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NOS GRECS ET LEURS MODERNES LES STRATEGIES CONTEMPORAINES D'APPROPRIATION DE. U’ANTIQUITE ‘ouvRAGe HuRLit avte LE concouns EDITIONS DU SEUIL 27, rue Jacob, Paris VIF ce vue a ere runt CHEMINS DE. PENSEE URoeE PAR TERRY MARCHAISSE «© tormons bo Seen, MAL ‘Avertissement Les textes qu'on valire ont été réunis&Toceasion du clloque sur Les Siratéges contemporaines dappropriaion de TAnigulé, qui ‘est tenu la Sorbonne, du 10 au 13 octobre 1950, Tinitative da (College international de philosophic, avec Veppui du CNRS, le concours du minstere de {a Culture et dels Direction du livre, da British Council, du Goethe Institut, du rectorat de Paris et de TTunversté de Paris IV. Que oes astociations, institutions, organisa tions, sans lesquelles rien ne se serait fait, cient ici remerciees “Toutes les interventions prononcées n'ont pas ete eaitées. La cause. en est souvent Te disposi méme des séances, od les [apeenicreg orerutrieperenkr eee ora kes diférends et de relancet gon en pratiquant la verta épistémo- logique de méshancet le happenings fixe difiiement. Que Luc FFery, Frangois Hart, Nicole Loraux, Robert James Hankinson, Bruno Pinchard, Heinz Wismann, Glenn Most, Patrice Loraux, ‘Paolo Fabbri, Franco Volpi, Carlo Natali, Jean-Luc Pei, Jonathan ‘Barnes, Stanislas Breton, dans Vordre dentrée en seéne, qui ont ‘tous parle, révelé ot transform le champ des forces en presence, mais sans laser de trace écrite, wouvent ici Texpression de ma, Les textes pubis n'ont pas toujours téprononcés, ou prononcts A cette occasion, quil sagsse de compléments qui mont para néeessires (Celle 1a conference de Jacques Brunschwig, fate en 1976 devant la Socié frangaise de philosophic, et ‘qu, était ‘proposce comme toile de fond & la réflexion sur « philosophie et histoire dela philosophie »), de résquiibrages thematiques, ou de remargues faites, comme celles de Giles Delewze, seulement 2 la Teeture ds textes rece Enfin, le colloque s'est msi dans un séminaire du College 1 international de philosophic, en 1989 et 1990, dont certains résultats ‘ont été publics dans le premier numéro de Rue Descartes (x1, Des Grecs, ‘Albin Michel, avril 1991): cesta qu'eurent lew les premigres confrontations entre histoire et philosophic (Nicole et Patrice Loraux), philosophie analytique et pilosophie herméneu- tigue (Jonathan Barnes et Monique Dissaut, et les_premicres grandes traversdes (Enrico Bert, « Les stratégies contemporaines appropriation d'Aristote»), Ces problématiques, et leurs repré- Sentans, étaient plus que jamais presents réetlement ou non, dans Je cllogue qu'ls ont contibué a bat. BC. Présentation Lacolombe tr, longue, dans son bre sol elle feod Tai dont ele sent a i= tincs, pout simapner qu'elle reusi- ral bin mieux encore due Te vide, Kas, redaction a Cute fe ao pare ‘Nous sommes a main de Rodin, avec ses pis, ses ongles de sculpteur, le caractére rauque propre au vivant, méme Torsqu'un'moulage le fige en position. Et nous nous empa- ons, non sans respect, non sans tendresse, d'un réve de pierre, un morceau de comps de toute beauté, auquel nous lnventons un jour ou autre une téte et des membres qui seront a jamais d'une autre veine. Le vif, ou presque, saisit ‘son mort, le complete, le peaufine : faux et usage de faux, est ainsi que nous novs approprions I’Antiquté. L’Anti- 4quité, ou plutdt les Antiquités, pour nous servir Pour déniaiser définitivement, si faire se peut, tous les positivismes, rien de plus efficace que de procéder a la comparaison des artefacts, montrer a quelle convenance nous les fabriquons. Qui s'approprie quoi et comment, ou : quels contemporains, quelles antiquités, et selon quellesstratégies? Le terme de stratégie, déjaluiaméme approprié de maniexe par trop marquée, mérte explication. I s'agit d'abord, tres classiquement, tr herméneutiquement, de désigner la'mise en place horizons d'intellgiblité. L'injonction la plus géné- rale, laquelle toutes es contributions épondent, est en effet quelque chose comme : expliitez votre horizon d'interpréta- tion, qu'on comprenne comment, & quel hoc, vous confection 9 aesexrarion rez votre objet. Expliquez-nous, expliquee-vous, vos intéréts dde connaissance. Aideznous i passer derritre vous, en ‘coulisses, pour qu'on voie comment vous préparez vos tours, torsions, distorsions, détournements, bref, vos manitres d'étre-dans. C'est par exemple, ov exemplairement, ce ‘qu Umberto Eco et Paul Ricaur, prenant recul sur leur euvre et leur culture, ont, en toute simplicté et en toute grandeur, écidé de faire pour la Podtique PAristote Mais cest aussi en face & face quils le firent, sous la présidence non formelle de Jacques Derrida, entourés de Paolo Fabbri et de Michel Deguy : ces journées, et ce livre, voudraient mettre en place, au lieu de simples autoréflexions, (04, pire, autocritiques,'ébauche d'un disposi favorable aux illuminations, de ceux qui parlent comme de ceux qui sent, le Aispositif de Fagan. Liagon, vieux comme le monde, le monde hhomérique en tout cas, est le résultat d'un agein, dune action de pousser », de « mener », du bétail ou des hommes, c'est ‘un « Fassemblement », une « assemblée ». Mais le développe- ‘meat grec du mot, nous dit Chantraine,differe sensiblement de celui du latin ago, agere, ou du sanserit, parce qu'il est proche de, et contaminé par, un autre verbe grec, égeomai, ui ala propriété de dite simultanément deux manires d' fen tte ! « marcher devant », et « penser que »,« dire davis due ». Sibien que lagon grec fint par désigner les réunions ct les concours qui ont lieu & Foccasion d'un « jeu », d'un ‘combat », d'un « proces », ou d'une « représentation théa- trale »; quatre modalités possibles de 'antagonisme, donc, centre concurrents, entre lutteurs, entre plaideurs, entre acteurs, qui tous, conformément au sens que prend le terme Gagonia & partir de Démosthene et d'Aristote, peuvent soutfrird’ « angoisse », et méme, via la latine agonia, etre & ’« agonie ». L'ag6n est a pour relayer Pauto-interprétation Sily 2 encore de illusion & vouloir sortr de son horizon, si toute la bonne volonté du monde ne permet pas de passer derrire soi, alors cette stratégie du dispositif agonistique, de la confrontation entre topes, tropes Whorizon et tropes 10 reesecraTon qui, de suteoit, « ne sont ni intéessantes ni fécondes® », J. Barnes reproche entre autres & Heidegger avoir érit que, dans allgorie dela caverne, "accompli un ‘changement dans essence de la vite» (ctép. 186). Plus ‘exactement, il suppose, patelin, que Heidegger n'a po vouloir dire cela (de méme qu'Arstote dist @ propos éHéraclite {que « ce qu'on it, i n'est pas toujours nécesaire qu'on le pense* »), car, soutient J. Barnes, « une telle constatation Seat absurde : fes essences ne changent pas » (p. 176, souligné par moi). Etonaant argument en verte, car d’ou J. Barnes sail que ls essences ne changent pas, sce n'est 4 Plain Iui-méme, slors