref et dont la qualité de la vie est très pauvre, la raison qui empêche les gens de ne pas se tuer reste, en fin de compte, peu convaincante. Si ces personnes sentent qu’elles sont inutiles pour les autres et que leur vie est vraiment pénible, il est peu persuasif d’affirmer que ni le suicide, ni l’euthanasie ne sont moralement répréhensibles.

    Le cinquième argument contre l’euthanasie met l’accent sur l’état psychique et sur la situation de pression que subissent les malades en fin de vie. « C’est difficile, voire impossible de vérifier, si la décision pour ou contre l’euthanasie est raisonnable et bien fondée. La plupart des grands malades sont aussi des gens très déprimés. En outre, ces malades subissent souvent la contrainte de la part des membres de leur famille ou des amis qui bénéficieraient de leur mort. » Ceux qui soutiennent l’euthanasie font presque toujours allusion à la liberté individuelle et au droit sans entraves que possède tout individu de dire qu’il en a assez. À première vue, cela apparaît comme un argument émotionnel parce qu’il se rapporte aux dernières semaines ou aux derniers mois de la vie, et en ce qui concerne un sujet à controverse, il spécifie que la prise de décision revient uniquement à la personne malade ou au mourant. Malheureusement, les décisions essentielles en faveur de l’euthanasie par les personnes malades sont rarement aussi sincères que ne le suggèrent les partisans de la libération de soi par l’euthanasie. La plupart des gens qui sont très fragiles ou très malades sont aussi déprimés et se sentent souvent découragés. Cet état émotionnel peut être la raison pour laquelle ces personnes demandent l’euthanasie. Le moyen raisonnable pour répondre à une personne déprimée est de lui offrir de l’aide, de la médication et de la thérapie pour l’aider à s’occuper de son état dépressif. Faire mourir une personne dépressive n’est ni une réponse raisonnable ni une réponse compatissante.

    Les personnes malades et dépressives sont également sujettes à la contrainte. Les membres de leurs familles et les amis proches, qui semblent fatigués de prendre soin de ces malades ou sont inquiets à cause des problèmes financiers qu’ils peuvent avoir, sont capables d’influencer de manière verbale ou autre, leur désir de mettre fin à la vie de leurs proches. Puisqu’il est pratiquement impossible de vérifier, si le fait de consentir aux demandes des autres motive une personne à demander l’euthanasie, il faudrait que les dispositions éthiques et légales actuelles qui sont contre l’euthanasie restent sauves.

    L’argumentaire soutenant l’euthanasie recourt au choix libre qu’un homme libre doit effectuer à un moment critique de sa vie. « Il faut donner à chaque personne la possibilité de réaliser ses propres choix. Les gens déprimés peuvent aussi faire des choix rationnels et ainsi permettre aux membres de leurs familles d’être soulagés par leur décès. » L’autonomie du patient et le principe d’autodétermination exigent que nous puissions respecter les choix que font les individus. La plupart des gens qui passent par des rudes épreuves se sentent quelque peu déprimés; mais cela ne veut pas dire qu’ils ne sachent pas ce qu’ils désirent ou qu’ils aient renoncé au droit dont ils disposent pour que leur désir soit accompli. Pour se rendre compte que les gens sont lucides et certains de ce qu’ils choisissent, entre autres qu’ils préfèrent l’euthanasie, il faudrait qu’ils passent par une ou deux consultations psychiatriques. L’expertise de ces médecins pourra servir de soutien ou de rejet de la demande du patient.

    En ce qui concerne le fait qu’une personne soit contrainte d’accepter l’euthanasie, il existe des garanties qui doivent être mises en place pour prévenir ce genres de situations où l’on dicterait aux patients les choix à faire. Un contrôle minutieux des relations familiales avec les patients ainsi que des entretiens approfondis et répétés avec les patients doivent se faire avant d’arriver à donner un accord pour l’euthanasie. Lorsque l’on a des réserves en ce qui concerne la liberté du patient à prendre des décisions, il faudrait se garder de pratiquer l’euthanasie. Il est important de sauvegarder les gens malades et les mourants de la contrainte; mais il est également important de se rappeler que la pratique actuelle force chaque personne à accepter la mort selon ses propres termes. Les patients, qui ne sont pas contraints et qui possèdent la capacité à prendre des décisions, ont un droit à choisir la fin de leurs souffrances d’après leurs termes.

