SENTIMENS DES CHINOIS
Sur Dieu & les Eiprits (*).
Tone 4. premiere Partie 5 page 170s
1S
ON peut douter bord & tes Chis
6 Teconnoiflent , ou ont reconnu
des fubftances ff irituelles. Mais aprés y
avoir bien penft, je juge quouis quel
(1) Ges sédexons de Leta Cont sndes ams
oa Terwe tM. Romande La tice y
Longtardly qu
cit Pun & Vantre pour jer eatee acculatic
en fates oh we
Lonel al ita
dase Cues pda tle poem ape
‘ah fertiment de la plupast de fos confivces,
pe Lersnirz, 333
qu'ils n’sient pent-étre point reconnu
ces fubttances comme féparées, 8¢ tout
Mait hors de fa matiere. Ul s'y auroit
point de mal en cela Al'égard des efprits
eréés, car je panche moi-méme a croire
gue les Anges ont des corps, ce quia
5 sal le lentiment de pluGeors Peres
de VEglife. Je fais davis auffi que lame
nifonnable n’eft jamais dépouillée ea
tiérement de tout corps. Mais & Pégard
de Diew, il fe peut que le fentiment
de quelques Chinois a6té de Ini donner
aufii un corps, de confidérer Dieu
comme Fame du monde, & de le
joindre & la matiere , comme ont fait
les anciens Philofophes de la Grece 8
de T'Afie, Cependant ,-en faifant voir
queles plus anciens Auteursde laChine
attribuent au Zy , ou premier principe,
la produdion m&me du ki ou de la
matiere , on n’a point befoin de les
reprondte, 8¢ il fuflt de les expliquer,
On-pourra perfuader plus aifément &
ears Difciples que Dieu eft Inzeligen=
tia fupramundana, & au-deffus de fa334 EsPpritr
matiere, Ainfi pour juger que les Chi
nois reconnoiffent les fubltances {pie
ituelles, on doit fur-tout confidérer,
(pege 171), leur fy ow regle,, qui et
Te premier auteur de la raifon des auties
chofes, Bc que je crois répondre A notre
divinité, Or il eft impofhible d’entendre
cela Pane chofe purement paffive ,
brute & indififrente 4 tout, & fe
conféquent fans regle, comme ett la
matiere. La regle, par exemple, ne
vient pas de la cire’, mais de celui qui
Ja forme. Leurs efprits auffi, quils at-
tribuent aux élémens, aux fleuves aux
montagnes , font ou la puiffance de
Dieu qui y paroit, ou peut-étre, aa
fentiment de quelques-uns d’entr’eux,
des fubftances fpirituelles particulieres,
doudes de fa force d’agir 8 de quelque
connoiffance , quoiquiils leur attrbuent
des corps fubtls & aériens, comme les
antiens Philofophes & les Peres ea
donnoient aux Génies ou aux Anges
Creft pourquoi Jes Chinois reffemblent
Nees Chrésens, quicroyoientque cer
tains Anges gonvernent les élémens &
Jes autres grands.corps; ce qui feroit
une erreur apparemment , mais qui ne
fenyerferoit point le Chrifticnifme,
De Lersnirz. 335
Dans le regne des Scolatques on wa
point condamné ceux qui croyoient,
avec Ariftote, que certaines Intelliz
gences gouvernoient les {pheres célef-
tts, Et ceux qui parmi les Chinois
Goient que leurs ancdtres & leurs
grands hommes font parmi ces Eiprits,
Sapprochent affez de expreffion de
Notre-Seigneur » qui infinue que les
Bienheureux doivent etre femblables
aux Anges de Dieu: Il eft donc bon de
confidérer que.ceux qui donnent des
corps aux Génies ou Anges, ae nient
point-pour cela les fubtances {piri-
tuelles créées; car ils accordent. des
ames raifonnables & ces Génies doués
ée comps, comme les hommes en ont,
nais des ames plus parfaites, comme
leurs corps font plus parfaits aufli. Ainfi
Je Pere Longobardi,, & le Pere Sabba-
tini, cité par le premier, ine doivent
int conelure , de ce quill paroit que
Te Caines dosment dS catpe os
Efprit y quills ne reconnoifient point
€e fubftances {pirituelies,
$. IL
_ Comite la Chine eft un grand Em,
Tite, qhi ne cede point en étendue336 Esprit
4 TEurope‘cultivée , & la furpaffe par
ie nombre des habilans, && en bore
police 8¢ comme ily a dans la Chi
tne morale extérieure admirabl
tains égards , jointe 4 une doStrine phi-
Tofophique, ou bien A une Théologie
naturelle , vénérable par fon antiquité,
Stablic 8 autorifée depuis trois mille
ans ou environ , long-temps avant la
Philofophie des Grecs , laquelle eft
pourtant la premiere dont le refte de
la terre ait des Ouvrages , nos faints
Livres toujours exceptés ; ce feroit une
grande imprudence & préfomption &
Rows autres nouveanx venus apres eux
& fortis’ peine de la barbarie , de vou-
oir condamner une doétrine fi anciea-
ne , parce qu’elle ne paroit point s'ac-
corder d’zbord-avec nos notions {co-
+ ordnsre. Et Gallen ily
a point d'apparence qu’on puitfe
truire cette doftrine fans une grande
révolution, Ainfi il eft raifonnable de
voir fi on ne pourra pas {ui donner un
hon fens.
§. 11k
Je crains que le-Pere Longobardi.
déja prévenu contre la dogtrine chs
noife,
pe Lerewyirz, 337
noife, n’ait été ébloui tui meme par les
difcours de certains Mandarins athées,
qui fe font mogqués de ceux qui vour
Ioient tirer des conféquences dela doc«
trine de leurs ancétres , pour établir la
Divinité, Iz Providence & le refte de
kk Religion naturelle. Il ne faut point
fe fier aux interprétations de ces gens«
B, qui font manifettement forckes ,
on plus qu’ un Athde d'Europe , qi
selforceroit de prouver par dee pall
5 ramaiiés mal & propos de Salomon,
E Peutes Anteurs ferés, quil ny
apoint de récompenfe ni de ‘chatiment
aprts cette vie. Er fi par malheur Aj
théifme prévaloit en Europe, & y de-
venoit la doGrine commune des plus
favans Lettrés, comme ily a eu un
temps ot PAverroitime prévalut quali
pirmi les Prilofophes de Via; les
ifionnaires envoyés en Europe pat
les Sages dela Chine , & étndiant nos
anciens Livres, auroient raifon de sop
pe, au torrent des fentimens de ces
és, & de fe moquer de leurs moe
queries...
Iv.
Le Pere de Sainte-Marie rapporte,
Tone I, P