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Les Contes aux Heures Perdues
Les Contes aux Heures Perdues
Les Contes aux Heures Perdues
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Les Contes aux Heures Perdues

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Libre à vous de choisir des fac-similés de piètre qualité ; le présent ouvrage a été entièrement recomposé, revu, corrigé et annoté au besoin, l'orthographe modernisée, car déchiffrer et interpréter ralentit et gâche le plaisir de lire ; bref, tout a été fait pour rendre votre lecture plus accessible et agréable.
Le présent Recueil de bons mots, naïvetés, simplicités, reparties, équivoques, brocards, gasconnades et autres contes facétieux, peut paraître austère et didactique au prime abord. Il n'en est rien, une fois qu'on a rompu l'os pour sucer la substantifique moelle.
Au vrai, il s'agit d'anecdotes, souvent courtes, toutes plus amusantes les unes que les autres, où tout le monde en prend pour son grade, du haut en bas de l'échelle sociale, depuis le Roi jusqu'à l'humble paysan ou le laquais faisant preuve de simplicité. Presque tous les corps de métier y prennent place également, avec une dent particulièrement aiguisée envers les Médecins-Diafoirus et les Juges ignorants ; et une tendresse pour les Gascons et autres Normands - compatriotes de l'auteur - qu'il n'épargne pas cependant.
Cet ouvrage est la suite de mes autres publications du Pogge, d'Arlotto, de Des Périers; mais aussi des recueils de tradition orale du Hodja Nasr Eddin, qui semble y avoir puisé de la matière, à moins que ce ne soit l'inverse ?
LanguageFrançais
Release dateMar 25, 2022
ISBN9782322446018
Les Contes aux Heures Perdues
Author

Antoine Le Métel D'Ouville (Sieur)

Antoine le Métel serait né entre 1587 et 1590 à Rouen pour certains, à Caen pour d'autres ; décédé en 1656 à Paris, ou en 1657 au Mans. Il a vécu 7 ans en Espagne, et y a fréquenté la cour du Roi Philippe, mais on ne sait pas à quel titre. De retour en France en 1636, il est anobli, et devient sieur d'Ouville, en Normandie. Ingénieur, géographe et hydrographe, son frère, l'abbé de Boisrobert, le pistonne pour un poste d'Etat, qu'il occupe de 1643 à 1650. En parallèle, il poursuit une carrière littéraire, traduisant et adaptant des auteurs espagnols. Il a une dizaine de pièces de théâtre à son actif, en plus de ce recueil de contes, qui sera suivi par 3 autres. Il est considéré comme l'introducteur de la comédie espagnole en France.

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    Les Contes aux Heures Perdues - Antoine Le Métel D'Ouville (Sieur)

    Je crois que c’est Coluche qui la racontait, celle-là :

    Un gars prononce un discours, et dit : « La

    moitié des élus sont des filous ». Tollé général.

    Sommé de s’expliquer suite au scandale

    énorme, le gars remonte sur l’estrade et dit :

    « Je vous ai dit hier que la moitié des élus de

    ce pays sont des filous. Eh bien, je me suis

    trompé. Je m’en excuse, et rectifie aussitôt.

    Voilà : il fallait comprendre que la moitié des

    élus ne sont pas des filous. »

    Deux petits vieux, discutent sur un banc :

    « On ne t’a pas vu aux obsèques de Machin,

    hier ; t’étais malade ? – Non, mais je suis per

    suadé qu’il ne viendra pas aux miennes. »

    TABLE DES MATIÈRES

    Introduction

    Privilège du Roy

    Des Naïvetés

    Naïvetés étudiées

    Naïvetés mixtes

    Des Simplicités

    Équivoques

    Gasconnades

    Normands

    Des Brocards

    Des promptes Reparties

    Déjà parus

    INTRODUCTION

    1) Biographie de l’auteur

    Selon les données de la BNF, Antoine d’Ouville serait né vers 1590 et mort vers 1656. Pour Wikipedia, Antoine Le Métel d’Ouville, né vers 1589 à Caen et mort en 1656 à Paris, est un ingénieur, géographe, poète et dramaturge français.