    Le sixième argument contre l’euthanasie se base sur le fait que la profession d’administration des soins de santé se trouverait en danger si l’on acceptait la pratique. « L’implication des médecins et des infirmiers dans l’euthanasie directe et active sape les bases éthiques de la médecine et la profession d’infirmière. » Les médecins et les infirmiers appartiennent à la profession médicale qui est une profession dont l’identité et la philosophie sont séparées et plus grandes que leurs notions individuelles sur ce qui est moralement acceptable ou inacceptable. Les médecins et les infirmiers font partie d’une profession consacrée aux soins de santé et à la guérison. Le fait qu’ils acceptent de faire partie de cette profession, fait qu’ils doivent accomplir la mission assignée par la profession. Tolérer que les médecins ou les infirmiers qui pensent à tort que faire mourir les patients est moralement acceptable rendrait à la profession un dommage irréparable et inacceptable. Les médecins, les infirmiers, les patients comme les législateurs, les juges, les philosophes et les citoyens en général, ont l’obligation de préserver et de protéger la dignité et l’intégrité de la profession de la médecine et la profession d’infirmière. Par conséquent, permettre la pratique de l’euthanasie par des médecins et des infirmiers en se basant sur le cas par cas, représenterait un compromis absurde et une irrationalité fondamentale.

    L’argument pour l’euthanasie demande que les professionnels de la santé aident ceux qui veulent mettre fin à leur vie. « Les médecins et les infirmiers sont mieux placés pour aider les malades en phase finale à mourir comme il faut. Pour ceux qui n’ont pas de scrupules en ce qui concerne la pratique de l’euthanasie, il ne faudrait pas qu’ils soient empêchés de le faire par des codes professionnels ou des droits civils. » Dans le pire des cas d’euthanasie, l’action est sabotée et la personne ne meurt pas, mais survit dans des conditions absolument malheureuses. Cela peut arriver un jour, si la personne ne connait pas la quantité de dose létale que contiendrait une médication ou si cette personne n’arrive pas à avaler le nombre de pilules requises. Habituellement, une personne profane, qui décide de mettre fin à ses jours, va demander de l’assistance d’un ami ou d’un membre de la famille. Mais si cet ami ou ce parent ne s’y connaît pas en matière de médication ou s’il arrive qu’il ne soit pas préparé au suivi des procédures à prendre lorsque cela est nécessaire, alors l’assistance est pratiquement sans valeur.

    Ce que désire la personne qui va mettre fin à ses jours on en conviendra, est une aide qualifiée d’un médecin ou d’une infirmière ou peut-être d’un pharmacien dont la présence pourra garantir qu’aucune erreur médicale ne se produira. Et que cette personne sera capable de faire et terminer le travail promptement dans des cas invraisemblables où une dose prescrite pour provoquer la mort ne puisse pas travailler comme il faut aussi rapidement ou efficacement que voulu.

    Soutenir que les médecins seront définitivement empêchés de pratiquer l’euthanasie par les exigences d’une vague responsabilité professionnelle, c’est s’imaginer que la formation et le savoir-faire des médecins et des infirmiers leur imposeraient une identité que beaucoup vont refuser. Il ne faudrait pas qu’il y ait des barrières qui empêcheraient les médecins et les infirmières techniquement qualifiés et qui sont, par philosophie, à l’aise avec l’euthanasie pour aider les patients qui demanderaient librement leurs services.

