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Colonie: Les natifs - tome 4
Colonie: Les natifs - tome 4
Colonie: Les natifs - tome 4
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Colonie: Les natifs - tome 4

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About this ebook

Voila deux révolutions - environ 4 ans - que l’équipage du New Hope s’est posé sur Lone pour y fonder la première colonie terrienne.
Depuis, le commandant Kearney a laissé la communauté prendre son envol en organisant des élections pour désigner un conseil d’administration au camp de base et s’est retiré au bord de l’océan avec un petit groupe.
En tout, ce sont désormais quatre villages qui se développent à leur rythme, au gré des difficultés rencontrées et des spécificités de leurs environnements, ignorant que d’autres civilisations et d’autres créatures sont déjà là depuis bien longtemps. Peu à peu, la technologie qui les soutenait jusque-là se fait rare et sa valeur augmente, créant les premières rivalités.
Alors que les premiers natifs humains de la planète fêtent leur troisième anniversaire, des frontières invisibles commencent à se chevaucher à l’insu de tous. L’enchaînement des évènements, les décisions prises, entraînent des conséquences ou les relations entre eux, mais aussi les différentes créatures, menacent un équilibre qui semble impossible à tenir.
LanguageFrançais
Release dateFeb 1, 2023
ISBN9782312131047
Colonie: Les natifs - tome 4

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    Colonie - J.M. Varlet

    Avant-propos

    Si vous lisez ceci, c’est que vous êtes toujours avec moi sur mon chemin.

    Et bien je suis content de vous voir, déambulant tranquillement au gré de mon imagination à mes coté, dans les plaines interminables de Lone, au milieu de cette mer d’herbe haute animée par le vent, cette légère odeur de prairie, la peau à peine chauffée par les rayons du soleil.

    Au loin, nous pouvons distinguer les silhouettes majestueuses des montagnes qui se dressent sur leurs pieds noyés par la masse sombre de la forêt.

    Soulageons un peu nos épaules en tirant sur les angles de nos sacs et laissons les paumes de nos mains caresser les cimes des tiges agitées qui nous entourent, bruissant sur notre passage, un pied après l’autre, appréciant cette sérénité. Notre respiration à l’unisson du souffle de toute une planète.

    Précédemment

    Il y a maintenant deux cycles que les humains ont débarqués sur Lone. Nous aurions pu parler d’années mais les journées faisant plus de vingt-quatre heures, et les rotations autour du soleil plus de douze mois…

    Pour faire simple, à l’échelle terrienne, plus de quatre ans se sont écoulés.

    Après une course de trente-huit années à travers l’espace depuis la Terre, le premier vaisseau de colonisation est arrivé à destination.

    Piloté automatiquement par Noé, une intelligence artificielle, il a franchi tous les obstacles et termine son voyage de façon quelque peu mouvementée sur le sol de Lone. Ce n’est pas très important puisqu’il ne pourrait, de toute façon, pas repartir.

    Les huit cent membres de l’expédition, qui émergent à peine de leur long sommeil, ne comprennent pas tout de suite que l’ordinateur, supposé veiller sur leur intégration dans l’équilibre biologique de leur Nouveau Monde, œuvre sur un plan plus large que la seule échelle humaine.

    Le premier à réaliser la mesure du danger, l’amiral Brian, responsable de la mission, le paye de sa vie.

    Ignorant totalement ces éléments, Alex Kearney, le second du vaisseau devient par ordre de succession le nouveau commandant de la base en développement.

    Le village modulaire, construit à flanc d’une des collines qui borde le site d’atterrissage, prend naturellement le nom de New Hope, comme l’astronef qui les a amenés ici. Au fond de cette vallée un fleuve s’écoule paresseusement en serpentant vers l’océan.

    Ils sont pour la première fois confrontés à la faune locale qui se présente sous l’apparence de paisibles ruminants qui ne semblent pas s’intéresser aux nouveaux arrivants.

