Tu n'auras pas d'enfant: Journal d'une femme qui ne voulait pas baisser les bras
()
About this ebook
Mêlant témoignage sans complaisance sur le monde de la PMA aujourd’hui et réflexions sur le sens de l’infertilité dans nos sociétés contemporaines, Cécilia Viala donne du sens à une expérience intime, traumatisante et qui touche pourtant de plus en plus de monde.
Voici le livre qu’elle aurait aimé lire lorsqu’elle se sentait si seule dans ce parcours éreintant.
Related to Tu n'auras pas d'enfant
Related ebooks
#balance ta vache: Plaidoyer antisexiste et cependant très masculin pour rétablir l'équilibre Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsLa surprise du surdoué Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsPetit carnet de route d'une maman solo: Op.1 Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsUn enfant tant attendu: De la PMA à l’adoption, surmonter tous les obstacles Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsMon papa m’a dit Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsUn coeur sans vie: Surmonter l'épreuve de la mort foetale in utero Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsRéapprivoiser le bonheur Rating: 5 out of 5 stars5/5Voyages dans l'Au-delà: Découvertes guidées d'un autre monde Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsLe vol du saumon ne croise pas le plongeon du pingouin: Roman contemporain Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsBrocantes et camisoles: Un conte philosophique Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsL'Insoumis Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsVingt-Quatre Sept Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsMon avenir ? Mais… quand j'me retourne ! Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsLa femme brouillon: Autofiction Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsPourquoi ? Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsAlzheimer, ma mère et moi: La vie avec la maladie Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsLa révolte du paresseux: Pamphlet contre les tire-au-flanc du plaisir Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsL'autre moitié du lit Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsMi-maman mi-moi: Chroniques d'une mère Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsPapa poule, et même pas peur: Nan, j'déconne… à l'aide ! Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsMal barrée Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsL'euthanasieur: Faut-il créer un nouveau métier ? Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsFamille d'accueil: Les expériences avant de se lancer Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsDix ans en psychiatrie: Une spirale infernale Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsMars 2020: Roman Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsDes étoiles dans la nuit Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsApprocher la personne qui souffre: Rencontrer et accompagner la souffrance Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsTel le phoenix: Ode à la vie Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsIl est temps de délivrer votre génie intérieur !: Fasciathérapie et approche systémique à votre secours Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsDerrière la porte: L'inceste, survivre et renaître Rating: 0 out of 5 stars0 ratings
Biography & Memoir For You
Les montagnes russes de l'humeur - Le journal intime d'une borderline: Roman Rating: 5 out of 5 stars5/5GIGN : nous étions les premiers: La véritable histoire du GIGN racontée par ses premiers membres Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsKarl Marx, la lutte des classes et le capital: Pourquoi l'individu est-il au cœur des enjeux économiques ? Rating: 5 out of 5 stars5/5Je Suis mon chemin Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsMa vie de maîtresse SM: Entre érotisme et sensualité Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsL'Age Du Rock : Ozzy Osbourne Rating: 4 out of 5 stars4/5Une brève histoire des maths: La saga de notre science préférée Rating: 3 out of 5 stars3/5Mahomet et les origines de l'islamisme Rating: 4 out of 5 stars4/5Portraits de femmes et d'hommes remarquables: Éléments de culture générale Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsAmerican Sniper: L'autobiographie du sniper le plus redoutable de l'histoire militaire américaine Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsGIGN : confessions d'un OPS: En tête d’une colonne d’assaut Rating: 5 out of 5 stars5/5Survivalisme: Le guide ultime pour se préparer à la survie en toutes situations Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsNapoléon: Sa vie, son oeuvre, son temps Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsFAME Katy Perry: La Biographie De Katy Perry Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsLes personnalités les plus productives de l'Histoire Rating: 5 out of 5 stars5/5Les Contemplations Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsFrédéric Chopin: L'âme du piano Rating: 5 out of 5 stars5/5La philosophie de SCHOPENHAUER Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsElon Musk - Biographie d'un génie et d'un titan des affaires moderne Rating: 5 out of 5 stars5/5Mon histoire: 50 souvenirs tirés de cinquante ans de service Rating: 5 out of 5 stars5/5Les rêveries du promeneur solitaire Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsPossédé par un djinn: Une victime raconte son enfer Rating: 5 out of 5 stars5/5Chroniques d'une libertine: Témoignage Rating: 0 out of 5 stars0 ratingsLe mensonge: L'affaire du maire de Vence accusé injustement du viol de son petit-fils Rating: 5 out of 5 stars5/5Les sept piliers de la sagesse: Le récit autobiographique des aventures de Lawrence d'Arabie Rating: 4 out of 5 stars4/5Les plus grands psychopathes: Une histoire des crimes les plus célèbres Rating: 0 out of 5 stars0 ratings
Reviews for Tu n'auras pas d'enfant
0 ratings0 reviews
Book preview
Tu n'auras pas d'enfant - Cécilia Viala
Churchill
Introduction
De la putasserie de DNLP aujourd’hui
Le calvaire est long.
