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La PEDAGOGIE DE L'INCLUSION SCOLAIRE, 3E EDITION: Un défi ambitieux et stimulant
La PEDAGOGIE DE L'INCLUSION SCOLAIRE, 3E EDITION: Un défi ambitieux et stimulant
La PEDAGOGIE DE L'INCLUSION SCOLAIRE, 3E EDITION: Un défi ambitieux et stimulant
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La PEDAGOGIE DE L'INCLUSION SCOLAIRE, 3E EDITION: Un défi ambitieux et stimulant

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About this ebook

Accueillir tous les enfants dans la classe ordinaire, considérer avant tout ce qui les rassemble plutôt que ce qui les distingue… voilà ce que met de l’avant cet ouvrage qui vise à contribuer à l’émergence d’une pratique pédagogique inclusive responsable en s’appuyant sur ce qu’elle est fondamentalement et sur les changements organisationnels et pédagogiques qu’elle sous-tend.

Entièrement réorganisée et comportant de nouveaux chapitres, cette troisième édition reflète les progrès de la recherche en matière d’inclusion scolaire et répond aux préoccupations grandissantes du personnel enseignant relativement à la pratique de l’inclusion scolaire. Réunissant les textes d’une trentaine de chercheurs, elle permet de développer une meilleure compréhension de ce qu’est l’inclusion scolaire et de découvrir des dimensions planificatrices et créatrices liées à toute pratique pédagogique destinée à une diversité d’élèves. Elle comprend également un glossaire des concepts clés facilitant l’utilisation d’un langage commun chez l’ensemble des acteurs de la pédagogie inclusive.

Essentiel à la formation initiale et continue en éducation, cet ouvrage montre que l’éducation inclusive est certes un projet ambitieux, mais combien stimulant, et ce, tant pour les acteurs de l’éducation qui se l’approprient que pour l’ensemble des membres de la communauté qui en bénéficient.
LanguageFrançais
Release dateJun 17, 2015
ISBN9782760539976
La PEDAGOGIE DE L'INCLUSION SCOLAIRE, 3E EDITION: Un défi ambitieux et stimulant
Author

Nadia Rousseau

Nadia Rousseau est titulaire d’un doctorat en psychopédagogie de l’Université de l’Alberta. Professeure en adaptation scolaire à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) depuis 1998, elle est également directrice du Réseau de recherche et de valorisation de la recherche sur le bien-être et la réussite (RÉVERBÈRE). Ses recherches portent sur l’expérience scolaire des jeunes, la pédagogie inclusive et les facteurs clés favorisant la qualification et l’obtention d’un premier diplôme d’un plus grand nombre de jeunes ayant des difficultés scolaires importantes.

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    La PEDAGOGIE DE L'INCLUSION SCOLAIRE, 3E EDITION - Nadia Rousseau

    document.

    Liste des encadrés

    Liste des figures

    Liste des tableaux

    Introduction

    La pédagogie de l’inclusion

    scolaire : un défi ambitieux,

    mais combien stimulant

    Nadia Rousseau

    C’est en 2004 que paraissait la première édition de La pédagogie de l’inclusion scolaire, ouvrage collectif réalisé à l’époque avec la collaboration de Stéphanie Bélanger. Trente et un spécialistes avaient alors participé à la rédaction de ce premier ouvrage. Six ans plus tard, une deuxième édition avait permis de revisiter l’ouvrage initial grâce à la collaboration de vingt-huit experts pour deux principales raisons. Il semblait évident que l’ouvrage, fortement utilisé dans les activités de formation initiale et continue en éducation, gagnerait à être mis à jour pour mieux répondre aux besoins des praticiens et praticiennes. De plus, les progrès de la recherche en matière d’inclusion scolaire se devaient d’être reflétés dans l’étude de cette question.

    Cette troisième édition reprend les deux raisons énoncées précédemment auxquelles s’ajoute une préoccupation grandissante relativement à la pratique de l’inclusion scolaire, soit les craintes qu’elle continue de susciter chez le personnel enseignant. Cet ouvrage propose donc un regard au goût du jour qui a comme principal objectif de contribuer à l’émergence d’une pratique pédagogique inclusive responsable en s’appuyant sur ce qu’elle est fondamentalement et sur les changements organisationnels et pédagogiques qu’elle sous-tend. L’ouvrage vise donc à apaiser certaines craintes exprimées par les acteurs de terrain, par le développement d’une meilleure compréhension de ce qu’est l’inclusion scolaire et par la découverte des dimensions planificatrices et créatrices liées à toute pratique pédagogique destinée à une diversité d’élèves.

    En d’autres mots, cet ouvrage permettra aux lecteurs de réaliser que l’éducation inclusive est certes un projet ambitieux, mais combien stimulant, et ce, tant pour les acteurs de l’éducation qui se l’approprient que pour l’ensemble des membres de la communauté qui en bénéficient.

    Cette troisième édition s’articule autour de cinq parties. La première, Comprendre l’inclusion scolaire et ses effets, nous invite, à travers quatre chapitres, à découvrir ou redécouvrir les assises de l’éducation inclusive. La deuxième partie, Départager les rôles et les responsabilités de chacun, cherche à illustrer l’importance des actions déployées par l’ensemble des acteurs qui composent la communauté éducative. Quatre chapitres nous permettent d’atteindre cet objectif. La troisième partie, Se donner un cadre de référence, permettra aux lecteurs d’appréhender leurs actions à travers trois modalités d’actions soutenant l’éducation pour tous. Ces trois chapitres sont certes distincts, mais tout à fait complémentaires. La quatrième partie, Faciliter les transitions, repose sur deux chapitres qui abordent cette étape si importante dans deux moments charnières de la vie des élèves, soit l’entrée à la maternelle et l’entrée sur le marché du travail. Enfin, la cinquième et dernière partie de l’ouvrage, S’approprier certaines voies d’action, comprend cinq chapitres destinés à outiller les acteurs de l’éducation dans les activités d’enseignement-apprentissage qu’ils mènent quotidiennement. Ces chapitres sont, en quelque sorte, les bases de la construction d’un coffre à outils qui allie planification, réflexion sur l’action et stratégies d’intervention.

    Rappelons que chacune des éditions de cet ouvrage comprend un glossaire original des concepts clés utilisés par les auteures et auteurs. Ce glossaire se veut un outil accessible, facilitant le développement d’un langage commun chez l’ensemble des gens interpellés par la pédagogie inclusive.

    Bonne lecture !