    Le septième argument qui se positionne contre l’euthanasie estime que si celle-ci est acceptée, il faudrait alors s’attendre à des dispositions dégradantes pour l’homme. « En pratiquant l’euthanasie, nous serons obligés de mettre en place des dispositions horribles et déshumanisantes. » Les périodes marquantes que les gens considèrent comme étant importantes dans leur vie restent des occasions sociales rares. Il en est ainsi de la naissance, des événements religieux, du mariage, le fait de devenir grands-parents et la mort, pour ne citer que ceux-là. Il existe un contraste entre l’agonie, la mort et les autres événements que nous venons d’énumérer parce que les premiers sont des événements tristes remplis d’un poids émotionnel et de larmes. Face à la mort ou à l’agonie d’un être aimé, beaucoup de personnes perdent pied. Pour elles, cela ne devrait pas arriver, du moins pas en ce moment-là. Tout est donc mis en oeuvre pour diminuer les souffrances et les peines de la personne. Leur cœur est gros et le seul meilleur état émotionnel qu’ils souhaiteraient avoir à ce moment-là, c’est la résignation tempérée par l’approbation.

    Remplacer ainsi la quête de patience, de résignation et de l’obligeance lorsque l’on se trouve en face de la mort d’un être aimé par un plan du moment, du lieu et de la manière de mettre en œuvre la mise à mort de ce même être aimé, cela constituerait un acte horrible et déshumanisant.

    Prenant à contre-pied cet argument, ceux qui sont pour l’euthanasie considèrent la fin rapide des souffrances d’un être aimé comme étant primordiale. « Prévoir le temps, le lieu et la manière dont on va mourir, cela ne semble pas du tout inhumain. Cela serait éprouvant, mais on ne pourrait pas nier que la mort soit une expérience éprouvante. Il vaut mieux avoir affaire à la fin des souffrances d’un être aimé plutôt que d’assister impuissant à ses souffrances atroces. » La mort est l’événement final de la vie de chaque personne. Pour certains, elle représente la fin de tout; pour d’autres elle est une transition vers une vie meilleure; d’autres encore voient la mort comme une délimitation spécifique dans un processus continuel de réincarnation. Tous, en tout cas, sont d’accord pour que l’on évite de parler de ce sujet. La mort est redoutable; et le seul moyen facile de faire son approche est tout simplement de nier son existence.

    Ceux qui sont raisonnables et assez réalistes pour aller au-delà de la tendance à nier la mort et jusqu’à demander l’euthanasie, font preuve d’une maturité extraordinaire. Cette force leur permet de se confronter au problème de l’euthanasie et aux détails mécaniques qui entourent la mort. Il ne s’agit pas de considérer l’euthanasie comme une affaire stressante. Mais pour ceux qui sont lucides et fermes assez pour s’impliquer davantage eux-mêmes dans le problème, il faut avoir du caractère et du courage.

    Le dernier argument contre l’euthanasie s’appuie sur la peur que les patients auraient vis-à-vis des médecins et du personnel soignant si l’euthanasie était légalisée. « L’euthanasie légalisée augmenterait la peur du côté des malades et des mourants qui se sentiraient être victimes de l’euthanasie positive involontaire. » Qu’est-ce que cela veut signifier lorsque l’on dit que l’on voudrait empêcher un membre de sa famille de souffrir en l’aidant à pratiquer l’euthanasie positive involontaire en suivant ses instructions? Peut-on mettre en place des garanties suffisantes pour empêcher des médecins sans scrupule de pratiquer l’euthanasie sur des gens fragiles et malades? Parce qu’il serait indiqué, selon eux, de voir ces malades mourir à cause des incitations offertes par les membres de leurs familles qui voudraient se débarrasser d’un malade encombrant? En posant ce genres de questions et en essayant de s’imaginer combien il serait difficile d’adapter l’euthanasie positive volontaire en fonction des circonstances de manière à ce que celle-ci ne puisse pas tomber dans une euthanasie positive involontaire, nous arrivons rapidement à constater combien il est difficile et même stupide d’approuver moralement l’euthanasie dans n’importe quelle circonstance.

