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commerciale
INTRODUCTION
Evolution du marketing, définition, concepts clés, démarche et limites
1. APPROCHE ANALYTIQUE
2
2.2. Les 4 P (variables d’action)
2.2.1. Produit (product)
2.2.2. Prix (price)
2.2.3. Communication (promotion)
2.2.4. Distribution. (place)
3
3.45 Les particuliers : un créneau porteur
3.46 Les ventes de PC portables explosent
3.47 Rebaptiser BBL par ING. Un pari fou ?
3.48 Plus d’un million d’accès broadbrand
3.49 Plus de 8 livres vendus à la seconde
3.50 L’enjeu pour air France : récupérer la clientèle
3.51 Rides oh ma ride dis moi …
3.52 Tout est-il permis
3.53 Touring : un nouveau virage
3.54 Zamzam contre Coca-Cola
3.55 La bonne fortune des enfants du hip-hop
3.56 Consommer éthique ou payer les produits moins chers
3.57 La face marketing de Danone
3.58 Nike : des aveux à double tranchant
3.59 Vous voulez vendre ? Lancez une rumeur
BIBLIOGRAPHIE
- Marketing, Management, Philip Kotler et Bernard Dubois, 787 pages, éd. Publi
Union
- Techniques marketing, Jérôme Bon et Pierre Grégory, 260 pages, éd. Vuibert
- MBA Marketing, les concepts (340 pages), les outils (312 pages), Alexander
Hiam et Charles Schewe, éd. Maxima Laurent du Mesnil, dif. PUF
4
- Les Etudes de marché, Professeur Paul Van Vracem, ICHEC, 1985
INTRODUCTION
1 – Origines du marketing
Le terme « marketing » est apparu aux Etats-Unis dans les années 50. Si aujourd’hui
le marketing semble indispensable au succès de toute entreprise, il n’en a pas
toujours été de même.
11 – Phase de production
12 – Phase de vente
De la fin de la crise de1929 à 1950 environ. Au cours de cette période, les revenus
ont augmenté, les individus commencent à souhaiter une gamme plus étendue de
produits, la concurrence s’est accrue. Les excédents et la surproduction devinrent
des facteurs économiques importants. Les entreprises prirent conscience qu’il ne
suffit pas de produire pour vendre. La demande exprimée par les agents
économiques joue alors un rôle essentiel.
Des aménagements importants apparaissent dans l’organisation commerciale :
- adaptation des circuits de distribution :
5
. les grands magasins évoluent,
. les magasins populaires se développent,
. de nouvelles techniques de vente apparaissent (libre-service),
. le nombre d’intermédiaires (grossistes) se réduit.
- Modification des procédés de communication :
. la publicité remplace la réclame,
. les grandes agences de publicité sont fondées à partir de 1930.
- Perfectionnement des techniques d’enquête et de sondage d’opinion.
- Les services de vente deviennent autonomes et le prestige de la force de
vente s’accroît, cependant les vendeurs ont recours à des techniques de
pression, ce qui continue aujourd’hui de ternir l’image de ce métier..
13 – Phase de marketing
Le début de la phase de marketing se situe dans les années 50. Après la seconde
guerre mondiale, on a enregistré un très fort accroissement du pouvoir d’achat et de
la demande de biens et services. Les habitudes d’achat évoluent ; le cycle de vie des
produits se raccourcit ; les marchés se segmentent, s’élargissent et se complexifient.
Cette phase est caractérisée par le passage des techniques agressives de vente à la
volonté de satisfaire les besoins des consommateurs. Le client occupe le centre de
la réflexion économique de l’entreprise.
- les techniques de distribution s’affinent (Grandes surfaces en libre-service
intégral),
- le commerce de détail se transforme,
- création des départements marketing dans les entreprises, dirigés par des
spécialistes qui analysent les besoins et les attentes du marché pour les
départements de recherche et développement, de conception et de
production.
Aujourd’hui un grand nombre d’entreprises dans le monde sont en phase de
marketing, même si certaines d’entre elles sont encore en phase de vente, voire de
production. D’autres encore, les plus modernes, ont commencé une phase sociétale
à la suite d’une adhésion à une législation restrictive voire à une prise de conscience
de l’impact de leurs décisions sur la société (préoccupations liées à l’environnement,
aux réactions négatives des consommateurs…) mais ne sont encore qu’une
minorité.
Le marketing est un ensemble d’actions qui, dans une économie de marché, ont pour
objectif de prévoir ou de constater, et le cas échéant de stimuler, susciter ou
6
renouveler les désirs des consommateurs en telle catégorie de produits et de réaliser
l’adaptation continue de l’appareil productif et de l’appareil commercial d’une
entreprise aux désirs ainsi déterminés.
3 – La démarche marketing
7
Information :Analyser l’information de l’entreprise (Analyse externe - Analyse interne)
Réflexion (Fixer des objectifs généraux – définir une stratégie produit-marché pour atteindre
ces objectifs)
Action (définir des actions en terme de :Moyens- Calendrier- Budget)
Contrôler.
Les entreprises se sont mondialisées, pour réussir sur les différents marchés, les
entreprises doivent en connaître les spécificités et celles de leurs consommateurs et
faire le choix entre un marketing global (s’appuyant sur une homogénéité des
habitudes de consommation) et un marketing plus différencié (s’appuyant sur des
particularismes locaux).
On peut reprocher au marketing de ne pas être aussi efficace que le prétendent ses
thuriféraires, même s’il doit se fonder sur l’intérêt des consommateurs. Plusieurs
domaines de l’action commerciale présentent des aspects négatifs :
8
• le produit :
- l’innovation n’est souvent qu’apparente,
- la durée de vie est volontairement raccourcie
- certains produits sont dangereux ou polluants…
• le prix : joue souvent sur la naïveté du public en laissant croire qu’un prix élevé va
de pair avec la qualité
• la publicité :
- coûteuse, elle augmente les prix des produits,
- persuasion non apparente
- envahi la vie privée et exerce un pouvoir sur les personnes les plus fragiles
(enfants, personnes âgées…)
- idéologie du trompe l’oeil et du faux semblant…
• la distribution : le merchandising incite les clients à parcourir les espaces de
vente les plus étendus possibles…
K. Galbraith (= 1970) : « Il est faux de croire que l’initiative appartient aux
consommateurs dont les injonctions commanderaient toute la politique commerciale
des firmes ».
1. APPROCHE ANALYTIQUE
1 .1. ANALYSE EXTERNE
1.1.1. Le macro-environnement
1.1.1.1. Définitions
9
L’environnement peut être présenté comme étant « l’ensemble des conditions
naturelles et culturelles susceptibles d’agir sur les organismes vivants et les activités
humaines ».
Le macro-environnement est défini comme étant l’environnement général de
l’entreprise qui l’influencera et auquel celle-ci devra s’adapter. L’environnement est
en perpétuel mutation : nouvelles idées, nouveaux produits, nouveaux modes de
communication… autant d’opportunités pour les entreprises qui savent les anticiper
ou s’y adapter, autant de menaces pour les autres.
Environnement Environnement
socioculturel institutionnel, Juridique
LES COMPOSANTES
DU MACRO-ENVIRONNEMENT
Environnement
Economique, démographique et social Environnement technologique
Environnement technologique :
L’entreprise doit identifier les innovations technologiques concernant les produits, les
processus de production, de commercialisation, de distribution, de conservation…
qui, dans son métier, sont susceptibles de constituer des sources de développement.
(innovations produits, amélioration de la qualité, réduction des coûts…) ou au
contraire des menaces (produits obsolètes…).
L’environnement socioculturel
Le responsable marketing doit identifier les tendances culturelles dominantes dans la
société à laquelle appartient ses consommateurs potentiels. Actuellement en Europe,
les thèmes majeurs de la consommation de « rassurance » sont : la santé, l’écologie,
le terroir, l’ethnisme, la famille, la culture, l’éducation, l’anti-mode, l’humanitaire.
10
(Centre de Recherches et de Documentation sur la Consommation (CREDOC) l
1.1.2. Le marché
1.1.2.1. Définition
Le marché est constitué par l’ensemble des clients capables et désireux de procéder
à un échange leur permettant de satisfaire un besoin.
Marché générique
Complémentaires
Part de
marché de
l’entreprise
X
Marché support Marché principal
Substituts
11
- le marché des produits substituts concerne l’ensemble des produits de
nature différente du produit principal mais qui satisfont les mêmes besoins
et les mêmes motivations, dans les mêmes circonstances
- le marché complémentaire concerne l’ensemble des produits auxquels
recourt le marché principal
- La part de marché concerne la part des ventes de chacun des
concurrents sur le marché donné. Elle se calcule de la manière suivante :
PDM = CA de l’entreprise (ou d’une marque) sur un marché / CA de
l’ensemble des entreprises (marques) sur ce marché principal.
Exemple :
- marché générique : marché de la forme
- marché complémentaire : marché des activités physiques et sportives
- marché substituts : marché des produits biologiques
- marché principal : marché de la diététique hors bio (330.2 M d’E en 2000)
12
Marché actuel de la profession
♦ Les motivations/freins
Une motivation est une force consciente ou inconsciente, qui pousse le
consommateur à agir, c’est un mobile.
Un frein est une force consciente ou inconsciente, qui empêche l’achat et
l’utilisation d’un produit ou d’un service.
13
vie en société. Ces désirs ne sont pas totalement éliminés ni parfaitement
maîtrisés, et réapparaissent dans les rêves, les lapsus ou les obsessions.
Le comportement individuel n’est par conséquent jamais simple.
Diverses techniques projectives parmi lesquelles l’association de mots, les
phrases à compléter, l’interprétation d’images, les portraits chinois et le jeu
de rôle sont utilisées pour sonder les motivations des individus.
FACTEURS ENVIRONNEMENTAUX
• Groupes de référence
• Facteurs socio-culturels
• Facteurs de situation
MARKETING
14
Besoins de
s’accomplir
Besoins d’estime
Besoin d’appartenance
et d’affection
Besoin de sécurité
Besoins physiologiques
♦ La perception
C’est un processus par lequel un individu choisit, organise et interprète des éléments
d’information externe pour construire une image cohérente du monde qui l’entoure.
Trois mécanismes permettent d’expliquer pourquoi le même stimulus peut être
interprété de multiples façons :
L’attention sélective
La distorsion sélective
La rétention sélective
♦ Les croyances
Une croyance correspond à un élément de connaissance descriptive qu’une
personne entretient à l’égard d’un objet.
♦ Les attitudes
Une attitude résume les évaluations (positives ou négatives), les réactions
émotionnelles et les prédispositions à agir vis à vis d’un objet ou d’une idée..16
♦ La personnalité
La personnalité est un ensemble de caractéristiques psychologiques distinctives qui
engendrent un mode de réponse stable et cohérent à l’environnement.
♦ Le style de vie
Le style de vie peut être défini comme un système de repérage d’un individu à partir
de ses activités, ses centres d’intérêt et ses opinions.
♦ Ressources personnelles
La position économique d’un individu détermine si une personne est en mesure
d’acheter. Cette position est fonction du revenu (niveau, régularité), de son
patrimoine (y compris les liquidités), de son niveau ou de sa capacité d’endettement
et de son attitude à l’égard de l’épargne et du crédit.
15
♦ Les groupes de référence
Les groupes de référence sont des groupes actuels ou imaginaires qui influencent
l’évaluation, l’aspiration et le comportement d’un individu.
Parmi les différents groupes auxquels appartient un individu, il est possible de
distinguer les groupes primaires (famille, voisins, amis, collègues de travail), des
groupes secondaires (associations, clubs).
Les groupes de référence interviennent de trois manières :
- ils proposent à l’individu des modèles de comportement et de mode de vie
- ils influencent l’image qu’il se fait de lui-même
- ils engendrent des pressions en faveur d’une certaine conformité de
comportement.
• La culture
Dès le jour de sa naissance, l’homme apprend ses modes de comportement. Un
individu assimile le système de valeurs caractéristique de sa culture, qui résulte des
efforts passés de la société pour s’adapter à son environnement, et qui lui est
transmis par différents groupes et institutions tels que la famille ou l'école.
• Les classes sociales
Ce sont des groupes relativement homogènes et permanents, ordonnés les uns par
rapport aux autres, et dont les membres partagent un système de valeurs, un mode
de vie, des intérêts et un comportement. La classe sociale peut être identifiée par la
profession, le revenu, le patrimoine, l’habitat, le niveau d’instruction, les ascendants
familiaux…
Dans « La société de consommation » Baudrillard montre combien les choix de
consommation sont en fait le reflet des enjeux sociaux, un moyen de différenciation
entre les classes sociales qui affirment leur identité et leurs différences..
16
1.1.3.2. Le processus de décision
1.1.3.2.1. Les étapes du processus de décision
Reconnaissance du problème
Recherche d’informations
Décision d’achat
Sentiments post-achat.
17
fois l’achat effectué, le consommateur peut percevoir un écart entre son
expérience et ce qu’il entend autour de lui à propos de ce produit. Il
cherche alors à justifier sa décision de sorte à réduire cette dissonance.
- L’achat routinier concerne les produits pour lesquels le consommateur se
sent peu impliqué et perçoit peu de différences entre les marques.
- L’achat de diversité concerne les produits pour lesquels le consommateur
est faiblement impliqué mais perçoit de nombreuses différences entre les
marques.
Il est possible d’identifier jusqu’à cinq rôles dans une situation d’achat :
• L’initiateur : celui qui pour la première fois, suggère d’acheter le produit
• Le prescripteur : toute personne qui directement ou indirectement a un
impact sur la décision (« influenceur »)
• Le décideur : personne qui détermine l’une ou l’autre des différentes
dimensions de l’achat (faut-il acheter ? où ? quand ? quoi ? comment ?)
• L’utilisateur : celui qui consomme ou utilise le produit.
De nombreuse études marketing ont été réalisées pour tenter de déterminer le
rôle et l’influence relative des différents membres de l’unité dans la prise de
décision. Ils sont souvent acteurs dans les opérations publicitaires pour renforcer
ou parfois réduire leur rôle dans le processus de décision..
1.1.4. La concurrence
1.1.4.1. Définition
Acheteurs Fournisseurs
Un Quelques Nombreux
18
Un Monopole bilatéral Monopsone limité Monopsone
.
Source : « Le marketing, Fondements et pratique » PL Dubois,
A. Jolibert éd. Economica
L’attrait d’un marché particulier pour une entreprise qui désire s’y implanter, est
directement fonction de la nature et de l’intensité de la concurrence qui y règne.
Nouveaux entrants
Substituts
L’intensité concurrentielle sur un marché est liée à la menace des nouveaux entrants
potentiels (les barrières à l’entrée sont-elles puissantes ?), à celles des produits de
19
substitution ainsi qu’au pouvoir de négociation des clients et/ou des fournisseurs.
Une fois les concurrents identifiés, il est nécessaire d’évaluer les positions
concurrentielles, c’est-à-dire de comparer les performances des entreprises (ou des
marques) concurrentes sur le marché étudié.
20
concurrentielles
La comparaison des résultats obtenus par les firmes concurrentes, donne une
approximation quantitative des positions concurrentielles. Lorsque l’évaluation
quantitative est trop délicate à obtenir, cette évaluation peut se faire par exemple
sous la forme d’une notation en + ou *.
B ++ ++ +++ ++ +++
C + - ++ + +
21
(en %) Part de marché Notoriété Préférence
2000 2001 2002 2000 2001 2002 2000 2001 2002
A 50 47 44 60 58 54 45 42 39
B 30 34 37 30 31 35 44 47 53
C 20 19 19 10 11 11 11 11 8
Cette analyse vise à décrire et à comparer les plans marketing des différentes firmes
concurrentes de sorte à identifier les choix, les objectifs stratégiques et les actions
marketing adoptés respectivement.
♦ les objectifs généraux : Quels sont les objectifs à 3 ou 5 ans définis par
l’entreprise pour son produit, en termes de valeur, de volume, de part de marché,
voire de rentabilité.
♦ le mix
• description du produit et de ses attributs (services associés, emballage,
marque…) ;
• prix : niveau, conditions de paiement… ;
• distribution : choix des réseaux, circuits, canaux, implantations dans le
magasin… ;
• communication : publicité (message, média…), promotion, marketing direct…
Pour être efficace, l’analyse de la concurrence doit être permanente. Les firmes qui
disposent de ressources suffisantes mettent en place une veille concurrentielle. Elle
est destinée à permettre à l’entreprise de se défendre face aux actions probables de
22
la concurrence. Elle peut avoir un objectif offensif qui consiste par exemple à
identifier de nouvelles opportunités en fonction des évolutions du marché, des
mouvements stratégiques possibles des concurrents et de leurs points vulnérables.
Elle peut être utilisée pour prendre une décision marketing (prix, distribution...) en
tenant compte des réactions probables de la concurrence.
Le schéma ci-dessous présente la structure d’un système de veille concurrentielle.
Source : D. Montgomery et CB Weinberg «Strategic Intelligence Systems »
DIRIGER
U
1. Besoins en informations
2. Priorités
3. Indicateurs à surveiller
4. Système de collecte
TRANSMISSION ET
TRAITEMENT ET
DISSEMINATION
ANALYSE
1. Qui reçoit quoi ? Quand ?
1. Pertinence, fiabilité,
2. Méthode
validité
3. Problèmes de déformation
2. Transformation des
données
en information
23
1.1.5. La distribution
1.1.5.1. Définition et fonction de la distribution
La distribution « recouvre l’ensemble des opérations par lesquelles un bien sortant
de l’appareil de production est mis à la disposition du consommateur ou de
l’utilisateur ».
« article Distribution « P.L. Dubois
Encyclopaedia Universalis Paris Corpus
24
commerciale globale pour l’ensemble de ses points de vente et canaux de
distribution et répond à une logique de développement financier.
- Les grands magasins offrent en centre ville, dans une vaste surface un
large assortiment de produits à dominante non alimentaire. Ce type de
magasins connaît actuellement des difficultés liées à l’importance de leurs
charges de structure et à la concurrence des nouvelles formes de
commerce.
- Les magasins populaires offrent dans de multiples rayons un assortiment
assez large mais peu profond de biens (y compris alimentaires) dans une
gamme de prix assez basse avec un service réduit, le plus souvent en
libre-service. Situés en centre ville, ils connaissent des difficultés depuis
les années 60-70 pour des raisons identiques à celles des grands
magasins.
- GMS : ce sont les grandes et moyennes surfaces (supérettes,
supermarchés et hypermarchés) qui proposent des produits à forte
dominante alimentaire, à prix réduit et en libre-service intégral. Les plus
grands points de ventes sont localisés en périphérie des villes.
- Les hard-discounters proposent en libre-service sur une surface de vente
réduite, un assortiment très court de produits essentiellement alimentaires
à des pris très bas. (les soft discount élargissent la gamme de produits)
- Les GSS sont des grandes surfaces spécialisées dans un domaine
spécifique : bricolage, sport…
- Les magasins d’usines : créés par les producteurs, ils ont pour fonction
d’écouler les stocks de produits directement aux consommateurs à des
prix dits « d ‘usine ».
25
pratique du discount gagnera les chaînes d’équipement de la personne dans les
années 80. Avant que les enseignes de produits culturels et de hard-discount ne
prennent le relais.
- 1958 : GOULET TURPIN ouvre EXPRESS MARCHE
- 1960 : CARREFOUR
- 1961 : AUCHAN
- 1967 : STOC
- 1969 : CASTORAMA
- 1972 : CONTINENT
- 1973 : INTERMARCHE
- 1976 : DECATHLON…
26
- Monoprix rachète Prisunic et s’affilie à Casino
- Casino prend le contrôle de Franprix-Leader-Price
- Promodès absorbe Catteau puis réalise une OPE avec Carrefour
- Leclerc conclu une alliance avec Système U, à l’instar de la fusion des
centrales d’achat de Casino et de Cora …
• Internationalisation pour compenser la saturation du marché intérieur et trouver à
l’étranger des relais de croissance. La globalisation fait de plus jouer des
synergies (achats, marketing, savoir-faire, innovations) et permet d’améliorer les
performances.(Voir « les distributeurs à la conquête de nouveaux marchés » Les
Echos 23-24 oct. 1998)
• Diversification de l’offre produits/services et meilleure définition de l’assortiment
pour accroître le panier moyen. A côté de l’alimentaire l’offre se diversifie : micro-
informatique,
téléphonie, hi-fi, textile, électroménager, bijoux, parfumerie,
parapharmacie, services financiers, voyages…
• Maîtrise de l’information. Depuis quelques années la distribution bénéficie d’une
information très abondante, banques de données, panels, méga-bases… Il s’agit
dorénavant d’améliorer la maîtrise de ces informations au service du marketing
pour constituer des images d’enseignes fortes..
Savoir-faire
en améliorant les savoir-faire
R O
grâce à une meilleure gestion des ressources
et une meilleure organisa tion
Source : Tamara J. Erickson et E. Shorey, « Businesse Strategy. New Thinking for the
90’s » in « Marketing Management Kotler et Dubois 9 e édition Publi Union.
27
1.2.1.1. Les clients
Un des défis majeurs à relever par le marketing est de satisfaire l’ensemble des
clients. Les clients satisfaits sont en général fidèles à l’entreprise. La démarche
consiste à identifier les clients dans un premier temps, puis d’appréhender la « valeur
délivrée » pour mesurer le degré de satisfaction de la clientèle.
Coût total :
• En argent
• En temps
• En effort consenti
• psychologique
♦ La satisfaction du client
On peut définir la satisfaction comme le sentiment d’un client résultant d’un jugement
comparant les performances d’un produit (ou plutôt sa valeur dérivée) et ses
attentes.
Trois niveaux de satisfaction sont envisageables :
- le niveau minimum en dessous duquel apparaît le mécontentement
- le niveau moyen qui assure une bonne croissance
- le niveau supérieur susceptible d’engendrer une forte fidélité.
28
Boîtes à suggestions et livres de réclamation : une entreprise orientée vers le
client doit inviter la clientèle à formuler suggestions et critiques
Enquêtes de satisfaction :de nombreuses études ont montré que les clients
mécontents n’expriment pas spontanément leur mécontentement. Ils se
contentent de changer de marque ou de produit, sans que l’entreprise en
comprenne la raison.
Clients mystère : méthode courante dans les services et la distribution, qui
consiste à faire appel à quelqu’un pour jouer, incognito, le rôle d’un client en lui
demandant de noter ses impressions positives et négatives.
Analyse et évaluation du coût des clients perdus. Le coût d’acquisition de
nouveaux clients est souvent supérieur à celui de la fidélisation d’anciens clients.
Aussi l’entreprise doit surveiller la défection de sa clientèle et en réduire
l’amplitude
♦ Le métier
29
- le métier lié aux façons de faire : la capacité de l’entreprise à maîtriser son
organisation, les relations entre ses différentes fonctions, s’intègrent aussi
au métier, à la façon de concevoir l’activité.
- Théodore Levitt a montré l’intérêt de définir un métier selon des critères de
marché (besoins fondamentaux) plutôt que de produit ou de technologie.
Pour une entreprise, identifier son métier n’est pas toujours aussi évident qu’il n’y
paraît. C’est cependant indispensable, car de nombreuses expériences
malheureuses démontrent que des entreprises qui s’éloignent de leur métier,
dans des opérations de diversification tous azimuts, courent des risques et en
font courir à leurs salariés et leurs actionnaires.
Une entreprise a souvent un seul métier dominant mais peut avoir plusieurs
domaines d’activités stratégiques..
Abell défini un domaine d’activité stratégique à partir de trois dimensions :
- la catégorie de clientèle à laquelle on s’adresse
- les besoins que l’on cherche à satisfaire
- la technologie privilégiée.
Technologie
DAS
Client
Besoin
30
1.2.1.4. L’organisation
♦ Structure organisationnelle
Pour Mintzberg, « la structure est la somme des moyens employés pour diviser le
travail en tâches distinctes, pour ensuite assurer la coordination nécessaire entre ces
tâches ». Ainsi la structure, c’est l’ossature, le squelette de l’organisation. C’est la
manière dont les tâches et les responsabilités ainsi que leurs relations sont décrites
et stabilisées.
Les différentes structures sont représentées sous la forme d’organigrammes. Un
organigramme de structure représente graphiquement une répartition des tâches et
des pouvoirs dans l’entreprise.
C’est surtout l’organisation interne du département de marketing et ses relations
avec les autres départements qu’il s’agira d’examiner..
31
1.2.1.5. La culture d’entreprise
Pour M. Thévenet « la culture d’entreprise est un ensemble de références partagées
dans l’organisation, construites tout au long de son histoire en réponse aux
problèmes rencontrées par l’entreprise ».
Ces références communes peuvent être :
- des valeurs, c’est à dire des finalités essentielles poursuivies par
l’entreprise et ses salariés,
- des symboles : personne, objet ou fait qui par sa forme ou sa nature
évoque quelque chose (logo, récompenses, tenues vestimentaires…)
- des rites : manière d’agir propre à l’entreprise (manière de débuter le
travail, pause, détente, repas…).
- des mythes : récit qui permet d’illustrer avec force un symbole ou une
attitude (histoires édifiantes, héros de l’entreprise…).
• Les vaches à lait : sont des DAS où la croissance est réduite, les besoins de
financement sont donc limités. En revanche la position de leader fait de ces
32
activités des sources de dégagement important de liquidités.
• Les poids morts : sont des DAS vieillis pour lesquels l’entreprise n’a pas su
s’imposer en termes de part de marché. Ils se caractérisent par une double
absence de besoin et de dégagement de liquidité. Ils n’apportent à l’entreprise ni
croissance, ni marge..
• Les dilemmes : sont des DAS à fort taux de croissance, mais pour lesquels
l’entreprise n’a pas encore su acquérir des positions concurrentielles dominantes.
Ces DAS sont demandeurs de ressources financières pour assurer leur
développement. Ils contribuent à la croissance de l’entreprise et nécessitent des
liquidités. Le terme de dilemme fait référence au choix stratégique qui s’impose à
l’entreprise : soit investir pour que le DAS devienne une vedette, soit désinvestir.
Si l’entreprise refuse de choisir, les dilemmes sont appelés à devenir des poids
morts.
+
VEDETTE DILEMME
du marché
Croissance
POIDS MORT
VACHE A LAIT Equilibre de liquidités ou
Surplus de liquidités besoins nets
– + –
Part de marché relative
Sur un plan financier, le portefeuille doit globalement s’équilibrer, les DAS étant dans
des situations complémentaires. On peut d’ailleurs représenter le circuit de
financement de la matrice BCG en précisant que les « vaches à lait » doivent
financer le développement des « dilemmes » et leur transformation en « vedettes »,
33
les « vedettes » vieillissantes devenant des « vaches à lait », qui sur le déclin
rejoindront les « poids morts ».
♦ Stratégies génériques
Dans la matrice BCG, à chaque situation peuvent être appliquées une ou plusieurs
stratégies génériques.
+
du marché
Croissance
VEDETTE DILEMME
Renforcement et Désinvestissement
investissement Investissement
Maintien Segmentation
POIDS MORT
VACHE A LAIT Maintien sans
Maintien sans investissement
investissement Désinvestissement
– + –
Part de marché relative
D’autres modèles de portefeuille ont été proposés (Mc Kinsey, AD Little, Shell…).
Tous ces modèles présentent certains avantages : ils aident à comprendre la nature
de son secteur, à améliorer la qualité de sa réflexion, à anticiper les évolutions, à
identifier les incertitudes et surtout à choisir les terrains d’investissement ou de
désinvestissement en fonction des ressources disponibles.
Cependant ils doivent être utilisés avec précaution : ils peuvent être à l’origine de
recommandations fondées sur des informations incomplètes ou biaisées. Par
exemple la recommandation de désinvestissement fondée sur des critères financiers
omet fréquemment les impacts sociaux (licenciements, pertes de savoir-faire,
détérioration de la culture d’entreprise…) et l’impact en terme d’image sur la
clientèle.
1.3. LE DIAGNOSTIC
Il s’agit de réaliser un pronostic sur l’évolution possible de l’entreprise sur son
marché, à partir de l’analyse externe de son environnement et de l’analyse interne.
34
1.3.1. Diagnostic externe
L’entreprise a analysé :
- le macro environnement : démographique, économique, technologique,
socioculturel, institutionnel et juridique
- le micro environnement : marché, comportement des acheteurs,
concurrence, distribution
Il s’agit dans le diagnostic d’identifier pour chacun de ces éléments ceux qui
représentent des opportunités ou des menaces.
♦ Opportunités
Une opportunité, pour une entreprise, est une circonstance ou une occasion qui vient
à se présenter dans l’environnement : évolution du marché (nouveaux besoins,
nouvelles demandes…), d’une innovation technologique (autorisant de nouveaux
procédés de fabrication ou de commercialisation)…
De nombreuses opportunités sont susceptibles de se présenter. L’entreprise sera en
mesure de saisir celles pour lesquelles elle peut espérer jouir d’un avantage
concurrentiel.
♦ Menaces
Une menace est un problème posé par une tendance défavorable ou une
perturbation de l’environnement, susceptible d’affecter le secteur d’activité et qui, en
l’absence d’une réponse marketing appropriée conduirait à une détérioration de la
position de l’entreprise sur son marché..
Une menace est d’autant plus grave qu’elle affectera en profondeur la rentabilité de
l’entreprise et qu’elle a de grandes chances de se réaliser.
♦ Forces
Une force est une capacité (individuelle ou collective), une compétence distinctive,
un pouvoir qui procure un avantage différentiel à l’entreprise. Une entreprise jouira
d’un avantage différentiel à partir du moment où ses compétences distinctives lui
permettront de remplir plus facilement que ses concurrents les conditions requises
pour exploiter une opportunité avec succès.
La question essentielle est souvent : l’entreprise dispose-t-elle des forces
nécessaires pour être en mesure de saisir les opportunités et de les mener à terme ?
♦ Faiblesses
Une faiblesse est une défaillance ou un manque de résistance ou de capacité,
souvent une fragilité qui est susceptible de créer un handicap dans un domaine
35
d’activité.
La question essentielle est souvent : l’entreprise doit-elle se limiter aux opportunités
correspondant à ses forces actuelles ou bien acquérir les compétences qui lui font
défaut pour affronter de nouveaux marchés ?.
2 - APPROCHE STRATEGIQUE ET
OPERATIONNELLE
36
Diagnostic interne et externe Objectifs
Segmentation, ciblage,
positionnement
Choix stratégiques
Marketing MIX
Contrôle
37
2.1.3. Segmentation, ciblage et positionnement
Il est rare qu’une entreprise intervenant sur un marché puisse s’adresser à tous les
acheteurs. Ceux-ci sont trop nombreux, dispersés et hétérogènes dans leurs attentes
et leur mode d’achat. Aussi, elle a souvent intérêt à rechercher un sous-marché
attractif et compatible avec ses objectifs, ses compétences et ses ressources.
Le marketing de ciblage suppose une démarche en trois temps appelée S.C.P.
(Segmentation-Ciblage-Positionnement).
Segmentation du Ciblage Positionnement
Marché
4. Evaluation de 6. Elaboration du
1. Niveau de l’attrait positionnement
segmentation relatif de chaque 7. Mise en place du
2. Critères de segment marketing mix
segmentation 5. Choix des cibles correspondant.
3. Analyse des
profils
des segments
2.1.3.1. La segmentation
• marketing segmenté : met l’accent au contraire sur les différences qui opposent
certains groupes de consommateurs à d’autres. L’entreprise s’efforce de classer
ses clients en unités d’analyse homogènes. Le marketing segmenté permet à
l’entreprise d’affiner son offre en l’adaptant davantage à l’audience visée. Ce
faisant, elle peut pratiquer des prix plus élevés, éviter une concurrence frontale et
mieux préciser ses choix en matière de distribution et de communication.
38
marketing personnalisé
Il s’agit d’un marketing individualisé, sur mesure. Les nouvelles technologies de
l’information offrent aujourd’hui des opportunités nouvelles pour la
pratique d’une « personnalisation de masse », que l’on peut définir comme la volonté
d’offrir, à l’échelon industriel des produits ou services adaptés à chaque
client.
marketing intra-individuel
Il consiste à s’adapter non plus seulement à chaque individu mais à chaque
consommateur considéré dans une situation particulière d’achat ou de
consommation. Le « marketing situationnel » représente une nouvelle tendance qui,
petit à petit, gagne un nombre croissant de secteurs d’activité :
l’équipement de la personne, les produits alimentaires, les services.
auto-marketing
Il s’agit d’une forme de marketing dans lequel le client prend davantage d’initiative et
de responsabilité dans ses décisions d’achat. Une telle tendance se
manifeste déjà clairement chez les acheteurs industriels mais de plus en plus auprès
du grand public. De transactionnel, le marketing devient relationnel..
Socio-
démographiques Avantages recherchés
Age, sexe, CSP, revenu, dans le produit
niveau d’éducation…
Utilisation
Psychographiques
Style de vie,
Personnalité
Fidélité.
39
♦ Les conditions de réussite d’une segmentation efficace
Il existe de très nombreuses manières de segmenter un marché. Tous les segments
identifiés ne sont pourtant pas significatifs.
• La pertinence : pour un produit donné, plus le critère est étroitement lié aux
attitudes et comportements des consommateurs, plus il est pertinent.
• La mesurabilité : des informations doivent être disponibles ou pouvoir être
obtenues sur les principales caractéristiques des acheteurs et doivent permettre
de mesurer la taille du segment.
• L’accessibilité : l’entreprise doit pouvoir effectivement diriger ses efforts
commerciaux et donc accéder aux segments choisis. Une PME peut identifier
correctement les différents segments d’un marché sans pouvoir en tirer parti du
fait de ses ressources limitées.
• La rentabilité : la taille du segment doit être suffisante pour rentabiliser les efforts
marketing qui lui seront consacrés
2.1.3.2. Le ciblage
Il s’agit d’évaluer l’attrait relatif de chaque segment et choisir celui (ou ceux) sur
lequel elle concentrera ses efforts (cible) en cohérence avec ses objectifs, ses
compétences et ses ressources.
L’attrait d’un segment dépend de sa taille, de son taux de croissance, de sa
rentabilité, des économies d’échelles et de synergies réalisables et du niveau des
risques encourus.
Voir §2.1.4.1. Les stratégies de segmentation d’un marché
2.1.3.3. Le positionnement
Positionner un produit consiste à le concevoir et le promouvoir de façon à ce qu’il
acquière une valeur distinctive face à la concurrence auprès du marché visé.