    C’est mon école

    à moi aussi…

    Les caractéristiques essentielles

    de l’école inclusive

    Nadia Rousseau, Luc Prud’homme et Raymond Vienneau

    CIBLES

    Comprendre l’origine juridique du développement de pratiques inclusives.

    Comprendre l’organisation de l’école inclusive et se familiariser avec elle.

    Reconnaître l’influence des attitudes dans tout projet d’école inclusive.

    Connaître les conditions essentielles à la pratique de l’inclusion scolaire.

    Reconnaître la légitimité de la diversité en salle de classe.

    Comprendre la différenciation pédagogique dans une vision inclusive.

    CONCEPTS EXPLIQUÉS DANS LE GLOSSAIRE

    Classe multiniveau

    Communauté scolaire

    Différenciation pédagogique

    Pédagogie de l’inclusion scolaire

    QUESTIONS CLÉS

    Quelle est l’importance des déclarations internationales sur le mouvement de l’inclusion scolaire ?

    Quelle est l’importance de la formation continue des intervenants scolaires en contexte inclusif ?

    En quoi les attitudes des différents acteurs scolaires influencent-elles l’émergence de pratiques plus inclusives ?

    Pourquoi la différenciation pédagogique est-elle si importante en contexte inclusif ?

    Ce texte constitue une amorce à cette troisième édition de La pédagogie de l’inclusion scolaire . Il s’agit d’un outil pour celles et ceux qui croient que l’école doit être repensée. Il offre des pistes d’action et de réflexion à celles et ceux qui veulent contribuer à la construction d’une école plus respectueuse de la diversité, une école où tous les jeunes peuvent développer une ouverture et une curiosité à la différence. Nous nous proposons non seulement d’approfondir la compréhension des caractéristiques de l’école inclusive, mais aussi d’enclencher un processus de réflexion et de construction de connaissances sur la pratique inclusive.

    « C’est mon école à moi aussi… » Des paroles qui pourraient être exprimées par les enfants d’une école ; par les parents de ces enfants ; par les pédagogues et autres praticiens qui gravitent autour de ces mêmes enfants, de même que par les membres d’une communauté qui auraient réussi à faire de leur école de quartier une école pour tous. Une école où tous se sentent chez eux et sont respectés. Une école où le développement du plein potentiel individuel et collectif est tout aussi valorisé que la réussite scolaire.

    Ce projet d’école inclusive et soucieuse du développement intégral de chacun de ses membres s’inscrit par ailleurs à l’intérieur d’un mouvement quasi planétaire alimenté par de nombreux textes de droits et déclarations internationales qui établissent en quelque sorte le premier palier des « fondements juridiques » de l’inclusion scolaire (Vienneau, 2014). Parmi ces textes, il convient tout d’abord de mentionner la Déclaration mondiale sur l’éducation pour tous de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO, 1990), dont l’article III, intitulé « Universaliser l’accès et promouvoir l’équité », reconnaît que « les besoins éducatifs des personnes handicapées exigent une attention spéciale » et qu’il convient d’assurer « dans le cadre même du système éducatif, l’égalité d’accès à l’éducation de toutes les catégories de personnes handicapées » (article III.5).

    Ces injonctions en faveur d’un accès universel et d’une plus grande équité en matière d’éducation publique seront reprises quelques années plus tard dans les Règles pour l’égalisation des chances des personnes handicapées de l’Organisation des Nations Unies (ONU, 1993). Faisant suite à la Décennie des Nations Unies pour les personnes handicapées (1983 à 1992), ces règles reconnaissent en effet « le principe selon lequel il faut offrir aux enfants, aux jeunes gens et aux adultes handicapés, des chances égales en matière d’enseignement » et que « c’est aux services d’enseignement général qu’il incombe d’assurer l’éducation des personnes handicapées dans un cadre intégré » (règle 6, Éducation).

    Parmi toutes ces conventions et déclarations internationales, un texte, souvent cité, occupe une place particulière : la Déclaration de Salamanque (UNESCO, 1994). Ce texte proclame, entre autres, que « chaque enfant a des caractéristiques, des intérêts, des aptitudes et des besoins d’apprentissage qui lui sont propres » ; que « les personnes ayant des besoins éducatifs spéciaux doivent pouvoir accéder aux écoles ordinaires, qui doivent les intégrer dans un régime pédagogique centré sur l’enfant, capable de répondre à ces besoins » ; et que « les écoles ordinaires ayant cette orientation intégratrice constituent le moyen le plus efficace de combattre les attitudes discriminatoires, en créant des communautés accueillantes » (article 2, traduction libre).

    Une décennie plus tard, un autre texte de l’UNESCO (2005) proposera des Principes directeurs pour l’inclusion « devant permettre de rendre les plans nationaux d’éducation […] plus inclusifs, dans le but d’assurer l’accès à une éducation de qualité à TOUS les apprenants » (p. 6). Dans l’introduction de ce texte, à caractère davantage pédagogique que juridique, on explique comment on en est venu « à reconnaître que la question de l’inclusion devait être considérée comme une composante essentielle de l’EPT [programme onusien Éducation pour tous] » (p. 10).

    Le projet d’école inclusive ne vise rien de moins qu’à actualiser ces diverses injonctions internationales en cherchant, entre autres, à universaliser l’accès à l’école publique (UNESCO, 1990), à offrir à tous les enfants et à tous les jeunes d’âge scolaire des chances égales en matière d’enseignement (ONU, 1993), à construire un régime pédagogique véritablement centré sur l’apprenant (UNESCO, 1994) et à garantir l’accès à une éducation de qualité à tous les apprenants (UNESCO, 2005).

    Est-il également possible de concevoir l’école comme un milieu de vie, un environnement qui facilite le développement d’une citoyenneté ouverte et curieuse envers l’autre, qui aide à se construire et à s’enrichir ? Comme plusieurs tentent de le faire comprendre, l’école n’a-t-elle pas cet objectif autrement plus important qui consiste à « aider chacun à devenir lui-même en rencontrant l’autre » ? (Jacquard, 2006, p. 165).

    En effet, l’école inclusive n’est pas uniquement préoccupée par ce qui distingue ou catégorise les acteurs entre eux, mais aussi par ce qui les rassemble : apprendre à vivre ensemble. Ainsi, l’accent n’est pas mis sur les différences de rendement entre les élèves forts et les élèves moins forts ou encore entre les élèves handicapés et les élèves sans handicap, mais plutôt sur le potentiel, les forces cachées ainsi que sur la capacité de communiquer et d’apprendre des uns et des autres (Hick, Kershner et Farrell, 2009). Cette complémentarité des rôles est tout aussi à propos chez les différentes personnes qui composent l’équipe-école et la famille (Agence européenne pour le développement de l’éducation des personnes présentant des besoins particuliers, 2003 ; Larivée, Kalubi et Terrisse, 2006).

