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L' EFFET TRUMP: Quel impact sur la politique étrangère des États-Unis ?
L' EFFET TRUMP: Quel impact sur la politique étrangère des États-Unis ?
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L' EFFET TRUMP: Quel impact sur la politique étrangère des États-Unis ?

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About this ebook

« C’est facile de travailler avec moi. Vous savez pourquoi ? Je prends toutes les décisions. »

Donald Trump a beau fanfaronner, la crise du coronavirus a pourtant révélé les carences d’un système intoxiqué par un style présidentiel et un mode de gestion qui, depuis bientôt quatre ans, ont considérablement nui à la réputation des États-Unis et au leadership américain dans le monde.

La politique extérieure des États-Unis est pour la première fois « personnalisée » et soumise entièrement aux calculs d’un président motivé par sa popularité auprès de son électorat. La raison principale de l’échec de cette présidence, en ce qui a trait à la politique étrangère, tient à son imprévisibilité et à son improvisation chroniques. Certes, celles-ci ont été des facteurs récurrents de Truman à Obama, mais sous Trump, elles atteignent des sommets inégalés par l’abandon des normes et des valeurs établies, au point de provoquer des dérapages irréversibles pour l’avenir de la diplomatie américaine.

La Pax Americana fait place à la Pox Americana, un virus antiinternationaliste qui perturbe les fondements de l’ordre international avec le refus américain d’y contribuer par son leadership. Si Trump est réélu en novembre 2020, certaines des caractéristiques évoquées dans ce livre rendront irrémédiables les changements importants quant à la place et au rôle des États-Unis sur la scène internationale.
LanguageFrançais
Release dateDec 3, 2020
ISBN9782760642751
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    L' EFFET TRUMP - Charles-Philippe David

    Charles-Philippe David

    L’effet Trump

    Quel impact sur la politique étrangère

    des États-Unis ?

    Les Presses de l’Université de Montréal

    Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

    Titre: L’effet Trump: quel impact sur la politique étrangère des États-Unis? / Charles-Philippe David.

    Noms: David, Charles-Philippe, auteur.

    Description: Comprend des références bibliographiques.

    Identifiants: Canadiana (livre imprimé) 20200080814 Canadiana (livre numérique) 20200080822 ISBN 9782760642737 ISBN 9782760642744 (PDF) ISBN 9782760642751 (EPUB)

    Vedettes-matière: RVM: États-Unis—Relations extérieures—2017- RVM: États-Unis—Politique et gouvernement—2017-

    Classification: LCC E895.D38 2020 CDD 327.73009/05—dc23

    Mise en pages: Chantal Poisson

    Dépôt légal: 3e trimestre 2020

    Bibliothèque et Archives nationales du Québec

    © Les Presses de l’Université de Montréal, 2020

    www.pum.umontreal.ca

    Les Presses de l’Université de Montréal remercient de son soutien financier la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC).

    Avant-propos

    Il n’y a pas si longtemps, au début de la crise du coronavirus, mon jeune fils, voyant sur quel sujet je travaillais, m’a fait une remarque qui m’est restée en tête: «Papa, a-t-il dit, Trump est comme un extraterrestre qui vit dans un univers parallèle.» Alors que ce commentaire visait expressément l’attitude du président dans les premières semaines de la pandémie de 2020, je n’ai pu m’empêcher de penser qu’il s’appliquait à l’ensemble de sa contribution à la redéfinition de la politique américaine, notamment de la politique extérieure des États-Unis. Ainsi est née l’idée de ce livre portant sur Trump et sa politique étrangère depuis 2017. La crise pandémique m’a fait entrevoir que la planète ne faisait pas face au seul virus originaire de Wuhan, mais à un autre aussi émanant de Washington. Dans les deux cas, les solutions ne sont pas simples ni évidentes.

