Dis, pourquoi tu m'fais du mal?: Mettons fin aux maltraitances faites aux enfants
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...parce que 2 en meurent chaque jour, il est temps de prendre conscience et d’agir contre les maltraitances faites aux enfants. Les coups n’ont jamais été une réponse. L’enfant est un être fragile et vulnérable, en construction, que l’on doit protéger pour qu’il devienne un adulte autonome et responsable, bien dans sa peau.
Parce qu’une fille sur huit et un garçon sur dix sont victimes d'abus sexuels avant l'âge de 18 ans, nous devons tous ouvrir les yeux devant ce fléau qui détruit des vies. Plus de 4 millions de cas d’inceste avérés, sans doute davantage, car les violences faites aux enfants sont taboues.
Un ouvrage incontournable, parce que nous sommes responsables de tous les enfants.
EXTRAIT
Les enfants ne peuvent pas se défendre et ils ont peur de parler. C’est difficile de dire que son papa, sa maman, un membre de sa famille, un ami, est violent ou qu’il a commis un abus sexuel ; surtout que les enfants même maltraités aiment leurs parents. Le sentiment de culpabilité, les menaces, la peur, le chantage affectif, sont les principaux facteurs qui empêchent un enfant de parler. Mais s’il en parle, il faut le croire et ne pas le rejeter ou penser que ça ne peut pas arriver. Quand ils peuvent en parler, très peu d’enfants inventent des attouchements ou un viol, d’abord parce qu’ils ne savent pas ce que cela signifie. Nous connaissons les ruses employées par les agresseurs pour faire taire les enfants, Il faut donc leur expliquer très tôt.
L’enfant est fragile, dépendant, en construction, ce qui le rend vulnérable, et rien n’autorise un adulte à profiter de cette vulnérabilité pour imposer quoi que ce soit. Le dialogue est, à mon sens, la première forme d’éducation, même si cela demande du temps. Pour cela, il faut connaître ce qu’est un enfant, vouloir comprendre sa personnalité, sans systématiquement imposer sa toute-puissance de parent.
CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE
Analytique, méthodique, documenté et précis, ce livre est un rappel à la réalité pour une société qui a oublié les moteurs fondateurs des systèmes sociaux. [...] C’est un livre brillant, servi par une plume magistrale. - Laurence Biava, Actualitté
À PROPOS DE L'AUTEUR
Nathalie Cougny est artiste peintre, poète et auteur de livres de société, romans, histoires pour enfants, spectacle.
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Dis, pourquoi tu m'fais du mal? - Nathalie Cougny
QUI EST L’ENFANT ?
L’enfance est la période située entre la naissance et l'adolescence, donc du premier jour de la vie jusqu’à l’âge de la puberté, vers 13 ans. Le corps se transforme, mais pas seulement. L’enfant va, au fil des ans, prendre conscience de sa personne et développer son sens moral.
Bien sûr, dans le ventre de la mère, il y a aussi des stades différents d’évolution. On parle d’embryon, à partir du moment où le système nerveux central commence à se mettre en place ; et jusqu'à la naissance il est question de fœtus, quand les organes sont différenciés et commencent à fonctionner.
A ces différents stades, s’il y a de la violence envers sa mère et donc lui-même, il le perçoit déjà. Par exemple, "Dans 40 % des cas, les violences conjugales commencent pendant la grossesse et peuvent être plus graves pendant la grossesse pour 2 femmes sur 3 ; 4 fois plus de femmes signalent de très mauvais traitements pendant la grossesse : coups, menaces avec armes, agressions sexuelles. Le fœtus se retrouve alors en danger. Il est exposé à un stress physiologique important, avec des retentissements cardio-vasculaires et neurologiques, à un risque d'avortement : deux fois plus de fausses-couches chez les femmes victimes de violences conjugales, à une mort in utero par décollement placentaire ou rupture utérine, à une hémorragie fœto-maternelle, à un accouchement prématuré (37% d'augmentation de risque), une souffrance néo-natale, à un petit poids de naissance (17 % augmentation de risque). En effet, le nouveau-né est très sensible aux effets de la violence qui l'entoure et il va développer d'importants troubles psychotraumatiques qui risquent de le mettre encore plus en danger : les pleurs continuels, les troubles importants du sommeil et de l'alimentation, le retard de développement psychomoteurs peuvent être des facteurs de risque supplémentaires de maltraitance : bébé secoué, étouffement, etc. » (Dr Muriel Salmona).
