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Vers une valeur sociétale: Le Ciel de la marelle
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Ebook636 pages4 hours

Vers une valeur sociétale: Le Ciel de la marelle

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About this ebook

Réchauffement climatique, appauvrissement des ressources, épidémie Covid-19, crises géopolitiques… autant de soubresauts planétaires qui interrogent l’Existence et les valeurs qui la sous-tendent. Du paradigme du profit au paradigme du sociétal, pour un bien-être durable, l’Existence appelle une (r)évolution des valeurs vers une « Valeur sociétale ». L’entrepreneuriat, comme phénomène qui a traversé l’Histoire en la produisant, endosse cette ambition avec celle d’un accroissement de la « Valeur sociétale » vers laquelle cet essai porte un regard.


À PROPOS DE L'AUTEUR


Ingénieur de formation, Fernand Maillet a une activité de consultant dans les domaines de la créativité, de l’innovation et du projet nourrie par l’expérience d’une vie professionnelle consacrée à l’ingénierie, au management d’équipe de projet, puis à l’accompagnement entrepreneurial.
LanguageFrançais
Release dateAug 8, 2022
ISBN9791037729873
Vers une valeur sociétale: Le Ciel de la marelle

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    Vers une valeur sociétale - Fernand Maillet

    Le terme « valeur »

    Le terme « valeur » recouvre un large spectre de significations qui ont trait aux catégories de la Connaissance : littérature, musique, Beaux-Arts, mathématiques, économie, comptabilité… et aux structures syntaxiques des phrases qui les expriment : la valeur-quantité, de valeur-qualité ou valeur de comparaison.

    Le terme « valeur » évoque en premier lieu l’idée d’une évaluation se rapportant à un sujet ou un objet matériel ou immatériel et envisagée comme relative à un contexte doté d’un référentiel ou de codes d’interprétation.

    La perception de ce sujet ou de cet objet, sensible ou intelligible, emprunte « la forme sous le regard » qui en révélera le sens.

    L’évaluation peut être qualitative ou quantitative, sachant que l’évaluation quantitative a vocation à solliciter de l’évaluation qualitative une interprétation qui lui donnera du sens. Il en va ainsi d’un objet dont on qualifiera le prix de « cher » ou de « bon marché » pour lui accorder du sens dans un contexte marchand donné. Cette valeur pourra déterminer l’action d’acheter ou pas.

    À l’inverse, une « évaluation qualitative » n’appelle pas aussi nécessairement un complément quantitatif, voire le récuse. Les qualités humaines qui répondent à ce que l’on désigne comme des valeurs ne sauraient se soumettre à une référence absolue quantifiée, et les nuances de la pensée s’accordent alors davantage avec l’idée d’une appréciation qui demeure subjective. L’appréciation de la valeur pourra néanmoins se rapporter à une hiérarchie de valeurs, et déterminer un jugement (de valeur).

    L’apprentissage scolaire s’évalue par des « notes » qui sont établies selon des barèmes. Les valeurs quantifiées se rapportent à des épreuves, et en traduisent les résultats comme une évaluation du niveau d’apprentissage atteint. L’évaluation demeure une appréciation pour une large part, qualitative. Le quantitatif donne une image du qualitatif, et la valeur a vocation à refléter la performance intellectuelle et/ou pratique de l’élève et de l’enseignement.

    Le quantitatif et le qualitatif entretiennent une relation de complémentarité asymétrique.

    Évaluer ou apprécier « la forme sous le regard », rencontre le champ de l’épistémologie selon les deux modes qu’emprunte l’acte de connaissance : l’intuition et le raisonnement.

    L’intuition résultera de la perception immédiate d’une réalité intelligible dont l’évidence du sens forcera l’entendement. Il en résultera principalement une appréciation qualitative.

    Tandis que le raisonnement s’appuiera sur l’observation d’une réalité sensible et d’une méthode par laquelle il pourra être rendu compte d’un résultat qui n’était pas nécessairement évident a priori. Il n’en résultera pas nécessairement une évaluation quantitative.