que Heidegger se situe de fagon évidente hors du plaionisme pour le ertiquer ? Que J. Barnes soit platonicien et considere comme « absurde » une phrase 4ui contredit un des axiomes du platonisme, c'est son droit (Groette rserve pres qu'il devrait die que la phrase est fausse, non quiele est absurde). Mais que Heidegger ne soit pas Platoncien et consider que estence (Gu reste, Wesen, qui ‘est pasla méme chose que lousia platonicienne) peut mur, cela devrait tre ausi son droit, & moins de considérer que le platonisme es la philosophic tout court. lest vrai qu'il sagit {ci dinterpréter laton, et non quelqu'un autre. Mais faut: étre platonicien pour interpréterPlaton ? On peut douter que ce soit possible; ear, pour éte platonicien, il faut d'abord lire Piaton, et non Tinverse, Et J. Barnes lueméme ne pense aucun bien — et ila raison — de ce genre d'interprétation Gircalaire et immanente qui essai de comprendre Platon ex Plaione. Ce sont « les savants paresscux >, dit un peu plus Join, qui prisent« le dicton de Trendelenburg * Interpreter 5.1. Bares, « Heidegger spldlogue», Revue de meétaphynigue et de ‘morale, 199, p90. Que Tonathan Barnes vee en me pardonner je ‘Tatpss teen séance ce ete gi vet de pra ot que joe connels ior, Cee coset eee non de veron ee, fue fe a soumes. (6 Meaphysique, C3, 1005 b 25, a rena auwenove istote ex Ariuotle™ » (p. 188). J. Bares sest pas un Savant parescux et ne peut done avoir voulu opposer & Heidegger, interprétant Paton de son propre point de vue ‘extérieur, la seule autorté de Platon Iuiméme. En vérité, J. Bares iterprte aussi Paton de son prope point de vue, ‘Qui est celui dun platonicien logique postrégéen et post fusselen, Cest pourquoi J. Bares écrit un peu plus Toin (p. 198) gus le rapport ate les quatre emplos du verbe éue » (ux ois emplois russelliens il ajoute I «elma ‘véritaif») «n'est jamais thématise par Paton, bien que, dans le Sophist, il semble s‘approcher quelque peu de cette problématigue » (p. 193-194, est moi qui soulgne). Ces ce ‘ue jappelas plus haut la condescendance. ‘A’la fin de son article, J. Bares covrige Heidegger en tentant expose, & propos de la doetrineplatonicienne dela vérité, « ce que Heidegger auait di dire »(p. 190). I aurait 4, explique Barnes, distinguer entre I « empioi objectif» et T" cemploi proposiionnel » de Tadjeci « vai ». Dans le second cas, « le terme * vrai” peut sinterpréter, du point de ‘ue syntaxigue, comme foncteur propositionnel ». Dans le Premier, celui de Temploi « object», «le terme * vrai” Sgn plus ou moins "réel"» (p. 191). Je m’aréte I pour ddemander : que sigife «object»? Que signe «fonction propositionnele » Que signife « réel »? On maccordera Sans douteaisément que ces expressions sot intraduisiles en rec ancien. Ce ne sont done pas des concepts platoniciens ls he peuvent donc entrer dans Ténoncé de prinipia dont la philosophic platonciene tert des eonséquences. Ceres i fst wral_que Platon, plus que les présocratiques, « Seat pproché » de ces concepts modernes. Mais c'est exactement Ia thise que soutent Heidegger dans Tessa incriminé: la mutation dans essence de la verité, cst précisément'émer- sence d'un concept de vrit propostionnelle (qu ne trowvera definition eanonigue qu’avee Aristo) et Poublicomélatit = sousla forme dune subordination, d'une mise en twee — de ce que Heidegger tient pour une expérienee plus originelle 8 de la vérité, qui est la vérité ontologique. J. Bares ne croyait passi bien dire, dans le sens de Heidegger, en nommant cette vérité ontologique « objective », cest--dire deja mite pour la captation par un sujet et pour sa soumission au critére de la rectitude et de Vadéquation : la vérité objective est, en bonne terminologie, la véritételle qu'un sujet se représente qu'elle est. Or quiconque aborde les Grecs en cherchant chez eux (que ce soit avec la crainte ou dans Pespoir de les y trouver) des objets, des sujets (au sens dela subjectivté moderne), des fonctions propositionnelles (au sens de Frege) et dela ralité (au sens, méme sion I'2 oublig, de la realias de Suarez), commet ‘des anachronismes, intervient dans le texte qu interpréte avec des principes, des présuppositions, qui sont ceux de sa propre philosophic’ il fait done violence au texte interprété, dans la mesure oil ne le répete pas, ne peut pas le répéter, mais, comme le disait Kant, le «critique ». Mais alors, de quel droit reprocher & Heidegger d'exercer sur les textes une autre « violence », de type cette fois archaisant ? n voit & tout le moins que le débat est ici philosophique. La ‘valeur d'une interprétation ne se mesure pas au fait quelle est lituéralement fid2le ou non & un objet — le texte — qui se ‘dérobe, mais au fait que, comme exige justement J. Barnes, celle est ou non « intéressante » et « feconde ». On me dira ici que je subjectivise par trop Vhistoire de la philosophic, la livre A larbitraie des interpretations et ‘éconnais encore une fois le travail effectif de 'historien de la pphilosophie, dont 1a tiche est aussi et d'abord (Jacques Brunschwig en a donné d'admirables exemples) d'etablir des textes, de les traduire, de mettre en rapport leur forme avec le systéme linguistique “dans lequel ils sont rédigés et leur contenu avec Phisioire sociale, politique, économique de leur temps. Ty a Ia un travail nécessaire et passionnant, qui aboutit comme tout travail historique & des propositions vérifiables ou fasifiables, éventuellement corrigibles, dont la 2» sommation et la coordination donnent lieu a un progres vident dans notre connaissance des philosophies, en particu- lier anciennes. Mais je continue de penser que, s‘agissant de objet pilosophiquc (empl sas srpole patie fe oe: fe de la modernité), le discours métathéorique auquel rovour inévtalementFistorien dela philosophic excide 8 tun moment ou 2 un autre les limites de Ia vérifiabiité empirique. L'exemple le plus élémentaire, et par la le plus paradoxal, est celui de 'établissement méme du texte. Ily @ fei des rogles précises; par exemple :il faut préférer la lectio Aiffcilior. Mais qu'estce qui est difcilior sans. excéder ppourtant les limites de Timtelligbilite? Et qu'est-ce que Tintelligibiité? J. Bollack a bien montré qu'on a rejeté au xn siecle des textes jugés inintelligibles au nom d'une ‘conception idéologiquement orientée de I'ntelligibilité. Mais le refus de toute conjecture, Vidée que tout texte transmis a ‘une cohérence (qui n'est souvent plus celle du principe de contradiction) ne reflétentils pas une décision idéologique inverse, celle qui parie — peut-etre & tort — sur Vobscurite? Je prends un autre exemple, qui me tient coeur: « Le livre Kappa de la Métaphysique aAristote est inauthentique. » Cette phrase devrait relever de Thistoire, appuyée ici sur la philologie, et devrait étre verifiable ou falsifiable. Je la tiens| personnellement pour vraie et crois en avoir donné de bonnes faisons, Mais je n'ai encore convaincu personne & 100 % de cette véité. Je ne parle pas de ceux qui me disent : « Moi, je suis philosophe et ne mintéresse pas aux questions «'éru tion. » Mais ceuxa mémes qui, attentifs & mes arguments, me disent : « Oui, vous avez Sans doute raison », continuent Je plus souvent de citer imperturbablement le livre Kappa, comme sil était @Aristote, Et, de fait, je comprends ces demniens, méme si je les désapprouve. lis pensent — ily @ suffisamment d'indices en ce sens — que ce texte n'est pas de a main d’Aristote. Mais quel texte est dela main d’Aristote? peut done bien n'étre pas d'Aristote et néanmoins véhiculer 20 des idées et des arguments authentiquement aristotdiciens (comme c'est le cas, dans un autre domaine, de la Grande ‘Morale Je pense au contraire que le contenu du livre Kappa West aristotélicien ni dans sa lettre ni dans son esprit. On ‘conviendra done — et jen conviens moi-méme, bien que ce ne soit pas ici mon intérét —que le débat sur authenticité n'est centitrement décidable qu’a partir d'arguments philosophiques fet que le concept méme d’ « authenticité» se charge ict de ‘connotations philosophiques. Dans le sommaire de mon intervention, javais, outre la proposition précédente, proposé & la sagacité de Nauditoire, fn vue d'une élucidation de leur statut, une série de propos tions qui ressortissent toutes, d'une fagon ou d'une autre, & histoire de la philosophie : = Socrate dit, selon Platon, que Protagoras a dit que la vertu peut s'enseigner. ~ Aristote a soutenu une doctrine de Vanalogie de V'étre. = En affirmant que tout mobile suppose un moteur en acte, Arisote contrevient au principe dinertie, — Aristote est un géant de la pensée (Marx). = Aristote fut le porte-parole de Vidéologie de la classe esclavagiste en Gréce (Grande Encyclopédie sovistique, édi- tion de 1950) = Nietasche est le platonicien le plus débridé (Heidegger). (On conviendra aisément que plusicurs de ces propositions, sinon toutes, n'ont de sens et, par consequent, ne peuvent lever de prétention & la vérifiabilit, que par rapport a un contexte qui appelle Vinterprétation. De telles propositions prétendument historiques sont, de ce point de vue, homo- ‘énes aux propositions philosophiques auxquelles elles se réferent, du type :« L'etre n'est pas un genre », ou : « Late précéde Ia puissance », qui appellent d'abord la compréhen- sion et ne se prétent pas & des procédures de vérification, sie 31 n'est au terme d'une médiation peut-étre infnie et qui est en tout cas de nature philosophique. Sis propositions de histoire de la philosophie en tant que telles échappent pour une grande part & a vérifiabilité, on ppeut se demander ob réside le ertére de leur valiité IL y a quelques dizaines dannées, I'éeole structuraliste frangaise (Gueroult, Goldschmidt), qui fera sirement date dans histoire de histoire dela philosophie, avait proposé un tel critére, qui était la conformité 4" « organisation démons- trative » du discours philosophique telle qu'elle a été voule ppar auteur; autrement dit, il s'agissait de comprendre auteur comme il voulat lui-‘méme qu'on le comprt. Ainsi Gueroult demandaitil que, pour comprendre Descartes, on Sinformat d'abord de « la méthode prescite par Descartes pour comprendte sa philosophie ». Et Goldschmidt fixait ainsi son programme : « S'efforcer de comprendre les theses «une doctrine & la lumiére de sa propre méthode »,ains les theses de Platon & la lumiére de leur place dans la structure dialectique de chaque dialogue, telle qu'on peut Vétablir&la lumigre de 'excursus méthodologique de la Letre VII, sorte ‘exposé dintentions de la méthode platonicienne. Cette méthode d'exégise, si elle a eu le mérite de rappeler les interprétes & obligation d'envisager I eeuvre philosophique ‘comme un tout ott le mode d'enchainement des parties — ordre des raisons — est lui-méme significa, s'est heurtée, Slagissant du reste de certaines philosophies plutét que autres, a des dfficultés application souvent insurmont bles. La structure officielle de Teeuvre consttue-telle tow jours sa structure effective? L'auteur procéde-til toujours ‘comme i annonce quil le fera? Et od Tannonce de la méthode este le plus authentiquement sasisable? Dans les textes publiés, comme les Dialogues platoniciens, ou dans les textes marginaux, oi auteur prend Une certaine distance Par rapport son ceuvre ? Gueroult refuse de tenir compte des 2 Lettres de Descartes, parce que l'ordre des raisons ne s'y_ Ise pas reconnatre. Mats Goldschmist ert pouvoir Sap- puyer sur un texte de la Leme VII de Paton (texte dont Fruthentict a daleus été contest) pour y dételer a cet ‘ela méthode mise en eure das les Dialogs. Aw nom de ‘quelle présuppostion autre que philosophique teeter de Sereit es temoignages concemant le « non-ert » du plato: name? Le debat surTexistence et fe contenu des « doctrines non écites » de Platon (expression ext d'Arstote) devrait toumer autour Cune question de fat: Paton ail dans son enseignement oral profesé des doctrines diferentes dans a forme, mais aussi dans le fond — de celles quo Ton peut ‘degager de es Dialogues? Cestcequaffrment de nombreux temoinages que nous possédons, maces temoignages son is dignes de foi? La passion avec laquelle i est d&battu aujourd'hui de cette question, de part et autre dela Manche et de I’Atlantique (un auteur anglo-saxon qualifie de répu- {ant ~ en un sens, e cos, malheureusement asx proche Gi sens continental = fa thése qui altbue 8 Platon des doctrines non écrites), montre bien que ce débat philologico- historique est chargé dimplcationspilosophiques sur la valeur fespectve de oral et de ert et sur la fagon dont dot Se presenter un dscourspilosophique dine de ee nom. ‘Mais on me dira ici derechef : le temoignage de l’auteur, & supposer qe nous le possédions, nest pas le plus desis ov rméme le seul dec? Si, comme I ert Jacques Bronschvig (©. 9339), « histoire dela philosophie est exsentillement tne quéte sens per », stl ps tentant de consierer {ue auteur demeure en dot le detentcur legtime de sens Derdu et qu, des lr, la seule ambition de Vhistoren dot Ere de tentr de coincder,& parti des textes conserves, avec intention suppose du sens et —jajoutrsi, saisant dune intention ~ cu sens univoque? Time semble que les nits de ‘mains historien dela phlosophie, dont je ne suis pas, sont hantees pa ce que jappelerai le phantasme du tclephone, le souhat ets crant fa fois que auteur iene trancher mon 33 PIERRE AUBENOUE probleme herméneutique, « si je pouvais lui téléphoner » .B., p. §2). Leexemple de quelques grands penseurs contem- porains, dont il n’était pas trop difficile de se procurer le nu- méro de téléphone, laisse sceptique sur ce point. Lorsque Von demandait A Heidegger de trancher sur un point UL. Bherische Zelurg, 14 let 1842 (K. Mar Bure, I, Philosophie, op. itp. 21). “4. Maton, Protaras, 323284. Ce résumé repose sa une aalye que {feidonnée slur «Le contrat social: un mye moderae A Fancenne fophisique » Philosophie, n° 28, sutomne 190, p. 3263 ef p 4-8. 