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Demandons l'impossible: Le roman feuilleton de Mai 68
Demandons l'impossible: Le roman feuilleton de Mai 68
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Demandons l'impossible: Le roman feuilleton de Mai 68

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About this ebook

Portrait d'une famille de la classe moyenne prise dans la tourmente de mai 68.

Mai 1968, Hamon, co-auteur avec son ami Rotman du célèbre Génération (Le Seuil), ça le connaît. Mais là, en choisissant le roman-feuilleton (et l’humour), il décide de nous raconter tout autrement les « événements ».
Le joli mois de mai, on le vit par le biais d’une famille, une famille moyenne, trois enfants, comme tout le monde, la province pas très loin, la guerre pas oubliée, le tremplin des Trente Glorieuses. L’héroïne, c’est la mère, une jeune femme au foyer qui, au fil des jours, va se vouloir une autre femme s’évadant de sa condition seconde.
Au fond, 68, c’est ça : une crise, une mise à jour qui atteint chacun dans l’intimité, qui bouscule tout le monde – révolutionnaire ou pas.

La chronique émouvante et jouissive d'une époque mythique !

EXTRAIT

Le coach, il me prend pour une débile, il est persuadé que mes derniers neurones sont morts. Pendant les séances du mercredi, il nous regarde, les vieilles, de manière soupçonneuse, comme un juge, comme nous regardait mon institutrice de neuvième, Mme Balanan, qui relevait les dictées avec répugnance avant même d’avoir compté nos fautes. Bien sûr que les gâteuses ne manquent pas, à l’Escale sereine (c’est le nom de la maison, une maison de la SNCF, j’y ai droit puisque je suis veuve de cheminot). Mais je ne suis pas gâteuse, pas du tout. Et je le prouve. C’est plutôt la somme de ce que je retiens qui m’effraie, toutes ces petites choses inutiles, ces détails, ces nuances dont tout le monde se fiche, moi la première. Je n’ai pas fait beaucoup d’études quand j’étais jeune, mais assez pour savoir que j’apprends vite. Je suis montée à Paris dès mes dix-sept ans, ça n’a pas plu à mon père, j’habitais Montparnasse, comme tous les Bretons, j’étais dactylo chez un notaire du boulevard Edgar-Quinet et je n’avais pas besoin de relire le brouillon pour frapper une lettre. C’était gravé là-dedans et ça y est toujours.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Hervé Hamon est un auteur farouchement éclectique.
Après de longues enquêtes historiques ou de société, il nous a donné une trentaine d’ouvrages où transparaît souvent son amour de la mer, et où la passion littéraire ne néglige aucun registre.
LanguageFrançais
PublisherGlyphe
Release dateApr 16, 2018
ISBN9782369341116
Demandons l'impossible: Le roman feuilleton de Mai 68

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    Demandons l'impossible - Hervé Hamon

    Dutronc

    CHAPITRE 1

    LE COACH, il me prend pour une débile, il est persuadé que mes derniers neurones sont morts. Pendant les séances du mercredi, il nous regarde, les vieilles, de manière soupçonneuse, comme un juge, comme nous regardait mon institutrice de neuvième, Mme Balanan, qui relevait les dictées avec répugnance avant même d’avoir compté nos fautes.

    Bien sûr que les gâteuses ne manquent pas, à l’Escale sereine (c’est le nom de la maison, une maison de la SNCF, j’y ai droit puisque je suis veuve de cheminot). Mais je ne suis pas gâteuse, pas du tout. Et je le prouve. C’est plutôt la somme de ce que je retiens qui m’effraie, toutes ces petites choses inutiles, ces détails, ces nuances dont tout le monde se fiche, moi la première. Je n’ai pas fait beaucoup d’études quand j’étais jeune, mais assez pour savoir que j’apprends vite. Je suis montée à Paris dès mes dix-sept ans, ça n’a pas plus à mon père, j’habitais Montparnasse, comme tous les Bretons, j’étais dactylo chez un notaire du boulevard Edgar-Quinet et je n’avais pas besoin de relire le brouillon pour frapper une lettre. C’était gravé là-dedans et ça y est toujours.