    Si l’on arrivait à une approbation médicale ou légale de l’euthanasie, on augmenterait les souffrances des malades, des personnes fragiles et des mourants, étant donné qu’à côté des autres charges déjà à leur compte, ils ajouteraient aussi la peur qu’ils éprouveraient d’être tués.

    L’argument qu’avancent ceux qui sont pour l’euthanasie est que « les personnes malades seraient dans une situation confortable si elles pouvaient avoir la possibilité de gérer elles-mêmes leur mort. » Mourir reste l’événement le plus traumatisant de la vie. La mort devient plus traumatique si celle-ci se déroule selon ses propres conditions. Les personnes fragiles et malades qui sont forcées d’attendre jusqu’à ce que la maladie mine leur dernière énergie sont obligées de subir une humiliation inhumaine. Il serait de loin plus indiqué pour ces personnes de gérer elles-mêmes leur manière de mourir, de prendre elles-mêmes leur propre décision, et de décider lorsqu’elles croient en avoir assez de la vie. Si les hommes se distinguent par leur manière de raisonner et de choisir, il s’ensuit qu’au moment crucial de leur mort, ils doivent avoir un droit incontestable de décider pour eux-mêmes s’ils doivent attendre que la mort arrive d’elle-même ou de décider de couper court à leurs souffrances.

    Soutenir que les personnes vulnérables pourraient être en danger de subir l’euthanasie contre leur propre gré si l’euthanasie était légalisée, c’est tenté de décider du problème sur base d’une possibilité farfelue. Si l’euthanasie était légalisée, on mettrait en place des garanties qui éviteraient une telle possibilité. En plus, il y a actuellement pour les patients se trouvant dans des institutions des soins de santé plus de danger de mourir à cause de la surmédication. Ce qui fait que cela a peu de chance d’arriver, c’est l’intégrité du personnel médical qui prend soin des patients et dont la philosophie interdit de procéder à la mise à mort des patients sans au préalable une demande rationnelle de leur part.

    0.3 Plan du travail

    Le travail comporte douze chapitres répartis en deux parties. La première partie comprend cinq chapitres et essaye de comprendre la physionomie contemporaine de l’euthanasie. La deuxième partie renferme sept chapitres et explore dans une démarche de discernement, la situation d’une personne qui fait face à la mort. Voyons en quelques mots le contenu de ce qui sera traité dans chaque chapitre.

    Le premier chapitre donne d’abord les différentes définitions de l’euthanasie. L’euthanasie ne signifie plus aujourd’hui une mort douce comme l’indique son étymologie. Elle signifie plutôt le fait de donner la mort pour mettre fin aux douleurs. C’est ainsi que l’on distingue l’euthanasie passive de l’euthanasie active, selon que l’on décide de ne pas donner des soins appropriés en vue d’accélérer la mort ou que l’on participe d’une manière active pour hâter celle-ci. Lorsque la personne malade elle-même demande que l’on puisse mettre fin à ses jours de façon délibérée, on parle alors d’euthanasie volontaire. Elle est involontaire lorsque l’on applique l’euthanasie à une personne qui est incapable de prendre de son propre chef une décision. On peut provoquer la mort d’un patient en voulant, par exemple, alléger ses souffrances; on parle alors d’euthanasie indirecte. Elle est directe, si l’on se sert de certains moyens afin de provoquer sans détour la mort d’une personne. Pour une telle mort directe, on parle davantage de suicide assisté. Il s’agit ici d’un appui que l’on apporte par l’intermédiaire d’un médecin ou d’un spécialiste de soins de santé pour aider le patient à se donner la mort. Nous voyons que la signification primitive de l’euthanasie se rapporte à la façon de mourir plutôt qu’à la pratique d’une tierce personne qui prend la décision de donner la mort. C’est dire qu’il y a eu un changement progressif dans l’idée même de la mort. Mourir à la maison est différent de mourir sur un lit d’hôpital. Mourir d’un accident de voiture est différent de mourir à la suite d’une maladie chronique. Il est vrai que, in fine, on se trouve toujours face à la mort; mais les circonstances donnent à chaque mort une signification différente.