Étymologiquement, le terme « enfant » vient du latin « infans » qui signifie « celui qui ne parle pas ». Chez les romains, ce terme désignait l’enfant dès sa naissance, jusqu’à l’âge de 7 ans.
Cette notion a beaucoup évolué à travers les siècles et les cultures pour finalement désigner l’être humain de sa naissance jusqu’à l’âge adulte. Mais cette conception de l’enfant était large et l’âge de la majorité variait d’une culture à une autre.
La Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant de 1989 définit de manière plus précise le terme « enfant » : « […] tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable ».
L’idée transmise, à travers cette définition et l’ensemble des textes de protection de l’enfance, est que l’enfant est un être humain avec des droits et une dignité.
Ce qui caractérise l’enfant, c’est sa jeunesse et sa vulnérabilité. En effet, l’enfant est un être en pleine croissance, un adulte en devenir, qui n’a pas les moyens de se protéger seul.
Ensuite, l’enfant va connaître différents stades d’évolution selon son âge.
Le stade sensorimoteur : de la naissance à 2 ans
L’enfant utilise ses sens et ses capacités motrices pour découvrir son environnement et se développer. Il est curieux de tout. Durant les neufs premiers mois de sa vie, il exerce des réflexes que l’on dit « innés », c’est-à-dire ceux dont il dispose déjà, par exemple téter le sein ou le biberon, ouvrir ou fermer la main. Il va prendre le contrôle de ces activités et observe les conséquences d’une action.
De l'intention à la représentation : de 9 mois à 24 mois
Ses mouvements sont plus coordonnés. Les actions sont voulues et l’enfant découvre de nouvelles façons d’atteindre son objectif, par exemple soulever sa couette pour prendre un jouet. On peut dire qu’à la fin de ce stade il se souvient de ses actions et comment résoudre un problème.
Le stade préopératoire : de 2 à 7 ans
L’enfant maîtrise le langage et peut se représenter un objet sans que celui-ci soit présent, ou une action sans qu’elle ait lieu. La parole devient plus sociale, les concepts sont plus logiques, même s’il ne peut pas encore tenir compte du point de vue des autres. En revanche, à 2 ans, l’enfant n’a pas conscience du temps. Ce n’est que vers 5 ans qu’il prend conscience que le temps s’écoule et laisse place à des changements : jour, nuit, semaine, mois. Mais à la différence de l’adulte, il se sert de repères comme l’école, Noël, anniversaire, etc.
Le stade des opérations concrètes : 7 à 11-12 ans
L’enfant est maintenant capable d’appliquer les opérations aux objets concrets ; capacité à pouvoir renverser l’effet d’une action ou d’une opération mentale, par exemple transvaser de l’eau d’un verre à l’autre et vice versa. Parmi les autres acquisitions de ce stade, l’enfant peut adopter le point de vue des autres, classer les objets en série, par exemple : du plus court au plus long ; une compréhension des concepts relationnels fondamentaux, par exemple : « plus grand que », « plus lourd que ».
Le stade des opérations formelles : 11/12 ans à 14/16 ans
Ce stade débute à la puberté et est caractérisé par la maturité cognitive ou l’intelligence adulte.
Les enfants et les adultes à ce stade sont capables de penser de manière abstraite. C’est-à-dire qu’ils sont capables de résoudre des problèmes géométriques sans devoir se référer à une figure existante. Ils déduisent des principes généraux des règles et peuvent se concentrer simultanément sur de nombreux aspects d’une situation et parvenir à se faire une opinion et à résoudre des problèmes.
A ce stade l’enfant fait preuve d’un raisonnement logique.
L’enfant va connaître aussi plusieurs stades de notions sociales et morales
L’enfant entre 2 et 3 ans
L’enfant entre deux et trois ans acquiert de l’autonomie. Il entre dans une période d’opposition par le « non » et l’affirmation de soi. Il éprouve des sentiments très intenses, souvent incompréhensibles pour l’adulte, car très ambivalents (l’enfant peut profondément aimer et détester un même objet simultanément). Si les débuts de l’acquisition du langage permettent à l’enfant de communiquer ses désirs et besoins, l’enfant exprime encore principalement ce qu’il ressent par le biais du corps.
