Discover millions of ebooks, audiobooks, and so much more with a free trial

Only $11.99/month after trial. Cancel anytime.

Santo Caserio, ouvrier boulanger: Roman historique
Santo Caserio, ouvrier boulanger: Roman historique
Santo Caserio, ouvrier boulanger: Roman historique
Ebook180 pages2 hours

Santo Caserio, ouvrier boulanger: Roman historique

Rating: 0 out of 5 stars

()

Read preview

About this ebook

Découvrez le destin funeste d'un jeune boulanger anarchiste de Lombardie.

Santo Caserio a été guillotiné en 1894 à l’âge de vingt ans ; le 24 Juin 1894, il avait poignardé mortellement Sadi Carnot, le Président de la République. Il venait de Lombardie, c’était un petit ouvrier boulanger, il était anarchiste, il était jeune, il croyait changer le monde avec un poignard acheté la veille et qui lui avait coûté cinq francs.

Ce roman historique et biographique suit les pas de Santo Caserio, un jeune anarchiste qui a poignardé à mort le Président de la République à Lyon en juin 1894.

EXTRAIT

Les idées sont comme des vagues et les vagues mettent un certain temps à s’apaiser ; si Santo avait attendu un peu… En attendant, il vit au milieu de ses chers compagnons qu’il ne veut en aucun cas trahir. Ses compagnons sont ouvrier boulangers comme Francesco Petrelli, forgeron-serruriers comme Dionigio Malagoli, cordonniers comme Angelo Maggi typographe ou publicistes comme Carlo Crivelli ou Antonio Caspani. Straggiotti, à Lyon, était marbrier. La vraie formation de Caserio, ce sont, on l’a dit, les journaux qui la construisent, ce sont les tracts que l’on fait venir de loin, que l’on achemine plus loin encore ; ils sont rédigés dans toutes les langues mais peu importe, on les traduit sommairement, on échange dans les arrière-salles, on polémique. Santo Caserio est parfaitement informé de ce qui se passe en Italie et partout dans le monde. Le 8 Août 1891 était sorti le premier numéro de La Croce Di Savoia. Ce journal était entraîné par l’anarchiste italien Paolo Schicchi, il avait pris la suite de Pensiero e Dinamite : « la pensée pour soulager les faibles, la dynamite pour abattre les puissants ». Schicchi s’en prenait à la dynastie de Savoie mais aussi aux têtes pensantes de l’anarchisme ; selon lui, Malatesta, Merlino, Cipriani, Gori n’avaient pas su organiser la suite des manifestations du Premier Mai 1891 en Italie. Il n’était que temps de s’opposer à eux.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Serge Carret a traversé plusieurs Lycées en tant que professeur. Puis, il s’est engagé comme membre de la réserve citoyenne de l’Académie de Grenoble à une action bénévole pour les jeunes en panne d’avenir, Protection Judiciaire de la Jeunesse et École de la Seconde Chance. Auteur de cette biographie de Santo Caserio, il l’est aussi d’une vie du Cardinal Consalvi, le Secrétaire d’État du Pape Pie VII. Sa première tentative d’écriture était un roman historique : Une vie droite.
LanguageFrançais
Release dateSep 4, 2019
ISBN9782851139184
Santo Caserio, ouvrier boulanger: Roman historique

Related to Santo Caserio, ouvrier boulanger

Related ebooks

Biographical/AutoFiction For You

View More

Related articles

Related categories

Reviews for Santo Caserio, ouvrier boulanger

Rating: 0 out of 5 stars
0 ratings

0 ratings0 reviews

What did you think?

