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Équité en emploi - Équité salariale, 3e édition
Équité en emploi - Équité salariale, 3e édition
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Équité en emploi - Équité salariale, 3e édition

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About this ebook

Cet ouvrage aborde à la fois les notions d’équité en emploi et d’équité salariale dans les régimes juridiques applicables aux entreprises de compétence québécoise et canadienne, tant universels que particuliers.

Dans cette 3e édition, on retrouve des descriptions statistiques mises à jour qui montrent l’état de la situation sur le plan de l’équité en emploi et salariale, les dispositions des lois appropriées et les droits et obligations qu’elles énoncent ainsi que les recours des personnes qui considèrent subir de la discrimination. On y aborde les dispositions de la nouvelle Loi sur l’équité salariale du Canada, en vigueur depuis le 31 août 2021, ainsi que les nouvelles dispositions de la Loi sur l’équité salariale du Québec concernant le maintien de l’équité salariale, mises à jour en 2019. On y met en contexte l’intervention de l’État en matière d’équité : pourquoi, où et comment intervient-il ? Quand faut-il poser un geste ou quand peut-on le faire ? Comment et auprès de quelles instances ?

L’ouvrage aborde tant les décisions que doivent prendre les gestionnaires que les travailleuses et les travailleurs engagés dans le processus et les syndicats qui les représentent. Il traite enfin des difficultés qui se présentent à elles ou à eux et des critiques adressées aux deux régimes en vigueur. Que vous ayez l’intention d’implanter un programme d’accès à l’égalité, d’équité en emploi ou d’équité salariale, que votre organisation soit de compétence canadienne ou québécoise, cet ouvrage vous permettra de disposer d’un guide pratique vous expliquant les différentes étapes qui y mènent.
LanguageFrançais
Release dateJun 15, 2022
ISBN9782760557062
Équité en emploi - Équité salariale, 3e édition

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    Équité en emploi - Équité salariale, 3e édition - Marie-Josée Legault

    1. PRÉSENTATION

    Si vous gérez des ressources humaines, si vous conseillez des travailleuses et des travailleurs syndiqués, si vous concevez ou vous appliquez des politiques gouvernementales, vous devez sûrement composer avec les notions d’équité en emploi, d’équité salariale et de discrimination. En effet, les chartes des droits de la personne et les lois qui énoncent ces droits sont des lois qu’on dit constitutionnelles ou quasi constitutionnelles, c’est-à-dire qu’elles s’appliquent de façon prépondérante à toute autre loi.

    L’ouvrage aborde à la fois les notions d’équité en emploi (quatre chapitres) et d’équité salariale (neuf chapitres). On y apprend à distinguer, parmi l’ensemble des employeurs, ceux qui sont de compétence canadienne et québécoise; la distinction est importante, car ils sont régis par deux régimes juridiques différents: les régimes applicables aux entreprises de compétence québécoise (qu’on désigne ici comme le régime québécois) et ceux qui sont applicables aux entreprises de compétence canadienne (qu’on désigne ici comme le régime canadien).

    Parmi chacun de ces régimes, il faut encore distinguer un régime général applicable à tout le monde et des régimes particuliers qui s’appliquent à certains employeurs et à certains travailleurs, mais pas à tous.

    On trouve encore dans l’ouvrage des descriptions statistiques qui montrent l’état de la situation sur le plan de l’équité en emploi et de l’équité salariale, les lois appropriées et les droits et les obligations qu’elles énoncent, les démarches à faire pour se conformer à ces lois et les recours des personnes qui considèrent subir de la discrimination. On y met en contexte l’intervention de l’État en matière d’équité: pourquoi, où et comment intervient-il? Quand faut-il poser un geste ou quand peut-on le faire? Comment et auprès de quelles instances?

    L’ouvrage aborde tant les décisions que doivent prendre les gestionnaires que les travailleuses et les travailleurs engagés dans le processus, les difficultés qui se présentent à elles ou à eux, les critiques adressées aux deux régimes en vigueur. Que vous ayez l’intention d’implanter un programme d’accès à l’égalité, un programme d’équité en emploi ou un programme d’équité salariale, que votre organisation soit de compétence canadienne ou québécoise, cet ouvrage vous permettra de disposer d’un guide pratique vous expliquant les différentes étapes qui y mènent.

    2. LE PLAN DE L’OUVRAGE

    En introduction de cet ouvrage, il importe de distinguer l’équité et l’égalité, l’égalité des droits et des faits, l’égalité des chances et des résultats, car ces notions sont essentielles à la compréhension de l’évolution des politiques gouvernementales en matière d’équité. Je les aborde plus loin.

    Un ouvrage sur l’équité en emploi et l’équité salariale ne saurait faire l’économie de démontrer que l’iniquité existe en ces matières, au moyen de statistiques agrégées plutôt que d’une façon anecdotique. Dans cet ouvrage, deux chapitres y sont consacrés: le chapitre 1 fournit un exposé de l’iniquité en emploi et le chapitre 5 fait de même en matière d’iniquité salariale. Dans les deux cas, ces exposés introduisent les deux sections de l’ouvrage, une première sur l’équité en emploi, une seconde sur l’équité salariale. Dans les deux cas, ils visent à établir que l’iniquité existe, qu’elle a des proportions sociales et n’est pas le fruit de quelques errements isolés. C’est en effet là la justification de l’intervention de l’État dans la rémunération des salariés. Les groupes cibles dont traite cet ouvrage sont ceux qui sont visés par les régimes québécois et canadien d’équité en emploi, soit les femmes, les personnes handicapées, les minorités visibles ou culturelles et les Autochtones.

    Le chapitre 2, essentiellement descriptif, expose certaines notions essentielles en matière d’équité: le partage des compétences dans la Confédération canadienne et les organisations de compétence fédérale et provinciale, la différence entre l’approche incitative, réparatrice et proactive en matière d’équité. Ce chapitre et le suivant exposent le régime juridique québécois en matière d’équité. Par régime juridique, on entend l’ensemble des lois, des règlements et des politiques qui s’appliquent à un employeur, établissent ses droits et ses obligations, ainsi que les recours qu’ont les employés de ces organisations. Le chapitre 2 distingue le régime général québécois, d’approche incitative et réparatrice, et le régime proactif québécois des programmes d’accès à l’égalité obligatoires dans le secteur public et parapublic et chez les entreprises privées qui fournissent des services au gouvernement du Québec. Il présente aussi l’évolution de l’intervention législative en cette matière et son fondement, les droits et les obligations des travailleurs et des employeurs en cette matière pour les organisations de compétence québécoise assujetties au régime général.

    Le chapitre 3 distingue les obligations du cadre général, qui s’appliquent à tous les citoyens et à tous les employeurs, et le fait de mettre en place un programme d’accès à l’égalité (PAÉ), qui est rarement obligatoire. En effet, l’approche québécoise en matière de programmes d’accès à l’égalité est avant tout incitative, à la différence de l’approche canadienne qui est plus proactive. Le chapitre 3 présente les différents scénarios d’implantation de tels programmes dans le régime québécois d’équité en emploi.

    Le chapitre 4, aussi descriptif, expose le régime juridique canadien en matière d’équité. Il présente l’évolution de l’intervention législative en matière d’équité et son fondement, de même que les droits, les obligations et les recours des travailleurs et des employeurs en cette matière pour les organisations de compétence canadienne. Le texte expose d’abord le régime général du droit à l’égalité, puis son application qui distingue un régime général de plaintes chez les employeurs du secteur privé de moins de 100 salariés et un régime proactif des programmes d’équité en emploi obligatoires chez les employeurs privés de plus de 100 salariés. Il importe de bien comprendre qu’il y a deux régimes au sein du régime canadien, car les droits et les obligations sont très différents dans l’un et l’autre:

    ▪ le régime général canadien d’approche incitative et réparatrice fondé sur les plaintes ressemble à plusieurs points de vue au régime québécois;

    ▪ cependant, le régime proactif canadien a une portée plus grande que le régime québécois, qui n’impose la démarche des programmes d’accès à l’égalité qu’aux employeurs des secteurs public et parapublic, et aux fournisseurs de l’État par l’obligation contractuelle.