0 — ‘oveis Montes, QUELLE POLITOUE, OUELS GRECS? spécialste. En effet, il n'y a de politique que dans une pots, Cest-A-die en un lieu qui nexiste comme tl que si tous avent {uils y sont soumis& la loi: c'est ce que dit Protagoras sur le mode mythique', quand il fonde la capacité des hommes & vivre ensemble sur le couple forme par dike, la régle, et aidds, la retenue qu'elle inspire. Cette conscience de a oi, voild ‘quel est le savoir requis en matidre politique : le réserver & {duelques-uns, c'est reduire & rien Pautorité de Ia loi, rendre impossible 1a constitution d'une cité. Le fait méme, par consequent, que des cités existent, et done quill y a des lois Teconnues, atteste la compétence politique de chacun au sein de ces cités, et donc le bien-fondé de la régle démocratique. Et il ne sagit pas ld seulement d'un postulat a priori; il est facile, poursuit Protagoras, d'observer dans la pratique quel soin prend la cité d'inculguer & chacun cette compétence : ‘est le processus méme de V'éducation. Une éducation, qui ‘commence avec les premiers mots compris par enfant, ce qui fait que nul n'y échappe; une éducation qui ne cesse jamais non plus — et c'est ce qui méne & son terme le Tenversement de Vimage socratique de "homme politique. ‘Non seulement en effet, selon Protagoras, chacun asa part du savoir politique, mais est la cité rassembiée qui inculque le ‘savoir & ceux qui la gouvernent —allusion a a regle qui oblige Tes magistrats sortants 8 obtenir quitus de Vexercice de leur mandat®, cest-a-diee & faire la preave quiils ont gouverné dans la galt, Défini, comme la citoyenneté, parla soumis- sion & la loi, Fart politique requis des gouvernants leur est done commun avec les gouvernés“, & tel point qu'en cas erreur il apparent aux gouvernés de « redreser» les sgouvernants* 41. ame 2 Be tse 44, asd 45. Rse Mm Deux points pour terminer. Les modéles politiques des philosophes s‘organisent autour de la question du choix des gouvernants. En fonction de cette question — qui a droit {Qui est digne de gouverner? —, Panalyse opére une polarisa: tion qui aboutit a dissocer Ia cif en classes opposées—_méme si, comme Aristote a soin de le faire, on les déclare complémentaires. On observera que le modéle sophistique est construit tout a inverse : n'a pas pour objet darbitre entre les candidats concurtents au pouvoir, mais de mettre au jour ce quil y a entre eux de commun, qui tend possible, compréhensible, cette donnée de fait, qui est quis vivent ensemble, que leur concurrence a pour cadre le lieu commun une cité. On peut montrer, mais ce serait top long, les rééditions de cette approche chez des auteurs aussi modemes ‘que Rousseau, aussi contemporains que John Rawls, ‘Ceest sur un autre point que je voudrais conclure. Quand il cherche ce qu’ont de commun les membres de la pols, Protagoras trouve bientOt le langage. L'art politique compris ‘comme Fart de vivre ensemble, cest de savoir parler. On connait la phrase fameuse selon laquelle, chercher dans ‘Athenes qui enseigne Part politique, c'est chercher qui enscigne le grec: tout le monde. C'est done en apprenant & parler qu'on commence, pour ne plus cesser, d'apprendre I'art politique : Aussit6tquum enfant somprend” ce qu'on Ii dit a nnourrice, la mére, le pédagogue ct le pere lui-méme se battent li-dessus, pour que enfant devienne le meilleur. ‘Apropos de fot ce qu’ fitout is i font a legon et {ut indiquent d'un edté le juste, de Fautre Vinjuste | tele chose est belle, tlle chose Iaide; telle chose, les dieux la permettent, tele autre, non; fais les unes, ne fais pas les autres 46,308, 47. Linralement: aust qu convient (si) dec qu'on Ii dit Rseo-as nm ‘QUELS MODELES, QUELLE FOLIIOUE, QUELS GRECS? Ces la version démythisée du don aux hommes d'aidas et de diké. Arrétons-nous sur Vénumération des substituts de Zeus : la nourrice, la mere, le pédagogue, et, enfin, le pete ‘Une chose que je n'ai jamais vu souligner, c'est que les premiers dispensateurs de la vertu ou de Vat politique sont ainsi des femmes et des esclaves. On peut voir 1a une contradiction avec Ia réalité dela cité greeque. L’existence de Tresclavage, exclusion des femmes de la vie cvique, c'est ce {qu'on met en avant quand on veut creuser la distance entre démocratie antique et démocratie moderne. Le mythe racomté par Protagoras dit le contrare : c'est & Vespece entigre, non faux seuls ctoyens, que Zeus fat don, sous les noms daidds et de dikz, de Tart politique : pas de cité possible, dit & Herm’s, si, comme pour les autres arts, seuls quelques-uns en cont leur part”. Pas de différence de nature, par conséquent, fentre homme libre et esclave, et donc pas d'esclaves par nature dans la cité de Protagoras; dans cete cité dont Platon nous dit pourtant qu'elle représente Athénes : modele poli- tique gree, par conséquent. Mais fait-on plus moderne? cL mas, De Vorganisme au pique-nique Quel consensus pour quelle cité?* Barbara Cassin pam ots ces magus bes 2 Gomes te denquees Monee Prefet ous at Thomnewr dese Gu cetout 8s prove spends owe es dela ace ovine py, ent, un tS ee win, era dt es oi, oon Fpulon da magi Cheval a wat dg, entanet, in out toute rote del prop, te Chumpiemcien ie cap es 1 Prison Bou, rangi, Cre, cer Je voudraistenter d'interroger & partir de la Gréce antique tune notion qui me parait de plus en plus centrale pour notre imaginaire politique et philosophique actuel, au point qu'elle peut sembler constitutive de Tage adulte ou de la modernité en politique : la notion de consensus. ‘Le consensus est en effet un concept chamiere, qui permet @articuler ensemble trois domaines * * Une premitre vemion de oe texte a Gt prononcte au séminire Images imapinare del Groce aque » organise en novembre 1588 pat Espace séminaze du Cente Georges Pompslon age par Christian Descamps. Piere Aubenque, Jacques Brunschig. Luciano Canes ‘Marcel Déienre, Marice de Gandlic, Geffey Lioyg, Nol Lora ‘Jean Mocha, Renate Shleser partipsen te renconte, ua DE LOROANSME AU HOUENIOUE — le logique, au sens large, puisque le langage est instru iment par excellence du consensus, qu'il s'agisse de Vobtenir par voie dialogique, mettant en @uvre ce qui se nomme Aaujourd’hui « raison communicationnelle », ou par voie rhé= torique de persuasion ; — Péthique, puisque le consensus signe le choix du bien, «du meilleur, ou, & défaut, témoigne du calcul d'un optimum ‘capable de préserver, sinon tous avec chacun, du moins, en ‘mode rawlsien, les plus défavorisés; Ie politique enfin, puisque le consensus est peut-étre une condition du politique, en tout cas une condition de la paix evil, sociale, nationale, voir de la concorde internationale, centre Etat ‘Te choisis de le faire & partir de tris corpus philosophiques distincts, mais qui sont en dialogue, en contradiction, en ppolémique, implictes ou explicites, Pun avee autre: celui de fa sophistique, celui de