Tap to rate

Review must be at least 10 words

    Book preview

    Santo Caserio, ouvrier boulanger - Serge Carret

    Serge Carret

    Santo Caserio, ouvrier boulanger

    Roman

    ycRfQ7XCWLAnHKAUKxt--ZgA2Tk9nR5ITn66GuqoFd_3JKqp5G702Iw2GnZDhayPX8VaxIzTUfw7T8N2cM0E-uuVpP-H6n77mQdOvpH8GM70YSMgax3FqA4SEYHI6UDg_tU85i1ASbalg068-g

    © Lys Bleu Éditions – Serge Carret

    ISBN : 978-2-85113-918-4

    Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants causes, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

    Bibliographie

    *Les journaux de l’époque :

     — La Croix, 7 Juillet 1894

     — Le Temps, 28/06/94, 30/06/94

     Le Matin, 24/06/94, 3/08/94, 8/08/94, 30/08/94

     — L’Express du Midi, 01/08/94

     — La Liberté, 04/08/94

     — La Presse, 08/08/94

     — Le Petit Journal, 02/01/94, 05/01/94, 03/08/94

     — Lyon Républicain, 26/06/94, réactions à l’attentat de Caserio.

     — La Comédie politique, 01/07/94, Journal hebdomadaire puis journal satirique.

     _ Le Nouveau Lyon, 04/08/94, Journal des intérêts commerciaux, industriels, agricoles.

     — Almanach du Père Peinard « farci de galbeuses histoires et de prédictions épatarouflantes ». 1894 – An 102.

     — Crime et châtiment de Santo Caserio, vu à travers la presse populaire, Gérard Corneloup.

     — Assassinat de Carnot par E.Tilly, Une du Progrès illustré du dimanche, 1° Juillet 1894, B.M. Lyon.

    — Dans la Feuille Charbinoise, Histoire d’un journal anarchiste : Le Révolté.

    *Livres d’éclairage sur l’époque

     — La pellagre en Italie à la fin du XIX° siècle, les effets d’une maladie de carence. Monica ginnaio.

     — Enquête Jacini de 1882 (Annalid’Agricoltura 1880)

     — De la pellagre et de la folie pellagreuse, observations recueillies au grand hôpital de Milan 1830. A. Brière de Boismont.

     — La Moisson des autres. Les salariés agricoles au XIX° et XX° siècle Sous la direction de Ronald Hubscher et Jean Claude Farcy. Jean Paul Garrier. La boje en Polésine.

     — Cronologia di Milano dal 1891 al 1900 a cura di Paolo Colussi.

     — La banlieue avant la banlieue. Milan et sa périphérie pendant la première moitié du XIX° dans Histoire Économie et Société, 1996, PP 381-404

     – Marina Moioli, Milano perduta e dimenticata, 2013, Newton Compton editori.

     -Giovanni Passannante, sepolto vivo nella torre della Linguella di Giancarlo Molinari.

     -Cesare Lombroso, Gli Anarchici, 1894, Bibliotheca Antropologica Giuridica Editions Fratelli Bocca.

     -Il movimento dei Fasci Siciliani, Una Verità messa a tacere. Controlacrisi.org.

     -La repressione dei Fasci dei Lavoratori impedi la modernizzazione della Sicilia. Par Dino Paternostro, 2012, Altritaliani.net

     -La Société mourante et l’Anarchie, Jean Grave, Émile Colin, imprimerie de lagny ; préface d’Octave Mirbeau. Tresse et Stock Éditeurs, 1893

     — Jean Maitron, Histoire du mouvement anarchiste en France 1951.

     — Charles Tromann, Le mouvement anarchiste dans les montagnes neuchâteloises et le Jura bernois. Thèse présentée à l’université de Neufchâtel. 1947.

     — Le mouvement anarchiste à Lyon 1880-1894 publié en 2018 écrit pour le site Fragments d’Histoire de la gauche radicale.

     — Le mouvement anarchiste de 1870 à nos jours par Anne-Léo Zévaes.

     — Le Crapouillot de Janvier 1938. L’Anarchie par Victor Serge, Alexandre Croix et Jean Bernier.

     — Louis Bertoni, une figure de l’anarchisme ouvrier à Genève, traduit de l’italien, Entremonde, Genève.

     — Cent ans de police politique en Suisse 1889-1989. Association pour l’étude de l’Histoire du mouvement ouvrier. Éditions d’En-Bas.

     -Storia di Lugano, Archivio Storico Città di Lugano.

     -Quod Apostolici, 1878, Léon XIII : Contre la peste mortelle du socialisme.

     — Pierre Kropotkine, Autour d’une vie, mémoires d’un révolutionnaire.

    *Observations sur Caserio.

     — Revue criminelle. Sante Caserio en prison. 1903.