    Le chapitre 6 expose les droits et les obligations des travailleurs et des employeurs en matière d’équité salariale pour les entreprises de compétence québécoise. Il présente aussi l’évolution de l’intervention législative en cette matière et son fondement. Il distingue deux régimes applicables très différents dans leur mode d’opération:

    ▪ un régime de plaintes individuelles accessible à tout citoyen et à toute citoyenne qui s’estiment discriminés en vertu de l’un des motifs interdits de discrimination selon la Charte québécoise;

    ▪ un régime dit proactif, par lequel la Loi sur l’équité salariale (LÉS) impose d’emblée des obligations à tous les employeurs de compétence québécoise de 10 employés et plus, seulement en matière d’équité salariale envers les femmes et seulement à certaines conditions.

    Le chapitre 7 aborde les infractions prévues dans la Loi sur l’équité salariale (LÉS), les recours que peuvent exercer les parties, les conditions à respecter pour ce faire, la démarche à suivre pour exercer un recours et les conséquences qui découlent de ces recours. Il aborde aussi brièvement les recours qu’ont les travailleurs qui ne sont pas protégés par la LÉS: les travailleuses chez les employeurs de 10 salariés et moins qui sont victimes de discrimination envers une catégorie d’emplois à prédominance féminine, les travailleuses qui ont un salaire inéquitable pour le même travail qu’un collègue masculin sans que leur catégorie d’emplois soit à prédominance féminine, et les travailleuses et les travailleurs discriminés en vertu d’autres motifs que le sexe.

    Le chapitre 8 expose les étapes du démarrage de la démarche d’équité salariale en vertu de la Loi sur l’équité salariale (LÉS), pour les employeurs de compétence québécoise. Il présente la façon dont l’équipe responsable du PÉS attaque les deux premières étapes du programme d’équité salariale, c’est-à-dire comment elle établit les catégories d’emplois au sein de son organisation et combien de ces catégories ne sont pas mixtes, mais à prédominance féminine ou masculine et comment elle choisit un mode d’évaluation pour ces catégories visées par la LÉS. Le chapitre 8 présente aussi la façon de gérer un programme d’équité salariale dans lequel la participation de la haute direction, l’information du personnel et sa participation sont importantes et essentielles, car elles influent sur l’atteinte de l’objectif d’équité salariale.

    Le chapitre 9 aborde la troisième étape du programme d’équité salariale. Au moment où entre en scène la Loi sur l’équité salariale (LÉS), certaines organisations, notamment les grandes organisations et les organisations syndiquées, ont déjà implanté depuis longtemps un système d’évaluation des emplois par points et facteurs pour rationaliser les pratiques de rémunération, mais sans préoccupation particulière pour l’équité salariale. En revanche, dans les plus petites organisations et en milieu non syndiqué, il arrive que les pratiques de rémunération ne soient pas fondées sur un système d’évaluation des emplois ou qu’il n’y ait qu’un système de rangement minimal, établi surtout en fonction de l’équité externe.

    Si l’organisation a déjà un système d’évaluation des emplois, en vertu de la loi, l’équipe responsable du programme d’équité salariale (PÉS) doit alors reprendre l’évaluation de certains des emplois:

    ▪ ceux des catégories d’emplois à prédominance féminine;

    ▪ ceux des catégories d’emplois à prédominance masculine qui servent de comparateurs.

    La LÉS demande d’évaluer les emplois des catégories comparées avec le souci d’éviter les préjugés sexistes. Dans ce chapitre, on explique comment s’assurer d’y parvenir et comment procéder à cette démarche en favorisant l’équité entre les hommes et les femmes, en éliminant le plus possible les préjugés sexistes.

    Le chapitre 10 aborde la quatrième étape du programme d’équité salariale, celle qu’attendent impatiemment les uns et les autres: il faut mesurer les écarts de rémunération qui séparent les emplois équivalents, c’est-à-dire les emplois de valeur comparable. Cela détermine en effet les ajustements salariaux à verser; il faut aussi établir les modalités de versement de ces ajustements. Comparer la rémunération des catégories d’emplois à prédominance féminine (nouvellement évalués sans préjugés sexistes) avec celle des catégories à prédominance masculine de même niveau d’évaluation sert à estimer les écarts salariaux à combler entre la rémunération actuelle des emplois des catégories féminines et celle des emplois des catégories masculines de même niveau. Il faut à cette étape calculer les ajustements salariaux nécessaires pour corriger les écarts salariaux.

    Le chapitre 11 expose le régime juridique canadien d’équité salariale. Dans les entreprises de compétence canadienne, l’évolution récente de l’intervention législative en cette matière instaure deux régimes différents, comme dans le régime québécois d’équité salariale qui vous est exposé au chapitre 6:

    ▪ un régime de plaintes individuelles accessible à tout citoyen et à toute citoyenne qui s’estiment victimes de disparité salariale en vertu de l’un des motifs interdits de discrimination selon la Loi canadienne sur les droits de la personne autres que le genre;

    ▪ un régime dit proactif, par lequel la Loi sur l’équité salariale (LÉS) entrée en vigueur en août 2021 impose d’emblée des obligations à tous les employeurs de 10 employés et plus, seulement en matière d’équité salariale envers les femmes et seulement à certaines conditions.

    Le chapitre 11 expose le contexte historique, le cadre juridique et les lois en vigueur, les deux régimes et les instances chargées de leur application.

    Le chapitre 12 expose les recours et la démarche de règlement en vertu des deux régimes juridiques canadiens d’équité salariale. Le texte explique les recours disponibles, la procédure d’évaluation, les critères d’admissibilité, la procédure d’enquête de la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP), le scénario d’un règlement à l’amiable et le traitement d’une plainte déférée au Tribunal canadien des droits de la personne, dans les deux cas.

    Le chapitre 13 présente le maintien de l’équité salariale dans le régime québécois à long terme, mais la lectrice ou le lecteur y trouve une procédure tout aussi utile au maintien de l’équité salariale dans le régime canadien, car les principes fondamentaux sont les mêmes.

    Enfin, je dresse en conclusion un bilan de l’application de la Loi sur l’équité salariale (LÉS) du Québec depuis son entrée en vigueur.

    3. LA DIFFÉRENCE ENTRE LES NOTIONS D’ÉGALITÉ ET D’ÉQUITÉ

    La préoccupation pour l’égalité de tous les citoyens entre eux a émergé en Occident après la Seconde Guerre mondiale et s’est manifestée dans une première génération de chartes et de lois qui promeuvent les droits fondamentaux de la personne présentée au chapitre 2 dans le cas du régime québécois et au chapitre 4 dans le cas du régime canadien. En vertu du droit libéral, qui s’applique notamment en Amérique du Nord et fonde la citoyenneté démocratique, tous les citoyens détiennent les mêmes droits formels (civils, politiques et sociaux), et chaque individu jouit, par exemple, d’une voix d’égale portée dans le processus électif.

    Dans la pratique, il s’agit d’une égalité de droits et de traitement qu’on obtient lorsqu’on cherche à traiter tous les individus selon les mêmes politiques, les mêmes règles, et à adopter des pratiques et des décisions neutres, qui ne subissent pas l’influence de stéréotypes ou de préjugés concernant les groupes raciaux, sexuels, ethniques, etc. Cela ne signifie pas que les décisions, les privilèges et les sanctions seront les mêmes pour tous; cela signifie plutôt, par exemple, que les décisions seront prises selon les mêmes règles et les mêmes critères pour tous, que les politiques et les règlements s’appliquent de la même façon pour tous.

    Le caractère démocratique des décisions s’appuie, dans ce contexte, sur le respect des vœux de la majorité, considérée comme l’agrégation de vœux d’individus égaux en droits. Les citoyens ainsi définis sont la base de la démocratie politique telle qu’on la connaît depuis le XVIIIe siècle.

