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Saint Augustin: Pasteur, théologien et maître spirituel
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Saint Augustin: Pasteur, théologien et maître spirituel

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Saint Augustin (354-430) est l’un des géants de la patristique et plus largement de la civilisation occidentale, car un certain nombre de ses intuitions, comme la place du sujet ou celle de la relation, sont encore fondamentales aujourd’hui.
Parmi les Pères de l’Église, saint Augustin est celui dont la vie est la mieux connue, car non seulement il a eu un biographe, mais il a également retracé sa biographie spirituelle ou plus précisément l’aventure de sa conversion dans les Confessions.
Après l’avoir situé dans son contexte, celui de l’Afrique du Nord au tournant du IVe et du Ve siècle, l’activité pastorale d’Augustin est tout d’abord explorée. Augustin parle de son expérience de prédicateur à travers la métaphore des anges qui montent et qui descendent, de l’importance de la catéchèse qu’il déploie à propos de l’eucharistie, de sa prédication pour les fêtes et surtout de la clef de sa pastorale, qui est la charité. Il se place ainsi dans la dynamique de l’amour trinitaire qu’il transmet aux autres, ce qui nous amène à envisager son œuvre de théologien.
Sa théologie, il la dégage de l’Écriture, comme en témoigne sa réflexion sur la création et sur l’image de Dieu en l’homme. Il se situe en disciple de Paul. En fonction de sa propre expérience, il développe une anthropologie solide, consacre des pages mémorables au Christ médiateur. En réponse aux hérésies, il réfléchit sur le motif de l’Incarnation, sur l’unité de l’Église… Pasteur et théologien, il apporte sa contribution à l’ecclésiologie et à l’eschatologie.
Homme de relation et de prière, il fait ressortir la place du Maître intérieur en chacun, reprend plusieurs fois son commentaire de la prière par excellence qu’est le Notre Père et met en évidence l’importance de la louange.

A PROPOS DE L'AUTEUR :

Marie-Anne VANNIER, professeur à l’Université de Lorraine (Metz), a une double formation en philosophie et en théologie. Directrice de l’Équipe de recherche sur les mystiques rhénans, elle s’intéresse depuis longtemps à la théologie et à la spiritualité d’Hildegarde de Bingen. Rédactrice en chef de la revue Connaissance des Pères de l’Eglise, éditée par Nouvelle Cité, Marie-Anne Vannier est l’auteur de nombreuses publications sur saint Augustin, Jean Cassien et Eckhart.
LanguageFrançais
Release dateNov 29, 2019
ISBN9782375821190
Saint Augustin: Pasteur, théologien et maître spirituel

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    Book preview

    Saint Augustin - Marie-Anne Vannier

    couverture

    Du même auteur sur S. Augustin

    Creatio, conversio, formatio chez S. Augustin, Fribourg, Éd. Universitaires, coll. « Paradosis », 1991 ; 2e édition augmentée, 1997, 252 p.

    Augustin et le mystère trinitaire, Paris, Cerf, coll. « Foi vivante », 1993, 144 p. ; 2e éd., Paris, Cerf, coll. « Trésors du christianisme », 2010.

    Les « Confessions » de S. Augustin, Paris, Cerf-Jaca Book, 2007, 173 p.

    S. Augustin. La conversion en acte, Paris, Dervy, 2011, 250 p.

    Dir. Encyclopédie S. Augustin. La Méditerranée et l’Europe IVe-XXe siècle, Paris, Cerf, 2005, 1491 p. (N.B. : Traduction d’une grande partie de l’ouvrage).

    Dir. Saint Augustin et la Bible, Berne, Peter Lang, 2008, 352 p.

    Marie-Anne Vannier

    S. AUGUSTIN PASTEUR,

    THÉOLOGIEN

    ET MAÎTRE SPIRITUEL

    nouvelle cité

    Sommaire

    Titre

    Du même auteur sur S. Augustin

    Préface

    Liste des abréviations des œuvres de S. Augustin

    Œuvres de S. Augustin

    Introduction

    Première partie.

    Études biographiques

    Repères chronologiques

    Qu’en est-il de la biographie de S. Augustin ?

    S. Augustin et la conversion

    Les anticipations du Cogito chez Augustin

    Deuxième partie

    S. Augustin, pasteur : le ministre de la Parole et de la charité

    S. Augustin et la Bible

    La mystagogie chez S. Augustin

    Les diacres d’après S. Augustin

    La prédication chez Augustin et Eckhart

    Les lettres-traités d’Augustin

    Troisième partie.