    Depuis 1990, année où j’ai commencé l’écriture du livre Au sein de la Maison-Blanche, je prends beaucoup de plaisir à analyser cet univers complexe qu’est le processus de prise de décision sous chaque président américain. Sous l’auvent d’une constitution résolument anti-autoritariste, pensée par des hommes voulant se libérer du joug de la monarchie anglaise, s’est développé un univers de poids et de contrepoids, les fameux checks and balances américains, au service desquels l’administration centrale à la Maison-Blanche, le secrétaire d’État et ses services, le Pentagone, le National Security Council (NSC), les services de renseignement, les législateurs du Congrès et du Sénat, tous les ministères, au total quelque deux millions et demi de fonctionnaires fédéraux, composaient une formidable machine à prendre des décisions, dans l’intérêt ultime des États-Unis d’Amérique. Pas toujours sans heurts. Avec des frictions internes passionnantes à observer. Des montées en puissance de l’influence d’un ministère au détriment d’un autre suivies de pertes de pouvoir parfois spectaculaires, liées souvent à la personnalité des leaders en place. Roosevelt, Kennedy, Reagan, Kissinger, Haig, Albright, McNamara, Rumsfeld, Cheney, Clinton, chacun a contribué à sa manière à façonner le système. Toujours au service des États-Unis d’Amérique. Puis Trump est arrivé. Ce livre explique comment son règne à la Maison-Blanche a transformé la politique étrangère américaine.

    Je souhaiterais remercier les personnes qui ont consacré du temps précieux, en confinement parfois et malgré la crise du coronavirus, pour apporter leurs conseils et leurs importantes suggestions et révisions au manuscrit. Merci notamment à Vincent Boucher, mon cochercheur depuis cinq ans qui, sans relâche, a répondu présent à chacune de mes sollicitations et relu avec minutie ce manuscrit. Mes remerciements également à Jordan Tama, professeur de science politique à l’American University à Washington, pour ses commentaires et ses recommandations qui ont contribué à améliorer ce livre. Merci à Julien Tourreille, mon «vice-président» avec qui j’enseigne la politique étrangère américaine à l’UQAM depuis plus de dix ans. Je remercie également mon ami Jean-Denis Roy pour ses suggestions et ses interventions tellement pertinentes, de même que ma complice Élisabeth Vallet pour nos discussions qui m’ont permis de pousser plus loin mes raisonnements. Merci à Frédérick Gagnon pour son amitié indéfectible et pour l’appui de la Chaire Raoul-Dandurand. J’exprime enfin toute ma gratitude à Patrick Poirier, Nadine Tremblay de même qu’à Marianne Champagne des Presses de l’Université de Montréal pour leurs encouragements et pour avoir offert à cet essai une vitrine numérique fort opportune. Pour qui s’intéresse grandement au phénomène Trump, ce livre est un premier jalon qui dévoile l’incroyable «univers parallèle» dans lequel est plongée la politique étrangère américaine depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche.

    Charles-Philippe David

    Montréal (en confinement)

    Le 1er juin 2020

    Introduction

    Peu de gens ont anticipé l’élection de Trump qui, tel un virus, a surpris le monde entier et laissé la planète largement tétanisée – sans moyen de défense – contre les idées et les méthodes jusqu’alors inconnues d’un chef d’État de pays démocratique à l’ego démesuré. Tous les acquis du mode de fonctionnement interétatique, l’ensemble des fondations de la vie politique, les usages et les attentes sont remis en cause par un chef de la Maison-Blanche résolu à dicter son programme et sa vision du rôle des États-Unis. Ainsi, l’intérêt national se confond avec l’intérêt personnel, les décisions d’un jour ne tiennent plus le lendemain, une chose et son contraire se disent sur un même enjeu. Bref, les méthodes d’analyse et les modèles traditionnels sont rudement mis à l’épreuve pour rendre compte du phénomène Trump. Ce n’est pas tant une «évolution» ni une «révolution» que celui-ci provoque, car au minimum l’une et l’autre ont une raison d’être et un plan, mais une «infection» au même titre que la crise virale que nous connaissons en cette dernière année de son mandat. En effet, l’étendue du «virus Trump» et les dommages qu’il cause sont importants et imprévisibles. Il affecte (et infecte) tous les aspects de la vie politique et en particulier la politique étrangère américaine, dans ses orientations comme dans la prise de décision qui la définit. Le résultat en est extrêmement néfaste, voire dangereux pour le rôle des États-Unis dans le monde. Il semble de plus très difficile, pour ne pas dire impossible, pour les conseillers qui entourent le président de préserver un semblant de normalité et de rationalité dans la conduite de la diplomatie américaine. Ni l’endiguement du «virus» ni la fuite ne semblent des options pour ces conseillers qui, las d’y résister, s’en éloignent ou en subissent les effets. Les alliés traditionnels comme le Canada craignent les volte-face du géant aux pieds d’argile. La crise du coronavirus a révélé toutes les carences d’un système décisionnel intoxiqué par un style présidentiel et un mode de gestion qui ont considérablement nui, depuis plus de trois ans, à la réputation des États-Unis et à l’exercice du leadership américain dans le monde.