    Le deuxième chapitre analyse l’euthanasie dans l’histoire. Nous commençons par la Grèce et la Rome antique. Nous décrivons ensuite l’euthanasie tour à tour durant la période postclassique et durant le Siècle des Lumières, de l’euthanasie utilitariste, et à la fin du chapitre, nous examinons l’euthanasie durant l’époque moderne qui est la nôtre. Comme le mot l’indique, l’euthanasie est d’origine grecque et signifie une mort douce. Mais il peut aussi avoir le sens d’un suicide. Dans l’antiquité grecque classique et pendant l’ère pré-chrétienne de l’Empire romain, les Anciens ne mettaient pas l’accent sur l’acte d’accélérer la mort, mais bien sur la manière de mourir. Le plus important pour la personne, c’est de mourir dans la paix de l’esprit et avec moins de souffrance. Durant la période postclassique, on revient à la conception de l’école d’Hippocrate pour consolider la lutte contre l’euthanasie. Cela est dû particulièrement à l’influence du Christianisme et à la notion de la vie humaine comme un don venant de Dieu. C’est surtout durant la période des Lumières que nous allons trouver des discussions importantes sur l’euthanasie. Les attaques fusent d’un peu partout contre l’enseignement autoritaire de l’Église dans tous les domaines, y compris celui de l’euthanasie et du suicide. C’est à cette époque que l’on va réaliser des avancées scientifiques importantes telles que l’isolation de la morphine et de son utilisation comme anesthésiant. On commence même à utiliser des drogues comme l’éther, le chloroforme et la morphine aussi bien pour apaiser les souffrances d’un malade se trouvant en phase terminale de sa maladie que pour mettre fin de manière délibérée à la vie d’un patient. La vision utilitariste de l’euthanasie est simple: lorsque à un moment donné, la douleur domine le plaisir, alors la vie se trouve dans un état inutile et sans valeur. S’il est difficile de renverser la tendance, à ce moment-là il faudrait mettre fin à cette vie. Dans le contexte culturel de notre époque, l’euthanasie a été surtout dominée par l’eugénisme et les camps de concentration nazis. Influencé par le darwinisme, le matérialisme et le positivisme, l’eugénisme de l’Allemagne nazie va mettre en place un programme d’élimination des personnes qui n’étaient pas de la race pure ou qui naissaient avec des déformations physiques. Il faut ajouter que notre époque est connue aussi pour une sécularisation à outrance de la pensée et de la vie. Cela fait qu’il n’existe plus une représentation générale et abstraite de la personne humaine. La vie humaine ne possède pas de valeur en elle-même et l’euthanasie s’établit comme un droit dans plusieurs sociétés.

    Le poids de la tradition chrétienne est vraiment énorme dans le débat sur l’euthanasie. C’est pour cette raison que le troisième chapitre examine la position de l’Église catholique sur le sujet. L’Église s’appuie sur la Bible pour s’opposer au suicide et à toute forme de mise à mort. Mais ni dans l’Ancien ni dans le Nouveau Testament, nous ne trouvons un passage où est défendu le suicide. Même le suicide de Judas dans le Nouveau Testament est considéré plutôt comme une repentance plutôt qu’un crime. C’est seulement à partir du sixième siècle que l’Église arrive à légiférer contre le suicide en se basant sur le « Tu ne tueras pas » du Décalogue. Le Berger d’Hermas, Augustin, Thomas d’Aquin, Juan de Lugo, vont, d’une manière ou d’une autre, s’opposer à la mise à mort d’une personne innocente et ils vont encourager les chrétiens à une obligation positive pour la préservation de la vie. Dans les documents théologiques et dans les documents du Magistère de l’Église, le suicide et l’euthanasie sont condamnés sans ménagement. C’est le pape Pie XII qui aura été le premier pontife romain à prendre clairement une position contre l’euthanasie. Celle-ci reste une violation de l’attribution de la vie humaine par Dieu. L’euthanasie se présente également comme un rejet par le malade d’accepter la souffrance avec le Christ. Le pape reconnaît le fait que l’homme puisse arriver à contrôler la douleur physique et à utiliser des analgésiques même si ceux-ci peuvent abréger la vie. Mais l’utilisation des narcotiques dans le but de provoquer ou de hâter la mort est illicite. C’est avec le pape Jean-Paul II, entre 1980 et 2000, que nous trouvons pour la première fois une déclaration directe au sujet de l’euthanasie. La vie humaine étant un don de Dieu, possède de la valeur. Le pape s’attaque à la culture de la mort qui semble prendre racine peu à peu dans les sociétés modernes. La vie humaine est inviolable et sacrée. C’est pour cette raison que l’euthanasie est un préjudice à la dignité de l’homme qui a été créé pour la vie et non pour la mort.