    Malheureusement, les chevaux et les bisons, deux des espèces massivement importées pour soutenir le développement de la nouvelle civilisation, disparaissent dans les plaines, à peine réveillés.

    Des cultures sont lancées sur un sol particulièrement fertile, recouvert initialement d’une herbe sauvage, haute, qui pousse à une vitesse impressionnante.

    Au cours d’une reconnaissance jusqu’à l’océan, les colons apprennent qu’ils ne sont pas l’unique forme de vie capable d’utiliser des armes. De gigantesques sortes de pieuvres peuplent le rivage et le sang est versé pour la première fois.

    La navigatrice, Scarlett Dryden, responsable également des systèmes informatiques, s’aperçoit du dysfonctionnement de Noé. Elle prend peur lorsqu’elle réalise que les efforts de l’IA visent à intégrer des espèces terriennes à sa guise, avec pour seule priorité l’équilibre naturel de la planète dans son ensemble. Pressentant une menace pour les humains, elle alerte l’encadrement de la mission, le nouveau commandant et son second, Erine Day.

    C’est sans compter les capacités de Noé. Celui-ci anticipe la réaction de l’équipage et déplace l’intégralité des unités qui le constitue au moyen de drones à bord d’une des deux navettes de l’astronef. Il prend la fuite sans laisser de traces et disparaît vers les montagnes. Pour garantir l’égalité des chances des espèces, il déconnecte les colons de la station géostationnaire d’observation, part avec l’ensemble des bases de connaissance, une vaste animalerie en stase, coupe les réseaux de surface et les prive des communications avec la Terre. Il emporte aussi avec lui l’intégralité des relevés faits pour la préparation de la mission.

    Les colons ignorent qu’il fait la rencontre d’une forme de vie ailée, de grande taille, les griffons, qui endommagent gravement son appareil et le contraignent à un atterrissage de fortune, à peine parvenu aux montagnes, au fond d’une gorge encaissée.

    Isolés, ils poursuivent leur installation en appliquant le plan prévu à court terme, seules directives et données encore entre leurs mains. Ils terminent les constructions, fortifient le village et organisent la collecte des ressources sous la surface avec les outils techniques apportés avec eux. Les foreuses quittent New Hope avec une cinquantaine de personnes pour rejoindre l’unique site de prospection connu sous les ordres d’Edward Jackson, l’ancien mécanicien navigant de l’astronef.

    De nombreux couples se forment naturellement et les choses suivent leur cours paisiblement.

    Dépourvu de moyen de transport, un talentueux jeune biologiste, passionné de technologie, Abel Maas, parvient à élaborer un modèle de véhicule parfaitement adapté à l’environnement : le ranger. Composé d’un châssis supportant une grande cabine vitrée devant un moteur puissant sous un capot amovible, il domine quatre énormes roues en alliage. Une petite chaîne de montage est créée pour suppléer au manque de fiabilité des trop rares voitures électriques, à la disparition des chevaux et l’incapacité de pouvoir utiliser les gros herbivores à des fins domestiques.

    L’officier en second, Erine Day, qui est la seule pilote aguerrie de la mission, tente le tout pour le tout pour tenter de reprendre le contrôle de leur technologie. Elle subtilise la dernière navette avec ce qui reste de carburant pour rejoindre la base géostationnaire avant que ce ne soit plus possible.

    Une nouvelle fois, Noé anticipe l’action humaine. Il tente, en vain, de dissuader Erine tant qu’elle peut encore faire demi-tour. En guise de réponse, Erine tire deux missiles vers la station afin de le neutraliser, mais le mal est déjà fait. Noé utilise les dernières secondes à sa disposition pour neutraliser définitivement l’ensemble des systèmes de communication terrien.

    Hélas, le carburant manque, et le vaisseau n’est plus en état d’entrer dans l’atmosphère sans dommage.

    Comme Erine le craignait, sa chute l’entraîne à des milliers de kilomètres de son point de départ, au-delà d’un immense plateau montagneux, infranchissable.

