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L'Afrique en danger de mort: Eldorado 54
L'Afrique en danger de mort: Eldorado 54
L'Afrique en danger de mort: Eldorado 54
Ebook216 pages3 hours

L'Afrique en danger de mort: Eldorado 54

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About this ebook

L’Afrique se développe doucement mais sûrement. Mais sa croissance la met en danger à cause des choix incompatibles avec ses réalités. Le système capitaliste s’installe et tend à détruire une Afrique non préparée, de la même manière que la démocratie, adoptée trop tôt et maladroitement a détruit une bonne partie des pays africains.
Pour se développer durablement, les Africains doivent tout ramener à leur réalité pour pouvoir pleinement bénéficier, dans la dignité de leurs innombrables richesses, naturelles et humaines.
Les questions de l’autonomie, de l’éducation et de la dignité qui permettront à l’Afrique de s’en sortir durablement sont largement abordées dans ce livre.
LanguageFrançais
Release dateMay 4, 2021
ISBN9782312080666
L'Afrique en danger de mort: Eldorado 54

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    L'Afrique en danger de mort - Radjiv Bewi

    l’Afrique

    Avant-propos

    Grande a été ma surprise de constater une attitude étonnante chez les Africains vivant dans les pays occidentaux. L’Afrique que je connais est celle de l’hospitalité et de la bienveillance. Quoique pauvre et déchirée par des guerres intestines, l’Afrique est restée attachée à la communauté, au partage, au respect des personnes âgées, etc. Toutes ces choses font partie de la culture africaine. Elles sont l’essence de l’existence des hommes et des femmes du continent qui la transmettent à leurs enfants.

    Ce que j’ai constaté chez une bonne partie des Africains en terres occidentales est loin de tout ce que je viens d’énumérer. Des hommes et des femmes inhospitaliers, fortement complexés. Avec des visages fermés la plupart du temps. Ils sont très souvent durs avec d’autres Africains pour tout et pour rien, et même avec leurs frères et sœurs, cousins, cousines, neveux et nièces vivant sous leur toit, qui gaspilleraient l’eau, mangeraient trop, qui ne contribueraient pas assez, etc. Ceux qui sont les plus durs sont souvent, étonnamment, ceux qui sont nés en Afrique et qui arrivent en Occident pour se chercher, comme on le dit chez nous. S’ils étaient nés en Occident et élevés par des Occidentaux de souche comme d’aucuns se plaisent à dire, on pourrait les excuser du fait que d’autres valeurs leur aient été transmises. Mais non, nombreux sont nés en terres africaines et ont baigné dans l’hospitalité et sont pourtant devenus durs en Occident. Plus durs que les maîtres, plus blancs que blancs.

    La vie est dure en Occident, c’est vrai, mais ce n’est pas la seule chose qui justifie l’attitude dure et non joyeuse des ressortissants africains dans ces pays. J’ai alors commencé à réfléchir à ces comportements qui, en tant qu’Africain, « non pas parce que je suis né en Afrique, mais parce que l’Afrique est née en moi{1} », me blessent profondément. Étant en France pendant la rédaction de ce livre, j’ai fait quelques recherches sur la culture française, une culture judéo-chrétienne. J’ai compris, par exemple, qu’avant la Révolution française au XVIIIe siècle, la religion, à travers la charité chrétienne, a été un ingrédient important ayant permis le développement et le renforcement d’un esprit de partage et d’un sens de l’hospitalité louables qui, même de manière décroissante, ont perduré jusqu’à l’avènement des deux guerres mondiales (1914-1945).

    De la Révolution française à la Première Guerre mondiale, en passant par la grande révolution industrielle du XIXe siècle, le remplacement de la religion par la science et la technologie a permis l’envol du capitalisme qui, peu à peu, a fait naître l’idée du chacun pour soi à travers la mise en concurrence des hommes afin de booster leur productivité. Après la Seconde Guerre mondiale, le besoin de la reconstruction a entraîné la restructuration de l’entreprise : optimisation des systèmes de production, investissements de masse, etc. L’économie avait mille couleurs, mais seuls les chefs d’entreprise et une petite classe bourgeoise s’enrichissaient. Les inégalités sociales s’accéléraient. Les pauvres, pour survivre, devaient travailler toujours plus. Les gens couraient les usines, n’avaient plus de temps pour leurs proches. Tous ces bouleversements entraînèrent la destruction des liens sociaux. Les crèches et les maisons de retraite fleurirent pour soulager les travailleurs. Les êtres fragiles furent mis de côté pour permettre aux plus vaillants de produire encore et encore jusqu’à ce que leurs carcasses qui n’ont ni beauté ni éclat pour attirer des regards finissent dans le she’ôl.