Platon et celui d’Aristote. auras pu choisir des corpus noa philosophiques (celui des tragiques par exemple, ou celui des historiens), et des corpus philosophi- {ques différents (celui des stoiciens en particulier). Mais mon projet n’est pas de parcourir exhaustivement ces corpus pertinents pour eux-mémes, en historienne de la philosophic, ‘Gest plutot d'essayer de voir si et comment certains modeles fonetionnent encore aujourd'hui. Or, ime semble qu'on tient Aéja, avec les sophistes et Platon, des figures de base, et, avec ‘Aristote, quelque chose comme leur combinatoire. Il me Semble aussi qu‘on peut, en accentuant certains traits et en jpassant ainsi, au pre, a a caricature, au mieux, &'idéal type, Ebaucher une taxinomic qui permet de répartir un certain ‘nombre de positions contemporaines : par exemple Heides- fer du c6te de Platon et Arendt du cOté d'un Aristote sophistiqué ‘Ce qui dfére & chaque fois, cesten tout cas la modalité de cette articulation entre logique, éthique et politique. Pour serv de fil conducteur, voici comment il me parait possible de earactériser chacune des postions : us 1. Consensus rhétorique : eréer contindment la cit par le logos. Un consensus de type sophistique est le résultat toujours précaire d'une opération thétorique de persuasion, qui pro- uit, occasion apres occasion (Cest le kairos), une unité instantanée faite tout entire de différences. A la phusis des Toniens et Etre des Eléates, que Vontologie naissante avait A charge de dire adéquatement, se substitue la politique que le discours crée : la nature ne ert done pas de modéle a lacté, est méme, inverse, a ité qui sert de modele a individu. ‘Avec homonoia et 'homologia sophistiques, le logos devient {a vertu politique par excellence. 2. Consensus éthico-poiigue : consenir @ la hirarchie [site des diferences. Dans la Republique de Plton, la cité est un agrandissement de Vame, et Mhomonoia détermine Tune des quatre vertus caractérstiques de la cité comme de Vindividu, la « empe- ranee » (sophrosune). Elle se défnit comme sens dela hierarchic, Avec la justice, vertu del structure (« que chacun Soccupe de ses alfaires »), elle ordonne le fxisme des Aiflrencesfonetionnelles&Tintérieur @une unité organique, a poltgue et ethique ne font qu'un, soumises& fa méme ide du Bien (philosophe-0i) 3. Spécificié du mélange politique :optimiser les défauts Les rapports entre politique et éthique sont si complexes chez Aristote quils peuvent paratre contradictoires. Mais Ia Gite se définit dlemblée comme pléthos politin, « masse », « quantité» de citoyens. Aussi comprend-on qué la constitu: tion démocratique puisse parfois étre dite « constitution » tout court, elle seule tenant compte du pltkos en tant que tel, On assste dans la Politique & la mise en euvre de paradigmes , done nullement un sentiment &obliga- tion morale dont la transgression provoguerat un trouble de Ja conscience, mais Tantcpation de Tattente 'autrui. De méme, dike, ‘sur diknumi, + je monte», avant d'etre la disposition propre au juste, dit la rele, Tusage, la norme publique de Ia conduit. Aids nest ainsi que la motivation & Tespecter dike, et la dike na de force que pour autant que 7. Ct. par exemple E.R. Dodés, Le Gres et Prato, chp. 1, 08 P. Chantine, Dicionsae etmoogique de a langue gregue, aidima. Pout dtailé'une nals theorqne et on equ eu mthe de Protagors, depuis Aetixs avsice jusque dant Ia modem, on 3 reportra 4 Phiosophe,w 28, automne 190, Rhtoigue et Politique, Let ‘mttamorphoss de Proagors, 14 chacun éprouve de Faidas:« respect» et «justice», puis ‘jstce et mate de si» (dlkeosun, sphrosune, 38), ne prennent sens dans la conception sophisti que média: tses par fe regard de Tavtre. C'est pourquoi Protagors proclame en concluat le myth queen mater de justice et de vert politique en général, quand on sit, méme qu'un hhomme est injste, silt huimeme pubiquement la verte Sur son compte [aie leg, oe qu'on crys sagese tot & Theure [ane ta verte] est fle», et, redoubant, «on cit que tous doivent die » quis sont justes (kai phasinpantas Ein pana), q's soient ov non, et que « equ ne joue ps fn justice [prospoioumenan] est un fou » C23b-). Le principe de publics ext nécesarement principe bypoetse, Eomme pour Antiphon qui dei Te bon usage df justice par Pobservance des prescriptions des loi quand on exten présence de emoins, et par lobserance des preserptions de Innatur quand on ext dans la soltade du prive (Sura veri, Decleva-Caiz,f-B, col. 1 op. city p. 1924-) ‘Cest bien ce que développe le logos de Protagoras, qui fi suite au mythe in vert est comme Te fogs, cest-un apprentiseage de ia convention La ite tat enter enseigne ine valeur», ae, en méme temps quelle enseigne& pari [Capprentisage commence dts que enfant « fait attention », fou comprend ce qu'on li it» (uni ta egomena, 3257), ‘is quileffecte la « convention» que sont les mots. Ele Poursut travers etude des formes de pls en plus ratings {En gos, jusqu'acete instance eminent qu'en est la red. tion des comptes en fin de magstratre (320), Cest pour: ‘quot il ny a pas pls de mates de vertu que de mates de fice (328): pouvoir de la justice, la vert politique, fend ts el 6 logon Ma ab pour re tagoras se considére comme In des meilleurs professes ‘Onremargucre, pour conte, que ce qu esr logos apres le myth, 4 savoir que le iogorluiméme eonstiue a ‘ert politique par excellence, devient Tessentel du mythe dans le fection qu'en propose Asis Aristide, au milieu du ws ui sitcle de notre de, lorsque la Seconde Sophistique réfléchit sur les pouvoirs de la rhétorique en pleine paix romaine. Dans ‘Contre’ Platon sur la rhétorique, les hommes « meurent en silence » (II, 396), tant que Zeus ne leur aecorde pas, non plus fidos et diké, mais la thétorique que leur apporte Hermes (G97), Crest « a victoire du logos » qui permet de constituer la ‘cite (398); la thetorique « lie et ordonne » (sunekhei kai osmei, 401, ef. 424): tel « un garde qui ne dort jamais » elle parvient toujours & « rendre coherent ce qui ne cesse d'art Yer » (aei to paron suntthémené, 401). En un mot, le logos, c'est Vactualité du politique, sa création continuée, contradiction aprés contradiction, volte face apres volte-face. L'homonoia-homologia dit cette cons- traction perpétuelle de artefact quest la cité, et témoigne ‘que la cité est, d'abord, une performance. [Le corps social ou le sens de a hiérarchie est un tout autre modele de consensus que nous présente Platon : je propose de le faire sentir en me limitant aux imétaphores ‘dela cité utilisées au quatsitme livre de la République, et aux caractéristiques de Vhomonoia qui en découlent. La cit est comme Vame ‘A vrai dite, il ne s'agit pas tant chez Platon de métaphore ‘que dagrandissement et de miniature. Devant Ia dfficulté de definir la justice, Socrate propose en effet un expédient ‘< Cest comme sion donnait a lire de loin des petites lettres & des gens qui n'ont pas une vue trés percante; si quelqu'un Sapercevait que les mémes lettres sont écrtes ailleurs en plus {gros et sur un support plus grand, cela paraitrat, je crois, un coup de chance de pouvoir les lie dabord et examiner tensute les plus petites pour voir ice sont les mémes » (3684). 