    Puis, devant des résultats plutôt faibles quant à l’amélioration de l’égalité de faits ou de résultats, des groupes ont fait campagne pour une deuxième génération de mesures dans les chartes et les lois qui promeuvent les droits de la personne, exposée au chapitre 3 dans le cas du régime québécois et au chapitre 4 dans le cas du régime canadien. L’observation des statistiques agrégées permet en effet de constater les limites de l’égalité de droits. Dans ces régimes, les personnes discriminées ont la responsabilité de déposer des plaintes en cas d’infraction, mais dans les faits, bien des obstacles s’opposent à un tel geste. J’y reviens lorsque j’expose dans cet ouvrage les régimes juridiques qui se succèdent en matière d’équité en emploi et d’équité salariale. Les chartes et les lois qui promeuvent les droits de la personne incorporent dorénavant un raisonnement et favorisent une démarche fondée sur l’équité envers des groupes cibles ou désignés, différente de la notion juridique d’égalité formelle. Selon un raisonnement fondé sur l’équité, le législateur reconnaît qu’il faut parfois:

    ▪ traiter différemment les membres de certains groupes pour augmenter leur représent ation, privilégier temporairement un groupe discriminé, jusqu’au rétablissement d’une situation d’égalité des résultats;

    ▪ suspendre temporairement l’ordre d’attribution de certains objets convoités, s’il est démontré qu’il produit des effets de discrimination systémique.

    En d’autres termes, pour obtenir l’égalité des résultats, le principe de l’équité prévoit qu’il faut parfois tenir compte de l’inégalité des positions de départ et traiter différemment les individus de différents groupes pour leur donner d’égales chances de parvenir à la ligne d’arrivée.

    Le principe de l’équité est promu devant le constat des limites de la simple égalité de droits. Il invite l’État à mettre en place des mesures qui déplacent la responsabilité et l’initiative des personnes discriminées vers l’État et les employeurs.

    4. LA DIFFÉRENCE ENTRE LES NOTIONS D’ÉQUITÉ EN EMPLOI ET D’ÉQUITÉ SALARIALE

    L’égalité en emploi signifie que chaque personne, sans distinction, doit avoir à la fois le pouvoir de choisir le travail qu’elle souhaite occuper et le droit d’obtenir un traitement juste et impartial en toute matière touchant la gestion des ressources humaines: le recrutement, la sélection, la dotation, l’établissement des conditions de travail en général, les exigences d’emploi (exigences du poste, critères d’embauche), l’évaluation des emplois, l’évaluation du rendement, la formation et le perfectionnement, l’application des politiques et des règlements. La pratique de l’égalité en emploi exige la neutralité des processus décisionnels pour ce qui a trait au sexe, à la race, à la religion, à l’origine ethnique, à l’orientation sexuelle, à tout autre motif d’inégalité reconnu dans le milieu ou tout autre motif de discrimination interdit par les chartes.

    Mais l’équité en emploi va plus loin en ajoutant à cette neutralité des processus décisionnels, la mise en place de mesures proactives qui permettent d’accorder temporairement un avantage, au moment de la sélection, aux membres des groupes cibles, afin d’accélérer l’amélioration de leur représentation sur le marché de l’emploi et d’obtenir des résultats statistiques concrets.

    Les programmes qui visent l’équité en emploi sont désignés au Québec comme programmes d’accès à l’égalité (PAÉ), tandis que les programmes d’équité en emploi (PÉE) désignent ceux qu’on établit en fonction des exigences du gouvernement du Canada.

    De la même façon, on peut dire que l’égalité salariale renvoie à l’établissement et au maintien d’une hiérarchie des salaires fondée sur des normes uniformes pour tous et interprétées de la même façon pour tous, qui résulte en principe en salaires équivalents pour des tâches équivalentes. La pratique de l’égalité salariale exige la neutralité des processus décisionnels pour ce qui a trait au sexe, à la race, à la religion, à l’origine ethnique, à l’orientation sexuelle, à tout autre motif d’inégalité reconnu dans le milieu ou tout autre motif de discrimination interdit par les chartes. Les chartes et les lois en matière de droits de la personne imposent à tous les employeurs d’agir conformément à ce principe, mais l’étude des statistiques agrégées permet d’observer que, dans les faits, nous n’avons pas atteint l’égalité salariale de faits (nous y reviendrons au chapitre 5).

    Pour y arriver, la Loi sur l’équité salariale du Québec et celle du Canada ajoutent à l’obligation d’égalité de traitement des mesures proactives d’analyse et de réévaluation des emplois et des salaires, pour contrer les préjugés qui peuvent intervenir en amont de l’établissement des salaires. En pratique, pour atteindre la situation de «salaire égal pour un travail d’égale valeur», on se fondera sur un système d’évaluation des emplois conçu sans parti pris, sexiste ou autre. L’évaluation des emplois est un processus apparemment neutre, mais qui peut subir l’influence de stéréotypes et de préjugés qui créent une pression à la baisse des salaires pour les membres des groupes cibles. Nous y reviendrons au chapitre 2, pour expliquer les différentes formes de discrimination. Les programmes qui visent l’équité salariale sont désignés comme des programmes d’équité salariale au Québec et des plans d’équité salariale au Canada (PÉS).

    Une action gouvernementale proactive d’équité salariale consiste à imposer à tous les employeurs de refaire l’exercice d’évaluation des emplois dans un mode neutre et exempt de préjugé discriminatoire, d’établir et de maintenir une nouvelle structure d’emplois et de salaires en conséquence. L’État va ainsi plus loin que de garantir formellement des droits et de permettre de déposer des plaintes en cas d’infraction.

    J’ai pris soin de distinguer les deux notions à des fins d’analyse, opération dans laquelle les nuances sont plus importantes que le portrait d’ensemble. Néanmoins, ces deux notions sont intimement apparentées, et on ne saurait travailler à l’un de ces objets sans travailler à l’autre.

    Ce chapitre introductif présente les manifestations d’iniquité à l’endroit des membres des groupes cibles sur le marché de l’emploi, à l’aide de statistiques agrégées qui comparent leur situation à celle de la population générale.

    Le marché de l’emploi met en scène de grandes quantités d’organisations qui composent la demande de main-d’œuvre (les employeurs), de nombreuses personnes qui constituent l’offre de main-d’œuvre (les travailleurs), et plusieurs organisations qui tentent de soutenir l’appariement de l’offre et de la demande sur le marché de l’emploi.

    Pour étudier ces grandes quantités, il faut se donner des outils; les concepts statistiques permettent d’organiser ces données et de les regrouper en catégories pour les rendre intelligibles. Lorsqu’on analyse le marché de l’emploi avec ces concepts, on constitue de grands agrégats permettant de dégager des tendances qu’on peut ensuite comparer, soit à travers le temps, soit à travers l’espace, au même moment. Certaines de ces tendances concernent l’inégalité d’accès au marché de l’emploi selon les caractéristiques des personnes et certains facteurs connus qui influent sur cet accès.

    Les groupes cibles dont il sera question dans ce chapitre sont les groupes visés par les régimes québécois et canadien d’équité en emploi, soit: les femmes, les personnes handicapées, les minorités visibles ou culturelles et la population autochtone.

    Je présente un portrait comparatif de l’intégration des membres des groupes cibles au marché de l’emploi, c’est-à-dire de leur participation à la population active et de leur distribution dans l’emploi, lorsque l’information est disponible. En d’autres termes, dans quelle mesure les membres des groupes cibles, collectivement, participent-ils au marché de l’emploi et quel type d’emploi occupent-ils¹?

    Ce texte demande un certain effort parce qu’il y a beaucoup d’informations précises et chiffrées, de surcroît comparées les unes aux autres. Souvenez-vous qu’il n’est pas question de les retenir toutes, mais bien de comprendre leur signification. À la fin de votre lecture, dressez un portrait spontané de ce que vous avez retenu, en vous aidant des intertitres; demandez-vous ce que vous avez retenu pour chacune des sections. Demandez-vous si ce que vous apprenez est conforme à ce que vous croyiez auparavant. Si vous conservez un souvenir juste de la direction des tendances (à la hausse ou à la baisse, pour quelles catégories, etc.), vous êtes dans la bonne voie. Vous pourrez toujours revenir aux chiffres précis, en vous appuyant sur le recueil de textes, pour étayer une argumentation en particulier.

