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Voleurs de ciel
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Ebook289 pages8 hours

Voleurs de ciel

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About this ebook

Zoya DeLarose se réveille dans un bateau volant grinçant au beau milieu de la nuit. Elle n’a aucune idée des raisons pour lesquelles elle a été clandestinement enlevée ni de la façon dont sa vie est sur le point de changer à jamais…

Dans les nuages, Zoya découvre un monde de tempêtes de météorites, de combats à l’épée, de raids de minuit, d’îles flottantes, de trésors perdus depuis longtemps et, le plus surprenant, un monde d’amitié, d’honneur et de confiance. Mais, avec l’ennemi le plus mortel qui se rapproche, Zoya trouvera-t-elle la force de planer, ou dégringolera-t-elle des cieux sans personne pour ralentir sa chute?

Bienvenue à bord, bienvenue dans le monde des voleurs de ciel…
LanguageFrançais
PublisherÉditions AdA
Release dateMay 8, 2020
ISBN9782897865085
Voleurs de ciel

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    Voleurs de ciel - Dan Walker

    Dominika

    CHAPITRE 1

    La première chose qui apparut dans le plafond du bureau fut un pied.

    Il avait émergé entre les lattes du toit et fut suivi par la jambe et le corps d’une jeune fille. Les trois éléments pivotaient et battaient l’air comme s’ils dansaient. Après une seconde, le mouvement cessa. Le pied, la jambe et le derrière pendaient dans le vide, et ensuite Zoya DeLarose descendit jusqu’au plancher. Elle atterrit en position accroupie, et ses yeux scintillaient dans les ténèbres.

    La voie est libre, pensa-t-elle.

    Zoya traversa la pièce et activa l’interrupteur, inondant la pièce d’une lumière orangée. Lorsque ses yeux se furent ajustés, elle sursauta devant son reflet qui la dévisageait dans le miroir. Ses cheveux coupés au carré étaient un amas de pics et de toiles d’araignée, et son visage était égratigné. Ses vêtements étaient déchirés.

    — Zut, grommela-t-elle en tirant sur un fil décousu. J’aime ce chandail.

    Elle était dans le bureau du directeur et propriétaire de son orphelinat, M. Whycherley. La pièce n’avait que peu changé depuis la dernière visite de Zoya. M. Whycherley était un homme ordinaire, et son bureau en était la preuve avec les habituels meubles, calendrier, crochets, bouilloire, tasses et bac à papier. Sa seule excentricité était une obsession pour les voleurs de ciel et leurs vaisseaux, une fascination que Zoya partageait. Malgré les avertissements répétés pour que les enfants restent loin des pirates (des bandits et des scélérats qui n’ont jamais travaillé une fois dans leur vie !), leur nature rebelle avait peu découragé M. Whycherley d’amasser la plus grosse collection de souvenirs des voleurs de ciel, y compris des peintures, des porte-clés et des modèles réduits des vaisseaux. Même la bibliothèque du bureau contenait une section consacrée aux voleurs. Zoya remarqua un des livres – Voleurs de ciel : voler le ciel – et prit mentalement note de demander à M. Whycherley si elle pouvait le lui emprunter la prochaine fois qu’ils auraient une de leurs « conversations ».

    Un seul autre objet de la pièce détonnait : le bureau en bois orné de M. Whycherley. Zoya savait que son médaillon s’y trouvait. M. Whycherley lui avait confisqué son pendentif trois jours auparavant pour la punir d’avoir organisé un concours pour déterminer lequel de ses amis pouvait manger le plus d’œufs sans vomir. La réponse n’avait été aucun d’eux, bien sûr, et M. Whycherley avait exigé de garder le pendentif pendant une semaine. Pour Zoya, c’était une torture. Chaque heure qu’elle passait sans son médaillon rongeait ses entrailles jusqu’à ce qu’elle puisse à peine respirer. Le médaillon était tout pour elle, son porte-bonheur, la seule chose qu’elle possédait vraiment dans tout l’orphelinat. Ce n’était qu’une question de temps avant qu’elle ne fasse une tentative de rescousse.

    Zoya plongea la main dans sa poche et en retira une épingle à cheveux. Elle avait appris beaucoup de trucs en grandissant dans un orphelinat, mais aucun n’était plus utile que celui de crocheter des serrures. Elle déforma l’épingle pour qu’elle prenne la forme d’un trombone et la glissa dans la serrure du tiroir du haut du bureau. Elle pencha la tête pour mieux se concentrer et fit bouger l’épingle à gauche et à droite, la faisant vibrer dans la serrure avant d’entendre un cliquetis.