    Antoine Le Métel, sieur d’Ouville, serait né en 1587 à Rouen, selon James Wilson Coke. Contrairement à certains historiens de la littérature qui affirment qu’il serait né en 1590 à Caen, James Wilson Coke pense que d’Ouville est né avant 1589. D’Ouville est le fils d’un procureur de la Cour des Aides de Rouen et il est le frère de François Le Métel, abbé de Boisrobert. On ne connaît pas grand-chose de sa vie avant la création de sa première pièce, Les Trahizons d’Arbiran, en 1637. On sait qu’il a beaucoup d’intérêt pour les langues étrangères, qu’il étudie depuis 1616, avec une préférence pour l’espagnol. Boisrobert dit de lui qu’il était : « l’homme de toute la France qui parlait le mieux Espagnol. »

    D’après Paul Ristelhuber (1834-1899), érudit strasbourgeois, journaliste et amateur de littérature, auteur de nombreuses publications, d’Ouville a vécu sept ans à la Cour d’Espagne, sans pouvoir dire à quel titre (il parle, d’ailleurs, dans son œuvre, de ce séjour à la Cour de Madrid). L’auteur le confirme d’ailleurs dans son conte numéroté 326. D’un bouffon Espagnol qui se moquait du pont de Madrid.

    Les renseignements que Boisrobert nous fournit sur son frère se réduisent à deux passages de ses Épîtres, 1654, 2 vol. in-8° ; il dit de lui, épître cinquième du troisième livre : « Le pauvre Douville est mon frère./ Il porte le titre d’Hydrographe,/ D’Ingénieur, de Géographe,/ Mais avec ces trois qualités,/ Il est gueux de tous les côtés./ Bref il n’a plus d’autre ressource/ Que celle qu’il trouve en ma bourse. »

    Il avait écrit ailleurs, parlant du même frère : « Melchisedech était un heureux homme/ Et son bonheur est l’objet de mes vœux,/ Car il n’avait ni frères ni neveux. »

    Suivant d’autres sources, ce dramaturge et homme de lettres avait épousé une Espagnole et passé six ans de sa vie en Espagne (selon Tallemant des Réaux, Boisrobert fit rompre le mariage). Il semblerait que ce séjour s’est étendu de 1615 à 1622. Ce long voyage permit à l’auteur d’approfondir sa connaissance de la langue et de la littérature espagnoles. Puis, il serait parti quatorze ans à Rome. Sa bonne connaissance de la langue et de la culture d’outre-Pyrénées l’incita à traduire, réécrire et à transposer pour le public parisien un bon nombre de comedias, comiques pour la plupart. Et c’est encore de la littérature ibérique que s’inspira le recueil des Nouvelles amoureuses, publié peu avant sa mort, en 1655.

    À son retour en France, en 1636, il est anobli, probablement grâce à l’influence de son frère qui lui obtient aussi une place d’ingénieur de l’État, de 1643 à 1650. Outre sa qualité d’ingénieur, d’Ouville est géographe et hydrographe. Il est ainsi employé pendant plus de quinze ans au service du gouvernement comme ingénieur et géographe du roi. Tallemant des Réaux raconte le démêlé de Boisrobert avec Monsieur de la Vrillière, secrétaire d’État, qui : « avoit osté de dessus l’estat des pensions un frère de Boisrobert, nommé d’Ouville, qui y estoit comme ingénieur. » Sur les instances de Boisrobert, Mazarin intercède en faveur de d’Ouville.

    Parallèlement, d’Ouville poursuit une carrière littéraire. Il a fait publier dix pièces de théâtre entre 1638 et 1650, dont huit sont des comédies : L’Esprit folet (1642), Les Fausses Véritez (1643), L’Absent chez soy (1643), La Dame suivante (1646), Jodelet astrologue (1646), Aymer sans sçavoir qui (1646), La Coiffeuse à la mode (1647), Les Soupçons sur les apparences (1650).

    Il s’inspire principalement de la comedia espagnole à travers Calderón, Lope de Vega, Montalvan. Dans une moindre mesure, il trouve son inspiration dans la comédie italienne pour Les Morts vivants (1646), tragi-comédie imitée des Morti vivi de Sforza d’Oddi, et, pour Aymer sans sçavoir qui, il s’inspire de l’Hortensio de Piccolomini. Sa première pièce, Les Trahizons d’Arbiran (1637), est une tragi-comédie.

