Le quinquennat d’un socialorphelin
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Book preview
Le quinquennat d’un socialorphelin - Bernard Lespagnol
Première partie
Segment écrit entre mai et juillet 2017
Le socialisme du possible
1
Quelles valeurs ?
Le socialisme repose sur des valeurs, le libéralisme sur des dogmes.
Les valeurs :
En 1945, le Conseil national de la Résistance a posé le socle du socialisme moderne :
C’est l’intérêt général qui permet l’épanouissement de l’intérêt individuel, le bien-être de tous inclut par définition celui de chacun, ce qui n’est pas le cas dans la formule inverse.
Les ressources naturelles, l’énergie, les grands moyens de production, les infrastructures territoriales, les transports, les circuits financiers doivent être sous une forme ou sous une autre sous le contrôle ou la tutelle ultime du peuple via ses représentants.
Notre système de protection sociale, santé, travail, retraites, doit être protégé, préservé, développé dans l’esprit mutualiste dans lequel il a été conçu.
Chacun d’entre nous, enfant comme adulte, doit pouvoir bénéficier du système d’instruction le plus développé, sans aucune discrimination d’origine, d’âge ou de sexe.
Une véritable démocratie a besoin d’une presse indépendante à l’égard de l’État ET des puissances d’argent.
Être terre d’accueil et d’ouverture laïque, démocratique et sociale.
2
Mes référents
JBA Godin (les enseignements de son œuvre extraits de la thèse de MM Delabre et Gautier).
- Tant que l’entreprise ne fera appel qu’au travail et pas au travailleur, elle restera la chose du capital.
- L’œuvre de Godin souffre de deux handicaps majeurs. En premier elle est le fait d’un patron socialiste. En second elle n’est pas spectaculaire.
- Le socialisme c’est la propriété diffusée, pas la propriété supprimée.
- Le socialisme est organisation.
- L’utopie n’est plus une distraction que l’on peut mépriser avec bonne conscience, elle est devenue une impérieuse nécessité.
- Le peuple a le droit de choisir ses gouvernants mais pas les responsables de son travail, la réforme démocratique de l’entreprise ne répond pas au besoin de notre époque.
Stéphane Hessel (Indignez-vous)
- Il nous appartient de veiller tous ensemble à ce que notre société reste une société dont nous soyons fiers : pas celle des sans-papiers, des expulsions, des soupçons à l’égard de l’autre, des retraites et de la sécurité sociale, remises en cause, pas celle du pouvoir des nantis.
Régis Debray (Civilisation, la république expliquée à ma fille)
- Prenons toujours garde à ce que le droit à la différence ne devienne pas la différence des droits ;
- Ce qui est légal n’est pas forcément légitime ;
- La laïcité met une frontière entre ce que je sais et ce que je crois ;
- La séparation des pouvoirs est souvent un casse-tête mais leur confusion mène toujours au casse-pipe ;
- L’État est le seul et dernier bien de ceux qui n’en ont pas ;
- Les techniques du bien communiquer ont remplacé les arts du bien transmettre.
Jean Jaurès
L’Histoire enseigne aux hommes la difficulté des grandes tâches et la lenteur des accomplissements mais elle justifie l’invincible espoir.
3
En quoi l’intérêt général prime-t-il
sur l’intérêt individuel ?
Le développement et la pérennité du genre humain à travers les millénaires ne sont dus qu’à la prise de conscience que rien ne serait possible sans entraide, solidarité et partage. Cliché ? Peut-être mais chaque fois que les intérêts personnels ou minoritaires ont prévalu sur l’intérêt général, l’humanité s’est mise en danger.
3 exemples des errements libéraux :
Les ménages créent les entreprises pour en vivre en les faisant vivre, ils sont le départ et la finalité du circuit économique. Voilà pourquoi l’intérêt général est prioritaire : les hommes créent et produisent, les entreprises sont leur outil.
Dans l’univers du capital en France, 0,6 % des entreprises emploient 35 % de la population active directement et fournissent, directement ou indirectement, du travail à l’essentiel de la population restante, mais la libre concurrence, l’avidité des possédants (patrons et actionnaires), le pouvoir de la propriété font qu’ils utilisent d’abord la machine pour leur enrichissement personnel avant celui de la communauté. Le capitalisme fait de l’entreprise elle-même une « personne morale », salariée de son (ses) propriétaire. Ils fournissent à l’entreprise les capitaux qui sont nécessaires à son développement et elle leur donne son savoir-faire, sa valeur ajoutée sous forme de profits ou de dividendes pour leur seul bien être les incitant à réinvestir à nouveau, etc., etc.
L’entreprise est donc devenue personne morale, départ et arrivée du circuit économique tandis que les ménages en sont devenus l’outil : une variable d’ajustement. L’intérêt individuel s’est substitué à l’intérêt général en dehors de toute logique globale.
Quelles pistes pour ramener le circuit à sa logique initiale ?
Je ne suis pas un collectiviste intégriste ni même opposé à ce que les entrepreneurs soient justement récompensés de leur travail, mais, en me référant à la structure de l’entrepreneuriat vue précédemment, les top entreprises doivent être a minima sous la supervision de la collectivité. Sous quelle forme ? Actionnariat salarial, représentation active au conseil d’administration, actionnariat d’état au niveau minorité de blocage, et probablement la combinaison des deux options. Le capital humain passant de l’état de terminologie RH branchée à celui de réalité active.
À fin 2016, les 500 plus grosses fortunes de France ont augmenté de 30 % dans l’année (50 % pour Bernard Arnault). Depuis 1996, la fortune des 500 a été multipliée par 7 (par 12 pour les 100 premières) et représentent aujourd’hui (2017) 475 Md € soit 20 % du PIB, qui pendant la même période n’a fait que doubler… Cherchez l’erreur !
