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La propriété immobilière
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La propriété immobilière

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Le droit de propriété, notamment immobilier, confère à son titulaire de larges pouvoirs et est soumis à certaines restrictions légales. Ce sont ces règles générales qui régissent le droit de propriété et les contraintes légales imposées qui sont analysées de façon approfondie dans cet ouvrage.

La propriété immobilière traite en particulier
– des règles gouvernant le transfert de la propriété immobilière entre parties,
– l’opposabilité de ce transfert à l’égard de tiers,
– le régime spécial gouvernant l’acquisition des immeubles d’appartements,
– la structure et la gestion de la copropriété par appartements.

L’ouvrage analyse également les divers droits immobiliers spéciaux comme l’usufruit, les servitudes, les relations juridiques entre voisins (murs mitoyens, vues et jours, les distances à respecter concernant la plantation d’arbres et arbustes) ainsi que le bornage. Il se termine par l’examen approfondi des règles sur les privilèges et hypothèques.
La propriété immobilière s’adresse tant aux juristes qu’aux non-juristes désirant se documenter sur des problèmes spécifiques touchant leur propriété immobilière.
LanguageFrançais
Release dateApr 22, 2013
ISBN9782879742809
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    La propriété immobilière - Monique Watgen

    couverturepagetitre

    © DBIT s.a. département Promoculture-Larcier 2013

    EAN 978-2-87974-280-9

    ISSN 2305-5642

    Cette version numérique de l’ouvrage a été réalisée par Nord Compo pour le Groupe De Boeck. Nous vous remercions de respecter la propriété littéraire et artistique. Le « photoco-pillage » menace l’avenir du livre.

    Des reproductions peuvent être autorisées par luxorr (Luxembourg Organisation for Reproduction Rights)

    www.luxorr.lu

    Pour toute information sur notre fonds et les nouveautés dans votre domaine de spécialisation, consultez notre site web :

    www.promoculture-larcier.com

    Membre du Groupe De Boeck

    7, rue des 3 Cantons

    L-8399 Windhof

    Tous droits réservés pour tous pays.

    Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent ouvrage, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.

    Préface

    La première publication de ce livre remonte à 1999. Si l’essence de la législation sur la propriété immobilière n’a pas changé fondamentalement depuis, il n’en est pas de même des contraintes imposées aux propriétaires immobiliers.

    Ces changements n’ont pas eu lieu dans le cadre du code civil mais dans celui de diverses lois qui imposent aux propriétaires des restrictions à leur libre jouissance ou à l’aliénation de leurs immeubles, et particulièrement à leurs terrains.

    Le livre traite de façon générale ces restrictions au droit de propriété. Ces contraintes imposées aux propriétaires l’ont été généralement sous forme de servitudes au profit de l’État et des communes. Elles sont motivées par des considérations économiques, écologiques ou sociales.

    Le livre commente également deux lois dont l’origine remonte à plus de 180 ans mais qui ont été remaniées fondamentalement en vue de servir à un but économique et social. Il s’agit de la nouvelle législation sur le droit d’emphytéose et du droit de superficie. Ces deux lois sont appelées à répondre à un but social préoccupant toutes les personnes se proposant d’avoir leur propre maison d’habitation.

    Ce livre examine aussi le régime du passeport énergétique. Celui-ci est légalement requis en cas de construction de bâtiments d’habitation, de transformation ou d’extension de maisons existantes. Ce passeport est requis également en cas de vente ou de location de logements.

    Pour le reste, le livre maintient les dispositions ayant figuré dans celui de 1999 tout en approfondissant les matières y traitées et en adoptant à leur valeur ou taux actuels les données chiffrées contenues dans l’édition de 1999.

    Introduction générale

    Le titre de cet ouvrage met en évidence deux concepts juridiques d’une grande importance dans le domaine du droit civil. Il s’agit, en premier lieu, de celui de propriété et, en second lieu, de celui d’immeuble.

    Le droit de propriété, qui est l’un des droits fondamentaux de l’homme, ne soulève pas seulement des problèmes d’ordre juridique, mais également de profondes discussions économiques, sociales, voire morales, différant sensiblement suivant les époques de l’histoire et les divers systèmes politiques en application dans un pays. Le droit de propriété, suivant les époques, a impliqué alternativement une faible intervention du législateur (19e siècle) ou une plus forte réglementation (période après la seconde guerre mondiale).

    La propriété immobilière s’oppose à la propriété mobilière. L’importance de cette première était largement prépondérante lors de la rédaction du Code civil et jusqu’à la fin du 19e siècle. C’était la propriété immobilière qui assurait la fortune de la famille noble et/ou bourgeoise. À cette époque, la propriété mobilière était de peu d’importance.

    Cette situation a fondamentalement changé au 20e siècle, avec l’industrialisation en constante évolution. En effet, les biens industriels modernes ne consistent généralement pas tellement en des terrains et des bâtiments, mais en des équipements, des brevets, des noms commerciaux et des titres cotés en bourse, pour n’énumérer que les facteurs économiques les plus essentiels.

    Néanmoins, du point de vue juridique, les immeubles continuent à faire l’objet de la réglementation la plus vaste et la plus complexe dans le code civil. Une des raisons essentielles en est que les biens mobiliers, de par leur nature, sont appelés à changer plus souvent de propriétaire et ont une durée de vie moins longue, de sorte qu’ils se détériorent plus rapidement. Ces échanges ne doivent pas être entravés par une réglementation trop compliquée. Cela vaut notamment pour les relations entre commerçants.

    L’objet de notre ouvrage est donc le droit de propriété sur les immeubles. Néanmoins, étant donné que certaines règles juridiques sont communes aux biens meubles et immeubles, on ne saurait complètement passer sous silence le régime applicable aux meubles. Nous en examinerons donc les règles essentielles.

    D’autre part, la propriété est susceptible de variations en ce qui concerne les droits conférés à une personne. Cela vaut spécialement, mais pas exclusivement, pour la propriété immobilière. On parle en ce sens de démembrement du droit de propriété. Sous cet aspect, nous étudierons l’usufruit, le droit d’usage et d’habitation, les servitudes, l’emphytéose et le droit de superficie.

    Par ailleurs, il convient de distinguer entre le droit de propriété et la possession. Cette dernière est une situation de fait par rapport à un bien. Une personne, sans disposer de titre juridique, se met en possession d’un bien et se comporte comme si elle en était le propriétaire. Nous verrons quelles suites utiles la possession peut avoir dans le domaine du droit de propriété.

    Nous terminerons l’ouvrage par une analyse des privilèges et des hypothèques.

    L’hypothèque est un droit réel créé sur les immeubles affectés à l’acquittement d’une dette. Le privilège est un droit que la qualité de la créance donne à un créancier d’être préféré aux autres créanciers, même hypothécaires. À l’opposé de l’hypothèque, le privilège peut porter tant sur les meubles que sur les immeubles.

    Par opposition aux autres droits réels mentionnés ci-dessus, qui sont des droits réels principaux, les privilèges et hypothèques sont seulement des droits réels accessoires. Ils sont l’accessoire d’un droit de créance, dont ils constituent une garantie.