    La valeur attachée à un objet ou à un sujet accompagne le sens qui ressort intuitivement de « la forme sous le regard » à la mesure de la sensibilité de l’observateur, que ce dernier tendra ou pas à la confirmer, ou à l’affiner, de manière différée, en l’introduisant par le raisonnement dans la somme de ses connaissances.

    L’étymologie du terme « valeur » hérite du latin « valere » signifiant : « être fort, puissant, vigoureux ». Au Moyen Âge, « la valeur » se rapporte exclusivement aux qualités humaines, et par conséquent au mérite qui appelle une reconnaissance. La valeur force l’admiration et l’émotion qui l’accompagne. La perception d’une attitude ou d’un comportement « de valeur » génère un affect qui décentre l’observateur de lui-même, pour un rapprochement en pensée avec son auteur par une forme de motivation mimétique. Un élan spontané qui se résout en une volonté de ressemblance, d’appropriation, jusqu’à assimilation des qualités concernées. L’admiration révélera la séduction opérante, du latin « seducere », signifiant « tirer à l’écart ». Accorder ou reconnaître de la valeur, c’est déjà marquer un attachement affectif dont le subtil avènement accompagnera la mémorisation avec le code d’interprétation qui le sous-tend. Il s’agit là d’une voie d’apprentissage. L’humain se construit par ses affects.

    La notion de « valeur » renvoie à la notion de « mérite », par un effet miroir dont les codes d’interprétation sont relatifs à la culture.

    Qu’elle soit le résultat d’une mesure physique réalisée par un instrument ou le produit d’un jugement établi par l’esprit, la valeur d’un objet est indissociable du système de pensée (scientifique, philosophique…) dans le cadre duquel elle a été produite, et se dissout avec lui.

    Ce système de pensée correspond à la réunion d’une catégorie de la Connaissance et du code d’interprétation des affects qui la fertilisent, et dont la pensée a besoin pour s’y mouvoir conséquemment.

    La valeur que représentait l’agencement des pierres du mégalithe de Stonehenge dans l’imaginaire collectif des chasseurs mésolithiques s’est évanouie avec leur croyance. Les traces éventuelles dans notre imaginaire collectif sont imperceptibles.

    L’antique valeur de la « coudée » est tombée en désuétude avec le système de mesure qui l’employait, et du coup a perdu sa valeur d’usage comme unité de mesure, au profit d’une valeur transposée dans le système métrique (environ 50 cm), pour mémoire historique.

    Avec la disparition du système de pensée, l’objet de connaissance ne « parle plus » à notre entendement, et c’est la mémoire et l’imagination qui sont mobilisées pour en restituer du sens dans le présent par un acte de connaissance dont le résultat échappe alors à l’intuition commune. C’est le travail de l’archéologue ou de l’historien. Mais le sens ainsi livré à notre intellect demeure à distance de l’affect que produisait la croyance de l’époque, elle-même emportée par le temps. La valeur a perdu sa dimension affective originelle, et l’archéologue s’empresse de la remplacer par une valeur à la mesure de son propre code d’interprétation. Il pourra lui attribuer une valeur archéologique inestimable dont le fondement n’aura alors plus aucun rapport avec sa valeur originelle et ses codes d’interprétation.

    Tandis que l’existence au présent d’un système de pensée se révèle directement à nos sens lorsque nous interagissons avec notre milieu de vie et que nous rencontrons « la forme sous le regard ». Ce système de pensée nous est indispensable pour déterminer nos comportements. Il a forgé notre esprit et nous offre les codes pour interpréter notre environnement et guider notre existence en lui accordant du sens. Il nourrit notre spontanéité et nous ouvre à la satisfaction que produit le mérite. Il nous donne les codes pour juger « du bien et du mal ».

    Ainsi nous percevons que le quantitatif de la valeur se dédouble au travers du prisme du système de croyance ou de pensée qui éclaire « la forme sous le regard », selon les modes qu’emprunte l’acte de connaissance. La valeur-chiffres rencontre d’abord sensibilité et subjectivité jusqu’à une impression, un ressenti, une intuition, à la mesure des références qui guident le jugement immédiat qu’appelle la rencontre de « la forme sous le regard ». Ensuite, l’observation de la valeur-chiffres produit sa valeur arithmétique pour accéder au champ du quantitatif et se soumettre ainsi à notre esprit qui lui attribuera du sens. La valeur qui ressort de « la forme sous le regard » est donc d’abord qualitative.