En matière d’impôts l’ISF est exonéré des placements financiers donc les plus riches paieront moins d’impôts d’autant qu’il serait bien naïf de croire que les sous de nos amis soient tous placés dans l’immobilier ou dans un coffre à la banque !
Enfin, pour valider cet exemple de déséquilibre collectif/individuel, sachez que l’ISF rapporte 4 Md € soit moins de 1 % de la fortune des 500 tandis que la CSG augmentera de 1,7 % notamment pour les « riches » retraités qui touchent plus de 1800 €/mois.
Des pistes pour changer ?
Pas 36 solutions je le crains, mis à part les changements radicaux exprimés plus haut et qui pourraient changer les échelles de rémunération dans l’entreprise, il faudra augmenter l’impôt des plus riches, qui de toute façon resteront riches, et sûrement légiférer en conséquence.
Inutile de chercher trop loin, il faut réduire drastiquement les écarts de salaires dans le 1 % des plus hautes rémunérations qui comme nous venons de le voir peuvent croître de 1 à 60 soit dans le cas de M. Carlos Ghosne 450 fois le SMIC ! je ne dis pas qu’un haut dirigeant ne mérite pas un haut salaire mais 450 fois le SMIC non. Le niveau reste à définir mais dans tous les cas et si nos génies souhaitent quitter le pays, rassurons-nous, les cimetières sont remplis de gens indispensables !
4
Le contrôle collectif des ressources
Il ne s’agit pas ici de prêcher un collectivisme pur et dur mais encore une fois de replacer l’homme au cœur de l’univers économique et social, en revenant brièvement sur la notion de circuit économique, composé de 4 pôles :
les ménages : Vous, moi, nous.
L’entreprise : outil créé par l’homme pour l’homme.
La finance : 2e outil dédié à la régulation des flux monétaires, base de nos échanges.
L’administration : l’organisation des hommes pour garantir le fonctionnement du circuit.
Ainsi, il est important de bien comprendre que le circuit économique ne peut tourner correctement que si les 2 pôles humains, ménages et administration, savent utiliser au mieux les 2 pôles outils, entreprises et finances. La confusion des genres entre humains et outils où l’entreprise est considérée comme un ménage et où la finance pense vendre des produits plutôt que rendre les services qu’on attend d’elle. Cette confusion nous mène aux limites que nous connaissons aujourd’hui. Un industriel de mes relations, réputé humaniste, a écrit « l’homme au cœur de l’entreprise », je pense qu’il se trompe tout autant que l’entreprise n’est pas au cœur de l’homme. L’homme est au cœur du circuit économique. Sa capacité à progresser individuellement n’est viable que si sa capacité à utiliser collectivement les outils est pérenne… depuis les débuts de l’humanité. Le fait que le circuit soit sous le contrôle d’une minorité d’hommes qui en privatisent le débit à leur profit est une erreur de gestion fondamentale de la part notre espèce. L’intérêt général doit primer sur l’intérêt individuel, c’est lui qui permet l’épanouissement de chacun.
Concrètement : Aujourd’hui l’État participe au capital de 1800 entreprises dans les secteurs de l’énergie (EDF, Areva, ENGIE) de l’industrie (Giat, DCNS, Airbus, PSA, Renault, Safran, Thalès) des services (la poste, France télé, FDJ, Orange) des transports (SNCF, Air France, RATP, ADP) pour un chiffre d’affaires (CA) de 430Md € et une contribution de 300 Md € soit 15 % du PIB et 1,7 millions de salariés, ce qui fait peu considérant que le secteur énergie sans le pétrolier TOTAL (CA 150Md €) ça fait désordre dans un domaine aussi stratégique.
Rien non plus dans les banques (150 Md€ de produit net) et que nous (oui nous !) avons sauvées de la faillite en 2009.
Rien toujours dans les assurances (200 Md € ça) que nous laissons en partie aux banques.
Et rien dans la grande distribution (ça 200 Md €) qui joue un rôle majeur dans la fixation des prix à la consommation et à la production.
Tout ceci ferait un joli paquet de 700 Md d’euros et une supervision directe de 35 % du PIB et plus en considérant les activités « dépendantes ». Il ne s’agit pas bien sûr de tout nationaliser comme en 1981 mais de prendre une participation à hauteur de minorités de blocage accompagnées de la présence active d’administrateurs salariés investis d’un réel pouvoir de décision au sein des conseils d’administration. Le moyen de réformer les écarts de rémunération déjà évoqués plus haut, de contrôler la rétribution des actionnaires et de participer à l’élaboration de la stratégie d’entreprise.
5
Préserver protection sociale et droit du travail
Droit du travail
Impossible de s’attaquer à ce vaste chapitre sans s’arrêter sur la réforme du Code du travail (associée à la loi El Khomeri de 2016) dont j’affirme qu’elle n’améliore pas le fond mais seulement la forme au grand profit du patronat, en maintenant un semblant d’influence aux syndicats et en saupoudrant les salariés de quelques miettes bien peu « nourrissantes ».
Le profit du patronat
Conséquences : moins de plans sociaux, plus simples, plus rapides et moins chers qu’avant si accord d’entreprise.
Conséquences : youpi, la fête pour le patronat. Facile, rapide, budgétisable, potentiellement discret, et pas plus, voire moins coûteux qu’un plan social ! la mesure phare si l’on se réfère aux exemples déjà en cours (PSA, Tupperware, Brico dépôt, Castorama, Carrefour) une vraie aubaine (on prend un CICE l’année précédente et hop là ; ça