L’enfant de 3 à 6 ans
A cet âge, l’enfant éprouve sa propre identité et il prend conscience de l’ambivalence de ses sentiments. Il continue l’affirmation de soi rendue possible grâce au « non ». Il fonctionne de manière égocentrique. Il ne peut s’imaginer ce que les autres ressentent et les conséquences lointaines de ses actes. Il perçoit la souffrance des autres, mais il a de la difficulté à en comprendre les raisons. Son égocentrisme le pousse à se sentir responsable, coupable des situations qu’il ne comprend pas. Sur le plan cognitif, il peut comprendre certaines situations, mais il ne les accepte pas. Sa compréhension intellectuelle semble déconnectée du désir affectif. L’entrée de l’enfant à l’école lui permet d’avoir une vie sociale en dehors de sa famille.
L’enfant de 6 à 10 ans
L’enfant acquiert un sens moral qui influence ses règles de vie et le jugement qu’il porte sur autrui. La pudeur et une plus grande discrétion dans les marques de tendresse expriment la nécessité pour l’enfant de se protéger en mettant une certaine distance entre lui et ses parents. L’apparition des relations amicales marque un tournant dans la vie affective. Il investit davantage ses pairs selon un mode relationnel moins passionnel. Lors de situations inhabituelles, il a besoin de trouver un coupable (qui ne soit pas lui) et de le punir en refusant de manifester son amour à cette personne. Il ne supporte que très difficilement deux sentiments contraires. Un de ses principaux objectifs est de connaître la vérité (besoin d’avoir une seule personne de référence, amenant au phénomène d’exclusion des autres personnes n’ayant pas la même version des faits).
L’enfant de 10 à 12 ans
L’enfant de dix à douze ans acquiert et développe des notions et des valeurs qui lui sont personnelles et qui ne sont plus obligatoirement celles de son environnement immédiat. Il ressent une grande émotivité affective.
En effet, il est extrêmement sensible aux situations vécues, il ressent avant de penser. Ses sautes d’humeur et de caractère entraînent un manque de stabilité dans ses opinions ; il reste encore très exposé aux influences extérieures notamment celles de l’adulte. Par rapport à l’adulte, une attitude double est ressentie, d’une part, le système adulte est rejeté parce qu’il le rend responsable des injustices et des imperfections qu’il ressent, de l’autre, il a besoin de confronter sa nouvelle pensée à celle de l’adulte, lequel a souvent le dernier mot. Le jeune peut ressentir le sentiment de ne pas avoir pu se défendre à armes égales.
L’adolescent
L’adolescent prend de la distance vis-à-vis du discours de l’adulte, qui n’est plus perçu comme détenteur de la vérité absolue. Il découvre la multiplicité des opinions, les contradictions, les oppositions et peut adhérer à l’une ou l’autre. Sa vision des choses peut être fortement influencée par des éléments extérieurs (amis, lectures ou médias), peu perceptibles par l’adulte. Il peut se réfugier dans un monde constitué uniquement par ses pairs. L’adolescence se caractérise par des mouvements d’affirmation de soi et d’opposition et se définit comme une période de recherche d’identité.
Source : Les dossiers de l’INFOP
LE TABOU DE LA SÉDUCTION
Freud, venu à Paris pour suivre les cours de Charcot, a beaucoup fréquenté aussi la Morgue. Il y a « vu des choses que la Science préfère ignorer » : des autopsies d’enfants massacrés par leurs parents. Dans sa pratique de médecin, il observe puis raconte dans des publications scientifiques que ses patientes névrosées évoquent toutes des violences sexuelles qu’elles ont subies, bien souvent de la part du père ou d’un autre parent proche... S’en suit un tollé dans le monde savant, qui lui fait comprendre qu’on n’incrimine pas impunément l’ordre familialiste et l’honneur des pères ou des oncles. Malgré le soutien de certains proches comme Sandor Ferenczi, la théorie dite de la « séduction » sera finalement abandonnée par le fondateur de la psychanalyse et par ses disciples, au profit de la désormais célèbre théorie de l’Oedipe, beaucoup moins inconvenante puisqu’elle renvoie sur l’enfant l’initiative d’un rapport libidinal, voire prédateur, à ses parents.