    La distance de la Terre au Soleil vaut une unité astronomique, soit 149 597 870 700 mètres¹. « La forme sous le regard » que représente cette succession de chiffres augmentée de l’énoncé de ce à quoi elle se rapporte, révèle d’abord, immédiatement, intuitivement et qualitativement par l’entremise de notre imagination, l’immensité de l’espace correspondant, et par là celle de l’Univers. Mais la valeur arithmétique de cette unité peine à en rendre compte, elle demeure abstraite et a du mal à rencontrer une référence dans notre quotidien. Pour tenter d’en prendre la mesure, d’en appréhender une « valeur » intelligible, il faudra d’abord lui donner du sens, par exemple en déduisant, par le raisonnement et en rapport d’autres connaissances, que cette distance correspond à environ 389 fois la distance² de la Terre à la Lune, tandis que cette dernière correspond à 384 fois la distance de Marseille à Lille.

    La « valeur » ainsi révélée parvient (péniblement) à « parler » à notre entendement parce que la représentation par laquelle elle a trouvé du sens a permis de transcender le champ de l’arithmétique³, et à sortir de l’abstraction en rencontrant, avec plus ou moins d’effort d’interprétation, une référence « connue ». Toutefois, l’impression qui en résultera demeurera peu changée : le soleil, c’est loin !

    Si l’atome est sphérique, l’ordre de grandeur de son rayon est de 10-10 mètres, tandis que le rayon de son noyau serait de 10-15 de mètres. Une transposition utilisant l’homothétie permettra de donner sens à cet infiniment petit dont la valeur dimensionnelle échappe à l’entendement : « Si le noyau était une orange de 3 centimètres de rayon, alors l’atome aurait un rayon de 3 kilomètres ».

    Qu’il s’agisse de l’unité astronomique ou des dimensions de l’atome, les nombres-valeurs qui rendent compte de leur mesure n’auront pas la même « valeur » selon que l’on est astronome, physicien des particules ou artiste, parce que la « valeur » est le fruit de la résonnance entre la chose observée et un corpus de connaissances pris comme référence d’un système de pensée. Cette « valeur » sera associée à un affect chez l’observateur en rapport avec la nature de son regard (de son intérêt, de sa motivation, de son engagement…) et de son état émotionnel.

    La mention délivrée à l’examen du bac dépend de la valeur (chiffres) de la note finale aux épreuves. Et cette mention a une valeur (norme, barème) en elle-même puisqu’elle permettra le choix d’une orientation désirée, ce qui rejoint le mérite, lequel traduit une valeur (sociale). Mais, si la mention est méritée, c’est-à-dire déterminée directement par la valeur (chiffre) de la note, le mérite qui pourra être reconnu à l’élève sera à la mesure de l’effort de travail qu’il aura produit pour l’obtenir. Cette mention n’aura pas la même valeur (performance) pour le professeur qui veut apprécier la qualité de son enseignement, selon que l’élève est connu doué pour les études ou moyen pendant l’année. Quant à l’élève, la valeur (chiffre) de la note chiffrée aura une valeur (joie) dans la proportion de l’effort dont il aura conscience d’avoir consenti. Et la valeur (mérite) de cet effort sera à la mesure du résultat obtenu. Cette mention trouvera une valeur (bienveillance) dans le regard de l’entourage familial de l’élève en devenant un vecteur de son amour pour l’enfant. Ce qui sous-tend ce bouquet de valeurs intriquées c’est le regard que porte l’entourage, comme l’élève et le professeur, sur la valeur (sociale) que représente la réussite dans les études. Tous partagent la même culture, la même échelle de valeurs, avec vraisemblablement bien des nuances.

    La valeur d’une œuvre littéraire (« Le Temps retrouvé » Marcel Proust), musicale (« Consolation No 3 » Franz Liszt)… artistique va dépendre du cadre ou contexte à partir duquel elle est appréciée, depuis notre « jugement personnel » qu’a forgé notre culture, jusqu’au jugement académique pour une « valeur artistique » ou au marché de l’Art pour une « valeur financière ».