    S. Augustin théologien

    Anthropologie

    L’anthropologie de S. Augustin

    Création

    Lumen/lux

    Materia, materies

    Mundus

    La beauté chez S. Augustin

    Trace (vestigium)

    La mémoire chez S. Augustin

    Aversio et conversio

    La création et son accomplissement chez S. Augustin

    Christologie

    L’apport du Sermon Dolbeau 26

    Noël, ou le motif de l’Incarnation d’après S. Augustin

    Théologie trinitaire

    S. Augustin et la Trinité

    Ecclésiologie

    L’Église une, sainte, catholique et apostolique chez S. Augustin

    Augustin et la Jérusalem céleste

    Eschatologie

    S. Augustin et le culte des reliques

    L’immortalité chez S. Augustin

    S. Augustin et la résurrection

    Quatrième partie.

    S. Augustin, maître spirituel

    Augustin prédicateur dans les Homélies sur l’évangile de saint Jean

    L’apport des Enarrationes in Psalmos d’Augustin

    La prière de S. Augustin à l’écoute du Psaume 41

    Le ciel chez S. Augustin

    Augustin et la relecture de l’In Lucam d’Ambroise dans les Lettres 147 et 148

    Lumière et illumination chez S. Augustin : relecture d’une question déjà ancienne

    La louange dans l’œuvre d’Augustin

    Conclusion

    Copyright

    Préface

    Un incroyable paradoxe pèse sur la scène culturelle d’aujourd’hui, qui tend à bien des égards à se libérer de la pensée moderne et de ses problèmes non résolus, résultat d’une gigantomachie épuisante entre empirisme et rationalisme, pensée des Lumières et romantisme, individualisme et collectivisme, mais qui d’une autre manière semble reproduire en elle-même sous de nouvelles formes un passage encore plus prononcé et insidieux entre régionalisme et globalisation, biocentrisme et anthropocentrisme, pensée faible et technologie forte... Cependant, à la différence des grands récits de la modernité, qui avaient tendance à se justifier en s’engageant dans une controverse frontale, argumentée et explicite avec la pensée classique, les polarisations contemporaines ne se présentent généralement pas sous des formes contrastées et infinies, mais elles prennent la forme nuancée d’un mélange malléable et envahissant qui se transforme en une véritable koinè syncrétiste.

    À la racine de cette complexité informe, on peut éventuellement saisir une ambivalence fondamentale, liée précisément à l’identité de la personne humaine : d’une part, l’instance de déconstruction postmoderne, qui théorise un refus radical du primat de la conscience, est liée, dans une sorte d’alliance involontaire, à un réductionnisme scientifique qui porte à leur limite les résultats de la technoscience ; d’autre part, un nouveau rêve transhumaniste fait son chemin, à la croisée du posthumanisme et de l’homme augmenté (human enhancement), qui transforme une partie des résultats des technologies dites « convergentes » en un tremplin pour les plus audacieuses aventures de la liberté, prenant le caractère d’une véritable révolution prométhéenne, dans l’ambition de dépasser toute différence entre le personnel et l’impersonnel, pour aboutir à une dystopie de la société post-mortelle.

    Dans ce double mouvement, en avant et en arrière, à la fin infra-humain et supra-humain, on en vient aux résultats extrêmes du même processus, qui semble avoir perdu la forme originelle de l’humain, par rapport à laquelle nous pouvons reconnaître ce qui a une forme et ce qui n’en a pas. L’informe, derrière ou devant nous, forge notre vocation, cherchant des substituts improbables dans une humanité diminuée ou au contraire augmentée ; deux manières opposées de trahir l’être humain, lui assignant une mesure inhumaine, qui est dans les deux cas le résultat d’une incompréhension du fini. Même la dimension religieuse, prise dans ce faux dilemme, semble osciller entre un arsenal sectaire et militant de rituels et de slogans identitaires exclusifs, utilisés pour protéger notre égoïsme dans l’espace public et consacrer nos peurs, et une foi pieuse et sans douleur, source de gratification subjective et compatible avec tout ordre social, économique, politique et culturel. Dans le premier cas, une religion sans foi risque de se noyer dans une armure identitaire, dans le second cas, une foi sans religion peut s’évaporer dans un effluve d’émotions évasives et consolatrices.