    Je ne traite pas ici des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes sur le marché de l’emploi, ni de ces écarts pour les membres des groupes cibles autres que les femmes, car le chapitre 5 en traite de façon détaillée.

    1. LES STATISTIQUES DISPONIBLES

    Les statistiques concernant les groupes immigrés, les personnes handicapées et la population autochtone sont beaucoup moins nombreuses que celles concernant les femmes nées ici, qui se sont organisées depuis plus longtemps. Tant au Canada et au Québec qu’ailleurs dans le monde, ce sont d’abord les femmes qui ont revendiqué l’implantation des programmes d’accès à l’égalité (Lamarche, 1990, p. 18). La plus grande importance accordée ici aux statistiques sur les femmes, comparativement aux autres groupes, résulte de cet état de fait.

    2. POURQUOI CERTAINS GROUPES PARTICIPENT-ILS PLUS OU MOINS AU MARCHÉ DE L’EMPLOI?

    Plusieurs facteurs contribuent à expliquer la participation au marché de l’emploi et le type d’emploi occupé: l’âge, les autres responsabilités ou projets, la scolarité et les qualifications professionnelles sont, par exemple, des facteurs importants. En d’autres termes, la décision individuelle d’occuper un emploi rémunéré ou non, de rechercher un emploi à temps partiel ou à temps complet, de choisir un domaine de formation et un secteur d’emploi plutôt qu’un autre dépend de plusieurs facteurs.

    L’âge peut influer de plusieurs façons; il est lié aux autres responsabilités ou aux projets: étudier, avoir de jeunes enfants, s’occuper de personnes malades, souffrir de problèmes de santé. Les qualifications professionnelles acquises influent directement aussi sur les choix professionnels. Ces facteurs contribuent largement à expliquer la position qu’occupe une personne sur le marché de l’emploi. On les appelle des facteurs d’employabilité; ils renvoient à l’ensemble des facteurs d’accès au marché de l’emploi et caractérisent en général l’offre et les offreurs de travail: l’âge, la scolarité, l’état de santé, la formation scolaire et professionnelle d’une personne. Le niveau de scolarité atteint et l’expérience de travail acquise sont d’importants facteurs de l’employabilité d’une personne. Par exemple, comme il y a une relation entre la scolarité et l’emploi, l’écart de niveau d’emploi entre les hommes et les femmes a diminué lorsque l’écart dans la scolarité a également diminué et que les femmes ont étudié plus longtemps. L’écart dans le type et le niveau des emplois occupés entre les hommes et les femmes a aussi diminué (Legault, 2010, 2011).

    De plus, l’employabilité dépend de facteurs qui caractérisent la demande de travail; les caractéristiques invoquées précédemment produisent des effets différents selon la conjoncture économique, les secteurs d’emploi développés dans un environnement donné, la réticence à employer des membres des groupes cibles, des ex-détenus, des personnes issues des minorités; les politiques publiques d’insertion, la présence de stages en milieu de travail; le dynamisme entrepreneurial.

    À partir de quand considère-t-on alors qu’il y a iniquité et discrimination dans une société?

    À l’échelle sociale, et non individuelle, c’est lorsque la demande et l’offre de travail sont peu ou mal appariées, sans que les facteurs d’employabilité ne puissent expliquer l’écart en entier. Par exemple, on peut facilement comprendre l’absence des femmes dans un secteur d’emploi lorsqu’elles ne détiennent pas les qualifications professionnelles requises; elles ne répondent pas aux critères d’employabilité. Mais lorsqu’elles les détiennent et n’y ont toujours pas accès, quel est l’obstacle à l’appariement de leur offre de travail avec une demande correspondante?

    En outre, l’absence même des femmes de certaines filières de formation peut aussi poser un problème d’iniquité. On considère qu’il y a iniquité sociale non pas lorsqu’on examine un ou des cas individuels, mais le portrait collectif d’un groupe tel qu’il se dégage de statistiques agrégées, et que ce portrait se révèle très différent de celui de la population générale, car l’écart ne peut alors s’expliquer par de simples préférences individuelles. Il devient alors un phénomène social, une tendance qu’il faut expliquer. Quels sont donc les facteurs à l’œuvre?

    Je vous présente donc des statistiques agrégées du marché de l’emploi sous plusieurs angles, en tenant compte de la scolarité et des qualifications professionnelles des personnes, du type et de la qualité des emplois qu’elles occupent, pour expliquer comment l’État en arrive à reconnaître que certains groupes sont victimes de discrimination à l’échelle sociale et à mettre en place des politiques d’équité pour corriger cette situation.

    3. LA PARTICIPATION AU MARCHÉ DE L’EMPLOI: LE TAUX D’ACTIVITÉ

    3.1. Le taux d’activité et le sexe

    On définit la population active comme le nombre de personnes civiles (excluant les membres à temps complet de l’armée) de 15 ans et plus, à l’exclusion des personnes vivant en institution (établissement de santé, pénitentiaire ou autre) et dans une réserve indienne, qui sont en emploi ou en chômage (c’est-à-dire disponibles pour travailler, sans emploi et à la recherche active d’un emploi) au moment de l’enquête de Statistique Canada. La population active se définit comme un nombre absolu de personnes. La main-d’œuvre est synonyme de la population active.

    Le taux d’activité se définit comme la proportion de la population générale en âge de travailler (personnes civiles de 15 ans et plus, à l’exclusion des personnes vivant en institution et dans une réserve); on définit ce groupe comme la main-d’œuvre ou la population active, telle que définie précédemment. Le taux d’activité est un rapport (personnes actives/personnes en âge de travailler * 100), alors que la population active est une simple quantité d’individus.

    Le taux d’activité des femmes se définit comme la proportion des femmes en âge de travailler (personnes civiles de 15 ans et plus, à l’exclusion des personnes vivant en institution et dans une réserve) qui fait partie de la main-d’œuvre ou de la population active, telle que définie précédemment. Le taux d’activité correspond au rapport femmes actives/femmes en âge de travailler * 100.

    Le taux d’activité se fonde sur la participation au marché de l’emploi, que ce soit à titre de travailleur ou de chômeur. Les travailleurs qui ont renoncé à chercher un emploi croyant qu’aucun n’était disponible ne sont pas considérés comme des chômeurs, mais comme des personnes hors de la main-d’œuvre.

    La transformation du marché de l’emploi crée des zones grises entre l’emploi et le chômage; en effet, certaines personnes sont sous-employées, c’est-à-dire qu’elles travaillent à temps partiel ou occasionnel sans l’avoir choisi; elles préféreraient travailler à temps complet. Par ailleurs, d’autres sont suremployées, c’est-à-dire qu’elles travaillent souvent en heures supplémentaires ou cumulent deux emplois. Il est utile de connaître ces statistiques de niveau d’activité pour mieux comprendre la répartition de l’emploi et de la richesse entre les travailleurs.

    Le taux de féminité de la main-d’œuvre représente la part des femmes dans la main-d’œuvre totale. Par exemple, si parmi l’ensemble des personnes actives, la proportion des femmes par rapport aux hommes augmente, on dira que le taux de féminité de la main-d’œuvre augmente. Historiquement, on observe cette tendance comme le montre le tableau 1.1.

    TABLEAU 1.1.

    Taux d’activité de la population de 15 ans ou plus selon le sexe, Québec, 1911-2020

    Source: Jusqu’à 1991: Statistique Canada; 1951 à 1991: Recensements canadiens; 1993: Enquête sur la population active (Motard et Desrochers, 1995, p. 89); 1996: Statistique Canada; 1996, tableau 2. À compter de 1997, pour le taux d’activité: ISQ, 2006, p. 47; pour le taux de féminité, p. 39 et 47. Pour 2010: ISQ, 2011a, p. 56 et 72. Pour 2015: ISQ, 2016a, p. 51 et 77. Pour 2020: ISQ, 2020a, p. 23.