    Nous sommes alors en face d’un entremêlas de sens et d’affects que la maîtrise du langage nous permet de discerner et d’appréhender directement sans même avoir à les analyser. Nous sommes touchés par la grâce de l’évidence qui rend justice aux croyances qui nous gouvernent à la mesure de l’imprégnation que nous avons de notre culture et de l’échelle des valeurs qui la sous-tend.

    Quelles que soient nos pensées, derrière chaque mot qui les porte, une « valeur » est en embuscade attendant qu’il soit rendu compte, immédiatement ou de manière différée, de l’écart ou de la nuance qu’elle entretient avec la « norme » inexorablement changeante, et qu’elle contribuera aussi à forger, par le cycle perpétuel des causes et des effets que la sémantique arrache à la syntaxe.

    L’idée de « valeur » nous amène ainsi à l’idée de « langage » dont elle est autant inséparable que le « langage » l’est de la relation à l’Autre et à soi-même. La « valeur » est un vecteur de sens entre Moi et l’Autre dont les expressions successives s’alourdissent des différences de nos perceptions de « la forme sous le regard » et des affects qui en découlent.

    Une communication qui tendrait à égaliser, en théorie, les « valeurs » telles qu’elles sont représentées et considérées de chaque côté de la relation, exigerait une identité de langage, c’est-à-dire un même mode de représentation et d’évaluation de la « forme sous le regard », ce qui serait un défi à l’esprit humain et à l’incontournable diversité des points de vue.

    Mais, dans le cadre de cette relation, la « normalité » de la valeur flotte dans l’océan infini du sens aux bons soins de l’affect. La cohérence est son maître. Un « pourquoi » peut la faire vaciller dès lors que le système de pensée qui le produit extrait de « la forme sous le regard » une information nouvelle provoquant un déplacement du sens qui alimentait la relation. Ainsi naît la nouveauté régénératrice de la valeur de l’objet de la connaissance⁴.

    Un tel « pourquoi » sous les lumières de la Raison, est l’instrument du doute cartésien, libérateur des préjugés, afin d’épurer notre jugement d’inutiles croyances et de tendre vers une vérité.

    Relation, langage, sens nous amènent alors au-delà des mots, portés par « la forme sous le regard », tandis que l’idée de « valeur » épouse les fluctuations incessantes des affects qui font nos vies. La valeur c’est la couleur de l’affect.

    Dans cette optique, le concept de « valeur » traduit l’importance que représente une chose (un bien, un fait) pour la personne qui en a connaissance, qui a conscience de la chose. C’est aussi un idéal à atteindre, un point de vue à défendre.

    Mais cette importance peut être accordée à la chose par la personne elle-même, seulement, ou bien à partir d’une caractéristique que la chose aurait en propre, et donc indépendamment de la personne.

    Cela amène à envisager deux catégories d’usage du terme « valeur » : la valeur « pour soi » (relative à l’être conscient) et la valeur « en soi » (abstraction faite de la conscience), et à s’interroger sur l’existence de cette dernière, sachant qu’une « valeur en soi » se traduirait par une « valeur pour tous », c’est-à-dire la reconnaissance par chacun et tous d’une « valeur universelle ».

    Si nous reprenons la dualité du quantitatif et du qualitatif pour éclairer et distinguer « l’en soi » du « pour soi », nous rencontrons la dualité de l’objectif et du subjectif.

    Nous observons que « le problème du monde » procède de la volonté de vouloir cerner « l’objectivité du qualitatif » jusqu’à vouloir y trouver de l’universel pour l’ériger en « valeur ». C’est la voie de l’idéologie, ce qui n’est pas un jugement de valeur, mais désigne une catégorie de la pensée qui se poserait comme la genèse des autres catégories, avant que ces dernières se déterminent en leur objet. Dans cette optique, « le problème du monde » n’est autre que l’antinomie irréductible entre le rationnel et l’irrationnel qui anime l’Existence.

    Approche qualitative

    Les valeurs en système ?