    Alors le coach, il m’amuse avec ses airs magnanimes, cette façon qu’il a de se pencher sur nous en parlant trop fort, de nous appeler ma belle comme s’il nous draguait à la plage, de vouloir tant nous stimuler. C’est son mot fétiche, stimuler, il est payé pour nous stimuler.

    Je ne lui ai pourtant rien dit d’extraordinaire. Je lui ai dit la vérité. Je lui ai dit que, pour moi, la révolution a commencé un dimanche d’avril 1968, juste avant la grand-messe que devait célébrer mon beau-frère Pierrot. La scène du début, je la situerais là, très exactement. J’étais dans notre chambre en combinaison mauve, avec Bernard, mon mari. Vous vous rappelez les combinaisons ? On portait ça sous la robe, c’était quelquefois brillant, quelquefois en nylon transparent, avec un liseré de dentelle. Quand ça dépassait un peu, les gens se moquaient, la formule consacrée était que la fille cherchait une belle-mère.

    Eh bien, moi, j’affirme que ce dimanche d’avril, entre 10 et 11 heures, dans ma vie, la révolution a commencé. Je l’ignorais, naturellement. Je connaissais le nom de Karl Marx parce que Bernard avait eu sa carte du Parti, mais je ne connaissais pas encore la phrase célèbre de Karl Marx :

    « Les hommes font leur histoire et ne savent pas qu’ils la font. » Ce qui est rudement vrai, la suite l’a montré.

    Le coach m’a regardée avec indulgence, avec lassitude. J’ai vu fonctionner sa cervelle mieux qu’au scanner. Ça y est, Madame Duvergnon a perdu la boule. Elle aura tenu longtemps. J’ai imaginé la fiche qu’il était en train de rédiger mentalement. Mélina Duvergnon, 2 25 08 22 278 052, début de ramollissement cérébral, pas d’Alzheimer mais signes avant-coureurs de démence sénile avec léger délire assorti de confusion, cite Karl Marx et se croit révolutionnaire.

    D’habitude, Bernard aimait observer sa femme en combinaison. Le côté dentelle, le côté « dessous », secret, la transparence peut-être, la phase intermédiaire entre l’habillage et le déshabillage. Ils s’étaient connus très jeunes, elle, c’était son premier amour, ils avaient aussitôt vécu ensemble, elle avait tout de suite été enceinte, ils s’étaient mariés vite fait, dès que possible, et maintenant, ils avaient déjà derrière eux vingt-cinq ans de vie commune. Un quart de siècle. Il n’empêche, quart de siècle ou pas, Bernard continuait de la trouver attirante, vivante, Mélina. Ce qui est également vrai, c’est qu’au fil du temps il le lui disait moins, il oubliait de le lui dire.

    Mais ce matin, l’ambiance n’était pas aux câlins. L’électricité, dans l’air, vibrait comme un essaim de guêpes. C’était ainsi, entre eux. Il suffisait d’un rien pour que l’exaspération flambe. Leurs tempéraments étaient pourtant fort différents. Elle, toute fine, toute brune, les yeux brillants, mordait vite et sec mais se reprochait ensuite ce premier mouvement. Lui tardait plus à démarrer, affichait d’abord une maîtrise dont il était peut-être dupe, puis cédait d’un seul coup, sans transition, et poussait sa gueulante. Ce matin-là, ce matin révolutionnaire, on frôla constamment l’incident. Pour rien. Parce que Mélina, avant de passer la robe à fleurs étendue sur le lit, fourrageait dans les tiroirs de la commode sans trouver ce qu’elle cherchait. Parce que Bernard, chemise blanche pendante, s’apercevait qu’il commençait à boutonner de travers, un cran trop haut.