    L’autre bout du monde.

    Pour tous, elle est morte. Personne ne peut savoir où sont tombés les restes de l’appareil qui s’est désintégré sous leurs yeux en une pluie d’étoiles filantes.

    C’est sans compter les talents exceptionnels de pilote de la jeune femme qui parvient à ramener l’essentiel du vaisseau vers la surface. A son tour, elle est interceptée par des griffons lors de son approche et la navette est finalement détruite.

    Contre toute attente, elle découvre que ce ne sont pas de simples animaux, mais les membres d’une communauté dotée d’intelligence, avec un langage et une véritable structure politique. La princesse Léva prend sa défense et l’adopte au sein du clan.

    Au cours des longs mois d’hiver, Erine Day met au monde une petite fille qu’elle appelle Cathy. Son père n’est autre que le commandant Kearney.

    Ce dernier, en deuil pour la seconde fois depuis leur arrivée, estime qu’il a achevé sa mission concernant l’implantation de la colonie. Désabusé, il se retire et laisse la place à un conseil d’administration élu par les habitants du site principal. Scarlett Dryden, officier de navigation pleine d’ambition, devient ainsi la première administratrice générale de New Hope.

    Environ deux cycles plus tard, soit un peu plus de quatre années terrestres, la population humaine de Lone à presque doublée.

    De façon naturelle, ou artificielle, toutes les femmes, en moyenne, ont déjà conçu deux enfants. Alors que, dans les nouveaux sites, les méthodes artificielles n’ont cours que pour les célibataires le souhaitant, à New Hope elles sont imposées à un rythme régalien depuis l’élection du conseil d’administration.

    En effet, selon la planification initiale de la mission, afin d’éviter les risques de consanguinité futurs, les ovules fécondés doivent toutes provenir des larges stocks plongés dans le fluide réfrigérant qu’ils ont amenés avec eux.

    Scarlett Dryden sait très bien mettre en avant ces obligations, en provenance d’une « autorité supérieure », lorsqu’elle y trouve son compte. Ce qui est justement le cas lorsqu’il s’agit de développer l’importance de son emprise par le nombre de ses administrés, ou d’établir la démonstration de force d’une chaîne hiérarchique institutionnelle dans laquelle elle revendique une place élevée.

    Elle est d’ailleurs suffisamment habile pour mettre l’opinion de la population de son côté, et les pratiques des « extérieurs » sont vues d’un mauvais œil. Progressivement, son ingérence dans la vie de sa population est devenue de plus en plus importante, faussement encouragée par un sentiment de supériorité générale.

    Protectionniste à l’excès, elle veille à conserver la main sur la technologie de pointe dont New Hope peut se prévaloir le seul site de production.

    Les colons sont également établis sur trois autres sites, totalement indépendants les uns des autres. Ils pratiquent des échanges commerciaux sur la base du troc et de moins en moins dans l’idée de s’aider mutuellement. Seul le site de base est doté d’un conseil démocratique :

    – Camp Jackson, un site d’exploitation du sol. De nombreuses galeries souterraines filent dans toutes les directions et sur de grandes profondeurs jusqu’à des filons référencés par la reconnaissance initiale de la mission.

    – La Forêt, sorte de petit village fortifié autour d’une scierie qui exploite les ressources forestières, comme son nom l’indique.

    – Moana, qui signifie « mer » ou « océan ». Il est installé au bord de l’eau, très au sud de New Hope. Une poignée de colons s’y sont implantés, dont Alex Kearney, le commandant prématurément à la retraite, et vivent des ressources locales. Depuis sa création, ce dernier camp n’a fait qu’une seule liaison, à la fin de l’été qui suivit son implantation. Peu d’informations ont filtré à son sujet.

    Alors que, isolée dans une grotte de montagnes avec sa mère, la petite Cathy faisait ses premiers pas sous les regards bienveillants des griffons, elle ignorait qu’elle était la première humaine née sur Lone.