    PARTIE I

    Le droit de propriété

    Chapitre I Les droits réels

    Chapitre II Le droit de propriété

    Chapitre III La distinction entre biens immeubles et meubles

    Chapitre IV Le caractère absolu du droit de propriété

    Chapitre V Le contenu du droit de propriété

    Chapitre VI L’étendue du droit de propriété – le droit d’accession

    Chapitre VII La propriété et l’usage des eaux

    Chapitre VIII Les restrictions au caractère absolu du droit de propriété

    Chapitre IX Les restrictions au caractère absolu du droit de propriété établies dans l’intérêt de la collectivité

    Chapitre X Limitation du droit de propriété dans le domaine des exploitations agricoles

    Chapitre XI La propriété collective

    Chapitre XII La propriété collective sans indivision et sans personne morale

    Chapitre XIII La copropriété par appartements

    Chapitre XIV Le syndic

    Chapitre XV Le cadastre vertical

    Chapitre XVI Le caractère perpétuel du droit de propriété

    Chapitre XVII L’expropriation pour cause d’utilité publique

    Chapitre XVIII Modalités du droit de propriété

    Chapitre XIX La propriété conditionnelle

    Chapitre XX La propriété apparente

    Chapitre XXI La propriété inaliénable

    Chapitre XXII La vente des immeubles à construire

    Chapitre XXIII La possession

    Chapitre XXIV Les actions possessoires

    Chapitre XXV La prescription acquisitive (usucapion)

    Chapitre XXVI La propriété mobilière – son régime

    Chapitre XXVII Acquisition de la propriété immobilière par convention

    Chapitre XXVIII La transcription des droits réels immobiliers

    Chapitre XXIX La protection et la preuve du droit de propriété

    CHAPITRE I

    Les droits réels

    A. Droits réels et droits de créance

    B. Les prérogatives du droit réel

    C. Subdivision des droits réels

    D. Énumération des droits réels principaux

    E. Limitation des droits réels immobiliers

    1

    Avant d’analyser les prérogatives conférées par la propriété immobilière, et les restrictions, auxquelles celle-ci peut être soumise, il convient de définir un certain nombre de concepts juridiques, qu’il faut connaître avant de pouvoir examiner les caractéristiques du droit de propriété, en général, et de la propriété immobilière, en particulier. Un de ces concepts est celui des droits réels.

    A – Droits réels et droits de créance

    Le droit de propriété est un droit réel. Qu’est-ce à dire ?

    On distingue en droit civil entre les droits réels (en latin : signifiant une chose) et les droits de créance.

    Le droit réel est un droit comportant un seul sujet exerçant une prérogative sur une chose. Le droit réel le plus essentiel est le droit de propriété.

    Le droit de créance a trait aux obligations juridiques, c’est-à-dire aux engagements naissant entre deux personnes qualifiées, respectivement, de créancier et de débiteur. Ces relations s’analysent en obligations de donner (vente, échange), obligations de faire (location, fourniture d’un bien ou d’un service) et obligations de ne pas faire (clauses de non-concurrence).

    2

    B – Les prérogatives du droit réel

    Le droit réel est un droit absolu, en ce sens que son titulaire peut opposer ce droit à tout tiers. Par contre, le droit de créance est relatif ne pouvant être exercé, en principe, que par le créancier contre le débiteur.

    Le droit réel emporte le droit de suite. Le titulaire de ce droit peut revendiquer son bien contre toute personne qui le détient, sans qu’elle dispose sur ce bien des prérogatives juridiques.

    Le droit réel comporte également le droit de préférence. Son titulaire passe avant toute autre personne ; il est notamment préféré aux créanciers.

    Le droit de créance ne comporte ni droit de suite, ni droit de préférence. Ainsi, sauf exceptions, un créancier ne peut saisir que les biens se trouvant entre les mains de son débiteur, et non ceux qui en sont sortis.

    3

    C – Subdivision des droits réels

    Les droits réels sont susceptibles de subdivision. On distingue en effet entre droits réels principaux et droits réels accessoires.

    Les premiers ont leur utilité en eux-mêmes, en ce sens que pour vivre l’homme doit se servir des choses et les consommer.

    Le plus important des droits réels principaux est le droit de propriété.

    Les droits réels accessoires, tout en portant, comme les droits réels principaux, sur une chose, n’ont pas pour but l’utilisation du bien par son titulaire. Ces droits réels secondaires sont l’accessoire d’un droit de créance, dont ils constituent une garantie.

    Les droits réels accessoires les plus importants sont les privilèges et hypothèques.

    4

    D – 

    Énumération des droits réels principaux

    À part le droit de propriété, qui comporte l’ensemble des prérogatives qu’on est susceptible d’exercer sur une chose, il convient de mentionner les autres droits réels principaux qui, par rapport au droit de propriété, confèrent moins de prérogatives. Citons à cet égard :

    1) L’usufruit qui ne comporte que la jouissance et l’usage de la chose. À côté de l’usufruitier, titulaire des droits précités, une autre personne exerce conjointement un droit sur la même chose : c’est le nu-propriétaire qui, à l’expiration de l’usufruit, survenant normalement lors du décès de l’usufruitier, devient plein propriétaire de cette chose.

    2) Le droit d’usage : C’est un droit plus restreint que le droit d’usufruit. Son titulaire ne jouit du droit d’usage que dans les limites de ce qui est nécessaire pour lui-même et sa famille.

    3) Le droit d’habitation : Il est plus limité encore que le droit d’usage, alors qu’il ne porte que sur l’usage personnel et familial d’une maison d’habitation.

    4) Les servitudes : Une servitude confère au propriétaire d’un immeuble, appelé le fonds dominant, le droit de se servir de certaines utilités d’un autre fond, qualifié de fonds servant (exemples : servitude de passage, servitude de vue).

    5) L’emphytéose : Elle consiste en un droit de jouissance consenti par un propriétaire à un preneur, moyennant une redevance annuelle. En fait, il s’agit d’un bail de longue durée (de 27 à 99 ans). À la différence du bail normal, qui est un droit personnel, le bail emphytéotique, conférant plus de prérogatives à son titulaire, est un droit réel. Il est susceptible d’hypothèque et d’aliénation.

    6) Le droit de superficie : Ce droit s’apparente à l’emphytéose.

    À l’exception du droit d’habitation, des servitudes de l’emphytéose et du droit de superficie, qui s’appliquent uniquement aux immeubles, les autres droits réels mentionnés sous ce numéro peuvent porter tant sur les immeubles que sur des meubles.

    5

    E – Limitation des droits réels immobiliers

    Pour les contrats, il n’existe pas d’énumération légale limitative. Les parties peuvent donc convenir entre elles de toutes espèces de conventions qu’elles désirent conclure, même non mentionnées par le Code civil (contrats innommés), pourvu que ces contrats ne soient pas contraires à l’ordre public et aux bonnes mœurs. En est-il de même des droits réels ?-

    Bien que cette question ait été discutée, en présence du fait qu’aucun texte légal n’interdit la création de droits réels non prévus par la loi, l’idée s’est néanmoins imposée qu’il n’est pas possible de créer de nouveaux droits réels, non prévus par le Code civil ou par une loi postérieure.