    Dans ce contexte, chaque relecture d’Augustin apparaît comme un exercice doublement important et méritoire. S’il est vrai que la grandeur d’un penseur se mesure toujours à ce qu’il cherche, la figure d’Augustin reste exemplaire par le caractère radical de sa recherche, qui trouve dans l’homme intérieur un point de contact énigmatique entre le fini et l’infini, entre le temps et l’éternité, entre la personne et la communauté. De plus, il y a toujours, pour chaque grand auteur, un kairos, un moment opportun, une capacité spéciale de dialoguer avec d’autres époques et d’autres cultures, permettant, alors, d’éclairer, grâce précisément à la distance historique, aux opportunités inattendues et aux critiques sous-estimées. Et il ne fait aucun doute que parmi les époques pour lesquelles Augustin peut devenir un interlocuteur privilégié, il y a aussi la nôtre, surtout parce qu’aujourd’hui, il peut nous aider à reconnaître et à appeler par leur nom l’instabilité informe de notre temps, en indiquant la manière alternative de chercher une « forme humaine » ouverte et dynamique, et non pas un essentialisme statique et fermé.

    Le livre de Marie-Anne Vannier est doublement important et appréciable, dans cette perspective. L’auteur est bien connue des chercheurs, non seulement des augustiniens, mais aussi des spécialistes d’Hildegarde de Bingen, de Maître Eckhart et plus généralement de la mystique rhénane. La voie qu’elle choisit s’éloigne des deux extrêmes qui distinguent souvent – et malheureusement pénalisent – l’historiographie augustinienne, peut-être trop divisée entre la voie de la synthèse, parfois fascinante mais aussi hâtive et arbitraire, et celle de l’analyse, parfois philologiquement savante mais aride spirituellement.

    Dans le livre de Marie-Anne Vannier, la figure d’Augustin – pasteur, théologien et maître spirituel – se dessine à partir d’études rigoureuses et convergentes, toujours accompagnées d’un horizon bibliographique très riche et pertinent. Alors que la biographie d’Augustin, relue à travers la double clé interprétative de la conversio et de la formatio, permet déjà d’entrevoir des horizons étonnants de sens, l’approfondissement théologique et spirituel trouve dans le statut anthropologique une jonction cruciale, dans laquelle une complexité organique de thèmes a son creuset, en allant de la théologie de la création à celle de la rédemption, de l’ecclésiologie à l’eschatologie, en passant par la théologie trinitaire.

    Deuxièmement, le chemin tracé dans le livre redonne au lecteur une pensée qui n’est pas abstraite et intemporelle, mais enracinée dans un contexte historique précis et, pour cette raison même, capable d’entrer en dialogue avec d’autres ordres de problèmes et d’autres auteurs (de Jean Scot Érigène à Anselme de Cantorbéry, de Hugues de Saint-Victor à Bonaventure et Maître Eckhart…). L’auteure prend en compte l’immense héritage culturel et spirituel d’Augustin à travers les siècles : non seulement au Moyen Âge et à l’époque moderne, mais aussi dans la pensée contemporaine. Cette prise de conscience se traduit par des références toujours pertinentes et actuelles.

    De ce point de vue, tant pour son articulation interne que pour les thèmes identifiés et approfondis, le livre représente une contribution précieuse à la connaissance de la pensée d’Augustin et à la redécouverte de son témoignage personnel, doctrinal et spirituel, mais c’est aussi un document important sur la manière dont on peut envisager aujourd’hui son message, sans naïveté anachronique, mais dans la perspective d’un cercle herméneutique authentique (dont Augustin lui-même reste un témoin extraordinaire). Ce qui compte, surtout dans la dürftiger Zeit, en cette époque difficile qui est la nôtre, c’est de se laisser questionner par d’authentiques problèmes : ce sont seulement les grandes questions qui impliquent que les réponses soient à leur hauteur.

    Luigi ALICI

    professeur à l’Université de Macerata

    directeur de la Scuola di Studi Superiori Giacomo Leopardi

    Liste des abréviations des œuvres de S. Augustin

    Œuvres de S. Augustin

    Introduction

    S. Augustin (13 novembre 354-28 août 430) est l’un des géants de la patristique et plus largement de la civilisation occidentale. Non seulement, il a laissé une œuvre imposante (plus de 1 000 sermons, quelque 300 lettres et une centaine de traités), mais un certain nombre de ses intuitions, comme la place du sujet, celle de la relation… sont encore fondamentales aujourd’hui, sans oublier qu’il a fortement marqué l’Occident, en particulier le Moyen Âge, même si parfois il n’a pas toujours été compris.