    Heinrich Rickert⁵ part du principe que les valeurs s’érigent en système dont il cherche à déterminer les éléments constitutifs et leur synergie.

    Il ne s’agit pas ici de résumer « Le système des valeurs⁶ » de Heinrich Rickert, mais simplement de présenter quelques idées phares en tentant d’en tirer parti pour éclairer l’univers qui enveloppe la notion de valeur, et ainsi percevoir dans quelle mesure les valeurs et leurs catégories peuvent constituer un système, c’est-à-dire un « ensemble abstrait dont les éléments sont coordonnés par une loi, une théorie » qui les transcende.

    Les valeurs et la vie

    Heinrich Rickert aborde le concept de « valeur » d’un point de vue philosophique, dans la mesure où la finalité de la philosophie est d’abord de proposer une « vision du monde » pour en déduire « le sens de la vie » et par là ce qui a de la valeur.

    Si le « sens de la vie » se rapporte d’abord à l’individu, « ce qui a de la valeur » révèle le collectif auquel l’individu appartient. Ainsi, c’est vers la nature humaine que se tourne le regard pour en percevoir des qualités fondatrices de l’existence, c’est-à-dire des qualités portées par l’individu pour un bénéfice collectif, que l’on nomme communément : valeurs humaines.

    Toutefois, Heinrich Rickert qualifie son approche de scientifique en rapport de la logique employée et de l’ancrage des idées et notions qu’il développe, et cela au regard des réalités concrètes de l’existence. Heinrich Rickert rejette ainsi la théorie des Idées de Platon (l’intuition que nous avons du monde est illusion) et l’intuitionnisme comme voie d’accès aux valeurs depuis l’expérience immédiate des réalités.

    « Lorsque nous exigeons une vision du monde qui nous dise ce que signifie le monde, nous demandons alors… si notre vie a une valeur ainsi que ce que nous devons faire pour qu’elle ait de la valeur ».

    La démarche consisterait à tenter de conceptualiser « la valeur », c’est-à-dire à lui attribuer une existence en soi. Mais cette ambition rencontre, a priori, une aporie, tant sont liées valeur et effectivité dans une unité qui se révèle à l’évaluation au travers du vécu d’une réalité par un acteur. Cette unité se résout dans le sens pour l’acteur, lequel sens transcende valeur et réalité effective. Ces trois catégories : sens, valeur, réalité s’offrent respectivement à l’entendement selon l’explication, la compréhension et l’interprétation.

    Alors la question se pose de savoir de quoi procède la valeur, de l’objet de connaissance ou bien du sujet connaissant, sachant que l’un comme l’autre doit répondre d’une réalité effective. Si l’objet n’est pas porteur de la valeur en lui-même, le sujet, quant à lui, l’évalue, et ainsi s’en distingue. Les valeurs doivent donc être distinguées des objets et des sujets, qui sont des biens, comme l’axiologie⁷ se distingue de l’ontologie⁸.

    « … les valeurs elles-mêmes ne peuvent se trouver ni dans le domaine des objets ni dans celui des sujets, mais elles constituent un règne pour soi qui se situe par-delà le sujet et l’objet ».

    Il convient donc de distinguer valeur et évaluation, tout en considérant premier le critère de validité. Cette distinction est fondamentale dans la démarche de Heinrich Rickert en cela qu’elle constitue une approche singulière de la connaissance qui sépare le contenu de connaissance du jugement par lequel il lui est attribué une valeur. La validité de ce jugement sera donc liée à la capacité du contenu à exister réellement, ce qui correspond à son effectivité.

    « La validité de la valeur demeure, quoi qu’il arrive, l’élément premier pour la question du sens de la vie… »

    Heinrich Rickert se pose alors « … la question de savoir si la vie a de la valeur en tant que simple vie… ».

    « Toutes les valeurs doivent donc se révéler fondamentalement des valeurs de vie, c’est-à-dire des valeurs qui sont attachées à la vie simplement parce qu’elle est la vie ».