Au début, on compte en mois (les cycles : C1, C2, C3… t’es tombée enceinte à quel cycle toi ?). Puis en années. Avec la terreur qu’il dure enfin toute la vie. Qu’il redessine le passé sous une nouvelle lumière, sombre, et l’avenir entièrement noir. Le présent ? Le présent, lui, n’existe plus du tout. Avalé en même temps que les traitements.
Mais je devrais peut-être dire le combat ? C’est souvent le type de vocabulaire qu’on entend et qu’on emploie presque naturellement quand on est plongé dedans. « On a perdu la bataille, mais pas la guerre… », « il faut se reposer et reprendre des forces avant la prochaine tentative », « ne pas perdre espoir », « c’est un parcours du combattant »… Mais qui est l’ennemi dans cette improbable bataille ?
Contre qui bander les muscles, à qui montrer les dents ? Contre DNLP, Dame Nature la Pute, comme on dit entre nous, entre couples infertiles ? Elle semble être une ennemie bien injustement désignée. DNLP n’est-elle pas la victime désignée, évidente, de nos modes de vie extravagants ? N’est-elle pas la chose fragile constamment malmenée, l’agonisante de tous les jours détruite un peu plus par l’Homme victorieux et impitoyable, maître et possesseur de la nature, justement ?
Contre les médecins, qui proposent des traitements inopérants, et qui, irrémédiablement, finissent par avouer leur impuissance en déclarant des généralités du type « Vous savez, il y a bien des choses qu’on ne maitrise pas en médecine de la reproduction » ?
Contre les fertiles, ce peuple de sapiens bruyants et turbulents qui, fatigués par la tâche éreintante d’élever la prochaine génération qui continuera à souiller la terre, n’ont pas une seule seconde de considération à accorder à des individus aussi gauches que ces éclopés d’infertiles — « si vous voulez on vous donnera des positions qui marchent bien, haha » ?
Alors ? Alors, il n’y a rapidement plus rien contre qui, contre quoi se retourner ; les infertiles d’aujourd’hui méritent leur situation et paient le prix fort. Alors que s’ajoutent à l’infini, tels les déchets dans nos décharges, les mauvaises nouvelles d’un monde sur le déclin, qui montrera un peu de compassion pour ces couples qui ne peuvent pas avoir d’enfants ? Qui reconnaitra leur malheur invisible ? Qui, enfin, reconnaitra qu’ils sont en deuil, alors qu’il n’y a littéralement rien à mettre en terre et que chaque tentative échouée représente une perte de plus ?
Dans la lutte impitoyable pour la reconnaissance des victimes de ce monde, les infertiles sont bien mal partis. Ils sont (généralement) en bonne santé, ont un toit sur leur tête et de la nourriture dans leur assiette. Leur sort intéresse moins que celui des hérissons. Et vraiment, à bien y penser, c’est compréhensible. Un hérisson, c’est mignon. C’est innocent. Fragile. Qui a véritablement envie de voir plus de bébés sapiens geignards et dépendants sur une Terre qui semble déjà trop pleine ? Neuf milliards de personnes en 2050. Ça coûte cher, la PMA. Et en plus, c’est dangereux, non ? Une pente savonneuse vers l’eugénisme… Qu’on laisse DNLP décider !