    En effet, par opposition aux contrats, dont les effets se limitent, en principe, aux parties, les effets créés par des droits réels sont opposables aux tiers, dans la mesure du moins où ceux-ci doivent respecter les effets que comportent ces droits réels.

    Les droits réels régissent le transfert des biens et assurent la sécurité des conventions. Ils intéressent donc l’ordre public. Or, les parties ne peuvent pas convenir entre elles de conventions qui sont contraires à l’ordre public.

    On comprendrait donc difficilement que les parties puissent créer des droits, qui seraient opposables à tous et risquent de causer une gêne pour la collectivité. On peut donc logiquement en conclure qu’il ne saurait exister d’autres droits réels que ceux formellement reconnus par la loi.

    CHAPITRE II

    Le droit de propriété

    A. Généralités

    B. Historique du droit de propriété

    C. Le droit de propriété dans le code civil originaire

    D. La réforme du 22 juillet 1987

    E. La propriété collective

    F. La propriété intellectuelle

    6

    A – Généralités

    Le droit de propriété est évidemment le droit réel le plus complet dont une personne puisse disposer. Il se rapporte tant aux immeubles qu’aux meubles. Souvent les règles régissant ces deux catégories de biens sont les mêmes, mais une grande partie de ces prescriptions sont spécialement conçues pour les immeubles.

    Nous étudierons prioritairement la propriété de ces derniers et n’analyserons que, dans la mesure du nécessaire, la propriété mobilière.

    Le droit de propriété prend une grande place dans le Code civil. Les articles 544 à 577 lui sont consacrés exclusivement. D’autres textes épars dans le Code en parlent également. Il en est ainsi du Livre II, notamment les articles 516 à 710, qui traitent des biens et des différentes modifications de la propriété. Finalement, dans le Livre III du Code civil, sont examinées les différentes manières d’acquisition de la propriété.

    Dans les numéros qui suivent, nous étudierons l’historique du droit de propriété, la définition de celui-ci et ses caractéristiques essentielles.

    7

    B – Historique du droit de propriété

    Le contenu de ce droit change avec l’évolution de la société humaine. La propriété n’avait guère de sens à l’époque où les hommes vivaient à l’état de nomades et se nourrissaient de la chasse, de la pêche et de la cueillette de fruits sauvages.

    La propriété naît seulement quand les hommes deviennent sédentaires et commencent à pratiquer l’agriculture et l’élevage du bétail. La propriété privée ne se développera que peu à peu.

    Une forme plus organisée de la propriété apparaît avec les Romains. Ils lui donnaient des caractéristiques qui, aujourd’hui encore, font partie des caractères essentiels de celle-ci. La propriété est perpétuelle. Elle comporte le jus utendi, fruendi et abutendi (voy. sous les points 20 et suivants).

    Le régime féodal du Moyen Âge met l’accent essentiellement sur la propriété immobilière, qui s’étend notamment sur les vastes étendues de terres que les grands seigneurs avaient réussi à accaparer par la guerre. Dans l’impossibilité de cultiver eux-mêmes ces larges domaines, ils en concédaient la jouissance à des tenanciers, qui leur payaient annuellement d’importantes redevances, ou leur prêtaient des services spécifiques.

    Sur base de ces données économiques se développe le régime de la féodalité qui domine le Moyen Âge, caractérisé par le droit de seigneurie. Le suzerain était le propriétaire de l’ensemble des terres de son royaume. Il en a eu le domaine éminent. Il en a cédé la jouissance (domaine utile) à un ou plusieurs vassaux en échange de différents services à son profit. Ces vassaux, se faisant à leur tour suzerain à un niveau inférieur, cédaient à d’autres vassaux la jouissance des terres. Ce système se répétait jusqu’à ce qu’on aboutisse finalement à quelqu’un disposé à cultiver effectivement ces terres.

    Avec l’évolution du temps, ces conceptions attribuèrent au domaine utile les services essentiels de la chose, alors que le domaine éminent devenait un simple attribut de souveraineté et de seigneurie. Ainsi le domaine utile est-il devenu la véritable propriété dès la fin de l’ancien droit et avant le régime du Code civil. Les droits féodaux finirent par être considérés comme des atteintes intolérables à la propriété.

    Le Code civil, promulgué en 1804, et reprenant, en partie, les idées de la Révolution française, faisait table rase de ces anciennes idées féodales sur le droit de propriété. Désormais, celui-ci est un droit individuel absolu et toute référence à une idée collective est réduite au strict minimum nécessaire pour la vie en société.

    8

    C – Le droit de propriété dans le code civil originaire

    La définition de ce droit est donnée par l’article 544¹ initial, libellé comme suit :

    « La propriété est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois et les règlements ». (On remarquera l’expression « la plus absolue » qui, en soi, constitue un pléonasme, alors que le terme « absolu » est déjà un superlatif non susceptible de gradation).

    Néanmoins, malgré la formulation si catégorique de l’article précité, jamais l’idée n’a prévalu que le droit de propriété comporte des pouvoirs illimités. L’article 544 sus-visé contient déjà une restriction à ce droit absolu, en parlant « d’usage prohibé par les lois et les règlements ». D’ailleurs, l’expropriation pour cause d’utilité publique était possible, ce qui est une dérogation incisive au caractère absolu de ce droit.

    D’autre part, le droit de propriété d’une personne peut entrer en conflit avec celui d’un autre propriétaire et notamment celui d’un voisin. C’est la fameuse question des relations de voisinage, qui a tant préoccupé la jurisprudence. Ainsi, la Cour Supérieure de Justice, par un arrêt du 2 juin 1963 (Pas. 19, page 71), a décidé que « les droits du propriétaire d’une construction nouvelle sont limités par le droit de propriété des voisins. Si par conséquent les inconvénients normaux qu’entraîne le voisinage, doivent être tolérés sans donner lieu à indemnisation, les inconvénients qui excèdent les limites de la tolérance réciproque entre voisins, obligent le propriétaire à réparer le dommage qu’il a causé par son fait ».

    Cette formule des « inconvénients qui excèdent les limites de la tolérance entre voisins » se retrouve dans quantités de jugements qui ont statué sur les actions d’un propriétaire ayant des effets sur la propriété de son voisin.

    9

    D – La réforme du 22 juillet 1987

    La formule précitée est devenue tellement courante qu’elle se retrouve légèrement modifiée dans le nouvel article 544, tel qu’il a été réformé par la loi du 2 juillet 1987. Cet article a désormais la teneur suivante :

    « La propriété est le droit de jouir et de disposer des choses, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ou qu’on ne cause un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage, rompant l’équilibre entre des droits équivalents. »

    On notera que le nouveau texte ne qualifie plus la propriété comme étant le droit de jouir et de disposer de la façon la plus absolue d’une chose. La nouvelle formule reflète l’évolution économique et sociologique intervenue depuis la promulgation du Code civil dans le domaine de la propriété. Ce droit ne peut pas se prêter à l’exercice de prérogatives égoïstes, mais la propriété a aussi une fonction sociale servant au même titre les intérêts de la société, dont fait partie un propriétaire.