     — Rapport du Capitaine Roques, commandant de Gendarmerie, Lyon, 27 Juin 1894

     — Plaidoyer par sante Caserio, 3 août 1894

     — Émile Raux : Actes, attitudes et correspondances de Caserio dans sa prison. Lyon, 1903.

     — L’assassinat du président Carnot. A. Lacassagne. A. Stork. Lyon 1894.

     — La criminologie perdue d’Alexandre Lacassagne. Marc Renneville, Revue hypermédia, Histoire de la Justice, des crimes et des peines. Gryphe, Revue de la Bibliothèque de Lyon. 1° semestre 2004, N° 8.

     — In Difesa di Caserio. Pietro Gori.

    « A voeni nen »

    Lyon, nuit du 24 Juin 1894. Un salon de l’Hôtel de la Préfecture. Sadi Carnot agonise. Une multitude de beaux habits autour du Président de la République française. Impressionnante sérénité. Il remercie les médecins qui tamponnent le sang qui coule sur sa lèvre inférieure. Lentement.

    Poliment et discrètement, comme il l’a souvent fait dans sa vie, à 0 heure 40 minutes, le 25 Juin, il s’en va.

    En visite officielle à Lyon, le Chef de l’État a rencontré le poignard de Sante Caserio, jeune anarchiste italien, parti la veille de Sète où il exerçait le métier d’ouvrier boulanger. Dans les quelques mois et semaines qui avaient précédé cette journée, le Palais de l’Élysée avait refusé la grâce à François Claudius Koënigstein dit Ravachol puis à Auguste Vaillant et à Émile Henry. Sadi Carnot, en réalité, n’avait pas pu faire autre chose que de laisser la main de la justice aller à son terme ; le Journal Le Gaulois dit que sinon, « on lui aurait arraché la plume » ! Le vieux Louis Deibler, 71 ans, bourreau national, avait, du bout de sa canne-parapluie légendaire, indiqué à ses aides les bons endroits pour stabiliser et monter les boiseries vert sombre et scrupuleusement savonnées du couteau de Guillotin. Trente-sept centimètres et demi d’écartement des bois. Surtout bien enfoncer les crampons dans le sol !

    Ravachol et Henry avaient tué délibérément. Mais Vaillant n’avait sans doute pas tous ses esprits ; sa bombe jetée dans les travées de l’Assemblée Nationale avait blessé une trentaine de personnes ; elle n’avait provoqué aucune disparition, les débats parlementaires n’avaient pas été ajournés, on l’avait fait lourdement connaître à l’opinion publique. Le courage républicain ! Que cela se sache jusqu’au plus profond de nos campagnes ! Carnot était resté sourd aux suppliques de Sidonie, la fille de Vaillant. Au Palais de l’Élysée, de bonnes âmes ont fermé les fenêtres. L’abbé Lemire, l’excellent abbé qui va bientôt fonder les jardins ouvriers et qui a été blessé par les clous de la bombe, intervint également sans succès en faveur de l’anarchiste. Le défunt président avait été pourtant convaincu de gracier le 27 avril le couple Hillion-Besnier qui avait tué leur enfant de 6 ans à coup de balai et en l’affamant. Pire peut-être : Dans « La Grande Peur des bien-pensants », l’écrivain Bernanos ose écrire en 1931 à propos de l’affaire Vaillant : « Il serait puéril d’écrire que la campagne anarchiste de 1890 à 1894 fut exclusivement policière, bien qu’on sache aujourd’hui par exemple, et sans discussion possible, au témoignage du Chef de la Sûreté, que l’attentat a été l’œuvre d’agents provocateurs qui fournirent jusqu’à la dynamite nécessaire à la confection de l’engin ».