Le positionnement s’appuie le plus souvent sur un produit ou une marque, mais il
peut aussi concerner un service, un organisme ou même une personne. Le
positionnement ne s’attache pas à ce que l’on fait avec le produit, mais plutôt à ce
que le produit (ou la marque) représente pour le client.
Positionner un produit c’est :
- donner au produit une position spécifique dans l’esprit des
consommateurs,
- différencier clairement le produit des produits concurrents.
40
♦ Eléments de différenciation des produits
Produit
U U Services
U U Personnel
U U U Point de vente
U Image
U U
41
marché ou de forte concurrence.
42
différenciation et la faire percevoir par les consommateurs.
♦ L’innovation : La marque lance sur le marché un produit nouveau ou qui se
substitue à un produit existant. Cette stratégie assure une avance à l’entreprise
pionnière par rapport à ses concurrents et lui ouvre les portes d’un marché quasi-
monopolistique
pendant un certain temps. Ce temps d’avance est d’autant plus
long que les barrières à l’entrée sont importantes (rupture technologique,
investissements en recherche importants…). C’est cependant la stratégie de
positionnement la plus coûteuse et la plus risquée.
2.2.1. LE PRODUIT
2.2.1.1. Définition
“Le produit est un bien ou un service offert sur le marché de façon à y être
remarqué, acquis ou consommé en vue de satisfaire un besoin.”
D’après “Marketing Management” Kotler et Dubois Ed. Publi Union
Produits
43
mythiques…
♦ Définition
La notion de cycle de vie fait référence à l’évolution de ventes d’un produit depuis
son introduction sur le marché jusqu’à son retrait.
Elle peut concerner :
- un type de produit,
- une classe de produits,
- une marque.
♦ Hypothèses
La notion de cycle de vie de produit (de marque) repose sur plusieurs hypothèses :
- un produit à une durée de vie limitée
- ses ventes passent par différents stades d’évolution
- son niveau de rentabilité varie en fonction de chaque stade du cycle
- les stratégies marketing les plus appropriées diffèrent à chaque étape.
On sait cependant que la réalité diffère quelque peu de ces hypothèses : cycles très
variables selon les produits et l’identification des phases est quelque peu arbitraire.
ventes
44
Phase de lancement : mise en place progressive du produit sur le marché
- bas niveau des ventes
- dépenses comerciales importantes
- concurrence limitée notamment pour le pionnier
La durée totale du cycle de vie peut varier en fonction des types de produits, des
problèmes de mise au point, de l’intégration par les réseaux de distribution, de
l’acceptation par les consommateurs et la concurrence.
Le concept peut s’appliquer à une classe de produits (les cigarettes à bout filtre) ou à
une marque particulière de produits ( les « Gauloise » à bout filtre)
Les classes de produit ont généralement une durée de vie plus longue que les types
de produits, eux-même plus durables que la plupart des marques.
45
Lancement Croissance Maturité déclin
objectifs Développer la Augmenter la part Augmenter le profit Diminuer les
demande globale de marché dépenses et
récolter
stratégie Notoriété-essai Créer une Fidélité pour la fidélité
préférence pour la marque
marque
Produit Mono-produit Elargissement de Différenciation Réduction de la
la gamme Modifications gamme
Amélioration du mineures
produit
prix Ecrémage ou Segmentation Prix de
pénétration positionnement Promotions sur les
prix
distribution Distribution Extension des Importance des Abandon de points
exclusive ou points de vente services associés de vente
sélective
communication Publicité de Publicité d’image Publicité Promotions
notoriété Utilisation des d’entretien ponctuelles de
Promotion d’essai grands médias Promotion de relance
soutien
♦ Définition
On appelle gamme un ensemble de produits liés entre eux du fait qu’ils fonctionnent
de la même manière, s’adressent aux mêmes clients ou sont vendus dans les
mêmes points de vente ou zones de prix.
46
Profondeur de la ligne
A
Largeur de A1 A2 A3 A4
la gamme
B1 B2
C
C1 C2 C3
Gestion de la gamme
47
2.2.1.4.3. Gestion de la marque
♦ Définition
La marque est un nom, un terme, un signe, un symbole, un dessin ou toute
combinaison de ces éléments servant à identifier les biens ou services d’un vendeur
ou d’un groupe de vendeurs et à les différencier des concurrents.
D’après “Marketing Management” Kotler et Dubois Ed. Publi Union
Marque-produit Une marque pour chaque Ariel, Vizir, Dash, Zest, Camay,
produit. Monsavon… (Procter et
Associe un nom et une Gamble)
promesse spécifique à un Badoit, Fruité… (Evian
produit
Branduit Désigne un produit, proposé par Pastis, Légo, Schweppes
une seule firme, que l’on ne peut
identifier que par sa marque.
Absence de dénomination
générique
Marque-ombrelle Désigne un ensemble Dim, Nestlé, Buitoni, Seb,
hétérogène de produits dont Moulinex, Calor, Vedette
chacun bénéficie d’une
promesse spécifique
Marque-ligne Regroupe sous un même nom N° 5, N° 19, Antaeus, Monsieur
des produits qui s’adressent à (Chanel)
une clientèle particulière et Poison, Jules, Diorela (Dior)
bénéficient d’une promesse
spécifique
Marque-caution Liée à plusieurs gammes Danone, Dany, Danette
complexes de produits, elle vient Gillette, Gill, Contour
en complément d’une autre Yoplait, Yop
marque pour authentifier le
produit
Griffe Signature d’une création Yves Saint-Laurent,
originale. Le territoire de la griffe Louis Vuitton,
s’exprime par rapport à une Cartier
compétence reconnue et un
style.
48
D’après J.J. Cagarra (1990)”L’identité nominale du produit” Actes du 6 ème congrès de
l’association Française du Marketing.
♦ Le “capital-marque”
“C’est la valeur ajoutée par le nom d’une marque et récompensée par le marché
sous forme de profits accrus ou de parts de marché élevées. Elle peut être vue par
les clients et les membres du canal comme à la fois un actif financier et un ensemble
d’associations et de comportements favorables”.
D.A. Aaker Managing brand equity New York Free Press 1991
Pour conserver ce capital marque, pour en préserver l’image, les firmes doivent
avoir une politique de communication conforme à l’image qu’elles souhaitent
véhiculer. Ce sont les firmes leaders qui ont les dépenses publicitaires les plus
fortes..51
2.2.2. LE PRIX
Toutes les entreprises doivent déterminer un prix de vente pour leurs produits et
services.
Le prix est la seule variable du marketing mix qui génère des revenus. Toutes les
autres variables n’engendrent que des dépenses pour l’entreprise. On saisit donc
toute l’importance de la fixation des prix et de leur variation.
49
2.2.2.1. La fixation des prix
Quand elle lance un nouveau produit, s’attaque à un nouveau marché, répond à un
appel d’offres, l’entreprise est confrontée à un problème de fixation de prix.
Pour fixer un prix, six étapes sont nécessaires :
Déterminer l’objectif > Evaluer la demande > Estimer le coût > Analyser la concurrence > Choisir une
méthode de tarification > Fixer le prix
♦ Objectifs
Toute entreprise doit d’abord clarifier l’objectif qu’elle s’efforce d’atteindre à travers
sa tarification. Si la cible et le positionnement ont été clairement identifiés, le prix en
découle logiquement.
Prix
Quantité
Le prix proposé influence le volume des produits vendus. Cette influence est plus ou
moins forte en fonction de l’élasticité (E) des ventes par rapport au prix.
D1-D0
D0
e = -----------------
P1- P0
P0.
D1 = demande période 1
D0 = demande période 0
P1 = prix période 1
P0 = prix période 0
Si |e| >1, la demande est élastique, c’est à dire sensible au prix
Si |e| =1, la demande est rigide : une modification du prix n’engendre pas une
variation de la demande.
Si |e| <1, la demande n’est pas sensible au prix
50
• Objectif de rentabilité
• Objectif de gamme
Le prix d’un produit peut avoir des conséquences sur les ventes d’autres produits de
la gamme. Ainsi, la fixation du prix peut avoir pour objectif d’optimiser les ventes des
produits d’une gamme (exemple : utilisation de prix d’appel).
• Objectif d’image
Au prix est souvent associé une image de qualité. La fixation d’un prix élevé peut
donc avoir pour objectif, le maintien ou la création d’une image de produit de qualité.
♦ Evaluation de la demande
Plusieurs facteurs affectent la sensibilité de la demande par rapport au prix (valeur
délivrée au produit par le consommateur, qualité perçue, connaissance des produits
de substitution, facilité de comparaison, poids de la dépense dans le budget, poids
du prix dans le coût total, …). Aussi, dans la pratique il est difficile d’établir une
véritable courbe de demande et donc d’apprécier, même approximativement, les
variations de demande à la suite d’une variation de prix.
Pour évaluer la demande/prix, les entreprises procèdent à des études de « prix
psychologique », sur la base d’un échantillon représentatif du marché du nouveau
produit. Les personnes interrogées répondent aux questions suivantes :
- « au-dessus de quel prix n’achèteriez-vous pas ce produit car vous le
jugeriez trop cher ? »
- « au-dessous de quel prix n’achèteriez-vous pas ce produit, car vous
penseriez qu’il n’est pas de bonne qualité ? »..
En comparant les courbes de prix minima et maxima, on déduit le volume de
demande (nombre de personnes considérant le prix comme acceptable) pour
différents niveaux de prix.
51
Coûts fixes Insensibles aux variations de la
(coûts de structure) production
♦ Analyse de la concurrence
Entre le prix plafond issu de la demande et le prix plancher imposé par les coûts, les
prix pratiqués par les concurrents constituent un troisième pôle de référence. Les
méthodes utilisées sont les suivantes :
- relevés de prix
- analyse des tarifs
- enquêtes auprès des consommateurs.
La connaissance des valeurs perçues par les consommateurs des produits
concurrents par rapport aux prix pratiqués par ceux-ci, oriente la politique de
tarification de l’entreprise.
Prix trop bas Coûts Prix des concurrents Valeur Prix trop élevé
et substituts perçue du produit
• coût + marge : consiste à définir le prix à partir d’un taux de marque (marge)
ajouté au coût total.
• Taux de rentabilité souhaité : déterminer le prix qui permet d’obtenir un taux de
rentabilité donné, à partir d’un coût et d’un volume de vente attendu.
• Prix du marché : vendre plus cher, moins cher ou au même prix que le principal
concurrent.
52
• Prix de soumission : dans une procédure d’appel d’offres ou d’adjudication,
lorsque plusieurs entreprises sont en compétition pour obtenir un contrat,
chacune d’entre elles soumet un prix fonction de son appréciation des
soumissions des concurrents.
♦ Le choix final
♦ La politique d’écrémage
Elle consiste à conquérir rapidement, une part importante d’un vaste marché, grâce à
un prix bas, mais à l’aide d’une publicité intense et d’une politique de distribution de
masse.
Le choix d’une telle politique se justifie quand :
- les ventes sont très sensibles au prix, même en période de lancement ;
- on peut réaliser des économies d’échelle sur les coûts unitaires ;
- on sait que le produit sera immédiatement menacé par une vive
concurrence dès le lancement ;
- il n’existe pas de « marché d’élite ».
Par ce choix, l’entreprise élève des barrières face aux concurrents potentiels et
acquière sur le marché une position de leader.
Cependant cette politique est très coûteuse, elle exige de gros investissements en
53
production et en commercialisation.
De plus en plus d’entreprises fixent leur prix à partir de la valeur perçue du produit
par le client. Cette approche est liée à la réflexion sur le positionnement.
L’entreprise élabore un positionnement en tenant compte d’une cible particulière et
de la qualité du produit offert. Le positionnement choisi fournit une première
indication de prix, l’entreprise calcule ensuite le volume qu’elle peut espérer vendre à
ce prix, puis estime la capacité de production et l’investissement nécessaire ainsi
que les coûts unitaires. Elle est alors en mesure d’évaluer le profit correspondant. Si
celui-ci est suffisant, elle continue d’explorer le projet, sinon elle abandonne.
Cette méthode suppose que l’on connaisse bien la perception du produit par
l’acheteur, non seulement dans ses dimensions économiques, mais également
psychologiques.
♦ Prix et marque
Le prix finalement choisi doit tenir compte de la marque (la notoriété à son prix) et de
l’effort publicitaire consenti pour maintenir la notoriété de cette marque.
54
qu’interdite par la loi Royer est fréquente dans la pratique car les producteurs ne
veulent pas se priver des commandes des gros clients.
Toute entreprise qui fixe ou modifie un prix doit se préoccuper autant des réactions
des clients que de celles des concurrents. Les réactions des concurrents sont
d’autant plus vives que leur nombre est limité, que le produit est homogène et que
les clients sont bien informés.
- sur certains marchés, les concurrents alignent leurs prix : guerre des prix.
Le leader d’un marché est souvent la cible d’une guerre des prix
déclenchée par d’autres entreprises soucieuses d’augmenter leur part de
marché.
- Sur des marchés où les produits sont plus différenciés, chaque entreprise
à plus de latitude puisque les critères d’achats des clients sont.
nombreux (service, qualité, sécurité…), rendant l’acheteur moins sensible
au prix.
Une entreprise peut être amenée à baisser temporairement ses prix. Les prix
55
promotionnels revêtent de multiples formes :
- articles à prix coûtant
- offres spéciales
- offres de remboursement
- crédit gratuit
Cette méthode consiste à moduler les prix selon la demande. Le prix discriminatoire,
très réglementé, peut prendre plusieurs formes :
• discrimination entre les clients : tous ne paient pas le même prix pour un
produit ou un service donné ;
• discrimination entre les produits : prix différents pour des versions
légèrement
modifiées d’un même article ;
• discrimination d’image : un même produit vendu sous des marques et à
des
prix différents ;
• discrimination selon la place : les différences dans la demande pour les
diverses places, font varier leur prix ;
• discrimination en fonction du temps : au cas où la demande d’une produit
varie en fonction de son cycle de vie, des saisons, des jours, des heures.
2.2.3. LA COMMUNICATION
MEDIA
Bruit
REPONSE FEED-BACK
56
2.2.3.2. Les étapes de l’élaboration d’un plan de communication
• La publicité média
• La promotion des ventes
• Le parrainage : sponsoring et mécénat
• Le marketing direct
• Les relations publiques
♦ Définition
On appelle publicité toute forme de communication interactive utilisant un support
payant mis en place pour le compte d’un émetteur identifié en tant que tel.
57
♦ Les partenaires de la publicité
Annonceur
Régies
Rattachées à des supports
ou
à des agences
Supports
1 Démarche générale
Définition de la stratégie
publicitaire
Cibles
Objectifs
Contraintes
Lancement et
Modifications Modifications éventuelles
contrôle.
Eventuelles
58
2 Elaboration des messages
• La copie stratégie :
Promesse (axe) : Proposition concrète faite au consommateur
Preuve (justification) : Support de la promesse correspondant à une
caractéristique distinctive du produit
Bénéfice consommateur : le « plus » apporté par l’utilisation du
Produit, l’avantage suggéré
Le ton : les éléments du message visant à créer une atmosphère
La proposition doit :
- être unique
- faire une promesse
- être vendeuse
- être crédible
• L’annonce publicitaire
Elle se compose de plusieurs éléments qui peuvent être visuels, écrits ou sonores.
Les principaux éléments sont : l’accroche, les titres et sous -titres, le texte (body
copy), le slogan, la marque, le logo et la signature publicitaire (base line).
59
Critères qualitatifs Définitions et commentaires
Nature du message Qualités nécessaires à l’expression : style
artistique ou purement
informatif, couleurs, formats disponibles…
60
Audience moyenne Moyenne des audiences enregistrées pendant
une période déterminée
Audience utile Personnes faisant partie à la fois de l’audience
d’un support et de la cible
visée.
Taux de couverture = ( Audience utile / population
cible) x 100
Echelle de puissance Classement décroissant des supports en fonction
de l’importance de
l’audience utile
Il doit préciser :
- La combinaison des supports sélectionnés
- Le nombre d’insertions ou de passages dans chaque support
- Le rythme de passage et le déroulement dans le temps
- Le budget.
61
2.2.3.3.2. Les techniques promotionnelles
♦ Définition
Ensemble de techniques qui consistent à ajouter temporairement un avantage
supplémentaire à un produit (bien ou service) dans le but de stimuler la demande en
augmentant le rythme ou le niveau des achats.
62
directe de l’événement : discrète, à faible
avant, intention
pendant et après son commerciale
apparition
RETOMBEES A court et moyen terme A moyen et long terme
DOMAINE Sport, Sponsoring Culturel, humanitaire,
d’émissions technique
♦ Définition
Le marketing direct est une forme particulière de la démarche marketing, à
l’intersection de la communication et de la distribution (sous certaines formes on
parle de ventes relationnelles) et qui se caractérise par :
• L’utilisation de bases de données permettant d’établir des contacts personnels et
différenciés (personnalisés) entre l’entreprise et ses clients prospects ;
• Le recours à toute technique de communication qui ait pour effet:
- de susciter une réponse immédiate ou du moins à court terme,
- de fournir à la cible visée les moyens de transmettre directement cette
réponse à l’entreprise.
63
2.2.3.3.5. Les relations publiques
♦ Définition
Ensemble des activités de communication et d’information mises en oeuvre par une
entreprise :
- soit à l’intérieur de l’entreprise (RP internes) pour instaurer et développer
un climat de confiance, renforcer la cohésion entre ses différentes
composantes, affirmer la culture d’entreprise, motiver les salariés…
- soit à l’extérieur de l’entreprise (RP externes) pour développer de bonnes
relations entre l’entreprise et ses différents publics : clients, prescripteurs,
fournisseurs, représentants des collectivités locales, presse… Elle crée
ainsi un capital de sympathie et renforce son image.
2.2.4. LA DISTRIBUTION
64
biens : les produits pharmaceutiques par exemple.
• liées aux habitudes et au comportement d’achat des consommateurs
Un niveau détaillant
Fabricant Consommateur
Deux niveaux grossiste détaillant
65
2.2.4.3. Choix tactiques de distribution
• Critères quantitatifs :
taux de DN (Distribution Numérique) : pourcentage des magasins détenteurs de
la marque de façon habituelle.
taux de DV (Distribution Valeur) : pourcentage du chiffre d’affaires total de la
famille de produits concernés réalisé par les magasins qui référencent la marque.
Ceci constitue une indication du potentiel de vente des magasins qui détiennent
la marque.
zone de chalandise : zone d’attraction commerciale du point de vente dont il
possible d’évaluer le potentiel de vente par des courbes isochrones ou par des
courbes isométriques (courbes reliant des points situés à des temps de trajet (ou
des distances en km) identiques du point de vente.
Chiffre d’affaires prévisionnel
• Critères qualitatifs :
66
• Les étapes de la conquête de la distribution
1. Identifier les types de points de vente les plus lourds en DV ;
2. Choisir parmi ceux-ci les enseignes les plus dynamiques pour la famille de
produits concernée ;
3. Entamer la négociation au niveau des centrales puis éventuellement les
poursuivre au niveau régional ;
4. Se faire référencer point de vente par point de vente..
♦ Le merchandising
On désigne généralement sous le nom de merchandising (marchéage), l’ensemble
des techniques destinées à améliorer la présentation des produits dans un espace
de vente.
• L’assortiment
L’ensemble des articles qu’offre un magasin à sa clientèle constitue l’assortiment.
la largeur de l’assortiment exprime le nombre de modèles différents,
pour un article donné.
la profondeur indique que pour chaque modèle, existe un choix
riche en coloris,
dessins, tailles…
CLASSEMENT DES FORMES DE COMMERCE SELON LEUR ASSSORTIMENT
• Le choix du rayon
Le choix du rayon revient à définir l’univers de concurrence dans lequel on veut
positionner le produit. Il faut tenir compte de la fréquentation du rayon par les
consommateurs.
67
• Choix dans le rayon
LE LINEAIRE
Ventes
favorisées Produits d’attraction
Forte marge unitaire
Faible rotation
4 facing YEUX
Produits volumineux
Ventes SOL Faible marge unitaire
Défav.
Faible rotation
68
produits de l’entreprise
- la vente : approche du client, présentation commerciale, réponses aux
objections et conclusion
- le service : conseil, assistance technique ou financière
- la fidélisation de la clientèle en proposant une offre complémentaire
-
Il importe par conséquent de spécifier la façon dont les vendeurs répartiront leur
temps et leur spécifier des objectifs réalistes, compréhensibles et motivants.
69
• Motivation des représentants
Dans toute force de vente, il existe des individus qui travaillent au maximum de leurs
possibilités sans avoir besoin d’être stimulés (vocation). Mais la plupart des autres
doivent être encouragés, surtout lorsqu’un effort de vente créatif est exigé.
Trois chercheurs américains Churchill, Ford et Walker ont étudié les facteurs qui
sous-tendent la motivation des vendeurs. Ils les structurent ainsi :
En d’autres termes, plus un vendeur est motivé, plus il s’investit dans son travail et
meilleures sont ses performances. Il est alors mieux récompensé donc satisfait et
motivé à poursuivre ses efforts.
70
LES PRINCIPAUX CONCEPTS DU MARKETING
Concepts Définitions
U
Annonceur Entreprise qui a l’initiative et pour le compte de laquelle une publicité est
réalisée.
Attitude
Sentiment construit par un consommateur vis-à-vis d’un produit ou d’une marque à
partir des
connaissances qu’il en a (composante cognitive), des émotions qu’il ressent
(composante affective) et
de ses intentions (composante intentionnelle).
C.S.P.
Catégories socio-professionnelles. Huit catégories sont le plus fréquemment utilisées
:
- exploitants agricoles
- artisans, commerçants et chefs d’entreprise
- cadres et professions intellectuelles supérieures
- professions intermédiaires
- employés
- ouvriers
- retraités
- autres personnes sans activités
71
conditionnée en bouteille de 2l, 1.5l, 0.5 l …
Copie stratégie
« Cahier des charges » réalisé par l’annonceur et servant de base à la conception du
message
publicitaire.
Critères de
segmentation
Paramètre utilisé pour découper le marché en segments homogènes. Les critères les
plus
fréquemment utilisés sont :
- les critères socio-démographiques (âge, sexe, C.S.P.)
- les critères psychologiques (personnalités, styles de vie)
- les critères comportementaux (fréquences d’utilisation d’un produit)
- les critères par avantage (avantage-prix, avantage-image …)
Culture
la culture est l'ensemble des habitudes et des aptitudes acquises par l'homme en tant
que membre
d'une société. Cela comprend tout à la fois des connaissances, des croyances, des
savoir-faire, des
valeurs et des normes.
Demande
La demande du marché relative à un produit est le volume total qui serait acheté par
une catégorie de
clientèle donnée, au cours d’une période donnée, dans des conditions
d’environnement donné (pouvoir
d’achat par ex) et en réponse à des actions marketing données.
D.V.
Distribution valeur : part dans le chiffre d'affaires du marché de référence réalisée par
les magasins
vendeurs de la marque étudiée. Ceci constitue un indicateur du potentiel de vente
des magasins qui
72
détiennent la marque.
Désir Volonté d’acquérir un bien pour remédier à l’état de tension créé par un
besoin.
Franchise Contrat par lequel une personne le franchiseur, concède à une autre
personne, le franchisé, une
73
enseigne, un savoir-faire, une assistance, en échange d’une contrepartie financière
(droits, royalties).
Marges Différence entre un prix de vente et un coût : par exemple, la marge brute
est la différence entre le prix
de vente d’un produit et son coût d’achat.
Marketing
Ensemble d’actions qui, dans une économie de marché, ont pour objectif de prévoir
ou de constater, le
cas échéant de stimuler, susciter ou renouveler les désirs des consommateurs en
telle catégorie de
produits et de réaliser l’adaptation continue de l’appareil productif et de l’appareil
commercial d’une
entreprise aux désirs ainsi déterminés.
P.L.V. Publicité sur le lieu de vente. Actions e t moyens de mise en avant des
produits sur le lieu de vente
(présentoirs, stop-rayons …)
Panel Echantillon permanent d’une population sur lequel portent régulièrement des
études.
74
Parrainage
Aide financière ou matérielle apportée par une entreprise à une association
culturelle, sportive ou
humanitaire dans le but de profiter de l’évènement pour améliorer sa notoriété ou son
image. Concerne
le sponsoring ou le mécénat.
Part de marché
Correspond aux ventes réalisées par une entreprise sur un marché donné par
rapport au total des
ventes de ce marché. Calculée en valeur (chiffre d'affaires) ou en volume (nombre
d’articles, poids), la
part est ensuite exprimée en pourcentage.
Prix magique Prix immédiatement inférieur à un nombre entier (9,99 euros) censé
en minimiser l’importance.
Publipostage (ou mailing) Action de marketing direct qui consiste à proposer une
offre personnalisée (par courrier) à
la cible
Qualité Notion subjective qui correspond à l’aptitude d’un produit à satisfaire les
besoins des consommateurs.
Quota Pour la force de vente, objectifs de vente à atteindre par rapport à un objectif
global, exprimé en
nombre de clients ou de produits, ou en chiffre d'affaires.
75
Référencement Procédure selon laquelle un produit proposé par un fournisseur est
accepté par l’acheteur d’une
centrale d’achat, qui le propose ensuite à ses adhérents.
Segment
Groupe d’individus ayant des caractéristiques communes et un comportement
identique
(consommation, loisirs …). On parle aussi de segment pour désigner une catégorie
de produits dans
l’assortiment d’un distributeur.
Style de vie Ensemble d’individus ayant des comportements très proches. Les styles
de vie (ou socio-styles) sont
identifiés à partir des activités, des attitudes et des opinions des personnes
interrogées.
Teasing Technique publicitaire qui consiste à laisser la cible dans l’expectative par
une promesse. Par
exemple : « Demain, j’enlève le haut ».
Veille
Au-delà du renseignement sur l’existant qui permet de s’adapter mais conduit au
suivisme passif, la
veille doit aller chercher dans tous les domaines, croiser les tendances pour
anticiper, mener
l’offensive ; on parle alors parfois d’intelligence économique (exemples : veilles
concurrentielle,
technolologique, marketing…
76
PHARMACIE
Bayer, associé à GlaxoSmithKline pour le marketing, et Eli Lilly s'apprêtent à mettre sur le marché
deux nouveaux produits contre l'impuissance, exploitant un secteur pas toujours médical où la
croissance peut vite être exponentielle. «Selon l'Association américaine d'urologie, le Vardenafil mis
au point par Bayer traite les pannes sexuelles quelles qu'en soient les causes : la dépression, les
maladies cardiaques, l'hypertension, le diabète...», précise le «Financial Times».
Encore quelques tests pour essayer de prouver que ce médicament est supérieur au Viagra, et le
Vardenafil devrait tirer les bénéfices de Bayer et de GlaxoSmithKline vers le haut. Bonne nouvelle
pour les deux laboratoires, aujourd'hui fâcheusement déprimés. Le britannique GlaxoSmithKline
ressent une réelle mollesse depuis la semaine dernière, quand son brevet d'exclusivité sur
l'antibiotique Augmentin, qui était jusque-là sa pompe à finances, est venu à terme. Bayer, pour sa
part, est au plus bas depuis qu'il a dû retirer le Baycol du marché. Son anticholestérol vedette était
accusé d'être impliqué dans le décès de plus d'une cinquantaine de personnes. Les analystes
économiques prédisent plus de 900 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel pour le Vardenafil.
Le Viagra de Pfizer devra également faire face au Cialis d'Eli Lilly, réputé être efficace durant trente-
six heures, soit sept fois plus que son rival. «Voilà qui offre plus de chances d'être prêt au bon
moment», note pudiquement le «FT». Le Cialis devra quand même attendre 2003, les autorités de
santé publique américaine faisant la fine bouche et désirant des preuves supplémentaires de son
innocuité.
Malgré l'arrivée de ses rivaux, le Viagra ne devrait pas se raidir sur ses positions. La pilule à
1,6 milliard d'euros va certainement profiter de l'étude de l'université du Maryland, qui montre que
40 % des hommes pour qui le Viagra fut sans effet n'avaient pas respecté le mode d'emploi. Certains
avaient pris une dose inadaptée, d'autres n'avaient pas tenu compte des incompatibilités avec l'alcool
ou l'abus de nourriture.
Un nouveau concurrent pourrait cependant bientôt pointer... son nez. Le «Financial Times» rapporte
que «le docteur Anthony Atala, un spécialiste des cellules souches, a annoncé hier qu'il était parvenu
à faire croître chez des animaux des tissus érectiles, des cartilages péniens et des tissus testiculaires
capables de sécréter des hormones mâles». Pour le chercheur, une «prothèse biologique» est
réalisable, avec l'avantage de minimiser les risques de rejet puisqu'elle serait issue des propres
cellules du patient. Une telle prothèse pourrait avantageusement remplacer les organes flasques
d'hommes malades. Une annonce qui fera certainement dresser l'oreille du troisième âge.
EG
Courrier International
29/5/2001
77
MARKETING
Réfléchir au nom que l’on va donner à une entreprise est une tendance récente : jusqu’aux 1970, une
société choisissait presque toujours un nom descriptif, et advienne que pourra. Impossible d’ignorer le
commerce auquel se livrait International Business Machines. Avec le temps, IBM s’est imposé, sans
qu’aucun cabinet au monde ne réfléchisse durant des heures aux implications psychanalytiques de
ces trois lettres.
Désormais, la lutte pour l’identification et le teasing est ouverte. Comme l’écrit “The Wall Street
Journal”, “des cabinets engrangent des dizaines, voire des centaines de milliers d’euros, pour
développer des noms et des marques destinés à des entreprises”. Avec un succès très relatif.
“Accenture reçoit régulièrement des coups de fil de personnes voulant contacter Adventure”, poursuit
le quotidien américain. Opodo, filiale Internet de grandes compagnies aériennes pour la vente de
billets d’avion, peut censément se dire de deux manières ; mais le mot continue à n’avoir aucun sens.
Constructions monstrueuses
“Ce sont des noms sans émotion, qui n’évoquent rien, pour personne”, s’amuse Steve Manning,
directeur de l’entreprise de vente de noms A Hundred Monkeys. Et de continuer : “Si aujourd’hui je
suggérais Oracle pour une boîte d’informatique, il y aurait toujours au moins un cadre supérieur pour
me dire que ce nom ne va pas, qu’il évoque le surnaturel, la mort, et qu’aucune société le portant ne
peut réussir.”
Steve Manning est un atypique du secteur. Son travail consiste bien, comme celui de ses rivaux, à
trouver des noms nouveaux, attractifs, faciles à retenir et à identifier dans de nombreuses langues
étrangères, sans pour autant être grossier dans aucune. Mais ce consultant s’oppose à la masse des
mots qui ne veulent rien dire, ce qu’il désigne, dans les colonnes du “Wall Street Journal”, comme “des
constructions morphémiques monstrueuses”.
Exemple type : Agere Systems, qui doit se prononcer a-gear Systems. “La société a expliqué que cela
venait du latin ago, qui signifie mener”, explique le quotidien. “Ce nom est né après consultation du
personnel, d’analystes de l’industrie et de panels tests.” “Et, encore une fois, on ne comprend rien”,
ajoute Steve Manning. “Tous ces gens veulent des noms qui n’aient pas l’air stupide. Tout est fait pour
les lisser, les policer à grands coups de panels. Au final, on obtient un truc neutre et fade : exactement
le contraire de ce qu’il faut.”
Finalement, les experts ne s’accordent que sur un point : toute référence à Internet doit aujourd’hui
être absolument évitée. “C’est trop connoté. Cela limite le champ d’action de l’entreprise. Prenez
Pets.com [pet : animal de compagnie] : difficile pour eux de sortir de l’animal et du web”, écrit “The
Wall Street Journal”. Finalement, laisse entendre le quotidien économique, “si une entreprise est
compétente, si son produit marche, qui s’inquiète réellement du nom ?”
EG
© Courrierinternational.com d'après The Wall Street Journal
HTU UTH
78
TÉLÉPHONIE PORTABLE
Pour n’importe quel équipementier digne de ce nom, les Nokia, Ericsson, Motorola et autres Siemens,
la première préoccupation, une fois un téléphone portable vendu, est : “comment en fourguer un autre
le plus vite possible ?” La question n’est pas anodine. Cette industrie habituée aux résultats
économiques flamboyants depuis plusieurs années est depuis quelques mois rattrapée par une
période de vaches maigres.
Les clients ne se bousculent plus. “Dans l’ouest de l’Europe, plus de 75 % de la population est déjà
équipée. Au-delà de 80 %, tous les experts prédisent une progression beaucoup plus difficile”,
explique “L’Hebdo” de Lausanne.
Aussi, les équipementiers changent-ils leur mobile d’épaule. “Si tu ne vas pas au portable, le portable
ira à toi” devient leur devise. Puisque les machines actuellement vendues font parfaitement leur
boulot, recevoir et émettre de la voix, l’idée consiste à créer un nouveau désir, en multipliant les
possibilités, afin évidemment que tout un chacun se sente l’envie et le besoin d’un nouveau joujou.
Le SMS au rebut
Et, dans cet effort pour vendre à tout prix - ou presque -, les équipementiers se sont trouvés des
complices : les compagnies de téléphone. Lourdement endettées, elles ont bien l’intention de vendre
chèrement les services que les nouveaux portables pourvoiront.
Premier gadget, dont tout un chacun chez Nokia ou Siemens vous dira à quel point il est difficile de
vivre sans, l’appareil photo numérique intégré dans le mobile. “Ne pas s’attendre à des miracles de
résolution”, prévient “L’Hebdo”. Avec leur écran 80 x 60 pixels, “à peine plus grand qu’un timbre-
poste”, les images demeureront symboliques. Toutefois, la nouvelle génération de mobile améliorera
bien les choses, avec des écrans couleur permettant “un transfert sur un ordinateur où la résolution
passe à 1 024 x 768 pixels”. Compter quand même la bagatelle de 800 euros le portable, pour
l’instant.
La fonction appareil photo sera bien utile à ceux qui voudront faire un bel usage des MMS (Multimedia
Messaging Service), que “L’Hebdo” définit comme “une sorte de carte postale électronique qu’il est
possible d’envoyer d’un appareil à l’autre”. Fini le SMS et ses misérables textes de 160 signes ! Le
MMS est un message composé d’une image accompagnée d’une musique ou d’un court texte vocal.