Les mots utilisés par Freud : viol, abus, attaque, attentat, agression, traumatisme, séduction sont sans ambiguïté sauf le dernier. L’adulte séducteur dira pour sa défense que l’enfant était séduisant et qu’on ne sait plus qui séduit qui... C’est donc cet euphémisme assez vague qui, après 1897, deviendra l’appellation officielle de la théorie abandonnée.
Les violences imposées à l’enfant n’ont pas toutes été brutales, mais qu’elles aient provoqué de la volupté ou de l’effroi et du dégoût, le traumatisme est produit par l’intensité extrême de l’émotion ressentie dans un corps et une organisation psychique profondément immatures. Quand l’abus a été précoce (avant 4 ans), l’effroi et le dégoût préparent l’hystérie qui se déclenchera à la puberté, à la suite d’un événement donnant sens après-coup à la violence ancienne. Lorsque la première violence intervient après 4 ans, l’événement ultérieur produira plutôt la névrose obsessionnelle (avant 8 ans) ou la paranoïa. Il y a donc une première violence que l’immaturité de l’enfant lui interdit d’élaborer et qui donne lieu à un refoulement, puis, à la puberté, un second événement qui vient percuter le souvenir de la première violence et lui fournit une capacité de destruction psychique importante.
Cette théorie présentée le 21 avril 1896, dans une communication à la Société de Psychiatrie et de Neurologie de Vienne, est accueillie par un silence glacial et on lui conseille de ne pas la publier. Krafft-Ebing directeur du Département de Psychiatrie à l’Université de Vienne déclare : « On dirait un conte de fées scientifique. » Freud qualifie ses auditeurs « d’imbéciles incapables de se rendre compte qu’on leur indique la solution d’un problème plusieurs fois millénaire ». Il écrit : « J’eus le sentiment d’être méprisé et que tout le monde me fuyait. »
En 1932, Ferenczi – proche disciple et ami de Freud – apportera, au Congrès de l’Association Internationale de Psychanalyse une contribution importante où il ose reprendre à son compte la théorie de la séduction à partir de son expérience de praticien : « L’objection, à savoir qu’il s’agit des fantasmes de l’enfant lui-même, c’est-à-dire de mensonges hystériques, perd malheureusement de la force par suite du nombre considérable de patients en analyse qui avouent eux-mêmes des voies de fait sur des enfants ».
Cette contribution sera accueillie par les psychanalystes avec une hostilité comparable à celle que Freud avait connue en 1896. On veut l’empêcher de parler, Freud lui-même insiste pour qu’il ne publie pas et Jones, le premier biographe de Freud, ira jusqu’à le déclarer psychotique.
Scandale dans la famille
Indépendamment de son côté subversif pour la société patriarcale, la thèse avait de quoi déranger non seulement la minorité des adultes pervers, mais aussi les parents les plus respectueux qui avaient une difficulté extrême à concevoir – projection oblige – que des pères puissent avoir sur leur enfant un regard à ce point différent du leur et des gestes aussi monstrueux.
Il faudra encore un siècle et le combat acharné des féministes pour qu’on se décide à prendre au sérieux les victimes au lieu de les mettre en hôpital psychiatrique ou de les lobotomiser quand elles persistaient à accuser leur géniteur, un homme tellement au-dessus de tout soupçon.
C’est peut-être la mort du sien, le 23 octobre 1896, une mort très durement ressentie, qui va conduire Freud à renoncer à une découverte par trop scandaleuse puisqu’elle l’amenait à soupçonner jusqu’à son propre père. Dans la nuit qui précède son enterrement, il fait un rêve dans lequel il lit sur une pancarte : « On est prié de fermer les yeux ».
À la pression de ses pairs pour qu’il abandonne, vient donc se joindre une pression interne d’autant plus forte que son athéisme ne l’empêche pas d’être profondément imprégné par cette culture biblique qui sacralise le père et promet un châtiment terrifiant à celui qui lui manque de respect. « Que l’œil de celui qui