Vous êtes sur la page 1sur 2

Le storytelling est-il

vraiment efficace ?
■ De nouvelles études et recherches l’affirment,
investigations à l’appui : raconter des histoires est
beaucoup plus efficace que les techniques de
communication traditionnelles. A condition de…

Par Stéphane Dangel


http://storytelling.over-blog.fr

■ Une histoire, mais encore… ■ Emotion contre raison

L ‘utilisateur d’une célèbre marque de déodorant passe


sa vie en revue, en se souvenant du temps où un
geyser de sueur jaillissait de dessous ses aisselles,
P our les tenants du storytelling, c’est la priorité donnée
à « l’émotion » au détriment de « la raison » utilisée
par la publicité traditionnelle, qui en explique le succès.
aspergeant généreusement son entourage.
L’histoire se termine sur une plage, avec le mouvement Une étude IPA dataMINE publiée fin 2008 leur donne des
de recul de sa petite amie lorsqu’il lève le bras pour arguments : elle montre en effet que les campagnes
l’étreindre. émotionnelles ont bel et bien un score d’impact plus
Précaution inutile, puisque maintenant, c’est un fervent important que les campagnes traditionnelles, rationnelles
adepte du déodorant… (fondées sur les atouts du produit).
Et dans un élan pavlovien, stimulé irrésistiblement par
cette histoire, le consommateur se déscotche de sa télé
pour dévaliser les linéaires de déodorant des
supermarchés, suivi par une foule en délire.

Evidemment non. Pas plus qu’une autre technique de


communication, le storytelling n’est à efficacité garantie.

Par contre, Jack Daniel’s a évalué à 6-7 % la croissance


de son chiffre d’affaires attribuable à sa campagne de
publicité axée storytelling.
Jack Daniel’s avait découvert que sa marque était
associée, dans la culture US, avec l’esprit de liberté de
l’ouest américain, et l’image de rebelle attachée à la
conquête de ce territoire.
La publicité a collé à cette histoire en montrant un
Mieux : elles sont encore plus impactantes en période de
homme marchant dans la rue avec un étui à guitare et
crise qu’en période faste.
cette accroche : « M. Jack Daniel n’était pas un saint,
mais il a créé quelque chose comme une religion ».
Cette étude se place dans la lignée des recherches en
neurosciences les plus récentes.
Des consommateurs branchés sur électrodes, des
mesures de courant électrique dans la peau,
l’enregistrement des battements du cœur… La scène
n’est pas tirée d’un (mauvais) film de science-fiction mais
des pratiques de cette nouvelle discipline qu’on appelle
le neuromarketing.
C’est alors l’intensité de l’émotion ressentie qui est
mesurée et son caractère positif ou négatif.

Et ce n’est pas tout : en complément de ces tests


biologiques, le neuromarketing va également chercher à
identifier les métaphores les plus profondément enfouies
Jack Daniel’s, depuis 1866 dans l’esprit du consommateur.
L’idée de base est que ce sont les consommateurs qui du volume du budget alloué à la campagne publicitaire.
co-créent les histoires racontées par la publicité, en
fonction de leur propre schéma narratif préexistant. C’est l’émotion (l’engagement) et son intensité (avec son
Par exemple, le mot « container / conteneur » est une corollaire, l’adhésion) qui sont déterminants.
métaphore qui exprime l’image de la protection.
Alors, quand Michelin raconte dans une publicité l’histoire Certes, mais comment évaluer précisément ces
d’un bébé réfugié dans un pneu alors qu’il est entouré effets ?
d’animaux sauvages…
Parmi d’autres, le pré-test Link, de Millward Brown, veut
■ Toutes les histoires sont-elles bonnes à apporter une réponse.
prendre ?

U ne autre étude conduite par Advertising Research


Foundation et l’American Association of Advertising
Agencies a fait appel à 14 instituts de recherché leaders
pour analyser plus d’une trentaine d’annonces et spots
publicitaires, dans différents secteurs d’activité.
Elle confirme l’efficacité des publicités narratives, mais
sous certaines conditions.

Ainsi, quand l’histoire racontée manque de suspense,


elle ne fonctionne pas. C’est le cas, par exemple,
d’United Airlines racontant l’histoire d’un businessman
qui rentre chez lui après un vol sur la compagnie,
heureux, mais banal. C’est-à-dire qu’un enchaînement de
faits ne suffit pas pour former une histoire, bonne qui plus
Si la solution a toujours intégré des paramètres
est.
émotionnels, la dernière version a ajouté une dose de
storytelling, présentée comme étant une nouvelle façon
Les publicités distrayantes, qui exigent trop de « travail »
de comprendre l’impact émotionnel des annonces et des
d’interprétation de la part du consommateur, ne seront
spots.
pas plus opérantes. Comme ce spot pour Nissan, dans
De nouvelles questions du test type portant sur
lequel un couple semble parler sexe, alors qu’en fait il
« l’histoire », sa « crédibilité », sa façon d’être ou non
parle de la voiture.
« parlante » ont été incluses.
Les consommateurs ne sont pas forcément des
spécialistes en sémiologie. Trop de complexité nuit à
l’efficacité de l’histoire.

Tout comme la passivité de l’auditoire : c’est lorsqu’il est


impliqué dans l’histoire que cette dernière est la plus
efficace. Modèle du genre : la fameuse publicité
« Whassup ! » de Budweiser.

Pour fonctionner, l’histoire devra également être


fortement en adéquation avec la marque.
Et pour cela, un maître-mot : l’authenticité.
Ici, c’est l’étude Publicité et société (Labo) de TNS-
Sofres et Australie, conduite en 2008, qui apporte des
enseignements.

Différents niveaux d’émotions, positives et négatives,


associées à chaque partie de l’histoire racontée sont
analysés.

A l’arrivée, pas de certitudes, mais un faisceau d’indices


concordants.
On a déjà formulé des jugements avec bien moins que
Ainsi, si les consommateurs demandent des récits aux cela… ■
marques, 50 % d’entre eux croient de moins en moins
aux discours de ces dernières, et plus de 50 % estiment
qu’elles les prennent pour des simplets.

■ Quelle efficacité véritable ?

L ‘efficacité des publicités narratives ne tient pas aux


canons traditionnels de la sacro-sainte répétition et Feedback bienvenu : dangelsteph(at)yahoo.fr

Vous aimerez peut-être aussi