    L’école inclusive repose simplement sur le fait que le projet scolaire ne peut se résumer au développement de connaissances et de compétences disciplinaires ; une société qui choisit de se donner un système scolaire joue un rôle d’envergure dans le développement identitaire de ses jeunes membres. Pour illustrer cette fonction trop souvent oubliée dans plusieurs écoles, voici des propos tout simples, mais combien évocateurs.

    En bref, Jean Tremblay ne va pas seulement à l’école pour y apprendre à lire et à écrire ou pour se familiariser avec la géographie, avec l’histoire de son pays et des autres, ni même pour apprendre à se montrer réceptif aux idées des autres et à devenir un bon citoyen. Il a également besoin d’apprendre à devenir Jean Tremblay (Rapport CELDIC, Un million d’enfants, 1970, p. 82, cité dans AuCoin, 2009, p. 1).

    La rencontre de l’autre… D’abord comme un miroir pour nous aider à voir qui nous sommes. Ensuite, pour nous permettre d’enrichir nos façons de considérer, de concevoir, de comprendre, de faire… C’est dans la complémentarité, l’interdépendance, l’intercompréhension que peuvent jaillir ces projets auxquels nous n’aurions jamais pensé si chacun de nous était resté seul… Combien de penseurs, d’employeurs, de philosophes, de sociologues et de politiciens soulignent la nécessité de réunir une multitude de forces différentes pour travailler ensemble dans la vraie vie à la résolution des problèmes d’aujourd’hui ?

    En effet, trop vouloir comparer et contrôler le rythme d’évolution des apprentissages des élèves qui composent une classe soulève une série de difficultés, qui prennent plusieurs formes. La première est reliée à la dimension pédagogique de l’école (difficultés associées à l’enseignement, à l’évaluation, à la différenciation, etc.) ; la deuxième porte sur la finalité de l’école (la qualification, la diplomation) ; la troisième concerne plus particulièrement la dimension affective de l’école (le perception de soi, l’estime de soi, le sentiment de compétence, etc.) ; et la quatrième touche la dimension sociale et citoyenne de l’école (l’autonomie, l’autodétermination, l’engagement, etc.).

    L’école inclusive est celle qui va au-delà de la normalisation. Elle s’inscrit plutôt dans une logique de dénormalisation au sens où elle considère les différences individuelles comme faisant partie de la norme (voir chapitre 3). Elle se donne comme mission d’assurer le plein développement du potentiel de chacun de ses élèves. Pour ce faire, l’école mise sur chacun des acteurs proximaux qui gravitent en ses murs et sur les acteurs distaux qui y sont les bienvenus. Dans cette école, l’expression « plein potentiel » ne se limite pas au potentiel scolaire, mais comprend aussi toutes les formes d’expression de l’intellect. Ainsi, elle se caractérise par la capacité d’innover, de se remettre en question et par l’utilisation d’une panoplie de stratégies qui ne visent pas à faire disparaître la différence, mais bien à l’apprivoiser. Elle est dynamique et mise sur l’expertise de chacun de ses acteurs. L’école inclusive est tout le contraire d’une école statique où toutes les règles de fonctionnement, les rôles et les registres de réussite sont immuables. L’école inclusive est aussi l’antithèse d’une école où l’on tente de faire d’une personne ayant des défis particuliers une personne comme les autres.

    Pour s’engager dans une pratique inclusive, nous croyons essentiel : 1) de repenser l’environnement scolaire, 2) de réfléchir aux relations qui se créent et qui se vivent au quotidien dans une école et 3) d’apporter des images illustrant le sens d’une différenciation pédagogique articulée dans la classe d’une école inclusive.

    1. L’organisation de l’école : créer un environnement

    L’école inclusive accueille tous les élèves du quartier, peu importe l’environnement socioéconomique, la race, la culture, la langue, le handicap ou la situation particulière de l’enfant. Ainsi, l’école devient une réelle microsociété qui traduit la vie telle qu’elle est à l’extérieur de ses murs. Dans ce contexte, la direction d’école se doit d’avoir un leadership solide pour réunir les conditions nécessaires au bon fonctionnement de l’école inclusive (Agence européenne pour le développement de l’éducation des personnes présentant des besoins particuliers, 2003 ; Booth et Ainscow, 2002 ; Shepherd et Brody Hasazi, 2007). La direction détient, par son rôle au sein de l’école et de la commission scolaire, une responsabilité importante dans le développement d’une culture inclusive dans son institution. La culture inclusive (Booth et Ainscow, 2002) se caractérise par :

    un environnement sécuritaire ;

    une communauté stimulante qui se démarque par ses habitudes de collaboration et d’acceptation ;

    une communauté où tous ses membres sont valorisés.

    La culture inclusive sous-tend :

    un processus continu de développement professionnel ;

    des politiques inclusives visibles et connues de tous ;

    des valeurs associées à la valorisation de la diversité et au déclin de la discrimination.

    1.1. Le nombre d’élèves ayant des besoins particuliers par école et par classe

    La recherche sur l’inclusion scolaire fait clairement ressortir l’importance de respecter la proportion naturelle d’enfants ayant des défis particuliers dans l’école et dans ses classes. En d’autres mots, l’école pour tous s’éloigne des logiques de placement et mise sur l’accès de tous les élèves aux services et ressources nécessaires au développement du plein potentiel (Schattman, Dennis et Cook, 2007). Ainsi, les pratiques de centralisation des services sont à éviter puisqu’elles entraînent une disproportion d’élèves à l’intérieur d’une même école ou d’une même classe. À titre d’exemple, si les élèves ayant des troubles d’apprentissage représentent 10 % de la population générale, trois élèves ayant un trouble d’apprentissage pourraient se retrouver dans un groupe de 30 élèves. Si tous les élèves ayant des troubles d’apprentissage d’un secteur donné étaient dirigés vers une école désignée « centre de services », la proportion de ces jeunes au sein d’une même classe risquerait de doubler. Cette situation est à proscrire. Une autre pratique fréquemment observée vient nuire aux proportions naturelles recherchées. En effet, dans une école où la direction doit former une classe multiniveau ou multicycle, certains ont tendance à placer un maximum d’élèves reconnus comme autonomes et à l’aise avec les tâches scolaires dans ces groupes, ce qui fait que la classe voisine à niveau unique accueille une proportion très élevée d’élèves éprouvant des difficultés à l’école. Cette pratique traduit une administration centrée non plus sur les élèves, mais sur les enseignants et crée des environnements très éloignés d’une vision inclusive. Dans une école inclusive, la formation des groupes doit constamment viser à intégrer une diversité d’élèves dans des proportions semblables à celles observées dans la société. On ne crée pas des villages uniquement pour ceux qui ont éprouvé des difficultés à accomplir des tâches scolaires.