    Une série d’attentats attaquaient la République frappant aveuglément au nom de « la propagande par le fait ». Outragée, la République refusait de se poser la moindre question. Bousculée par la crise boulangiste, par le scandale des « chéquards » de la Compagnie du Canal de Panama, elle était tout entière tournée vers son projet colonial. Depuis 1881, ce qu’il est convenu d’appeler le « Code de l’indigénat », lui permettait, en Afrique et en Asie, les réquisitions de main d’œuvre, l’utilisation de la main d’œuvre pénale, les jours de travail obligatoires pour les chantiers publics. La République était en cette même année 1894 affairée du côté du Dahomey et du lointain Siam. Cinq ans après le meurtre de Carnot, on étouffera soigneusement l’horreur de la « mission Voulet et Chanoine ». La République était meurtrie par « l’assassin Caserio », mais elle avait depuis 6 mois acquitté les responsables des rixes meurtrières d’Aigues-Mortes, elle avait depuis longtemps oublié les morts de 1871, les conseils de guerre, les pontons de la Seine chargés de prisonniers et les déportations en Nouvelle-Calédonie.

    Trois jours après l’exécution de Caserio, un encart publicitaire parait dans « Le Matin » du 19 Août 1894 : « Un pieux souvenir : L’album historique renfermant 12 photographies exécutées par M. Boyer, photographe du regretté Carnot est mis en vente au prix de 2 Francs pris dans nos bureaux. Nous l’expédions franco à domicile à Paris et en province contre la somme de 2 Francs 25 Centimes. Cet album photographique de format grand in-8, d’une exécution absolument parfaite contient les tableaux suivants : portrait en pied du président Carnot, le président dans son cabinet de travail à l’Élysée, Carnot acclamé à Lyon, Carnot entrant à l’Exposition, Carnot sur son lit de mort, la chapelle ardente, le grand catafalque à l’Élysée, la foule à l’extérieur de l’Élysée, la levée du corps, le cortège des funérailles, l’entrée à Notre-Dame, l’entrée au Panthéon. »

    Deux francs, c’était le salaire d’un facteur en 1890. Les facteurs de France ont dû y penser quand leur sacoche se remplissait de plusieurs de ces albums. Soyons justes. Ils avaient droit à une paire de chaussures neuves chaque année.

    Le 16 Août 1894, Caserio est réveillé à 4 heures 15 minutes dans la cellule n° 41 de la prison Saint-Paul près de la gare de Lyon-Perrache. Deibler a tout vérifié, la machine, le couteau de 160 kilos, le cou du supplicié. Le panier et le seau ont été disposés au bon endroit, on a l’habitude. Les deux aides ont quitté leurs vêtements de travail et revêtu leur habit de cérémonie.

    On coupe en habit.

    À 4 heures 35, le condamné bascule sur la planche, la tête vite emprisonnée dans la lunette, il s’agite, il se cambre, il crie peut-être « Vive l’Anarchie » mais, selon les témoins directs, plus sûrement et humainement « a voeni nen » ; (Je ne veux pas en dialecte lombard de Motta Visconti) Les assistants du bourreau sont obligés de plaquer rudement le corps sur la planche. Pour que cela ne fasse pas trop de complications. Car ce diable de jeune boulanger veut vivre encore.

    Applaudissements parmi la foule ameutée, au petit matin, malgré la pluie de la nuit. Silhouettes sur les toits des immeubles qui se trouvent aux abords de la prison. Le corps sans tête tressaille encore. On sait aujourd’hui que ses neurones vont vivre encore deux minutes avant de s’effondrer dans le néant. La tête cherche les mains qui à cette heure devraient pétrir le pain de l’ouvrier et du bourgeois, quand elle est jetée dans la sciure.

    À 5 heures 35, le panier arrive au cimetière de la Guillotière, près du « carré D 11 ». Le cadavre encore chaud est prestement placé dans une caisse en bois, la tête tranchée au ras des oreilles et du menton, placée entre les jambes. Barbarie, vulgarité, obscénité. La fosse, creusée depuis la veille, se referme, indifférente. Sante Caserio dormait encore une heure plus tôt.

    Vingt ans, il avait.

    Puis Deibler règle sa note d’hôtel. Hôtel des Voyageurs, face à la gare de Perrache. La guillotine est déjà lavée et démontée, chargée dans un wagon. L’appareil doit être dirigé maintenant sur Montbrison pour traiter un autre boulanger ; on ira ensuite en direction de Laval où il va falloir couper la tête d’un prêtre qui a assassiné un de ses collègues.