    Aussi, voyons-nous une quantité de lois déroger à l’article 544 et porter des entraves assez importantes au caractère absolu du droit de propriété. Nous étudierons dans la suite ces entraves au droit de propriété.

    10

    E – La propriété collective

    D’autre part, tout en écartant, par réaction contre l’ancien droit, la propriété collective, le Code civil de 1804 a néanmoins dû admettre certaines formes de propriété collective tant en matière immobilière (murs mitoyens) qu’en matière mobilière (parts sociales détenues par les associés d’une société).

    De nos jours, la propriété collective a pris une relative extension pour satisfaire un certain nombre d’exigences de la vie moderne. On n’a qu’à songer à la copropriété des immeubles par appartements que nous étudierons sous les numéros 137 et suivants.

    Rappelons pour mémoire que dans les pays à régime communiste, qui ont disparu pratiquement, la propriété collective l’emportait largement sur la propriété individuelle.

    11

    F – La propriété intellectuelle

    Clôturons ce chapitre en mentionnant l’extension qu’a subi le droit de propriété depuis la promulgation du Code civil. Cette extension a trait notamment à la propriété mobilière que le Code civil considérait comme quantité négligeable. Ainsi, de nos jours, la propriété littéraire et artistique joue un grand rôle, en faisant bénéficier les auteurs d’œuvres-d’art de droits d’auteur et en défendant à des tiers de reproduire, en tout ou en partie, une œuvre sans l’accord de l’auteur.

    Le droit de propriété industriel protège les marques, dessins et modèles et fait bénéficier les inventeurs de brevets d’un certain nombre de prérogatives.

    Les œuvres de l’esprit, que sont les œuvres-d’art, tout comme les marques, dessins et modèles, comportent une appropriation exclusive et opposable à tous, donc une sorte de propriété soumise à un régime spécial quant à leur acquisition, leur durée ou leur transmission.

    1. S’il n’en est autrement précisé, tout autre article cité sans référence se rapporte au Code civil.

    CHAPITRE III

    La distinction entre biens

    immeubles et meubles

    A. Généralités

    B. Conséquences juridiques de cette distinction

    C. Les biens immeubles

    D. Les biens meubles

    12

    A – Généralités

    Le droit de propriété est dominé par la distinction entres immeubles et meubles.

    Le Code civil dispose en son article 516 : « Tous les biens sont meubles ou immeubles ». Souvent le régime juridique, appliqué aux uns et aux autres, est le même. Il y a néanmoins beaucoup de cas où les immeubles, traités par le Code civil comme des biens méritant une protection supérieure, bénéficient d’un régime spécial.

    Dans le présent ouvrage, nous nous limitons pour l’essentiel, à préciser ce qu’il faut entendre par immeuble au sens du Code civil.

    Avant d’analyser ces règles, il importe de savoir quelles sont les conséquences pratiques qui se dégagent de la classification des biens en immeubles et en meubles.

    13

    B – Conséquences juridiques de cette distinction

    Ces intérêts sont assez nombreux. Nous en citons ci-après les principaux.

    1) Le tribunal compétent pour connaître d’une action judiciaire relative à un immeuble est le tribunal de la situation dudit immeuble. Quand une telle action concerne un meuble, le tribunal compétent est généralement celui du domicile du défendeur.

    2) Le droit de propriété sur un immeuble est toujours sanctionné par une action en revendication (cf. numéros 355 et suivants). Pour les meubles, une revendication contre un propriétaire, qui n’a pas acquis ce meuble du vrai propriétaire, n’est guère possible si son détenteur actuel est de bonne foi, cela en vertu du principe « en fait de meubles, la possession vaut titre. »

    3) Les immeubles sont susceptibles d’être hypothéqués. Un meuble ne l’est pas. Toutefois, le droit moderne a conçu, pour certains meubles d’un genre spécial, tels que les avions et les navires, la possibilité de les grever d’une hypothèque.

    4) La possession d’un immeuble est protégée par des actions possessoires accordées au possesseur, indépendamment de la question de savoir s’il est ou non propriétaire (cf. numéros 271 et suivants sur les actions possessoires). Un meuble n’est pas susceptible d’une telle action.

    5) L’aliénation ou le partage d’un immeuble appartenant à un mineur, ou à un incapable majeur, est soumis à plus de formalités que les mêmes opérations se rapportant à un meuble.

    6) Dans certains régimes matrimoniaux (par exemple, la communauté des meubles et d’acquêts), tous les meubles font partie de la communauté. Quant aux immeubles, sont communs uniquement ceux acquis à titre onéreux au cours du mariage, sauf dans le régime de la communauté universelle.

    7) La saisie des immeubles exige une procédure plus compliquée (saisie immobilière) que la saisie des meubles.

    8) En droit international privé, la succession des immeubles est régie par la loi du pays de la situation de ceux-ci. La succession des meubles est soumise à la loi du pays du domicile du défunt (cf. « Successions et Donations », numéros 188 et suivants).

    9) La législation postérieure au Code civil a organisé un régime spécial de preuve de l’aliénation d’un immeuble. Pour mieux organiser la preuve à l’égard de tiers, une publicité de ce transfert est organisée. Elle consiste dans la transcription de l’acte d’aliénation au bureau des hypothèques (cf. numéros 332 et suivants). Une telle publicité n’existe pas pour les meubles, sauf pour ceux visés sous le point 3 ci-dessus.

    14

    C – Les biens immeubles

    Le Code civil, dans son article 517, distingue entre trois catégories d’immeubles. :

    1) Les immeubles par nature,

    2) les immeubles par destination,

    3) les immeubles par l’objet auxquels ils s’appliquent.

    15

    1. Les immeubles par nature

    L’article 518 dispose que les fonds de terre et les bâtiments sont immeubles par nature.

    1.1 les fonds de terre

    Ils représentent l’ensemble des immeubles non bâtis. On sait que la propriété du sol comporte celle de la surface du dessus et celle du dessous (cf. numéros 26 et suivants).

    Sont aussi immeubles, les arbres et autres végétaux (herbes, céréales et plantes) qui tiennent au sol par leurs racines. Ces végétaux font partie du fonds aussi longtemps qu’ils adhèrent au sol. Ces éléments prennent par contre une individualité distincte et acquièrent le caractère de meubles, quand ils sont séparés du sol par la récolte.

    Même non encore séparés du fonds sur lesquels ils poussent, les végétaux peuvent devenir meubles par anticipation dans les cas suivants :

    – en cas de vente de récoltes sur pied ou de vente de bois sur pied,

    – lorsque le fonds est cultivé par un fermier qui a droit à ces récoltes,

    – ces récoltes peuvent être saisies séparément du fonds, et sont donc meubles, si cette récolte est faite dans les six semaines précédant la maturité des fruits ou plantes. On parle dans ce cas de saisie-brandon.