De leur entrée en PMA, comme on entre au purgatoire
Notre aventure — c’est le premier mot qui me vient à l’esprit et, quand on y pense, c’est véritablement formidable ! « Aventure », comme cela semble romantique ! Quelle partie tordue de mon cerveau a-t-elle décidé à cette seconde précise que le mot « aventure » était sans aucun doute le plus approprié ? Dois-je comprendre qu’une partie de moi-même considère cette « chose qui nous arrive », ou plutôt qui ne nous arrive pas, comme une expérience exceptionnelle, hors du commun, comme digne d’intérêt, valant le coup d’être racontée ? Sans doute. Mais je dois immédiatement ajouter que j’aurais donné beaucoup pour ne pas la vivre. Comme si j’avais peur de pouvoir tirer quelque chose de positif de ce bourbier dégoutant.
Tout a commencé par la plus banale des décisions — se reproduire —, dans le plus banal des quotidiens de l’Occident contemporain d’un couple monogame hétérosexuel blanc. Quel ennui !
Tout a continué par des mois de rapports quand il fallait, et la douleur et le sang, invariablement au rendez-vous, là, quand on les attend. Impeccablement à l’heure, le sang, ad nauseam. Je pense parfois, souvent, que mon corps devrait être objet d’études scientifiques : adieu contraception polluante, effroi d’une grossesse non désirée, bonjour stérilité naturelle, sexualité sans contrainte ! Mon corps exceptionnel… De quelle liberté j’aurais pu jouir si j’avais eu 20 ans dans les années soixante-dix ! Une hippie parfaite !
Puis arrive le printemps de l’an I, l’entrée en PMA. Comme on entre au purgatoire, la mort dans l’âme, mais persuadés qu’on va s’en sortir. C’est sûr. Nous ne sommes pas plus mauvais que les autres, non ? Et puis on voit les chiffres. Un couple sur deux sort de la PMA sans enfant. On relit, pas sûrs d’avoir bien saisi. D’avoir intégré ce que cela signifie. Un couple sur deux sort de la PMA sans enfant. Personne ne nous l’a jamais dit, d’ailleurs. Cela fait partie des informations que l’on glane par soi-même, quand on se rend compte, rapidement, que l’autoformation est plus que jamais nécessaire. Qu’on ne peut compter que sur nous-mêmes. Et sur quelques autres copains de galère, éventuellement. Un couple sur deux sort de la PMA sans enfant. Boum. Un sur deux. Tiens, prends-toi ça dans la gueule. 50/50. Fifty-fifty. Dans tous les sens, on n’est pas très sereins.
Mais ça ne peut pas être nous. Ça ne sera pas nous. Nous, on est plus forts.