    Le chapitre quatre s’intéresse au contexte légal de l’euthanasie. Pour vivre ensemble les hommes essayent de régler, d’une manière ou d’une autre, leur vie commune en société. L’euthanasie étant un contrôle de la mort, on peut bien se demander dans quelle mesure une société pourrait arriver à une réglementation portant sur la mort. La décision de l’euthanasie relève-t-elle du seul individu ou de la société tout entière? La survie et le bien-être de la société dans l’ensemble ont la préséance sur la survie et le bien-être de l’individu. Si la société parvenait à légiférer sur l’euthanasie, s’agirait-il alors d’un droit de liberté, d’un droit de non-ingérence ou tout simplement d’un droit positif? Si l’on considère les droits interdépendants d’autodétermination, d’autonomie, de la vie privée et de la liberté, à ce moment-là chaque individu pourrait prendre des décisions en rapport avec sa mort. En revanche, lorsque l’on considère le droit à la vie et de son inaliénabilité, alors on ne saurait légaliser l’euthanasie sans des garanties législatives sévères. S’il est impossible d’avoir des assurances suffisantes et cohérentes qui sont nécessaires, on risque de ce fait d’ouvrir la boîte de Pandore des abus. Cela se traduirait par un glissement vers la pente savonneuse. Celle-ci est un sophisme qui veut dire que, lorsque l’on accepte un compromis, celui-ci va fatalement conduire à un cercle vicieux qui débouchera nécessairement sur une catastrophe. Ce qui fait qu’il faudrait par tous les moyens s’abstenir d’accepter de faire les premiers pas qui risquent d’entraîner des pratiques additionnelles qui sont moralement inacceptables. Des travaux effectués dans certains pays occidentaux ne conduisent pas à dire que l’acceptation de l’euthanasie conduit inévitablement à une pente savonneuse.

    Le cinquième chapitre analyse la situation de l’euthanasie dans certains pays, principalement aux Pays-Bas et en France. Le premier a déjà légalisé l’euthanasie, tandis que le second ne l’a pas encore fait. Dans presque tous les pays l’euthanasie et le suicide assisté sont considérés comme un meurtre, et, donc, comme des actes criminels. Les Pays-Bas est le premier pays au monde à avoir légalisé l’euthanasie. C’est l’argument de nécessité qui a poussé ce pays à la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté. Les poursuites judiciaires en 1973 d’un médecin qui avait aidé une femme de 78 ans à trouver la mort, sonnèrent comme un déclic initial pour l’intérêt que porta toute la société néerlandaise au problème de l’euthanasie. Il était courant à cette époque que les médecins puissent administrer des analgésiques aux malades qui étaient en phase terminale de leur maladie, même si la dose donnée pouvait accélérer la mort du patient. Vers la fin des années 1970, on assiste à un consensus au niveau politique et au niveau public à propos de l’euthanasie et du suicide assisté comme des actions théoriquement acceptables. Avant d’arriver à sa codification, la loi néerlandaise progressera à travers une suite des cas qui seront traités par la Cour Suprême. La loi sur la fin de vie sur demande et du suicide assisté de 2001 ne changera pas beaucoup d’éléments importants de la justification de nécessité dans les éventualités d’euthanasie. La situation de l’euthanasie en France évoluera autrement. Il existe en effet dans ce pays un organe consultatif sur le sujet. Le Comité Consultatif National d’Euthanasie ou CCNE donne des conseils au gouvernement et aux deux Chambres de représentants sur des questions éthiques. Ce comité désapprouve fortement tout avant-projet de décriminalisation de l’euthanasie. La loi reconnaît pourtant le droit de refuser le traitement, surtout pour les patients se trouvant en phase finale de leur maladie. On tient compte des décisions des mandataires des malades se trouvant à la fin de leur vie et du refus qu’ils peuvent émettre à l’avance d’arrêter à n’importe quel moment toute médication.