    1.2. La planification de l’inclusion scolaire

    La recherche montre que l’accueil d’un enfant ayant des défis particuliers au sein de l’école et de la classe doit être planifié (Rousseau, 2009). Cette planification est encore plus importante lorsque l’école fait ses premières armes en matière d’inclusion scolaire. Ainsi, en plus de la planification qui doit s’articuler à la commission scolaire, trois autres tâches sont assumées par l’école : l’analyse des besoins sociaux, affectifs et cognitifs de l’élève ; la formation relative aux particularités des besoins de l’enfant (et ce, pour l’ensemble des personnels de l’école, incluant la secrétaire et le concierge qui auront eux aussi à interagir avec l’enfant) ; la réorganisation des rôles dans la communauté scolaire.

    1.2.1. L’évaluation des besoins sociaux, affectifs et cognitifs de l’élève

    Dans un souci de professionnalisme, l’arrivée d’un enfant ayant des défis particuliers sera précédée d’une évaluation qui ne se limitera pas à la seule dimension cognitive de l’élève. Ainsi, le portrait de l’enfant que l’école est sur le point d’accueillir inclura des dimensions sociales (habiletés d’interaction, réseau social, etc.) et affectives (maturité, confiance en soi, anxiété, etc.) (Holub, Lamb et Bang, 2001). Dès lors, il va de soi que la famille devient une alliée importante dans l’élaboration du portrait de l’enfant.

    1.2.2. L’activité de perfectionnement

    Dans le même esprit, l’arrivée de l’enfant devrait être précédée d’une formation destinée à tous les personnels de l’école visant une meilleure compréhension du handicap ou du trouble avec lequel l’enfant doit composer. Par exemple, l’arrivée d’un enfant affecté du syndrome de Gilles de la Tourette dans l’école devrait entraîner une activité de perfectionnement sur ce syndrome (caractéristiques, incidences sur les plans cognitif, social et affectif, etc.). Une telle démarche évitera de mauvaises surprises, voire certains malaises chez les personnels scolaires qui, pour la première fois, croiseront un jeune ayant ce syndrome, qui se caractérise, entre autres, par des tics moteurs ou verbaux. Depuis plusieurs années déjà, la recherche sur l’inclusion insiste sur la nécessité d’organiser des activités de formation continue et des activités de perfectionnement (Lunt et Norwich, 2009). Il va de soi qu’une telle démarche vise non seulement à accroître le sentiment de compétence des enseignants, mais aussi à éliminer les « surprises » de la rentrée scolaire au cours de laquelle l’enseignant découvre dans sa classe un ou des élèves pour qui aucune préparation n’a été faite, pour qui peu de connaissances sont maîtrisées et qui deviennent alors générateurs de stress chez l’enseignant, et ce, malgré les élèves.

    1.2.3. La réorganisation des rôles au sein de la communauté scolaire

    La recherche met aussi en évidence la nécessité de revoir l’allocation des ressources humaines dans l’école. Ainsi, une école inclusive ne devrait pas assister à la diminution de ses ressources, mais se transformer (Jorgensen, Fisher, Sax et Skoglund, 2001 ; Jorgensen, Schuh et Nisbet, 2006). De cette manière, les ressources spécialisées ne sont pas distribuées dans une logique de placement (p. ex. les centres de services), mais dans une logique de service (p. ex. la classe où se trouve un élève ayant besoin de la ressource spécialisée pour favoriser le développement de son plein potentiel et l’aide à fournir à l’enseignant). À ce titre, l’Agence européenne pour le développement de l’éducation des personnes présentant des besoins particuliers (2003) précise qu’il est parfois nécessaire d’offrir quelques séquences de travail à certains élèves (ayant ou non des besoins particuliers) à l’extérieur de la classe. Cela dit, ces séances devraient s’organiser naturellement (en réponse à un besoin particulier qui émerge), et ce, de façon modulable. Plusieurs croient à tort que dans une pratique inclusive, l’élève ne peut jamais sortir de la classe pour recevoir un service spécialisé. De fait, il est préférable que la ressource spécialisée, qui appuie tant l’élève que l’enseignant, se manifeste dans la classe ; mais il est tout à fait possible également de sortir un élève de la classe, à l’occasion, pour répondre à un besoin particulier.

    1.3. L’allocation de temps

    La recherche insiste sur la nécessité de créer et réserver des temps de concertation au calendrier scolaire (Rousseau, 2009 ; Schattman, Dennis et Cook, 2007). Il ne s’agit pas uniquement d’accroître le temps alloué aux enseignants, mais également de concevoir une utilisation différente du temps disponible (Agence européenne pour le développement de l’éducation des personnes présentant des besoins particuliers, 2003). Ainsi, par son leadership, la direction d’école pourrait prévoir des réunions hebdomadaires de concertation statutaires au calendrier scolaire de son école. Il va de soi que ces temps de concertation rendent possible la collaboration entre les membres de l’équipe-école, collaboration orientée vers l’analyse et l’évaluation des stratégies mises en œuvre pour favoriser le développement du plein potentiel des élèves qui rencontrent des difficultés (Porter et AuCoin, 2012). Un temps statutaire au calendrier scolaire contribue également à la formation continue, au perfectionnement, aux rencontres de résolution de problèmes, aux rencontres de planification et à la production du plan d’intervention de l’enfant, etc.