    La première des « natifs ».

    Chapitre 1

    Placé devant le fait accomplis, le commandant Kearney, désormais seulement « Alex », avait l’impression que tout lui échappait.

    Non pas qu’il aurait souhaité un contrôle absolu, loin de là, mais au moins que le cap soit maintenu.

    Depuis qu’il avait choisi délibérément de se retirer de la direction de la colonie en donnant la possibilité à la communauté d’élire leurs représentants, il ne s’occupait plus que du camp de Moana.

    Dans ce camp ou ils étaient peu nombreux, ils se réunissaient tous chaque soir pour discuter librement et organiser l’avenir et les tâches à accomplir.

    Malgré tout, il restait le commandant et même s’il refusait farouchement de le reconnaître, son avis comptait encore beaucoup. Il n’était pas rare que les gens se tournent vers lui lorsqu’il y avait une décision à prendre. Avec une certaine lassitude, il s’y était habitué.

    Et voila que son ami, le biologiste marin Henry Talbot, l’informait qu’avec une amie, ils avaient pris contact avec une forme d’intelligence extraterrestre. Forme curieusement très proche de celle qui avait manqué de peu de les tuer tous les deux quelques années plus tôt au cours d’un voyage d’exploration beaucoup plus à l’Ouest.

    Non content d’avoir établi un contact, les deux colons entretenaient depuis plusieurs jours des relations ou ils apprenaient un mode de communication commun.

    Alex connaissait bien l’enthousiasme d’Henry pour les nouvelles formes de vie, ainsi que sa capacité surnaturelle à s’affranchir de la plus élémentaire prudence dès qu’il en avait l’occasion. La présence de Colette le rassurait toutefois un peu. Il se souvenait de l’opératrice spécialisée dans les senseurs longue portée de l’astronef. Son professionnalisme n’avait jamais fait les frais de son éternelle bonne humeur. Cette fille avait les pieds sur Terre et elle était en mesure de se concentrer dans les pires moments pour permettre de déceler, parmi les milliards d’obstacles sur une trajectoire, ceux qui représentaient un danger mortel.

    La présence d’une forme de vie comme celle du calmar Géant, une créature capable de les tuer sur un caprice, était ce qu’il redoutait depuis qu’ils étaient venu vivre au bord de l’océan.

    Il avait naïvement pensé que l’estuaire et la large plage de sable ne serait pas un endroit propice pour ce genre de créature, surtout de la taille annoncée par son ami.

    Il s’était bien planté !

    Alex et Thierry poursuivirent leur discussion pendant le repas du soir pris en commun que le camp fit autour du traditionnel feu de camp. Rejoints par Nadia et Hau, la petite se blottit comme elle en avait pris l’habitude sur ses genoux alors qu’il passait machinalement la main dans ses cheveux si blonds. Nadia se chargea de ramener aux deux hommes plongés dans leur conversation de quoi les nourrir et elle en profita pour écouter curieusement ce qui se disait sur le calmar dont elle avait entendu parler dans le camp.

    Callie, un peu perdue depuis qu’elle avait laissé Abel derrière elle à New Hope, dodelinaient avec son ventre proéminent à la suite avec ses deux garçons. Tous les deux étaient si excités devant leur nouvel environnement et la découverte de nouveaux compagnons de jeux, qu’ils semblaient bien décidés à passer la nuit à courir partout et se rouler dans le sable.

    Si les autres colons écoutèrent ce qu’ils se disaient, personne n’intervint directement et chacun regagna peu à peu sa hutte pour coucher les enfants

    Peu à peu, les conversations se firent plus basses, les paroles s’espacèrent, et le sommeil et la fatigue semblèrent passer sur Moana comme une couverture qu’on aurait tirée. Nadia et Callie, chacune avec un enfant dans les bras, prirent le chemin de leurs lits.

    Alex et Thierry poursuivirent jusque tard dans la nuit.