    Attention de ne pas confondre deux statistiques:

    ▪ Le taux d’activité des femmes mesure la grandeur d’un sous-ensemble de femmes (celles qui sont actives) par rapport à un total de femmes; cette fois-ci, la population totale est celle des femmes, puisque le taux d’activité dans un groupe se mesure par rapport à ce groupe;

    ▪ Le taux de féminité de la main-d’œuvre mesure la grandeur d’un sous-ensemble de personnes actives (les femmes) par rapport à un total de femmes et d’hommes actifs. On peut étudier le taux de féminité général de la main-d’œuvre, qui représente la part des femmes dans la main-d’œuvre totale; on peut aussi étudier le taux de féminité d’un métier ou d’une profession, qui représente la part de la main-d’œuvre féminine affectée à certaines occupations particulières sur la main-d’œuvre totale de ce métier ou de cette profession.

    En effet, lorsque le taux d’activité des femmes augmente, le taux de féminité augmente, comme on le voit au tableau précédent, mais l’inverse n’est pas toujours vrai. Le calcul du taux de féminité résulte de la division du nombre de femmes actives par le total des personnes actives. Si le dénominateur diminue, par exemple si le total des personnes actives d’un groupe d’âge diminue, cela influe sur le taux de féminité. Ainsi, en vertu de la prolongation générale de la durée des études, la proportion des actifs chez les personnes âgées de 15 à 24 ans diminue, chez les hommes comme chez les femmes. S’il était arrivé que le nombre de femmes actives de 15 à 24 ans reste le même, mais que le nombre d’hommes actifs diminue de moitié dans ce groupe d’âge (une pure hypothèse…), le taux de féminité aurait augmenté sans que leur nombre augmente. Le taux de féminité est une proportion de la population active, alors que le taux d’activité est une proportion de la population globale.

    En général, sans égard au sexe, la population active au Québec augmente régulièrement depuis les années 70 (ISQ, 2005, p. 28). Entre 2000 et 2020, le taux d’activité agrégé pour les populations des deux sexes est plutôt stable, passant de 63,1% à 63,8% (ISQ, 2011a, p. 39; ISQ, 2020a, p. 23).

    Mais lorsqu’on tient compte du sexe, on remarque au tableau 1.1 que le taux d’activité des femmes augmente régulièrement, alors que celui des hommes baisse pendant l’ensemble du XXe siècle et au début du suivant. L’augmentation de la population active est donc principalement imputable à l’augmentation du taux d’activité chez les femmes.

    Néanmoins, remarquons que le taux d’activité des hommes est toujours supérieur à celui des femmes. L’écart entre les hommes et les femmes diminue toutefois régulièrement pendant l’ensemble de la période.

    3.2. Le taux d’activité, le sexe et l’âge

    En général, sans égard au sexe, le groupe des 25 à 44 ans a le taux d’activité le plus élevé chez les hommes en 2019, mais chez les femmes on distingue plutôt le groupe des 45 à 54 ans à ce titre. Lorsqu’on tient compte du sexe, on voit diminuer l’écart entre les hommes et les femmes dans les trois premiers groupes d’âge entre 1976 et 2019.

    Les hommes ont encore des taux d’activité supérieurs à ceux des femmes. Toutefois, notons au tableau 1.2 que pour chacun des groupes d’âge, le taux d’activité des femmes augmente bien plus que celui des hommes, parfois lui-même à la baisse, ce qui réduit progressivement l’écart entre les sexes.

    TABLEAU 1.2.

    Taux d’activité selon le groupe d’âge et le sexe, Québec, 1976-2019

    Source: Pour les années 1976-1986: ISQ, 2005, p. 36; pour 1997: ISQ, 2006, p. 48; pour 2010 et 2015: ISQ, 2016, p. 52. Pour 2019: ISQ, 2020c, p. 46.

    Chez les femmes âgées de 25 à 44 ans, le taux d’activité atteint 86,7% en 2019, c’est-à-dire que 86,7% des Québécoises de ce groupe d’âge sont actives. En 1951, seules 22,3% d’entre elles l’étaient (Motard et Desrochers, 1995, p. 88). C’est le groupe d’âge dont la participation a le plus augmenté à long terme chez les femmes. En conséquence, l’écart entre les femmes et les hommes de ce groupe d’âge diminue beaucoup en longue période.

    Cela est d’autant plus remarquable qu’à cet âge, la probabilité est grande que les femmes mettent au monde des enfants; auparavant, cela les éloignait du marché de l’emploi. Il s’agit donc d’un changement social important.

    3.3. Le taux d’activité, le sexe et la scolarité

    En général, sans égard au sexe, les diplômés universitaires affichent le taux d’activité le plus élevé, et ce, peu importe l’année. De tous les niveaux d’étude, il faut noter que les personnes qui ne détiennent pas de diplôme d’études secondaires présentent le plus faible taux d’activité. L’écart est grand entre le taux d’activité des personnes détenant ce niveau de scolarité et les autres.

    Lorsqu’on tient compte du sexe, on observe au tableau 1.3 suivant que 27,4% des femmes sont actives sans diplôme d’études secondaires, alors que 75,7% le sont avec un diplôme universitaire. Chez les hommes, 44,9% sont actifs sans diplôme d’études secondaires, alors que 76,5% le sont avec un diplôme universitaire.

    TABLEAU 1.3.

    Taux d’activité selon le niveau d’études et le sexe, Québec, 1997-2019

    Source: Pour 1997 et 2005: ISQ, 2006, p. 50; pour 2010 et 2015: ISQ, 2016a, p. 53; pour 2019: ISQ, 2020c, p. 47.

    C’est chez les femmes qu’on observe des augmentations du taux d’activité dans certains groupes d’âge; les hommes, sauf lorsque sans diplôme d’études secondaires, voient baisser leur taux d’activité.

    Il faut noter la très grande différence qui sépare les femmes et les hommes sans diplôme d’études secondaires; les hommes de ce niveau de scolarité ont près de deux fois le taux d’activité des femmes. Aux autres niveaux, les écarts en faveur des hommes sont bien moindres.

    La deuxième moitié du XXe siècle a été le théâtre d’une amélioration importante de la scolarisation de la population. Ce progrès s’est manifesté au Québec notamment par la diminution de la part des personnes détenant moins d’une 9e année (de 61,2% en 1951 à 18,5% en 1996) et des personnes détenant de 9 à 13 ans de scolarité (de 45% en 1961 à 39% en 1996); et par l’augmentation de la part des diplômés du collégial (de 16% en 1971 à 30% en 1996) et universitaires (de 1,9% en 1951 à 12,2% en 1996) (Lespérance, 2001, p. 177).

    Comme l’illustre le tableau 1.4, l’écart entre les hommes et les femmes quant au niveau de scolarité a diminué progressivement au cours du XXe siècle.

    TABLEAU 1.4.

    Répartition de la population de 15 ans et + selon le niveau de scolarité et le sexe, Québec, 1951-1996

    Source: Lespérance, 2001, p. 178.

    Au cours de cette période, les femmes ont accompli des progrès considérables en matière de niveau de scolarité; en effet, lorsqu’on examine les données contemporaines, elles sont plus nombreuses que les hommes à détenir des diplômes d’études collégiales et universitaires (tableau 1.5). Les femmes sont aussi moins nombreuses à n’avoir qu’un diplôme d’études primaires ou secondaires.

    TABLEAU 1.5.

    Répartition de la population de 25 à 64 ans selon le plus haut niveau de scolarité et le sexe, Québec, 2020

    Source: Deschênes, 2020, p. 2. Données du recensement de 2016 de Statistique Canada, traitées par l’Institut de la statistique du Québec.