    La mise en concurrence des hommes crée l’adversité, puis l’inimitié entre eux. Elle fait disparaître l’hospitalité, l’amour du prochain et le sens du partage. Tant pis pour le canard boiteux. La culture française de base en termes de valeurs humaines ou d’idéologies vacille telle la flamme d’une bougie sur le point de s’éteindre. Elle est progressivement remplacée par une culture néolibérale. Mot qui sonne comme la liberté, mais qui est là juste pour en créer l’illusion. La culture française s’est transformée en une culture consumériste, de la même manière que dans les autres pays occidentaux. C’est désormais le fric qui mène la danse à travers la liberté du marché, la seule chose qui, finalement, est libre en Occident aujourd’hui. En France : Liberté, Égalité, Fraternité sont devenues des coquilles vides. Des mots qui rappellent une époque lointaine et qui étonnent le présent. Des mots décoratifs dans un présent incertain où la guerre de tous contre tous fait rage. Guerre qui préfigure un futur inhumain, froid et déprimant.

    Voilà le monde dans lequel ont atterri beaucoup d’Africains relativement épargnés chez eux par un système capitaliste destructeur, un virus dangereux pour la communauté. C’est donc ce virus qui a infecté une bonne partie des Africains qui vivent en Occident, qui sont devenus froids comme la mort et inhospitaliers comme le champ hydrothermal de Dallol{2}.

    C’est alors que je me suis souvenu qu’en Afrique, quand j’étais gamin, je voyais que les hommes riches avaient de belles maisons bien clôturées et de belles voitures, souvent avec des vitres teintées. Je comprends maintenant ce que je voyais ; ces hommes s’extirpaient de la communauté. Qu’à peine riches, ils abandonnent les autres à leur triste sort et n’ont plus envie ni de se mêler ni même de croiser du regard le peuple d’en bas de Jack London{3}. Ils sont infectés par le Virus. Plus ils ont, plus ils en veulent et plus ils deviennent égoïstes. Ces Africains riches qui mènent une vie à l’occidentale en terres africaines sont la preuve que l’appât du gain et l’avidité détruisent les communautés.

    Mais il faut dire que l’inhospitalité que je constate en Occident n’est pas dans la nature propre des Occidentaux. Elle a été créée. J’ai compris que les peuples occidentaux sont eux-mêmes pris au piège et souffrent de solitude, du stress, etc. Les anxiolytiques{4} et les antidépresseurs font partie des médicaments les plus vendus et consommés en Occident. Les gens souffrent, et ils n’ont que des médicaments pour calmer leurs nerfs, encore un peu de temps avant de rejoindre les maisons de retraite, où gémissent à longueur de journée les pré-décédés, là où la solitude, le mépris et la maltraitance assassinent par milliers chaque semaine :

    « Ce qui rend un homme malheureux, ce n’est pas de mourir, ni même de mourir de faim. Beaucoup d’hommes sont morts. Tous les hommes sont mortels. C’est de vivre dans la misère sans savoir pourquoi, de travailler comme des bêtes sans rien gagner, d’avoir le cœur usé, d’être épuisé, isolé, sans amis, dans un laisser-faire glacial et généralisé{5}. »

    La montée de l’individualisme en Afrique est factuellement à corréler à l’augmentation des richesses des populations africaines. Et comme l’Afrique est en voie de développement, ce développement risque de mettre sa culture en voie de disparition. On peut oser dire que l’Afrique d’aujourd’hui est le passé de l’Occident, avant qu’il connaisse l’effet d’un capitalisme affermi. Le virus qu’est le système capitaliste fait route vers l’Afrique. Et c’est inquiétant, car il corrompt, crée l’inimitié et détruit des vies. J’ai alors voulu écrire pour avertir, pour alerter sur notre mort prochaine si nous n’agissons pas tout de suite.

    L’Afrique meurt à petit feu à cause de systèmes politiques et économiques incompatibles avec sa réalité, mais imposés par les puissances occidentales bénéficiaires du système capitaliste. Pour se déployer pleinement, le capitalisme supprime la culture des peuples et détruit leur histoire. Il crée des guerres interminables pour piller les terres ainsi dévastées.