    Compte tenu de sa stature, nous avons répondu à la demande de donner des clefs de lecture pour son œuvre, en lien avec la revue Connaissance des Pères de l’Église ¹. Comme Agostino Trapè ², nous avons retenu, outre la biographie, trois figures indissociables de l’évêque d’Hippone, celles du pasteur, du théologien et du maître spirituel.

    S. Augustin est parmi les Pères de l’Église celui dont la vie est la mieux connue, car non seulement il a eu un biographe en la personne de Possidius, mais il a également retracé sa biographie spirituelle ou plus précisément l’aventure de sa conversion dans les Confessions, où il orchestre magistralement les trois sens du terme confessio, en tant que confession des fautes passées (les neuf premiers livres), confession de foi (les trois derniers livres) et action de grâce qui traverse tout l’ouvrage. Il donne également toute sa mesure à la conversion, qu’il ne limite pas à quatorze années, mais dont il fait le moteur même de sa vie et de son œuvre, comme en témoigne ce livre unique dans l’histoire de la littérature que sont les Révisions, où, reprenant un à un tous ses ouvrages, il précise ce qu’il importe d’en retenir ou d’y modifier.

    Après l’avoir situé dans son contexte, celui de l’Afrique du Nord au tournant du IVe et du Ve siècle, nous reprenons l’activité pastorale d’Augustin. Sans doute souhaiterions-nous avoir des témoignages directs de cette pastorale, ce qui n’est pas le cas, mais Augustin ne parle pas moins de son expérience de prédicateur à travers la métaphore des anges qui montent et qui descendent, de l’importance de la catéchèse qu’il explique à Deogratias ou qu’il déploie à propos de l’eucharistie, de sa prédication pour les fêtes et surtout de la clef de sa pastorale, qui est la charité, qui le situe dans la dynamique de l’amour trinitaire qu’il transmet aux autres, ce qui nous amène à envisager son œuvre de théologien.

    Sa théologie, il la dégage de l’Écriture, comme en témoigne sa réflexion sur la création et sur l’image de Dieu en l’homme. Il se situe en disciple de Paul. En fonction de sa propre expérience, il développe une anthropologie solide, consacre des pages mémorables au Christ médiateur. En réponse aux hérésies, il réfléchit sur le motif de l’Incarnation, sur l’unité de l’Église… À partir des deux livres de l’Écriture et de la création, il développe sa théologie trinitaire. Pasteur et théologien, il apporte sa contribution à l’ecclésiologie et à l’eschatologie.

    Homme de relation et de prière, il fait ressortir la place du Maître intérieur en chacun, reprend plusieurs fois son commentaire de la prière par excellence qu’est le Notre Père et met en évidence l’importance de la louange, qui est la prière pure, par laquelle il termine ses grandes œuvres que sont les Confessions et la Cité de Dieu.

    Il serait possible de multiplier les angles d’approche de l’œuvre d’Augustin ³, mais avec ces trois axes de sa vie : la pastorale, la théologie et la vie de prière, il est déjà possible de bien pénétrer ses écrits.

    Première partie

    Études biographiques

    Repères chronologiques

    Jeunesse et études

    Augustin est né le 13 novembre 354 à Thagaste. Ses parents sont Patricius et Monique.

    361-364 : Écolier à Thagaste.

    365-368 : Études à Madaure.

    370-371 : Début des études supérieures à Carthage.

    371 : Mort de Patricius.

    Vie en ménage.

    372 : Naissance d’Adéodat.

    Les méandres de la conversion

    372 : Lecture de l’Hortensius de Cicéron : passage de la rhétorique à la philosophie.

    Déception à une première lecture de l’Écriture.

    Adhésion au manichéisme.

    373-374 : Professorat à Thagaste.

    374-376 : Professorat à Carthage.

    383 : Rencontre avec Fauste de Milève. Déception, éloignement du manichéisme.

    Départ pour enseigner à Rome.

    384 : Début de l’enseignement à Milan. Rencontre avec Ambroise, dont il suit la prédication.

    Découverte du sens de l’image de Dieu en l’homme et de l’origine du mal.

    386 : Mai-juin : Lecture des Livres platoniciens : conversion intellectuelle.

    Juillet : Lecture des épîtres de S. Paul : conversion morale.