    La tendance devrait se maintenir, car chez les 25 à 34 ans, 41,7% des femmes ont un diplôme universitaire, alors que chez les 55 à 64 ans, seules 21,2% des femmes en ont (Deschênes, 2020, p. 3).

    Pour ce qui est des études supérieures, l’évolution chez les femmes est notable. Depuis 1986, les femmes augmentent leur représentation chez les diplômés de doctorat. Depuis 1996, elles sont présentes en plus grande proportion que les hommes chez les diplômés de maîtrise, bien que les hommes demeurent toujours plus présents en 2011 chez les diplômés de doctorat (tableau 1.6).

    TABLEAU 1.6.

    Taux d’obtention du diplôme universitaire selon le sexe, Québec, 1986-2016, en% de la population d’hommes et de femmes

    Source: Lespérance et al., 2001, p. 190; pour 2008: ISQ, 2011b, p. 121. Pour 2016: ISQ, 2020b, p. 118.

    Depuis 1986, le taux d’obtention d’un baccalauréat a augmenté de 46 points de pourcentage chez les hommes et de 48,6 points chez les femmes. On est passé d’un écart de 1,8 point en faveur des femmes en 1986, à un écart de 4,7 points à l’avantage des femmes à ce chapitre en 2016. Dans la population, la diplomation croît en général, mais le rythme de croissance chez les femmes est supérieur à celui des hommes. Jusqu’en 2008, les femmes ont augmenté de presque deux fois plus que les hommes leur taux de diplomation. Toutefois, en 2016, hommes et femmes tendent à revenir au niveau d’avant 2008, moins encore chez les femmes au baccalauréat.

    Pour ce qui est des personnes dont le plus haut diplôme est un diplôme d’études secondaires, le progrès des femmes se reflétait jusqu’à récemment par un écart net en leur faveur chez les plus faiblement diplômés (tableau 1.7). Toutefois, cet écart diminue aussi à la faveur de la croissance du niveau moyen de scolarité pour l’ensemble de la population. Tant les hommes que les femmes comptent de remarquables progrès aux études supérieures et sont maintenant plus rares à avoir obtenu un diplôme d’études secondaires pour un plus haut diplôme.

    TABLEAU 1.7.

    Répartition de la population de 15 ans et plus selon le plus haut diplôme obtenu, Québec, 1976 à 2016, en% de la population d’hommes et de femmes

    Source: Lespérance, 2001, p. 211; pour 2011: Marcoux et Bouchard, 2016, p. 32; pour 2016: Deschênes, 2020.

    En conclusion, on doit observer que si des écarts quant à la scolarité ont pu expliquer dans le passé les écarts de rémunération et de position hiérarchique entre hommes et femmes, ces écarts diminuent progressivement et constamment. Les femmes ont une avance sur les hommes à ce titre. L’écart de scolarisation universitaire chez les personnes âgées de 25 à 64 ans en leur faveur continue de s’accroître depuis 2006 et il est passé de 2,8 en 2011 à 5 points de pourcentage en 2016 (non illustré). Cet écart devrait continuer d’augmenter en raison de l’avancement en âge des jeunes cohortes au sein desquelles l’écart est particulièrement élevé (ISQ, 2020b, p. 212).

    3.4. Le taux d’activité, le sexe et les obligations familiales

    Malgré une participation accrue des femmes au marché de l’emploi, selon les statistiques, la répartition des tâches parentales entre le père et la mère demeure inégale. Les femmes consacrent également toujours plus de temps aux travaux ménagers que leur conjoint ainsi qu’aux soins aux enfants et aux parents âgés.

    À l’aide des données de l’Enquête sociale générale (ESG) de 1986, 2010 et 2015 sur l’emploi du temps et de l’ESG de 2012 sur les soins donnés et reçus, Moyser et Burlock (2018) ont examiné l’écart entre les sexes en matière de temps alloué aux tâches ménagères, aux soins prodigués et aux loisirs ainsi que la façon dont la situation a évolué au cours des 30 dernières années. Elles notent que les hommes n’ont pas accru leur participation au travail non rémunéré dans la même mesure que les femmes ont renforcé leur participation à un travail rémunéré (ou qu’elles ont diminué cette participation au travail non rémunéré). Par conséquent, les femmes effectuent encore un deuxième quart de travail non rémunéré après leur travail rémunéré (Moyser et Burlock, 2018, p. 4). Elles notent aussi que les femmes, malgré leur temps de travail rémunéré accru, ont conservé la responsabilité d’assurer la coordination de la vie des enfants, de s’assurer du bon fonctionnement du ménage (planifier les repas, fixer les rendez-vous de santé, prendre les dispositions nécessaires pour effectuer les réparations ou organiser les livraisons), du travail d’ordre affectif (veiller à l’amélioration du bien-être des proches et offrir un soutien) et de l’entretien des relations (garder contact avec les membres de la famille immédiate et élargie, souligner les anniversaires et autres jalons, planifier et organiser les fêtes familiales et les vacances). Bien que les femmes consacrent beaucoup de temps à ces activités, elles sont en grande partie invisibles pour les autres (sauf si elles n’ont pas été effectuées), peu reconnues socialement ni mesurées dans les enquêtes sur l’emploi du temps (Moyser et Burlock, 2018, p. 5).

    Les femmes consacrent plus de temps à effectuer un travail non rémunéré que les hommes. Par exemple, en 2015, les femmes au Canada y consacrent 3,9 heures par jour comme activité principale — c’est-à-dire 1,5 heure de plus que les hommes qui y consacrent 2,4 heures (Moyser et Burlock, 2018, p. 6). Les femmes consacrent aussi plus de temps au travail rémunéré mais cela n’entraîne pas une redistribution significative du travail non rémunéré chez les hommes. La division traditionnelle du travail selon les sexes se maintient à ce titre. Une observation fine permet d’observer que les femmes exécutent des tâches multiples simultanément ou en alternance rapide, afin d’en effectuer plusieurs en un temps limité: plusieurs tâches ménagères en même temps, ou combinées aux soins prodigués aux enfants ou aux loisirs, deviennent des activités simultanées: plier le linge en surveillant ses enfants et en regardant la télévision (Moyser et Burlock, 2018, p. 5).

    La pratique des activités simultanées (multi-tâches) peut entraîner une sous-estimation systématique du temps que les femmes passent réellement à effectuer des activités de travail non rémunéré, ainsi que leur charge de travail totale et générer une image déformée de la progression vers l’égalité entre les sexes. Lorsqu’on compte l’activité simultanée, soit le travail non rémunéré fait en même temps que d’autres activités, l’écart entre les sexes grandit quant au temps consacré à un travail non rémunéré: 60,8% des femmes ont effectué un travail non rémunéré comme activité simultanée en 2015, par rapport à 40,2% des hommes (Moyser et Burlock, 2018, p. 7).

    Cela contribue à expliquer que les femmes sont moins actives sur le marché de l’emploi et, lorsque cela est le cas, elles sont proportionnellement plus nombreuses à occuper un emploi à temps partiel au Canada en 2015:

    ▪ 82% des femmes occupaient un emploi, par rapport à 90,9% des hommes;

    ▪ les femmes consacrent en moyenne 5,6 heures de moins par semaine au travail rémunéré que les hommes, tous emplois confondus (35,5 heures chez les femmes, 41,1 heures chez les hommes) (Moyser et Burlock, 2018, p. 7).

    Enfin, le travail non rémunéré effectué par les femmes pour les membres de leur famille facilite le taux d’activité plus élevé des hommes et leurs plus longues heures de travail. Le volume de travail total des femmes et des hommes est quasi-égal en 2015 (7,8 heures et 7,6 heures respectivement) mais:

    ▪ le volume total inclut le travail non rémunéré des femmes, plus élevé que celui des hommes;

    ▪ lorsque l’on inclut un travail non rémunéré en tant qu’activité simultanée, le volume de travail total des femmes devient plus élevé que celui des hommes de 1,2 heure par jour en 2010 (9,1 versus 7,9 heures) (Moyser et Burlock, 2018, p. 7).