126 La justice, puis injustice, dans la cité sont ainsi une transposition pour myopes de Ia justice et de Finjustice dans Findividu. Le passage annoncé, « épanaphore » (44) de la cité & Tindividu, se fit partir du ehapitre 11 du livre IV, pour aboutir au constat que la cité # bel et bien su rendre lisibles le « principe et le modele » de la justice (arkhen te kai ‘upon, 4430) ‘Mais les choses sont manifestement un pew plus compli aquées. Car, lorsque Socrate s'est attaché a defini la justice en grosses lettres, dans le grand thédtre de la cite ila sans cesse eu recours 2 ce quise passe dans Thomme, dans individu. Je prendrai un seul exemple, crucial pour mon propos : celui de Ia sophrosune, une des quatre verus, para: « évidentes » dela cits « parfaitement bonne » (427e);<'est un terme qu'on ‘a coutume de traduire par « tempérance », justement a cause de Ia pririté du modele « psychologique >. La tempérance, done, dit Socrate, est « une sorte ordre et dempire sur les pilaisis et les désts » (4302); pour mieux Vexpliquer, ile sert ‘e Fexpression « Etre matte de soi» (to krettshautou) :« 1 ime semble que cette expression veut dire que, dans Phomme Tuiméme, ily a, en son me, une partie meilleure et une partie moins bonne, et lorsque, comme cest nature, la partic meilleure domine la partie moins bonne, alors on dit qu'on est “maitre de oi » (4312). Ces alors, et alors seulement, que Socrate propose de « tourmer les yeux » (apoblepe, 431D) vers la cité « tempérante », pour constater que la partie la meilleure y commande, comme chez lhomme tempérant, 1a moins bonne. On ne’ peut plus s'étonner dds lors de la recommandation de Dies, & propos de « justice sociale et justice individuelle, ordre de la cité et ordre de Tame » “Nous n'avons done pas & nous demander quel est le sujet primaire et quel est le sujet secondaire; le sujet est un...» 1. Auguste Digs introduction 4 Plaon, ures complies, VI (Lat ‘eépublgue, FAM, texte tal et adit par Exe Chany) Pars, Les Beles Lees, 195, px wm A condition d'ajouter que cette unité est, somme toute, celle de lame. L'dme en effet ne cesse de fonctionner comme un modele d'intelligiblité pour la eit, permettant de compren- dre la difference entre les « corps »,« lasses » ou « castes » (ethne), entre leurs fonctions, entre leurs vertus : cest le propre de ce dont la cité est la métaphore, avant d'ére la imétaphore de la cite Les vers de la structure Ty a done, dans "Etat comme dans 'ime puis dans ime comme dans "Etat, trois paris, «les mémes et en méme nombre » (44le): la pattie qui décide » (10 boulewion), représentée dans la cité par ls « gouvernants» ou « gardiens accomplis » et dans Time par le « principe logique » (ho logos, 10 logistikon), et dont 1a vertu est d'etre « sage > (Gophos); «la partie qui vient en aide » (10 epihourétikon) — dans la cit, les « gucriers»; dans V'ime, le humeur » to ‘thamoeides)— dont a vertu est la «viriité » ou «bravoure » (andreia enfin, « la parie qui est concern pares objets», «qui s.attache aux bens »(o Khremausion)~ dans lac, ies producteurs et les commergants; dans Mame, le « déit» (io epidhuménkon) ~ qui & pout vertu, prévsément, la « tempérance » (ct. surtout eet, en particulier, 440e-44is). ‘La tempérance présente cependant, par rapport aux devx autres vertu, une particulanté qui la rapproche de cette mystricuse quatrieme vertu, objet du dialogue a justice. En let, au lieu d'appartenir seulement a une ds partes de Ia fité ou de Tame, cest une sorte de « consonance » ou ‘« harmonie » (eumphonia ts kat harmonia,430e, cf. 43le) 1 « Ble sttend réellement a la cité tout entire 8 travers tous ies ctoyens, t les rend eapables de chanter tous ensemble la meme chose [runaidontas(..) auton), qu'il sient fables, forts ou quils tiennent le milieu, ea iateligence ou, sit preléres, en force physique, ou en nombre, richese, ete.» 18 (4322). Crest alors que Socrate fait intervenir le terme homonoia : « De sorte que nous pourrions dire avec la plus grande justesse que la tempérance est ce consensus [homo- rnoian}, consonance [xumphonian) naturelle du pire et du meilleur pour déterminer lequel des deux doit commander et dans la cté et dans chaque individu’. » On sait qu'ensuite Socrate définit la justice par le fait que chacun, chaque classe, chaque citoyen, chaque partie de "ame, « fait ce qu'il faire sans se méler de ce que font les autres™ », et reste ainsi sa place, dans tous les sens du terme, Sila justice est la vertu de fa structure, qui assure la taxinomie, ia sephrosun, qu'on pourrait proposer de traduire par « contre » (self-control, liton méme dans L.S.J.), est la vertu de la hiérarchie, et assure la cohésion de Ide individuelle comme de I'ime (c'est mieux dit que le corps) sociale, vertu qu’on peut certes imaginer en un premier temps plus difficile & obtenir, donc plus caractérstique, des assujetis que des maitres La partie en fonction du tout On comprend en tout cas quil ne saurait s'agir dans la République qu'une partic quelconque, par exemple la classe des gardiens, soit « différentiellement heureuse » (diapheron- 185 eudaimon), mais simplement d'assurer « le plus de bon- hheur possible pour la cite tout entire » (4200; cf, & propos des philosophes, 519e), exactement comme le’ Dieu de 9. Voici ta phrase preaue en son enter: amy shy dysvouey ‘uapponcry tna, xipowes te dytvovos nant Qdow Euan Sxrepov Bet Speer wat bv xSke nal by ba Exdorg (423). Leterme ‘Shomonoia est partis elayé pat celui Thomodana dette Sopinion fente es gouvernants et les gouverns pour que la pare la metleare pouvere (te, 420, 10. CE_par exemple 436, d, dle : 0 wd Svt0d xpare, wb dno Fraonog ee Gv Expat sal ob Laolparates 29 Leibniz ne devra pas sétre soucié du sort de Ia seule Lucréce pour créer le meilleur des mondes possbles. Socrate prend Alors Pexemple d'une statue qu'il serait en train de peindre si (on lui reprochait de ne pas colorer la plus belle partie, les yeux, avec la plus belle couleur, le pourpre, il saurait répondre : « Ne crois pas qu'il me {alle peinde les yeux si beaux quils n’aient plus Tair d'etre des yeux, pas plus {quiaucune autre partie, mais observe si, en donnant a chacune {qui lui convient, nous faisons le tout beau. De méme & [résent, ne nous force pas attacher aux gardiens un bonheur tel qu'il fera d'eux bien plus que des gardiens, Car nous saurions aussi revétir les laboureurs de robes tranantes, les ‘couvrir dor, et leur commander de ne travailler Ia terre que pour leur plaisir » (420¢-e). Deux conceptions de la réparti tion s‘opposent, cele qu se fait en fonction de Vindividu et ‘elle qui est fonction du tout. Et Socrate conclut, pour que Cité ily ait, que le gardien