    Au sixième chapitre, nous discutons des droits du patient. Respecter les droits du patient, c’est contribuer à améliorer les soins du malade. L’Association américaine des hôpitaux (AHA) propose douze points susceptibles de soutenir ce programme d’aide aux malades. Parmi ces droits, on trouve entre autres, le droit aux soins, le droit à l’information, le droit de refuser les soins, etc. Parmi tous les droits disponibles, nous nous intéressons exclusivement dans ce chapitre au droit à l’information, et, en passant, au droit de refus des soins. Un séjour à l’hôpital réduit le patient à des conditions de passivité et d’impuissance. Lorsque le médecin ausculte un patient, il arrive à un diagnostic et à un pronostic. Il est vrai que le premier bénéficiaire est sans aucun doute le malade qui devra avoir la primeur des informations, dans la mesure où sa capacité à choisir librement découle des informations qui sont à sa disposition. Mais ici la pratique nous montre tout à fait autre chose. Le médecin donne en premier lieu les informations aux membres de la famille du patient, surtout s’il s’agit des mauvaises nouvelles. On pense particulièrement au fait qu’en informant les proches du patient, ceux-ci pourront bien peser dans la décision du patient. Sur base de ces informations, le patient peut comparer les bénéfices et les risques du traitement qu’il juge nécessaire de prendre par rapport à l’estimation des autres thérapeutiques alternatives. Les informations à fournir concernent tout ce qui a trait à l’individu malade. Selon la norme professionnelle, le médecin est obligé de fournir au patient toutes les informations requises; des informations que le patient peut comprendre ou celles qu’il désire avoir. Le praticien le fera en se plaçant lui-même du côté du bien du patient. Quant à la norme objective, elle exige que le souci de révéler les informations soit basé sur la nécessité de décrire au patient la marche à suivre en énumérant tous les risques et dangers matériels qui sont liés à la thérapie. Si un patient est plus intéressé à son autonomie qu’aux soins à recevoir, alors la norme subjective sera moralement plus attrayante pour lui. Le patient voudrait en faisant ce choix maximiser ses intérêts. Mais, le médecin est-il obligé de tout dire au patient? Par le passé, le médecin s’en tenait à l’occultation et ne devait rien dire au patient. Mais aujourd’hui, le malade a droit à l’information. Ayant reçu toutes les informations nécessaires, le patient est dès lors obligé de donner un consentement éclairé qui implique son assentiment ou celui des tuteurs, pour les soins. Mais tout se fera en dehors de toute contrainte. Un consentement éclairé pour la thérapie est étroitement lié au refus des soins.