    Zoya ouvrit le tiroir. À l’intérieur, son médaillon brillait sous les lueurs de la lanterne. Elle posa la main sur le pendentif, poussa un soupir de soulagement et regarda le plafond ouvert.

    — Bon, mieux vaut se tirer d’ici.

    — Trop tard, j’en ai bien peur, dit une voix derrière elle.

    Zoya pivota, mais elle savait déjà qui était là. Une seule personne avait une voix si grave dans tout l’orphelinat.

    — Bonjour, M. Whycherley.

    CHAPITRE 2

    — Zoya DeLarose, comme je l’aurais imaginé, dit M. Whycherley.

    — Je ne vous attendais pas avant encore cinq minutes, dit Zoya.

    — Ah, toutes mes excuses, dit M. Whycherley. Je n’ai jamais été très ponctuel. Maintenant, voudrais-tu me dire ce que tu fais dans mon bureau et pourquoi il y a une tuile de toit sur mon meuble ?

    Zoya prit un moment pour réfléchir.

    — Pour que je te croie, continua M. Whycherley, cela va prendre une excuse incroyablement bonne, Zoya, même pour toi.

    Zoya pensa à toutes les excuses possibles : qu’elle avait vu un feu, qu’elle avait entendu un cambrioleur, qu’elle avait fait un cauchemar. Aucune ne semblait vraie. M. Whycherley croirait davantage qu’elle était somnambule que quelque baliverne au sujet des feux et des cambrioleurs.

    — Monsieur, dit Zoya, je ne peux pas penser à quelque chose qui ne me causerait pas davantage d’ennuis.

    — Brillant, dit-il. Et si tu me disais la vérité, dans ce cas ? Cela ferait changement.

    M. Whycherley fixait Zoya tandis qu’elle tortillait son pied contre le tapis et comprit qu’il n’obtiendrait jamais la vérité. Il retira sa veste et l’accrocha sur un crochet. C’était un homme de grande taille avec les cheveux bruns perpétuellement ébouriffés comme ceux qu’arborerait quelqu’un venant tout juste de s’échapper d’un ouragan. Sa chemise était toujours froissée, tachée et de deux tailles trop grande. Dans l’ensemble, il ressemblait davantage à un pirate désorganisé qu’à un propriétaire d’orphelinat.

    En dépit de son apparence, M. Whycherley était une force sur laquelle on pouvait compter. Il avait inspiré des générations d’orphelins malchanceux à faire quelque chose de leur vie, un fait qui lui avait valu une place de choix dans le cœur de Zoya. En fait, il était la seule personne qu’elle respectait vraiment.

    M. Whycherley était bien au fait de cela et l’utilisait à son avantage lorsque c’était nécessaire. Et aujourd’hui était une de ces occasions. Il s’assit derrière son bureau, les pieds sur la table, et fixa le plancher pendant de longues minutes sans rien dire. Il laissa le silence s’installer dans la pièce. Éventuellement, Zoya détourna les yeux. C’est à ce moment qu’il prit la parole.

    — Depuis combien de temps es-tu à mon orphelinat, Zoya ?

    — Douze ans, monsieur.

    — Combien de fois as-tu été dans mon bureau depuis ce temps ?

    — Je ne sais pas, monsieur.

    — Non ? Eh bien, heureusement que j’ai gardé un registre.

    M. Whycherley ouvrit le tiroir du haut de son bureau et en sortit un livre rouge.

    Il plaça le livre sur le bureau et l’ouvrit à près de la moitié, traça un trait le long de la page jusqu’à ce qu’il trouve le nom de Zoya, et referma brusquement le livre.

    — Quatre-vingt-huit, dit-il. Quatre-vingt-neuf, si on compte celle-ci. Cela fait 89 fois que je dois gérer ton comportement. Je commence à croire que mes mots entrent par une oreille et sortent par l’autre sans même y passer la nuit.

    M. Whycherley arqua les sourcils en attendant une réponse, mais aucune ne vint.

    — Veux-tu savoir quelque chose ? demanda-t-il.

    — Monsieur ?