    La fenêtre était ouverte. On se serait cru à l’été si le cerisier n’était en fleur. La 403 grise, dans l’allée du pavillon de meulière, brillait au soleil. Bernard l’avait préalablement astiquée, comme chaque dimanche, et même un peu plus car ce dimanche-là était exceptionnel.

    – Qu’est-ce que j’ai fait au Bon Dieu pour avoir un frangin curé ! Je n’ai plus l’âge d’aller pointer à la messe, quand même !

    La moustache en bataille, il ressemblait à Yves Robert dans La Jument verte.

    – Tu sais très bien que ce n’est pas une messe comme les autres. Vingt ans de prêtrise, ça s’appelle un jubilé.

    Tout en parlant, Mélina faisait claquer les tiroirs.

    – Eh bien je jubile, amen, je jubile ! T’es contente, toi qui crois au paradis ?

    Mélina ne prit pas la peine de répondre. Le temps filait. Bernard, lui, se battait avec la cravate, une cravate noire tricotée.

    – Et qu’est-ce que tu cherches, d’abord, qu’est-ce que tu cherches comme ça ?

    – Mon collant fumé. J’aurais juré…

    – Si t’avais gardé tes porte-jarretelles…

    Terrain miné, les porte-jarretelles. La maison Dim avait, cinq années plus tôt, ourdi un complot contre l’érotisme conjugal, inventant le collant mousse. Les mâles étaient en deuil. Mélina choisit l’échappée banale.

    – C’est un calvaire, le porte-jarretelles, ça tourne tout le temps, tu sais bien.

    – Un calvaire…

    Bernard poussa un soupir désabusé. Mélina ne l’écoutait guère, elle surveillait sa montre, cédait à la panique.

    – On va être en retard, tu vas voir qu’on va être en retard ! La voix s’étranglait, elle s’affolait pour de bon.

    – Tu resteras toujours une fille d’adjudant, hein ? C’est plus fort que toi, la trouille de manquer le rassemblement.

    Là, c’était risqué, et Bernard ne pouvait l’ignorer. L’adjudant-chef était mort en Indochine, la mère de Mélina était morte en couches. Côté famille, chez elle, c’était le cimetière des braves, un désert douloureux qu’il était imprudent de violer au coin d’un bon mot. Bernard vit sa femme se hérisser comme un chat qui va être jeté à l’eau. C’est le collant qui évita la guerre, le collant niché en boule derrière une pile de lingerie.

    – Bien sûr qu’il était là !

    Elle l’enfila prestement sous la combinaison mauve, empoigna la robe.

    – Laisse-le tranquille, l’adjudant. T’es vraiment injuste. Je suis devenue bougnate pour l’amour de toi, et ça ne te suffit pas encore ? Je vais te dire, moi : si on est en retard, je ne me pardonnerai pas de faire un coup pareil à Pierrot.

    La guerre couvait à nouveau. Cette fois, ce sont les boutons de manchette qui sauvèrent la situation. Bernard fourrageait dans les poches de son costume.

    – … Tiroir de la table de nuit, voyons !

    – Merci, Maman.

    Le ton était ironique et l’atmosphère se détendit, réchauffée par un souffle complice. Tous deux se moquaient des couples qui ont oublié leurs prénoms respectifs et ne paraissent plus unis que par le statut parental.

    – De rien, mon grand.

    Mélina poursuivit sur le même mode. Elle lissait maintenant sa robe à deux mains, s’assurant que la combinaison était invisible, et Bernard fut troublé par le geste. Il l’aimait ainsi, petit pruneau jamais sec, il aimait qu’elle lui arrive sous le menton, que sa nuque vienne naturellement s’inscrire au creux de son épaule. Soudain, elle parut vaciller, chanceler un peu. Elle prit appui sur l’accoudoir d’un fauteuil, respira fortement. Il bondit, l’enserra de ses bras.