    1.2 Les bâtiments

    Ceux-ci ne deviennent immeubles que par leur incorporation au sol.

    Parfois, ces bâtiments peuvent avoir une existence séparée du fonds dans le cas d’emphytéose ou de droit de superficie (cf. numéros 437 et suivants).

    La notion de bâtiments couvre non seulement les constructions complètes, mais également les travaux de maçonnerie ou de fer, édifiés sur le sol, ou dans le sol. Sont donc immeubles : un barrage, un tunnel, une digue, les tuyaux de conduite du gaz ou les fils destinés au transport de l’énergie électrique.

    16

    2. Les immeubles par destination

    On appelle ainsi les objets mobiliers, qui ont été attachés à un immeuble pour son service ou pour son exploitation par le propriétaire de cet immeuble (article 524). Il s’agit en l’occurrence d’immeubles fictifs, auxquels la loi fait perdre le caractère mobilier qu’ils tiennent par leur nature.

    Le but de cette fiction est de fortifier le lien économique que le propriétaire a voulu établir entre les meubles et l’immeuble et empêcher ainsi qu’ils ne puissent en être séparés dans certaines hypothèses, comme dans le cas de saisie opérée indépendamment de celle de l’immeuble. Cette règle joue également en cas d’un legs mobilier, qui ferait passer des biens meubles à un autre héritier que celui ayant hérité de l’immeuble auquel ils sont attachés. Elle peut trouver application aussi en matière de régime matrimonial comportant un régime de communauté. Ainsi, à titre d’exemple, l’article 524 déclare immeubles par destination, dans le cadre d’une exploitation agricole, entre autres, les animaux attachés à la culture et les ustensiles aratoires.

    Aussi longtemps que ces éléments restent sur la ferme, ils ne sauraient être saisis indépendamment des immeubles constituant cette exploitation. Ils doivent donc être saisis dans le cadre d’une saisie immobilière. En cas de legs d’une exploitation agricole, ces éléments font partie de cette dernière. Quand des époux optent pour le régime de la communauté d’acquêts, les animaux attachés à la culture, ainsi que les ustensiles aratoires, qui sont la propriété de l’un des conjoints avant le mariage, ne tombent donc pas en communauté.

    Les immeubles par destination jouent un rôle dans le cadre d’une exploitation agricole, ou d’une entreprise industrielle ou artisanale. L’article 524 énumère les divers biens entrant en ligne de compte à cet égard.

    Les biens énumérés par l’article précité, dont la liste a été complétée par la jurisprudence, notamment pour adapter ce matériel à l’évolution économique, ne conservent le caractère immobilier qu’aussi longtemps qu’ils restent attachés à l’exploitation ou à l’entreprise qu’ils aident à faire fonctionner. Quand ils sont librement détachés par leur propriétaire de cette exploitation, ils redeviennent meubles, par exemple, quand un exploitant agricole vend des animaux attachés à la culture.

    L’article 525 connaît encore une autre catégorie d’immeubles par destination. En ce cas, il s’agit plutôt d’une destination somptuaire, par opposition au caractère indispensable, ou du moins utile prévu par l’article 524. L’article 525 vise une utilisation plutôt bourgeoise. La caractéristique de ces objets est qu’il s’agit d’ornements. Ledit article vise notamment « les glaces, tableaux et autres ornements ». Ceux-ci doivent répondre à un double critère :

    a) Il faut qu’ils aient été placés par le propriétaire avec une vue de perpétuité ;

    b) Il est exigé que lesdits ornements « soient scellés en plâtre ou à chaux ou en ciment ou lorsqu’ils ne peuvent être détachés sans être fracturés ou détériorés ou sans briser ou détériorer la partie du fonds à laquelle ils sont attachés ».

    17

    3. Les immeubles par l’objet auquel ils s’appliquent :

    Cette catégorie, énumérée par l’article 526, comprend les droits immobiliers. Entrent en ligne de compte :

    a) les droits réels immobiliers,

    b) les créances immobilières,

    c) les actions immobilières.

    3.1 Les droits réels immobiliers

    On distingue à cet égard entre :

    – Les droits réels principaux qui, outre le droit de propriété, sont l’usufruit sur un immeuble, le droit l’habitation, les servitudes, l’emphytéose et le droit de superficie,

    – les droits réels accessoires, tels que l’hypothèque, le privilège et l’antichrèse (gage sur un immeuble).

    3.2 Les créances immobilières

    Celles-ci sont fort rares de nos jours. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’obligation de livrer un immeuble n’est pas une créance immobilière, mais une obligation mobilière (obligation de faire). Il s’agirait cependant d’une créance immobilière dans le cas où l’immeuble à livrer n’est, lors de l’accord de volontés des parties, pas encore délimité quant à son étendue, par exemple, lorsque A vend à B 30 ares, à délimiter dans un terrain comprenant en tout un hectare.

    3.3 Les actions immobilières

    Sont considérées comme telles :

    – les actions qui sont attachées aux droits réels immobiliers. Ce sont :

    1) l’action en revendication d’un immeuble par un propriétaire contre un usurpateur,

    2) l’action confessoire permettant de réclamer un usufruit ou une servitude sur un immeuble,

    3) l’action du créancier hypothécaire contre le tiers possesseur de l’immeuble hypothéqué,

    4) les actions possessoires.

    – les actions qui ont pour objet de faire rentrer un immeuble dans le patrimoine du demandeur (action en rescision pour lésion, action en nullité ou en résolution).

    18

    D – Les biens meubles

    Tous les biens, ne rentrant pas dans l’une des trois catégories d’immeubles préexaminées, sont des meubles. Le Code civil les analyse dans les articles 527 à 536.

    Les meubles ne faisant pas l’objet de notre ouvrage, nous n’examinons qu’accessoirement les dispositions correspondantes.

    CHAPITRE IV

    Le caractère absolu

    du droit de propriété

    A. Généralités

    19

    A – Généralités

    Nous avons esquissé ci-dessus dans quelle mesure la propriété présente un caractère absolu. Nous avons constaté que ce caractère varie avec les différentes époques, qui ont apporté de plus ou moins grandes restrictions au droit du propriétaire.

    Néanmoins, quelles que soient ces restrictions, on peut toujours affirmer les deux principes suivants :

    – en matière de propriété, tout ce qui n’est pas défendu est permis. Le pouvoir du propriétaire est la règle, les restrictions légales à ce droit sont l’exception.

    – seul le pouvoir législatif et, à un certain degré, le pouvoir réglementaire, dans la limite de son habilitation par la loi, ont le pouvoir de restreindre l’exercice du droit de propriété.

    Nous examinerons ci-après les différents aspects du droit de propriété. Dans un premier chapitre, nous analyserons le contenu du droit de propriété, dans un second chapitre, l’étendue de ce droit.

    Les règles exposées s’appliquent tant à la propriété mobilière qu’à la propriété immobilière.