    Les yeux perdus sur les braises du feu qui s’éteignait doucement, cerné de ses grosses pierres noircies au cours de toutes ces soirées depuis qu’ils s’étaient installés ici, les deux amis achevèrent leurs explications assis au bord de la terrasse du domicile d’Alex, ce dernier narrant leur dernier passage à New Hope.

    Tout d’abord en colère après le biologiste qu’il savait peu prudent, Alex avait pris la peine de l’écouter.

    La rencontre imprévue de Colette avec le calmar avait tout d’abord créé une véritable panique dans le camp.

    Thierry lui-même avait retrouvé son fusil d’assaut dans le fond de sa hutte au milieu du bazar dans lequel il vivait. Cela fit sourire Alex qui se souvenait combien il haïssait les armes.

    Alors qu’ils allaient reprendre la battue le long des berges le lendemain de l’accident, Colette, transie mais indemne, avait émergé du bois. Une fois réchauffée, elle leur avait raconté sa rencontre.

    Ne sachant trop quoi faire, ils avaient donc commencé par s’armer. Puis, une fois rassemblés, ils durent prendre une décision sur la suite de la conduite à tenir.

    Se fut Colette qui s’opposa farouchement à une expédition. Elle n’eut, évidement, aucun mal à convaincre Henry. Il fallut beaucoup plus de temps pour faire entendre raison aux autres, et surtout à Jim.

    Au final, la décision fut prise que quelqu’un, Thierry, forcément, accompagnerait Colette pour retourner voir la créature. Une équipe lourdement armée resterait à proximité, sans se faire voir, prête à agir au moindre cri.

    Munis de bâtons pour franchir le bras d’eau en sondant pour éviter les pièges cette fois, ils rejoignirent le petit ilot ou elle avait fait la rencontre.

    Au début, ils crurent qu’elle ne viendrait pas. Elle ne semblait pas là.

    C’était sans compter l’étonnant mimétisme dont ces créatures étaient capables. Se fondant sur le sol, ce qu’ils prenaient pour le bord de l’eau s’avéra être le calmar géant. Déjà, des bras énormes et puissant glissaient autour d’eux, comme des serpents glissant sur le sol. Des yeux gigantesques et étranges leur renvoyaient leur image déformée.

    Henry reconnu en riant que le drame avait été évité de justesse. Il aurait volontiers hurlé, et déclenché l’intervention de l’équipe de secours, si l’air ne lui avait pas manqué, paralysé par la peur. Ses sphincters l’avaient trahi et il avait réalisé, en sentant un liquide chaud sur sa cuisse parcourue de tremblement, qu’il venait de se pisser dessus.

    Seule Colette était au courant. Généreuse, elle avait juré de ne pas trahir ce secret.

    Elle lui avait expliqué, avant la rencontre, comment elle était parvenue à communiquer avec des gestes.

    Aussi, ils reprirent là où elle était restée pour commencer : « moi gentil », « pas manger moi », « ami ? »…

    La pigmentation de la peau de la créature en disait également beaucoup sur son état de pensée. Elle émettait des séries de couleurs en même temps qu’elle tentait d’esquisser des gestes proches de ceux de ses interlocuteurs.

    Depuis, leur lexique s’était bien étoffé mais il restait beaucoup de chemin à faire avant de pouvoir espérer tenir une véritable conversation.

    Henry et son assistante étaient enthousiastes devant le travail réalisé et tout ce qui restait à accomplir.

    Déjà, fruit de leur collaboration, la créature avait retrouvé pour eux le corps sans vie, et un peu dévoré, de Padma, coincé dans le piège qui l’avait attrapé et commencé à digérer.

    Il avait été enterré à côté de celui d’Arthur à flanc de colline, face à l’océan. Le deuil de Colette avait été bref tant la créature monopolisait son attention. Dans le village, ils étaient plusieurs à lui en vouloir de ne pas sembler plus affectée.