doit étre vraiment gardien, comme «le laboureur laboureur et le potier potier » (4212). On le voit, est finalement le mode organique, méme west ni le pius explicite ni, détillé dans sa complétude, q ttiomphe : la cite/léme fonctionne comme le corps. La différence entre les parties est nécessaire au méme titre que celle entre les mains et les yeux. D'aillurs, la cité a mal au citoyen comme homme a mal au doigt (IV, 4626-4) ; et, plus ‘généralement, la justice est santé de I'ame comme de la cité (H4e-e), de méme que les formes déviées de constitutions sont des maladies, selon la métaphore que file le live VIIL. ‘L’homonoia décrt chez Platon la fagon dont les patties cconspirent au tout. Bien entendu, dés qu'une parte pretend & autonomic, il ne peut s'agir que d'une perversion stricto sensu &Ia fois dangereuse et coupable. Ala difference du tout histique, le tout platonicien ne sait ou ne veut pas traiter la libre concurrence des singularités qui le constituent, 130 De oROAMSE AU PQUE-NOUE Le pique-nique ou la ruse de la démocratie «< La cité est une pluralté de citoyens » Crest trds précisément ce & quoi Aristo rétorque dans sa Politique (Poliikon, et non Poltia), proposant d'autres images pour la cité et, du coup, un autre modéle de consensus. « Car, ere heureux, ce n'est pas comme étre pair: le pair peut bien ére 'attribut du tout sans tre celui ’aucune ddes parties, mais pour le bonheur, c'est impossible » (Poli- ‘tique, T, 1264b 19-22). Qu'l Sagisse du bonheur ou de la vertu la cité, Aristote choisit constamment Vordre synthétique : si chacun, alors tous — « car méme sil est possible que tous soient politiquement 2élés sans que chacun des citoyens le ‘soit, c'est pourtant la seconde modalité qui est préférable = car le tous est aussi une conséquence du chacun » (VI, 13, 1332. 3638). De Platon & Aristote, cest intuition de départ qui differ : pour Platon, la cté est dabord une, pour Aristote, elle est 'abord pluraité, pléthos. Toute la critique aristotéli- cienne de Platon en découle : Platon confond économique et Je politique, parce qu'il rabat sur Tunité de Vindividu (et méme sur celle de lime, et méme sur celle du corps) P'unité de la maison et Tunité de la cité. « Il faut que la maison ‘comme la citésoient une en un sens, mais non pas totalement. (Car tant6t, dans la progression vers Punité, n'y aura plus de cite, tant0t, sly ena encore, bien présd’ére une non-cité, ce sera une eité inférieure, comme si d'une symphonie on fasait ‘une homophonie et d'un rythme un pied unique’! » Pour se démarquer de Platon, Aristote utilise, comme toujours et jusque dans sa Métaphysique, les concepts et les cexigences de la sophistique, quitte & esquiver les consé- 11, Voi te gee: Gonep wy cL ng shy ooyantan zougac.ey uodiay row pd Bow way (UH, 126 31.35), Bt ‘quences uiltimes de Ia sophistique en revenant, au dernier ‘moment et comme faute de mieux, 2 Platon"”. Quoi qu'il en soit, la critique aristotélicienne de Platon nous fait d'emblée retrouver Vinterprétation sophistique de Vhomonoia :ils'agit, iinterpréter le « méme », non pas comme un « un », mais ‘comme un « avee ». Ou encore: a définition aristotélicienne de la eité et de la constitution n'a pas pour modele P'unicité «un organisme mais la composition d’un mélange, ainsi qu’en| témoignent les premigres définitions du livre III: « La Constitution est une certaine organisation taxis) de ceux qui habitent la cité. Et, puisque la cité est um mélange (ton sugkeimendn], comme nvimporte quelle totalité qui est ‘abord composée de plusieurs parties /sunestiton d’ek pollan ‘moridn), est éviderment d'abord du citoyen quill doit Sapir. Car la cité est une pluralité de citoyens /hé gar polis, politon ti plethos estin] » (1274 b 38-41. De Véquipage au pique-nique Contrairement au monoidéisme de République IV, ta Politique est émaillée de métaphores. Il est normal que le paradigme des partes du corps, des parties de ame, voire du {apport entre I'ame et le corps, fonctionne au livre I, quand il ‘agit de organisation de la famille et de la maison, du rapport entre maitre et esclave, mari et femme, pere et enfant. Mais, dés qu'l sagit de la cité proprement dite, le paradigme est utilisé 2 contre;pied par rapport a Platon. Ainsi, il sert d'abord & prouver la différence entre la vertu dans individu et la vertu dans la cite la vertu éthique, celle de Vagathos aner, dee homme vertueux », ne se confond pas 12 Sur ce setour de soeratisme dans la poique Aristo, oir 12 domite pare de Tarte de Miche! Nar, Antote devant es obj ‘ons de Socrate la democratic, Polique It, 4et Il» paral dans es ‘Eudes sr le Polique & Arai, sou a Srecuon de Peete Aubenque, Pass. 132 avec celle du spoudaios polis, du « citoyen 21» (1276 b 452.aq.), car i n'y a quiune seule vertu étique, mais une pluralté diférencge de vers politiques — e= qui n'est pas fans rappeer le debut du Menon. « Puisque ait est faite de dissemblables /ex anomoion] — comme un vivant est constitué ‘Cemblée Ame et de corps, time de raison et Cimpulsion, tla maison un homme et dune femme, tla proprieé d'un mare et dun eslave, la cite aussi est constituee de tut exl, avec en plus autres exptees d'élements dssemblables necesalement, la verts de fou les citoyens next pas unique, pas plus que dans un char exle du coryphée et cele de son ant» (II, 4, 1297 25-12) Sihomonota politique ily a, sa premiere caractistque sera done etre ex anomolan, ns tituée d’une pluralité de vertus différentes. Mais ces diferenes, paradigme oblige, sont encore suscep- tiles etre interpretées en mode platoniden, comme une hierarchie fonctionnelle. Au chapite 4, le modéle du cheur, souvent repis et qui permet de décinr les vert selon les Constitutions (mode dorien, mode phrygien, cf. 1276 b 4-9), celui, qui fera long feu, de 'équipage du navire (1276 b 20- 51), gui met en Gvidence la difference entre public et privé, compétence siagulitre (rameur, pilote, timonier) et vse commune (e salut du navie, 12766 20-31), relevent toujours, méme sion peut changer de mode et changer de métcr, ‘Tune taxinomie de type organist; finlement, la diffrence des vertus ou des capecités correspond encore & quelque those comme la division du taal. ‘Cest alors q’apparaissent, au chaptre 11, quand i sagt de savoir sil convient ou non de confer le pouvoir (10 Kurion) ‘a pluralite (o plehos,« la masse » son veut, mai au sens ‘0 cette masse des cloyens est, en vertu de la definition ‘donnée, on en souvient, au debut du méme livre, constitu. tive dea cté®), un certain nombre de métaphores originales, 1, Cest ire qui ne me semble pas nese, bien au conta, de donner dew sens dirents&plehos: boone « pura», et peutéte 133 dde moins en moins compatibles avec les premiéres, mais de plus en plus conformes au mélange pour ainsi dire déspécialisé et stochastique quest la cité. Simultanément, image du comps cet celle de Fame se mettent & del ‘Une pluralité de gens, qui un sa aleur