    CHAPITRE V

    Le contenu du droit

    de propriété

    A. Généralités

    B. Les attributs du droit de propriété

    20

    A – Généralités

    Le droit de propriété est le droit le plus complet qu’on puisse avoir sur une chose. Le propriétaire exerce sur elle une véritable souveraineté. Les attributs de ce droit, déjà dégagés par le droit romain, se définissent par les trois verbes latins uti, frui, abuti.

    a) uti : le propriétaire peut user de la chose, donc s’en servir,

    b) frui : le propriétaire peut jouir de son bien, c’est-à-dire percevoir et s’approprier tous les produits et fruits de la chose,

    c) abuti : le propriétaire a le droit de détruire la chose ou d’en disposer.

    Les trois prérogatives précitées consistent dans des actes matériels de jouissance ou d’usage. Le propriétaire a la faculté d’exploiter lui-même un bien et d’en percevoir les revenus. Il lui est loisible de détruire une chose hors d’usage ou qui ne lui plait plus.

    Il peut poser des actes juridiques relatifs à sa chose. Ces actes sont classés en trois catégories :

    1) les actes conservatoires (conclusion d’un contrat d’assurance),

    2) les actes d’administration (conclusion d’un contrat de bail),

    3) les actes de disposition (vente, échange, donation).

    B – Les Attributs du droit de propriété

    21

    1. Droit d’user de la chose

    Le propriétaire est libre de faire usage de son bien ou de n’en pas faire usage. Il est par ailleurs indifférent si le propriétaire use de sa chose dans un but économique, ou pour son seul plaisir. Ainsi, il peut habiter sa maison, y exercer un commerce ou une industrie ; il a aussi le droit de la laisser inhabitée.

    22

    2. Droit de percevoir les fruits et les produits de la chose

    Le propriétaire d’un bien en perçoit les fruits et produits ou, d’après son bon plaisir, il laisse ces biens improductifs.

    Il s’agit dans ce cadre de définir ce qu’on entend par « fruits » et par « produits ».

    2.1 Les fruits

    On désigne sous ce concept tout ce que la chose produit périodiquement et sans altération de sa substance.

    On distingue trois catégories de fruits (art. 547) :

    a) Les fruits naturels : ce sont ceux que la chose produit spontanément, sans le travail de l’homme, comme les fruits des arbres, le fourrage des prairies naturelles, le croît des animaux (naissance des jeunes animaux).

    b) Les fruits industriels : ce sont ceux résultant du travail de l’homme, comme les récoltes des champs, des prairies artificielles, des jardins, des vignes, les coupes de bois taillis ou de futaies aménagées.

    Le propriétaire acquiert les fruits industriels, que les biens frugifères soient exploités par lui-même ou par des personnes à son service.

    c) Les fruits civils : il s’agit des revenus périodiques dus par des tiers, auxquels le propriétaire a concédé la jouissance d’une chose, tels que les loyers ou fermages de biens loués, les intérêts de sommes prêtées et les dividendes des actions.

    2.2 Les produits

    Les produits se distinguent des fruits en ce sens qu’ils ne sont pas périodiques et qu’ils épuisent la substance d’un bien. Ainsi sont des produits : les coupes de bois dans les futaies non aménagées, les matériaux extraits des carrières non exploitées, les lots échéant à des valeurs mobilières, notamment à des actions.

    Parfois, il dépend de la volonté du propriétaire que le revenu d’un bien est à considérer comme un fruit ou comme un produit. Cela dépend de l’aménagement qu’il a donné à son bien. Ainsi, les matériaux extraits d’une carrière non exploitée sont des produits, alors qu’il s’agit de fruits si les matières proviennent d’une carrière en exploitation. De même, les arbres abattus dans une forêt sont des produits. Si, par contre, la forêt est aménagée et mise en coupe réglée, les arbres abattus constituent des fruits.

    Signalons que la distinction faite ci-dessus entre fruits et produits n’est pas relevante en ce qui concerne le propriétaire lui-même. Il perçoit indistinctement tant les fruits que les produits. La distinction revêt toutefois une importance en cas de démembrement de la propriété, quand celle-ci est amputée du droit de jouissance, ce qui se produit en matière d’usufruit. L’usufruitier perçoit les fruits échus durant son usufruit, mais non les produits. Nous en reparlerons, en examinant les droits de l’usufruitier et du nu-propriétaire.

    23

    3. Droit de disposer de la chose

    Ce droit se manifeste sous deux formes :

    une disposition physique et une disposition juridique.

    3.1 Disposition physique

    Le propriétaire a le droit de faire tous les actes matériels sur son bien, non expressément interdits par une loi, conformément à l’usage auquel cette chose se prête. Il peut exécuter ou faire exécuter tous les travaux qu’il désire sur ses biens, avec ou sans altération de leur substance. Ainsi, il la faculté de transformer un immeuble ou de le démolir et de laisser le terrain à l’état nu. Il lui est loisible de détruire un bien mobilier et de le remplacer par un autre.

    Cette prérogative différencie le propriétaire de tous les autres titulaires de droits réels, comme un usufruitier. Ce dernier peut jouir de façon plus ou moins complète des bien sûr lesquels porte son usufruit, mais il doit toujours en conserver la substance, ainsi que l’exige l’article 578.

    3.2 Disposition juridique

    À part les actes purement matériels, le propriétaire a également le droit de passer, quant à sa propriété, tous les actes juridiques non expressément prohibés par la loi. Il peut ainsi restreindre ou démembrer cette propriété (par exemple, en cédant l’usufruit ou en consentant une servitude) et même anéantir son droit de propriété. Il a aussi la faculté de transférer, en totalité, sa propriété à un tiers par acte à titre onéreux (vente) ou par acte à titre gratuit (donation). Quand la propriété a trait à un meuble, le maître peut anéantir son droit, en détruisant l’objet en question (démolir un meuble meublant).

    Sans aller même jusqu’au transfert total ou à la destruction d’un bien, le propriétaire peut le laisser à l’abandon, sans qu’il passe entre les mains d’un autre propriétaire. Cette chose devient alors une res nullius, quand il s’agit d’un bien mobilier et que cet abandon a été total. Toutefois, le propriétaire garde le droit de reprendre sa chose, tant qu’un tiers ne se l’est pas approprié.

    Ce régime concerne du moins les biens mobiliers. Il s’applique plus difficilement aux immeubles, ainsi que nous allons le voir sous le numéro 179.

    CHAPITRE VI

    L’étendue du droit de propriété

    – le droit d’accession

    A. Généralités

    B. Le droit d’accession aux fruits et produits

    C. Propriété du dessus et du dessous

    D. Limite de la propriété du dessous

    E. Le droit d’accession sur ce qui s’incorpore à la chose

    24

    A – Généralités

    Le droit de propriété ne s’applique pas seulement à la chose elle-même. Il s’étend également à ses accessoires. Cela résulte des dispositions de l’article 546, libellé comme suit : « La propriété d’une chose, soit mobilière, soit immobilière, donne droit sur tout ce qu’elle produit et sur ce qui s’y unit, soit naturellement, soit artificiellement. Ce droit s’appelle droit d’accession. »

    Le droit d’accession comporte un certain nombre d’applications précisées par les articles 547 à 577 et qui sont les suivantes :

    1) Le propriétaire a droit à tous les fruits et produits de la chose,

    2) la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous, sauf disposition contractuelle contraire,

    3) la propriété s’étend à tout ce qui s’incorpore à la chose,

    4) le propriétaire a un droit sur les eaux qui jaillissent ou coulent sur son sol.