    1.4. L’évaluation des interventions

    La recherche met également en évidence l’importance d’une pratique d’évaluation continue en lien avec la pertinence et l’efficacité des stratégies mises en œuvre pour favoriser le développement du plein potentiel de l’enfant (Jorgensen, Schuh et Nisbet, 2006 ; Stringer, 2009). Ainsi, périodiquement, les acteurs de l’éducation sont invités à réfléchir ensemble sur les forces et les limites des stratégies déployées, les aspects de la démarche qui gagneraient à être révisés, les besoins de perfectionnement que suscite la situation d’un enfant en particulier, etc. Lors du processus d’évaluation, l’équipe doit garder à l’esprit les visées de la pratique inclusive : le développement du plein potentiel de l’enfant dans les domaines scolaire, affectif et relationnel. Dans la mesure où certains enseignants font face à des défis particuliers en salle de classe, la direction d’école peut offrir son soutien en constituant des équipes stratégiques ayant pour principale fonction de soutenir les enseignants (Porter et AuCoin, 2012). Les équipes stratégiques sont constituées de la direction et des professionnels des services complémentaires.

    L’évaluation des interventions peut également donner lieu à la production d’un document utile en contexte de transition d’une classe à une autre ou d’une école à une autre. C’est d’ailleurs pour répondre à ce besoin qu’un formulaire de transition a été élaboré par une équipe-école de la Gaspésie¹. De plus, la transition en soi est un domaine d’étude fortement significatif en inclusion scolaire. D’ailleurs, les chapitres 12 et 13 se consacrent à cette question.

    1.5. Le coordonnateur de l’inclusion scolaire

    La recherche encourage la présence d’un coordonnateur de l’inclusion au sein de l’équipe-école ou d’un petit regroupement d’écoles. D’ailleurs, soulignons le travail de Jorgensen, Schuh et Nisbet (2006) à cet égard, qui proposent un guide fort intéressant pour définir ce rôle. Le coordonnateur de l’inclusion scolaire encadre les actions inclusives et assure ainsi une démarche d’inclusion harmonieuse et continue. À titre d’exemple, le coordonnateur de l’inclusion peut aider à :

    trouver les personnes-ressources susceptibles d’animer des activités de formation continue en réponse à un besoin particulier ;

    suggérer des outils didactiques qui pourraient contribuer à enrichir le curriculum de l’élève ;

    envisager une rencontre pour résoudre un problème au sein de l’école en matière d’inclusion ;

    soumettre une demande de subvention de recherche-action en lien avec les pratiques inclusives ;

    amorcer la rédaction d’une demande de subvention visant l’achat d’un outil technologique en réponse à un besoin particulier ; etc.

    2. Les relations : des expériences où peut se vivre l’éloge de la différence

    L’école inclusive se caractérise par la richesse des relations qui existent entre les membres de cette microsociété. En fait, l’école inclusive repose sur la collaboration, l’entraide et la complémentarité des acteurs. On s’en doute, pour faire de l’école un lieu où tous se sentent bien, un travail important doit être effectué sur les préconceptions de l’un et de l’autre à l’égard de la différence et à l’égard des rôles pédagogiques (Ramel et Lonchampt, 2009).

    2.1. Les attitudes

    Les attitudes sont définies par Shapiro (1999) comme étant la « tendance d’un individu à agir ou réagir selon son mode de croyances, de valeurs et de paradigmes enracinés dans ses expériences sociales […] Cette tendance présente deux aspects : ce que la personne dit et ce qu’elle fait » (p. 8-9, traduction libre). Cette définition des attitudes peut à elle seule aider à comprendre la difficulté vécue par les intervenants scolaires engagés dans un processus de changement. Il est clair que la pratique de l’inclusion exige un changement de paradigme concernant l’école et son rôle, un changement de perception à l’égard de la différence, un changement de fonctionnement envers la gestion de l’école, un changement de pratique à l’égard des stratégies pédagogiques et adaptatives déployées. Certes, bien que le changement soit l’affaire de tous, il semble que la volonté de la direction d’école à mettre en œuvre des changements soit fortement associée à la pratique de l’inclusion scolaire (Agence européenne pour le développement de l’éducation des personnes présentant des besoins particuliers, 2003 ; Rousseau, 2012). Dans un contexte de changement, les intervenants scolaires ont tendance à s’accrocher à ce qu’ils connaissent déjà (croyances enracinées dans leurs expériences sociales passées). On verra alors ceux qui acceptent favorablement ce changement (parce qu’ils ont vécu des expériences inclusives positives) et ceux qui l’acceptent difficilement ou le refusent tout simplement (parce qu’ils n’ont pas vécu de telles expériences ou parce que l’expérience vécue a été négative). Ces réactions, qu’elles se manifestent dans le langage verbal ou non verbal, viennent nécessairement favoriser la pratique de l’inclusion scolaire ou lui nuire. D’ailleurs, à ce sujet, plusieurs recherches ont démontré que l’attitude de l’intervenant scolaire est un facteur déterminant dans le bon fonctionnement de l’école inclusive (Black-Hawkins, Florian et Rouse, 2007 ; Lunt et Norwich, 2009). Les attitudes des intervenants viennent ensuite colorer leur ouverture et leur volonté de s’engager dans un processus de changement, leur souplesse dans les interventions ainsi que leur degré de collaboration aux différentes activités de résolution de problèmes, de perfectionnement, de comité multidisciplinaire, etc.

    Accepter de s’engager dans la construction d’une école inclusive, c’est poser un regard sur soi, sur ses croyances et sur ses valeurs. C’est accepter de prendre conscience des croyances qui mènent à l’ouverture à la différence et au changement et celles qui mènent plutôt à la fermeture ou à la crainte de la différence et du changement. En d’autres mots, l’attitude des enseignants dans tout projet inclusif est un facteur décisif du caractère inclusif de l’école (attitudes envers les élèves ayant des besoins particuliers, manières d’appréhender les différences en classe, volonté de s’attarder efficacement à ces différences) (Agence européenne pour le développement de l’éducation des personnes présentant des besoins particuliers, 2003).

    Pour y réfléchir ensemble, toujours selon le modèle de Shapiro (1999), voici trois questions que tout intervenant scolaire peut se poser :

    Quellessontlesémotionsquefaitnaîtrelaprésenced’unenfant ayant des défis particuliers dans ma classe ou dans mon école ?

    À quelles croyances ou préconceptions ces émotions sont-elles associées ?

    Comment se traduisent-elles dans mes comportements ?

    Pour pousser plus loin la réflexion, prenons le cas de Marie-Soleil, qui semble plutôt fermée à l’idée d’une pratique inclusive, et celui de Pierrette, qui semble plutôt ouverte à la pratique de l’inclusion scolaire.

    2.1.1. Le cas de Marie-Soleil : une attitude de fermeture

    Quelles émotions suscite la présence d’un enfant ayant des défis particuliers dans ma classe ?

