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Rarámuri: Liberté Au Crépuscule: Souvenirs De La Tarahumara
Rarámuri: Liberté Au Crépuscule: Souvenirs De La Tarahumara
Rarámuri: Liberté Au Crépuscule: Souvenirs De La Tarahumara
Ebook268 pages2 hours

Rarámuri: Liberté Au Crépuscule: Souvenirs De La Tarahumara

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About this ebook

Ce livre nest pas une tude ethnologique des indignes, mais un recueil dexpriences vcues, de brefs rcits, humains et ralistes, qui permettent de connatre petit petit les diffrentes facettes de la vie des gens qui y habitent, leurs rves et croyances, et les implications que la rencontre de races et cultures a entrane. Cest un thme de toute actualit dans ces temps de globalisation dans lesquels, pig dans le vertigo du modernisme sauvage, ltre humain sest gar dans labsurde et le grotesque, dans la superbe et lgocentrisme qui lont men irrmissiblement au vide de lme.

LanguageFrançais
PublisherAuthorHouse
Release dateDec 26, 2013
ISBN9781491828847
Rarámuri: Liberté Au Crépuscule: Souvenirs De La Tarahumara

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    Rarámuri - Dr. Carlos Maldonado Ortega

    AuthorHouse™

    1663 Liberty Drive

    Bloomington, IN 47403

    www.authorhouse.com

    Phone: 1-800-839-8640

    © 2013, 2014, 2015 . All rights reserved.

    This French version is a translation made by the author himself from his original book in Spanish.

    No part of this book may be reproduced, stored in a retrieval system, or transmitted by any means without the written permission of the author.

    Published by AuthorHouse 01/28/2015

    ISBN: 978-1-4918-2885-4 (sc)

    ISBN: 978-1-4918-2884-7 (e)

    Library of Congress Control Number: 2013919363

    Any people depicted in stock imagery provided by Thinkstock are models,

    and such images are being used for illustrative purposes only.

    Certain stock imagery © Thinkstock.

    Because of the dynamic nature of the Internet, any web addresses or links contained in this book may have changed since publication and may no longer be valid. The views expressed in this work are solely those of the author and do not necessarily reflect the views of the publisher, and the publisher hereby disclaims any responsibility for them.

    12831.png

    À MA MÈRE :

    qui forgea dans ses entrailles mon être.

    À MON PÈRE :

    qui me guida par les ardus chemins

    du langage.

    AUX DEUX :

    pour m’arracher du néant et me lancer

    à l’incertaine aventure de découvrir

    cet Univers merveilleux.

    REMERCIEMENTS

    Je veux exprimer ma profonde gratitude à Monsieur François Verdier pour sa méticuleuse et patiente révision de la traduction française que j’ai faite de ce livre, dont le texte originel j’écrivis en Espagnol. Son aide a été inappréciable, mais surtout son sincère engagement avec le succès de ce projet. Et, bien sûr, je veux aussi remercier Monsieur Jean Claude Guillemot pour me mettre en contact avec François.

    Mille mercis, vraiment.