    Au XVII e siècle, il est aussi connu pour ses contes. Sa grande connaissance de l’Espagnol lui permet de faire paraître la traduction de cinq novelas de Maria de Zayas y Sotomayor ainsi que des œuvres de don Alonso, en 1655. Ensuite, il serait parti avec son frère au Mans, où Boisrobert aurait confié d’Ouville au chanoine Pierre le Prince, neveu de d’Ouville. D’Ouville serait mort au Mans vers 1657, dans une grande pauvreté¹.

    D’Ouville est considéré comme l’introducteur de la comédie à l’espagnole en France. Il a fréquenté Thomas Corneille, a été présenté au cardinal de Richelieu (notamment).

    2) Sieur d’Ouville

    A) Ouville :

    Ouville est une commune française, située dans le département de la Manche, en région Normandie, peuplée de 443 habitants en 2019 (les Ouvillais). En 1793, la population s’élevait à 824 âmes, culmine à 992 en 1831, en perpétuel déclin depuis.

    La commune est située en pays coutançais, dans le Bocage normand. Son bourg est à 7 km à l’ouest de Cerisy-la-Salle, à 9,5 km au sud-est de Coutances, à 15 km au nord de Gavray et à 26 km au sud-ouest de Saint-Lô.

    B) Sieur :

    a) La seigneurie est une institution médiévale et moderne, occidentale, assurant l’encadrement économique et judiciaire des populations par un individu ou une personne morale n’exerçant pas nécessairement la souveraineté. La seigneurie est une réalité distincte du fief², qui est l’un des modes d’exercice de la seigneurie, avec l’alleu³.

    La seigneurie est un ensemble de terres, c’est-à-dire de propriétés foncières, de droits et de redevances. Elle est dans une certaine mesure, l’héritière de la villa de l’Antiquité tardive en même temps que la résultante de l’éparpillement du pouvoir public avant l’an 1000. La seigneurie est le cadre privilégié par lequel l’aristocratie médiévale assure sa prééminence sociale, économique et politique. La limitation des prérogatives seigneuriales est l’un des biais par lequel le pouvoir des États s’affirme à la fin de l’époque médiévale et durant l’époque moderne. Dans certains pays, comme le Royaume-Uni, des réalités ressortissant à la seigneurie subsistent encore.

    On estime entre 40 000 et 50 000 le nombre de seigneuries en France au XVIIIe siècle.

    Le possesseur d’une seigneurie porte le titre de « Seigneur » ; il peut être une personne, dans la très grande majorité des cas un ressortissant de la noblesse ou de la haute bourgeoisie, mais aussi une personne morale, le plus souvent une institution ecclésiastique telle une abbaye, un chapitre cathédral ou canonial ou un ordre militaire. Le pouvoir du seigneur s’exerce par divers intermédiaires, dont le plus important est le bailli⁴. Le souverain peut aussi être seigneur ; les seigneuries qu’il possède forment le domaine royal.

    Le titre de seigneur est aussi accordé, surtout à l’époque moderne, à des individus titulaires de fiefs nobles qui ne sont pas pour autant des seigneuries. Ces « seigneurs » sont parfois appelés sieurs, à ne pas confondre avec « sire », terme équivalent à celui de seigneur à l’époque médiévale. La personne dont relève un ensemble de censives peut porter le titre de seigneur censier ; celui qui possède le droit de haute-justice porte le titre de seigneur justicier. Le titre de seigneur de paroisse est parfois appliqué aux seigneurs ayant autorité, notamment comme patron, sur une église paroissiale.

    3) La présente édition

    Les « contes » repris ici, qui sont plutôt des facéties, anecdotes, et autres bons mots, sont tirés d’un ouvrage in-8° (l’équivalent du format A5 de l’époque, où le papier, comme nos vies, n’était pas normalisé). Sur les 580 pages initiales (572 dans la version Hachette Livre/BNF, disponible au prix de 27,70 €), grâce à quelques astuces, je suis arrivé à le faire tenir sur un peu moins de la moitié.

    L’écologie (utilisation de moins de papier, qui va de pair avec l’impression par l’éditeur à la commande, évitant de mobiliser et stocker inutilement cette ressource), mais aussi le souci de contenir le prix final dans des limites raisonnables – parce que la culture ne doit pas être une question de moyens –, ont été mes moteurs dans cette démarche.