Le récepteur peut être un autre appareil doté de MMS ou une adresse e-mail.
L’image est possible à télécharger sur un site Internet, mais le marketing mettra l’accent sur le côté
amusant d’envoyer ses propres images, d’où l’intérêt de l’appareil photo intégré. “L’Hebdo” signale
que, bien sûr, “il va sans dire que l’envoi ou la réception d’un MMS requiert un téléphone dernier cri”.
Toutefois, pour pouvoir utiliser le MMS, il est nécessaire que le réseau de l’opérateur soit du GPRS
(Global Packet Radio Service), une amélioration large bande de l’actuelle technologie GSM. En
France, Bouygues Télécom vient juste de lancer ce service. Nul doute que SFR et Orange, ses rivaux,
vont suivre.
79
Autre argument pour prouver que votre portable actuel est “has been” : le portable de l’automne, en
vente prochainement, sera capable “de mugir avec la force et la qualité d’une petite radio AM”, avertit
l’hebdomadaire suisse. Et avec beaucoup plus de sonnerie en stock. “Ces téléphones mélomanes
sont du pain bénit pour l’industrie des télécoms. Déjà aujourd’hui, les jeunes utilisateurs cherchent à
singulariser par tous les moyens leur appareil avec des sonneries originales. Ils téléchargent des
mélodies pour lesquelles ils sont même prêts, ô merveilleuse idée, à payer fort cher.” Les sites qui
fournissent les sonneries les facturent autour de 1 euro chaque.
Enfin, le dernier truc qui sera - les équipementiers l’espèrent - à la mode est le jeu. Car, maintenant
que la machine miracle dispose d’un écran couleur et du son adéquat, jouer dessus devient un peu
plus attrayant. Pour ceux qui ont une bonne vue, s’entend. Mais, s’empresse d’expliquer “L’Hebdo”,
cette technologie devrait aussi permettre de télécharger “des programmes plus sérieux, que ce soit le
plan d’une ville, un dictionnaire ou un calepin pour noter ses courses”. Malheureusement, constate le
magazine, “il n’y a encore que très peu de programmes téléchargeables, notamment dans le domaine
des jeux”. Sûr que cela va vite changer.
Maintenant que les équipementiers ont inventé pleins d’astuces pour vendre leurs nouveaux produits,
une question se pose : et dans deux ans ? Pour éviter le retour à la case départ, la réponse a l’air
simple : UMTS (Universal Mobile Telecommunications System). Cette téléphonie de troisième
génération promet carrément Internet sur portable. Et, comme le rapporte “L’hebdo”, “les applications
imaginées par les industriels sont sans limites”.
A un détail prêt : l’UMTS nécessite une licence, hors de prix, ainsi qu’un réseau spécifique, très
coûteux. Les entreprises de télécoms, lourdement endettées pour acquérir les licences, sont pour
l’instant dans l’incapacité financière de mettre en place les réseaux. Seul le conglomérat hongkongais
Hutchison Whampoa dit vouloir lancer sa version avant la fin 2002. Sans garantie, car pour l’instant
les tests effectués sur cette technologie, par British Telecom notamment, ne sont guère concluants.
Régulièrement annoncée, toujours reportée, l’UMTS devient l’Arlésienne des télécoms. L’Arlésienne
ou le Godot. Car il y bien de l’absurde dans tout cela.
EG
© Courrierinternational.com
Courrier International
10/9/2002
80
LUXE
“Après le bide du Millennium, les ventes de champagne ont explosé à nouveau”, note “The
Independent”. “Et vous avez tout intérêt à savourer votre verre de brut cette année, car bientôt ce vin
de fêtes par excellence pourrait se faire rare et son prix quelque peu s’élever”, poursuit le quotidien
britannique.
“En 2002, les producteurs de champagne ont vendu 285 millions de bouteilles à travers le monde ! Sur
le marché intérieur, la consommation est en hausse de 7 %. En Grande-Bretagne, la première
destination d’exportation, c’est 25 % de ventes en plus. Si cette tendance se confirme, la pénurie est à
craindre”, ajoute le journal.
“The Independent” s’explique : “Le vignoble champenois peut au plus fournir 300 millions de bouteilles
par an. Nous arrivons donc à ses limites. Les stocks constitués en vue du passage à l’an 2000 et qui
n’ont pas été utilisés faute de demande ont permis de passer tranquillement les deux dernières
années.” Mais cette bouée de sauvetage est dégonflée.
Les récoltants français sont donc confrontés à un choix difficile : obtenir des autorités le droit de
planter plus de vignes ou laisser des vins mousseux concurrents, provenant essentiellement d’Italie et
d’Australie, gagner des parts de marché. “Plus de vignes veut certes dire plus de production, mais aux
dépens de la qualité. Ce choix est celui des grandes marques, telles Moët & Chandon ou Veuve
Cliquot”, précise “The Independent”. Elles comptent sur leur réputation et la puissance de leur
marketing pour faire avaler la pilule aux consommateurs.
Du côté des petits producteurs, le choix serait plutôt inverse : ils luttent contre la multiplication des
vignes et comptent sur la qualité pour conserver la première place. Tant pis si les vins étrangers
s’emparent du créneau des boissons bon marché. Pour ces récoltants anonymes, c’est la qualité qui
justifie la réputation et donc le prix du champagne.
EG
d'après The Independent
HTU UTH
Le Courrier International
81
SUPERMARCHÉ EN LIGNE
La qualité paie toujours. La petite aventure que conte «L'Hebdo» de Lausanne devrait convaincre
quiconque en douterait. «Tout a commencé le 23 décembre dernier. J'étais devant ma télé, écoutant
le 19 h 30 annoncer la fermeture de LeShop.ch, à la suite du désinvestissement de son actionnaire
unique, Bon Appétit Group», explique Daniel Salzmann à l'hebdomadaire suisse. Or l'homme
d'affaires est «client depuis une année et demie, totalement satisfait par les prestations de ce
supermarché en ligne et convaincu de son avenir.»
Il prend donc contact avec les dirigeants de LeShop et de Bon Appétit Group afin de négocier la
reprise du site et de ses activités. «La période des fêtes de fin d'année est propice car tout le monde
est en vacances. Je n'avais pas à redouter la concurrence pour mener de telles discussions», confie
Daniel Salzmann.
Des discussions rondement menées : la holding ShoppingNet, dont les trois administrateurs sont
Philippe Thévenaz, Jacques Delafontaine et Daniel Salzmann, reprend LeShop.ch, en injectant
7 millions d'euros dans l'affaire. Une somme nécessaire «afin de couvrir les pertes prévisibles et
l'investissement marketing durant les trois prochaines années», note le magazine. L'accord prévoit
que Bon Appétit continuera jusqu'en 2005 à fournir 50 % des biens de consommation proposés à la
vente en ligne. Les emplois des quelque 70 salariés de LeShop sont préservés.
Cette reprise s'apparente toutefois à un véritable défi : la holding parie sur 40 % de croissance
annuelle du chiffre d'affaires. Un objectif qui ne sera possible qu'«en attirant de nouveaux clients, en
plus des 16 000 déjà connectés. Une campagne de séduction plus soutenue en Suisse alémanique
est d'ailleurs prévue.»
Mais la rentabilité de ce commerce en ligne passe aussi par une éducation du client, analyse l'un des
administrateurs. «Nous devons faire comprendre aux concommateurs, sans les brusquer, qu'au-
dessous de 100 euros, leurs achats ne sont pas forcément rentables pour nous. En outre, nous
voulons qu'ils sachent bien que nous ne cherchons pas à les empêcher d'aller faire leur marché le
samedi. Nous sommes fondamentalement un service de confort qui offre notamment l'avantage de
débarrasser le panier de la ménagère de tous les produits lourds, encombrants et désagréables, des
bouteilles d'eau aux packs de lessive.»
Le premier jour de reprise, lundi 27 janvier, donne des raisons d'espérer à LeShop : «427 commandes
ont été passées, soit deux fois plus que de coutume. Cent clients se sont abonnés, soit huit fois plus,
et le chiffre d'affaires de ce jour-là a été sacré 'Record Monday', soit le plus haut rendement jamais
obtenu un premier jour de semaine», conclut «L'Hebdo.»
EG
© Courrierinternational.com d'après L'Hebdo
HTU UTH
Courrier International
31/1/2003
82
MARKETING
Pour vendre,
il faut avoir du nez
“Unff, unff, ça sent quelque chose… Une odeur de sapin peut-être ?” A Noël dernier, les clients du tout
nouveau supermarché Inno de Liège ont pu humer une odeur “inhabituelle pour un centre-ville”, note
“Le Soir”. Un an plus tôt, “City, un concurrent d’Inno, avait parfumé ses allées d’une ‘fragrance de
Noël’ composée d’essences de pin de Sibérie, de cèdre de Virginie, avec un zeste éthéré de baies de
genévrier et un bouquet de fèves de Tonka…”
Après avoir longtemps été oublié au profit des quatre autres sens, constate “Le Soir”, “l’odorat revient
en force dans les stratégies marketing”. En fait, explique Jean-Marc Lehu, auteur du “marketing
olfactif”, “l’acte d’achat et de consommation ne peut plus être considéré comme un acte purement
rationnel. La consommation est plus affective et le consommateur est désormais à la recherche de
stimulations sensorielles et émotionnelles”.
Bref, commente “Le Soir”, “l’odeur fait vibrer en nous une corde qui n’est pas sollicitée par les
techniques classiques de marketing”. Ce constat est avéré par une série d’études américaines qui
signalent qu’une odeur agréable “augmente le temps de fréquentation dans les points de vente de 10
à 15 %. Une senteur réduirait même certains désagréments comme les files d’attente !”
Mais, comme le pointe le quotidien belge, “ce marketing est vieux comme le monde : les vendeurs de
gaufres ou de pain font bien refluer leurs odeurs de cuisson dans la rue”. De même, les parfumeries
vaporisent la dernière fragrance qu’ils veulent vendre. Cela dépasse pourtant rarement le “stade
artisanal”.
Cependant, une entreprise belge s’est positionnée sur ce marché de niche : Comulé. Cette société
bruxelloise a dernièrement “travaillé pour un grand exploitant de parkings afin de désodoriser et de
diffuser des odeurs agréables au niveau des caisses, un moyen de mieux faire passer la pilule. Il
s’agissait en effet de diffuser une odeur qui soit suffisamment discrète pour qu’on n’ait pas
l’impression que le lieu a été parfumé.” Si on ne peut même plus se fier à son nez…
Ph J
© Courrierinternational.com d'après Le Soir
HTU UTH
83
ORDINATEUR
Six foyers américains sur dix possèdent au moins un ordinateur. Comme l’année dernière. Le constat
vient d’Odyssey, une entreprise d’analyse économique de San Francisco. “Cela signifie-t-il que tous
ceux qui veulent un ordinateur en ont déjà un ?” s’interroge “The Mercury News”. La remarque n’est
pas anodine : Nasdaq et autres indices se nourrissent de vente de technologie. Si jamais le marché de
l’ordinateur personnel est arrivé à saturation, alors les années roses de croissance et de marges
bénéficiaires à deux chiffres sont révolues pour les entreprises dites “de technologie”.
“Pas d’inquiétude à avoir”, commente Sean Baenen, l’un des dirigeants d’Odyssey. “C’est une crise du
marketing, pas des ventes. La plupart de ceux qui n’ont pas encore d’ordinateur personnel (PC)
pensent simplement ne pas en avoir besoin.” Sous-entendu : aux spécialistes du marketing de créer le
besoin ou de le révéler. L’ordinateur est à demain ce que le téléphone ou la télévision sont à hier.
Donc, 95 % des Américains devront tôt ou tard s’équiper. Telle est la croyance qui règne parmi les
observateurs du monde de l’informatique.
Trop cher
“Ce n’est pas si clair”, estime “The Mercury News”, “ce n’est pas parce que vous allez nommer un PC
‘gestionnaire de photo numérique’que la foule va se précipiter pour en acquérir un”. Le baratin ne
marche plus. En fait, poursuit le journal californien, “la stagnation des ventes d’ordinateurs s’explique
par trois facteurs différents que l’industrie néglige ou ignore”.
D’abord, l’absence de besoin est une réalité. Non pas que certains acquéreurs potentiels
n’apprécieraient pas d’avoir une machine chez eux, mais désormais écoles, universités ou
bibliothèques mettent des ordinateurs à disposition du public. De quoi faire réfléchir sur la vraie nature
du besoin, surtout quand les ordinateurs premiers prix coûtent au bas mot 600 euros. Pour “The
Mercury News”, “même avec le qualificatif de ‘PC pas cher’, cela reste hors de prix pour de nombreux
foyers.” Les industriels oublient que, dans le pays le plus riche du monde, une part importante de la
population est pauvre.
Ensuite, penser que l’ordinateur va connaître le même succès que le téléphone ou la télévision relève
uniquement de l’idéologie, et de la méthode Coué. “A 600 euros l’objet, sachant que Windows ou
Macintosh sont bien moins faciles à utiliser qu’un mobile ou une télé, 60 % de pénétration semble un
très beau score”, confie Steve Baker, analyste chez NPD Techworld, une société d’analyse de
marché. “Et 95 % est un mythe”.
Enfin, s’ils veulent recommencer à vendre à tout va, les industriels vont devoir se préoccuper un peu
de leurs clients et les voir autrement que comme des vaches à lait. “La consommation de masse a des
règles à respecter”, rappelle “The Mercury News”. En particulier, celle de concevoir des produits pour
tous.
Le quotidien de San Jose note que, quand aux Etats-Unis 70 % des Blancs et des Asiatiques
possèdent un ordinateur, 56 % des Noirs et 49 % des Hispaniques en ont un. Pour le journal, dans le
cas des Hispaniques, l’une des raisons est claire : la langue est une barrière ; 13 % des locuteurs
espagnols aux Etats-Unis ne parlent que cette langue. Pour Gloria Paredes, propriétaire d’une
boutique d’informatique, “la communauté hispanophone veut des ordinateurs avec des logiciels en
espagnol, ce qui est très difficile à trouver”. Les industriels ont donc mangé leur pain blanc, et
Microsoft, Dell et compagnie vont désormais devoir se préoccuper de vendre du matériel accessible à
tous. Un défi qu’ils ne seront sans doute pas capables de relever avant longtemps
84
En couverture - La politique made in France IMAGE
Jusqu'à présent, la France était le pays des passions politiques, des interminables discussions de
café. Un pays où les débats idéologiques enflammaient les coeurs et avaient raison de l'indifférence
des électeurs. Aujourd'hui, pour les candidats à la présidence, l'idéologie est morte et
l'"américanisation" de la campagne électorale vient se substituer au fracas des débats d'idées. Chirac
et Jospin ont tous les deux confié leur sort au marketing politique, nouvelle vedette des élections en
France.
Un groupe de conseillers entoure chacun des candidats. Parmi eux, on trouve non seulement des
stratèges, mais aussi des conseillères en habillement, des sémiologues, des analystes de la presse,
des sondeurs. Leur grand défi : "désidéologiser" le discours de ces deux vétérans de la politique, deux
hommes si habitués au vieux style - sans pour autant en faire la risée de la presse, qui pendant des
années a suivi leurs campagnes, rendant compte de leur dogmatisme politique. La campagne se
personnalise. Le Premier ministre se fait appeler "Lionel", le président, "Jacques", et l'on voit
apparaître en pleine lumière leurs qualités et leurs défauts, leur caractère télégénique ou leur pudeur,
leur intégrité ou leur capacité de simulation lorsqu'on leur pose des questions embarrassantes.
De plus en plus, l'art de la politique cède la place à l'art de l'irréalité, digne d'un spectacle
hollywoodien, et avec les arguments électoraux susceptibles de convaincre à la fois la ménagère qui
regarde la télévision à partir de 3 heures de l'après-midi et ces difficiles "indépendants" qui n'allument
leur poste qu'après 21 heures. Le débat se mue en un spectacle tantôt didactique, tantôt puéril,
généralement surjoué, comme quand le président Chirac s'est lui-même présenté sous les traits du
"candidat de la passion".
Courrier International
28/03/2002, Numero 595
85
VIN
“Au secours ! Les Français arrivent !” C’est en français que le “Sydney Morning Herald” commence
son article consacré aux vins made in France. Pendant des années, la production australienne avait
fait d’énormes progrès alors que les vins français perdaient des parts de marché. C’est en reprenant
les techniques de production et de marketing du Nouveau Monde, s’amuse le journal australien, que la
France espère aujourd’hui regagner son lustre d’antan.
Pourtant, à première vue, l’industrie viticole hexagonale reste, selon le quotidien australien, “trop
fragmentée et trop sévèrement contrôlée pour se réformer.” De plus, “l’idée que la France produit le
meilleur vin du monde et qu’elle n’a ainsi aucun besoin de faire sa publicité est enracinée dans la
mentalité française”. Conclusion, la France n’avait rien à apprendre des techniques de production et
de marketing australiennes.
Pour sonner le réveil de la France des chais et des vins de pays, il faudra attendre, selon le quotidien
de Sydney, le rapport alarmiste de Jacques Berthomeau, en juillet 2001. Le contrôleur général des
offices écrivait notamment : “Jusqu’à récemment, le vin était notre spécialité. Nous étions le centre du
monde, la référence absolue. Aujourd’hui, les barbares sont à nos portes. Australie, Nouvelle-Zélande,
Etats-Unis, Argentine, Chili, Afrique du Sud… Le vin du Nouveau Monde va-t-il faire couler l’industrie
vinicole du Vieux Continent ?”
Cette banderille de l’administration se double d’un recul historique de la place du vin français dans le
monde. La France conserve péniblement 40 % du marché. Pis, au Royaume-Uni, le vin australien est
sur le point de détrôner les sauternes et autres château-margot. Malgré les annonces du ministère de
l’Agriculture français, le changement n’est pas pour demain. Le journal de Sydney explique : “Vu la
lenteur et la lourdeur administrative française, un changement de stratégie de l’industrie vinicole
française ne risque pas de se faire en une nuit...”
Ph J
© Courrierinternational.com d'après Sydney Morning Herald
HTU UTH
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Dossier - Jeux Olympiques : Salt Lake City 2002 TURIN 2006
TIMES UNION
Albany (Etat de New York)
Salut Jacko !
Trop mortels, les Jeux de Salt Lake. L'impact sur les jeunes est trop fort. J'veux dire, mec, ça
assure grave. On va largement rentrer dans notre pognon, avec 70 millions de dollars [79,8
millions d'euros] de bénef, mais ce qui nous inquiète, c'est que, d'après nous, la thune va pas
couler à flots comme ça dans quatre ans, quand les Jeux d'hiver iront à Turin, en Italie.
Voilà le deal : les Américains ne s'intéressent pas à 90 % de ces disciplines hivernales ou
même s'en foutent, sauf une fois tous les quatre ans.
Pour la plupart d'entre nous, ces sports internationaux dominés par des Scandinaves, des
Allemands et des Russes sont tellement, comment dire... étrangers. Mais les nouvelles
épreuves, comme le snowboard et le ski acrobatique, ça, ça plaît au jeune public américain.
Surtout parce que, là, c'est nous les meilleurs. Pour les plus vieux, on pourrait même essayer
de faire traduire ce que dit Kevin Delaney, le spécialiste du snowboard.
Pour ceux qui le comprennent, faut en faire un peu plus au niveau de ces sports. Dans
quatre ans, les lycéens pourront t'aligner "des 720 McTwist sans même un bobble au niveau
de leurs triples". Ouais, je sais, moi non plus, je sais pas ce que ça veut dire. Mais c'est
plutôt bon signe quand on considère la courbe démographique des 18-34 ans.
En fait, on pourrait trafiquer juste un peu tous les sports pour que les jeunes laissent tomber
le catch pendant quelques semaines. Nos gars du marketing nous ont sorti une liste pour les
prochains Jeux. Y a qu'à ajouter les épreuves suivantes :
- ski de fond : ajouter des coyotes affamés ;
- biathlon : autoriser les tirs de riposte ;
- short-track : remplacer les patins par des motos ;
- saut à skis : couvrir de glace la piste d'atterrissage ;
- ski acrobatique : avec des cerceaux enflammés ;
- bobsleigh : sur des tremplins de 90 et 120 mètres ;
- luge : prévoir des congères ;
- patinage en couple : épreuves pour couples du même sexe (ça va marcher du tonnerre
87
auprès des fans de luge en couple pour hommes) ;
- danse sur glace : autoriser les prises de catch ;
- curling : avec des pierres en C4.
Après votre foutoir au niveau du patinage artistique avec les gars de la fédération, là, vous
devriez pas avoir trop de mal à trafiquer quelques règles de plus. Si, dans un "sport" comme
ça, il suffit d'avoir le meilleur chorégraphe, le meilleur styliste, les meilleurs contacts
internationaux ou le meilleur consultant en relations publiques pour gagner, c'est clair qu'on
peut faire ce qu'on veut.
Faut poursuivre ce rajeunissement des JO en 2006. Y a des gars, chez nous, à NBC, qui ont
jeté quelques nouvelles idées de sports sur le papier. L'un d'entre eux avait cinq anneaux
dans son arcade sourcilière. Cinq anneaux, c'est un signe, non ?
Bobsleigh acrobatique : un double saut périlleux arrière avec un engin de 250 kilos, la
classe.
Descente en body-surf : sûr qu'y aura de la casse tout au long du parcours.
Motocross sur glace : de toute façon, les fans de patinage aiment bien quand ça grince.
Comme le dit mon pote Delaney, si on met ces modifs en place, les prochains Jeux seront
trop mortels.
Au niveau du style, comment qu'on va pas se la péter, hein, Jacko !
Salut,
Dick.
Mark McGuire
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Dossier - Jeux Olympiques : Salt Lake City 2002
Un cheeseburger McDonald's, des Pop-Tarts Kellogg's, du Coca-Cola. On est loin, a priori, du menu
d'un champion olympique. Pourtant ces marques ont décroché le titre - ô combien convoité - de
fournisseurs officiels des Jeux olympiques d'hiver 2002. Seules onze sociétés de produits alimentaires
et de boissons ont obtenu à grands frais le droit de nourrir les athlètes, le personnel et les bénévoles
au cours de ces JO.
Ces sociétés sont aussi les seules à pouvoir vendre leurs produits au million et demi de spectateurs
attendus à Salt Lake City. Le prix plancher pour un contrat olympique est d'environ 3 millions de
dollars [3,4 millions d'euros], en partie sous forme de services et de produits. Un parrainage haut de
gamme, assorti du droit exclusif de nourrir les athlètes, avec un contrat qui court jusqu'aux Jeux de
2004, peut atteindre près de 60 millions de dollars.
La bière Budweiser, la soupe Campbell's, les céréales de petit déjeuner Kellogg's et des amuse-
gueules Bugles de General Mills seront également en vedette aux JO d'hiver. Mais ce sont Coca-Cola
et McDonald's qui se sont réservé la part du lion. Le géant des hamburgers est la seule société à avoir
le droit de nourrir les athlètes olympiques dans le monde entier, et elle jouit de l'exclusivité à l'intérieur
du village olympique. McDonald's prévoit de vendre 4 000 hamburgers par jour aux athlètes, aux
entraîneurs et au personnel. Coca-Cola fournit aux athlètes des boissons gratuites, notamment en
distribuant 5 500 chaînes porte-clés munies d'un dispositif radio leur permettant d'avoir accès à un
distributeur de Coca qui les servira gratuitement.
Et que se passera-t-il s'il reste de la nourriture ? La Banque alimentaire de l'Utah veillera à ce que les
soupes populaires, les centres d'accueil pour sans-abri et les organisations caritatives puissent
récupérer l'excédent. "Je crois que nous avons eu les yeux plus gros que le ventre", reconnaît Mark
Lewis, vice-président du marketing du Comité d'organisation de Salt Lake City.
Kim Serverson
Le Courrier International
89
Insolites
Moins chère que le rafting ou les jeux de guerre, la marche sur le feu est sûrement le plus répandu de
tous les exercices de "création d'esprit d'équipe" infligés aux cadres. Selon l'une des sociétés
américaines qui proposent cette activité, cela stimule le personnel et accroît la productivité ; les clients
sont ravis, les bénéfices s'envolent.
Lorsqu'on marche sur des charbons ardents, on se brûle les pieds : c'est ce qu'ont appris pour leur
part les managers de Burger King, réunis en Floride début octobre. Parmi les cent personnes qui
participaient au séminaire d'entreprise obligatoire organisé à l' Ocean Reef Club de Key Largo, une
dizaine se sont retrouvées avec des brûlures du deuxième et du troisième degré, une a été conduite
aux urgences et plusieurs ont regagné l'aéroport en fauteuil roulant.
"Ce n'était pas du tout notre objectif", a déclaré le porte-parole de Burger King, manifestement inquiet
que l'on puisse penser que le programme de formation de l'entreprise comprenne le passage au grill
des employés. Ne vous contentez pas de vendre des ham burger s, SOYEZ le burger. Selon The
Miami Herald, la marche sur le feu venait couronner une journée passée à casser des planches, à
tordre des petites cuillers et à s'allonger sur des planches à clous - autant d'exercices destinés à
insuffler une nouvelle énergie au département marketing de Burger King. Le lien entre le fait de tordre
des couverts et l'affirmation de l'identité d'une marque n'est pas évident de prime abord, mais l'objectif
de la marche sur le feu est clair : il s'agit d'encourager les participants à développer un état d'esprit
positif, à bannir la peur et à se convaincre que tous les obstacles, personnels ou professionnels,
peuvent être surmontés par la confiance.Dans cette logique, il serait légitime de virer tous ceux qui se
sont brûlés. Manifestement, ils n'ont pas le bon état d'esprit. Si ça se termine comme ça lorsqu'ils
marchent sur le feu, qu'est-ce que ça va donner lors de la prochaine réunion de stratégie médias ?
Plus de 80 % des participants sont sortis des flammes indemnes et ont trouvé le défi gratifiant.
Mais quelle est la part du mental dans cette activité ? Pour le Dr Robin Allen, chercheur en physique
théorique à l'université de Southampton, qui a foulé des braises des dizaines de fois, "la marche sur le
feu n'a rien de mystérieux ; cela repose sur des phénomènes de physique de base". Le bois et la
cendre de bois conduisent relativement mal la chaleur. Tant qu'on reste en mouvement, on peut
traverser sans problème un lit de braises à plus de 900 °C. "C'est comme lorsqu'on met un gâteau au
four. Au bout d'une demi-heure, tout est à la même température, l'air, le gâteau et le moule en métal.
On peut mettre la main dedans parce que l'air est un mauvais conducteur et ne brûle pas tout de suite,
contrairement au moule."
Quant aux employés malheureux de Burger King, plusieurs raisons peuvent expliquer leur
mésaventure. Les braises peuvent coller aux pieds, surtout s'ils sont un peu humides ; le bois tendre
est meilleur conducteur que le chêne ou le hêtre ; certaines personnes ont la plante des pieds moins
épaisse que d'autres. Bref, rien à voir avec un manque d'esprit maison.
Tim Dowling
Le Courrier International
90
INTERNET
Même au plus fort de la vague Internet, tout le monde le savait. Les bandeaux de publicité les
bannières qui viennent agrémenter les pages de tous les sites Internet sont de médiocres racoleurs.
Aujourd'hui, on en est sûr, «seules 0,2 % des bannières de pub sont cliquées», et «capter l'attention
des internautes est un casse-tête épouvantable».
Ce constat, dressé par le magazine brésilien «Exame», affole les spécialistes du marketing. Pour une
simple raison : «Les méthodes habituelles de segmentation des consommateurs sont inopérantes.»
Alors que le marketing a l'habitude de découper ses «cibles» en «jeunes, vieux, hommes, femmes» et
par «habitudes de consommation ou niveau de revenus», les internautes défient toute classification.
«70 % des surfeurs américains et 60 % des brésiliens ont un comportement similaire sur Internet.» En
clair, «de l'adolescente de 13 ans jusqu'au cadre de 25 en passant par la ménagère de moins de
50 ans, tous vont sur des forums de discussion, échangent des courriels, s'informent ou visitent des
boutiques virtuelles».
Pour contrer cette «promiscuité», il fallait inventer une nouvelle base de travail. C'est ce que vient de
faire Booz-Allen, une entreprise de consulting, en inventant le «marketing occasionnel». Pour
«attraper» l'internaute, il est inutile de s'intéresser à qui il est, mieux vaut se concentrer sur son temps
de navigation.
Booz-Allen a ainsi défini sept comportements types, de la visite éclair (11 % des usagers, moins de
deux minutes de consultation et 2 sites visités) à la séance «ciné» (20 % des surfeurs, quatre-vingt
minutes en ligne et un minimum de 16 sites cliqués).
Il revient ensuite aux fournisseurs de bannières publicitaires d'adapter leur offre à ces comportements.
«Il suffirait de programmer les pubs pour les répartir en fonction du temps passé sur un site.» De la
même manière, «les portails feraient bien de se restructurer afin d'offrir aux internautes plus de textes
ou plus d'images en fonction du type de navigation».
Pour résumer ce concept de marketing, «Exame» utilise un argument... culinaire. «Dans le monde
réel, il est impossible de transformer un quatre-étoiles Michelin en fast-food afin de répondre aux
exigences du dernier client à passer la porte. Sur Internet, c'est la technique qu'il faut adopter.»
d'après Exame
HTU UTH
Le Courrier International
91
MARKETING
Experts, journaux, militants le content partout, les frontières commerciales entre pays ont disparu, la
mondialisation nous étreint, nous vivons dans un village mondial. Rien de plus évident que les voitures
pour en témoigner. Les automobiles sont produites partout sur des chaînes de montage identiques.
Les mêmes modèles se rencontrent en Australie, au Japon, aux Etats-Unis ou en Europe. La Bora
américaine de Volkswagen se nomme Jetta en Europe. Fiat ne se donne même plus la peine de
changer le nom de ses nouveaux modèles : la Palo Weekend vendue en Europe peut se trouver au
Brésil sous le même patronyme.
La logique qui préside à ce processus de globalisation des voitures est évidente : une normalisation à
outrance réduit considérablement les coûts de production et de développement. L’aboutissement
logique serait qu’il aille jusqu’au dernier maillon de la chaîne : le marketing et la publicité.
Ford a d’ailleurs déjà franchi le pas. Dans une publicité pour la Ford Mondeo largement diffusée dans
toute l’Europe, la voiture traverse lentement l’écran en portant une plaque d’immatriculation en image
de synthèse : plus besoin de filmer une séquence par pays. Que voilà une belle économie ! D’autant
que, comme le confie Hartwig Petersen, porte-parole du constructeur américain, “les spectateurs ne
se sont même pas rendu compte que la plaque avait un numéro bizarre”. Du moins, le bureau du
marketing n’a mesuré aucune attitude négative provoquée par cette publicité.
L’homme est ferme : “Une bonne politique de relations publiques intègre bien sûr les composantes
culturelles de chaque pays.” Un constructeur automobile ne parvient à s’imposer que si sa
communication cible parfaitement son marché, estime-t-il. Et de citer “les Italiens, qui accordent
surtout de l’importance au design du véhicule alors que les Français se préoccupent avant tout du
confort”.
Autre exemple, le fiasco en 1997 de la Mercedes Classe A, pourtant un “must” aux yeux des
Allemands, qui avait passé haut la roue les tests les plus ardus de la sécurité routière locale. Mais, en
Suède, en affrontant l’essentiel “test de l’élan” - à savoir éviter d’un brusque et violent coup de volant
un obstacle qui surgit de manière inattendue -, la voiture s’est retrouvée sur le toit ! Et la réputation de
Mercedes avec…
Par cette anecdote, Michael Dithmer justifie sa conviction. Le marketing mondial est voué à l’échec
dans la construction automobile. “La Classe A a été conçue pour le marché européen, mais selon des
besoins allemands. Donc, sans prendre en compte les spécificités locales. Le résultat est là :
Mercedes a perdu des milliers de clients, et toute son image de marque est à recomposer. Même
dans la mondialisation, les comportements locaux ne peuvent pas être ignorés.”
Le Courrier International
92
JAPON
Soixante-sept pour cent de croissance en cinq ans ! Un chiffre à humilier une start-up ! C'est le chiffre
magique de l'envolée de la consommation de vin en Asie. C'est aussi le chiffre incantatoire de toute
une profession : les viticulteurs français et leurs distributeurs. Devant un tel boom, le «Japan Times»
n'a pas hésité à dépêcher un reporter à Bordeaux, pour la Vinexpo 2001. Vinexpo, la foire
internationale du tout vinicole, dont la prochaine édition aura lieu... à Tokyo en juin prochain. Logique,
conclut le journaliste japonais, «il n'y a pas de meilleur endroit au monde, en dehors de Bordeaux,
pour accueillir ce rendez-vous de clients et de négociants. Le Japon est le premier marché asiatique
pour les vins français.»
Le Japon est aussi «la cible numéro un des efforts de marketing des exportateurs français». Pour une
raison bien simple : «Les consommateurs nippons ont une sophistication bien supérieure aux autres
Asiatiques.» La prochaine cible ? «les femmes célibataires à fort pouvoir d'achat», dont les Français
attendent beaucoup. Les premiers résultats sont encourageants : «Au premier trimestre 2001, les
ventes de bordeaux ont crû de 9 % en volume et de plus de 15 % en valeur. Sur l'ensemble de l'année
2000, les exportations ont augmenté de 37 % en volume et de 47 % en valeur.» De quoi tourner la
tête à toute une profession.
D'autant que le millésime 2000 promet, lui, d'être incroyable. «Les premières dégustations en mars
sont enthousiasmantes : les spécialistes parlent du meilleur millésime de ces vingt dernières années.»
La nouvelle a déjà fait le tour de la planète et la conséquence a été immédiate : «les prix sont en
hausse de 10 à 90 % par rapport à l'année précédente. Les grands noms comme Latour, Margaux,
Haut-Brion et Mouton Rothschild viennent de mettre sur le marché leur troisième livraison de vins
2000 pour un prix moyen de 215 $ (1 600 FF) par bouteille. Cela porte la caisse à 3 000 ou 4 000 $
(jusqu'à 30 000 FF). Quant au vin, il ne sera livré qu'en 2003, au plus tôt.» Inutile de préciser qu'à de
tels niveaux de prix, il reste une marge énorme pour d'autres vins, plus accessibles et pas forcément
moins bons.