    La présence de Benoît dans ma classe me dérange. J’ai l’impression qu’il serait mieux dans une classe d’adaptation scolaire puisque, de toute façon, il n’arrivera pas à faire le travail que je lui demanderai. Ça me choque de devoir le garder dans ma classe. C’est une surcharge de travail qui ne mènera pas à grand-chose.

    À quelles croyances ou préconceptions mes émotions sont-elles associées ?

    La colère et le sentiment d’être « dérangée » sont associés à ma croyance à l’égard des enfants différents : ils ne seront pas capables de réussir comme les autres ; ils me demandent plus de temps pour peu de résultats.

    De quelle manière ces émotions et croyances se traduisent-elles dans ma classe (ce que je dis et ce que je fais) ?

    Je soupire ! J’ai tendance à voir tout ce qui ne fonctionne pas et porte peu attention à ce qui fonctionne. Je centre mon regard sur l’apprentissage et je le compare à l’apprentissage des autres. Je porte peu mon regard sur la dimension sociale et affective. Je lui souris moins.

    Compte tenu de ses attitudes et de ses croyances, Marie-Soleil, même sans mauvaise intention, sera plus portée à entretenir une relation pédagogique difficile avec Benoît, à manifester une certaine rigidité à l’égard des stratégies pédagogiques et adaptatives qui pourraient être déployées pour favoriser le développement du plein potentiel de Benoît, à résister au changement qui s’effectue dans son école, à participer « à reculons » aux ateliers de perfectionnement offerts pour répondre aux besoins particuliers de son école ou sur la question de l’inclusion scolaire, et sera peu engagée dans les activités de résolution de problèmes ou les comités multidisciplinaires. Par conséquent, Benoît sentira qu’il est un fardeau pour l’enseignante et aura tendance à se désengager, à être la cible de moquerie par ses pairs qui, eux aussi, sentent les réticences de leur enseignante. La relation entre celle-ci et les parents de Benoît en sera aussi affectée.

    2.1.2. Le cas de Pierrette : une attitude d’ouverture

    Quelles émotions suscite la présence d’un enfant ayant des défis particuliers dans ma classe ?

    La présence de Benoît dans ma classe m’impose un défi professionnel stimulant, c’est excitant ! J’ai une amie qui a un enfant avec la même problématique. Je sais combien c’est difficile pour cet enfant au quotidien. Je suis heureuse de l’accueillir dans ma classe. Je crois que tous les élèves bénéficieront de sa présence.

    À quelles croyances ou préconceptions mes émotions sont-elles associées ?

    L’excitation et un sentiment de joie sont associés à ma croyance à l’égard des enfants différents : je sais que la vie n’est pas toujours facile lorsque l’on vit avec un défi particulier. Je veux qu’il se sente bien dans ma classe. Je sais que je peux l’aider à faire plein d’apprentissages même si, en bout de ligne, il ne lira peut-être pas aussi bien que les autres élèves de ma classe.

    De quelle manière ces émotions et croyances se traduisent-elles dans ma classe (ce que je dis et ce que je fais) ?

    Je souris ! J’ai tendance à garder un œil sur lui et à l’inclure dans toutes les activités de la classe. Je centre mon regard sur ses améliorations, ses apprentissages au sens large du terme et sur sa participation sociale au sein de la classe.

    Compte tenu de ses attitudes et de ses croyances, Pierrette, spontanément, sera plus portée à entretenir une relation pédagogique harmonieuse avec Benoît, à manifester une certaine souplesse à l’égard des stratégies pédagogiques et adaptatives qui pourraient être déployées pour favoriser le développement du plein potentiel de Benoît, à être ouverte au changement qui s’effectue dans son école, à participer avec enthousiasme aux ateliers de perfectionnement offerts pour répondre aux besoins particuliers de son école ou sur la question de l’inclusion scolaire, et sera visiblement engagée dans les activités de résolution de problèmes ou les comités multidisciplinaires. Par conséquent, Benoît sentira qu’il est un élève apprécié par son enseignante, il sera plus enclin à s’engager, à vivre des relations harmonieuses avec ses pairs qui, eux aussi, sentent l’ouverture de leur enseignante. La relation entre cette enseignante et les parents de Benoît n’en sera aussi que plus saine.

    Voici des suggestions pour aider Marie-Soleil à vivre autrement l’arrivée de Benoît dans sa classe et pour consolider l’ouverture de Pierrette eu égard à son arrivée :

    réfléchir honnêtement sur ses attitudes et croyances à l’égard de la différence ;

    reconnaître les émotions que ces différences suscitent ;

    déterminer les répercussions de ses émotions sur sa pratique ;

    se familiariser avec les défis particuliers de Benoît en discutant avec ses parents, avec une association de parents, avec ses pairs qui ont une meilleure connaissance de ce type de défis et en lisant à leur propos ;

    participerà des activités de perfectionnementou deformation continue portant sur les défis ou les bénéfices de l’inclusion scolaire (pour l’intervenant, pour l’enfant ayant des défis particuliers, pour les autres enfants de la classe et de l’école) ;

    visiter une école qui pratique l’inclusion scolaire de façon responsable, c’est-à-dire une école qui répond aux conditions organisationnelles de l’inclusion scolaire ;

    discuter avec des collègues qui pratiquent l’inclusion scolaire de façon responsable ;

    informer le coordonnateur de l’inclusion ou la direction d’école des inquiétudes ou des besoins ressentis au regard du bon fonctionnement de la classe ;

    participer à des activités de recherche-action pour ainsi bénéficier d’un terreau fertile d’idées nouvelles, de collaboration et d’entraide autour d’une même question.

    2.2. L’ouverture et la souplesse

    La pratique inclusive repose aussi sur l’ouverture à une nouvelle façon de percevoir l’école et le rôle que l’on y joue. En effet, la pierre d’assise de l’inclusion scolaire est l’ouverture (Forlin, 2010 ; Prud’homme, Vienneau, Ramel et Rousseau, 2011 ; Shapiro, 1999) : ouverture au changement, à une nouvelle façon d’organiser l’école ; à la prise en charge de nouveaux rôles au sein de l’école ; aux avis des différents intervenants de l’école (psychologue scolaire, enseignant spécialisé, orthopédagogue, technicienne en éducation spécialisée, etc.) ; à la différence dans notre façon de concevoir l’apprentissage, la réussite, la qualification et la diplomation.

    Voici deux exemples (encadrés 1.1 et 1.2) des retombées concrètes de l’ouverture dans la pratique enseignante et dans la vie d’un enfant ayant une trisomie 21.