    Nous allons examiner ci-après les règles mentionnées ci-dessus. Nous verrons que ces prérogatives du droit de propriété sont néanmoins soumises à quelques restrictions.

    D’autre part, dans certains cas, si les biens nouveaux revenant au propriétaire par accession, proviennent d’un tiers, la loi oblige le propriétaire, qui profite de ces avantages, à payer une indemnité à ce tiers. Le fondement de cette indemnité est le principe de l’enrichissement sans cause. Personne ne doit s’enrichir aux dépens d’autrui, si cet enrichissement n’est pas justifié par une raison équitable.

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    B – Le droit d’accession aux fruits et produits

    Nous avons précisé au numéro 22 ci-dessus ce qu’il faut entendre par fruits et par produits. Nous avons également relevé qu’une distinction n’est pas à faire entre ces deux notions, tant que c’est le propriétaire lui-même qui perçoit ces fruits et produits.

    Il est possible que des améliorations aient été apportées à une chose par un possesseur qui, ni en vertu d’un contrat, ni en vertu de la loi, n’a droit à la jouissance de cette chose. Dans cette hypothèse, le Code civil distingue entre le possesseur de bonne foi et le possesseur de mauvaise foi.

    Ce premier possesseur est celui qui a cru légitiment qu’il était le vrai propriétaire du bien frugifère. Le possesseur de mauvaise foi est, par opposition, celui qui avait conscience qu’il n’était pas le propriétaire légitime de la chose.

    Le possesseur de mauvaise foi n’a pas droit aux fruits et produits de la chose qu’il possède illégalement. Si donc le vrai propriétaire exerce une action en revendication contre ce possesseur, ce dernier doit rendre, non seulement la chose elle-même, mais également les fruits et produits qu’il a perçus, ou même négligé de percevoir. Comme seule concession, l’article 548 accorde au possesseur de mauvaise foi le remboursement « des frais de labours, travaux et semences ».

    Le Code civil est toutefois muet sur la base d’évaluation de ces derniers frais, tout comme il ne dit rien sur la date qu’il faut prendre en considération pour évaluer les fruits et produits perçus par le possesseur de mauvaise foi et qu’il doit rendre au propriétaire effectif du bien. Nous rencontrerons cette même question quand nous examinerons les problèmes en rapport avec les constructions et plantations qu’une personne réalise sur un terrain, dont elle n’est pas propriétaire (cf. numéros 37 et suivants).

    Quant au possesseur de bonne foi, il peut conserver les fruits perçus par lui. Il n’a toutefois pas droit aux produits. Nous examinerons au numéro 269 à quelles conditions un possesseur doit répondre pour qu’il puisse être considéré comme étant de bonne foi.

    26

    C – Propriété du dessus et du dessous

    L’article 552 prévoit que la propriété du sol emporte la propriété du dessus et celle du dessous.

    1. La propriété du dessus

    1) Celle-ci comporte le droit pour le propriétaire de faire, sur son sol, toutes plantations et constructions qu’il juge indiquées. Toutefois, cette règle générale renferme une série de restrictions d’ordre légal, ou du moins d’ordre administratif. Ces dérogations s’appliquent avant tout au domaine de la construction. Nous en verrons les plus essentielles quand nous étudierons les restrictions légales au droit de propriété (cf. numéros 87 et suivants).

    2) La prérogative précitée permet également au propriétaire d’un fonds de s’opposer à tout passage ou à tout empiétement d’un tiers sur son terrain. Le propriétaire peut contraindre son voisin à couper les branches des arbres débordant au-dessus de son sol. Il est en droit de s’opposer à l’établissement de lignes de câbles au-dessus de son terrain. Cependant cette règle ne s’applique pas à l’égard de quelques administrations ou concessionnaires fournissant certaines énergies (électricité, gaz) ou faisant certaines prestations de services (téléphone).

    3) Le propriétaire d’un fonds est présumé propriétaire de toutes les constructions et plantations, même faites par un tiers sur son terrain, sous réserve des dispositions prévues au point précédent.

    4) Le propriétaire sus-visé est de même propriétaire de l’espace se trouvant au-dessus de sa propriété, donc de la couche d’air se situant immédiatement au-dessus de son fonds. Sur cet espace, le propriétaire jouit d’un droit de propriété et peut s’opposer même à des atteintes qui ne lui causent pas de préjudice actuel ou virtuel, sous réserve évidemment des servitudes légales visées au point 2 ci-dessus.

    Il n’est toutefois nulle part précisé jusqu’à quelle hauteur une personne est propriétaire de la couche d’air se situant immédiatement au-dessus de son fonds. Il semble néanmoins normal que ce droit ne soit conféré au propriétaire que pour l’usage normal de son bien.

    Une restriction légale importante à ce droit résulte essentiellement de la réglementation sur la navigation aérienne. Un propriétaire ne saurait évidemment s’opposer au survol de sa propriété par des avions ou des hélicoptères.

    Bien que la propriété du sol emporte la propriété du dessus, il est possible au propriétaire d’un fonds de détacher la propriété du dessus de ce fonds. Ainsi, il peut céder contractuellement à un tiers le droit de planter ou de construire sur sa propriété. On parle dans ce cas du droit de superficie. Ce droit, qui constitue un droit réel, sera examiné sous les numéros 441 et 442.

    27

    2. La propriété du dessous

    La propriété ne porte pas seulement sur ce qui est au-dessus du sol, mais également sur ce qui se trouve dans le dessous d’un terrain. Jusqu’à quelle profondeur peut aller ce dessous ? -On doit logiquement admettre que le droit de propriété sur le sous-sol n’existe que dans la mesure où celui-ci se prête effectivement à une utilisation pratique pour réaliser des fouilles ou faire des constructions souterraines.

    Tout comme nous l’avons vu pour la propriété du dessus, celle du dessous peut être détachée, par convention, de la surface de la propriété (par exemple, pour faire des installations souterraines ou pour exploiter les richesses du sous-sol).

    Il appartient à un tiers, non propriétaire du fonds, qui revendique la propriété du sous-sol, de prouver sa prétention. En effet, aux termes de l’article 552 alinéa 1er, « la propriété du sol emporte la propriété du dessus et celle du dessous ». Le Code établit donc une présomption de propriété en faveur de la personne propriétaire d’un fonds. Néanmoins, la jurisprudence admet qu’il s’agit en l’occurrence d’une présomption simple, c’est-à-dire susceptible d’être renversée par la preuve contraire.