C'est le cas des vins espagnols qui grignotent petit à petit les parts de marché de l'empereur français.
Le Japon est aussi le pays de cocagne des vins italiens : leurs ventes ont crû de 7 % en volume en
l'an 2000. Le Japon est désormais la septième destination des Chianti et autres Lacrima Christi. Sans
parler des producteurs du Nouveau Monde qui «gardent un oeil attentif sur le Japon, prêts à attaquer
à tout moment.» C'est le cas de Robert Mondavi, le second producteur américain de vins. Son
entreprise est côtée au Nasdaq et il est présent au Japon depuis plus de vingt ans. Pour lui, le Japon
connaît aujourd'hui le même bouleversement gustatif que les Etats-Unis ces trois dernières décennies.
«En 1965, 18 % des vins vendus aux Etats-Unis étaient des vins de qualité. Aujourd'hui, 60 % des
bouteilles vendues coûtent plus de 5 $ l'unité (37 FF).» Robert Mondavi est même convaincu que «ce
changement est une chance pour les Japonais : le moment est venu de tester la rencontre entre le
raffinement de leur cuisine et la grandeur de certains vins.» Vous reprendrez-bien un peu de Mouton-
Rothschild avec vos sushis ? d'après The Japan Times ,
HTU UTH
Le Courrier International
93
INTERNET
Tranquillement, le soir, vous ouvrez votre boîte à lettres électronique et l'application vous annonce dix
messages en attente. Votre grand-mère vous a enfin répondu ? Votre oncle vous écrit de Taïwan ?
Votre meilleur ami vous envoie des photos de Dubrovnik ? Non, sur dix messages, sept sont des
«spams»... Les trois autres, des erreurs de routage. Les «spams», ces courriels publicitaires que les
entreprises envoient en nombre, se multiplient. Leur avantage est évident : faciles à développer, ils
sont beaucoup moins coûteux que les mailings traditionnels et surtout beaucoup plus efficaces. Alors
qu'il vous fallait au minimum ouvrir une enveloppe de papier et composer un numéro de téléphone, les
spams vous proposent d'un clic d'accéder à une boutique virtuelle. L'enjeu de cette nouvelle forme de
prospection commerciale est énorme et les services du commissaire européen à la Santé et à la
Protection des consommateurs, David Byrne, l'ont bien compris.
Aussi ont-ils innocemment proposé que la législation de l'Union adopte le «opt in». Derrière ce terme
abscons se dissimule le cauchemar des services de marketing. Le «opt in», c'est l'obligation pour les
entreprises de vous demander poliment votre avis avant de vous abreuver de messages publicitaires.
La plupart des pays européens obligent leurs entreprises à appliquer ce procédé, afin de protéger les
consommateurs. Or les entreprises américaines, britanniques mais aussi françaises pratiquent le
«opt out». En clair, vous recevez d'abord le «spam» et vous décidez ensuite si vous désirez ou non
recevoir ces courriels intempestifs. Le problème aurait pu se régler entre Européens, mais la
Commission veut aller plus loin et obliger les entreprises extra-communautaires à pratiquer le «opt in»
dès lors qu'elles veulent démarcher dans l'Union. Les Américains ont parfaitement compris le danger.
La riposte est toute prête. D'abord, menacer de rétorsions foudroyantes. Ensuite, appliquer la bonne
vieille méthode qui consiste à diviser pour mieux régner. Déjà l'opposition de la France, du Royaume-
Uni, de l'Irlande et du Luxembourg augure mal du sort de la nouvelle directive. De plus, ce genre de
projet doit être approuvé par le Parlement européen avant d'avoir force de loi. Et son soutien est loin
d'être acquis. Reste à espérer, conclut «The European Voice», que la Belgique saura maintenir le cap
qu'elle s'est fixé et qui passe par l'adoption de cette directive...
Au fait ! Et si vous voulez recevoir régulièrement des nouvelles de notre site, n'oubliez pas de laisser
votre adresse électronique en page d'accueil...
d'après European Voice ,
HTU UTH
Le Courrier International
94
J.O. 2004
La Grèce vit une période d’effervescence intense qui ne saurait trouver de répit avant l’ouverture des
premiers Jeux olympiques du nouveau millénaire. Pour la patrie de l’olympisme, “organiser les jeux est
une véritable source de fierté nationale, note l’“International Herald Tribune”, mais aussi de maux de
tête”. Quatre ans après le succès retentissant des Jeux de Sydney, la barre est haute pour Athènes,
voire un peu trop… au point que, “à deux reprises déjà, les membres du Comité d’organisation
d’Athènes ont été changés et que le gouvernement reconnaît que les préparatifs accusent un lourd
retard”.
Néanmoins, ces Jeux sont cruciaux si la Grèce entend prouver qu’elle est capable de réussir un tel
événement malgré les plaies qui stigmatisent Athènes, “la ville la plus congestionnée d’Europe”. Le
challenge le plus relevé concerne sans doute les questions environnementales. Le gouvernement de
Costas Simitis semble décider à prendre le problème à bras-le-corps.
C’est du moins ce que laisse croire la récente présentation d’un projet de loi sur “l’amélioration de
l’environnement et la modernisation des activités de production dans la région de l’Attique”. Selon ce
projet de loi, présenté par les ministres de l’Environnement et du Développement, “toutes les
entreprises industrielles seront interdites dans les zones de grandes habitations de la capitale, alors
que quelque 4 000 usines implantées illégalement en Attique devront se conformer aux technologies
vertes”“toutes les propositions du gouvernement vont certes dans la bonne direction” car elles mettent
fin au décret présidentiel de 1984, qui interdisait toute nouvelle usine en Attique, d’où la situation
actuelle de développement sauvage de nombreux sites, outrepassant le cadre de la légalité.
Mais il s’agit plus de “déclarations de bonnes intentions” sans commune mesure avec la situation
réelle. Les critiques cinglantes de l’éditorialiste d’“I Kathimerini” visent particulièrement les ministres
concernés, “qui ignorent le nombre d’industries nuisibles et polluantes situées en Attique” et donc la
faisabilité des nouvelles mesures proposées.
Quant aux Jeux de 2004, ils pourraient accentuer l’étouffement récurrent de la zone, surtout si, note
l’“IHT”, les milliers d’Athéniens qui fuient la canicule du mois d’août pour les plages décidaient de
rester, histoire de suivre les Jeux les plus chauds de la Grèce moderne.
d'après "International Herald Tribune" , "I Kathimerini
HTU UTH HTU UTH
Le Courrier International
95
Quand Intel se fait remonter les
bretelles
SALON MAGAZINE
San Francisco
Le 19 février dernier, Intel a lancé une campagne de publicité de 300 millions de dollars pour lancer
son nouveau superprocesseur, le Pentium 4, cadencé à 1,5 GHz. La société nous a ainsi fait savoir
que le Pentium 4 intègre la microarchitecture "NetBurst" d'Intel, laquelle s'appuie sur des technologies
aussi sophistiquées que l'"hyperpipelining". Tout cela afin d'aider votre ordinateur à être encore plus
performant lorsque vous manierez des fichiers MP3 et lorsque vous vous immergerez dans des jeux
en 3D ou dans la streaming video [diffusion audio-vidéo en flux réguliers et continus]. Qui dit mieux ?
Les spécialistes ne pourraient que s'extasier. Et pourtant, ils ne se montrent pas plus impressionnés
que ça et manifestent plutôt leur mécontentement. Selon ces esprits critiques, Intel connaîtrait une
dérive. Ce ne sont plus les ingénieurs, expliquent-ils, qui prennent les décisions dans cette société. Le
département marketing impose le ton. Soucieux de mettre sur le marché un processeur censé faire de
votre ordinateur une star d'Internet, il demande aux ingénieurs de faire des choses sans queue ni tête.
Difficile d'imaginer qu'Intel (ou ChipZilla, comme l'appellent les initiés), premier fabricant au monde de
microprocesseurs en silicone, ait pu ainsi perdre les bonnes grâces des spécialistes du domaine.
Après tout, ce sont généralement des gens beaucoup plus affectueux avec leurs ordinateurs qu'avec
leurs proches. En outre, la firme joue depuis des années un rôle d'innovateur de premier ordre dans le
secteur. Certains analystes estiment que les concepteurs d'Intel ont été obligés de développer des
concepts fantaisistes. A savoir l'Extension Streaming SIMD pour Internet [SIMD : Single Instruction
Multiple Data, jeu d'instructions et système d'unité de calcul utilisé pour optimiser les applications
multimédia] ou l'architecture NetBurst - les noms qui ont été donnés au Pentium III et au Pentium 4. Or
ce vocabulaire est davantage motivé par la quête d'un marché que par les principes physiques de la
semiconductivité.
La grande surprise de l'an 2000 a été que la société AMD - une concurrente d'Intel dont les
ressources techniques et financières sont bien inférieures - a détrôné Intel de sa première place parmi
les fabricants de microprocesseurs. Quand, l'été dernier, AMD a lancé son processeur Athlon cadencé
à 1,2 GHz, elle a causé de sérieux soucis à Intel et à son Pentium III à 1,1 GHz. C'est d'ailleurs à ce
moment que le cours de l'action d'Intel a brutalement chuté, de près de 60 %. Intel vit depuis lors dans
l'obsession de reprendre l'avantage. L'un des aspects de sa contre-attaque s'est cristallisé sur
l'augmentation de la cadence.
Pendant ce temps, AMD avance plus posément, probablement parce qu'elle sait que davantage de
mégahertz ne garantit pas forcément un processeur plus rapide. Dans sa course éperdue aux
mégahertz, Intel a négligé d'autres aspects de l'architecture du microprocesseur, ce qui a affecté
96
l'ensemble de ses capacités de vitesse - au point que le Pentium 4 a fini par perdre du terrain par
rapport à l'Athlon, et même, au Pentium III.
Cependant, Intel ne voit pas où est le problème. "Une fois franchie la barre du gigahertz, vous aurez
plus que la puissance nécessaire pour écrire une lettre à votre grand-mère", explique George Alfs, le
porte-parole d'Intel. "Nous voulions nous concentrer sur des aspects bien plus excitants de
l'architecture du processeur", poursuit-il. A savoir, le streaming, les jeux multimédias, les fichiers MP3
et l'encodage des vidéos. Ce sont là des domaines où le Pentium 4 bat effectivement à plate couture
les autres processeurs. Pour ces applications, le Pentium 4 est bel et bien un processeur puissant.
Mais ce n'est quand même pas ce qu'Intel prétend haut et fort, c'est-à-dire le meilleur du monde.
Difficile d'affirmer que le scepticisme affiché sur les sites comme < TomsHardware.com> soit
responsable de l'échec d'Intel à imposer son Pentium 4. Il est certain, en revanche, que, si vous
cherchez à savoir ce qu'il en est exactement à propos de tel ou tel processeur, Internet est là pour
vous aider. Un grand nombre de mordus de l'informatique connaissent leur domaine sur le bout des
doigts et sont plus que désireux de le partager avec les autres. Vous pouvez être assuré qu'ils se
précipiteront sur leur site à chaque fois qu'Intel, AMD ou toute autre société ou personne concernée
feront quelque chose valant la peine d'être commenté. Reste à savoir si nous voulons y prêter une
oreille attentive.
Kieran McCarthy
Courrier International
29/03/2001, Numero 543
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LIVRE ELECTRONIQUE
Chapitre II
L'année 2000 devait être celle du e-book. Force est de constater que les
différentes expériences menées n'ont pas porté les fruits escomptés.
Aujourd'hui, les éditeurs revoient leur copie.
Il y a un an, pratiquement jour pour jour, l'éditeur américain Simon & Schuster tentait une
«expérience», pour reprendre l'expression utilisée à l'époque. Elle consistait à publier sous format
électronique un texte de Stephen King. Le succès qui s'ensuivit donna lieu à un enthousiasme délirant
à propos du livre électronique (e-book) et de la diffusion en ligne d'ouvrages. On prédisait une
révolution dans la manière de lire et on laissait entendre que les jours (années) de l'édition
traditionnelle étaient compté(e)s. Le même Stephen King, impressionné par les 400 000
téléchargements de Riding the Bullet(publié en France en format papier sous le titre Un tour sur le
bolid, Albin Michel), s'est lancé quelques semaines plus tard dans la publication en ligne d'un autre
roman, The Plant, que les internautes pouvaient télécharger chapitre par chapitre contre la somme
modique de 1 dollar. L'aventure a tourné court lorsque, en novembre, le maître de l'horreur grand
public a «planté» ses lecteurs en ligne en annonçant l'abandon de l'expérience sous prétexte que plus
de la moitié de ses lecteurs n'avaient pas acquitté leur dîme. Stephen King a tout de même fait un
bénéfice net de 463 832,27 dollars grâce à ce roman qui demeure inachevé au grand dam de ses
fans.
Cette décision a jeté un froid et a montré que l'emballement des différents acteurs du secteur auteurs
et éditeurs était pour le moins exagéré. Aussi, malgré les études toujours encourageantes concernant
l'avenir de l'édition électronique, ils sont désormais plus prudents dans leur stratégie. Selon une étude
publiée en décembre par IDC, le seul marché américain devrait passer de 9 millions de dollars
en 2000 à 414 millions en 2004. Pour justifier son optimisme, la société spécialisée dans le marketing
souligne le nombre important d'accords signés entre les éditeurs et les fournisseurs de technologies
au cours des mois écoulés. Jason Epstein, cofondateur de la très respectée «New York Review of
Books» et ancien directeur éditorial chez Random House, a publié en avril et en octobre deux textes
allant dans le même sens. Il mettait notamment l'accent sur l'irréversible passage de l'édition
traditionnelle à l'ère numérique. S'il est difficile de réfuter cette affirmation, tant elle paraît logique, il est
cependant clair aujourd'hui que le vent de folie, qui a soufflé l'an passé, est retombé.
Les professionnels semblent aujourd'hui convaincus que le livre électronique n'est pas adapté à la
publication de romans, mais qu'il est parfait comme vecteur d'informations pratiques. On ne s'étonnera
donc pas d'apprendre que l'éditeur Random House a parié gros sur Dr. Ian Smith's Guide to Medical
Websites (Guide des sites médicaux, du Dr Ian Smith) plutôt que sur la littérature pour assurer sa
présence dans le secteur. Le livre électronique ne sera pas l'objet que l'on prendra pour se détendre,
comme on bouquine un roman pour se changer les idées, mais plutôt un outil pratique pour s'informer
ou apprendre. D'ailleurs, le monde de l'éducation constitue à terme le véritable enjeu pour les
promoteurs du livre électronique. C'est ce que confirme une étude récente de Jupiter Media Metrix,
selon laquelle 6 % des ventes d'ouvrages scolaires aux Etats-Unis se feront sous format électronique
en 2005. Des enseignements intéressants pour les participants au Premier sommet européen de
l'édition numérique, qui se tiendra dans le cadre du Salon du livre de Paris.
Courrier International
12/3/2001
98
LUXE
Après avoir séduit la populace, le groupe Swatch prétend conquérir le coeur et le portefeuille des
nantis - et de ceux qui rêvent de l'être. En effet, non contente, grâce à sa production de masse, d'avoir
ressuscité l'industrie horlogère suisse et de l'avoir sauvée de la concurrence japonaise, voici venu le
temps, pour le numéro un mondial de la montre, de s'adonner au vice du luxe. Le mensuel suisse
«Bilan» fait ce mois-ci le point sur cette «révolution», symbolisée par le rachat, en septembre 1999, de
la prestigieuse société Bréguet, à laquelle le patron de Swatch, le vibrionnant Nicolas Hayek, tenait
tant. «L'homme a un ego puissamment développé et la perspective de s'asseoir, deux siècles plus
tard, dans le fauteuil d'Abraham-Louis Bréguet, le plus génial horloger de tous les temps, a sans doute
joué.» Mais il n'y a pas que le prestige. Le marché du luxe, très juteux, affiche des marges importantes
et une promesse de croissance de 7 à 8 % par an, deux fois supérieure à celle de la consommation
globale. Le groupe de Bienne s'était déjà payé Blancpain et Omega. Depuis Bréguet, qu'il a ravi de
justesse à LVMH, il s'est «offert deux fleurons» de plus : le jurassien Jaquet-Droz et l'allemand
Glashütter Uhrenbetrieb.
Mais, surtout, Swatch a réussi à mettre l'industrie horlogère suisse à ses pieds. Car dans l'escarcelle
de Bréguet se trouvait aussi la manufacture de mouvements mécaniques Nouvelle Lemania. «Dans
les faits, Nicolas Hayek s'est offert un outil de production qui met le groupe Swatch en position de
leader sur le marché du mouvement mécanique. Dix-huit mois plus tard, toute l'industrie horlogère de
prestige, à l'exception notable de Rolex, commence à en payer le prix.» D'autres manufactures sont
tombées dans son giron. Aujourd'hui, «Nicolas Hayek tient tout le monde par le collet, y compris les
groupes LVMH et Richemont, actifs dans le luxe et, dans l'absolu, bien plus puissants que le groupe
Swatch, mais dépendants de lui pour leur approvisionnement» en mécanique horlogère, à 90 % pour
le premier, à 60 % pour le second. «En clair, il lui a fallu moins de deux ans pour, d'une part, mettre à
sa merci ses plus dangereux concurrents et, d'autre part, entamer sa révolution du luxe et venir ainsi
guerroyer sur leurs terres fertiles.» Et lorsque la société Frédéric Piguet, détenue par Swatch,
annonce à ses clients que, désormais, «il faudra indiquer sur tout matériel promotionnel la provenance
du coeur de la montre», un tabou est brisé.
Mais face à cette situation, c'est l'omerta dans le milieu horloger, «tétanisé», qui craint de ne plus être
livré. «Le patron du groupe Swatch joue-t-il les Bill Gates de l'horlogerie ? Abuse-t-il de sa position
dominante ?» Pour l'instant, il n'y a ni enquête ni plainte. Et le groupe biennois est devenu «le seul à
contrôler la totalité des étapes industrielles présidant à la fabrication du produit horloger», des cadrans
et aiguilles aux composants microélectroniques de pointe.
Reste à gérer l'image. «Le groupe biennois à commencer par son nom a longtemps véhiculé l'image
de la montre en plastique bon marché et celle du reliquat industriel Asuag-SSIH, lequel fleure plus
l'huile des ateliers que l'atmosphère feutrée et parfumée de l'antre des joailliers ou des grands
couturiers.» Le groupe a ouvert, place Vendôme à Paris, une boutique Bréguet, mais également
Swatch : provocation, sûrement, mais aussi tentative de redorer son blason. d'après Bilan
HTU UTH
99
MARKETING
Tous les dimanches, délaissant les églises, des dizaines de milliers de fidèles se rendent
religieusement chez Ikea. 12 000 personnes se sont mariées dans les centres de loisirs de Disney
depuis 1991. Aux Etats-Unis, les aficionados de Harley-Davidson se font enterrer dans des cercueils
siglés Harley. Ces nouvelles tendances, relevées par le consultant en design londonien Fitch,
montrent qu'aujourd'hui les marques sont littéralement déifiées. Selon la dernière étude statistique
rendue publique récemment par Young & Rubicam, l'une des plus grosses agences publicitaires, «la
croyance dans les marques a remplacé la foi religieuse comme raison de vivre», rapporte le
«Financial Times». «Les marques qui ont du succès sont celles qui transmettent de fortes croyances
et des idées originales, analyse Y & R. Ce sont aussi celles qui ont la passion et l'énergie de changer
le monde et de convertir les gens à leur manière de penser à travers une communication frappante.»
Le publicitaire ne craint pas de filer la métaphore un peu plus loin : «Les promoteurs de marques
actuelles peuvent être comparés aux missionnaires qui ont répandu le christianisme et l'islam à
travers le monde.» De même que ces missionnaires ont pu «convertir des millions de personnes grâce
à leur passion et à la puissance d'idées donnant un sens à la vie», «les marques arrivent au sommet
du succès non seulement grâce à la qualité du produit, mais aussi parce qu'elles fournissent un kit de
croyances sans compromis». C'est du moins l'avis de l'agence publicitaire américaine, qui cite les
inévitables Calvin Klein, Gatorade (boisson énergétique), Ikea, Microsoft, MTV, Nike, Virgin, Sony
Playstation et Yahoo! comme exemples de «marques-croyances sans compromis». Sans que l'on
sache très bien ce que «sans compromis» signifie.
L'Eglise d'Angleterre, face à cette concurrence, ne se démonte pas. Elle reconnaît que la foi
chrétienne détient l'un des plus vieux et des plus reconnus outil de marketing du monde, la croix. Pour
l'Eglise anglicane, «les résultats de Y & R représentent même 'de bonnes nouvelles' s'ils signifient que
les entreprises se sentent davantage sous pression pour intégrer une certaine responsabilité sociale
dans les valeurs de leur marque». Mais, à voir les slogans des uns et des autres - «Just do it !» (Nike),
«The will to win» (Gatorade), «Go create» (Sony)...-, on peut douter que leur credo aille très loin dans
l'exploration métaphysique. d'après Financial Times
HTU UTH
100
STRATEGIE
«Quand Juan Villalonga, alors PDG de Telefónica, a évoqué la possibilité de déplacer le siège social
de son entreprise de Madrid à Miami, il ne le faisait pas seulement pour des raisons personnelles»,
affirme «Actualidad Económica». Miami, qui n'est même pas la capitale de l'Etat de Floride, est en
effet en passe de devenir celle des entreprises espagnoles les plus ambitieuses, en quête de
nouveaux marchés.
Au carrefour des Etats-Unis, des Caraïbes, des Amériques centrale et latine, la métropole, dont
l'essentiel de la population est hispanophone, est une tête de pont idéale pour conquérir les
735 millions de clients potentiels de la région. Aujourd'hui, plus de 300 entreprises ibériques sont
implantées dans la ville. «Et ce nombre devrait augmenter très rapidement, car attirer des
investissements espagnols est une des priorités économiques de la Floride», confie María Gracia,
directrice de l'investissement de l'Office commercial d'Espagne à Miami, à l'hebdomadaire madrilène.
Les stratégies de conquête des marchés d'outre-Atlantique peuvent prendre diverses formes.
Certaines entreprises se lancent à l'assaut directement depuis Madrid, d'autres envoient des hommes
de confiance dans les pays visés, d'autres enfin installent un bureau à Miami et développent leur
activité à partir de là. C'est ce qu'a fait Heptium, une société de consulting de nouvelles technologies.
Pour Tomás Tomeo, associé fondateur de l'entreprise venu s'installer à Miami, cette voie est celle qui
ouvre le plus de chances de succès. «Les lois américaines sont conçues pour l'entreprise, pas pour le
salarié. Grâce à quoi il est extrêmement facile de monter une boîte d'un jour à l'autre, y compris dans
l'Internet, et cette flexibilité est essentielle.»
«A la simplicité du droit du travail nord-américain s'ajoute le très avantageux régime fiscal de Floride»,
commente Tomás López, un avocat d'affaires qui a travaillé deux ans dans la filiale de Garrigues &
Andersen à Miami. Un autre atout, quand on doit travailler avec les Amériques : le décalage horaire
est effacé. En outre, le coût de la vie n'est pas excessif dans la ville de Floride, inférieur de 132 % à
celui de New York et de 11 % à celui de Los Angeles. A côté, la qualité de la vie y est meilleure que
dans quelque capitale d'Amérique latine que ce soit, d'après une étude du cabinet William M. Mercer.
Conquérir de nouveaux marchés, c'est aussi connaître parfaitement ses futurs clients. Vivre à leurs
côtés est dès lors un réel avantage. José Vicente Ruiz est conseiller exécutif chez Anuntis Online, une
entreprise de petites annonces en ligne. Il vient d'investir 12 millions d'euros pour s'installer en
Argentine, au Chili et au Venezuela car «le marché des annonces est terriblement local. Pour réussir
dans ce secteur, il faut particulièrement bien connaître les méthodes commerciales locales et les
modes de vie locaux», explique-t-il. Bancaja ne témoigne pas d'autre chose. La caisse d'épargne du
sud-est de l'Espagne explique sa présence à Miami par la nécessité de service dû à ses clients
américains et par la volonté de défendre les intérêts locaux de Valencia, Alicante ou Murcia. Arrivée à
Miami en 1998, Bancaja y a plus de 312 millions d'euros d'affaires, ce qui fait d'elle la caisse
d'épargne européenne la mieux implantée outre-Atlantique.
Dernier «plus» qu'offre Miami : son aéroport international, le plus gros des Etats-Unis pour le fret.
Iberia en a déjà fait la plaque tournante de son trafic dans la région un «hub» en langage technique
réussissant là ce qu'elle n'avait su faire en Europe : rentabiliser ses lignes. Preuve que Miami est la
place idéale pour faire décoller l'économie espagnole. d'après Actualidad Económica ,
HTU UTH
101
ENTREPRISE
L'inventeur de la montre en plastique voit fondre ses résultats, et cette manière de marquer le pas
plonge toute l'activité horlogère suisse dans le doute ; car, en lançant sa montre révolutionnaire, dans
les années 80, Swatch a insufflé un dynamisme nouveau à toute la profession, y compris le haut de
gamme, lui permettant de renouer avec le succès économique. Un minimum pour une industrie qui fut
longtemps l'un des symboles de la Suisse.
Or les derniers chiffres publiés par le premier groupe horloger mondial sont quelconques, en deçà
même des mauvaises prévisions des analystes. De quoi semer le trouble dans l'ensemble de la
profession. Swatch enregistre un chiffre d'affaires (CA) de 1,34 milliard d'euros au premier semestre,
en faible hausse de 2,3 %. Mais cette faible augmentation ne génère que 152 millions d'euros de
bénéfices, en baisse de 9,8 % par rapport au premier semestre de l'an 2000.
Parmi les grosses déceptions, les montres «clés en main» s'affichent bien haut, avec un recul du CA
de 0,6 %. L'entreprise explique cette mauvaise passe par la difficulté de répondre à la demande sur
quelques nouveaux produits (Omega coaxial, Tissot T-Touch ou Swatch Skin-chrono). Simple report
de vente, donc. Les achats se feront au second semestre, une fois que la production suivra, laissent
entendre les dirigeants de Swatch. «Le Temps» s'interroge toutefois en ces termes : «Beaucoup de
marques du segment moyen et inférieur, à l'instar de Swatch ou de Calvin Klein, connaissent un
ralentissement évident. Quant à Omega la marque la plus rentable du groupe , elle connaît, pour sa
part, un clair ralentissement de croissance.»
Significatif lui aussi, l'état des stocks, dont le communiqué du groupe indique que «la somme du bilan
s'accroît de près de 5 % à la suite des efforts réalisés en vue d'améliorer, au niveau des stocks, le
degré de disponibilité des produits offerts sur le marché». Une langue de bois que le quotidien de
Genève n'hésite pas à traduire ainsi : «En déduire que les pipelines des filiales et des points de vente
sont pleins n'est sans doute pas éloigné de la réalité.»
Ces nouvelles ont glacé la Bourse de Zurich, où l'action Swatch a perdu 9,1 %, à 87,50 euros, dans
un gros volume d'échange. En deux mois, la capitalisation boursière du groupe a perdu le tiers de sa
valeur. Avec Swatch, c'est toute l'industrie horlogère qui plonge. La Fédération horlogère suisse
mesure une diminution en volume de 13 % des produits en matière plastique et de 30 % des montres
en aluminium pour le premier semestre de 2001.
Evidemment, le géant suisse ne peut rester les rouages croisés. Pour commencer, Nicolas G. Hayek,
le grand patron, a revu ses objectifs à la baisse. De toute façon, s'il ne l'avait pas fait, les analystes
s'en seraient occupés. D'une progression de CA censée être comprise entre 10 % et 12 % sur l'année,
on passe à un plus modeste 5 % à 8 %. Et encore, «le résultat du groupe pour l'année complète
dépendra fortement des développements des marchés financiers», prévient l'entreprise.
Quant aux réformes profondes, elles semblent devoir passer par un meilleur marketing, un
renforcement de l'image, une solide campagne de communication. Car, note «Le Temps», en
plastique, en acier ou en aluminium, «le produit est techniquement remarquable, les innovations
nombreuses, mais cela ne suffit plus à donner le coup de fouet nécessaire au redécollage d'une
marque qu'aucun jeune ne peut plus, vingt ans après, trouver 'jeune et provocante'». d'après Le HTU
Temps ,UTH
102
AFGHANISTAN
La question du marketing se posait peu : le zèle religieux en tenait lieu, avec une grande efficacité.
Les femmes avaient l'obligation de cacher leur corps en entier, seules les mains pouvant demeurer
visibles. Toute désobéissance entraînait une punition, souvent une mutilation ou la mort. La burkha ne
pouvait que se généraliser.
«Le vêtement n'a pas été inventé par les talibans», précise le quotidien américain, «depuis des
siècles, les paysannes afghanes en portent». Les étudiants islamiques l'ont par contre imposé aux
citadines, créant un nouveau marché. Un marché d'autant plus prometteur qu'au moindre accroc, il
fallait changer la burkha, le risque étant trop grand que le trou s'agrandisse et laisse voir une partie du
corps.
Ce petit commerce rapportait gros. Dans un pays où le salaire mensuel moyen tourne autour de 4-5
euros, le prix d'une burkha variait de 12 à 50 euros. Et Mohammed Ibrahim Islamadin n'est pas le seul
à avoir su en profiter. Au bazar central de Kaboul, Sadar Nuri jouait les grossistes, vendant le tissu
bleu que les couturières des échoppes transformaient ensuite. Ce qui constituait d'ailleurs une
contradiction majeure pour l'idéologie talibane : toutes les femmes devaient porter une burkha et
cesser de travailler, mais sans le travail des femmes, les burkhas ne pouvaient être fabriquées.
Les grossistes afghans se procuraient le tissu au Pakistan, chez d'autres grossistes, qui eux-mêmes
l'avaient acquis auprès de fabricants chinois ou sud-coréens, comme Myunhwa Industries à Séoul.
Aujourd'hui, le départ des talibans n'a pas mis complètement fin à la burkha, les nouveaux maîtres de
Kaboul n'ayant encore rien montré de leurs intentions vis-à-vis des femmes. Pourtant, la plupart des
Afghanes se risquent maintenant à sortir moins couvertes. Un changement néfaste au commerce de
Mohammed Ibrahim Islamadin, Sadar Nuri ou Park Kyung Hyun, l'un des directeurs de Myunhwa
Industries.
L'ancien chauffeur de taxi, dont les ventes ont baissé de moitié en l'espace d'un mois, a l'intention de
céder ses stocks à son frère, qui tient le même genre de commerce mais en zone rurale, là où les
ventes vont se maintenir. Lui-même va - fortune faite - se lancer dans le commerce de la vaisselle.
Sadar Nuri termine d'écouler son stock de tissu bleu - les deux tiers sont déjà vendus - avant d'en
commander du marron. Les présentatrices de la toute nouvelle chaîne de télévision portent en effet
des châles beiges sur des tailleurs marron. Cela devrait lancer une mode, suppose le grossiste.
Quant à Park Kyung Hyun, dont la société a elle aussi enregistré une baisse de la demande, il ne
s'inquiète pas trop. Même si la burkha n'a plus le vent en poupe, «les vêtements féminins traditionnels
de l'islam seront toujours excellents pour le commerce : ils nécessitent beaucoup de tissu», confie-t-il
au «Wall Street Journal».
© Courrierinternational.com d'après Le Soir 4/1/2002
HTU UTH
103
COMMUNICATION
Les publicitaires du monde entier cherchent sans cesse de nouvelles manières d’attirer l’attention.
Toujours plus originaux ou décalés, les annonceurs australiens semblent avoir trouvé un bon moyen
de marquer les esprits. Pour vendre leur canapé ou un shampoing ultradoux, ils utilisent le stéréotype
qui s’affirme de plus en plus dans l’imagerie publicitaire : l’homo !
Et pourtant, “ça ne fonctionne pas à tous les coups”, affirme le “Sydney Morning Herald”. Pour le
quotidien australien, une publicité à destination d’un public homosexuel est sans nul doute plus
appréciée si elle fait figurer des personnages “gays ou lesbiens”. Par contre, quand il s’agit d’une
publicité grand public, c’est une autre affaire.
“Il y a encore quelques années, utiliser un homosexuel déclaré dans une publicité était refusé avec le
plus grand dédain par les annonceurs.” Pour le “Sydney Morning Herald”, le trop grand décalage avec
la cible visée ne faisait qu’effrayer le fabricant de barres chocolatées ou de rasoirs jetables.
Mais les temps changent et l’Australie, comme l’ensemble des pays industrialisés, assume ses gays et
son iconographie. Le quotidien cite les chanteurs Elton John ou George Michael. Plus proche de nous,
les maires de Berlin, Klaus Wowereit, et de Paris, Bertrand Delanoë, montrent que quelques tabous
ont aussi sauté sur le Vieux Continent. La publicité ne fait donc que récupérer ces “tendances
sociétales lourdes”.
Du coup, “être ouvertement gay est une tactique intelligente de marketing pour attirer des
consommateurs hétérosexuels”, analyse le “Sydney Morning Herald”. Les spots télévisés australiens
accueillent ainsi deux “vrais homos”, des gays stars qui font vibrer l’Australie.
Publicités décalées
Dans un film pour une célèbre firme suédoise d’ameublement, Johnnie Cass, ancienne star du “Loft
Story” local, tente d’attirer une femme avant de lui préférer un confortable canapé. Sur le même
canevas, un acteur gay assumé, Joh Bailey, séduit une femme dans un salon de coiffure... pour
finalement lui vendre un shampoing.
“Ces publicités décalées jouent toujours sur l’image que l’on se fait de l’autre”, analyse le “Sydney
Morning Herald”. Pour autant, rapporte le journal australien, “avant de diffuser ce type de publicité, les
agences préfèrent consulter la presse gay, histoire de ne pas heurter la communauté homosexuelle”.
Car “les concepteurs de ces films sont tous hétérosexuels !”
PhJ
© Courrierinternational.com
14/2/2002
104
RECYCLAGE
Cette semaine, la prison de Moundsville (Virginie-Occidentale) a connu trois jours de révolte des
prisonniers. «Durant l'émeute nous avons eu une prise d'otages, des évasions, plusieurs tentatives de
sortie de voitures, arrêtées par des grilles de pointes», s'enthousiasme dans «The Economist» Paul
Kirby, l'un des organisateurs de ce soulèvement qui a impliqué 1 200 personnes venues de 15 Etats
des Etats-Unis mais également du Canada, de Grande-Bretagne ou du Japon.