    Août : Scène du jardin de Milan : Dénouement de sa conversion.

    Novembre : Retraite à Cassiciacum avec quelques parents et amis.

    Démission de son poste de rhéteur.

    24-25 avril 387 : Vigile pascale : Baptême d’Augustin avec son fils Adéodat et son ami Alypius.

    Le retour en Afrique du Nord

    387-388 : Vision d’Ostie.

    Mort de Monique.

    Départ pour l’Afrique du Nord.

    389 : Mort d’Adéodat.

    Organisation de sa communauté des Serviteurs de Dieu à Thagaste, dans la maison familiale.

    391 : Ordonné prêtre à Hippone. Fondation du monastère du Jardin.

    Augustin évêque

    395 : Consécration comme évêque-coadjuteur de Valère à Hippone.

    396 : Mort de l’évêque Valère.

    Augustin, évêque titulaire d’Hippone.

    397-400 : Rédaction des Confessions.

    Dès son retour en Afrique, polémique contre les manichéens.

    24 août 410 : Chute de Rome.

    411 : Conférence avec les donatistes à Carthage.

    413 : Début de la rédaction de la Cité de Dieu.

    Lutte contre Pélage.

    426 : Eraclius, désigné pour être le successeur d’Augustin après sa mort.

    Rédaction des Révisions.

    28 août 430 : Mort d’Augustin à Hippone, assiégée par les Vandales.

    Qu’en est-il de la biographie de S. Augustin ⁴ ?

    S. Augustin est, parmi les Pères, celui dont la vie est la mieux connue. Non seulement il a écrit les Confessions, qui évoquent les premières années de sa vie jusqu’à son baptême en 387, mais il donne aussi un certain nombre d’informations sur sa vie dans ses Lettres, dans ses Dialogues, dans ses Sermons et dans les Révisions. De plus, il a eu un biographe en la personne de son ami, l’évêque Possidius de Calama.

    Cependant, on ne dispose pas à proprement parler de biographie d’Augustin. Sa Vie, présentée par Possidius, s’inscrit dans le cadre des Vitae, des vies de saints. En effet, Possidius n’invente pas un genre littéraire pour écrire la vie de son ami Augustin, mais il en reprend un qui existe déjà et il organise son ouvrage « selon le plan classique de la biographie antique : vie/vertus/derniers moments ⁵ », à la manière dont Suétone, par exemple, avait écrit la vie de César ⁶. Il évoque, certes, la vie d’Augustin dans toute sa durée, mais il passe « rapidement sur les premières années de son héros, suffisamment illustrées par ses Confessions (comme il le dit dès l’introduction), il fait le bilan de son activité pastorale et de ses luttes, le présente aussi dans son activité de juge, de formateur, de théologien ⁷ ». Il retient des événements marquants, qui relèvent presque de l’hagiographie, comme d’avoir fait « rompre et fondre les vases sacrés pour assister un grand nombre d’indigents et de captifs ⁸ ». Il dit qu’Augustin a réalisé l’unité de l’Église d’Afrique malgré le triple ébranlement du donatisme, du manichéisme et du pélagianisme et qu’il a joué un rôle important dans les conciles. Il met en évidence ses vertus, rappelle qu’il « n’avait d’autre joie que de parler et de s’entretenir des choses de Dieu dans l’intimité de la vie fraternelle ⁹ » et il souligne le caractère édifiant de sa mort. Mourant, il guérit un enfant ¹⁰, il prie continuellement et médite les psaumes de pénitence qu’il avait fait écrire sur le mur en face de lui ¹¹. Sans doute y a-t-il une vérité historique, des données biographiques dans cette Vita, et Possidius se présente lui-même comme un témoin oculaire. Il dit d’entrée de jeu qu’il va « rappeler l’origine, la vie et la fin de cet homme vénérable, ce qu’[il] a recueilli de lui-même, les faits dont [il] a été le témoin en cette longue suite d’années passées dans son intimité ¹² ». Mais il n’en demeure pas moins que nous n’avons pas là une biographie historique ni romanesque, mais davantage une œuvre d’édification.