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    D – Limite de la propriété du dessous

    De même que la propriété du dessus n’a pas un caractère absolu, celle du dessous est également soumise à des limites.

    À cet égard, un certain nombre de lois, pour la plupart d’origine assez récente, sont venues soumettre la propriété du dessous à des restrictions.

    Des considérations d’intérêt général ont entraîné des dérogations à la liberté du propriétaire de pratiquer des fouilles ou des excavations. S’y sont ajoutées, à une époque plus récente, des considérations d’environnement et de protection de la nature.

    Une première catégorie concerne les différentes lois régissant l’exploitation des mines, minières et carrières. Il convient de mentionner à cet égard la loi du 21 avril 1810 concernant les mines, minières et les carrières. Cette loi a été modifiée à plusieurs reprises.

    Jusqu’à une époque récente, les mines ont joué un grand rôle économique dans notre pays, alors que le minerai était la base de notre sidérurgie. Il existait donc une abondante législation à ce sujet, traitant notamment des droits et devoirs des propriétaires de terrains, sous lesquels se trouve ce minerai, ainsi que les redevances à payer par les sociétés devenues concessionnaires de ces mines. Aujourd’hui, les mines ne sont plus en exploitation. Nous nous dispensons en conséquence d’en analyser le régime juridique.

    Les restrictions relevant du domaine de la protection de la nature ont trouvé leur expression essentiellement dans la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles. Nous examinons plus en détail cette loi sous le numéro 101.

    Certaines installations sont également assujetties au régime de la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés. Nous examinons sommairement cette loi sous le numéro 97.

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    E – Le droit d’accession sur ce qui s’incorpore à la chose

    1. Les divers modes d’accession

    Le propriétaire d’une chose acquiert la propriété de tout ce qui s’incorpore à cette chose.

    Cette accession peut porter sur un meuble ou sur un immeuble. Elle est naturelle ou artificielle, suivant qu’elle se fait sans intervention de l’homme ou par son activité.

    Dans la présente étude, nous nous limitons à l’accession immobilière, qui présente le plus d’intérêt.

    2. Accession naturelle au profit d’un immeuble

    L’accession, due au seul fait de la nature, fait acquérir au propriétaire d’un immeuble les biens suivants :

    a) des choses mobilières inanimées,

    b) quelques espèces animales,

    c) des accroissements résultant de l’effet des cours d’eau.

    30

    2.1  Choses mobilières inanimées

    Cette espèce d’accession est peu importante. Elle a trait essentiellement au trésor découvert dans la propriété d’une personne.

    Le régime de celui-ci est réglementé par l’article 716, aux termes duquel : « la propriété d’un trésor appartient à celui qui le trouve dans son propre fonds ; si le trésor est trouvé dans le fonds d’autrui, il appartient pour moitié à celui qui l’a découvert et pour l’autre moitié au propriétaire du fonds. Le trésor est toute chose cachée ou enfouie sur laquelle personne ne peut justifier sa propriété et qui est découvert par le pur effet du hasard ». Cette règle subit certaines restrictions résultant de la loi du 18 juillet 1983 concernant la protection des sites et monuments nationaux.

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    2.2  Animaux

    L'article 564 cite certains animaux demi-sauvages, qui, lorsqu’ils quittent un domaine pour un autre, deviennent la propriété du maître de ce dernier domaine. Cet article ne s’applique cependant pas, lorsque ces animaux ont été attirés par fraude ou artifice.

    Quels sont les animaux qui, en changeant de fonds, changent également de propriétaire ?

    L’article 564 sus-visé cite à cet égard les lapins des garennes (réserve où les lapins vivent en semi-liberté), les pigeons des colombiers et les poissons des étangs. La jurisprudence a étendu cette catégorie d’animaux au gibier sauvage, pour autant qu’il soit enfermé dans un enclos. Le gibier vivant à l’état libre est considéré comme res nullius, c’est-à-dire comme bien sans maître. Théoriquement, il appartient donc à celui qui s’en empare. Mais, pratiquement, l’appropriation du gibier est soumise à la législation sur la chasse, limitant le droit de s’approprier ces animaux. La même règle s’applique aux poissons vivant dans les eaux courantes. Ils sont aussi des biens sans maître, mais leur prise est régie par la législation sur la pêche.

    L’article 564 ne s’applique pas non plus aux animaux de basse-cour (volailles et lapins). Lorsque ces animaux s’échappent, leur propriétaire peut les revendiquer de la personne, sur le fonds de laquelle ils se sont enfouis.

    2.3 Accroissements résultant de l’effet des cours d’eau

    À cet égard, il y a lieu de distinguer entre plusieurs phénomènes naturels : a) l’alluvion et le relais (avulsion) ; b) la formation d’une île ; c) le changement de lit d’un cours d’eau. Ces phénomènes sont régis par les articles 556 à 563.

    32

    2.3.1  Alluvions et relais

    On appelle alluvions les terrains qui se forment dans un cours d’eau. L’alluvion consiste en un dépôt de vases et de graviers le long des rives de ces cours. Les relais résultent du retrait des eaux d’un cours d’eau. Ce sont des parties de terrains que les eaux d’une rivière mettent à nu, en se portant de façon insensible d’une rive sur l’autre.

    Les alluvions et relais appartiennent, en général, au propriétaire des fonds le long desquels ils se sont formés. La condition de cette acquisition est cependant que ces alluvions et relais se soient constitués progressivement, c’est-à-dire au cours d’une période prolongée. L’article 556 parle de « successivement et imperceptiblement ».

    Les articles 556 et 557 ne s’appliquent plus dans le cas d’un phénomène abrupte et brusque. L’article 559 prévoit que si un fleuve « enlève par une force subite une partie considérable et reconnaissable d’un champ riverain et la porte vers un champ inférieur ou sur la rive opposée, le propriétaire de la partie enlevée peut réclamer sa propriété, mais il est tenu de formuler sa demande dans l’année. »

    L’article 556 est applicable aux rivières navigables et flottables ou non. Qu’est-ce à dire ? Le Code civil, notamment l’article 538, classe les cours d’eau en rivières ou fleuves navigables et flottables et en rivières et fleuves non navigables, ni flottables. Les premiers appartiennent au domaine public et ne sont donc pas susceptibles d’appropriation privée. Nous en étudierons les effets sous le numéro 118. Signalons que, dans notre pays, les seules rivières navigables et flottables sont la Moselle, et en partie, la Sûre.

    Les cours d’eaux non navigables et non flottables sont, dans une certaine mesure, susceptibles d’une appropriation privée.

    On pourrait donc logiquement conclure de cette classification que l’acquisition des alluvions, prévues par l’article 556, ne s’opérerait pas dans les rivières navigables et flottables. Il n’en est cependant rien, alors que l’article précité ne fait pas de distinction entre les deux catégories de cours d’eau. Il oblige seulement les nouveaux propriétaires à laisser le marchepied ou chemin de halage, conformément aux règlements, et ne présentant actuellement plus d’intérêt.

    L’article 556 ne s’applique cependant pas aux lacs et

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