La prison de Moundsville, bâtiment de style néogothique édifié en 1860, ne retient plus aucun
condamné depuis 1995, faute d'être aux normes. Le lieu a donc été reconverti en «centre
d'entraînement et de technologie pour les punitions nationales et le respect de la loi», et a pour
objectif principal la formation des futurs gardiens. Accessoirement, le centre est aussi devenu une
attraction touristique, des visiteurs pouvant s'initier aux habituelles méthodes de cavale et tout
découvrir de la longue et triste histoire de la prison de Moundsville : les plus belles évasions, les plus
grandes rébellions, les exécutions...
Le marketing de la prison s'appuie d'ailleurs sur cette image sinistre : en 2001, la soirée Halloween a
attiré 11 000 personnes ; en 2002, une réunion de spécialistes des sciences occultes est prévue, ces
braves gens désirant entrer en contact avec les esprits tourmentés des anciens prisonniers. Et, bien
sûr, les trois jours d'émeutes étaient l'une de ces manifestations destinées à attirer le public.
Moundsville n'a rien d'exceptionnel. Dans un pays où les prisons font défaut la population carcérale
des Etats-Unis a quadruplé en vingt ans , les Etats sont obligés de mettre des bâtiments hors service :
trop vieux, pas assez adaptables, plus possibles à protéger. Plutôt que de laisser ce patrimoine à
l'abandon, ils font donc leur possible pour en tirer profit. A l'image de l'une des plus célèbres prisons
du globe, Alcatraz, nombre de hauts lieux de l'incarcération cherchent à se reconvertir en parcs
d'attractions.
La prison de Lorton Reformatory, qui a fermé en novembre dernier après avoir compté plus de
12 000 »résidants», suit une autre voie de réinsertion. Elle va être transformée en résidence, avec
écoles, parcs, et même terrain de golf ! Celle de Joliet, près de Chicago, pourrait devenir un casino.
Enfin, la prison de Bluefield, en Virginie-Occidentale, s'est transformée en un centre scientifique pour
enfants, avec des salles aux noms évocateurs : «cellule photos», «cellule du cerveau», etc. Son haut
lieu est un appartement pour quatre personnes, comportant encore les barres et les chaînes d'un
autre temps. Comme l'écrit «The Economist», «les parents américains ont peut-être trouvé la solution
à leurs problèmes d'autorité».
EG
© Courrierinternational.com
d'après The Economis
HTU
105
Intelligences - Économie LA VIE EN BOÎTE
H
Balayez du regard votre bureau. Il y a de fortes chances pour que les murs soient crème, blancs ou
gris, les étagères gris métallisé et les chaises et les bureaux d'un brun terne. La conception habituelle
du lieu de travail laisse peu de place aux couleurs fortes. L'idée même d'avoir des murs rouges ou des
placards bleu vif paraît aussi étrange que de remplacer les chaises à roulettes par des canapés. Or
les recherches menées à ce propos montrent qu'un bureau décoré de façon moins traditionnelle, avec
davantage de couleurs, pourrait contribuer au bonheur des salariés, donc à leur productivité.
"Les couleurs ont un grand impact et peuvent limiter ou augmenter le degré de stress", estime Lilian
Verner-Bonds, l'auteur de Colour Healing [Guérir par la couleur]. "Certaines tâches sont favorisées par
certaines couleurs. Le rouge vif, énergisant, est tout indiqué pour les bureaux du secteur bancaire ou
des loisirs. Le vert, apaisant, convient aux lieux où règne la discorde, où l'harmonie fait défaut. Le bleu
est censé être la couleur la plus appropriée pour instaurer le calme. Et l'orangé clair incite en douceur
à l'action."
A première vue, un bureau bleu et orangé peut paraître tape-à-l'oeil, mais faire entrer de la couleur sur
un lieu de travail ne veut pas dire avoir des moquettes et des murs aux tons criards. "Lorsque j'ai été
nommée assistante de la direction, j'ai revu toute la décoration", explique Carla Pieroni, qui travaille
pour une petite société de géomètres. "Tout était d'une teinte crème défraîchie, vraiment terne.
Comme les patrons refusaient tout changement radical, j'ai tout fait peindre en blanc laqué, mais j'ai
commandé deux sofas rouge vif pour la réception et des accessoires de bureau bleus. J'ai acheté des
tas de plantes et des tableaux aux couleurs vives. Au bout du compte, ça avait l'air un peu clinquant,
mais marrant."
Acquérir deux tiroirs à classeurs colorés peut sembler dérisoire, mais l'être humain est extrêmement
sensible à la couleur. Etant donné que 80 % de nos perceptions du monde sont d'ordre visuel,
quelques détails de couleur vive suffisent à nous mettre de meilleure humeur. "90 % des entreprises
de premier plan ont des armoires grises", note Nick Tuggey, directeur du marketing chez Kardex
Systems, un fournisseur de systèmes de classement de documents. "Or nous nous sommes aperçu
que, dans les bureaux que nous avons équipés d'installations d'autres couleurs, c'est tout
l'environnement qui semble plus léger. Les entreprises doivent prendre conscience de l'effet positif
que la couleur peut avoir sur l'humeur des salariés dans leur lieu de travail."
A l'époque des tenues professionnelles décontractées, du télétravail et du partage des bureaux, il
semble paradoxal que les sociétés s'accrochent à l'image du bureau traditionnel. "Les gens éprouvent
toujours le besoin de faire la différence entre leur lieu de travail et la maison, estime Charles Gordon,
psychologue d'entreprise. Conserver au bureau une décoration neutre, voire terne, relève de cela. Les
murs pâles, crème ou gris confèrent une ambiance de sérieux dénué de la moindre parcelle d'humour,
qui, d'après un grand nombre d'employeurs, est censée inciter au travail. En réalité, lorsqu'un bureau
a un aspect moins formel, plus drôle, la productivité crève le plafond."
Annabelle Thorpe
Courrier International
24/01/2002, Numero 586
106
Intelligences - Économie MARKETING
Ann Hendrix-Jenkins a eu droit à une leçon de marketing surprenante chez Toys 'R' Us lorsqu'elle a
voulu acheter un train à sa fille Isabel, âgée de 3 ans. Le grand magasin récemment rénové de
Langley Park, dans le Maryland, venait d'installer deux nouveaux rayons de jouets, mais aucun train
n'était disponible dans celui destiné à Isabel : dans le rayon "Le monde des filles", les présentoirs
regorgeaient de poupées, de cuisines miniatures et de produits de maquillage. Mais les trains étaient
rangés dans "Le monde des garçons", avec les figurines, les camions Tonka et les talkies-walkies.
Mme Hendrix-Jenkins, femm active et mère de famille âgée de 34 ans, a eu l'impression d'être
revenue aux années 60. "J'ai été choquée de voir Toys 'R' Us faire un tel pas en arrière", explique-t-
elle.
Le nouvel aménagement des grands magasins Toys 'R' Us - résultat d'un sondage effectué auprès de
10 000 clients, selon le détaillant - illustre une tactique qui revient à la mode chez les fabricants de
jouets, de logiciels et autres produits pour enfants : la différenciation des sexes. Après avoir adopté
durant deux décennies un ton "neutre sur le sexe" et précautionneusement évité les stéréotypes filles-
garçons, beaucoup de spécialistes en marketing ont décidé qu'ils pouvaient se permettre d'accentuer
à nouveau les différences pour les produits et les messages publicitaires.
Et, cette fois, les entreprises commencent dès l'âge de 2 ans. Aux Etats-Unis, cette vente agressive
qui différencie les garçons des filles était en effet passée de mode il y a un quart de siècle, car les
entreprises pensaient que les parents élevés dans les années 60 et 70 ne voudraient pas de produits
qui renforcent les rôles traditionnels des deux sexes. Aujourd'hui, le comportement des
consommateurs prouve que ce n'est pas le cas, et beaucoup d'entreprises se sentent plus libres de
reconnaître les différences.
Fox Family Channel, un joint-venture de News Corp. et Saban Entertainment, n'éprouve aucun
remords en fondant sa commercialisation sur ces différences. L'entreprise est sur le point de lancer
deux chaînes câblées destinées aux garçons et filles de 2 à 14 ans, surnommées de manière peu
subtile boyzChannel [la chaîne des garçons] et girlzChannel [la chaîne des filles].
Derrière cette évolution, on trouve une constatation des spécialistes du marketing et de l'enfant faite
depuis quelque temps : les garçons semblent se comporter en garçons et les filles en filles plus
précocement qu'autrefois. Les comportements qui en résultent, ce que les spécialistes appellent "les
modèles de jeu masculins et féminins", apparaissaient auparavant vers l'âge de 5 ou 6 ans. Selon
certains spécialistes, cela pourrait être dû à une socialisation précoce dans les crèches et les
maternelles et à un contact tout aussi précoce avec les médias. Et cela expliquerait pourquoi les
distributeurs de logiciels ne ciblent que l'une ou l'autre catégorie.
107
début d'année, la société Mattel a fait les gros titres avec le lancement sur le marché de deux
ordinateurs, un pour les garçons, l'autre pour les filles, de 4 à 12 ans. L'ordinateur rose à fleurs de
Barbie et l'ordinateur bleu royal de Hot Wheels sont vendus tous deux avec 20 logiciels. Mais la
plupart des logiciels compris dans le paquet Hot Wheels sont éducatifs, ce qui a entraîné des
critiques. Mattel déclare ne pas avoir eu l'intention d'insulter les filles, mais, les logiciels Barbie
disponibles étant simplement plus nombreux que les logiciels Hot Wheels, il n'y avait pas autant de
place pour les jeux éducatifs.
Certains sont cependant révoltés par cette ségrégation. Le marketing fondé sur la différence des
sexes "n'est pas en accord avec ce qui se passe chez les adultes", déclare Pamela Haag, de la
fondation pour l'éducation universitaire des femmes. "C'est complètement anachronique." Dans le cas
de Toys 'R' Us, Mme Hendrix-Jenkins a organisé une campagne de protestation contre le nouvel
agencement des rayons de jouets, réaménagement appliqué dans les 707 magasins du détaillant aux
Etats-Unis. Toys 'R' Us se donne beaucoup de mal pour essayer de réparer les dégâts.
Bien que la société ait prévenu ses actionnaires de la nouvelle disposition des rayons durant sa
réunion annuelle de juin et ait dévoilé le nouvel agencement à Atlanta l'année dernière, un porte-
parole déclare : "Aucun projet d'agencement n'a été établi. La direction du grand magasin qui a
étiqueté les rayons s'est 'trompée'. Lorsque cela nous a été communiqué, nous avons tout changé."
Warren Kornblum, directeur du marketing chez Toys 'R' Us, assure que cette disposition est le résultat
d'une recherche approfondie sur les habitudes des clients.
Les produits susceptibles d'être achetés par un même type de client sont disposés les uns à côté des
autres dans le magasin. Ainsi, les fours en plastique Easy Bake Ovens se trouvent à côté des Barbie,
et non près des Action Man.
"Notre intention n'est pas de faire des différences entre filles et garçons, mais de satisfaire tous nos
clients", déclare M. Kornblum. Autre explication pour ce retour de la séparation des sexes, le secteur
aurait enfin prêté attention au marché des filles. Selon un vieil adage, on peut en effet vendre un
produit de garçon à une fille, mais non l'inverse.
Lisa Bannon
Courrier International
31/05/2000, Numero 500
108
Intelligences - Économie INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE
BUSINESS WEEK
New York
Pour ce qui est du traitement des 50 millions d'Américains atteints d'hypertension artérielle, médecins
et partisans des restrictions budgétaires sont unanimes : des études au long cours le prouvent, les
antihypertenseurs les moins chers sont aussi les plus sûrs et les plus efficaces. En 1995, et plus
récemment en novembre dernier, un panel de cardiologues réuni par les Instituts nationaux de la
santé (NIH) recommandait, en l'absence d'autres complications, d'utiliser les médicaments les moins
coûteux. La logique voudrait donc que les praticiens, économies obligent, se précipitent pour les
administrer.
Mais la pratique médicale obéit parfois à une tout autre logique. Deux nouvelles études font en effet
apparaître que les prescriptions des médicaments les moins chers - bêtabloquants et diurétiques - ont
enregistré une baisse sensible entre 1992 et 1996. Dans le même temps, les médecins ont délivré
généreusement de nouveaux médicaments, plus chers, tels les antagonistes calciques et les
inhibiteurs de l'ECA [enzyme de conversion de l'angiotensine]. Une étude menée en 1995 concluait
que la surconsommation de nouveaux médicaments alourdissait d'ores et déjà inutilement de 3
milliards de dollars [environ 17 milliards de FF] la facture médicale américaine, tendance qui n'a fait
que s'accentuer.
Mais qu'ont donc ces fameux médicaments que n'ont pas les bêtabloquants et les diurétiques ?
Réponse : le marketing. Se disputant une part de marché de 24 milliards de dollars, les laboratoires
pharmaceutiques investissent lourdement dans les traitements vendus le plus cher, et donc les plus
rentables. Les docteurs Thomas J. Wang et Randall S. Stafford, du Massachusetts General Hospital,
ont signalé, lors de la réunion de mars du Collège américain de cardiologie, que les publicités du New
England Journal of Medicine faisaient la part belle aux antagonistes calciques alors qu'on ne risque
guère d'y trouver la moindre publicité pour des diurétiques ou des bêtabloquants.
En outre, les laboratoires pharmaceutiques envoient des représentants, les poches pleines
d'échantillons gratuits. "Il ne se passe pratiquement pas un jour qu'on ne soit assailli par des vendeurs
qui essaient de placer leurs produits - le plus souvent des médicaments nouveaux, vendus au prix
fort", rapporte un médecin généraliste new-yorkais qui tient à garder l'anonymat. "Pas une seule fois
un représentant ne m'a proposé des diurétiques ou des bêtabloquants." Ce généraliste affirme que les
démarcheurs sèment derrière eux des monceaux d'échantillons dans l'espoir que les médecins les
prescriront aux patients. "Une fois qu'un malade prend un médicament et qu'il lui fait de l'effet, il est
difficile de l'en faire changer", précise-t-il.
Les répercussions en termes de coûts sont considérables. Ainsi, une étude parue dans le Journal of
the American Medical Association (JAMA) révèle que le prix de gros des antagonistes calciques est
plus de trois fois supérieur à celui des diurétiques. "Il est assez regrettable que le marketing puisse
influer sur les ordonnances, fait valoir le Dr Wang. A un moment où nous nous efforçons de réduire les
dépenses de santé, il paraît pour le moins absurde d'opter pour les traitements les plus coûteux, alors
que leur innocuité n'est pas prouvée à 100 %."
109
En 1995, le Procardia*, des laboratoires Pfizer, un antagoniste calcique également connu sous le nom
de nifédipine, était l'antihypertenseur le plus souvent prescrit, selon la société d'études de marchés
MMSI Scott-Levin, de Newstown (Pennsylvanie). Il venait au septième rang des médicaments le plus
souvent prescrits aux Etats-Unis. Et ce en dépit du fait que, selon certaines études, les antagonistes
calciques accroîtraient les risques d'infarctus et de cancer et seraient responsables d'une
augmentation des taux de suicide. Parmi les patients traités pour hypertension, l'inhibiteur de l'ECA
Vasotec*, ou énalapril, de Merck Sharp et Dohme (MSD), arrivait en deuxième position.
Les premiers antihypertenseurs sont apparus dans les années 50, et ils ont produit des effets
remarquables. Entre 1972 et 1994, selon le NIH, l'amélioration des traitements de l'hypertension a
réduit de 59 % les cas de morts par apoplexie et de 53 % les cas d'infarctus. Les inhibiteurs de l'ECA
et les antagonistes calciques, mis sur le marché dans les années 80, offraient plus de confort pour le
patient et entraînaient a priori moins d'effets secondaires que les diurétiques et les bêtabloquants. Ils
ne doivent être administrés qu'une fois par jour, alors que les diurétiques imposent souvent trois prises
quotidiennes et peuvent provoquer des mictions fréquentes. Quant aux bêtabloquants, parfois facteurs
d'asthénie et d'impuissance, ils peuvent masquer des signes d'hypoglycémie.
Il y a une dizaine d'années, le panel des NIH préconisait que les antagonistes calciques, ainsi que les
diurétiques et les bêtabloquants, deviennent les traitements de choix. Aucune étude clinique à grande
échelle n'avait été menée en ce qui concerne les nouveaux produits. Aussi les chercheurs ont-ils
effectué une nouvelle analyse des données existantes d'où il ressort que les inhibiteurs de l'ECA et les
antagonistes calciques ne sont pas plus efficaces que les anciens traitements. De plus, les nouveaux
médicaments ne réduiraient pas le nombre de décès.
Il faudra attendre 2002 pour connaître les résultats d'une enquête nationale
Il n'en fallait pas davantage pour convaincre le panel des NIH. En 1993, la commission édictait de
nouvelles lignes de conduite, recommandant que les bêtabloquants et les diurétiques - et non les
antagonistes calciques - soient envisagés comme premier traitement chez les patients ne présentant
pas de complications comme le diabète ou des formes associées de maladies du coeur. En
novembre, elle a confirmé de nouveau cette recommandation dans sa sixième série d'orientations.
Ces revirements successifs ont soulevé des critiques parmi les fabricants d'antagonistes calciques.
"Nous estimons que ces molécules représentent un réel progrès, et toute notre communication est
axée sur leur innocuité et leur efficacité", précise Andrew McCormick, porte-parole de Pfizer. Une
enquête nationale destinée à comparer les divers médicaments antihypertenseurs est en cours. Il
faudra attendre 2002 pour en connaître les résultats.
D'ici là, les médecins paraissent bien décidés à se lancer bille en tête dans la nouveauté, même si les
anciens traitements ont fait la preuve de leur efficacité et de leur innocuité. Dans l'étude qu'a publiée le
JAMA au mois de décembre, des chercheurs californiens rapportent qu'en 1995 les antagonistes
calciques et les inhibiteurs de l'ECA représentaient 71 % de toutes les ordonnances délivrées. La part
des diurétiques n'était que de 18 %. "Ce sont sans doute les activités de promotion pharmaceutique,
notamment la vente directe et les publicités, qui ont eu le plus d'impact" sur la prescription des
médicaments, si l'on en croit les chercheurs. Le panel des NIH craint que ses recommandations ne
soient pas entendues par les médecins, pourtant censés en tenir compte. Seulement 53 % des
patients chez qui on a diagnostiqué une hypertension reçoivent un traitement quel qu'il soit. Parmi les
patients traités, la plupart sont suivis par des généralistes, au dire du Dr Thomas A. Pearson,
président du service de médecine préventive et sociale à l'université de Rochester. D'après l'étude du
Massachusetts General Hospital, les généralistes sont les moins enclins à prescrire des
bêtabloquants. Pour ces médecins, plus encore que pour les spécialistes, les laboratoires
pharmaceutiques constituent une précieuse source d'informations, soutient le Dr Pearson. Peut-être
les organismes de soins qui visent à la maîtrise des dépenses de santé devraient-ils investir eux-
mêmes une part de leurs bénéfices dans un travail de sensibilisation auprès des médecins.
Catherine Arnst
Courrier International
04/06/1998, Numero 396
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Intelligences - Médias & communication PRESSE
THE ECONOMIST
Londres
Les journalistes américains se sont-ils trouvé une nouvelle bête noire [en français dans le texte] ?
Après Richard Nixon et Joseph McCarthy, c'est maintenant le tour du responsable de la publicité. Le
constructeur automobile Chrysler a dû récemment renoncer à exiger des revues où il passe ses
annonces qu'elles l'avertissent avant de publier "tout article traitant de questions sexuelles, politiques
ou sociales, ou qui pourrait être interprété comme une provocation ou une insulte" [voir CI n° 343, du
29 mai]. Par ailleurs, en Californie, l'éditeur du Los Angeles Times a engagé une réorganisation du
quotidien en fonction d'impératifs commerciaux qui, selon certains, exposera encore plus ses
journalistes aux pressions des forces du dieu Argent .
Dans les deux cas, l'origine de la polémique tient d'abord à la "muraille de Chine" qui sépare la
rédaction du service de publicité. Aux Etats-Unis comme ailleurs, c'est une pratique courante chez les
éditeurs de presse que de prévenir les annonceurs de la parution d'articles délicats (l'exemple
classique étant d'avertir Boeing qu'on va traiter de la sécurité dans les transports aériens) et de leur
laisser la possibilité de retirer leur publicité dans le numéro en question. Il n'empêche que des
différends peuvent toujours éclater - par exemple, IBM a récemment retiré ses pages de pub de
Fortune après que le magazine l'eut décrit sous un jour peu favorable -, mais seulement APRÈS la
parution du "papier" litigieux.
Surtout pas d'infanticides à côté de mes couches-culottes !
Chrysler, qui dépense en publicité quelque 370 millions de dollars par an rien que dans la presse
périodique, exigeait un droit de regard préalable, ainsi qu' "un résumé écrit des principaux thèmes et
articles à paraître dans les prochains numéros". Pour certains gardiens de la liberté de la presse, cela
revient à donner au cinquième annonceur des Etats-Unis un droit de veto. Selon eux, c'est la crainte
de la réaction de Chrysler qui a poussé Esquire à retirer un long article sur l'homosexualité prévu pour
le numéro d'avril dernier. (La décision a été uniquement motivée par des considérations d'ordre
rédactionnel, affirme la revue.)
En septembre dernier, dans une déclaration commune, les organisations professionnelles Magazine
Publishers of America et American Society of Magazine Editors ont recommandé à leurs adhérents de
ne pas accorder aux annonceurs de "lecture en avant-première". En conséquence, Chrysler n'eut plus
guère d'autre choix que de renoncer à ses exigences, même si cela devait se traduire par une
réduction du nombre de périodiques dans lesquels le constructeur insérerait ses annonces. En effet,
l'"étau" - pour reprendre le terme utilisé par la Columbia Journalism Review [voir encadré] pour
désigner la pression exercée par les annonceurs - semble se resserrer, en particulier autour des
petites publications. Un nombre croissant d'annonceurs prétendent que leurs produits ne peuvent
côtoyer que du texte inoffensif. Ainsi Kimberly Clark, le fabricant des couches-culottes Huggies, exige
que sa publicité dans les magazines consacrés aux bébés apparaisse "près de rubriques où il est
question de bébés heureux". Entendez par là : surtout pas d'histoires d'infanticides.
Mais, au moment même où Chrysler essuie une rebuffade de la part du monde des magazines, un
homme de marketing est, semble-t-il, en train d'abattre à coups de bulldozer la "muraille de Chine"
111
élevée dans les journaux. Dans la nouvelle organisation commerciale dévoilée par Mark Willes, le
président du groupe Times Mirror, chaque service de la rédaction du Los Angeles Times se verra
doublé d'un service publicitaire "couvrant" le même secteur.
L'idée est que les deux parties travailleront main dans la main pour séduire les lecteurs et gérer les
marques des annonceurs. Le quotidien est-il en train de brader son intégrité ? Il y a lieu de se poser la
question, non seulement à cause de la démission - pure coïncidence, affirme-t-on - du rédacteur en
chef Shelby Coffey, mais aussi à cause de la nomination d'un ancien responsable du marketing de
produits de grande consommation comme directeur général de la rédaction. A l'évidence, le projet de
M. Willes n'est pas sans dangers (peut-on écrire un article corrosif sur Hollywood alors que le chef de
service courtise assidûment un grand studio ?).
Mais les risques d'asservissement des journalistes du Los Angeles Times paraissent limités, étant
donné l'influence dont jouit ce quotidien sur le marché local. Ce qui peut être un problème, c'est un
affadissement du journalisme pratiqué. M. Willes, un transfuge de l'industrie des céréales pour petit
déjeuner, semble obnubilé par la nécessité de s'adapter rapidement aux goûts du consommateur.
Normalement, ce n'est pas là la recette du journalisme original.
Courrier International
30/10/1997, Numero 365
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MARKETING
La Suisse superstar
“La Suisse est sexy”, s’enthousiasme le gourou de la mode Tyler Brûlé. Micaela, 15 ans, surfe sur la
même tendance en arborant fièrement un tee-shirt orné de la célèbre croix blanche : “Grâce au tee-
shirt, j’accroche bien mieux les mecs”, confie-t-elle. C’est un fait : la “Suisse attitude” est à la mode.
Devenue un argument de vente, la croix blanche sur fond rouge, armoirie officielle du pays depuis
1889, s’affiche sur tous les supports : tee-shirts, mais aussi tapis, savonnettes et autres chaussettes.
A Londres, New York ou Tokyo, la seule présence du mot “Suisse” dans le libellé de la marque
semble garantir presque automatiquement un bon démarrage des ventes. C’est du moins ce que
croient les entrepreneurs : dans une étude de l’université Sankt Gallen rapportée par le journal suisse
alémanique “Facts”, 85 % des firmes helvétiques sont convaincues que leur origine représente un
atout à l’étranger.
Les succès de la Suisse auprès des consommateurs étrangers s’explique d’autant mieux qu’il est
ancien. Déjà en 1919, les trois quarts de la production des chocolats de Lindt et Sprüngli partaient à
l’exportation. Mais les raisons qui poussent les boutiques à parler de “tee-shirt du siècle” à propos du
tee-shirt à la croix blanche sont d’une autre nature. “Les gens sont en quête de repères et d’identité”,
explique l’expert en images Steven Loepfe. Les connotations d’élégance, de qualité et d’authenticité
qu’on accole facilement aux produits suisses sont autant de facteurs rassurants pour le
consommateur.
Vraie et fausse croix
Mais les Helvètes doivent faire face à un nombre croissant de copies bon marché. Les pertes pour
l’économie suisse se chiffrent en milliards de francs suisses. “De plus en plus de produits de qualité
médiocre portent la croix suisse, je trouve ça dangereux”, déplore le patron des couteaux Victorinox.
Les firmes se heurtent en outre à la prolifération de nouveaux produits utilisant les symboles de la
Suisse sans être suisses eux-mêmes, malgré une loi interdisant de tels procédés. “Les experts
estiment que parmi les milliers de marques répertoriées dans le monde comportant le mot ‘Suisse’,
seulement un tiers est helvète”, indique l’hebdomadaire “Facts”. Ainsi peut-on trouver en Colombie
une chaîne de fast-foods dénommée Swiss Place ou encore du maquillage thaïlandais appelé Swiss
Alpine.
Pourtant, ces petites ombres au tableau cachent peut-être un danger plus grand. Une étude publiée
en juin par l’institut Gottlieb-Duttweiler ose critiquer ouvertement la nouvelle mode de la “suissitude” et
de la tentation de “faire du neuf avec du vieux”, qui témoigneraient en réalité d’une absence de vision
et de volonté de prise de risques. “Le progrès avance à reculons”, prévient Eva Gerger, coauteur de
l’étude. Ceci n’empêche pas la Suisse de savourer son nouveau statut de star au pays des outils de
marketing... comme le soulignait la publicité à propos d’un célèbre bonbon à base de plantes : “Qui l’a
inventé ? Les Suisses”... pour sûr.
ET
© Courrierinternational.com
d'après Facts
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I NTERVIEW
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En sept ans, Fortis Foundation a financé 577 projets en faveur des déshérités et contre l'exclusion
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sociale. Ses priorités: les enfants, les jeunes et la solidarité entre les générations. Coup marketing T
ENTRETIEN
Créée en 1996, l'asbl Fortis Foundation, dont les fonds proviennent des entreprises du groupe de
bancassurance du même nom, a déboursé très exactement 7702060,51 € et financé 577 projets. Les heureux
bénéficiaires? Des associations belges au service d'enfants socialement défavorisés ou atteints de maladie
lourde, de jeunes désireux d'accéder à l'apprentissage ou à la formation et de projets susceptibles de
rapprocher des personnes en situation de précarité ou d'isolement. Ses promoteurs se défendent de céder à
«l'air du temps». « Notre démarche est éthique et fondée sur le principe de responsabilité envers les plus
démunis et les générations futures», disent-ils. Et d'expliquer: « Nos métiers nous sensibilisent depuis toujours
à la notion de solidarité bien que nous ne puissions, en toutes circonstances, répondre à toutes les questions ».
Autrement dit, il n'est pas permis d'endosser toute la misère du monde...
Dans cette démarche du groupe Fortis, quelle est la part de l'engagement citoyen et celle de la stratégie
marketing? Amélie d'Oultremont, cheville ouvrière de la fondation, répond à nos questions.
Fortis Foundation se dit «parée pour de nouveaux projets". Comme si l'action citoyenne ne
connaissait pas la crise...
L'enjeu est sérieux, ce n'est pas sur un poste pareil qu'on peut faire réellement des économies. Le budget
annuel qui nous est alloué reste fixé à 1,25 million d'euros. La démarche fait de plus en plus partie de la façon
d'être de Fortis. Vu le nombre de dossiers et de projets soutenus par les associations, l'effort doit
nécessairement être collectif.
Un monde ou l'Etat et les pouvoirs publics couvriraient tous les besoins de la société me ferait un peu peur.
Pour moi, cela ressemblerait méchamment à un Etat totalitaire ou le débat ne pourrait pas avoir lieu.
L'entreprise comme acteur économique a aussi sa part de responsabilité sociale au sein de la collectivité. Ceci
dit, il est essentiel que chacun reste à sa place. Pas question pour l'entreprise de se substituer à qui que ce soit
ni de se tromper de rôle. Sensibles aux défaillances du système et aux déficits qui se creusent, nous refusons
de jouer les sauveurs de l'Etat.
Sans votre aide matérielle, qu'adviendrait-il des projets que vous soutenez?
Ils n'auraient sans doute pas lieu, les difficultés allant hélas en grandissant.
Nous sommes à l'initiative de plusieurs projets en partenariat avec des associations, des communes, d'autres
entreprises, des institutions culturelles, etc. Nous faisons aboutir des projets qui n'auraient jamais lieu sans
notre apport. Exemples: deux émissions de TV (RTL et VTM) destinés aux jeunes parents défavorisés, une
action d'accueil aux associations avec le TRM («Un pont entre deux mondes»), création d'un lieu de formation
gratuit à l'informatique pour les démunis au sein de l'asbl IDJ avec la commune de Woluwe-St-Pierre, expo
photo, etc. Nous avons également lancé des "Solidarity days" au sein du groupe pour les collaborateurs qui
veulent donner un coup de main, un jour, au sein d'une association. Cela a beaucoup de succès! Nous avons
déjà mis sur pied 17 projets, réuni plus d'une centaine de bénévoles et lancé un service personnalisé pour les
jeunes retraités de Fortis.
Comment faites-vous pour assurer le pluralisme de votre action? Et les équilibres régionaux?
114
Nous travaillons au cas par cas, sans obsession, car sinon nous ferions de la politique. En fin de compte, tous
les équilibres sont bien respectés. Les besoins sont vraiment très nationaux.
Certains n'ont pas abouti, certains ont été postposés mais parmi les projets que nous soutenons, il est difficile
qu'ils échouent à proprement parler car nous travaillons sur base de conventions et de factures. Parfois, nous
sommes remboursés, le montant ayant été réévalué à la baisse ou le projet reporté.
Je déteste cette tendance qui consiste à tout vouloir confondre afin d'éviter de se définir. Le sponsoring et le
mécénat sont deux termes différents qui ont chacun leur contenu et leur retentissement. Le sponsoring suppose
un échange commercial, les entreprises du groupe Fortis font beaucoup de sponsoring dans différents domaines
et dans ce cas, elles entrent en relation avec leurs différents «stakeholders» (les parties prenantes, NDLR).
Nous n'avons aucune mission de ce type, au contraire. Le mécénat pour nous, c'est une décision libre du top
management qui choisit, comme tout citoyen, d'être social dans la discrétion, mais aussi d'être professionnel,
efficace, transparent dans ce domaine bien délicat. Pour ce faire, Fortis a mis en place une structure
indépendante, un budget annuel et cinq personnes. Son conseil d'administration suit la situation de près.
Comme un individu qui veut s'engager et souhaite avoir une bonne image de lui-même, Fortis vise une bonne
intégration au sein de la collectivité et la fidélité à ses valeurs. Le groupe est fier de sa réputation, aussi dans ce
domaine.
Pourquoi faut-il toujours avoir des arrière-pensées? C'est un fait, Fortis appartient à la société belge. En cela, il
se doit de répondre avec des objectifs clairs, des axes d'interventions bien définis et des critères non
équivoques aux multiples demandes qui nous viennent de la société civile. Les intentions sont parfaitement
réfléchies et aucunement commerciales. Tant mieux si cela enthousiasme un client. Où est le problème ?
Chez Fortis, l'engagement ne date pas d'hier et ne se limite pas à un territoire. Le groupe a créé des fondations
d'entreprises partout (Fortis Foundation Nl, Fortis Foundation Inc, Fortis Foundation Belgium). Il correspond à
des valeurs, ce n'est pas juste du cosmétique!
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B as les marques!
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Exit BBL, Stassano, Maxi-GB et tutti quanti. Comme par magie, ces marques disparaissent de notre
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quotidien. Que penser de cette valse des enseignes? L'avis d'Isabelle Schuiling, professeur à
l'IAG/UCL T
ENTRETIEN
A quoi bon s'étonner, protester ou verser un pleur? Les marques locales tombent au champ d'honneur. Comme
des mouches. Qu'est-ce qui peut bien pousser les entreprises à changer leur nom ou celui de leurs produits? Le
consommateur s'y retrouve-t-il? Voyons ce qu'en pense Isabelle Schuiling, professeur à l'IAG/UCL, auteur de
travaux sur la question.
Oui. Il est même plus prononcé dans les petits pays. Des centaines de marques locales ont été éliminées. Le
portefeuille d'Unilever passe de 1600 marques à 400, Procter & Gamble n'en a plus que 300, Nestlé se
concentre sur ses 10 marques mondiales, L'Oréal en conserve 17 et Mars privilégie Twix, M&Ms ou Mars. Aucun
secteur n'est épargné.
Une marque locale forte dans un petit pays ne pèse pas lourd en terme de volume et de profit au niveau
européen ou mondial. En Belgique, les marques BBL, Générale de Banque, Crédit communal, CGER, Marie-
Thumas, Unox, GB maxi, Gaufre Suzy, et bien d'autres, ont été supprimées au profit de marques
internationales.