    SOMMAIRE

    Chapitre I – LA TERRE

    a) – Une Découverte Inespérée

    b) – Source de Vie et de Mort

    Chapitre II – LA FATALITÉ D’UNE MALHEUREUSE RENCONTRE

    Chapitre III – L’HERITAGE DU MODERNISME

    a) – Dans les Entrailles de la Terre

    b) – Un Guerrier Invincible

    c) – L’Ennemi Occulte

    d) – Au Royaume des Cieux

    Chapitre IV – FONDANT LE PRÉSENT À L’HIER

    a) – La Survivance

    b) – Une Brèche Incontournable

    c) – Perçant L’Intérieur

    d) – Les Vicissitudes d’une Lutte Stérile

    e) – Maîtres du Syncrétisme

    Chapitre V – CES VOISINS AUX FACETTES MULTIPLES

    a) – Avec le Temps sur le Dos

    b) – Un Petit Morceau de Vie

    c) – Le Frère Lico

    Chapitre VI – LE SIÈGE

    a) – Une Funeste Intrusion

    b) – Un Silencieux Dépouillement

    c) – La Blessure Mortelle

    Chapitre VII – L’INQUIÉTANTE IMPRESSION D’UN MOMENT FINAL

    15500.png

    Chapitre I – LA TERRE

    a) – Une Découverte Inespérée

    Interminable, côtoyant des précipices épouvantables, serpentant entre bois odorants de pin et de chêne, l’étroit sentier grimpe par une côte de plus en plus escarpée, comme s’il avait hâte d’arriver au ciel. La brillante lumière du soleil fend l’air cristallin et éclate en mille éclairs sur les têtes lustrées des arbres, où les oiseaux chantent en habillant leurs trilles métalliques du frais du matin. Devant moi va Marcos, mon petit guide tarahumara ; il marche vite, en jouant à sauter de pierre en pierre, avec mon sac à dos rebondissant sans cesse sur son dos, il a insisté pour le porter. Quelquefois nous nous dévions par des secrets raccourcis qui gravissent des pentes effroyables, « pou’ y arriver plus tôt ». Il a pris au grand sérieux la commission de son père: « emmène le docteur à La Mesa. Arrive chez Matías, il me semble qu’il étai’ malade. Prends bien soin de lui ! ». Marcos n’a que dix ans.

    Normalement c’est Cenobio, le père de l’enfant, qui me guide par les ravines. Dès que nous nous rencontrâmes, et qu’il apprit que je parcourais la sierra en cherchant des malades, il s’offrit pour me mener aux maisons voisines, dispersées sur l’abrupt versant. Il abandonna deux jours ses cultures, en dépit d’être à l’époque la plus critique des semailles. Cette fois-là, quand j’arrivai chez lui épuisé et désorienté, même sans me connaître il m’accueillit avec une grande amabilité en m’offrant un logement et des aliments, me traitant avec une simplicité et une sincérité qui me déconcertèrent. Ce fut alors que je connus une des traditions les plus importantes du tarahumara: le Kórima; lequel ne consiste pas à donner de l’aumône, comme on l’interprète mal dans notre société, mais exprime la solidarité avec un semblable dans l’embarras, pour l’aider à résoudre quelque problème.

    Cette fois-ci Cenobio ne put pas m’accompagner ; il a dû transporter d’urgence sa mère jusqu’au village le plus proche, à plus de quatre heures de marche, pour l’hospitaliser. Avec l’aide de quelques voisins, ils l’ont portée sur une civière improvisée de branches et couvertures. Dès que j’arrivai, Cenobio me demanda, alarmé, de l’examiner ; « elle est très malade ». Je la trouvai prostrée sur le sol de son humble hutte, avec le cœur débridé et les poumons inondés par une grave pneumonie. Ça faisait une semaine qu’elle était malade mais elle avait refusé d’être soignée. Même le jour précédent elle fit son parcours habituel de quelque huit kilomètres jusqu’à un ruisseau, pour apporter des lourds fardeaux d’argile et faire des pots que Cenobio l’aide à vendre, pour vivre. Elle a plus de soixante ans et ne parle pas espagnol ; son fils me traduisit ses mots : « elle dit qu’elle ne peut pas rattraper son souffle, que l’étouffement ne la laisse pas marcher ». Après une injection, ils la mirent dans la civière et descendirent, rapides, en s’enfonçant dans l’épaisseur de la brousse.

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    Un jet traverse le bleu du ciel en laissant un blanc sillage qui se perd dans le lointain ; comme il le voyait, Marcos exclame en le montrant du doigt : regard, une « giclée » ! Il me demande si je les ai vus de près, comment sont-ils, de quelle grandeur sont-ils ? Face à mes réponses il ouvre grands les yeux avec indifférence et continue à marcher. Je ne réussis pas à imaginer l’idée que j’ai laissée dans son esprit ; un avion est quelque chose sans importance dans son monde. Ensuite il me demande si j’aime le miel, et il me raconte, ému, lorsque, avec quelques amis, ils firent tomber à coups de pierres une ruche « géante » qui pendait sous un rocher escarpé au bord de l’abîme ; poursuivis par l’essaim, ils durent courir pour plonger dans un ruisseau proche, où ils sont restés longtemps parce que les abeilles « ne voulaient pas s’en aller ». Il dit que certains d’entre eux restèrent tous enflés plusieurs jours; que le miel était très bon.