    – Qu’est-ce qu’il se passe ? Ça va, ma puce ? Ça va ? Elle se ressaisit, amorça un sourire.

    – Ça va, bien sûr que ça va. C’est rien. Maman va toujours bien, non ?

    Ils arrivèrent en retard, c’était écrit.

    La paroisse Saint-Joseph-le-Charpentier était pourtant voisine de Malakoff où ils habitaient rue Gagarine. Le bâtiment n’était ni gothique, ni roman, ni même saint-sulpicien, tant s’en faut. Tout de béton gris, tout en angles vifs et verrières dépolies, il incarnait la volonté récente manifestée par les catholiques d’aller vers le peuple, vers les masses laborieuses en rupture de foi, d’arracher la ferveur religieuse aux seuls quartiers bourgeois et clochers ruraux, d’offrir aux damnés de la Terre le spectacle, non des ors romains, mais d’une Église « servante et pauvre ».

    La tribu Duvergnon avait rudement encaissé le choc quand Pierrot, le plus jeune des trois frères (échelonnés tous les deux ans), avait annoncé qu’il se verrait bien prêtre, et pire, prêtre-ouvrier. La religion, on n’était pas contre, même si Bernard se proclamait libre penseur. On n’était pas contre mais à dose pondérée, baptêmes, mariages, Pâques et autres étapes rituelles. Et puis c’était rageant : pour une fois qu’on avait engendré un intellectuel, voici qu’il retournait au cambouis.

    Traditionnellement, l’aîné reprenait le bistrot familial, orgueil et unique patrimoine du clan. À l’origine, en 1917, ce n’était qu’un petit dépôt de charbon et une minuscule cave à vin acquis par Maurice Duvergnon, le pionnier, monté de Pierrefort avec rien en poche ou si peu, et qui avait repéré l’affaire, située près des Halles, dans L’Auvergnat de Paris. Gégé, quarante ans plus tard, avait donc hérité du bistrot qui, aujourd’hui, se donnait des allures de brasserie. Les autres enfants, eux, n’avaient rien à reprendre ni à prendre, sinon leur courage à deux mains. Bernard était entré chez les cheminots par la petite porte, puis avait taillé sa route. Et le cadet, Pierrot, sacré Pierrot si l’on ose dire, s’était mis conjointement à parler latin et à chanter L’Internationale. Ses père et mère, aujourd’hui défunts, ne savaient s’ils devaient se féliciter de compter un notable dans leurs rangs ou s’alarmer qu’un loup pénètre dans la bergerie. On n’avait pas entendu pareille histoire depuis Camille, la petite cousine qui, en 52, était devenue danseuse dans un cabaret du dix-huitième, et quand on dit danseuse, on se comprend.

    En tout cas, l’église était bondée. De paroissiens. D’amis. De camarades. Pierrot était peut-être un drôle de citoyen mais il faisait le plein.

    Honte sur eux. Le rose aux joues, ce qui lui allait fort bien, Mélina fut contrainte, avec son mari, de remonter lentement la nef, ses talons claquant sur le ciment postconciliaire (le bruit fâcheux était amplifié par l’écho propre aux maisons du Seigneur). Tac tac tac, la honte, la honte, la honte. Les visages qui pivotent, les regards qui convergent, les bouches qui chuchotent, le recueillement profané. J’ai l’impression d’être nue en public, songeait Mélina, et elle songeait aussi que cette pensée n’était guère convenable à la messe. Elle apercevait, très loin, les places qui leur étaient réservées, au deuxième rang, à côté de leurs trois enfants, eux-mêmes flanqués de l’oncle Gégé, de son épouse Catherine et des jumelles dont Dieu les avait dotés. Catherine, la punaise, devait se régaler comme elle se régalait toujours en pareille circonstance.

    – Le Seigneur soit avec vous, dit Pierrot, bras écartés, paré d’une simple aube blanche : il récusait les chasubles et autres tenues pompeuses.