    Je ne suis pas sociologue, encore moins historien. Je suis ingénieur en Sciences de la Terre, j’ai étudié les mines et la géologie, les paléoclimats et le génie des procédés. Suis-je bien placé pour parler de ces sujets de société ? Du capitalisme ? Je me le permets sans prétention !

    Je ne parlerai pas du franc CFA, comme c’est le cas généralement quand on aborde la question du capitalisme et de sa progéniture qu’est le néocolonialisme en Afrique. C’est un sujet important et légitime, qui mérite d’être abordé, non seulement par les économistes africains, mais par tous les Africains en général parce qu’il les concerne tous. Mais il faut prendre le temps de planifier rigoureusement la suppression du franc CFA et préparer l’Afrique d’après. Sinon, nous serons dans une impasse à la fin et pire encore si le sujet est traité de manière émotionnelle, dans les rues et autres ; nous ne serons pas plus avancés si nous ne réglons pas préalablement la question urgente de l’autonomie. Car pour imposer une monnaie, il faut avoir des gages solides, il faut avoir le monopole sur un certain type de ressources stratégiques (énergies, métaux précieux, terres rares…) ; pour ainsi, dans la foulée, fixer des conditions d’échange, à prendre ou à laisser. La Chine par exemple s’est longtemps tue. Consciente de ses potentialités, elle cherchait d’abord, dans le silence, à avoir le monopole sur beaucoup de ressources avant d’oser bousculer le système économique du monde. Elle a le yuan, mais cela n’a pas empêché qu’elle soit méprisée par l’Occident, jusqu’à ce qu’elle soit autonome, puis qu’elle contrôle des ressources stratégiques. La Chine peut désormais s’imposer. Avoir sa propre monnaie n’est donc pas un gage de prospérité et même d’indépendance. L’éducation et l’autodétermination des peuples peuvent conduire à une vraie indépendance.

    En plus de la question du monopole, il ne faut pas négliger la question de l’autonomie. La plupart des pays africains, quoi qu’on dise, ne sont pas autonomes économiquement et souffrent de mal-gouvernance, qui est encore pire.

    Comme beaucoup d’Africains, j’aimerais voir la fin réelle du franc CFA et particulièrement le relâchement de la main basse de la France impérialiste sur l’économie de nos pays. Beaucoup peuvent à raison – dans un sens – penser qu’on ne peut pas être autonome lorsqu’on ne contrôle pas sa monnaie ; je comprends ce discours, mais je crois qu’on peut faire des efforts pour atteindre une autonomie suffisante avec la monnaie que nous avons pour ensuite la détruire le moment opportun. S’il n’y a pas de liberté sans dignité, il n’y a pas non plus de dignité sans autonomie, de sorte que la liberté et l’autonomie deviennent une seule chair. Pour mettre fin au franc CFA, il faut d’abord que l’Afrique soit autonome. Sans déni, le sommes-nous vraiment ?

    Apprenons d’abord à être autonomes avec cette monnaie, c’est difficile certes, mais qui peut le plus peut le moins, dit-on. Si, donc, nous apprenons à être autonomes avec le peu que nous avons, imaginez ce que nous ferons quand nous aurons notre propre monnaie.

    Dans ce livre, j’aborde la question de l’autonomie, à travers l’éducation des populations, l’agriculture et autres choses tout aussi semblables, qui doivent, une fois acquises, justifier la souveraineté monétaire de l’Afrique du pré carré français. Chaque chose en son temps, dirait le sage. L’Afrique a aujourd’hui besoin de former ses dirigeants et de nourrir ses populations. Les autres luttes se gagneront en leur temps.

    J’invite les lecteurs à faire une lecture participative, c’est-à-dire à compléter les idées manquantes, à les discuter, à se les approprier et à les diffuser ; le plus grand de tous, c’est de les diffuser.

    Bonne lecture à toutes et à tous.