    Bien évidemment, cela a été au prix de quelques – petits – sacrifices. Trois ou peut-être quatre contes ont été écartés, car à quelques mots près, ils en reprenaient un autre (ainsi, par exemple, de celui des Porchers ; ou de l’Écolier aspirant à une Cure). Ou alors, l’histoire était reprise et développée quelques pages plus loin. Ainsi, par exemple, D’un Notaire Normand (version courte éliminée), faisant double emploi avec D’un Notaire Normand doublement faussaire.

    De même, les contes ont été regroupés, afin d’éviter les répétitions de titre et épargner l’espace qu’ils occupaient, tels que : Du même, Autre, même sujet, etc. De ce fait, ils ne sont pas dans l’ordre strict initial. Mais ils y sont (quasiment) tous. Aucune sélection n’a été opérée, ni censure d’aucune sorte.

    Il s’agit en fait du 1er Tome d’une série de 4 :

    Les contes T1 : daté 1641, 1ère édition 26 mars 1643, 580 pages

    Les contes T2 : 1ère édition ?, 542 pages

    Les contes T3 : daté 1644, 400 pages

    Les contes T4 : daté 1644, 1ère édition 17 août 1644, 388 pages

    Autre souci auquel j’ai eu à faire face. En tant que traducteur/vulgarisateur, la seule correction typographique ne suffisait pas (les u représentant des v, et inversement, les j remplacés pas des i, des ß remplaçant des doubles s, à l’allemande, le simple étant souvent remplacé par une sorte de f, pas toujours évidente à distinguer). Outre l’orthographe ayant évolué, il y avait la formulation grammaticale des phrases ; j’ai essayé de rectifier tout cela, pour une forme plus contemporaine, bien plus facile à lire et à comprendre. Cela a nécessité parfois une réécriture partielle d’une phrase, par-ci, par-là.

    Mais il y a encore un dernier point. Le style de l’auteur est parfois lourd, sur une construction latine, avec des phrases à rallonge, genre Proust (avant l’heure, il est vrai). Par ailleurs, l’auteur n’hésite ni à se répéter souvent, ni à saupoudrer de conjonctions, comme « et ». De même que j’ai substitué par moments certains termes pour éviter les redites ; pour alléger donc, et aérer, je n’ai pas hésité à couper des phrases, ni à remplacer la litanie des « et » par d’autres coordinatrices, genre « mais, ou, or, ni », afin de relancer l’intérêt qui aurait tendance à fléchir sans cela, face à la monotonie. Ainsi qu’à couper des phrases qui duraient sur une page ; de façon à aérer. Sans vouloir par trop altérer le texte initial (que les puristes me pardonnent, mes ouvrages ne s’adressent pas aux puristes en premier, mais plutôt à des gens cherchant à se divertir utilement, en se plongeant dans les pépites du passé). Traduttore traditore, je vous dis…

    Je vous souhaite une bonne lecture, et de grands éclats de rire.

    Christophe Noël

    Bibliophile

    Quelques dates (rappel) :

    Le Métel d’Ouville (ca 1589-ca 1656)

    Le Pogge (1380-1459)

    Arlotto Mainardi (1395-1484)

    Bonaventure des Périers (ca 1510-ca 1543)

    LES CONTES AUX HEURES PERDUES

    DU SIEUR D’ OUVILLE,

    ou le

    RECUEIL D E TOUS

    les bons Mots, Reparties, Équivoques, Brocards,

    Simplicités, Naïvetés, Gasconnades

    et autres Contes facétieux, non encore imprimés

    À PARIS ; M. DC. XXXX. III

    Traduit en français moderne et annoté

    par Christophe Noël


    1 Eh oui ! la littérature nourrit rarement son homme.

    2 Le fief, appelé également tenure noble ou terre de noble tenure (car, contrairement à une simple tenure, elle exigeait un hommage au suzerain), désigne, durant les époques médiévale et moderne, un bien ou un revenu immobilier, le bénéfice, la terre, confié à l’origine en rétribution d’un service.

    Le fief consistait en général, durant l’époque féodale, en une tenure, une terre concédée à un vassal (le feudataire), à la charge de la foi et hommage et, éventuellement, de quelques autres devoirs envers son seigneur. Cette pratique s’est développée au Moyen Âge à la suite de l’éclatement de l’Empire carolingien, et a ensuite présidé à l’établissement d’une aristocratie foncière.