    L’âge de l’enfant influe sur le taux d’activité des mères; en 2020, chez la moyenne des femmes il est de 86,3%; chez les mères ayant un enfant de moins de 6 ans, il baisse à 82,2%; il a beaucoup augmenté au cours des 35 dernières années et tend à s’approcher de celui de la moyenne des femmes et de la moyenne générale (88,6%). Il est moins élevé que celui des mères ayant des enfants en âge de fréquenter l’école, de 6 à 12 ans (87,2%). Chez les hommes, l’âge du plus jeune enfant n’entraîne pas de différence notable dans le taux d’activité, au contraire en fait: il est de 90,7% en moyenne chez les hommes, augmente à 93,8% chez les pères d’un enfant de moins de 6 ans (en un mouvement inverse de celui des femmes) et à 94,6% chez les pères d’un enfant de 6 à 12 ans (ISQ, 2021e).

    En 2020, les mères d’enfants de 12 ans et moins ont un taux d’activité de 84,4%, moindre que l’ensemble des femmes qui est de 86,3%. À l’opposé, les pères d’enfants de moins de 12 ans ont un taux d’activité (de 96%) qui surpasse celui des hommes en général (90,7%). Ainsi, la présence d’enfants exerce une pression à la baisse sur le taux d’activité des femmes, mais à la hausse sur celui des hommes. Ces mères demeurent moins actives que leurs vis-à-vis masculins sur le marché de l’emploi et que les femmes dans l’ensemble. Elles font plus de compromis que les pères quant au régime de travail et renoncent à travailler à temps complet plus souvent que les hommes: 69,2% des femmes et 86,8% des hommes en couple avec enfants travaillent à temps complet (ISQ, 2021e).

    Quand la famille est monoparentale, le taux d’activité des femmes passe à 84,7% et le taux d’emploi à temps complet passe à 69,3%. Par comparaison, les hommes à la tête de famille monoparentale ont un taux d’activité de 91,1% et un taux d’emploi à temps complet de 81% (ISQ, 2021d).

    3.5. Le taux d’emploi et le sexe

    Le taux d’emploi est la proportion des personnes qui ont travaillé contre rémunération ou en vue d’obtenir un bénéfice et celles qui, même absentes de leur travail, maintiennent un lien d’emploi, incluant les travailleurs autonomes, mais excluant les chômeurs, dans la population active, soit le nombre de personnes civiles (excluant les membres à temps complet de l’armée) de 15 ans et plus. En d’autres termes, il s’agit des personnes en emploi par rapport au total des personnes qui sont en emploi et en chômage (la population active).

    Entre 2009 et 2019, le taux d’emploi a augmenté de 59,6% à 61,5% en général pour l’ensemble des employés; chez les femmes, il est passé de 56,6% à 58,4%, alors que chez les hommes il est passé de 62,7% à 64,7%. L’écart en faveur des hommes est plutôt constant à 6,3 points de pourcentage en 2019 (ISQ, 2020c, p. 93).

    En général, sans égard au sexe et pour l’ensemble de la période 1976-2015, le taux d’emploi augmente (tableau 1.8). En d’autres termes, l’écart diminue à long terme entre les sexes au point de vue du taux d’emploi. Comme on l’observe à la lecture du tableau, cette réduction de l’écart résulte à la fois du grand accroissement du taux d’emploi féminin et de la diminution du taux d’emploi masculin. En revanche, on observe que le taux d’emploi stagne pour les deux sexes depuis 2010.

    TABLEAU 1.8.

    Taux d’emploi selon le sexe, Québec, 1976-2019

    Source: Pour les années 1997-2005, ISQ, 2006, p. 115; pour 1976, ISQ, 2005, p. 65; pour 2010, ISQ, 2011a, p. 123; pour 2015, ISQ, 2016a, p. 99; pour 2019, ISQ, 2020c, p. 93.

    Il est cependant utile de se rappeler que chez les personnes qui travaillent à temps partiel, en 2019, 63% sont des femmes; chez les personnes qui travaillent à temps complet, seulement 44,3% sont des femmes (ISQ, 2020c, p. 61). On ne peut donc conclure que le niveau de revenu des femmes s’améliore en conséquence.

    3.6. Le taux d’emploi, le sexe et l’âge

    Entre 1976 et 2019, et pour chacun des groupes d’âge, le taux d’emploi des hommes dépasse celui des femmes, comme le montre le tableau 1.9, à l’exception du groupe des 15 à 24 ans, depuis 2005, dans lequel les femmes sont en emploi en plus grande proportion que les hommes.

    TABLEAU 1.9.

    Taux d’emploi selon le groupe d’âge, femmes et hommes, Québec, 1976-2019

    Source: Pour les années 1976 et 1986: ISQ, 2005, p. 67; pour les années 1997-2005: ISQ, 2006, p. 116; pour 2010: ISQ, 2011a, p. 125; pour 2015: ISQ, 2016a, p. 101; pour 2019: ISQ, 2020c, p. 95.

    L’augmentation du taux d’emploi des femmes est notable dans les deux groupes d’âge de 25 à 44 ans et de 45 à 54 ans. Chez les femmes âgées de 25 à 44 ans, comme dans le cas du taux d’activité, l’augmentation du taux d’emploi reflète une transformation sociale importante, celle du taux d’activité (participation au marché de l’emploi) des femmes qui ont des enfants, même d’âge préscolaire. Le taux d’activité de ces dernières a presque doublé depuis 1976.

    En 2019, le taux d’emploi des femmes de 25 à 44 ans qui ont au moins un enfant de moins de 6 ans (78,7%) est plus faible que celui de l’ensemble des femmes du même groupe d’âge (83,4%). En revanche, l’écart entre ces deux groupes a diminué entre 1997 et 2019, passant de 9,1 à 4,7 points de pourcentage.

    Lorsque les femmes de ce groupe d’âge ont un ou des enfants âgés de 6 à 17 ans, leur taux d’activité est plus élevé que celui de l’ensemble (85,2%), ce qui confirme la tendance historique à l’augmentation du taux d’emploi chez les femmes (tableau 1.10).

    TABLEAU 1.10.

    Taux d’emploi des femmes de 25 à 44 ans selon l’âge du dernier enfant, Québec, 1997-2019

    Source: ISQ, 2006, p. 119; ISQ, 2011a, p. 128; ISQ, 2016a, p. 103; ISQ, 2020c, p. 97.

    La politique québécoise de services de garde joue un rôle important à cet égard, car l’État a mis en place:

    ▪ l’implantation graduelle de places à contribution réduite (5 $ par jour par enfant en septembre 1997, en hausse par la suite) en services de garde éducatifs;

    ▪ l’accès à temps complet des enfants à la maternelle;

    ▪ l’accès aux services de garde à contribution réduite pour les enfants de l’éducation préscolaire et primaire.

    Cette politique ne visait pas seulement l’accès des femmes à l’emploi, mais bien trois objectifs:

    ▪ la lutte à la pauvreté;

    ▪ une plus grande participation des parents au travail, en particulier des femmes;

    ▪ une plus grande égalité des chances pour les enfants (Croisetière, 2004; Lefebvre et Merrigan, 2005).

    Néanmoins, aux fins de cette démonstration, remarquons qu’une comparaison des taux d’activité des femmes de cet âge ayant des enfants de moins de 6 ans, entre le Québec et l’Ontario, permet d’attribuer en partie à cette politique un effet notoire sur la participation des femmes à l’emploi. En effet, le gouvernement de l’Ontario n’a pas mis en place une telle politique.