Pourquoi supprimer une marque locale que le consommateur apprécie? Pour des raisons
d'économies d'échelle? Le changement a lui aussi un coût...
Les réductions de coûts sont en effet la raison principale de ces suppressions. Les multinationales ne veulent
plus consentir d'efforts pour soutenir des marques locales qui nécessitent des investissements en R&D et des
équipes de marketing locales. Ces marques locales fortes représentent des années d'investissements et sont
bien présentes à l'esprit des consommateurs. Elles ont réussi à créer un lien émotionnel très fort avec eux. La
fidélité à la marque est également élevée. D'un autre côté, les entreprises locales ont beaucoup de mal à
concurrencer les marques internationales qui disposent de moyens très élevés.
Le changement de nom de marque a certes un coût très élevé mais les entreprises espèrent qu'à long terme
elles seront gagnantes financièrement.
Certaines marques qui paraissaient "usées" reviennent parfois à l'avant-plan par effet de mode. La
preuve qu'il ne faut pas s'en débarrasser trop vite?
Les marques locales doivent innover comme les autres pour rester concurrentielles. Certaines d'entre elles n'ont
pas été rajeunies mais sont de vrais joyaux locaux, les consommateurs y sont très attachés. Elles reviennent
quand une société les relance avec une stratégie marketing appropriée.
Je suis convaincue que, dans quelques années, quand l'effet de mode de la globalisation sera passé, les
groupes internationaux relanceront des marques qu'ils ont abandonnées. Cela nécessitera des investissements
lourds et le risque existe que ces marques ne puissent revenir à l'avant-plan. Je crois que le consommateur se
lassera d'avoir à choisir parmi des marques internationales et standardisées qui ne répondent pas forcément à
ses besoins.
La marque BBL avait la chance d'avoir un capital de sympathie et de confiance très élevé. Elle existait depuis
des décennies en Belgique. Je pense qu'il sera très difficile à ING de créer un tel lien.
116
J'aurais tendance à privilégier un changement progressif quand le degré d'attachement à la marque est élevé.
L'objectif est d'informer le consommateur du changement de nom avant qu'il n'ait effectivement lieu afin de le
familiariser. Des marques comme Whirlpool (qui a racheté l'électroménager de Philips), Bonduelle (ex-Marie-
Thumas) et ING ont suivi ce type de changements progressifs.
Les consommateurs belges sont-ils condamnés à ne plus acheter que des marques uniformisées? Le
"made in Belgium" n'a-t-il plus la cote?
Les marques belges souffrent du rachat par des sociétés étrangères de nombreuses entreprises nationales. Les
managers locaux n'ont plus la possibilité de convaincre la direction étrangère de l'importance de leurs marques.
De même, les entreprises multinationales n'accordent que peu d'importance aux marques locales fortes en
Belgique.
Lors d'un changement de marque, arrive-t-il que des clients habituels "décrochent"?
La règle veut qu'un client ne change pas facilement son habitude de consommation. Mais une minorité de
consommateurs «décrochent» et passent à la concurrence car ils ne se reconnaissent pas nécessairement dans
les nouvelles marques. Pour les entreprises internationales, une baisse de volume et même de profit dans un
pays est jugée moins importante que le bénéfice futur espéré par le développement et donc par la
standardisation des marques internationales. On peut se demander si une marque comme Bonduelle, peu
connue en Belgique, a réussi à conserver le volume de ventes de l'ex-Marie-Thumas.
Quand un groupe acquiert des marques nationales, n'a-t-il pas intérêt à les conserver, à l'instar
d'Interbrew?
Interbrew est, à ce titre, exemplaire. Voilà une entreprise qui n'est pas influencée par la mode du marketing
global. Ses dirigeants essaient de générer des économies d'échelle en s'internationalisant mais pas au
détriment des consommateurs locaux. Ils estiment que les marques locales sont un atout majeur de leur succès
car elles ont une relation privilégiée avec le consommateur local. Ils les conservent et les nourrissent. Ils
disposent, par ailleurs, de la marque internationale Stella Artois, positionnée dans le haut de gamme.
Le groupe Coca-Cola a compris, il y a peu, qu'il avait perdu la sensibilité aux consommateurs locaux et a
redonné la liberté aux équipes de marketing locales de développer des spots publicitaires locaux et même de
lancer de nouvelles marques locales. Procter & Gamble a quelque peu ralenti également sa frénésie de
globalisation sans pour autant abandonner complètement ce «business model». Il est regrettable que le
marketing des entreprises soit exclusivement motivé par des considérations financières à court terme. Il faut
remettre le consommateur au centre des préoccupations.
Y a-t-il des exemples de marches arrière de fabricants contraints de réagir à la "pression" des
consommateurs ?
En Tchéquie, Danone n'a pas réussi à imposer sa marque internationale et à dû recourir à la marque locale
Opavia pour s'introduire sur ce marché.
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C olt dégaine contre Belgacom
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ENTRETIEN
Cinq ans après la libéralisation totale du secteur des télécommunications en Belgique, l'opérateur historique
Belgacom conserve une position très forte alors que les opérateurs alternatifs accumulent les déboires. Le point
de vue de l'un d'entre eux par le biais d'Alain Vande Kerkhove, le directeur marketing de Colt Telecom dans le
Benelux. Au premier trimestre, cet opérateur britannique présent dans 13 pays européens a réalisé un chiffre
d'affaires d'environ 390 millions d'euros, en hausse de 10 pc par rapport à la même période l'année passée. En
Belgique, ce chiffre d'affaires s'est élevé en 2002 à 54 millions d'euros, soit une croissance de 16 pc par rapport
à 2001. La rentabilité, tant en Belgique qu'au niveau du groupe, est programmée pour 2005.
Un bilan mitigé. D'une part, il y a incontestablement eu des avancées, notamment au niveau de la qualité des
services offerts aux clients mais d'autre part, il reste des gros manquements. Le coût des appels d'un téléphone
fixe vers un téléphone mobile, qui est dans les mains des 3 opérateurs GSM, reste ainsi scandaleusement élevé.
Or, ce trafic représente tout de même 23pc de l'ensemble des appels effectués en Belgique. Autre problème: le
régulateur du marché. Malgré les promesses répétées du ministre des télécoms Rik Daems, l'IBPT n'est toujours
pas indépendant. Et il ne dispose d'aucun pouvoir de contrainte, ce qui le rend inefficace pour contrer les
illégalités de Belgacom. Contrairement à ce qu'affirme Daems, la Belgique est donc loin d'être un bon élève
européen en matière de télécoms.
Non, je crois qu'un autre que lui n'aurait pas fait mieux. C'était ridicule de confier à un même ministre la
gestion des télécoms et des entreprises publiques, le rendant ainsi responsable aussi bien de l'opérateur
historique que du régulateur. Pendant quatre ans, sa gestion n'a fait que conforter la position dominante de
Belgacom.
Précisément, en parlant de Belgacom, vous leur reprochez d'agir dans l'illégalité. Pourquoi ne pas
les poursuivre alors?
On ne peut tout de même pas passer notre temps au tribunal. Et puis les responsables de Belgacom sont
malins: ils savent exactement jusqu'où ils peuvent friser l'illégalité. Beaucoup de leurs tarifs sont trop bas pour
être honnêtes par exemple. Mais d'une part, leurs comptes ne sont pas assez transparents pour qu'on puisse
prouver une quelconque infraction et d'autre part, un client qui bénéficie de ces tarifs ne va évidemment pas
témoigner contre Belgacom.
N'y a-t-il pas eu aussi des erreurs de stratégie commises par les opérateurs alternatifs?
Certainement, beaucoup d'entre eux se sont tués eux-mêmes. Aujourd'hui, lorsque nous briguons un marché,
nous ne rencontrons plus guère que Belgacom, WorldCom, BT Ignite ou, beaucoup plus rarement, Versatel
comme concurrents. Il y a des tas de «cow-boys» qui sont arrivés sur le marché en cassant les prix et en se
basant sur des business models totalement irréalistes, qui visaient par exemple une part de marché de 50pc.
Ces opérateurs-là ont disparu, mais leurs tarifs sont restés. Et les marges ont fondu, ce qui rend notre situation
beaucoup plus difficile.
Oui, c'est sûr, on a gagné un certain nombre de clients. Mais l'image des opérateurs alternatifs a beaucoup
souffert des problèmes de KPN Qwest, de Global Crossing ou de WorldCom. En ce qui nous concerne, nous
avons heureusement revu à temps notre business model et nous avons drastiquement réduit nos dépenses. Nos
effectifs, qui étaient de 5.700 personnes à leur plus haut niveau, seront ainsi ramenés à 4.300 personnes d'ici à
la fin de cette année. En Belgique aussi, ils ont d'ores et déjà été ramenés de 174 à 155 personnes.
D ISTRIBUTION-ÉTUDE
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C olruyt va-t-il détrôner Carrefour?
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Sandrine Vandendooren
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Affirmatif, conclut Marketing Map dans sa dernière étude sur la distribution belge. Si Carrefour ne
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mène pas de politique d'expansion, Colruyt le supplantera en 2006. Et, dès 2003, les ventes des
affiliés Delhaize dépasseront celles des franchisés GB. T T
Après 15 années de pertes, Carrefour Belgium (ex-GB) a enfin regagné des parts de marché en 2002 et
renoué avec les bénéfices (opérationnels). Et cette fois-ci ce n'est pas le géant français de la distribution qui
l'affirme. Le redressement du leader belge est confirmé dans la dernière radioscopie sur la distribution
alimentaire en Belgique que vient de publier le bureau d'études anversois Marketing Map.
L'auteur de l'étude, Chris Opdebeeck, estime toutefois que Carrefour Belgium est attaqué sur deux fronts: par
Colruyt en ce qui concerne les magasins intégrés et par les affiliés de Delhaize (AD Delhaize, Proxy, Shop'n go)
au niveau de son réseau de franchisés (Super GB Partner, GB Contact et GB Express). «Sauf changement
fondamental dans la politique d'expansion de Carrefour, Colruyt dépassera Carrefour en 2006 et sera numéro
un en Belgique, exception faite des supermarchés franchisés», avance Chris Opdebeeck, qui fonde ses
extrapolations d'une part sur la récente reprise par Colruyt de 26 magasins appartenant au groupe Laurus
(Battard et Central Cash) - dont le chiffre d'affaires sera multiplié par deux, une fois remodelés à la sauce
Colruyt - et d'autre part, sur le rythme de croissance des deux groupes. Soit 3,3pc pour Carrefour (croissance
de janvier à avril 2003 par rapport à la même période 2002) et de 10 pc pour Colruyt (croissance affichée en
moyenne ces dernières années). Ainsi, selon lui, à politique inchangée, le chiffre d'affaires de Colruyt devrait
tourner, à l'horizon 2006, autour des 4 milliards d'euros, tandis que celui de Carrefour Belgium (hypermarchés
Carrefour et Super GB) devrait avoisiner les 3,9 milliards. Toujours en termes de place sur le marché belge, le
consultant estime aussi - à politique inchangée encore et sur base des ventes jusqu'en 2002 - qu'à la fin de
cette année déjà, le chiffre d'affaires des affiliés de Delhaize (1,52 milliard d'euros) pèsera davantage que celui
des franchisés GB (1,45 milliard).
L'étude de Marketing Map démontre, par ailleurs, l'impressionnante progression des enseignes allemandes de
hard-discount, Aldi et Lidl. La première a ouvert 15 nouveaux points de vente, totalisant ainsi 363 magasins en
Belgique. Et la deuxième a enregistré la plus forte expansion en 2002 (+ 28 points de vente). Les deux
distributeurs allemands font ainsi partie, avec AD Delhaize, du peloton de tête des plus grands gagnants en
termes d'ouvertures, entre 1998 et 2002.
En moyenne, la grande distribution à dominante alimentaire réalise un chiffre d'affaires de 6600 euros par m et
par année. Les enseignes les plus performantes sont GB Express, Colruyt, Rob et Makro qui réalisent un
rendement supérieur à 10000 euros par m et plus. «Mais ces chiffres sont encore bien loin du rendement
affiché par Auchan en France : 15000 euros par m», souligne M. Opdebeeck.
Le rendement des hypermarchés Carrefour s'est amélioré, en 2002, pour atteindre 6662 euros mais cela reste
en dessous du rendement des magasins Carrefour (ex-Continent) en France ayant une surface comparable à
celle des hypermarchés belges (10000 euros). Au niveau de la rentabilité, Colruyt demeure l'as de la
performance. Son résultat d'exploitation (140 millions d'euros selon les estimations de Marketing Map) a
dépassé, l'an dernier, celui de Carrefour (3,3 millions d'euros) et de Delhaize (94,7 millions) réunis.
Enfin, l'enquête - qui se réfère aux chiffres de GFK - montre que la fidélité des clients belges (réputés pour être
volages) envers une enseigne augmente à nouveau depuis 2000. En 2002, le consommateur belge visitait en
moyenne 4,7 enseignes par trimestre, contre 5,6 en 1999. «Le phénomène de proximité joue. A cause de la
densité élevée des magasins (300 m de surface de vente par 1000 habitants), un ménage belge trouve nombre
de différentes enseignes dans son voisinage et se déplace moins loin pour faire ses courses», analyse Chris
Opdebeeck.
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D u délire, de la folie, du Harry Potter
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Laurence Bertels
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«Harry Potter et l'Ordre du Phénix» est sorti ce 21 juin à minuit. Il s'agit bel et bien du plus grand
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Vertiges d'un jour, sortie de la nouvelle Nintendo, du dernier album de Madonna, bougies chez Johnny,
pottermania... Les mégaévénements passionnent, se jugent par la quantité de spectateurs, de lecteurs,
d'auditeurs. Même votre serviteur tombe dans le chaudron dopé. Car quoi de neuf sur la planète sinon la sortie
du tome V d'Harry Potter attendu depuis 3 ans par les fans du plus grand sorcier de tous les temps ? On est loin
des dragées maigres de 1990, date réelle de la naissance du petit Harry lors d'un aller simple Manchester-
Londres, du café Nicolson's d'Edimbourg et des 100 euros de revenus mensuels de J.K.Rowling..
En vente en version anglaise, chez Bloomsbury et Scholastic, dès minuit, heure GMT, ce 21 juin, «Harry Potter
and the order of the Phoenix» sera disponible en français, et dans toutes les autres langues, le 3 décembre
2003. D'ici là, le traducteur, Jean-François Ménard se coupera du monde. La version française comptera près de
900 pages, 130 pages de plus qu'en anglais, langue plus concise.
A nouveau, la sortie du tome V s'accompagnera d'un battage publicitaire à la (dé)mesure du phénomène. Rien
que sur Amazon, librairie en ligne, plus d'un million d'exemplaires ont déjà été achetés. Du jamais vu dans le
monde de l'édition.
Aux Etats-Unis comme en Angleterre, à Paris, à Bruxelles, des librairies resteront ouvertes jusqu'à minuit voire
toute la nuit. Festivités et autres opérations de marketing sont prévues des docks londoniens à Southampton,
de Douvres au Lands End. De l'autre côté de l'océan, la sortie du livre a pris l'allure d'un événement national au
risque d'halluciner. Des mesures de sécurité de niveau militaire ont été prévues pour encadrer des milliers
d'enfants inconditionnels et canaliser des groupes religieux prêts à l'autodafé.
Equipés de leur cape d'invisibilité et du maquillage indispensable pour réussir la célèbre cicatrice d'Harry, les
enfants auront la tenue de rigueur pour se procurer ledit exemplaire. L'éditeur américain Scholastic a prévu un
premier tirage sans précédent de 8,5 millions d'exemplaires dans un pays où 80 millions de livres de Harry
Potter ont déjà été vendus. Pour rappel, dans le monde, ce sont plus de 195 millions de livres qui ont connu le
même sort. Pendant cette fièvre pottérienne, l'auteur, Joanne Kathleen Rowling, passera son samedi près de
son fils de 3 mois, David, de sa fille Jessica (10 ans) et de son mari anesthésiste.
La dame la plus riche d'Angleterre - sa fortune est estimée à 405 millions d'euros - apparaîtra le 26 juin, à
Londres, dans un Royal Albert Hall redécoré aux couleurs du Collège Poudlard devant 4000 enfants avides de
savoir ce que le sage Dumbledore confiera à Harry; de qui celui-ci tombera amoureux - Cho Chang? - et, qui
sait?, le nom de celui qui doit mourir. Ni Ron, ni Hermione, ni Harry, paraît-il. Alors, Hagrid? Malgré l'embargo
strict, des fuites ont eu lieu et l'éditeur Scholastic compte réclamer des dizaines de millions de dollars au «New
York Daily News» pour avoir publié des extraits avant l'heure. Damned, tout continue à faire bouillon au
chaudron.
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F ini la banque «gratuite»!
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Désormais, plus aucune grande banque belge ne fera de «cadeau» à ses clients! La Banque de La Poste, celle
que l'on appelait jadis la «banque des pauvres», appliquera une tarification forfaitaire «light» à ses divers
services à partir du 1er août. La dernière à travailler pour les beaux yeux de sa clientèle, elle en faisait un
argument marketing... peu apprécié par la concurrence. Mais par-dessus tout, sa position devenait «intenable».
Jusqu'ici, les revenus dégagés par les sommes transitant sur les comptes à vue suffisaient à la rémunérer. Mais
le reflux persistant des taux d'intérêt posait un problème de plus en plus aigu. La rentabilité et la continuité des
services étaient menacées, reconnaît la banque.
Créée en 1995, fruit du partenariat entre La Poste et Fortis Banque, la Banque de La Poste a toujours occupé
une place d'outsider au sein du secteur. Si elle n'a plus rien à voir avec le Postchèque qui s'attirait les foudres
des banques pour manque de transparence et subsidiation déguisée, elle n'en était pas moins une institution
«pas comme les autres».
Bien que le prix qu'elle réclamera ne sera dans un premier temps pas très élevé (20 euros pour 144 virements,
52 extraits de comptes, 4 chèques et des opérations électroniques illimitées), elle met le pied à l'étrier de la
tarification. Elle cesse de jouer la différence. Pour la clientèle moins favorisée, le service bancaire universel
tombera à point nommé à la rentrée de septembre.
Un autre point mérite d'être soulevé. A l'heure où les banques se voient reprocher d'opérer en «cartel» - ce
qu'elles démentent bien entendu - et qu'elles s'entendent comme larrons en foire pour coordonner leurs
prestations (l'abaissement simultané des taux des carnets d'épargne à des taux dérisoires annoncé cette
semaine en est une nouvelle preuve), on peut regretter ce coup de canif supplémentaire dans la concurrence.
Entre les grands discours sur la libéralisation des services financiers et la pratique, il y a un monde
d'incompréhension.
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H AUT DE GAMME
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T U n nouveau créneau? T
Christian Hubert
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Opel appartient à General Motors, qui possède, aussi, la totalité de Saab et toutes les marques américaines que
l'on connaît, de la Chevrolet à la Cadillac. C'est sans doute pour cela que le généraliste Opel donne un peu
l'impression de négliger son haut de gamme. L'Omega n'a pratiquement plus changé depuis une dizaine
d'années. Aux dernières nouvelles, la relève sera assurée, mais pas dans l'immédiat. En attendant, c'est la
dernière née des productions européennes de GM, la (ou «le», le genre n'est pas exactement défini) Signum,
qui est considérée comme le haut de gamme d'Opel.
Ses concepteurs, en tout cas, attendent beaucoup pour modifier l'image de marque d'Opel que d'aucuns
considèrent comme trop classique. Un faux procès, d'ailleurs, car il y a suffisamment de produits Opel, comme
le Zafira, le Meriva, le Speedster, les cabriolet et coupé Astra qui démontrent le contraire.
QUATRE EN UN?
La Signum est conçue sur la plate-forme de la nouvelle Vectra, mais avec 13 centimètres en plus. C'est ce
détail capital qui fait passer la voiture dans une autre catégorie. Une catégorie qu'elle a l'ambition de créer, et
qui s'affranchit des barrières traditionnelles; la «classe Signum» veut faire la différence par quatre qualités
majeures: une esthétique élégante, des qualités dynamiques spectaculaires, un confort très élevé et un
intérieur très modulable.
Bref, une voiture qui serait à la fois berline, coupé, break et monovolume: «Le Signum a l'élégance d'une
berline de fonction, le dynamisme d'un coupé sportif, la polyvalence d'un monospace et le volume utile d'un
break», affirme Freddy De Mulder, directeur du marketing.
Renault, le constructeur qui était allé le plus loin dans ce mélange des genres, a arrêté la production de
l'Avantime. Un mauvais présage? «Non, certifie Stefan Warnke, responsable du projet Signum, car l'Avantime a
connu beaucoup de problèmes à sa naissance, son lancement a été différé, et elle était construite chez Matra
qui a aujourd'hui abandonné l'automobile. Il n'y a pas de point commun. Signum doit séduire ceux qui hésitent
entre diverses formes de familiales.»
UN MAXIMUM DE CONFORT
En réalité, par rapport à la Vectra, plus précisément la GTS, la différence essentielle, en dehors du look, se situe
au niveau des places arrière. Le système de sièges FlexSpace permet de reculer individuellement les deux
sièges arrière. Leurs dossiers peuvent également s'incliner à 30°. C'est ainsi qu'on peut avoir un passager qui
travaille sur son ordinateur posé sur la tablette style aviation, tandis que l'autre peut faire la sieste ou regarder
un DVD grâce au lecteur inséré sur la console multifonctions «Travel Assistant». Quant au siège du milieu, il
peut, grâce à une cinématique élaborée, être rabattu et transformé en accoudoir. Vous l'aurez compris, si on
peut évidemment placer cinq passagers à l'arrière, la Signum a été conçue pour quatre. Notez que la... VW
Phaetom est dans le même cas.
Ceci dit, les places avant ne sont pas négligées. Ainsi, pour le conducteur, Opel propose en option un siège
morphologique ventilé réglable sur... 18 axes!
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SEPT MOTORISATIONS
En Belgique, la Signum sera disponible en quatre exécutions: Signum, Elegance, Sport et Cosmo.
Au niveau des motorisations, 75pc des ventes en Belgique seront réalisées avec les DTI de 2.0 et 2.2 litres. Le
3.0 CDI ne devrait faire que 20pc. Pour les versions à essence (20pc), la 1.8 devrait représenter 13pc, la 2.2
6pc, les 2.0 Turbo et 3.2 se partageant le dernier pour cent...
Les prix? Ils s'échelonnent de 24000 à 36400 euros, mais le programme des prix nets débute à 22500 euros.
Opel espère, en année pleine, vendre 1450 Signum, ce qui serait un résultat appréciable. Il est vrai qu'à part
quelques percussions de suspension et une finition parfois peu en rapport avec le standing de la voiture, il n'y a
quasi que des éloges à épingler.
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H omme de marque (s)
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John Brock est, depuis trois mois, le nouveau grand patron d'Interbrew.
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Cet Américain, débauché chez Cadbury Schweppes, a une obsession: développer les marques du
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RENCONTRE
C'est une question de principe. John F. Brock ne boit que des bières de la famille Interbrew. S'il n'en a pas sous
la main? Dans ce cas, il se passe de bière. «J'avais la même attitude vis-à-vis des boissons non alcoolisées
quand j'étais chez Cadburry Schweppes. Notre business est très compétitif. On ne peut pas se permettre d'être
vu, buvant une marque concurrente». Voilà qui a le mérite d'être clair. Et John Brock est clair. Peu connu dans
les milieux d'affaires belges, c'est pourtant lui que les actionnaires ont été chercher pour prendre la tête du
troisième brasseur mondial et succéder à Hugo Powell, il y a trois mois.
L'Américain, qui soufflera ses 55 bougies le 6 mai, est une solide pointure, au profil international. Certes, il ne
vient pas du monde brassicole mais d'un milieu qui lui est tout proche: celui des boissons non alcoolisées. John
Brock a travaillé pendant 20 ans chez Cadbury Schweppes, le troisième groupe mondial de «soft drinks», où il a
occupé plusieurs postes de direction avant de devenir «Chief Operating Officer», le numéro deux de la maison.
Une fonction qui lui a d'ailleurs valu d'être sacré «Manager de l'Année 2000» par l'«US Beverage Industry».
«Excepté la législation, il y a beaucoup de similarités entre le monde des boissons non alcoolisées et celui de la
bière. Tout est une question de marques, de marketing et de distribution. Il faut s'assurer que les produits
répondent bien aux besoins des consommateurs et qu'ils soient disponibles dans les endroits où les
consommateurs les attendent», estime le nouvel homme fort d'Interbrew, originaire de Moss Point, une petite
localité du Mississipi.
Ingénieur chimiste diplômé du Georgia Institute of Technology à Atlanta, John Brock a débuté sa carrière chez
Procter & Gamble, une autre multinationale américaine. Après 11 ans, il rejoint Cadbury Schweppes, où il joue
notamment un rôle décisif dans les acquisitions de plusieurs grandes marques de limonades telles que Dr
Pepper/Seven Up et d'Orangina.
Le président du conseil d'administration, Pierre-Jean Everaert, le décrit d'ailleurs comme «un homme de
marques». «Chez Cadburry Schweppes, j'étais chargé de construire un portefeuille de marques, confirme
l'intéressé. Ma mission chez Interbrew est plus confortable car les marques existent déjà».
Pour John Brock, ce nouveau défi sonne un peu comme une consécration professionnelle. «Devenir le CEO
(Chief Excecutif Officer ou administrateur délégué) d'une entreprise cotée comme Interbrew, avec un tel
héritage et une telle collection de marques, est un rêve, le poste de ma vie. J'avais déjà eu des opportunités de
ce type mais j'avais toujours refusé jusqu'à présent».
John Brock a donc quitté Londres, où il résidait depuis sept ans pour la Belgique. Depuis mars, il a élu domicile
avec sa femme (son «amour d'enfance», avec qui il est marié depuis 34 ans, glisse-t-il fièrement) et le plus
jeune de ses trois enfants, à Tervuren, dans une villa avec vue sur le golf.
«Interbrew est une voiture qui roule très bien mais je veux la faire rouler plus vite et plus efficacement»,
diagnostique-t-il. L'homme veut aussi retrouver la confiance des milieux financiers. L'action du brasseur belge
ne s'est, il est vrai, jamais remise de l'affaire Bass au Royaume-Uni et les dirigeants d'Interbrew ont souvent
été critiqués par les analystes pour «les prix exorbitants» qu'ils avaient payés lors de certaines acquisitions,
entre autres celle de Beck's en Allemagne.Le nouveau patron l'a donc expliqué cette semaine, devant
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l'assemblée générale des actionnaires: sa priorité numéro un va à la croissance organique et au renforcement
des marques du groupe. Un message qui a visiblement rassuré le marché. «Nous avons réalisé plusieurs
acquisitions avec succès. Nous devons à présent les intégrer le plus efficacement possible, afin de réaliser un
maximum de synergies et libérer cet argent pour soutenir nos marques.» Cette stratégie passera par une
augmentation du budget marketing. «Nous allons continuer à soutenir commercialement nos deux marques
internationales phares, la Stella Artois et la Beck's, et étudier quelles sont les marques locales et/ou spéciales
dans lesquelles nous voulons investir davantage.»
Pour autant, le nouveau maître de l'orge d'Interbrew n'entend pas mettre un point final à l'expansion
internationale du groupe belge. «Nous allons poursuivre notre politique d'acquisitions mais de manière très
prudente. Il est important que celle-ci soit stratégique et créatrice de valeur pour nos actionnaires. C'est
pourquoi, il faut d'abord regarder, dans les 21 pays où nous sommes déjà implantés, s'il y a des opportunités
pour y renforcer nos positions.»
John Brock déborde visiblement d'énergie. «Il est hyperdynamique. C'est un homme de terrain qui met l'accent
sur l'opérationnel», raconte-t-on dans les couloirs d'Interbrew. M. Brock attache par ailleurs beaucoup
d'importance aux hommes et femmes qui font Interbrew. «Je veux connaître les gens et je veux que les gens
me connaissent.» L'homme, qui passe 30 à 40 pc de son temps à voyager, a d'ailleurs l'intention de faire le tour
de toutes les brasseries du groupe. Il se voit davantage comme «un leader, un coach» que comme un manager.
«Il est très important, chez Interbrew, que l'on travaille comme dans une équipe et non pas comme dans un
groupe de superstars.» L'Américain compte apporter quelques changements dans la structure organisationnelle
du groupe, sans toutefois, insiste-t-il, faire la révolution. « Vous pouvez avoir les meilleures marques et les
meilleurs marchés du monde. Mais si vous n'avez pas les meilleures personnes aux meilleurs postes, vous ne
pouvez pas réaliser de grandes choses.»
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J OLI COUP DE PUB!»
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« Génial», «nul», «plutôt sympa», «assez marrant», «illégal «, «zwanze typiquement de chez nous », etc. On
trouve des réactions de toutes les sortes et de toutes les couleurs sur le site de La Libre Belgique
(www.lalibre.be) au lendemain de l'initiative «électorale» de Virgin Express. Dans l'ensemble, il faut le dire, les
avis sont assez bienveillants et tous s'accordent pour dire que la compagnie s'est octroyé « un joli coup de pub
à bon compte». «On en parle partout. Un peu comme Benetton, Virgin a réussi à choquer ou à faire rire. Il a
atteint son but final: faire parler de lui », affirme un internaute. « Sur le plan marketing, beaucoup
d'entreprises peuvent en prendre de la graine », réagit un autre. Et d'ajouter: «Si on était vraiment moral ou
éthique, on condamnerait la plupart des pubs qui ne sont que des déchets en plus dans notre vie de
consommateur. Alors, pas d'hypocrisie!».
«Je serais tenté d'accueillir ce genre de campagne par un haussement d'épaule. Comment répondre autrement
à un pareil mauvais goût?», se demande cet intervenant. « Franchement, je ne trouve pas qu'il soit moins
correct d'aller voter en maillot de bain plutôt qu'en jean avachi et en baskets trouées », lui répond un autre. «
Je ne vois pas en quoi cela dérange. Après tout, on est dans un pays libre », souligne un troisième. Si l'un(e) ou
l'autre de nos correspondant(e)s s'interrogent sur la légalité d'une telle opération, d'aucuns estiment que nos
parlementaires - « dont certains vont siéger en vélo»- feraient bien de se préoccuper de la question. Quant à la
Justice, elle devrait être « plus cohérente », pense l'un d'eux. Certains insistent encore sur la « pingrerie » de
Virgin qui n'offre que des mini prix. D'autres sont carrément nostalgiques: « Je suis allé voter en uniforme de la
Sabena. On ne m'a pas remarqué...». (P. Lo.)
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L 'image, rien que l'image
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Le Grand Prix presse du Festival de la pub de Cannes revient à une annonce PSII représentative du
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ÉCLAIRAGE
En consacrant cette année un visuel français pour la PlayStation conçu par l'agence TBWA (dont le directeur de
création, Erik Vervroegen, est l'un de nos compatriotes -Cocorico!-), le jury «Press & Outdoor» du 50e Festival
international de la publicité de Cannes, qui s'achèvera ce samedi avec les résultats du palmarès de la
compétition «Film», a en partie déjoué les pronostics en ne couronnant pas, parmi les quelque 8500 candidats
(!), une affiche anglo-saxonne. Mais en partie seulement car son Grand Prix revient quand même à une
campagne dont le concept «tout à l'image» (avec ce personnage en train de «renaître», un clin d'oeil pour nous
dire que depuis qu'il a découvert la console de jeu il serait devenu un autre homme) illustre bien la tendance
dominante de la création publicitaire de ces dernières années.
Depuis le milieu des années 90, le «visuel concept» comme on l'appelle s'est en effet imposé comme un must
dans les agences, et la clé du succès dans les compétitions internationales de renom. Il y a des exceptions -
The Economist ou Diesel notamment -, mais elles sont rares.
Au prétexte qu'«un dessin vaut 4.000 mots» pour reprendre un vieil adage publicitaire, les créatifs ont depuis
pris massivement le pli de supprimer toute référence au texte -jusqu'à n'apposer le plus souvent que le logo-,
laissant à l'image seule le soin de faire passer le message. Une pratique qui résulte à la fois de
l'internationalisation des campagnes, laquelle a conduit les annonceurs à privilégier un discours universel; et
d'une uniformisation des références et des valeurs -comme on s'en doute fortement teintée d'accent anglo-
saxon-, qui doit elle à la fois à la suprématie culturelle des Etats-Unis et au caractère incontournable de
quelques sources (palmarès des grands rendez-vous créatifs, publications spécialisées comme «Shots», etc.),
les mêmes pour tout le monde.Une pratique qui a entraîné une homogénéisation des travaux et la disparition
des particularismes régionaux, humour biscornu scandinave, extravagance latino et autres. Sinon dans les pays
eux-mêmes où les clins d'oeil à la culture locale restent encore fréquents, en tout cas dans les palmarès des
concours mondiaux.
Or, comme ceux-ci servent de source d'inspiration aux jeunes générations de créatifs, on doit s'attendre à les
voir adopter les mêmes réflexes. Surtout que cette soumission à l'image est la condition sine qua non
aujourd'hui pour espérer briller sur la Croisette.
En attendant, la plupart des pubs primées se ressemblent déjà et utilisent les mêmes ficelles, qu'elles émanent
d'Argentine ou de Suède. Un exercice ultracodé qui finit par agacer un nombre croissant de festivaliers. La
coupe serait-elle pleine?
«Les campagnes sont de plus en plus formatées, confirme ainsi Frédéric Bouchar, directeur de la rédaction de
«Media Marketing», qui se trouve sur place. Pour reprendre le jeu de mot d'une consoeur, on a de plus en plus
l'impression d'assister au Festival de la publicité internationale qu'au Festival international de la publicité.»
Ce constat, s'il doit inciter publicitaires et annonceurs à réfléchir ensemble pour éviter de ne produire à l'avenir
que des publicités ultrastandardisées et consanguines, n'empêche pas de profiter du plaisir de l'instant. Surtout
quand trois agences belges se distinguent dans ce palmarès «Press & Outdoor», ce qui est mieux que l'an
passé. Il s'agit en l'occurrence de LG&F avec une annonce cocasse pour les tracteurs Lamborghini qui met en
scène un fermier âgé qu'enlace une jeune pin-up (Silver), de Grey avec ce visuel pour Clearasil qui s'appuie sur
un effet d'optique pour démontrer que tout le monde a besoin du produit (Bronze) et enfin de McCann avec
cette campagne Opel qui montre deux mains en gros plan, l'une propre, l'autre pleine de cambouis, tenant une
carte de visite sur laquelle apparaissent les mots «Sales & Repair» (Bronze). Précisons également que l'agence
DVN a remporté un Bronze pour un mailing BMW dans la compétition Direct, qui récompense les actions de
marketing direct.