    Radjiv BEWI

    Chapitre I : La déconstruction

    « Armés de la connaissance de notre passé, nous pouvons avec confiance embarquer, cap vers notre futur. »

    Malcolm X

    LE LAVAGE DU CERVEAU

    L’Afrique est l’Eldorado du futur. À vrai dire, elle en était déjà un dans un passé très lointain, aux temps où Mansa Moussa, de passage au Caire quelque temps avant son pèlerinage à La Mecque en 1324, distribuait tellement d’or que le cours de ce métal précieux a chuté pendant douze ans{6}. Croyait-on que sur le continent africain, l’or poussait comme des carottes ? Aujourd’hui, la réémergence de l’Afrique est certaine. Les dés sont jetés. Mais de la même manière que la renommée du continent africain du temps de Mansa Moussa avait attiré sur lui les convoitises les plus sombres qui l’ont depuis fait plonger dans les ténèbres de la misère, il est possible que cette promesse de réémergence soit le signe avant-coureur du dernier coup de (dis)grâce qui enverra l’Afrique dans les bras d’Azraël{7}. Mansa a exhibé ses richesses au XIVe siècle, et dès le XVe siècle la traite négrière atlantique a débuté ; action-réaction. Il y a alors des raisons de penser que l’émergence ou la réémergence africaine ne soit pas, en fin de compte, une si bonne nouvelle pour les 54, vu qu’elle va attirer sur elle de nouvelles convoitises. Pour le capitalisme, en revanche, cette réémergence est sans aucun doute une excellente nouvelle.

    Le capitalisme, « dans la terminologie marxiste, [est un] régime politique, économique et social dont la loi fondamentale est la recherche systématique de la plus-value (profit), grâce à l’exploitation des travailleurs, par les détenteurs des moyens de production, en vue de la transformation d’une fraction importante de cette plus-value en capital additionnel, source de nouvelle plus-value{8} ». Le système capitaliste peut être considéré comme un puissant moteur de développement, ou du moins comme une force qui en crée les conditions. Il sait forcer la marche du progrès. Jean Ziegler{9}, dans son petit ouvrage sur le capitalisme{10}, dit ceci :

    « Le mode de production capitaliste se caractérise par une vitalité et une créativité stupéfiante. En concentrant les moyens financiers énormes, en mobilisant les talents humains, en jouant sur la compétition et la concurrence, les détenteurs du capital les plus puissants contrôlent ce que les économistes appellent le « savoir problématique », c’est-à-dire la recherche scientifique et technologique dans les domaines les plus variés : électronique, informatique, pharmaceutique, médical, énergétique, aéronautique, astronomie, science des matériaux… Grâce aux laboratoires, aux universités qu’ils sponsorisent, ils obtiennent des progrès éblouissants, notamment en matière de biologie, de génétique ou de physique. »

    Pour Ziegler, « le capitalisme a créé un ordre cannibale sur la planète ; l’abondance pour une petite minorité et la misère meurtrière pour la multitude ». Ce système, pour exister, a en plus du capital financier et des matières premières, besoin d’un capital humain comme force de production. Le continent africain a une main-d’œuvre jeune et d’inestimables matières premières qui creusent la faim et en même temps aiguisent l’appétit du capitaliste, ce dragon ancien. Et le voilà qui vient à vive allure, déchirant le vent. Mais avant d’aller plus loin, disons-le tout de suite ; ce dragon n’est pas du genre à s’arrêter de lui-même. Il lui arrive souvent de faire une pause quand il n’arrive plus à digérer, mais c’est pour revenir encore plus affamé. Le capitalisme, ce vieux dragon, cette créature fascinante, quand il s’arrête, c’est juste le temps de changer de tactique, de changer de modèle. De l’esclavage à la colonisation, il a dû s’adapter ou se réinventer. De la même manière que la mort est indissociable de la vie, le capitalisme est un avec tout système de servitude.

    Est-ce possible de dompter le dragon pour qu’il serve l’humanité ? Telle est la question posée par beaucoup de penseurs qui essaient de savoir si le système capitaliste peut être reformé ou réinventé pour servir les humains équitablement. Ziegler{11} a donné une réponse à cette question à travers une interrogation de sa petite-fille :

    « Abattre le capitalisme, ce n’est pas une utopie ? Est-ce qu’on ne pourrait pas plutôt l’améliorer, le reformer ? »

    Pour lui, tout système de servitude doit être renversé, détruit entièrement. Il a donné l’exemple de l’esclavage, de la colonisation, ou encore du système féodal qui était la norme en terres françaises d’avant la Révolution. Tous ces systèmes de servitude ont été combattus, très souvent par des luttes armées. Combattus, mais non abattus, l’esclavage et la colonisation existent encore au XXIe siècle. Il convient tout de même de noter que beaucoup de groupes de résistance existent encore aujourd’hui comme ce fut

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