    Nous analysons au septième chapitre les relations entre le médecin et le patient. Ces relations sont empreintes de confidentialité, de respect et du droit d’égalité de traitement. Ces relations peuvent être purement professionnelles; nous pouvons avoir des relations qui sont verticales, des relations horizontales autonomes, des relations d’entreprise audacieuse. Au centre des relations entre le médecin et le patient, se trouve la confidentialité du médecin. Celui-ci doit garder secrètes les informations concernant le patient. La confidentialité est soutenue aussi bien par l’Église catholique romaine et sa théologie que par la tradition légale. Selon le point de vue philosophique, il existe deux arguments qui militent pour la protection de la confidentialité. Il y a l’argument utilitariste qui fait référence aux conséquences éventuelles à long terme; et le second argument fait allusion au respect des droits de la personne. La confidentialité porte notamment sur l’identification de la personne, le nom, l’adresse, la date de naissance, le sexe, ainsi que sur les informations médicales, le diagnostic, le résultat des examens, les détails du traitement, etc. On trouve également des informations sociales sur la famille, les finances, ainsi que les informations d’ordre psychologique. Pour violer la confidentialité médicale, il faut que la confidentialité entre en conflit avec le droit d’une tierce personne innocente ou lorsqu’il y ait conflit entre la confidentialité et les droits ou les intérêts de la société en général. Il est demandé particulièrement au médecin d’avoir du respect envers le patient et que les éléments d’appréciation comme l’âge, la maladie ou l’infirmité, la croyance, l’origine ethnique, le sexe, la nationalité, le parti politique, la race, le penchant sexuel ou de statut social ne troublent pas les relations existant entre son devoir et le patient. Dans les relations professionnelles, nous sommes en présence des rapports exclusivement instrumentaux. Il s’agit de réaliser des diagnostics et des procédures thérapeutiques. On exerce sur le patient les différentes techniques médicales. Étant donné le fait que les relations professionnelles soient oppressives, lorsque l’expert décide à partir de ses compétences, alors le malade est obligé de tout accepter. À l’opposé des relations oppressives, nous avons des relations dociles. Ici, le patient donne des ordres et le médecin les exécute. Nous avons des relations harmonieuses lorsqu’elles sont ouvertes et horizontales. Les relations verticales entre le médecin et son patient débouchent sur le paternalisme et la dépendance. Les relations autonomes qui se développent après la Deuxième Guerre mondiale vont insister sur la capacité de décision de l’adulte malade. On ne saurait donner un traitement sans l’accord du malade, et le médecin ne pourra forcer un malade à prendre un traitement. Les relations entre le patient et le médecin ont tendance à se réduire à un esprit d’entreprise. Le rôle du patient se comparerait à celui du client, et celui du médecin serait celui du vendeur.

    Le huitième chapitre explore le problème d’autonomie dans la décision prise par un adulte compétent qui se trouve face à la maladie. L’autonomie qui prend ses racines dans les cités-états grecques veut dire au niveau personnel le droit que détient une personne d’exercer un pouvoir de direction dans les décisions concernant son corps et sa vie. Cette personne reste libre de toute emprise externe et possède les pleins pouvoirs dans ses affaires. Cela implique la non-ingérence et la connaissance dans les choix de la personne. C’est aux XVIIe et XVIIIe siècles que ce terme trouvera une formulation plus adéquate avec John Locke et Immanuel Kant. Du point de vue psychologique, on serait amené à attacher l’autonomie à l’identification d’un individu avec ses propres désirs. Mais ici ses propres convictions et ses désirs motivants doivent être cohérents et constants d’une certaine manière. Certains auteurs vont considérer l’autonomie comme étant un processus dans le sens où elle est le développement de l’identité propre d’un individu à travers les circonstances de la vie. Comme affirmation de soi, l’autonomie s’oppose au paternalisme et au moralisme. Le premier veut dire que nous avons le droit de nous introduire dans la vie des autres pour leur propre bien nonobstant leurs désirs ou leurs jugements. Le moralisme nous donne le droit d’ordonner la vie des individus dans le but de protéger la moralité. Face à la souffrance et à la mort, et aussi à l’incapacité physique de certains malades pour exercer leur droit d’autonomie, le malade peut déléguer son pouvoir de décision à une tierce personne. Chaque individu développe des stratégies pour la résolution des problèmes. Ces stratégies sont acquises chez soi à la maison, à l’école, au travail, en voyage, etc. Quant à Bergsma et Thomasma, ils arrivent

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