    Le mot, sans doute d’origine germanique ? (néerlandais vee, « bétail », meuble source de richesses), est apparu dans le Midi à la fin du IXᵉ siècle (fevum), avec peut-être une confusion avec le mot fiscum (qui désigne à l’époque carolingienne les grands domaines royaux), et une filiation avec beneficium, ce qui évoquerait l’origine « publique » du fief méridional (le beneficium désigne la concession d’une terre fiscale par un agent public en échange de services publics). Il s’étend ensuite aux autres formes de concessions vassaliques et se substitue au mot bénéfice.

    Le fief est opposé à l’alleu, qui ne relevait d’aucun seigneur, et au bien roturier qu’est la censive. Si le fief est constitué non d’une terre, mais des revenus de cette terre, le vassal, bénéficiaire du fief, est alors chasé sur une terre.

    Dans les premiers temps, seuls les nobles pouvaient posséder un fief. Puis cette possibilité fut offerte aux roturiers (et gens de mainmorte) moyennant un droit (le droit de franc-fief) lorsque le fief était féodalement proche du roi. Ce droit était payable tous les 20 ans (au XVIIIe siècle) et lors des successions (d’Ouville parle de Paulette).

    Saint Louis permit l’anoblissement des roturiers tenant fiefs à la tierce foi, c’est-à-dire au 3ᵉ hommage (concrètement, le petit-fils de l’acquéreur, sous réserve de non-dérogeance, était anobli).

    Ce mode d’anoblissement cessa au XVIᵉ siècle, et cette abrogation était mise sur le compte de l’ordonnance de Blois (1579), qui stipulait que « les roturiers et non nobles, achetant fiefs nobles, ne seront pour ce anoblis, ni mis au rang et degrés des nobles, de quelque revenu et valeur que soient les fiefs par eux acquis ».

    3 Un alleu ou franc-alleu est une terre dont le possesseur ne doit pas d’hommage ou de reconnaissance à un seigneur.

    Leurs possesseurs ne doivent payer ni redevance seigneuriale telle que le cens, ni les lods à chaque mutation, d’où l’expression de terres allodiales.

    4 Un bailli est, au sens général, le représentant d'une autorité sur un territoire. Plus particulièrement, les baillis et les sénéchaux étaient, en France, des officiers royaux exerçant par délégation les pouvoirs de justice et militaires sur une province du royaume.

    Privilège du Roy

    LOUIS, par la grâce de Dieu, Roy de France & de Navarre, À nos aimés & féaux Conseillers, les gens tenant notre Cour de Parlement, Maître des Requêtes Ordinaires de notre Hôtel, Baillis, Sénéchaux, Prévôts, leurs Lieutenants, & à tous autres de nos Justiciers & Officiers qu’il appartiendra, Salut.

    Notre cher & bien aimé TOUSSAINT QUINET, Marchand Libraire de notre bonne ville de Paris, Nous a fait remontrer qu’il désirerait faire imprimer un Livre, intitulé, Les Contes aux Heures perdues, de la composition du sieur d’Ouville, ce qu’il ne peut faire sans avoir sur ce nos Lettres humblement requérant icelles.

    À CES CAUSES, désirant favorablement traiter ledit exposant, Nous lui avons permis & permettons par ces présentes de faire imprimer, vendre, & débiter en tous lieux de notre obéissance ledit Livre, en telle marge, & tel caractère, & autant de fois que bon lui semblera, durant le temps & espace de sept ans entiers & accomplis, à compter du jour que ledit Livre sera achevé d’imprimer pour la première fois. Et faisons très-expresses défenses à toutes personnes de quelque qualité & condition quelles soient, de l’imprimer, ou faire imprimer, vendre ni débiter durant ledit temps en aucun lieu de notre obéissance, sans le consentement de l’exposant, sous prétexte d’augmentation, correction, changement de titre, fausses marques, ou autre en quelque sorte & manière que ce soit, à peine de trois mil livres d’amende payables sans déport, Nonobstant oppositions, ou appellations quelconques par chacun des contrevenants, applicable, un tiers à Nous, un tiers à l’Hôtel Dieu de notre bonne ville de Paris, l’autre tiers audit exposant, confiscation des exemplaires contrefaits, & de tous dépens, dommages & intérêts.