De bon augure en tout cas avant la compétition phare, celle des films, où huit spots belges sont encore en lice.
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L e chocolat se déguste aussi avec les yeux
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Deux marques de chocolat s'affichent en même temps. Chacune avec leur style. Si Côte d'Or joue sur
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la tradition, Jacques, en revanche, mise sur l'audace avec une campagne décalée T T
ANALYSE
Les amateurs de chocolat auront été soumis à rude épreuve ces dernières
semaines. En tout cas ceux d'entre eux à qui la simple vue d'une tablette
fait tourner la tête. Deux marques emblématiques du marché ont en effet
investi en masse les médias à l'occasion de campagnes de pub de grande
envergure.
Une manière de rappeler que Côte d'Or fait partie du patrimoine - ce qui est toujours rassurant pour le
consommateur qui jettera un regard ému sur cette marque qui a fait la fierté de notre pays -, tout en surfant
judicieusement sur la vague rétro qui confère à toute représentation artistique du passé, même à vocation
publicitaire, un cachet particulier.
Ce choix de capitaliser ici sur l'image de l'éléphant inscrit en outre cette campagne dans la continuité des
précédentes. Le pachyderme a en effet toujours été présent d'une manière ou d'une autre dans la
communication de Côte d'Or. Ce qui permet d'ailleurs à ce dernier d'affirmer dans son slogan que l'éléphant est
«l'animal préféré des Belges». Songeons simplement au dernier film en date, qui montrait un homme
déambulant dans un loft en proie à des visions d'une nature sauvage où errait un éléphant chaque fois qu'il
croquait dans sa tablette.
Si la tradition a été mise en avant dans cette campagne, l'émotion n'a pas été oubliée pour autant. Le chocolat
est une friandise, pas un aliment vital -quoique, pour certains... Pour le rendre attrayant, les arguments
rationnels ne suffisent donc pas, il faut l'enrober d'une couche d'émotion qui en accentuera l'attrait. Cette
dimension affective, si on la retrouve en filigrane dans les clichés représentant les pachydermes -
essentiellement par la référence au passé -, se concentre surtout dans les spots télé.
Depuis le 25 mars, neuf personnalités du pays (de Jean-Luc Fonck à Annie Cordy en passant par Olivier Strelli
ou Gérard Corbiau) se relayent ainsi sur un divan rouge (un clin d'oeil à la couleur traditionnelle des emballages
et du logo du fabricant) pour évoquer leurs souvenirs «chocolat». «Nous avons donné carte blanche à ces
personnes pour qu'elles expriment leurs propres souvenirs», nous explique Manuella Casagrande, account
director chez Euro RSCG Partners, l'agence qui signe cette campagne. Pas de texte imposé donc. Histoire de
préserver un peu de spontanéité et de laisser s'exprimer la personnalité de chacun.
Jouant à fond la carte de la communication intégrée, l'agence de Côte d'Or a en outre imaginé une série
d'actions qui viennent compléter le dispositif initial. Cela va d'une édition spéciale de l'emballage de ses
mignonnettes (accompagnée d'une action permettant de se procurer une collection inédite de cartes postales
représentant d'anciennes photos de la marque), à l'utilisation récurrente tout au long de l'année du logo
anniversaire dans la communication et sur les emballages. Et puis il y a Internet, appelé à jouer un rôle pivot
pour le volet plus direct marketing de la campagne. Un site créé pour l'occasion (www.cotedor120.be) permet
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ainsi de visualiser des archives publicitaires, de (re) découvrir l'histoire de la marque ou de participer à un
concours. Qui joue lui aussi la carte de l'émotion puisque les internautes sont invités à raconter leurs propres
expériences chocolatées. Colis cadeaux à la clé.
En conclusion, Côte d'Or, fidèle en cela à sa réputation, nous sert une campagne solide, au goût assuré, mais
sans réelle surprise. On se retrouve en quelque sorte en terrain connu. Ce qui est peut-être rassurant mais qui
ne laisse pas d'emblée une trace indélébile. C'est plus la répétition qui permet de frapper les esprits que
l'originalité du propos.
Une politique sans vague dictée à la fois par le statut de leader de la marque (pourquoi irait-elle se risquer à
changer de stratégie alors qu'elle séduit toujours en misant sur ses valeurs originelles?) et par des racines
solidement ancrées dans l'inconscient collectif qui rendrait hasardeux tout changement de cap intempestif.
De ce point de vue, la comparaison avec l'autre marque du segment qui fait l'actualité en ce moment est
intéressante. Poussé dans le dos par son agence, le remuant et décidément hors norme Duval Guillaume, la
Chocolaterie Jacques, qui occupe pour sa part une position de challenger, a pris en effet une tout autre
direction. Nettement plus percutante et audacieuse. De sorte que l'impact compense largement la relative
discrétion des messages.
Car on joue ici dans une autre catégorie. Le budget disponible ne permettait par exemple que de financer une
campagne d'affichage. Il fallait donc faire mouche directement. L'objectif du chocolatier étant de remettre la
marque dans la tête des gens, en la dépoussiérant un bon coup au passage. «Tout le monde connaissait encore
le nom, mais l'image du fabricant était un peu défraîchie et plutôt vieillissante», commente Jens Mortier,
directeur de création chez Duval Guillaume. Le fait que le chocolat Jacques n'ait plus communiqué depuis belle
lurette n'a évidemment rien arrangé à l'affaire.
L'idée de génie de Duval Guillaume a consisté à s'inspirer du logo historique représentant un chevalier du
Moyen Âge pour en faire un personnage clé de la communication. Étonnamment, ce cavalier harnaché d'une
armure n'avait jamais quitté le pré carré de son logo. Quand on voit l'usage qu'en a fait l'agence, on se
demande bien pourquoi.
Placée sous le signe du retour - que traduit le slogan évoquant ostensiblement un titre de film, «Jacques is
back» -, la campagne met en effet en scène avec un humour décalé assez jouissif cette figure promise à un bel
avenir publicitaire.
La campagne s'articule autour de trois visuels au ressort créatif identique. À chaque fois, le chevalier est
présenté dans des situations complètement absurdes. Assis en train de lire un magazine dans un salon lavoir en
attendant la fin de sa lessive; arpentant les couloirs d'un aéroport, une valise dans une main, une lance dans
l'autre; et enfin chez le coiffeur pour un brushing de la crinière de plumes qui surplombe son casque.
Les deux objectifs assignés à cette campagne sont de toute évidence rencontrés. Le dépoussiérage de l'image
de la marque est radical. Sans pour cela qu'on ait rompu complètement avec son socle puisque les visuels
exploitent un élément qui a toujours symbolisé la marque.
Pour ce qui est de la notoriété, pas de souci non plus. Une campagne aussi décalée ne passe pas inaperçue.
D'autant plus qu'elle met en scène un langage publicitaire très moderne. À la fois par le texte en anglais qui
renvoie volontairement à l'imagerie des films à répétition. Et à la fois par l'absence de référence directe au
produit vanté. Nulle part il n'est fait mention du rapport entre le personnage et le chocolat. On pourrait ajouter
en creusant un peu que l'atmosphère rappelle indirectement celle des «Visiteurs», ce qui ne fait qu'ajouter à
l'absurde qui se dégage de ces annonces.
La marque met donc en avant un état d'esprit inattendu. Avec succès puisqu'il transforme une marque à
l'image décrépie en chocolat franchement avant-gardiste dont le discours laisse penser qu'il ne se prend pas au
sérieux. Une attitude qui devrait plaire en particulier aux jeunes, rétifs aux discours publicitaires lénifiants et
trop bien balisés.
Le charme de cette campagne vient aussi du côté antihéros de ce chevalier errant sans raison à notre époque.
La figure de l'antihéros est en effet très prisée de nos jours dans la production publicitaire. Les hommes
bouteilles d'Orangina, ou, pour rester dans le secteur, le côté un peu balourd du cuisinier des campagnes du
chocolat Meurisse, traduisent un engouement pour des figures moins parfaites, moins lisses.
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Des figures qui correspondent davantage aux aspirations de nos contemporains, blasés de se voir confrontés en
permanence à des bellâtres aux muscles saillants qui ne leur ressemblent pas.
Il en faut pour tous les goûts, proclame un célèbre dicton. Entre la tradition teintée d'émotion de Côte d'Or et le
«non sense» rafraîchissant de Jacques, les amateurs de chocolat trouveront certainement leur compte. Pour
autant qu'ils n'ont pas déjà fait leur choix sur ce qui reste quand même le plus important: le goût.À moins bien
sûr qu'on considère que nos préférences alimentaires soient dictées par le discours publicitaire. Une hypothèse
qui n'est peut-être pas si absurde qu'elle y paraît. Car si elle ne détermine pas à proprement parler la saveur
d'un produit, l'imagerie véhiculée par une campagne de pub peut tantôt renforcer tantôt atténuer l'impression
subjective qui s'en dégage.
De ce point de vue, les deux marques ne se sont pas trompées. Instinctivement, l'iconographie de Côte d'Or fait
penser à quelque chose de fort et de savoureux mais de relativement classique, convenu, ce que sont la plupart
de ses chocolats; celle de Jacques fait davantage penser à des parfums plus osés, ce que révèlent ses mélanges
audacieux.
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L e mythe met les voiles
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A la fin de la saison, Belgacom dira adieu au trimaran fétiche qui a porté haut ses valeurs pendant
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quatre ans. La décision est économique. Déjà, l'opérateur songe à de nouveaux projets, «moins
hollywoodiens» T
RÉCIT
Pendant quatre ans, le trimaran a symbolisé les valeurs de notre société: l'esprit d'équipe, la confiance en soi,
le respect de l'autre, etc. Aucun sport autre que la voile ne les reflétait aussi bien. La décision d'arrêter n'a pas
été facile à prendre », assure Ghislaine Maistriaux, directrice du marketing chez Belgacom, au lendemain de
l'annonce de la volonté du comité de direction du groupe de mettre fin à ce programme à la fin de la saison.«
Tout a commencé à la mi-99. Il nous fallait un projet fort, mobilisateur. Nous avons acheté le Fujicolor.
Contrairement à ce qu'on a dit, John Goossens, golfeur convaincu, n'était pas un adepte de la voile. Le
trimaran, ce n'était donc pas vraiment la danseuse du patron», souligne Mme Maistriaux. « En 2001, le bateau
avait dix ans et ne gagnait plus. L'ayant vendu à un prix sympathique, nous nous sommes fait plaisir en en
construisant un nouveau. Hélas, la chance ne nous a pas toujours souri. Il y a eu de la casse...», poursuit-elle
Emblème de la société pendant pendant quatre ans, le trimaran était censé être à Belgacom ce que l'«Oiseau
de ciel» de René Magritte a été à la Sabena, toutes proportions gardées bien entendu. On l'a vu partout: dans
les films de présentation et les spots publicitaires, sur des posters, dans les couloirs des célèbres «tours», les
rapports annuels, le journal destiné au personnel, etc. « Au départ, l'accent était principalement mis sur la
communication interne mais cela a vite évolué. Le public s'est passionné pour le voilier, surtout au sud du pays
», indique Mme Maistriaux, « même si certains ont regretté que ses skippers ne soient pas Belges...»
Curieusement, le trimaran, est resté un objet de luxe, lointain et immatériel pour la majeure partie du
personnel. Mythique pour ainsi dire. « C'est vrai que seuls quelques rares privilégiés ont pu monter à bord. Que
voulez-vous, c'est un peu comme une Ferrari, on l'admire, on ne la touche pas non plus. Le bateau ne pouvait
tout de même pas venir chaque semaine au siège pour faire des ronds dans l'eau...», confie-t-elle, précisant
qu'un «sailing fan club» a toutefois rassemblé quelque 800 passionnés.
La décision d'arrêter est-elle uniquement économique? « Oui et non », répond Piet Van Speybroeck, directeur
de la communication. « Nous devons réduire les coûts, c'est bien connu. Il faut dire aussi que nous avons eu de
la malchance et que rien n'est éternel. Le trimaran nous apporte beaucoup à condition d'investir beaucoup.
D'autres projets auxquels nous réfléchissons colleront tout aussi bien que lui aux valeurs que nous défendons ».
Quel a été le coût de l'aventure? La directrice du marketing refuse de citer des chiffres mais trouve « exagéré »
le budget annuel de 2,5 millions d'euros qui été cité dans la presse. On n'en est cependant pas loin. Et s'il paraît
clair que le «Bel 32» se revendra à bon prix, les frais de fonctionnement pèsent lourd, très lourd. « Un peu
moins de la moitié » du budget sponsoring de Belgacom, reconnaît Mme Maistriaux qui estime que le moment
est venu de songer à des projets « moins hollywoodiens ».
Faut-il y voir la griffe du nouvel administrateur délégué, Didier Bellens, comme on le suppute? « Il y a deux
ans, sous la houlette de John Goossens, nous avions déjà convenu de réévaluer le projet fin 2003. Nous avons
simplement avancé l'échéance et communiqué notre décision immédiatement par souci de transparence », se
borne à préciser M. Van Speybroeck.
Rétroactes: «J'ose croire que ce sera notre année...» Tel était le voeu voire la prière de Jean-Luc Nélias, le
Skipper du trimaran Belgacom à l'aube de la saison 2003. Quelques mois plus tard et après un nouveau
démâtage au large de Gibraltar, le deuxième en treize mois, le couperet est tombé, tranchant comme l'étrave
du «bel oiseau». Du fin fond de la péninsule ibérique, affairé à panser les plaies de son bateau meurtri, Jean-
Luc Nélias ne voudra pas commenter la décision de ses employeurs, se contentant de dire, avec du roulis dans
la voix: «Il reste de belles courses...» En effet, il en restera trois au Sailing Team pour boucler le programme
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Belgacom et attirer un «main sponsor» qui serait séduit par les performances du bateau et le professionnalisme
de son équipage, des qualités qui n'ont jamais été contestées et qui font référence dans le milieu.
Si la décision prise par Belgacom d'arrêter le projet «trimaran» n'est pas totalement liée aux performances de
celui-ci, gageons que les (in) fortunes de mer y soient pour quelque chose...
Marin de course depuis deux décennies, équipier prisé par les plus grands, en 1999, Jean-Luc Nélias touche son
rêve, celui d'être le seul maître à bord. L'aventure pouvait alors démarrer, à la barre du Bel 20 tout d'abord. De
ce trimaran au palmarès prestigieux mais dépassé technologiquement - il fut mis à l'eau en août 1990 -, Jean-
Luc Nélias et le Sailing Team allaient en tirer la quintessence.
Dopée par les bons résultats de l'équipe avec ce vénérable bateau, la direction de Belgacom décide de
construire un trimaran flambant neuf. Un Carolo, Grégoire Metz, participe à la conception de cette nouvelle
Formule 1 des mers et le 25 août 2001, Jacques Rogge, le président du CIO, baptise le Bel 32.
Dès sa première course, la transat Jacques Vabre (Le Havre - Salvador de Bahia), Nélias et Desjoyeaux mènent
la première semaine de course avant de connaître quelques problèmes techniques et de terminer cinquième au
Brésil. Le potentiel est au rendez-vous, les maladies de jeunesse aussi, normal se dit-on à cette époque.
Vient ensuite le début de l'année 2002 qui commence par un démâtage alors que le trimaran se rendait vers
Zeebruges, son port d'attache en Belgique. Un mauvais mât, cela arrive.
L'équipage prend ensuite le départ de la course des Phares (Calais - Lisbonne - Calais) et connaît de nouveaux
problèmes techniques, comme la majorité de la flotte, d'ailleurs. Remis d'aplomb pour le GP de Belgique en
juillet, le trimaran décroche une belle troisième place au cours d'un week-end ponctué par une victoire de
manche. Deux mois plus tard, le Belgacom s'impose au Grand Prix de Fécamp...
Le bateau semble fin prêt pour la Route du Rhum, épreuve prestigieuse d'un point de vue sportif mais surtout
attrayante pour l'armateur du fait de sa surexposition médiatique. Patatras, sur dix-huit trimarans engagés,
trois seulement rejoignent la Guadeloupe. Le Belgacom, lui, n'a pas quitté la Bretagne. La structure des
bateaux est remise en question, les trimarans rentrent en chantier pour se solidifier en vue de la saison 2003.
Celle-ci s'ouvre à Lorient où Nélias et consorts décrochent la troisième place, sur onze équipages engagés. Vient
ensuite le Challenge Mondial Assistance une nouvelle fois fatal au mât du Bel 32. Le carbone perforé et le vague
à l'âme, Jean-Luc Nélias regagne Gibraltar où il apprendra, la décision prise par le Conseil d'Administration
d'arrêter le projet à la fin de l'année.
Le rêve a chaviré!
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L es firmes de gardiennage à l'assaut de nouveaux marchés
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En Suède, les forces de l'ordre délèguent certaines de leurs missions au secteur privé. Impensable
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en Belgique. Même si les firmes de gardiennage font les yeux doux aux pouvoirs publics T
ENQUETE
À STOCKHOLM
La rue Biblioteksgatan, en plein coeur de Stockholm, est l'une des rues commerçantes les plus chic de la
capitale suédoise. C'est aussi le quartier où les voleurs en tout genre sont les plus actifs. Las de cette situation,
les commerçants de cette rue piétonne ont décidé de faire appel, depuis quelques années déjà, à des agents de
firmes privées pour assurer leur sécurité. Ainsi, la Biblioteksgatan dispose d'un garde rien que pour elle, qui
patrouille en permanence dans la rue. Et la plupart des commerçants sont équipés d'un système qui leur
permet, en poussant sur un simple bouton dissimulé derrière le comptoir, de prévenir la société de
gardiennage. «Nos agents ont un temps de réaction de 1 à 2 minutes alors que les forces de l'ordre n'arrivent
pas sur place avant 30 minutes», souligne Niklas Stjernfeldt, le responsable du projet chez Securitas AB, le
leader du marché du gardiennage en Suède. Toujours dans la même rue, six bijouteries louent, carrément, les
services d'un garde qui se poste devant leur magasin pour veiller au grain.
«On dénombre quelque 50 incidents par semaine qui conduisent à une vingtaine d'arrestations», explique un
agent de Securitas AB, qui fait partie de ces city- patrouilles.
Mais que fait la police de Stockholm? Ces gardes ne se substituent aucunement aux forces de l'ordre. Leur rôle
est purement préventif et dissuasif. Leur pouvoir d'intervention est limité. Ils ont pour seule arme, une
matraque. «Quand on intercepte quelqu'un, on doit le surveiller mais on ne peut pas l'enfermer. La plupart du
temps, pour le neutraliser, on le couche sur le sol, le temps que la police arrive sur place... mais cela peut
parfois prendre deux heures», raconte un garde de Securitas.
Les commerçants de la rue Biblioteksgatan ne sont pas les seuls à faire appel aux services d'agents privés.
Securitas compte, parmi ses clients, quelque 500 boutiques et restaurants dans le centre-ville de Stockholm.
C'est que depuis quelques années, le gouvernement suédois a réduit ses budgets en matière de sécurité
publique (en gelant notamment le recrutement de nouveaux policiers) et délégué une partie des tâches de
police au secteur privé. Résultat: le corps de police a fondu, passant de 21000 policiers, il y a une dizaine
d'années, à 17000 aujourd'hui. «Dans ce contexte, nous devons définir nos priorités, nous ne pouvons pas tout
faire», soupire Hakan Fulton, de la police de Stockhlom. C'est dans ce contexte que sont apparus les
ordningsvakter, des agents privés ayant davantage d'autorité que les simples agents de gardiennage. Cette
autorité est toutefois limitée. Les «agents spéciaux» ne sont, par exemple, pas autorisés à porter une arme sur
eux, tout au plus une matraque et des menottes. Ils ne peuvent pas non plus procéder à des arrestations. C'est
la police qui assure la formation des ordningsvakter, qui leur accorde et aussi enlève leur licence. La Suède
compte aujourd'hui 16000 agents privés, dont 10000 sont des ordningsvakter, pour la plupart des indépendants
(un quart d'entre eux travaille dans une firme de gardiennage). Identifiables grâce à un badge, ils sont
autorisés à veiller au maintien de l'ordre public en divers endroits: restaurants, bars, discothèques, musées,
hôpitaux, rues commerçantes, etc. «La police peut aussi faire appel à eux pour des missions particulières
comme l'accompagnement de supporters à un match de foot», explique Ann-Christine Nordström, la
responsable des ordningsvakter au sein de la police de Stockhlom.
La direction du métro de Stockholm - lui aussi privatisé - recourt aussi, depuis 10 ans, aux «agents spéciaux»
de Securitas pour intervenir en cas d'incidents (personnes en état d'ivresse, trafic de drogues, agressions, etc.).
L'église Clara, située dans un petit square en plein coeur de la capitale, travaille aussi avec Securitas. «De
nombreux clochards viennent ici troubler l'ordre public, nous pouvons intervenir pour les faire partir», explique
un agent de la firme privée.
Une telle privatisation partielle de la sécurité publique est impensable en Belgique. «La loi belge interdit aux
gardiens privés d'intervenir en matière d'ordre public», précise Paul Schoolmeesters, le secrétaire général de
Securis, la filiale belge du groupe Securitas AB.
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Le ministre de l'Intérieur Antoine Duquesne (MR) avait déposé, il y a un an, un projet de loi qui permettait de
déléguer des tâches mineures au privé, mais, élections obligent, le projet n'a pas eu le temps de passer la
rampe du parlement. «On était encore loin du modèle suédois. Ce projet ne donnait pas entière satisfaction au
secteur mais il ouvrait une brèche dans le système en permettant notamment aux gardiens privés de constater
certaines infractions sur la voie publique comme le non-balisage des chantiers ou des dépôts clandestins
d'immondices ou encore l'encadrement de carnavals et de manifestations ».
«Le segment des pouvoirs publics est extrêmement porteur pour le secteur du gardiennage mais il faut que la
loi change», souligne Stéphane Bocqué, le directeur marketing de Group 4 Falck, le leader du secteur en
Belgique. Toutefois, ajoute-t-il, «cela ne nous empêche pas dès à présent d'être pro-actifs par rapport à ce
segment». Exemple: «Nous nous occupons déjà de la surveillance de nombreux bâtiments publics mais il y a
encore beaucoup d'opportunités dans ce domaine, notamment au niveau local». Les firmes privées espèrent,
par ailleurs, séduire les pouvoirs locaux avec leurs nouveaux produits dans le domaine de la surveillance
électronique. A cette fin, Group 4 Securitas et Securis, participaient cette semaine, au Salon Infopol (*) à
Courtrai.
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L es particuliers, un créneau porteur
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Dans les métiers de la sécurité, de nombreux secteurs sont arrivés à maturité. C'est particulièrement le cas du
transport de fonds et du gardiennage. Aussi pour assurer leur avenir, les entreprises partent-elles à l'assaut de
nouveaux marchés: les autorités publiques (lire ci-dessus) et les particuliers. On estime aujourd'hui à 500000,
le nombre de systèmes d'alarme installés en Belgique. La moitié de ces dispositifs concerne des résidences,
dont un tiers seulement est relié à une centrale de télésurveillance. Dans ce cas précis, un gardien peut vérifier
s'il s'agit d'une vraie ou fausse alarme et prévenir, le cas échéant, les forces de l'ordre. «Le taux de pénétration
dans les ménages belges n'est que de 6 pc. Ce qui place la Belgique dans la moyenne inférieure européenne»,
souligne Stéphane Bocqué, le directeur du marketing de Group 4 Falck. C'est dire le potentiel. «On estime que
le nombre d'installations peut encore être multiplié par 2,5, précise Kris Van Den Briel, le directeur des
opérations chez Securis. Mais les Belges ne sont pas encore suffisamment conscients qu'ils doivent prendre à
leur charge leur sécurité». Danny Vandormael, l'administrateur délégué de Group 4 Falck abonde: «malgré un
sentiment d'insécurité croissant dans le public, le marché des particuliers ne se développe pas comme on
pourrait le croire. Monsieur tout le monde a souvent la perception qu'équiper son domicile d'un système
d'alarme n'est pas à sa portée. Or, on peut déjà avoir un système de base pour 1250 euros».
Pour faire son nid dans ce créneau, la société Securis a créé, avec Belgacom, une société commune: Alert
Services, dans laquelle elle détient une part majoritaire de 75 pc. «Le marché devrait enregistrer de 35 à 40000
nouvelles installations cette année, soit une progression de 5 à 10 pc par rapport à 2002 mais le nombre de
systèmes reliés à une centrale devrait lui croître de 30 pc. Les particuliers ne se contentent plus d'avoir une
alarme, ils veulent être reliés à une centrale de surveillance 24h sur 24», note Lucien Meeus, le patron d'Alert
Services.
Group 4 Falck vient, lui, d'introduire un nouveau concept sur le marché belge: safety ou protection des
personnes. A ne pas confondre avec le bodyguard (garde du corps), un terrain davantage occupé par les petites
sociétés. Dans cet esprit, la société a lancé une nouvelle gamme de systèmes d'alarme sans fil, destinée aux
particuliers et aux indépendants. A noter que tous les systèmes sont cablés en Belgique, le sans fil n'étant pas
autorisé légalement jusqu'il y a peu. Les nouveaux systèmes de Group 4 détectent en plus des intrusions, les
incendies et les inondations et sont équipés d'une fonction d'appel au secours.
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L es ventes de PC portables explosent
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Entre les premiers trimestres 2002 et 2003, les ventes de portables ont augmenté de 48,3 pc!
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Le marché informatique est morose depuis des années. Les derniers chiffres du bureau d'études IDC sur les
ventes d'ordinateurs portables en Belgique ont donc de quoi étonner. Celles-ci ont augmenté de près de 50 pc
entre le premier trimestre 2002 et le premier trimestre de cette année, passant de 41.516 à 61.563 unités. Ce
faisant, la Belgique fait beaucoup mieux que la moyenne européenne, qui voit les ventes de portables
augmenter de 23 pc.
«Depuis plusieurs années maintenant, il y a clairement une montée en puissance des portables par rapport aux
desktops (les ordinateurs de bureau classiques, ndlr) », explique Danny Vervaeke, product manager chez
Toshiba. «Entre le premier trimestre 2001 et le premier trimestre 2003, la répartition portables-desktops est
passée de 20-80 à 30-70. Et cela ne va faire que progresser dans les années à venir».
Ces derniers mois, c'est essentiellement le marché résidentiel qui a dopé les ventes de portables, tant en
Belgique que dans le reste de l'Europe. Les prix ont dégringolé, permettant ainsi à un nombre plus important de
personnes d'adopter un type de machine qui, il n'y a pas si longtemps, était encore réservé au marché
professionnel. «La barre magique des 999 euros a été franchie», dit Danny Vervaeke. «Ce qui s'explique par le
fait que là où il y a trois ans encore, nous n'avions que trois concurrents sur le marché des portables, nous en
avons aujourd'hui une dizaine». De plus en plus, on voit également apparaître des portables «clones», c'est-à-
dire sans marque, notamment dans des grandes surfaces comme Lidl ou Aldi.
Mais en Belgique, la percée la plus spectaculaire est à attribuer au fabricant taïwanais Acer, dont la part de
marché a progressé de près de 10 pc en un an, ses ventes connaissant quant à elles une croissance de 423,5
pc entre les premiers trimestres 2002 et 2003! «Notre but est de devenir numéro un sur le marché durant au
moins un des trimestres de cette année», affirme Maarten de Haas, le directeur marketing d'Acer dans le
Benelux, qui se dit surpris par la bonne santé du marché belge. «Il se situe quasiment au niveau historique de
1999».
À noter aussi la belle progression de Fujitsu Siemens (+ 61,3 pc) qui, comme Acer, a décidé de mettre
davantage l'accent sur le marché résidentiel et sur celui des PME, soit les deux segments ayant le plus
fortement progressé ces derniers mois.
Mais selon Kenneth Del Rio Van Heese, product manager chez Dell, le marché professionnel va lui aussi au-
devant d'une forte croissance dans le domaine des portables. «Beaucoup d'entreprises vont bientôt être
obligées de renouveler leur parc informatique. Le fait que les portables soient devenus moins chers et plus
performants associé à l'émergence du télétravail et de l'importance de la mobilité va clairement jouer en faveur
des portables», dit-il.
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M ARKETING
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Dans moins de trois semaines, au lendemain du lundi de Pâques, le nom BBL disparaîtra au profit d'ING
Belgique. Abandonner un nom aussi connu en Belgique que la BBL pour le remplacer par celui beaucoup moins
répandu de la maison mère néerlandaise, il fallait oser le faire. Un pari complètement fou qui, de surcroît, aura
coûté 23 millions d'euros en deux ans? Pas si fou que ça et surtout mûrement réfléchi et préparé, à entendre
Albert Biebuyck, le directeur du marketing de la BBL.
Stratégie de transition
La décision formelle fut prise fin 2000, se basant sur le postulat qu'une marque globale est positive dans la
mesure où elle contribue à en faire une marque forte. «En Belgique, il y avait une certaine perplexité car la BBL
est une marque forte», reconnaît néanmoins Albert Biebuyck. Une «analyse détaillée» a donc été faite auprès
d'un échantillon de 2000 personnes sur la manière dont le client et le «prospect» (client potentiel) réagiraient à
un tel changement. Et la conclusion n'a pas vraiment été dans le sens attendu et... espéré. En d'autres mots,
elle fut plus positive que prévu pour la marque ING, si l'on en croit Albert Biebuyck. Du côté des entreprises, le
passage à la marque ING était valorisé. Quant aux «prospect», ils montraient un certain enthousiasme,
souligne-t-il. Pour les particuliers, il était admis qu'il fallait passer par une marque combinée où la BBL serait
«endossée» par ING. Il a donc été décidé que, pendant un an et demi, serait appliquée une «stratégie de
transition» qui a commencé à l'automne 2001 à grand renfort publicitaire.
Frilosité... interne
Apparemment c'est au sein d'une partie du personnel que ce changement a été accueilli avec le plus de frilosité.
«Il est intéressant de voir que c'est en interne qu'il y a eu le plus d'angoisse», explique Albert Biebuyck,
certains craignant de travailler pour... le McDonald's de la banque avec, à terme, la vente d'un seul produit.
«On leur a dit qu'évidemment ce n'était pas vrai, on leur a expliqué quelles étaient les valeurs d'ING.»
Douze roadshows ont été organisés où le président de la banque Luc Vandewalle, Albert Biebuyck et parfois le
directeur du siège ont rencontré les cadres de la banque. «Ce fut la première confrontation entre un message et
des personnes qui ont posé des questions et parfois exprimé des réserves», raconte le directeur de marketing.
Pour lui, ce fut aussi la première poussée d'adrénaline!
«Brand ambassador»
Pour assurer la communication en interne, des «brand ambassador» ont été nommés. Ils étaient chargés de
faire la liaison avec l'équipe de «rebranding» composée d'une dizaine de personnes.
Les clients ont, eux, reçu une lettre pour les informer du changement. Une enveloppe hors format (un poster où
le vert de la BBL fait place à l'orange et au bleu d'ING) a été envoyée à chaque famille cliente, en général au
père. En tout, ce sont 1,2 million d'envois qui ont été faits.
Le coup final sera donné le week-end de Pâques avec le basculement informatique et le changement par des
sous-traitants de toutes les enseignes extérieures des agences. C'est le personnel des agences qui fera le
«nettoyage interne». Ils jetteront bics, papier à lettre à l'enseigne BBL pour les remplacer par du matériel à
l'enseigne ING. Mais il y subsistera des touches de vert. Bien sûr, il fallait aussi fêter cela. Deux soirées, une
pour les francophones, une autre pour les néerlandophones, auront lieu au Heysel, les 3 et 4 avril sur le thème
du voyage. D'où un carton d'invitation en forme de billet d'avion.
Reste à espérer que le dépaysement ne sera pas trop difficile quand même...
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P lus d'un million d'accès «broadband»
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Une fois n'est pas coutume, la Belgique est dans ce domaine un très bon élève.
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Mais, rappelle l'ISPA, le taux global de pénétration du web auprès des Belges reste faible.
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La Belgique a franchi la barre symbolique du million d'utilisateurs de l'Internet «large bande». C'est du moins ce
qui ressort des chiffres publiés par les différents acteurs du marché. Il y a quelques jours, Belgacom précisait
ainsi avoir dépassé les 600.000 clients ADSL, tandis que Telenet vient de raccorder son 333.333ème client
Internet à son réseau câblé.
Si on ajoute à ces deux chiffres les clients des câblo-distributeurs wallons et bruxellois, qui vendent désormais
leurs accès Internet sous la marque commune de «Clark Cable», on arrive facilement au fameux chiffre d'un
million. Le bruxellois Coditel par exemple, qui a été l'un des derniers à lancer son offre il y a moins de deux ans,
comptait à lui seul plus de 5.500 clients fin janvier.
Une fois de plus, on ne peut donc que souligner l'excellente performance de la Belgique dans le domaine du
«broadband». Quelques chiffres suffisent à s'en rendre compte. Selon une récente étude de Datamonitor, 10
millions d'Européens surfaient via une connexion «large bande» à la fin de l'année passée. Si l'on en croit ce
chiffre, quelque 10 pc des utilisateurs câble ou ADSL en Europe seraient donc Belges.
C'est surtout au niveau de la part du «broadband» dans le nombre total de connexions Internet que la Belgique
est un des meilleurs élèves européens. Selon des chiffres publiés par l'ISPA, l'association des fournisseurs
d'accès belges, cette proportion s'élevait en décembre 2002 à 51pc, tandis que selon la dernière enquête de
l'Agence wallonne des télécommunications (AWT), l'Internet haut débit représentait fin 2002 62pc des
connexions en Wallonie (56pc via l'ADSL et 6pc via le câble de télédistribution).
Belgacom dominant
Contrairement à la Flandre, où Telenet représente 55 pc des accès «broadband», le câble est donc largement
minoritaire en Wallonie. «Dans l'esprit des consommateurs, Internet reste encore et toujours associé à
Belgacom», explique André Blavier, de l'AWT.