    Maintenant, si l’on considère les Confessions, on n’y trouve pas davantage une biographie d’Augustin. D’une part, les Confessions ne concernent qu’une partie de sa vie : les années 354-387, ses premières années, celles de sa conversion ; d’autre part, Augustin n’entend nullement y faire œuvre de biographe. Il s’attache bien plutôt à rappeler les initiatives de Dieu à son égard. Si les Confessions devaient être une biographie, elles seraient autant celle de Dieu ¹³ que celle d’Augustin. Comme il le dit dans les Révisions (II, 6), cet ouvrage où il relit et apprécie ou corrige, peu de temps avant sa mort : les Confessions « orientent l’esprit et le cœur de l’homme vers Dieu. Tout au moins en ce qui [le] concerne, elles ont eu sur [lui] cette action pendant qu’[il] les écrivait et elles l’ont encore lorsqu’[il] les lit ».

    Livre unique et qui a eu un succès immédiat à sa parution ¹⁴, best-seller de la littérature, désormais publiées en « Pléiade », les Confessions de S. Augustin ont été lues et relues au cours des âges et elles ont fortement marqué les générations qui nous ont précédés ; elles ont une postérité chez des auteurs comme Rousseau, Montaigne, Pascal, Musset, Proust… même si ceux-ci les ont largement réinterprétées ; elles ont inspiré les peintres ¹⁵ qui se sont, par exemple, efforcés d’exprimer toute la dramatique de l’épisode du jardin de Milan, ou encore la vision d’Ostie… Elles apparaissent vraiment comme l’un des « classiques » du christianisme. Déjà, du vivant d’Augustin, elles avaient eu un succès certain qui faisait dire à l’auteur lui-même : « Parmi mes ouvrages, en est-il un qui ait été plus répandu et plus goûté que mes Confessions ¹⁶ ? »

    À la différence d’un Rousseau, qui présente plutôt une biographie romanesque, Augustin n’a pas décidé un jour d’écrire ses confessions. Il y a été invité par Paulin de Nole, ou du moins, il a voulu décharger son ami Alypius à qui Paulin demandait de retracer son itinéraire spirituel ¹⁷. Ainsi a-t-il écrit le sien ¹⁸, entre 397 et 401 ¹⁹, ce qui lui a donné l’occasion de couper court aux rumeurs qui l’assimilaient encore aux manichéens et il a alors rendu compte des différentes étapes de sa conversion.

    De plus, et toujours à la différence du philosophe de Genève, il n’a pas réduit les Confessions à une simple autobiographie. Il y propose peu de narrations concrètes, il n’évoque pas ses impressions, en arrivant à Rome ou à Milan…, il ne parle pas de la douleur que lui ont causée la mort de son fils Adéodat et celle de sa mère Monique… Il ne commence pas l’ouvrage à la première personne, comme il devrait en être pour une autobiographie, mais à la seconde : « Tu es grand, Seigneur… » Il « part de bien plus profond que des souvenirs de l’évocation autobiographique : de ce centre mystérieux de la personne où l’homme accueille ou rejette la présence divine, en répondant à son interpellation ; ce lieu qu’après la Bible, et avant Pascal, Augustin appelle le cœur ²⁰ ». Comme il l’écrit dans la dernière lettre qu’il écrivit : la Lettre 231, 6, il présente, dans cet ouvrage, sa biographie spirituelle. Ainsi dit-il à Darius :

    Prends ces livres mêmes de mes Confessions que tu désirais avoir : là regarde-moi au fond afin de ne pas me louer au-delà de ce que je suis ; là tourne-toi vers moi et vois ce que j’ai été en moi-même par moi-même ; et là si quelque chose en moi te plaît loue avec moi Celui que j’ai voulu louer à mon sujet ; ce n’est pas en effet moi qu’il faut louer parce que c’est Lui – et non pas nous-mêmes – qui nous a faits ²¹.

    C’est à son Créateur qu’il rapporte tout ce qu’il y a de valable dans son ouvrage. D’ailleurs, le livre dans son ensemble est un long dialogue avec son créateur, ce qui en constitue l’originalité ²².

    Quant au titre de Confessions qu’Augustin a retenu, il est polysémique et s’écarte de la simple biographie. Ce n’est pas une révélation extraordinaire qu’Augustin va proposer dans ce volume, mais bien plutôt la reconnaissance de ses propres limites et de la puissance de Dieu, manifestée dans sa vie ²³. En bon rhéteur, il a su déployer toutes les ressources sémantiques du terme de Confessions. Le verbe latin confiteri, auquel correspond le terme de confessio, a une triple acception ²⁴ qu’Augustin présente dès le Prologue de l’ouvrage (Conf. I, 2, 2-5, 6). Il désigne, tout d’abord,

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