    — Il y a très longtemps que je fais ce travail. J’ai vu passer des centaines d’enfants par mes portes : des fous, des méchants, des imbéciles. J’ai même eu des enfants intelligents, même s’ils sont rares. Je vais te dire quelque chose, Zoya : tu es, sans aucun doute, l’enfant le plus intelligent que j’aie jamais eu à ma charge.

    Zoya sourit.

    — Ce n’est pas un compliment, dit-il. Tu vois, c’est facile d’être intelligent. Tu nais avec de l’intelligence. Ce qui est difficile, c’est de décider quoi faire de ton intelligence. Je ne crois pas que tu fasses quoi que ce soit avec la tienne. Maintenant, je t’ai dit tout ce que tu devais savoir pour ne plus te retrouver ici, continua-t-il. Je t’ai dit de baisser la tête, de lire des livres et d’avoir de bonnes notes. Tu veux voler, n’est-ce pas ?

    Zoya tressaillit. M. Whycherley avait raison. Elle rêvait depuis longtemps de s’évader de l’orphelinat et de disparaître dans le ciel. Que ce soit en tant que pilote de transporteur pour le bureau de poste, comme soldat dans l’armée de l’air ou même comme membre d’équipage sur un des vaisseaux des célèbres voleurs de ciel, cela importait peu à Zoya. Tout ce qui comptait, c’était d’aller dans les nuages.

    — Eh bien, tu le pourrais. Tu pourrais devenir pilote, avocate, médecin, tout ce que tu veux. Mais c’est à toi d’agir, Zoya. Je ne peux pas le faire pour toi.

    M. Whycherley prit une pause pour reprendre son souffle. Zoya regardait les rouages du cerveau du directeur tourner. Après un moment, il se pencha et tira sur le tiroir que Zoya avait forcé quelques minutes plus tôt. Il en sortit le médaillon de Zoya, un pendentif ovale noir comme de l’encre se balançant au bout de sa chaîne. Zoya s’étira pour attraper le médaillon, mais M. Whycherley le souleva hors de sa portée.

    — J’imagine que c’est ce que tu étais venue chercher.

    Zoya regarda le collier et M. Whycherley tour à tour. Elle acquiesça.

    M. Whycherley secoua la tête, puis lui lança le médaillon.

    — Te confisquer ça ne t’a pas fait de bien, n’est-ce pas ?

    Zoya mit le collier à son cou. Pour la première fois depuis des jours, le trou dans son ventre disparut.

    — Une partie de moi ne croit pas qu’il vaille la peine de te punir. Cela ne t’empêchera pas de recommencer. Mais ce ne serait pas juste pour les autres.

    Il grinça des dents, et son regard se posa sur un calendrier au-dessus de la bibliothèque.

    — Ah, cela va faire l’affaire, dit-il en se tournant vers Zoya, un sourire malicieux aux lèvres. Il y a une sortie au musée de l’aviation demain matin.

    Le cœur de Zoya bondit. Un voyage pour voir la plus grande collection de vaisseaux aériens !

    — M. Maxim y emmène les plus jeunes. Tu iras avec eux. Un cadeau de ma part.

    M. Whycherley lui fit un clin d’œil.

    Le cœur de Zoya coula à la mention des tout-petits.

    — Mais…

    L’homme la regarda de travers.

    — Tu iras, continua-t-il, et selon ce qu’on me dira de ton comportement, nous déciderons si je dois te punir davantage. Compris ?

    Zoya ouvrit la bouche pour parler, puis la referma et hocha la tête. M. Whycherley ôta ses pieds de sur son bureau, se leva et ouvrit la porte.

    — Maintenant, sors d’ici avant que je ne change d’idée.

    CHAPITRE 3

    Le Fabuleux monde des machines volantes de Garibald Amstad avait été fondé par le fabricant d’engins volants le plus riche au monde (Si vous pouvez le faire voler, nous pouvons le construire !). Amstad voulait en redonner un peu aux gens qui avaient acheté ses vaisseaux bon marché et l’avaient rendu multimillionnaire.

    Une fois que la cohue de tout-jeunes eut passé les portes, ils furent accueillis par une procession d’avions cargos, d’airbus, de transporteurs touristiques, de vaisseaux de guerre, de croiseurs et de vaisseaux de voleur de ciel.

    — Mesdames et messieurs, mesdemoiselles et mes damoiseaux, bienvenue au Fabuleux monde des machines volantes ! dit le guide assigné à leur groupe pour la journée. Veuillez déposer vos effets personnels derrière le comptoir ; je vais me préparer pour vous faire découvrir le merveilleux monde de l’aviation.