    ENCADRÉ 1.1

    Ouverture d’un orthopédagogue face au changement de son rôle dans l’école

    Lucien, orthopédagogue, vit actuellement tout un changement. Son école vient de prendre la décision d’adopter une pratique inclusive. Ainsi, dans son école, on ne se contentera plus de recevoir des élèves ayant des défis particuliers dans les classes ordinaires parce qu’il le faut ! L’école va plutôt s’engager dans un processus inclusif, ce qui signifie que plusieurs changements seront apportés au fonctionnement même de l’école. Dès lors, il est directement touché par cette nouvelle orientation. En effet, à titre d’orthopédagogue, Lucien a œuvré, durant les quatorze dernières années, auprès des enfants ayant des troubles d’apprentissage. Il rencontrait les enfants individuellement ou en petit groupe de deux ou trois dans son local, en moyenne deux fois par semaine. Aujourd’hui, il doit revoir son mode de fonctionnement puisque son travail ne s’effectuera plus uniquement dans son local. Concrètement, lorsqu’il travaillera avec Gabrielle, il le fera dans la classe de Gabrielle, et ce, avec d’autres enfants de la classe qui, sans avoir les défis de Gabrielle, pourraient bénéficier d’un petit coup de pouce pour les stratégies de lecture ! À l’occasion, il travaillera aussi avec l’enseignante lorsque de nouvelles stratégies seront enseignées ou lorsque cette dernière constatera qu’une activité est particulièrement difficile pour plusieurs élèves. Par conséquent, tous les élèves de la classe pourront bénéficier des compétences de Lucien, incluant Gabrielle et son enseignante !

    ENCADRÉ 1.2

    Ouverture d’une école secondaire qui célèbre la remise des diplômes de tous ses élèves

    David participera aujourd’hui à une grande célébration : c’est la remise des diplômes. C’est aujourd’hui qu’il défilera, avec sa toge et son drôle de petit chapeau (mortier), à l’auditorium de son école. Âgé de 19 ans, il recevra aujourd’hui son diplôme d’études secondaires. Certes, son diplôme est un peu différent des autres. Il traduit toutes ses années d’études et de présence en classe, toutes ces années où il a participé de tout son être à l’expérience de la vie qu’est l’école. Avec son diplôme, il n’ira pas à l’université ni même au cégep, mais il aura lui aussi son moment de célébration pour ce qu’il a accompli. La reconnaissance que lui offre son école, c’est un cadeau inestimable qu’il n’oubliera jamais.

    Bien entendu, l’ouverture est fortement liée à la souplesse. En étant ouverts, les intervenants scolaires manifestent davantage de souplesse. La recherche sur l’inclusion scolaire reconnaît la souplesse et la flexibilité comme étant des qualités professionnelles nécessaires à la pratique inclusive (Jorgensen, Schuh et Nisbet, 2006). De plus, elle reconnaît que l’empathie contribue à la qualité des interactions et de la collaboration avec la famille d’un enfant ayant des besoins particuliers (Scorgie, 2010). À titre d’exemple, l’enseignant ouvert et souple acceptera qu’un élève utilise une technologie d’aide comme outil d’apprentissage (stratégie de différenciation), contrairement à un enseignant rigide. Une direction d’école ouverte et souple acceptera la participation concrète des membres de la communauté dans son projet d’inclusion (les relations). À l’inverse, le refus de travailler en collaboration ou de bénéficier de l’aide volontaire des parents des élèves qui fréquentent l’école traduit un manque de souplesse et d’ouverture. Rappelons-le, les parents jouent un rôle significatif dans toute pratique inclusive ; ils sont des partenaires dont la coopération est valorisée et devraient pouvoir s’exprimer, être informés de la mise en œuvre des stratégies d’inclusion pour leur enfant et de l’évaluation de l’efficacité de ces interventions (Agence européenne pour le développement de l’éducation des personnes présentant des besoins particuliers, 2003).

    2.3. Les pairs

    Contrairement à la croyance populaire, les enfants, lorsqu’ils sont exposés tôt à la différence, l’acceptent naturellement, c’est-à-dire qu’ils ne la craignent pas. C’est pourquoi l’école inclusive ne peut s’actualiser sans la participation active de tous, même celle des élèves ! Les pairs qui vivent une année scolaire avec un enfant ayant un défi particulier apprennent beaucoup de cette expérience. En fait, « ils apprennent à réfléchir et à résoudre des problèmes ; ils apprennent que la vie n’est pas égale pour tous ! » (Educating Peter, 1992). Ainsi, lorsque la difficulté, le trouble ou le handicap est tenu secret, n’est pas abordé ouvertement et demeure un sujet tabou, les enfants qui ne vivent pas ces défis particuliers ont plutôt tendance à juger, à ne pas comprendre et à développer une forme de crainte à l’égard de la différence, crainte qui se manifeste trop souvent par la moquerie. À titre d’exemple, voici l’histoire de Mathieu (encadré 1.3).

    ENCADRÉ 1.3

    Mathieu en avait assez de la moquerie !

    Mathieu, âgé de 11 ans, vit au quotidien avec le syndrome de Gilles de la Tourette. Ce syndrome entraîne des tics moteurs et verbaux de même que de l’impulsivité. Depuis son entrée à l’école, Mathieu n’a jamais abordé ouvertement son syndrome. Ainsi, tout le monde sait qu’il a « quelque chose de différent », mais les élèves de l’école ne savent pas trop de quoi il s’agit au juste. Tant son enseignante que ses parents hésitent à en parler, car ils craignent ainsi d’entraîner une escalade dans les comportements parfois méchants de certains élèves de la classe et de l’école. Sans surprise, certains élèves se moquent de Mathieu. Par exemple, ils rient de ses tics ou refusent de le choisir dans l’équipe de soccer. Qui voudrait s’associer à ce drôle de personnage ? Conséquemment, au fil du temps, Mathieu s’isole de plus en plus et n’ose plus montrer son intérêt pour les activités sociales ou sportives de l’école, craignant toujours davantage le rejet. C’est lors du passage d’un conférencier sur l’utilisation des drogues dans la classe que Mathieu saisit, spontanément, l’occasion de s’exprimer sur ce qu’il vit. Alors que le conférencier faisait ressortir la difficulté de vivre avec un problème de toxicomanie, Mathieu osa lever la main. Le conférencier lui donna la parole, croyant qu’il voulait lui poser une question, mais il en fut autrement. Le droit de parole obtenu, Mathieu s’affranchit enfin : « C’est aussi difficile de vivre tous les jours avec la Tourette. Saviez-vous à quel point mes épaules font mal à la fin d’une journée alors qu’elles ont sauté toute la journée à cause de mes tics ? » Voilà, Mathieu venait de briser un tabou qui l’étouffait chaque jour davantage. S’ensuivit une discussion non pas sur la toxicomanie, mais sur la Tourette (ses causes, ses impacts, etc.). À la suite de ce geste courageux de Mathieu, les moqueries ont diminué de façon radicale et Mathieu a enfin été choisi pour faire partie de l’équipe de soccer !