    Motta Visconti

    Sante Caserio n’avait pas encore, à quelques jours près, 21 ans lorsqu’il fut jeté dans la fosse de la Guillotière. Sa famille aurait voulu faire revenir le corps en terre lombarde mais cela coûtait.

    Pour combattre une société inégalitaire et cynique, il avait choisi la voie du terrorisme. « La propagande par le fait » des anarchistes « individualistes ». « Choisi » est une façon d’écrire comme on le comprendra.

    Le Tribunal de Lyon a expédié le procès : Le Président Carnot a été assassiné le 24 Juin et Caserio est exécuté le 16 août, 51 jours plus tard. On a voulu savoir si Caserio était fou. On a cru trouver quelques éléments dans ce sens, quelques preuves d’une folie familiale. Sante Caserio a refusé énergiquement que son avocat bâtisse une défense sur cette base-là. Il voulait assumer son geste de révolutionnaire ; ne pas le faire, c’était trahir les compagnons.

    Une Cour des Assises indépendante des contingences politiques du moment aurait dû passer outre aux protestations d’un jeune anarchiste, et ouvrir d’elle-même le dossier des origines du geste fatal de Caserio ; il aurait été nécessaire d’analyser longuement l’environnement social dans lequel le jeune homme avait évolué, le contexte politique très lourd du Royaume italien, les rapports heurtés entre la France et sa sœur latine, enfin la société qui était celle de Santo mais aussi celle de la génération précédente. On peut oser l’optimisme sur les progrès de l’Histoire : c’est ce que l’on aurait fait de nos jours, dans nos démocraties imparfaites. C’est ce qu’il faut faire pour tout terrorisme : qu’a fait « la société » aux pères des terroristes ? Le terrorisme ne naît pas de la malignité d’un individu, comme voulaient le démontrer « les savants » de la fin du XIX° siècle ; cela peut être le cas, – il y a des cas pathologiques que l’état actuel de nos connaissances ne sait expliquer – c’est un drame pour les victimes, pour leurs proches, mais ce n’est pas le terrorisme. Le terrorisme est trop complexe -- puisque nous ne le comprenons pas – pour être combattu par des lois d’exception (les « lois scélérates » de l’époque, « les états d’urgence ») ou par des procès de deux jours accompagnés de peines spectaculaires. Le terrorisme est une maladie du corps social. Une maladie du système, une maladie au long cours.

    Dans le cas précis, on comprendra pourquoi la pellagre avait fait des ravages parmi les membres de la famille de Sante Caserio. On ne connaissait pas bien les origines de la maladie à l’époque mais on aurait pu chercher. Sante Caserio était peut-être atteint lui-même de cette maladie. La responsabilité du meurtre de Sadi Carnot n’est pas vraiment dans les seules mains d’un jeune homme de 21 ans. Il croit agir de sa pleine et entière volonté. Il n’est qu’un rouage dans un mécanisme de mort qui s’est construit bien avant sa pauvre vie. Du temps de l’occupation coloniale de la Lombardie par l’Empire autrichien, du temps du décollage économique qui a accompagné le Risorgimento et la constitution de la nouvelle Italie, mais aussi du temps du capitalisme balbutiant et se construisant sur la misère des masses populaires des campagnes et du monde ouvrier, offrant, comme à Milan des contrastes sociaux insupportables. La Cour d’Assises aurait pu et dû avoir ce courage d’analyser une crise plus profonde qu’elle ne voulait bien l’imaginer. La presse, les journalistes évoquaient bruyamment « l’assassin Caserio », c’était plus simple et plus efficace pour les ventes, c’était plus simple pour les lecteurs. Mais les mentalités de l’époque n’étaient pas prêtes, les applaudissements abjects de la foule montée sur les toits lorsque tombe la tête de cet enfant le montrent amplement.

    Sante Ieronimo Caserio est né le 8 Septembre 1873 à Motta-Visconti, petite commune de Lombardie, peu éloignée de Milan et encore moins de Pavie. Non loin, coule le Tessin qui va nourrir le Pô après avoir rempli de ses eaux montagnardes et tumultueuses les canaux de navigation et d’irrigation de la plaine milanaise. La plupart

    Enjoying the preview?
    Page 1 of 1