    La Mesa est un endroit merveilleux. Située dans la partie supérieure d’un imposant ravin, elle s’incruste comme une marche démesurée dans un énorme mur de granit qui entoure un haut plateau ; son autre extrémité donne sur le vide. Depuis le bord du précipice on parvient à voir, dans les profondeurs, le sinueux cours d’un fleuve qui, dans son ardu chemin vers la mer, se glisse furtivement entre roches et gorges, ressemblant à un fin fil d’argent, caché derrière le ténu brouillard qui monte dès le fond, tournant à bleu, dans la distance, l’intense verdure de la végétation. Il y a peu de maisons à la Mesa. La plus lointaine est celle de Matías, bâtie au pied de la paroi de roc, à côté d’un sentier accidenté qui monte au plateau par le seul pas franchissable. Il s’est réjoui de notre arrivée ; il souffre d’une sérieuse bronchite qui l’empêche de travailler. Il n’est pas descendu au village pour se soigner car il craint de ne pas pouvoir remonter « à cause du manque d’air », et il n’a personne avec qui rester là-bas. Dans une autre maison, une jeune femme venait d’accoucher la nuit antérieure ; pour faciliter la naissance elle avait accouché accroupie, en appuyant l’abdomen sur un châle accroché aux poutres du toit. Elle et le bébé étaient en excellentes conditions ; à la requête de son mari je lui laissai quelques vitamines « pou’ qu’elle reprenne des forces ». Quand je lui demandai pourquoi elle n’était pas allée à la clinique pour se faire assister, la logique de la pensée indigène et son particulier sens commun me surprirent : « là-bas ils te couchent et l’on doit pousser vers le haut, comme ça c’est plus dur pou’ que les gamins sortent ».

    Des mois plus tard, juché sur des rochers vert grisâtres de lichen, je contemplais, encore incrédule, l’embrouillé labyrinthe de colossaux canyons qui débordaient l’horizon. Le vent et l’eau, encaissés dans ce monde d’abîmes, formaient des torrents parallèles qui coulaient, irrépressibles, en éboulant la terre et réinventant l’espace ; en créant un paysage fabuleux de longs plateaux bordés par de monumentales crêtes rocheuses, séparées par des précipices insondables qui s’enfonçaient presque deux mille mètres dans la rugueuse face de la planète, en ressemblant à de monstrueuses gorges qui menaçaient de dévorer tout le règne végétal qui, saisi tenacement aux inclinés versants, déployait une diversité étonnante, en changeant drastiquement à mesure qu’il descendait vers les profondeurs : des touffus bois habités par des petits rongeurs, des maquis où demeure une infinité d’oiseaux et se réfugient les cerfs, des élancées cactacées où reposent les urubus, tel des funèbres vigies. Comme un titanique livre ouvert, dans l’immensité de cañons se résumait une partie de la vie terrestre.

    Au milieu des canyons, des portions isolées du terrain avaient résisté aux assauts de l’érosion, et se dressaient dès le fond en ressemblant à de grandioses sculptures taillées par les éléments naturels : une cathédrale gothique, un clocher, un doigt de géant, un prodigieux pilier qui semblait soutenir le ciel. Cenobio m’avait raconté que quelques personnes sèment sur les hauteurs de ces lieux, en montant jusqu’à elles par des échelles rudimentaires faites de simples troncs avec d’étroits échelons taillés sur sa surface. Comme je regardais l’effrayante verticalité des murs rocheux qui les entouraient, il me semblait inconcevable que quelqu’un eût l’audace de les escalader en utilisant seulement des mains et des pieds, sans aucune protection. Pour l’indigène c’était, tout simplement, encore un épisode dans son interminable quête de nouvelles aires de culture, qui commença avec l’arrivée des Espagnols ; en subissant depuis lors le dépouillement constant de ses meilleures terres, qui l’a obligé à occuper les zones les plus abruptes des canyons. Même actuellement, les métis leur disputent les peu de terrains plats qu’ils possèdent, en s’appuyant sur certaines autorités dont la mentalité raciste est parfois subtile, mais toujours présente et implacable.