    Les pairs constituent une aide précieuse par le soutien qu’ils peuvent apporter, les rôles qu’ils jouent et l’exemple qu’ils donnent. Qui plus est, ils développent leurs compétences relationnelles et morales à travers cette aventure, et ce, sans compromettre les apprentissages scolaires. Voici quelques rôles que peuvent assumer les pairs dans l’école inclusive :

    aide à la préparation de matériel destiné aux élèves ayant des besoins particuliers (p. ex. enregistrement audio ou numérisation de textes variés) ;

    aide dans la gestion des comportements (valoriser les bons comportements d’un jeune et ignorer les mauvais) ;

    aide dans la résolution d’un problème (résolution collaborative d’un problème vécu en classe, à la récréation, dans les corridors de l’école, dans l’autobus, etc.) ;

    aide à l’apprentissage (lecteur, scripteur, compteur, etc.) ;

    aide dans les déplacements d’un enfant ayant un handicap physique (pousser le fauteuil roulant, déplacer les sacs d’école qui bloquent le passage, saisir un objet hors d’atteinte, etc.) ;

    aide à la participation sociale au sein du groupe et de la classe (inviter l’élève à se joindre à un groupe ; à faire la démonstration d’un talent méconnu des autres élèves de la classe, etc.).

    2.4. La communauté

    ²

    Tout comme les pairs, les membres de la communauté (acteurs distaux de l’école) peuvent contribuer à la pratique inclusive (McDonnell et McGuire, 2007 ; Trépanier et Roy, 2013). Tout d’abord, il convient de signaler l’existence de deux types de ressources communautaires : celles qui sont spécialisées et celles qui ne le sont pas.

    2.4.1. Les ressources communautaires spécialisées

    Les ressources communautaires spécialisées regroupent divers services de réadaptation ou services sociaux accessibles dans la majorité des régions. La création d’un véritable partenariat avec ces ressources spécialisées contribue à la formation continue des intervenants scolaires, à la qualité des interventions effectuées dans l’école, de même qu’à la réduction du stress chez les intervenants scolaires qui se sentent moins seuls devant une situation problématique. Voici quelques services communautaires spécialisés qui peuvent être fort utiles (voir le tableau 1.2).

    2.4.2. Les ressources communautaires non spécialisées

    Ces ressources, souvent oubliées, constituent une banque d’aidants naturels qui méritent d’être connus. En fait, trop souvent, la participation des membres de la communauté se limite aux sorties d’école ou à la surveillance lors des récréations. Les membres de la communauté peuvent apporter beaucoup plus ! En voici quelques exemples (voir le tableau 1.3).

    La sollicitation des membres non spécialisés de la communauté peut s’effectuer de différentes façons (lettre de sollicitation envoyée par les enfants ; rencontres de parents ; affichages dans des lieux clés de la communauté où se situe l’école, etc.). À titre d’exemple, l’annexe 1.3 présente un modèle de dépliant visant la sollicitation des membres non spécialisés de la communauté.

    La reconnaissance de l’apport des ressources communautaires au projet inclusif est essentielle. Qu’il s’agisse de la transformation d’une école en école communautaire (Porter et AuCoin, 2012 ; Trépanier et Roy, 2013), de la collaboration des membres de la communauté à l’intérieur des murs de l’école dans le cadre de projets particuliers, ou encore de la collaboration de ces membres à l’extérieur des murs de l’école à travers l’accueil des élèves permettant une expérience communautaire, toutes ces formes de participation contribuent à la création d’une réelle culture inclusive (McDonnell et McGuire, 2007 ; Porter et AuCoin, 2012).

    3. La différenciation : reconnaître, valoriser et tirer parti de la diversité

    D’emblée, lorsqu’on traite de différenciation pédagogique, il faut comprendre que le phénomène de la diversité prend une tout autre dimension pour celle ou celui qui fait le choix de travailler à partir de ce modèle de pratique enseignante. Alors qu’elle a souvent été perçue comme un problème, la diversité se transforme en une ressource pour enseigner, pour favoriser l’apprentissage et expérimenter en classe un idéal d’interdépendance et d’intercompréhension. En d’autres termes, la diversité devient un objet explicite de discussion, de comparaison et d’étonnement pour amener les élèves à s’intéresser aux multiples façons de faire, opinions, forces, intérêts et difficultés que manifestent les membres d’une communauté d’apprentissage telle que la classe peut le devenir, et, par la suite, à les reconnaître et à en tirer parti. Dans ce sens, on ne peut parler de différenciation que dans le contexte d’une école démocratique et inclusive où les différences sont considérées comme une source d’enrichissement de la compréhension de chacun. Or, dans ce contexte, apprendre change de sens pour l’enseignant ; au lieu de concevoir l’apprentissage comme un travail individuel, il pourra éventuellement le voir comme un acte social où « c’est par le dialogue, par l’échange, par le doute, par le conflit, par l’argumentation – suscités grâce aux exemples – que les perceptions intuitives des uns et des autres peuvent commencer à s’accorder et à évoluer vers une compréhension commune » (Barth, 2004, p. 160).

    Par surcroît, le professionnel qui fait le choix de valoriser la diversité s’inscrit dans une vision de l’enseignement qui reconnaît, exploite et valorise aussi une diversité de stratégies d’enseignement-apprentissage. Cet enseignant comprend que c’est en portant un regard éclectique sur son travail qu’il peut s’ouvrir de manière significative aux croyances, aux conceptions et aux expériences de tous ses élèves. En somme, cet enseignant choisit d’associer les différences et la diversité au droit qu’ont tous les êtres humains d’être « à la fois comme tous les autres, comme certains autres et comme personne d’autre » (Ducette, Sewell et Poliner, 1996, p. 323, traduction libre). Il accepte qu’apprendre et comprendre dépassent la mémorisation : ce travail s’effectue au départ à l’aide d’une grande diversité

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