    Il venait de se retourner vers l’assistance et de découvrir les arrivants. Il sourit d’une oreille à l’autre car il était de nature débonnaire et soutenait que Dieu, qui a toutes les vertus, possède nécessairement le sens de l’humour.

    – Soyez les bienvenus, poursuivit-il. Notre Seigneur avait un faible pour les fils prodigues et les ouvriers de la dernière heure. Vous nous êtes d’autant plus chers.

    Mélina, raide et gauche, s’assit près de sa fille Nadine qui l’observait avec malice. Elle lui retourna un coup d’œil sombre. Jupe courte, corsage vert pomme et couettes nouées par de simples élastiques. Jupe très très courte et corsage échancré. Elle exagère, se dit Mélina, elle se croit tout permis, la petite, depuis qu’elle est en terminale. Elle ne rentre plus le samedi soir. Qu’est-ce qu’elle fiche le samedi soir au juste ? Je suis chez des copains, je suis chez des copains… Quels copains ? Qu’est-ce que ça veut dire, exactement, un copain – elle n’a que ce mot-là à la bouche ? Dix-sept ans. Il faut que je m’en mêle, c’est rien qu’une gosse. Nadine ne bronchait pas. Et l’autre, plus loin, Catherine, la femme à Gégé (il disait « ma femme » trente fois par heure, Gégé), qui se fendait d’un sourire faux cul…

    Le prêtre commenta l’Évangile selon saint Luc. C’était l’histoire d’un homme très pieux qui interrogeait le Christ. Un homme qui appliquait les règles, observait les commandements depuis sa jeunesse. Que lui restait-il à faire pour connaître la vie éternelle ? « Une seule chose te manque, répondit Jésus. Va, vends ce que tu as, donnes-en le prix aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel. » L’autre, entendant cela, devint maussade et s’éloigna. Car il possédait beaucoup de propriétés.

    Pierrot ne souriait plus. Il s’exprimait avec fougue.

    – Demandons-nous, frères et sœurs, qui nous aurions suivi : ce singulier prophète qui prêchait le dépouillement, ou bien notre appétit de consommation égoïste…

    Et il resta silencieux, face aux fidèles, tête baissée et bras croisés, laissant chacun réfléchir, laissant l’harmonium jouer pensivement.

    Nadine donna un coup de coude à sa mère.

    – Antoine (elle désignait son frère, lequel observait la cérémonie d’un œil narquois) voudrait savoir si tu penses que l’oncle Gégé vendrait son bistrot pour suivre le petit Jésus.

    Antoine se pencha et souffla :

    – Évidemment, ça ne fait pas un pli, c’est un saint, l’oncle Gégé.

    – Chttt… protestèrent en chœur Bernard et Catherine. Gégé, lui, semblait indifférent à la scène. Les yeux mi-clos, il arborait « sa gueule d’apôtre » selon l’expression favorite de Bernard.

    Mélina sourit tandis que prières et répons s’enchaînaient. Elle aimait bien le folklore de la tribu Duvergnon, les querelles recuites entre Gégé l’éternel gaulliste et Bernard le cégétiste de toujours, la manière que tous avaient de s’étriper puis de se réconcilier en partageant des tripoux.

    Comme toutes les familles, celle-ci abritait maintes aigreurs et contentieux. Mais au bout du compte, le lien ne se perdait pas. Les Duvergnon, elle qui n’était, suivant la formule usuelle, qu’une « pièce rapportée », elle les aimait bien, elle les appelait « ses Gaulois » et les prenait en bloc – même Catherine.

    Après la consécration et l’Agnus Dei, Pierrot se rapprocha du micro, un robuste micro à pied devant lequel il se planta comme un rockeur yéyé.

    – Nous allons maintenant chanter ensemble le chant de Moïse, chant d’espérance en des jours meilleurs, chant de tous les opprimés qui prennent le risque d’affronter

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