    Le guide était un homme en forme de poire. Il portait un habit vert et un chapeau melon. Au-dessus de sa lèvre supérieure était nichée une moustache semblable à une limace retroussée de chaque côté.

    — Mon nom est Rodger Bartholomew Panklehurst, et je serai votre guide aujourd’hui. Mon patron, M. Amstad, m’a dit à quel point il pense que vous êtes tous spéciaux et m’a demandé de vous donner une visite extraspéciale. Toi, jeune homme, dit-il en pointant un des enfants dans le groupe de Zoya, quel est ton nom ?

    Le jeune se figea, son doigt toujours dans le nez, où il fouillait.

    — M-M-Marvy…

    — M-M-Marvy, j’aime bien. Marvy, comment crois-tu que la plupart des gens se déplacent dans le Fabuleux monde des machines volantes ?

    Marvy regarda son enseignant, M. Maxim, qui lui donna la permission de répondre d’un hochement de tête.

    — En marchant ?

    — Exactement. En marchant. Crois-tu que les enfants de l’orphelinat de M. Whycherley devraient user leurs bottes ?

    — Oui, dit Marvy, essayant de plaire.

    — Hors de question ! s’exclama Rodger Panklehurst. Laisser des visiteurs aussi exceptionnels que vous marcher toute la journée ? Pas la moindre chance ! Pour nos visiteurs extraspéciaux, nous réservons quelque chose d’extraspécial.

    Sur le mur derrière le guide, il y avait un bouton rouge avec un signe « Ne pas appuyer » juste au-dessus. Rodger s’y dirigea à grands pas, fit aux enfants un clin d’œil conspirateur et appuya sur le bouton. Il y eut un petit clic, et le mur derrière lui glissa, révélant des rails et une ligne de chariots ayant la forme du navire le plus célèbre d’Amstad.

    Les plus jeunes enfants s’exclamèrent, et même Zoya dut prendre une respiration. Après un moment d’émerveillement, les enfants montèrent à bord et se tiraillèrent pour avoir les meilleures places, tandis que M. Maxim grimpait dans la dernière place libre. Rodger monta sur la plateforme du devant et ouvrit les bras.

    — Qui veut voir des vaisseaux voler ?

    Les enfants applaudirent.

    — Qui veut voir le premier navire volant jamais construit ?

    — Oui ! crièrent les enfants.

    — Qui veut voir les restes du Spangled Dangler, le premier navire à avoir fait le tour du monde entre les mains des grandioses frères Wangle ?

    — Nous !

    — Qui veut voir, dit Rodger en savourant ses mots, l’avion noir maudit du capitaine Gruesome Grimybeard ?

    — Nous !

    — Dans ce cas, dit-il, bouclez vos ceintures, parce que nous allons VOLER !

    Pour Zoya, le Fabuleux monde des machines volantes était une révélation. Voir ainsi les bateaux volants sur lesquels elle avait lu, solides et brillants, avait presque fait exploser son esprit. Elle avait passé tellement de périodes de récréation à prétendre être les frères Wangle avec ses amis, ou à les faire marcher sur la planche comme si elle était le capitaine Gruesome Grimybeard. Vivre cela dans la vraie vie était comme marcher dans un livre de contes.

    Zoya retourna vers le bateau qui l’avait le plus fascinée : celui de Grimybeard. C’était un monstre aux moteurs turbocompressés et avec une section d’artillerie qui aurait fait verdir de jalousie l’armée de l’air. Zoya fit courir sa main le long de la quille du navire, son fer étant froid au toucher. Au bas, un arc s’ouvrait sur la coque. Fourmillant à l’extérieur se trouvait un groupe de visiteurs qui avaient plongé la tête et s’étaient glissés à l’intérieur. Zoya les suivit. Elle émergea dans une énorme cabine, éclairée par une lampe, où les familles s’étaient arrêtées pour manger sur des rangées de bancs. Tout le mur du dessus était consacré à des peintures de voleurs de ciel, placés dans une pyramide du moins intimidant au plus menaçant. Zoya reconnut quelques-uns des voleurs : Fixyx, Goldshatter et l’homme auquel avait appartenu le bateau sur lequel ils se trouvaient, Grimybeard. Le seul voleur sans image était l’homme au sommet, un pirate si impitoyable que peu de ceux qui l’avaient rencontré avaient survécu : Lendon Kane.