    Au Québec, le taux d’activité des femmes augmente plus vite que celui des Ontariennes. Entre 1976 et 2016, le taux d’activité des femmes sur le marché de l’emploi au Québec est passé de 51 à 81% et en Ontario, pendant la même période, il est passé de 60 à moins de 75%. L’écart entre les taux d’activité des femmes au Québec et en Ontario coïncide avec l’écart entre les taux de fécondité dans ces provinces depuis le milieu des années 2000. L’écart entre les taux d’activité est attribuable aux femmes dont le plus jeune enfant au sein du ménage était âgé de moins de 13 ans et qui avaient donc besoin de services de garde pour des enfants d’âge préscolaire ou de services de garde avant ou après l’école. Plus précisément, 60% de l’augmentation du nombre de femmes actives sur le marché du travail au Québec, de 1996 à 2016, est survenue chez celles ayant un enfant de moins de 13 ans. Plus de la moitié de cette augmentation est survenue chez des femmes dont le plus jeune enfant au sein du ménage était âgé de moins de 3 ans (Moyser et Milan, 2018, p. 7).

    L’activité de travail des Ontariennes dont le plus jeune enfant était âgé de moins de 13 ans a également augmenté entre 1996 et 2016, mais nettement moins qu’au Québec. Par exemple, chez les femmes ayant des enfants de moins de 3 ans, le taux d’activité a augmenté de 4 points de pourcentage en Ontario (passant de 66 à 70%), pendant qu’il augmentait de 19 points de pourcentage au Québec (passant de 61 à 80%) (Moyser et Milan, 2018, p. 8-9).

    3.7. Le taux d’emploi, le sexe et la scolarité

    Le niveau d’études joue un rôle important dans le taux d’emploi et module l’effet du sexe. Le taux d’emploi varie en effet beaucoup d’un niveau d’études à l’autre. En général, sans égard au sexe, les personnes les plus scolarisées affichent les taux d’emploi les plus élevés. En revanche, chez les personnes qui n’ont pas de diplôme d’études secondaires, l’emploi plafonne.

    Cette tendance a-t-elle le même retentissement chez les femmes et chez les hommes? Pas tout à fait, comme l’illustre le tableau 1.11a et 1.11b. Plus le niveau d’études est élevé, plus l’écart entre le taux d’emploi des hommes et des femmes diminue.

    TABLEAU 1.11a.

    Taux d’emploi selon le niveau d’études et le sexe, Québec, 1997-2019

    TABLEAU 1.11b.

    Taux d’emploi selon le niveau d’études et le sexe, Québec, 1997-2019

    Source: ISQ, 2006, p. 65; pour 2010: ISQ, 2011a, p. 126; pour 2015: ISQ, 2016a, p. 102; pour 2019: ISQ, 2020c, p. 96.

    En effet, l’écart est très marqué en faveur des hommes pour le groupe sans diplôme d’études secondaires. En d’autres termes, sans diplôme d’études secondaires, les femmes ont beaucoup moins d’emploi que les hommes.

    À l’opposé, chez les diplômés universitaires, l’écart entre les hommes et les femmes est minime. Les femmes sans diplôme ou ayant une faible scolarité sont plus pénalisées que les hommes sur le plan de l’emploi; elles doivent s’instruire bien davantage que les hommes pour atteindre un taux d’emploi comparable. Même si le taux d’emploi des hommes est toujours plus élevé que celui des femmes, la différence s’atténue selon le niveau de scolarité atteint.

    On note que les femmes immigrées sont proportionnellement plus nombreuses que leurs consœurs québécoises à détenir un diplôme universitaire (28,8% des femmes immigrées, 21,9% des femmes nées au Québec). En revanche, elles sont aussi nombreuses en pourcentage à ne détenir aucun diplôme (22% des femmes dans les deux groupes). On remarque donc une surreprésentation de femmes très scolarisées parmi la population immigrante. Dans la population immigrante, la scolarité élevée ne se traduit malheureusement pas par un meilleur accès à l’emploi. La non-reconnaissance des diplômes, l’absence d’expérience professionnelle sur le territoire québécois, le racisme et la discrimination sont quelques-uns des obstacles à l’intégration en emploi des immigrants. Le taux d’emploi des personnes qui détiennent un diplôme universitaire n’est en effet que de 69,1% chez les immigrantes, et de 78,5% chez les immigrants (Marcoux et Bouchard, 2016, p. 33-36).

    3.8. Le taux d’emploi, le sexe et le secteur d’emploi

    L’ISQ définit deux grands secteurs quant à l’emploi:

    ▪ Le secteur des biens comprend le secteur primaire (extraction des ressources naturelles: agriculture, élevage, chasse et pêche, mines, forêts, pétrole et gaz), les services publics (électricité, gaz naturel, aqueducs) et le secteur secondaire (la construction et la fabrication).

    ▪ Le secteur des services comprend le commerce, le transport et l’entreposage, la finance, les assurances, l’immobilier et la location, les services professionnels, scientifiques et techniques, les services aux entreprises, les services relatifs aux bâtiments et autres services de soutien, l’enseignement, la santé et les services sociaux, l’information, la culture et les loisirs, l’hébergement et les services de restauration, les services personnels et domestiques, l’administration publique.

    En général, sans égard au sexe, l’emploi dans le secteur des services dépasse depuis un certain temps déjà, et de beaucoup, l’emploi dans le secteur des biens; en effet, le secteur des services est passé de 73,6% de l’emploi en 2000 à 79,6% de l’emploi en 2019 (ISQ, 2020c, p. 84).

    Lorsqu’on tient compte du sexe, on constate que les femmes ne sont pas aussi présentes que les hommes dans le secteur des biens; elles n’y comptent que pour 22,5% de la main-d’œuvre en emploi en 2019, en baisse par rapport à 2000 alors qu’elles comptaient pour 26%. En d’autres termes, le taux de féminité de la main-d’œuvre en emploi du secteur des biens est de 22%. Dans le secteur des services, il est de 54,3% en 2019, par rapport à 52,3% en 2000 (ISQ, 2011a, p. 110-111; ISQ, 2020c, p. 87).

    Les tableaux 1.12a et 1.12b illustrent le taux de féminité de la main-d’œuvre en emploi des différents secteurs d’emploi des services.

    TABLEAU 1.12a.

    Taux de féminité dans les services et ses secteurs d’activité, Québec, 1997-2019

    TABLEAU 1.12b.

    Taux de féminité dans les services et ses secteurs d’activité, Québec, 1997-2019

    Source: ISQ, 2006, p. 71; ISQ, 2011a, p. 112; ISQ, 2016a, p. 93; ISQ, 2020c, p. 87.

    À la lecture de la première colonne du tableau 1.12a, on constate que les femmes comptent pour plus de la moitié de la main-d’œuvre en emploi dans le secteur des services en 2019. Le secteur de la santé et des services sociaux est le plus féminin; les femmes y occupent 8 emplois sur 10. Les secteurs de la finance et des assurances, de l’enseignement et de l’hébergement sont aussi très féminins: les femmes y occupent 6 emplois sur 10. En revanche, le secteur du transport et de l’entreposage est très peu féminin.

    En 2019, dans ce secteur, l’emploi à temps partiel est bien plus répandu (22,2% des emplois) que dans le secteur des biens (6%). Par exemple, dans le secteur de l’hébergement et de la restauration, la part de l’emploi à temps partiel est de 44,8%, ce qui est très élevé; or, il s’agit là d’un secteur très féminin (ISQ, 2020c, p. 65).

    Dans son ensemble, la fonction publique est devenue un secteur à prédominance féminine; en 1976, les hommes y occupaient 57,5% des emplois et en occupent 36,2% en 2019. Le tiers des femmes qui occupent un emploi rémunéré travaille dans la fonction publique, et le reste dans le secteur privé (ISQ, 2020c, p. 80).

    Les femmes ont aussi augmenté leur présence dans le secteur privé, mais à un rythme moindre. En 1976, elles occupaient 34% des emplois du secteur privé; depuis 1993, elles en occupent environ 45% de façon assez stable (ISQ, 2020c, p. 80). Bien sûr, la fonction publique offrant une large part d’emplois de service, les choix professionnels des femmes sont corrélés avec les secteurs qui les emploient.

    Ce facteur est aussi corrélé avec le taux de syndicalisation selon le sexe, car le secteur des biens affiche au Québec, on l’a vu précédemment, une part de syndiqués plus élevée que celle des services, à l’exception

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