    Nous offrons ici un premier bilan de la politique étrangère très personnalisée du président Trump. Ce bilan se fonde sur une observation et une lecture attentives de cette présidence, tant sur le plan doctrinal que sur le plan décisionnel. D’une manière volontaire, notre analyse insiste très amplement sur les sources et les comptes rendus disponibles, qui d’ailleurs se comptent par milliers de pages et que nous citons sans restriction, afin qu’il n’y ait aucun doute dans l’esprit de nos lecteurs que nos conclusions sont fondées sur des faits et des propos documentés – à l’heure où ceux-ci sont trop souvent contestés comme s’ils n’avaient jamais existé. Bref, ce livre se veut le produit d’une recherche universitaire, complète et rigoureuse, visant à informer le grand public des décisions que l’on doit qualifier d’inconséquentes de l’administration Trump dans le domaine des affaires étrangères. Pourquoi et comment cette «inconséquence» s’est-elle installée au sommet de l’État, et quels en sont les effets? Notre thèse est qu’elle reflète le choix qu’a fait Trump d’une vision particulière des relations internationales et d’une approche décisionnelle assez singulière – avec pour résultat que l’Amérique se retrouve seule, distanciée de ses partenaires, et qu’elle est devenue imprévisible. Rien de très rassurant pour l’avenir.

    Premier chapitre

    L’Amérique seule

    L’un des experts chevronnés de la politique extérieure des États-Unis, Stephen Sestanovich du Council on Foreign Relations, parlait déjà en mai 2017 de «l’incohérence brillante» de l’approche de Trump1. Selon lui, celle-ci décuple la tension qui existe depuis longtemps aux États-Unis entre la «volonté d’en faire plus» et la «volonté d’en faire moins», les Américains souhaitant à la fois se désengager de certaines missions (interventions militaires) et faire en sorte que les choses changent (politiques commerciales). La contribution «brillante» de Trump serait de vouloir concilier les deux et d’offrir ainsi un programme sans nul précédent. Le problème est que cette approche originale demeure quasi impossible à mettre en œuvre et engendre toutes sortes de contradictions, au demeurant exacerbées par une présidence imprévisible. La vision de Trump oscille entre l’audace (redéfinir les règles du jeu) et la prudence (fuir tout engagement qui contredit la doctrine de «l’Amérique d’abord»). D’où la difficulté pour les analystes de qualifier sa politique étrangère. Certes le trumpisme a changé le monde, mais personne ne s’entend sur la signification et la portée de ce changement. L’effet Trump est-il réversible ou permanent? A-t-il consacré, freiné ou accru le déclin de la puissance américaine tant prédit ou redouté? À notre avis, on se trouve face à une doctrine particulière qui à terme transformera le rôle traditionnel des États-Unis dans le monde, sa diplomatie et son approche sur plusieurs enjeux tels que la défense, le commerce, l’immigration, les rapports avec les grandes puissances et la gestion des crises régionales. Autrement dit, la doctrine Trump représente une idéologie foncièrement souverainiste, transactionnelle et antilibérale des relations internationales. Il semble ainsi que cette doctrine et ses effets placeront l’Amérique dans une situation unique depuis 1945: celle d’une superpuissance de plus en plus isolée dans le système international.

    La doctrine Trump

    L’ancien officier des communications du National Security Council (NSC) Michael Anton est en quelque sorte le créateur de la doctrine Trump: «comme le dit le magicien d’Oz, rien de mieux que la maison pour y privilégier ses intérêts et être en sécurité et prospère. C’est cela la doctrine Trump2.» En d’autres termes, «l’Amérique d’abord» est l’affirmation d’un nationalisme américain centré sur lui-même qui ne vise plus l’empire ou la mondialisation qui aurait prévalu depuis des décennies. Il n’est plus, selon Anton, dans l’intérêt des États-Unis «d’homogénéiser» le monde. La meilleure chose à faire est de «revenir à la normale». Cette expression nous ramène à la doctrine américaine de l’entre-deux-guerres. Rappelons tout de suite que celle-ci ne fut pas très salutaire pour la suite de l’histoire. Voici les éléments centraux de la doctrine Trump:

    L’Amérique d’abord. La doctrine Trump de «l’Amérique d’abord» n’est pas synonyme d’«isolationnisme». Elle signifie avant tout que «l’Amérique est de retour», plus forte que jamais parce qu’elle veille à ses intérêts. Quand Trump affirme qu’il est le président des États-Unis et non le président du monde (ni le policier de la planète), il révèle bien la portée des objectifs de son administration. Pas de considérations altruistes ici ni trace de l’idée d’un «empire bienveillant» qui avait animé les élites après la guerre froide3. Une Amérique forte signifie d’abord et avant tout une Amérique forteresse qui met l’accent sur le renforcement de ses armées et l’augmentation de son budget militaire4.

    Le doigt d’honneur. On retrouve ici une forme de realpolitik à l’extrême, un peu comme dans la formule «pas d’amis, pas d’ennemis». Jeffrey Goldberg cite un officiel de l’administration Trump qui compare la doctrine à «un doigt d’honneur5». Doigt d’honneur à l’ordre international libéral conçu par les prédécesseurs du président, aux alliances militaires américaines coûteuses, à l’économie mondiale injuste pour les travailleurs américains, et aux démocrates. Trump, démolisseur en chef? On peut le croire dans la mesure où sa vision se situe aux antipodes des présidents précédents, surtout Barack Obama dont il renie sciemment toutes les positions et les décisions, au point où l’on pourrait surnommer sa doctrine: «faire constamment tout le contraire d’Obama6».

    La loi de la jungle. Dans la vision de Trump, il n’y a pas de règles, de normes, de valeurs, ni d’institutions internationales qui contraignent les États, il n’y a que des compétiteurs qui comme des loups se disputent un butin – le lien avec la jungle réaliste n’en est ici que plus évident. La promotion de la démocratie n’est pas inscrite au programme, d’autant que Trump évoque une certaine sympathie pour les dictateurs et les hommes forts (Poutine, Erdogan, Kim Jong-un, Xi Jinping…).

    Le gain personnel. La doctrine Trump est celle de la volonté de gagner à tout prix en relations internationales, quitte à créer un «jeu à somme nulle» dans un monde divisé entre un gagnant et des perdants. La politique étrangère vise à défendre surtout l’intérêt personnel de Trump, et l’intérêt national quand celui-ci coïncide avec cet intérêt personnel7. «Trump a constamment fait passer ses intérêts politiques personnels avant l’intérêt national des États-Unis8», écrit un ancien officiel haut placé du gouvernement. Il n’y a pas d’intérêt international ou multilatéraliste possible dans cette vision réductionniste et unilatéraliste. «Trump pense qu’il est le pays9», fait remarquer le journaliste aguerri George Packer.

    Le gain électoral. La politique extérieure de Trump est devenue en quelque sorte «la continuation de la politique intérieure par d’autres moyens», pour paraphraser Clausewitz, au service des objectifs électoralistes du président. Ce président priorise en tout temps les perceptions de sa base électorale dans ses décisions de politique étrangère10, comme celles du déménagement de l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem, de la guerre commerciale avec la Chine, ou encore de l’abandon de l’accord nucléaire avec l’Iran.

    On peut dire de la doctrine Trump qu’elle est symbolique dans la mesure où, comme elle cherche à redorer le statut des États-Unis comme puissance «gagnante11», il est important, par exemple, que l’accord de libre-échange nord-américain porte un nouveau nom, symbole des gains d’un pays plus fort qu’avant. Trump cherche ainsi à renverser ce qu’il décrit comme les pertes de son pays sur la scène internationale et à regagner le respect des autres États. Cette doctrine est aussi transactionnelle12. Trump est prêt à prendre des risques pour obtenir des gains en politique étrangère, et à adopter des positions de négociation très dures pour atteindre ses objectifs. La doctrine Trump use en outre de la stratégie de l’imprévisibilité dans la conduite des affaires diplomatiques (ce qui exclut alors toute idée de continuité dans la politique extérieure13). Plusieurs ont reconnu dans cette stratégie celle du Madman chère à Nixon, qui donne à voir la «rationalité de l’irrationalité14». Là s’arrête toutefois la comparaison, puisque Trump ne l’a en réalité jamais mise en œuvre comme son prédécesseur. L’imprévisibilité se traduit surtout par des volte-face diplomatiques spectaculaires (en particulier face aux États à risque telles la Corée du Nord et

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