    Toutefois, Heinrich Rickert remarque que la « vie », en tant que telle, ne peut s’autojustifier, et que la valeur accordée à la culture ne peut pas dépendre d’une « valeur de vie » car cette valeur ressortirait davantage alors du plaisir que la culture procure, que de la « vie » en soi (en évitant de confondre valeur et évaluation, objet et jugement). N’étant pas possible de faire de la « vie » le fondement d’une valeur, il conclut que c’est « Le tout du monde [qui] doit être appelé "vie⁹" ».

    Depuis le biologisme et l’évolution du vivant (Darwin) jusqu’à la morale et l’éthique, Heinrich Rickert parcours l’antagonisme qui sous-tend la relation entre l’état de culture et l’état de nature en tendant à conclure que « La vitalité est seulement un moyen ».

    « La diversité des valeurs s’est en quelque sorte déposée dans les biens culturels, et cela s’est produit au cours de l’évolution historique ». La vie est au service de la culture et la question est de savoir « quelles valeurs sont effectivement réalisées par sa vitalité ».

    « Une réflexion élémentaire suffit pour apercevoir que la valeur d’une machine, quelle que soit sa perfection technique, dépend exclusivement de la valeur que l’homme joint aux prestations de celle-ci, et qu’il n’y a, par conséquent, aucun sens à parler de perfection technique sans tenir compte des positions humaines de valeur ».

    Dans cette optique, notre sens critique doit sans cesse nous inviter à aspirer à « d’authentiques valeurs de la vie ».

    Comment concevoir un « système de valeurs » ?

    Les valeurs sont attachées aux biens qu’il nous faut aborder au travers de leur rapport au monde : « … tous les biens sont ou ne sont pas des personnes, et dans ce cas sont des choses, et notre rapport à eux est ou n’est pas une activité, et il doit alors être déterminé comme contemplation. »

    Ces « biens » sont des personnes et des choses telles qu’elles apparaissent dans la « vie historique ».

    Heinrich Rickert distingue ainsi les modes de vie entre « actif » et « contemplation », et distribue sur ces deux modes les biens qui leur sont attachés. Ces biens trouvent leur plein accomplissement dans le temps et se répartissent en trois stades : en « biens d’avenir » (ce qui adviendra, la science), « biens du présent » (ce qui est accompli au présent, la philosophie), et « biens d’éternité » (ce qui est atemporel, la transcendance).

    Cette approche débouche sur « six domaines axiologiques », respectivement : socio-éthique, vie personnelle, principe d’amour, puis : logique, esthétique, mystique.

    Les domaines s’agencent les uns les autres pour constituer un « système de valeurs » sur lequel repose le sens de la vie humaine.

    Ces « modes de vie » harmonisent les trois niveaux de l’existence : le matériel, l’affectif et le spirituel.

    Mais les liens entre les valeurs n’offrent pas d’interprétation sans « … abandonner à l’individu singulier le choix de la vision du monde qui convient le mieux à sa singularité… ».

    Reste à inscrire le « système de valeurs » dans le temps. « Tout ce qui arrive n’a jamais existé. Nous ne pouvons donc pas savoir dans quelle mesure des biens se développeront auxquels des valeurs inconnues seront attachées, ni quels seront les nouveaux problèmes qui en résulteront pour la philosophie en tant que science des valeurs, et par conséquent aussi pour la doctrine de la vision du monde… » « Pourquoi le jour prochain n’apporterait-il donc pas quelque chose qui pourra renverser demain ce système de valeurs que nous produisons aujourd’hui ? »

    Le « système de valeurs » est réputé « ouvert », c’est à dire « non achevé », eut égard au caractère « ouvert » de l’historicité qui en rend compte. Les valeurs s’apprécient au présent et s’offrent à la nouveauté sous l’effet de l’évolution du contexte, de même que leurs rapports respectifs. « Le système des valeurs fait ainsi de la philosophie de l’histoire un tribunal des discours axiologiques… ».

    « … La philosophie de l’histoire en son sens éminent… devait être entendue comme la description axiologique des époques passées, c’est-à-dire l’évaluation de leur sens relativement à la réalisation progressive de valeurs supra-historiques dans l’histoire humaine¹⁰. »

    Avec la mystique, le sujet disparaît dans le « Tout », comme la relation de l’un à l’autre en se fondant dans la communauté, pour un mode de

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