    Henry était conscient du problème mais il avait trop besoin de la jeune femme pour le moment. Elle était son sauf conduit auprès du calmar géant. Colette y pensait pourtant, lorsque rien n’occupait ses pensées, ce qui jusque là avait rarement été le cas.

    La créature ne pouvant prononcer le moindre son, ils n’étaient pas parvenus à lui donner un nom, masculin ou féminin. Pout le moment, ils l’appelaient Un.

    Il ressortait de leurs échanges qu’Un n’était pas le seul représentant de son espèce. Ils étaient très nombreux, mais ces céphalopodes pélagiques (de surface), avaient des territoires assez vastes compte tenu de leur taille et leur besoin alimentaires en proportion.

    L’estuaire était le territoire d’Un. Il accordait le droit de passage mais il valait mieux s’abstenir d’y pécher ou chasser.

    Rassuré, d’une certaine manière, Alex accepta l’idée d’une tentative de communication.

    Après tout, le premier contact était déjà fait et personne ne s’était fait dévorer.

    Alors que la nuit était tombée, Alex raconta leur visite à New Hope et leur départ qui ressemblait étrangement à une fuite de son point de vue.

    Il était inquiet pour la période à venir et estimait que Scarlett jouait un jeu dangereux. Il regrettait publiquement d’y être passé sans que les plus « exaltés » n’aient vraiment eu le temps de l’oublier un peu. Il préférait garder ses doutes pour lui. Il ne pouvait s’empêcher de les soupçonner de continuer à médire sur son compte et celui de ses proches, entretenir, voire envenimer, leur rancœur qui les liait.

    Selon Thierry, l’ambitieuse administratrice n’avait jamais fait illusion à ses yeux. Il ne regrettait pas leur départ pour Moana et estimaient qu’ils étaient bien à cette distance de New Hope.

    Ils se séparèrent sur ces paroles, Alex gardant pour lui que la distance lui semblait encore trop faible pour être hors de portée de cette folle et de ceux qui la suivaient.

    Il avait toujours été convaincu que la décision d’organiser des élections à New Hope était ce qu’il fallait faire. De toute façon, à terme, c’était un engagement qui faisait partie du plan initial pondu par la Terre pour ses missions de colonisation. Maintenant qu’il voyait ce dont était capable Scarlett, il était évident que s’il avait attendu plus longtemps, le clivage aurait sans aucun doute été pire lorsqu’il n’aurait plus eu le choix. Il se serait sans doute retrouvé à devoir faire le choix entre une dictature menée par lui, réglant par la force le sort de Scarlett et consorts, ou laisser le pouvoir sous la contrainte, entrainant des conséquences sur ses proches.

    Peut-être y aurait-il eu une révolution s’il s’était accroché à sa place.

    Pourtant, pour la première fois depuis longtemps, il réalisait qu’il risquait fort de devoir reprendre la main et siffler la fin de la « récréation ». Elle avait beau avoir été élue par la population de New Hope, ses décisions dépassaient largement le cadre de ce qu’un représentant pouvait imposer à ses administrés. Peu à peu, elle grignotait le pouvoir pour imposer toujours plus sa propre volonté.

    Redevenir le commandant, diriger à nouveau la colonie… il ne pourrait le faire que depuis le quartier général de New Hope.

    Quitter Moana était hors de question, il restait tant de choses à faire encore ici.

    Pas maintenant.

    Lorsqu’il entra dans la hutte, Hau dormait paisiblement en boule sur son lit, au milieu de ses draps en bataille. Il lui recouvrit doucement les épaules et s’installa dans le sien, un peu plus loin.

    Nadia y dormait déjà, épuisée par la route, les mains ouvertes au-dessus de la tête autour de l’oreiller. Elle se lova dans son dos en grognant dès qu’il fut sous les draps. Il sentait son souffle régulier dans son dos.

    Était-ce réellement la question de quitter Moana qui lui posait un problème ?

    En proie à ses réflexions, il lui fallut de longues minutes pour

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