    À condition qu’il en sera mis deux exemplaires en notre Bibliothèque publique, & un en celle de notre très-cher & féal, le sieur Séguier, Chevalier, Chancelier de France, avant que de l’exposer en vente, à peine de nullité des présentes, du contenu desquelles, Nous vous mandons que vous fassiez jouir & user pleinement & paisiblement ledit exposant, & tous ceux qui auront droit de lui sans aucun empêchement.

    VOULONS aussi qu’en mettant au commencement ou à la fin dudit Livre un extrait des présentes, elles soient tenues pour dûment signifiées, & foi y soit ajoutée, & aux copies d’icelles collationnées par l’un de nos aimés & féaux Conseillers et Secrétaires, comme à l’original.

    MANDONS, Aussi au premier notre Huissier, ou Sergent, sur ce requis, de faire pour l’exécution des présentes, tous exploits nécessaires, sans demander autre permission. Car tel est notre plaisir : Nonobstant clameur de Haro Chartre Normande, & autres lettres à ce contraires. Donné à Paris le 20ème jour de Février, l’an de grâce 1641. Et de notre règne le trente-deuxième,

    Signé. Par le Roy en son Conseil. GUITONNEAU.

    Achevé d’imprimer pour la première fois le 26 Mars 1643

    Les Exemplaires ont été fournis.

    DES NAÏVETÉS

    Il y a trois sortes de Naïvetés, les unes sont simples, quand simplement on dit quelque chose de ridicule, sans avoir aucun dessein de faire rire celui, ou ceux à qui l’on parle, et celle-ci procède d’ignorance pure, dont toutefois les bien sensés, tirent de grands avantages de risée contre l’intention de celui qui les dit.

    Il y en a d’autres qu’on nomme Naïvetés étudiées, quoiqu’elles soient dites sur le champ, sans les avoir préméditées, comme lorsqu’on répond à quelque question par paroles, qui semblent naïves, mais où il y a pourtant de l’étude, avec un sens qui semble se gausser de celui qui l’en questionne, et celle-ci bien contraire à l’autre, procède de subtilité d’esprit.

    Or de celles-ci il y en a de deux sortes, les unes qui butent seulement à s’exercer l’esprit par une réponse aiguë, et les autres qui piquent celui à qui l’on parle, et celles-ci tiennent plutôt du brocard ou de la repartie que de la Naïveté.

    La troisième sorte de Naïveté est celle qui participe de la simple, et de l’étudiée, et celle-ci par les ignorants peut être prise simplement, et par les autres il peut y avoir vue pointe réservée, et le plus souvent contre l’intention même de celui qui la dit, celle-ci peut être dite par les savants, et par les doctes. La pointe consistant en l’explication qui le plus souvent est remarquée par les auditeurs, et ignorée par l’auteur, qui en ce cas ne mérite pas pour son regard d’être séparée des premières, c’est-à-dire des simples ou Naïves. De ces trois nous donnerons quelques exemples, où la différence paraîtra assez visible.

    1. Naïveté d’un homme condamné aux galères

    Un bas Normand fut un jour condamné aux galères pour quelque larcin qu’il avait fait. Comme on lui eut prononcé son Arrêt, il se prit à rire. Ceux qui étaient là présents lui dirent : « Mon ami, si tu savais ce que c’est d’aller aux galères, tu ne rirais pas comme tu fais. » Il ne s’en étonna point pour cela, et s’en attrista encore moins. Comme on le menait enchaîné avec les autres il se riait de ses compagnons, qui lui disaient qu’il n’aurait pas meilleur marché qu’eux, mais il leur répondit qu’il était bien assuré qu’il n’irait pas. Comme on l’interrogeait pourquoi et quelle prérogative il avait pour s’en exempter, il dit que sitôt qu’on aurait su quelque chose, on n’aurait garde de l’y mener ; et comme on le pressa pour savoir ce secret de lui, il dit : « Comment voudrait-on que j’y allasse, je suis si peureux sur l’eau que j’y mourrais d’appréhension. » N’était-ce pas une raison bien suffisante, pour en être exempt ?

