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Passage au crible
Pour une analyse transnationaliste
de la scène mondiale
N°7 · 30 novembre 2009 · www.chaos-international.org
Rappel historique
L’épidémie a débuté au Mexique au printemps 2009, suscitant immédiatement l’inquiétude.
Celle-ci se trouve exacerbée par le souvenir de plusieurs précédents restés très présents dans la mémoire
collective. Rappelons en premier lieu que la grippe espagnole a tué en 1918 plusieurs dizaines de millions
de personnes, à une époque où les mouvements de population étaient pourtant moins fréquents que de
nos jours. Mentionnons ensuite les alertes mondiales provoquées par le SRAS en 2003 et la grippe aviaire
depuis 2004. En outre, alors que certains pays manquent de vaccins, le virus connaît des mutations
géniques, ce qui ne fait qu’accentuer les tensions politiques, les pressions sociales et les querelles
scientifiques. Enfin, la décision de l’OMS de passer le 11 juin 2009 au niveau d’alerte 6 – limite maximale
correspondant au seuil pandémique – a conforté davantage encore ce climat d’angoisse, voire de
panique.
Cadrage théorique
La stratégie internationale de lutte contre la première pandémie du XXIème siècle relève de deux
logiques interdépendantes qui soulignent « l'immense difficulté de l'État-nation à prédire, organiser et
contrôler le risque » , pour reprendre les termes du sociologue allemand, Ulrich Beck.
1 La santé comme bien public mondial. Le processus de mondialisation de l’économie de marché
conduit à repenser l’échelle et les conditions de réalisation des politiques sanitaires. Par ailleurs,
l’implication d’un nombre de plus en plus important et diversifié d’acteurs, intervenant à l’échelle
internationale, exige une approche globale d’enjeux, jusque-là circonscrits au plan national.
2 La sécurité humaine. Cette notion fait référence aux droits humains, notamment à celui de vivre
dans un environnement sanitaire qui soit protégé. Elle implique une remise en cause de la
territorialisation de la souveraineté en favorisant un double dépassement de l’arène étatique : a) par le
haut avec la nécessité de protéger les grands équilibres globaux qui appellent une gouvernance mondiale
encore en chantier ; b) par le bas, avec une attention accordée aux individus plutôt qu’aux États. De nos
jours, la légitimation de la sécurité humaine se donne à voir dans le renforcement des normes juridiques
et la capacité de les faire respecter. C’est dans ce cadre que doit être abordé le rôle joué par l’OMS, mais
aussi celui des communautés épistémiques et des réseaux plus ou moins institutionnalisés de praticiens.
Analyse
Cette épidémie témoigne du processus de mondialisation par l’intensification de la mobilité,
l’accélération des échanges et la modernisation des moyens de communication. Marc Barthélemy,
Références
Beck Ulrich, La Société du risque. Sur la voie d’une autre modernité, trad., Paris, Aubier, 2001.
Chiffoleau Sylvia, « Santé et inégalités Nord/Sud : la quête d’un bien public équitablement mondial », in François
Constantin (dir.), Les Biens publics mondiaux. Un mythe légitimateur pour l’action collective ?, Paris, L’Harmattan,
2002, pp. 245-268.
st
Kaul Inge, Grunberg Isabelle, Stern Marc A. (Eds), Global Public Goods, International Cooperation in the 21
Century, New York, Oxford, Oxford University Press, 1999.
Gabas Jean-Jacques, Hugon Philippe (Éds.), Biens publics à l’échelle mondiale, Paris, Colophon, 2001.