    Les tarahumaras ne vivent pas en grandes communautés. Les familles habitent en hameaux dispersés par les versants des ravins et sur les plateaux, à considérable distance les uns des autres ; reliés par d’indénombrables sentiers qui traversent des défilés et des endroits d’une beauté extraordinaire, lesquels ont été forgés à travers les siècles par d’innombrables générations d’infatigables marcheurs. « Comme ça tu laisses le vent courir libre et tes animaux ne gênent personne » ; ce fut la simple explication de Cenobio comme je m’enquérais du pourquoi d’une structure si embrouillée, laquelle a permis à la société tarahumara de développer une singulière façon de vivre où, en même temps, se conserve l’indépendance individuelle et les besoins de communication sociale sont remplis. Les familles mènent une existence solitaire, relativement écartées des autres membres de la communauté, concentrées sur leurs activités domestiques et de champ. Quoique fréquemment on se rende des visites personnelles ou que l’on effectue des travaux agricoles collectifs auxquels participent plusieurs voisins, finissant avec des tesgüinadas de reconnaissance ; seulement dans des occasions spéciales, comme les fêtes religieuses, ils rompent leur isolement en se réunissant en groupes nombreux pour réaliser leur célébrations dans des lieux sacrés.

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    L’abrupte dénivellation géographique provoque des conditions climatologiques très contrastantes; en hiver, par exemple, les hauts plateaux et les montagnes se couvrent de neige, tandis qu’au fond des canyons il prévaut un agréable climat tempéré. Ces variations climatiques ont déterminé la vie semi-nomade du tarahumara. Normalement chaque famille possède deux maisons : une dans les ravins et une autre sur les plateaux. La première est habitée en hiver, en cherchant à se protéger de l’intense froid des régions hautes ; pendant l’été on émigre sur les plateaux pour échapper à la chaleur des canyons et cultiver les terrains plats, en profitant des pluies. Aujourd’hui, la croissance des localités métisses a occupé des terrains qui appartenaient aux indigènes, obligeant beaucoup de familles à vivre toute l’année dans le même endroit. Peu d’entre eux habitent encore dans des grottes, et déjà il n’est plus possible de trouver les gigantesques cavernes, décrites par les premiers missionnaires, qui abritaient à leur intérieur des chambres séparées par des murs de pierre et argile, où cohabitaient plusieurs familles et qui, à leur dire, « elles plus ressemblaient des sépultures que des maisons ».

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    Comme la plupart des familles rarámuris, celle de Pedro n’utilise son logement que pour garder ses vêtements, couvertures, nattes et d’autres possessions ; ou pour dormir, si le temps est défavorable. Toutes leurs activités se réalisent à l’extérieur. Leur maigre mobilier : une table branlante, quatre chaises et un fourneau double d’argile, pour cuisiner, sont en dehors des chambres, sous un avant-toit fait de planchettes de bois. Normalement elles comprennent deux petites chambres en brique crue ou en pierre, quoiqu’aux zones boisées on préfère les troncs de bois. Il n’y a pas un style uniforme et chacun les bâtit selon ses goûts et possibilités. Dans les aires proches des villages métis on utilise souvent des matériaux et des meubles modernes.

    Un soir serein je conversais avec Pedro et sa famille à l’ombre d’un odorant oranger, dans la cour de sa maison, en nous délectant d’une succulente papaye qu’il avait cueilli à son verger. Nous parlions de choses banales et simples, et, cependant, c’était un moment si charmant et plaisant que je ne concevais pas une meilleure façon d’en profiter. Les horaires s’étaient évaporés ; nous mangions quand la faim nous « perçait », et si la chaleur nous engourdissait nous dormions, insouciants. Ici régnaient le soleil, la pluie, la sécheresse, l’hiver. Et personne ne se souciait de savoir son âge ou fêter son anniversaire. On avait l’impression que l’harmonie familiale était presque parfaite. C’était bien connu que les tarahumaras n’ont pas l’habitude de frapper ni de gronder leurs enfants pour les éduquer, et je n’ai jamais vu un garçon répondre à ses parents. Brièvement je m’enfonçais dans les détails les plus intimes de leur vie quotidienne ; ainsi j’appris l’histoire du corbeau qui vola le chapeau de Pedro, et comment il le retrouva longtemps après dans le trou d’un tronc ; ou une autre

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