goltigue, ex néanmoins capac quand cle ext rassomblee (sunetihonas] d'etre melleure qu'une Slte [ekeinon reprend tous arsious men, oligous de, {281 a 40 3g], nom pas quand on la prend un par Un, ‘ais tous ensemble uk has hekasion, all hos sumpan as), comme les repas ol chacun apporte son écot sont rmeileurs que ceux ob un seul régale. En effet, orsqu'ly {plural [pollon gar onion), chaque parte possede une Partie de vertu et de sagesse pratique, et, quand la Pluralité se- rassemble (sunelhiondon), -cxactement Eomme la fule (to plethos) devient un seul horse plein de pieds, plein de mains et plein de sensibilites il en va de méme pout les dispositions morales ct intellectuelles {ta eth kat ten dianoian). Cest pourquoi la plualitéjuge Imicux les cuvres musicales et poctiques + chacun Juge tune patie et tous jugent le tout allot gar alot morion, panda de panes] * (1281 a 42-b 10) quand is agit de ait, par opposition & mauve « mas» pide la deviation Semocratgueasage de pleho juque ans TE chapive II démeat consamment ete opposition, pusqe ples, pat dierenceavecoligo, est equivalent de hol poll (1381 a4, 8,11), ‘st qu Aristote se demande Hi c'est «tout plas» ou sevlement « leh determine» quest suscepble de Se comport come un bon Imsange (b 1521) (Cette ates fat Técho dune dsasson oa, mle Sor un pont lourd de consequence, avec Lavano Canfora) “ML suite imate da texte pose un double probleme. « Au emeurat fala, ces ais que ceux des hommes qui sont poliquement ‘ertoeus diferent de chacun de ceux gi composet la plurality exacte- ‘ment comme on dt que ceux ql ne sont pa eaux ferent de ceut qu Sent beaux, ees objets pens par un arse des objets ress ferent 134 DE ORGANISE AU MOUE-NOUE La qualité de la partic n'est pas, comme dans un corps ou pour Platon, d'etre adaptée au tout, et de rester 2 sa place Elle est seulement avoir une qualité quelle qu'elle soit, dont le tout va semparer. Chez Platon, le tout optimise les parties ‘en faisant de leurs insuffisances comme individus la condition de leur qualité, de leur qualification comme organes. Chez La pate qu ser de model ex dans ‘cv catrpéceure apart result -est de qu on peed quelque cows ea Fascemblant, doe que ls qualiés dela foul ob de homme vertex sont Inféeues sux quale prises une par ane dans les dius. Or este ‘ontave qll aut démonter “Te rastemblemeat rssemble chaque fois Sulement equily ade mieux, dav a fole chez homme vertaeuk, dns tn tableau. Por Paton, la parte n'a pas re optimal, i faut meme {ele ne eset pas pour elle meme, afin que le eu esi. Pour Astor, TE tout ne ent que optimum : comme en temoigneat ales ses notes (fo, Tricot vers i dns le pltonsme. Le Big ets cect i git de In fonction de fou gegranmenou, 4. Sil est complement dy omparatif,alion, lors du modble es en eft «plus bean que pelt» Si Cestun genitif'apparenance, alors ona choi pours beaulé Fil dune, eproduit dan Is peitue, Reconalsos quel contraction propose par Tricot et ele qu vient inmedatemeat A Test 135 aqualités et en les composant. Avec l'image du pique-nique (est ainsi que L. S. 5. traduit ta sumphoréta), reprise en 1286 a 29, c'est la diversité& elle seule qui constitue la g lité, car que serat-ce si, au lieu du « avec », on avait un «< meme » el si tous apportaient des tomates? Enfin, la diversité peut méme étre relayée simplement par le nombre. Cest alors la quamtits qui est 8 elle seule une qualité, comme en témoigne, par-deld Ia folle image du comps tentaculaire™, Pultime comparaison qui sert&justfier le fait ‘que la « masse des citoyens », cest-dire « tous ceux qui ont ni richesse ni titre ala vertu, meme pas un » (1 pléthos 10n politan (..) hosoi méte plousioi méte axioma ekhousin aretes méde hen, 1281 b 24s9.), partcipent au délibératif et au judiciaire : « Car tous ont quand ils sont rassemblés (sunel- ‘thontes} une Sensibilité suffisante, et, mélangés avec les meilleurs, is aident la cit, exactement comme un aliment qui f'a pas 1é purifié joint 8 une petite quantitéd’aliment pur rend le tout plus nourrisant; alors que chacun pris & part ‘manque de maturité dans le jugement » (1281 b 34-38). Cette dietétique-I est fort loin du modéle organique. eut-étre certains mélanges physiques procédent-ils ainsi & des décantations, & des €purations automatiques : la lie s‘éli- ‘mine toute seule en tombant au fond. Mais sans doute est-il plus juste de supposer qu'on tient lla singularité de cet objet ‘quest la eté, puisque, quelle que soit sa constitution ou son ré- ‘Bie, elle se défint dete « une pluralité de ctoyens » — voire 15, Image reprise en I, 161287253, propos deiner qu'il y it pseu chaque magisat joe bien quand i et bien forme parla ot ext sas douteabsurde gue quel vie avec dean sa joge avec deux fells, apse avec deux mass et deus ped, mean {ue beaucoup avec beaucoup; de fat, es monarqus se font beascoup ‘yeux, ores, de main et de peds Us asvocent leur pouvor cea gah timent eur pouotretleur perce. » Ilser ntrestant dese demandet ‘comment cette image d'un corps & plétorecorganes devient cele dela ‘yeanne 136 DE VORGANISME AU POUE-MOUE la spécificité méme du politique : constituer par soi, entre tous les mélanges, une telle provédure de décantation 6 L'« amitié politique » ‘Sila pluralité est bien la condition du politique, que devient Phomonoia Le premier constat est que le terme n'appartient pas au vocabulaire de a Poliigue", mais & celui de VEthique 4 Nicomague. Crest elle en effet qui se charge de défini, en 1X, 6, Phomonoia comme politike philia, amitié dont le cadre est la cite. Il ne sagit pas avoir les mémes opinions ou les ‘mémes conceptions, en astronomie par exemple, mais, pour faire bref, d'etre Caccord sur les fins et les moyens pratique ‘ment importants. La défintion doit faire réfléchir, car com- ‘ment concilier l'amitié, qui, dans sa forme parfaite, unit les semblables dans un sunaist perception mutuelle ou sentiment partagé de leur excellence (VII, 4), eta cté, est- 2 dire le mélange composé d'une pluralité d’éléments dssem- blables? La réponse semble cette fois devoir fare droit & la diversité des régimes, comme le suggere Vanalyse différentielle des 16, Je Inise de tte argument qui suit cher Arisoe, selon equal Yutlsateur (une mason, ¢un gouveral), vie le consoemateur (Sun repas), et mellearjuge de la qualité dv prodit que le roduceu Inene, et renvowe 4 Taricle de Pitre Aubongue. « Arsote ela ‘eanocratie dns Invi Sol LuncedArisote dans le monde Imétteranéei Actes collogue stant, $3 janvier 1986, Inbal Paris Rome-Tiest, Ed. Iss, 988, en parte p36. Reste Avot argument fst de a oté un obj fabigue et un objet usage, e gut ouratpet-teépurgaer un cetan nome de conueseas sul celeb Dhse (2 1233 22) 17, On toave seulement homonotiton dans Ia ertique de Ia Répue ‘nique tou dst ensemble + Cet een» i 8 aps pour autant ‘e concorde (I, 3,181 32). Pas, nous y revlon, omanootsn 6, 130549, pour quaifer une eligarchie

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