    Zoya choisit un banc en face du mur et sortit son déjeuner. Peu de temps après, un M. Maxim débordé se laissa tomber à ses côtés.

    — J’abandonne, soupira-t-il. Si M. Whycherley veut tant que les enfants voient cet endroit, qu’il les amène lui-même.

    Zoya rit en regardant M. Maxim se lever pour réprimander un orphelin non loin qui avait lancé son sandwich sur le quai du vaisseau de Grimybeard.

    — Je n’arrive toujours pas à croire que M. Whycherley aime les machines de l’air, dit Zoya.

    — Les adore, précisa M. Maxim.

    — Comment s’est-il mis à s’y intéresser ?

    — L’armée de l’air. Il en a presque rejoint les rangs lorsqu’il était plus jeune. Il en était à environ une semaine de la fin de l’entraînement de base lorsqu’il a abandonné.

    — Pourquoi ?

    — L’orphelinat. Un de ses amis lui a offert son usine après avoir perdu une partie de cartes, et M. Whycherley a pensé que c’était trop bien pour refuser. Il a lui-même déjà vécu dans la rue lorsqu’il était enfant. Je pense que c’est ce qui lui a donné l’idée de vous donner à tous une maison. Il a transformé l’usine en orphelinat. Je suis certain qu’il avait prévu de finir par retourner dans l’armée, mais l’orphelinat a simplement pris le dessus.

    — Et vous ? demanda Zoya. Comment en êtes-vous arrivé ici ?

    — C’est facile : M. Whycherley. Avant de commencer à l’orphelinat, j’ai eu une offre d’emploi ailleurs. Même travail, meilleur salaire.

    — Pourquoi ne l’avez-vous pas acceptée ?

    — Parce que lorsque j’ai eu mon entrevue avec M. Whycherley, je savais que je parlais à un grand homme. Et mon père me disait, quand j’étais petit : « Trouve un grand homme et apprends de lui. » Alors, c’est ce que j’ai fait.

    M. Maxim prit une bouchée de son sandwich et regarda le mur des voleurs.

    — Les enfants, vous ne savez pas à quel point vous êtes chanceux.

    Zoya pensa à toutes les deuxièmes chances que M. Whycherley lui avait données. Elle savait ce que voulait dire M. Maxim.

    CHAPITRE 4

    La circulation sur le chemin du retour du musée était pire qu’à l’habitude. Zoya s’était assise seule à l’avant du bus, loin du reste des enfants. Normalement, elle aurait été exaspérée par le ralentissement, mais cet après-midi-là, cela lui était égal. Elle voulait du temps pour réfléchir. Elle sortit son médaillon de sous sa chemise et le serra dans sa main. Elle ferma les yeux et se concentra sur ses pensées. Après une minute, elle parvint à disparaître dans la quiétude de son esprit.

    M. Whycherley n’avait pas exagéré lorsqu’il avait dit à Zoya que cela faisait 89 fois qu’elle se retrouvait dans son bureau. Évidemment, ce n’était que les fois où elle s’était fait prendre. Si elle avait été réprimandée chaque fois qu’elle avait fait quelque chose de mal, le nombre aurait été plus près de 300.

    Zoya n’était pas fière de son comportement. Et elle n’était pas fière de laisser tomber M. Whycherley. Il était le seul adulte qu’elle connaisse qui exigeait qu’elle se respecte elle-même.

    — Si vous ne vous respectez pas, les enfants, disait-il toujours, ne vous plaignez pas que personne d’autre ne le fasse.

    De retour dans le bus, Zoya ouvrit les yeux. Il était temps de changer. De sa poche arrière, elle sortit un crayon et du papier.

    Cher M. Whycherley,

    Je suis désolée de vous avoir laissé tomber. Cela ne se produira plus.

    Je ne vais pas passer ma vie à grimper sur les toits.

    Zoya

    Elle gribouilla un bonhomme sourire dans le coin, puis plia la feuille aussi petite qu’elle le put et la glissa dans sa poche.

    Le bus tourna enfin le dernier coin avant l’orphelinat, et la raison de l’attente apparut. Il y avait devant eux une foule qui bloquait l’entrée et qui s’étendait sur le chemin. L’attroupement était si important qu’il formait un mur impénétrable. Chaque visage de la foule était tourné vers l’orphelinat.

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