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Autobiographie du nant

Pablo Neruda

Sans nom. Survivant dans le mutisme de lil. Bris Par la stridence de la vie, je suis debout, Comme un peuplier austral. Pour linstant, je me dresse contre les falaises du nant. Evoluant comme une pierre sans patrie. Maudit. Envelopp dinsultes et prt pardonner le bruit De la pluie tombant sur leau. La terre tremble sous mes pieds dargile. Je bouge mes bras. Je respire. Il est temps de construire des ponts, des sentiers, Des passages. Tu nes nulle part. Nous devons reconstruire ces murs. Le brouillard, comme une vague obscure nous emporte. Aucun mot. Aucun visage pour annoncer le jour. Et ta colre froce sous une comte de jade. Rues absentes. Odeur de pole qui suinte dans ta mmoire denfant. Les arbres sont briss dans une fort innommable. Tu chantes donc, le rien. Le squelette de la feuille. Le silence. Les maisons sont vides comme un gant endormi. Il faut admettre que la vie nest pas partout souveraine. Btir un mur en papier comme on construit une maison. Seule la parole est importante. Seul le geste est ncessaire. La paupire ouverte. La main tendue. Lespoir. La joie est un dilemme lorsque nous dcouvrons le jour. Le criminel sen va. Son ombre passe, ancre en nous, amoindrie, inaccessible. Sur les ruines du nant, lherbe pousse. Et se faufile travers nos yeux, Lombre. Cest la fin. Egorgs, les hommes meurent encore. La ville disparat. Nous devrons nous souvenir. Je reviens vers toi, travers cette dchirure sans fin. Ton visage sourit lorsque je touche ces cendres. Dans la plaie de ta voix disparat lorage. Sur ces murs fissurs nous btirons une ville. Patricio Armando Snchez, (Chili, 1959). Pote rsidant dans lHrault, France.

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