    2. Naïveté d’un valet normand

    Un valet de Normandie extrêmement spirituel (comme vous le jugerez par la suite de ce discours) était avec son Maître à Paris, logé en chambre garnie. Au-dessus de sa chambre il y avait certaines Damoiselles logées, que son Maître voyait assez volontiers, parce qu’il y en avait une à qui il voulait beaucoup de bien. Entendant un bruit au-dessus de sa chambre, et désireux d’aller voir ces Demoiselles, il craignait qu’il n’y eût quelque compagnie avec elles, où il n’eût pas eu assez de familiarité ; et appelle ce valet, lui disant : « Monte là-haut, fais semblant de rien, et viens me dire qui y est. » Ce laquais sort, et rentrant tout aussitôt, lui dit : « Monsieur, je ne sais pas comme il faut faire semblant de rien. » Le Maître étonné de cette naïveté, lui dit : « Monte là-haut, regarde qui y est, tu connais bien ceux qui y hantent, ne dis mot à personne, remarque-les et viens me le dire. » Il sort là-dessus, monte, se plante au milieu de la chambre, regarde tout le monde au visage, et comme ces Damoiselles lui demandèrent : « Que fais-tu là ? » il répondit : « Je fais semblant de rien. » Voyez si ce n’était pas avoir bien retenu l’instruction de son Maître.

    Naïvetés d’un laquais en pays étranger

    3. Un laquais qui n’était jamais sorti de Paris, y trouva un Maître, qui le prit pour le mener à Rome. Comme il eut passé les monts, et arrivé à Turin, son Maître qui était à la suite de Monsieur l’Ambassadeur (qui fut défrayé lui et son train aux dépens de son Altesse de Savoie), l’envoya avec un billet pour faire apprêter sa chambre dans la ville, car son Altesse logeait l’Ambassadeur chez lui, et ses Gentilshommes chez les plus apparents bourgeois de Turin. Ce laquais s’étant fait montrer la maison, entre dedans et voulant parler à ses hôtes, il fut tout étonné qu’il ne les entendait point, ni eux lui ; donc tout étonné il vint trouver son Maître, lui disant : « Monsieur, que voici un sot pays, on n’y parle pas comme à Paris ! je leur ai demandé de l’eau, et des gens qui ont de la barbe au menton, ne m’entendaient pas ; or à Paris des enfants de trois ans m’entendent bien. Il s’est trouvé là un homme qui entend bien leur jargon, qui m’a dit qu’ils n’ont garde de m’entendre, et qu’il faut ici demander de l’aigue. De l’aigue ? Dieux quelles sottes gens ! ne vaut-il pas bien mieux demander de l’eau, tout le monde entend bien cela ! Ce n’est pas encore le tout, Monsieur ; on ne compte pas ici les heures comme à Paris (car en Italie on commence à compter le jour par le coucher du Soleil) ; ils m’ont demandé à quelle heure vous viendriez vous coucher, je leur ai dit que vous viendriez à dix ou onze heures, ils disent que c’est demain au matin ; vit-on jamais au monde plus sottes gens ? »

    4. Le même laquais étant arrivé à Florence avec son Maître, il fut au Dôme avec lui pour ouïr Messe, mais trouvant la Messe plus qu’à demi dite, il désirait savoir si on n’en dirait pas encore une autre. Ce laquais va demander à celui qui avait aidé à dire la Messe, si c’était la dernière, si on n’en recommencerait point bientôt une autre. Ce garçon qui n’entendait pas son patois, lui dit en italien qu’il n’entendait pas ce qu’il disait ; son Maître oyant cela, dit à son laquais, que c’était un brutal de lui parler en français, vu que depuis le temps qu’il était en Italie, il voyait bien qu’on y parlait une autre langue que la sienne, et qu’il n’avait garde de lui répondre. Le laquais haussant la tête, dit à son Maître, que ce n’était que pure méchanceté qui le tenait, et qu’il répondrait bien s’il voulait, parce que quand le Prêtre disait Dominus vobiscum, il avait bien ouï que l’autre avait répondu et cum spiritu tuo.

    5. Le même laquais étant arrivé à Rome, demandait à son Maître si la Seine de Rome était aussi grande que celle de Paris, où était le Louvre, la place Maubert et les Tuileries, croyant que tout cela devait être à Rome comme à Paris.

    6. Naïveté d’un laquais qui voulait envoyer des lettres à sa mère

    Ce même laquais étant à Rome avec le même Maître ci-dessus, son Maître eut dessein d’aller à la garde-robe⁵ ; il commande

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