Des infertiles célèbres, à l’origine
« Lorsque Rachel vit qu’elle ne donnait point d’enfants à Jacob, elle porta envie à sa sœur, et elle dit à Jacob :
Donne-moi des enfants, ou je meurs ! »
Genèse, 30 : 1-24
Assez tôt dans le parcours de PMA, je me suis demandé vers qui me tourner. Autour de moi les annonces de grossesse pleuvaient, rien de nouveau sous le soleil, j’étais dans la trentaine, c’était la France. Impossible d’échapper à l’engouement français pour la maternité, dans la rue, au travail, en vacances, partout, oppressantes, des femmes enceintes. Et qui étais-je pour les juger ? Mais étais-je donc la seule à me trouver dans cette situation désespérée ? Au-delà des forums bordéliques et trop souvent mal écrits, les blogs ont constitué assez vite des ressources rassurantes pour sapiens grégaires. Oh ! des gens comme moi. Je n’étais pas seule. Des femmes (dans leur écrasante majorité) qui écrivent bien, régulièrement. Leurs parcours complets étalés au grand jour comme une source quasi infinie où puiser réconfort auprès d’autres êtres souffrants. L’humour dont font preuve certain(e)s bloggeurs/euses est incroyable, touchant. Mais c’est une forme d’apaisement toujours ambigüe, et c’est l’ADN même de ce genre de site à durée de vie – tout le monde l’espère – limité. Si le parcours en PMA de la bloggeuse est rapide, si, par exemple, elle tombe enceinte à la deuxième insémination¹, alors c’est un sentiment de colère et de dégout qui peut saisir la lectrice de l’ombre. Enceinte à la deuxième insémination ? Et tu viens nous saouler avec ton désespoir de façade ? Voilà bien une fertile impatiente qui s’est glissée chez les infertiles, tel le loup dans la bergerie, pour glaner une compassion qui n’est pas méritée. Des pensées sitôt suivies de culpabilité, de honte. Mais qui pense ainsi, franchement ? (Blâmez DNLP.) Si le parcours de la bloggeuse est long, difficile, désespérant, la lecture est douloureuse et empreinte d’empathie, mais également, inévitablement, d’une pointe de satisfaction. Je ne suis pas la seule à galérer, et j’espère que tu galéreras encore longtemps, j’espère que tu seras là, avec moi, ne me laisse pas seule dans ce trou noir. Les blogs sont utiles, mais ne peuvent pas nourrir un besoin plus profond de sens, car le succès du traitement arrache immédiatement de la communauté des losers celle ou celui qui écrit. La communauté des « childless », les sans-enfants contraints et forcés (par opposition aux « childfree » qui décident de ne pas avoir d’enfants), s’organise petit à petit sur l’Internet français, mais il faut retourner dans le passé pour trouver une nourriture plus roborative.
Étonnamment (étonnamment, d’abord parce que je n’y connaissais rien, et ensuite parce que je n’imagine pas qu’il y ait eu tant de problèmes d’infertilité que ça au moment où elle est écrite, au plus tôt au VIIIe siècle av. J.-C., à moins que le discours contemporain sur la chute de la fertilité ne soit trop dramatisé ?), la Bible est truffée d’histoires de femmes infertiles qui doivent attendre des années avant de mettre au monde un enfant. Sans aucun doute, la fonction de ces histoires n’est pas de souligner un quelconque problème biologique à l’époque, mais bien plutôt leur portée symbolique. L’Ancien Testament rappelle sans arrêt aux femmes qu’elles ne décident pas quand elles auront un enfant, mais qu’il s’agit bien d’un don de Dieu : elles doivent se soumettre à sa volonté, et de cette soumission plus ou moins heureuse, de cette reconnaissance de leur impuissance, de cette humiliation naitra peut-être un enfant. La soumission à Dieu ou au destin ? La différence entre le croyant et le non-croyant…
Ainsi, Sarah est la deuxième femme importante à apparaitre dans la Bible après Ève. La mère de toutes les infertiles, « femme du désir et du manque, femme des éternels déracinements »². Mariée à Abraham, elle doit attendre d’approcher 100 ans (!) avant de mettre au monde Isaac (« Dieu rit », le prénom de plume que se choisira Karen Blixen). L’annonce de cette naissance a été faite un an auparavant par un envoyé de Dieu, et Sarah, en l’entendant parler à son mari, aurait ri devant le ridicule (ou la joie ?) d’une telle affirmation. C’est ce rire qui la rend éminemment sympathique à mes yeux. Je me l’imagine sardonique, aigu, cassant, puissant, afin que ces envoyés de Dieu comprennent bien la valeur qu’elle accorde à leurs dires. Un bon gros LOL des familles. Sans doute suis-je complètement à côté de la plaque. Mais c’est ma Sarah. Et pourtant, un an plus tard, le miracle divin vient au monde. Joie et soumission à la volonté de Dieu.
Isaac (qui déjà a failli passer sur le bucher !) et sa femme Rebecca vont bien galérer eux aussi, vingt ans (!), avant de donner naissance à des jumeaux, Ésaü et Jacob. Et devinez quoi ? Jacob à son tour épouse Rachel, mais Dieu, un brin pervers, pimente