«Notre campagne Clark Cable, pour laquelle les câblo-distributeurs wallons et bruxellois ont rassemblé leurs
budgets marketing, est précisément censée montrer qu'il existe une alternative à l'ADSL», répond quant à lui
Xavier Darche, de Coditel. «Avec un certain succès jusqu'ici puisque depuis son lancement, nous avons
augmenté de 20 pc le nombre de nouveaux raccordements que nous effectuons chaque mois».
Un certain renforcement de la concurrence vis-à-vis de Belgacom, voilà qui devrait faire plaisir à Jean-Philippe
Schepens, le président de l'ISPA. Paradoxalement, ce dernier ne se réjouit pas du succès de l'ADSL. «Il faut que
le câble wallon fasse bloc, comme Telenet en Flandre», dit-il. «L'ADSL, qui n'offre pas de modèle économique
intéressant aux opérateurs alternatifs, ne fait que renforcer en effet la position dominante de Belgacom». Le
président de l'ISPA relativise également la performance belge par rapport au reste de l'Europe.
«Le succès du broadband est très positif bien sûr mais dans l'ensemble, le taux de pénétration global de
l'Internet en Belgique reste inférieur à la moyenne européenne», dit-il. Selon des chiffres fournis par l'ISPA à la
fin de l'année dernière, ce taux est de 34pc en Belgique, contre 40pc dans l'Europe de l'Ouest. De nouveaux
chiffres devraient être publiés par l'association la semaine prochaine.
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P lus de 8 livres vendus à la seconde !
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Interminables files d'attente, enfants surexcités déguisés en magiciens, prises d'assaut: une nouvelle vague de
"Pottermania" a déferlé sur le monde samedi à l'occasion de la sortie du 5ème volume de la saga, salué par les
premières critiques de la presse britannique.
De Londres à en passant par Sydney et Hong Kong, les amateurs de tous âges se sont rués sur le nouvel opus
des aventures inventées par la Britannique Joanne Kathleen Rowling, "Harry Potter et l'ordre du Phénix". Des
centaines de librairies ou supermarchés avaient exceptionnellement ouvert leur porte vendredi à minuit (23h00
GMT), organisant souvent des soirées spéciales avec animations, maquillages ou déguisement.
A Londres, et aux quatre coins du pays natal de Harry Potter, des hordes de jeunes fans, tenus éveillés par une
excitation difficilement contenue, ont fait la queue, parfois pendant plus de douze heures, pour être parmi les
premiers à mettre la main sur le précieux "pavé" de 766 pages et plus d'un kilo.
A la gare londonienne de King's Cross, la librairie W.H Smith avait reconstitué à grands frais le passage
magique qu'empruntent Harry et ses compagnons pour rejoindre le fameux "quai 9 3/4", d'où ils prennent
ensuite le train pour l'école de Poudlard en Ecosse. La chaîne de librairies Waterstone avait décidé d'ouvrir pour
l'occasion une centaine de magasins dans tout le pays. Notamment à Edimbourg (Ecosse), où les heures
d'attente des centaines de jeunes lecteurs ont été récompensées par une visite de J.K. Rowling en personne.
"Pour moi, le plaisir d'être publié vient en grande partie de la rencontre avec les enfants qui lisent mes livres",
a-t-elle expliqué, tout en se disant soulagée que très peu d'éléments de l'intrigue aient filtré avant l'embargo.
Les Etats-Unis, principal marché des Harry Potter, ne pouvaient pas être en reste. A Times Square à New York,
une grande boutique de jouets vendant aussi des livres avait installé une horloge géante à sa devanture pour
égrener les heures et minutes avant la mise en vente des aventures du jeune sorcier.
La queue des acheteurs, encouragés à se déguiser en personnage de "Harry Potter", s'était formée dès le début
de l'après-midi vendredi. Les files d'attente se sont multipliées dans tout le pays. La fièvre du vendredi soir a
également gagné de nombreux pays non-anglophones. Incapables d'attendre la version traduite dans leur
langue, des milliers d'inconditionnels français, allemands, italiens ou même islandais ont veillé jusqu'à l'heure
fatidique pour commencer à dévorer les quelque 255.000 mots de la version anglaise.
Médias et professionnels avaient annoncé le plus grand lancement d'un livre dans toute l'histoire de l'édition. Le
résultat de cette campagne marketing sans précédent ne s'est pas fait attendre: des milliers d'exemplaires du
"Phénix" se sont envolés des étalages dès les premières minutes. Sauf surprise, le 5ème volume devrait
pulvériser le record absolu de ventes de livres en un seul week-end établi en juillet 2000 par... le 4ème épisode
de la saga, "Harry Potter et la Coupe de feu": 355.000 exemplaires en deux jours pour la seule Grande-
Bretagne. Le géant américain de la distribution en ligne Amazon a à lui seul reçu plus de 1,3 million de
commandes pour "l'Ordre du Phénix", soit six fois plus que pour la "Coupe de Feu". "Nous nous attendions à
quelque chose d'important, mais c'est la vente de livre la plus rapide que nous ayons jamais connue", a pour sa
part commenté samedi un porte-parole de la chaîne britannique W.H Smith, dont de nombreux magasins ont
ouvert plus tôt que prévu pour faire face à la demande. Selon le directeur des ventes de livres de cette chaîne,
Gary Kibble, les exemplaires du 5ème Harry Potter "sortent de nos magasins à un rythme de plus de huit par
seconde"...
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L 'enjeu pour Air France: récupérer la clientèle
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La fin de l'exploitation commerciale du Concorde par Air France ne devrait avoir qu'un impact limité sur l'activité
de la compagnie aérienne française si elle parvient à conserver la clientèle «haute contribution», notamment
américaine, du supersonique jusqu'à la reprise du trafic transatlantique. Ainsi, l'arrêt des vols supersoniques
n'amputera pas significativement son chiffre d'affaires puisque ceux-ci ne représentaient qu'environ 1 pc au
global (et 5 pc aux Etats-Unis).
D'un point de vue strictement économique, l'arrêt d'exploitation de Concorde représente au contraire une
économie comprise entre 30 et 50 millions d'euros par an. Reste à garder la clientèle américaine, «majoritaire
jusqu'à l'été 2002», véritable «vache à lait» de la compagnie au niveau du long-courrier. Depuis l'annonce de
l'arrêt d'exploitation, les «habitués» américains font donc l'objet d'une action marketing personnalisée. Air
France a aussi décidé d'augmenter ses capacités entre Paris et New York en affaires et first et va proposer une
nouvelle fréquence quotidienne. Et réaffecter hôtesses et stewards du Concorde dans les cabines first et
business de ces vols.
British Airways s'est évidemment ménagé un avantage de fait en maintenant Concorde en service jusqu'à fin
octobre... (AFP)
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L A PLUME BUISSONNIÈRE
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Alors que les visages lisses et interchangeables des top-models ne racontent rien, les rides sont
comme le fragile sillage que laisse derrière lui un courageux navire au long cours. OK Johnny?
MYRIAM TONUS
Chroniqueuse
Avec l'été, voici que revient - soigneusement entretenue pas les magazines dits féminins autant que par les
suppléments de nos quotidiens favoris - l'obsession d'un corps lisse, svelte, bronzé, dépourvu de toute trace de
capiton et de la moindre pilosité. Quelque chose comme un composé de la Vénus de Milo et de la Pietà de
Michel-Ange, version anorexique et retouchée par un designer misogyne. Que les boulottes, les plantureuses et
les XXL se rassurent: la tyrannie de l'incantation ne dépassera pas la fin du mois d'août, époque où les gourous
du marketing se préoccuperont de leur capital-vitamines en prévision de l'hiver.
Mais le soleil, décidément impitoyable, ne met pas seulement en évidence bourrelets et poils disgracieux. Quel
est cet endroit du corps qu'il prend un malin plaisir à révéler, souligner, magnifier? La ride, parbleu! Oui, la ride,
ce petit sillon à peine visible (ou déjà trop visible, justement!) à la surface de la peau, de préférence sur le
visage, là où tout se voit...
La ride, cet inévitable glissement de terrain, plus résistante aux cosmétiques que la limace ne l'est aux répulsifs
et qui érode, lentement mais sûrement, le visage le plus Michel-Angelesque. Que celle qui n'en compte pas une
me jette le premier miroir! Je dis bien «celle»... Parce que s'il est un domaine où l'inégalité entre hommes et
femmes est d'une stabilité à toute épreuve, c'est bien celui de la ride. La preuve: à l'heure où les magazines
toujours dits féminins nous bassinent avec Penelope Cruz, Jennifer Lopez et Nolwenn Leroy, tandis que Sheila
s'efforce de faire croire qu'elle porte toujours ses couettes et que Chantal Goya continue de chanter Bécassine
pour ses petits-enfants, oui, pendant ce temps, monte une clameur de pâmoison devant le plus-que-mi-
centenaire de l'année.
Le mec de 60 ans qui fait rugir les filles et leurs mères. Johnny, quoi. Ah, ses yeux comme deux lacs d'eau
glacée au milieu d'un canyon (je cite de mémoire)... Ah, son beau visage buriné... Vous avez dit: buriné? Mais
oui, creusé, façonné, marqueté de rides! Et puis, tant qu'on y est, souvenons-nous: le charme fou des rides de
Gable, de Gabin, de Bronson... Et la fossette de Michael Douglas (tout à fait celle de Kirk, son père!)...
Et les pattes d'oie de Richard Gere... Côté femmes, les rides, on les trouve pleines de noblesse chez Mère
Teresa, Soeur Emmanuelle, éventuellement Marguerite Yourcenar - et encore, pour cette dernière, c'est parce
qu'elle est la première Académicienne. Pour sûr, devant tant de mauvaise foi, on aurait bien envie de
chantonner perfidement avec Juliette Greco, à l'oreille des Penelope, Jennifer et autre Loana: «Si tu t'imagines,
fillette, fillette, k'ça va durer toujours... Très sournois s'approchent la ride véloce, la pesante graisse, le menton
triplé, le muscle avachi...». Ou de citer crânement Ronsard: «On m'a vu ce que vous êtes, vous serez ce que je
suis... » Évidemment, il se trouvera toujours un Brassens pour faire répondre Marquise: «J'ai 18 ans, mon
vieux Corneille, et je t'em... en attendant» ! Quoique (suprême injustice!) le plus-que-quinqua-masculin garde
toutes ses chances auprès des Marquise d'aujourd'hui - consulter à nouveau Johnny sur la question.
Et pourtant, pourtant. Ce peut être tellement beau, un sillon de rides... Même sur un visage de femme. C'est
comme la carte géographique du coeur projetée là, modelée à même la chair.
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Alors que les visages lisses et parfaitement interchangeables des top-models ne racontent strictement rien, afin
que nous puissions nous noyer dans le miroir qu'ils prétendent nous renvoyer, tous ces visages anonymes,
croisés en rue, dans le train, au magasin, sont comme des livres entrouverts où sont écrites les premières
lignes d'une histoire toujours unique, toujours singulière.
Il y a la ride campée juste entre les sourcils, qui raconte le souci - à moins que ce ne soit l'habituelle
concentration ou encore la sévérité. Il y a les rides creusées sous les yeux, qui sont les lits asséchés d'humbles
ruisseaux de larmes. Et celles qui, comme les lignes d'une portée musicale inscrite au long du front, disent
l'étonnement et la curiosité. Et encore les joyeuses pattes d'oie, sourires gravés au coin des yeux, tout comme
celles qui s'épanouissent aux commissures des lèvres. Ou, au contraire, celles qui entraînent ces mêmes lèvres
dans la chute de leur désillusion... Délicats stigmates des joies, des peines, de l'expérience aussi, les rides sont
comme le fragile sillage que laisse derrière lui un brave et courageux navire au long cours.
«Souriez, Mesdames, pour que vos rides soient bien placées!», conseillait Mme de Maintenon, épouse de Louis
XIV, qui s'y connaissait en séduction. Oui, gloire à ces femmes qui portent leur âge et leurs rides comme un
arbre porte ses beaux fruits mûrs. Les Simone Signoret, Marguerite Yourcenar, Françoise Giroud, Charlotte
Rampling, qui nous ont appris qu'on peut continuer à sourire sans craindre de faire céder une peau liftée et que
si la chair se fait plus douce, moins ferme, c'est parce qu'on a enfin quitté ses armures, qu'on est devenue
capable d'accueillir sans juger, qu'on est comme un beau paysage chargé d'histoire et de secrets. Un de ces
paysages comme les aime le soleil d'été.
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T ouring, un nouveau virage
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En exclusivité pour la «Libre», les responsables de Touring nous dévoilent les dessous de leur
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ÉCLAIRAGE
La plus grande association d'automobilistes du pays (900.000 membres) fait peau neuve. Le numéro 1 du
dépannage - c'est l'image qu'on lui colle encore souvent dans le grand public même si cette activité ne
représente plus que la moitié du chiffre d'affaires réalisé avec les particuliers - entend en effet se positionner
désormais comme le «spécialiste de la mobilité».
«Un changement de cap qui répond aux nouvelles attentes des consommateurs», justifie Bruno de Thilbaut,
marketing & sales director. Et qui se concrétise dès aujourd'hui par l'adoption d'une nouvelle identité visuelle,
l'élargissement des services d'assistance et le lancement de nouveaux services.
Ce grand entretien, pour reprendre une terminologie du secteur, est le fruit d'une réflexion entamée il y a deux
ans par la nouvelle direction. «Nous nous sommes occupés dans un premier temps de moderniser les structures
internes de la société pour en améliorer le fonctionnement et pour inculquer par la même occasion une nouvelle
culture d'entreprise plus dynamique», explique Thierry Willemarck, administrateur délégué de l'association.
«Nous nous sommes ensuite penchés sur le positionnement à adopter à l'extérieur, Touring étant actif jusqu'ici
essentiellement à travers son activité dépannage, qui est aussi le principal vecteur de sa notoriété, et par le
biais de son produit standard d'assistance à l'étranger auquel ont souscrit 225.000 familles l'an passé». Et de
préciser immédiatement: «En nous basant sur l'évolution des habitudes de consommation en matière de
voyages, nous avons fait le choix d'adopter une stratégie marketing et commerciale plus ciblée, plus
segmentée. Il nous est vite apparu que les différences de comportement entre les différences catégories de la
population sont devenues trop importantes pour se contenter d'offrir un produit unique comme nous le faisions
jusqu'ici. Le jeune qui part étudier à l'étranger pendant une longue période n'a en effet pas les mêmes besoins
en termes de couverture que les seniors qui partent avec leurs petits enfants pour un séjour de courte durée».
Résultat: Touring va lancer prochainement plusieurs formules d'assistance voyage, entre 6 et 8, répondant
chacune aux besoins spécifiques des différents publics. Si la plupart de ces produits ne sont lancés que dans le
courant de l'année et en 2004, Touring nous donne déjà un premier aperçu en commercialisant dès aujourd'hui
le Touring Family. Comme son nom l'indique, il est censé répondre aux besoins des familles. Il s'agit en réalité
d'une évolution du produit standard existant. «Il reprend en effet les caractéristiques de l'assistance actuelle
mais avec quelques améliorations spécifiques», détaille le responsable marketing. «Les enfants qui
accompagnent les grands-parents qui ont souscrit à cette formule seront par exemple couverts. On a en effet
constaté que les petits-enfants accompagnent de plus en plus souvent leurs grands-parents. En outre, les
souscripteurs auront la possibilité de bénéficier d'une voiture de remplacement pour la durée du séjour si une
panne intervient à l'aller et qu'elle nécessite une réparation importante. Une innovation qui répond à la
tendance au raccourcissement des séjours. Si on part seulement une semaine, on n'a pas envie de perdre trois
jours à cause d'une réparation».
Toujours dans cet esprit de segmentation et pour bien affirmer le credo de la mobilité, l'association va
également étoffer sa palette de services. Les informations routières, qui étaient déjà diffusées sur les ondes de
certaines radios, seront ainsi accessibles à partir de juin également via SMS. «L'automobiliste pourra soit
recevoir quotidiennement les informations sur un trajet précis à l'heure de son choix, c'est le SMS Push,
l'inscription se faisant sur le Net; soit demander des indications à tout moment via le 3722, c'est le SMS Pull»,
ajoute Bruno de Thilbaut. Avec le Route Planner, un autre service commercialisé prochainement, le conducteur
pourra de la même manière optimaliser ses déplacements en évitant les points noirs. «On répond de la sorte à
une demande du public qui souhaite avoir des informations dynamiques en temps réel mais qui n'a pas
nécessairement les moyens de s'équiper en matériel coûteux du style GPS», enchaîne l'administrateur délégué.
Pour l'occasion, un nouveau logo - «Plus ouvert, plus dynamique», dixit Thierry Willemarck -, qui symbolise
cette nouvelle politique, est lancé ce samedi. Il est accompagné d'une nouvelle signature, «Simple comme
bouger», qui illustre, elle, l'importance accordée à la mobilité. Notons d'ailleurs à ce propos que Touring entend
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réactiver son rôle de défenseur des intérêts des automobilistes en faisant entendre sa voix auprès des autorités,
par exemple pour demander une harmonisation des limitations de vitesse dans les zones urbaines. «Les
enquêtes nous ont montré que les membres étaient attachés à ces interventions», précise encore le patron.
Pour faire connaître et le nouveau logo et la nouvelle stratégie, un imposant dispositif de communication a été
mis en place. Il vise les membres, qui seront informés sur tous les changements via le magazine maison, mais
aussi et surtout le grand public. Dès ce samedi, une annonce pleine page fleurira ainsi dans tous les quotidiens
du pays. Conçue, comme le nouveau logo d'ailleurs, par l'agence Next Age, spécialisée dans le marketing
générationnel, elle explique en termes imagés la nouvelle philosophie de Touring.
Suivra dès lundi un volet affichage (5.000 panneaux abribus) mettant davantage l'accent pour sa part sur le
produit Family. Sur fond d'azur et de paysages de rêve où s'ébattent des vacanciers (une iconographie qui n'est
pas sans rappeler celle du Club Med), les slogans insistent sur la sérénité des voyageurs. «Le client est
désormais au centre de la communication», commente Bruno de Thibault. «Par le passé, on avait peut-être trop
tendance à mettre systématiquement Touring à l'avant-plan avec des scénarios catastrophe».
La télévision, la radio et des actions de terrain viendront compléter le tout par la suite avec des accents plus
marketing direct, histoire de joindre l'utile (prospecter de nouveaux clients) à l'agréable (bâtir une nouvelle
image).
Un travail de fond qui dépoussière l'image un peu vieillotte de l'association et qui affirme bien ses nouvelles
ambitions.
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T out est-il permis?
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Adecco hier, Virgin et Ford aujourd'hui. La publicité ne connaîtrait-elle plus aucunes limites? De la
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sexualité aux institutions démocratiques, il n'est en tout cas plus aucun tabou qui lui résiste T
ANALYSE
Même si la publicité belge reste indéniablement plus prude que celle de nos voisins anglais ou hollandais,
plusieurs campagnes récentes n'en ont pas moins relancé le débat sur les dérives du discours publicitaire. Avec
en toile de fond, cette question: la pub peut-elle tout se permettre aujourd'hui?
Beaucoup en arrivent à le croire quand ils voient une compagnie aérienne, en l'occurrence Virgin, inciter les
citoyens à se rendre aux urnes en maillot de bain pour gagner des billets gratuits; ou quand ils découvrent
cette affiche du constructeur Ford qui montre le buste de trois jeunes femmes et d'un jeune homme dans une
mise en scène qui évoque furieusement les photos que l'on trouve sur les sites Internet pédophiles. Un
rapprochement que la légende, «Venez les essayer, les nouvelles petites», ne fait d'ailleurs que renforcer.
Le sexe, la mort, la violence, la religion, la maladie ou les institutions ne sont plus guère des tabous pour les
marques, qui n'hésitent pas à se réapproprier ces thèmes pour faire parler d'elles. Car c'est bien là leur objectif.
Dans un environnement saturé de messages commerciaux, le seul moyen de se distinguer et d'attirer le regard
est bien souvent celui-là: titiller les limites de l'acceptable et du bon goût. De préférence sans les dépasser -
aller trop loin peut provoquer un phénomène de rejet éminemment dommageable à l'image de la marque -,
mais en les approchant au plus près quand même, histoire que l'odeur de soufre qu'elles dégagent parviennent
bien jusqu'aux narines du consommateur.
Les Anglo-saxons ont un mot pour qualifier cette stratégie: le «shockvertising». Que l'on peut traduire par
politique de la provocation. Une technique redoutable. Car en bafouant les valeurs les plus solidement ancrées
en chacun de nous, qui nous servent d'ailleurs de balises psychologiques, la provocation implique
émotionnellement très fort le consommateur, de sorte qu'elle garantit un pouvoir d'attraction à l'annonce et
augmente son taux de mémorisation de manière substantielle. Ce qui, pour un challenger notamment, peut
s'avérer déterminant.
L'un des pionniers dans le domaine n'est autre que Benetton évidemment. Avec ses campagnes chocs du début
des années 90, le fabricant italien a fait la démonstration de l'efficacité de la provocation. Ses corps tatoués
d'un HIV, son sidéen agonisant, ses vêtements maculés de sang ont fait couler beaucoup d'encre et alimenter la
polémique sur la légitimité d'une marque à s'inspirer de sujets de société sensibles à des fins commerciales.
Reste que même si elle a fini par se brûler les ailes à ce petit jeu (elle est revenue à un discours plus «united
colors»), la firme doit l'essentiel de sa notoriété à cette politique de la terre brûlée publicitaire.
Parmi l'éventail des interdits, c'est évidemment le sexe qui tient le pompon. La pub en use et en abuse. En
repoussant toujours plus loin les frontières de la décence. Il y a vingt ans, le corps nu de la Française Myriam
proclamant sur de grands panneaux d'affichage «Demain, j'enlève le bas» avait provoquer un scandale.
Aujourd'hui, cette image passerait sans doute inaperçue. Pour choquer, il faut désormais aller beaucoup plus
loin, comme reproduire les codes sado-maso (Dior), simuler une scène de masturbation féminine (parfum
Opium d'Yves Saint-Laurent) ou distiller une touche de vulgarité chic (Sisley).
Dans son ouvrage intitulé «De la stratégie marketing à la création publicitaire», Henri Joannis explique que
l'exploitation du sexe dans la pub peut prendre deux formes: «Soit l'émotion voluptueuse, évoquant mais sans
montrer vraiment, soit la représentation directe du corps voluptueux exposés à un degré de nudité plus ou
moins élevé.» C'est cette deuxième voie qu'explorent les adeptes du «shockvertising». «Pour attirer l'attention
par ce biais, il faut faire preuve d'audace, dépasser la norme, aller plus loin que le tabou social», précise
l'auteur.
Adecco en est un bel exemple. En plaçant des patrons derrière des vitrines de prostituées et surtout en mettant
en scène le strip-tease d'un patron obèse, la société d'interim a joué la carte du sexe au sens large mais en la
pimentant d'une petite entorse aux conventions sociales.
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Quand on leur reproche de banaliser la cruauté ou la pornographie, les publicitaires se retranchent derrière
l'argument de l'évolution des mentalités. Ce qu'ils font ne heurterait pas la sensibilité de la majorité des gens,
habitués à côtoyer ces thèmes à la télévision. ä
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Z amzam contre Coca-Cola
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Surfant sur l'antiaméricanisme régnant dans les pays arabes, des marques n'hésitent pas à afficher
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un positionnement religieux radical. Dans le secteur des sodas, plusieurs marques islamistes
s'opposant à Coca-Cola ont ainsi le vent en poupe
ÉCLAIRAGE
Une tendance qui s'inscrit dans une politique plus générale de boycott des
marques étiquetées «made in USA». Toutes les entreprises dont les
produits symbolisent les valeurs mythiques de l'Amérique sont en effet
confrontées depuis quelques mois à une baisse de leurs ventes à mesure
que la rancune et l'amertume des masses arabes grossissent.
De son côté, McDonald's aurait enregistré en 2002 une baisse de ses recettes de 10 pc au Proche-Orient. La
pression serait d'ailleurs telle que certaines marques locales dont le nom présente une consonance anglo-
saxonne ont pris la précaution de préciser dans la presse qu'elles ne sont pas Américaines. A l'instar de House
of Donuts, une chaîne saoudienne de magasins.
Dans ces pays sous tension, la consommation prend donc clairement un tour idéologique. C'est encore plus
visible avec la mésaventure vécue par la marque Ariel du géant Procter&Gamble. Divers mouvements politiques
d'obédience islamique ont appelé à boycotter une marque qui porte le nom du premier ministre israélien et
affiche un logo qui rappelle selon eux l'étoile de David. L'entreprise a eu beau expliquer que le produit existait
depuis belle lurette et que le logo symbolise en fait la trajectoire des atomes dans le tissu, rien n'y a fait, les
ventes d'Ariel ont considérablement baissé dans la région.
Au cas où aucune alternative locale n'existe, les consommateurs de ces pays semblent s'orienter vers des
marques européennes. Les ventes de Gitane et de Gauloises blondes ont ainsi fait un bond en 2002 dans la
région. Par contre, si un produit équivalent idéologiquement plus proche des croyances et de la culture arabe
est disponible, celui-ci sera privilégié. C'est là qu'intervient la notion de marketing idéologique, voire de
marketing religieux.
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Le cas des ersatz musulmans au Coca-Cola est emblématique de cette évolution. Une série de marques qui ont
vu le jour récemment dans ce secteur (Qibla Cola, Muslim Up, etc.) exacerbent dans leur communication leur
ancrage religieux et philosophique anti-impérialiste, voire antisioniste, et pro-islamique.
Le plus ancien de ces sodas «religieux» est le Zamzam-Cola. Ce substitut islamique au Coca américain est
apparu en 1979 en Iran pour remplacer la boisson américaine que les gardiens de la révolution islamique
avaient interdit. Il tire son nom de la source sacrée de Zamzam à la Mecque.
Jusqu'il y a peu, sa distribution se limitait à l'Iran et aux ennemis farouches du «grand Satan» comme l'Irak et
l'Afghanistan, ainsi qu'à quelques pays africains. Mais depuis que l'Amérique n'est plus en odeur de sainteté
dans tout le Proche et le Moyen-Orient, on le trouve aussi au Bahreïn et, depuis l'été 2002, sur le marché
saoudien. Proscrites dans la communication des marques «traditionnelles», la politique et la religion occupent
ici un strapontin de choix. La campagne publicitaire de Zamzam insiste par exemple sur le fait que l'eau utilisée
vient des sources saintes de la Mecque et qu'une partie des profits est reversée à des organisations de charité
palestinienne. Une démarche humanitaire assez courante.
On la retrouve aussi chez Mecca-Cola, l'un des plus populaires, qui déclare reverser 20 pc de ses revenus à des
organisations caritatives. «Ne buvez plus idiot, buvez engagé», invite le slogan de cette marque qui a vu le jour
en France -mais réalise l'essentiel de son chiffre dans les pays arabo-musulmans- à l'initiative d'un homme
d'affaires tunisien, Tawfik Mathlouthi (auquel «l'Hebdo» de la RTBF consacrera d'ailleurs un portrait le vendredi
18 avril).
En réaction, la firme d'Atlanta mène des actions pour prouver son implication dans la vie sociale et culturelle
locale et joue la carte du respect des valeurs de l'islam, par exemple en baissant ses prix pendant le ramadan.
La guerre des bulles fait rage...
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Nouvel Observateur Hebdo N° 1928 - 18/10/2001
Avant les Rencontres de la Villette
Au sommet de la tour Montparnasse, ils plantent leurs corps face aux vitres sales. Trouvent leurs
reflets, même confus. Et ça suffit à faire sourire Margaux, à lui tirer de la voix un petit air saccadé.
Salim la suit, fait claquer sa langue. Ils s'agitent, et leurs deux corps parlent: ils dansent, sautent.
Frappent le béton et l'air, à coups de pieds et de poings. Il y a de la rage à la naissance de chacun de
leurs gestes. Une femme jette un oeil furtif mais trace. Plus loin, elle se retourne: «C'est quoi comme
danse?» Du hip-hop, Madame.
Un genre à part, un art que l'on disait il y a quelques années encore «pauvre», issu d'une culture
«barbare». Celle de la rue, peu tolérée dans les écoles. Salim en sait quelque chose. Il y a deux ans,
alors qu'il se «sentait mourir», il a jeté le collant moulant de l'Académie internationale de la Danse, sis
dans le 16e arrondissement parisien. Le voilà redevenu lui-même, avec son bandana Com 8 sur la
tête, son survêt et ses baskets. «Il aurait fallu que je leur abandonne le hip-hop, raconte-t-il. Ils me
traitaient de rappeur, ils n'avaient rien compris. Je suis danseur.»
Depuis, la culture «pauvre» a élargi son public, gagné une certaine valeur commerciale aussi, en
faisant des apparitions à la télé ou dans les salles des fêtes en banlieue. Les académies de danse
contemporaine envisagent du coup la création d'un brevet d'Etat de danse hip-hop, histoire de ne pas
rester à la traîne. Et Margaux, ça l'agace: «Ils voient que nous avons du potentiel, qu'on ne peut plus
faire sans nous, qu'un marché s'ouvre. Alors ils veulent le récupérer. Mais le hip-hop appartient aux
gens de la rue. On se battra pour qu'il reste entre nos mains.» A 28 ans, Margaux a compris: le
combat est économique. Il faut «ramasser de la caillasse» pour être légitime, pour exister. Et une
association, ça touche des subventions. Elle a monté Arts 93 à Saint-Denis. Elle a son local, donne
des cours de danse à des gens âgés de 5 à 40 ans. «Si tu veux être pris au sérieux dans ce pays, il te
faut une structure. Sinon, on ne te regarde même pas, et tu n'apprends jamais le mot subvention.»
Le mouvement hip-hop est parti de rien. D'un terrain vague, porte de la Chapelle, où quelques
centaines de personnes se réunissaient, il y a une quinzaine d'années. Où rappeurs, graffeurs, DJ et
danseurs venaient s'exprimer dans l'underground. A l'époque Cyril avait 13 ans: «J'ai grandi dans le
mythe de ce qu'il se passait porte de la Chapelle.» Une «micro-société» avec ses propres règles, cet
esprit de liberté totale, une dynamique compétitive. «L'idée de réussir à s'en sortir quoi qu'il arrive,
sans jamais tomber dans la dépendance, et en partant de rien.»
C'est là qu'il a trouvé son identité, qu'il est devenu Phatstaff en graffant puis en mixant. A 14 ans il
s'est acheté une platine, a commencé à scratcher, «à jouer avec la musique». Et il a dit qu'il voulait
faire sa vie là-dedans. A 25 ans il est l'auteur de trois mix-tapes, l'animateur d'une émission
hebdomadaire de radio sur Générations (1). «Moi, je conçois ça comme un travail, mais la société
appelle ça du vol.» Parce que le principe est de sampler, scratcher, pitcher sur des musiques qui sont
la propriété d'auteur. Phatstaff y voit «la liberté, et une école de la vie». Vivre d'un marché illégal,
«c'est se faire les dents, se démerder». Il faut acheter ses vinyles, en faire la sélection, les mixer,
fabriquer la cassette, tapisser les murs d'affiches et d'autocollants. A la sauvage. Et distribuer le
produit: «C'est là que tu sues le plus. Tu cours tous les détaillants de Paris. T'en laisses dix là,
cinquante ici...»
Les mix-tapes circulent dans l'underground, passage obligé de la réussite, promo souterraine. D'abord
prendre le «mike» (le micro), afin de se faire connaître, le but à terme étant d'arriver dans les bacs.
Sans dénaturer le mouvement hip-hop, parce que «la parole est un calibre que l'on doit savoir tenir»
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(La Cliqua). Le hip-hop, culture identitaire dont le rap est la vitrine. «Les thunes sont comme une
consécration, une reconnaissance», assure Phatstaff. Une valeur qui donne son poids à la parole, si
précieuse: «J't'explique c'que j'kiffe. (...) Pouvoir faire de la musique tout en gardant mon éthique, faire
du fric sans casser l'image de ma clique. Touche pas à ma musique, touche pas à c'que j'fais, touche
pas à c'que j'ai. C'est mon patrimoine, mon projet, j'y crois, j'ai mis tout c'que j'avais d'dans, c'est à
moi» (Kool Shen, NTM). Autrement dit: ils veulent mordre le steak et ils ne le lâcheront pas.
Par la voix du rap, le hip-hop français est désormais dans la place: deuxième au rang mondial, juste
derrière les Etats-Unis, avec un véritable marché local. Parce que le rap n'est pas seulement une
musique, mais aussi une tribune pour de nombreux jeunes issus des quartiers et banlieues de
l'Hexagone. «Le ther-momètre d'une certaine jeunesse, explique Kodjo, qui a créé son label
indépendant, Nouvelle Donne, et sorti le célèbre rappeur Disiz la Peste avant de le revendre à une
major. On ne veut pas prendre le risque de laisser le système baisser la température quand il la trouve
trop chaude.» Alors ils protègent leur outil, leur discours. Montent leurs propres boîtes. Tentent de
jouer le jeu de l'économie mieux que ceux qui la tiennent.
Si les multinationales en ont poussé plus d'un à adoucir ses textes, à se compromettre dans la variété,
cela aura eu le mérite de servir l'expérience des autres. Kodjo a retenu la leçon: «Quand l'un de nous
perd le contrôle de ce qu'il fait, parce que l'argent en détourne la nature et l'intégrité, il y a
automatiquement une résistance qui s'organise dans le milieu.» Et il a compris où se trouve la clef du
succès: dans le public. «La diffusion d'un titre ou d'un disque n'est qu'une consécration d'un
événement reconnu et plébiscité par l'underground au préalable.» Et les maisons de disques n'ont pas
le contact avec les gens de la rue, ceux qui font le «buzz» d'un artiste ou d'un groupe. Elles ne
décident pas, elles suivent. «Notre atout, c'est de savoir faire monter la sauce. Après seulement on
deale avec les maisons de disques, avec cette force de tenir un public que l'on connaît dans nos
mains.»
Ils ont leur propre réseau, celui de la rue, avec ses relais, des DJ qui font circuler les nouveautés dans
des radios associatives ou des soirées. La réalisation et la promotion leur appartiennent. «Sur la
distribution, y'a pas à se battre, on la laisse aux multinationales... Ils ont des moyens qu'on n'a pas. Et
il n'y a aucun risque de détournement de notre matière.» Mais avant d'en arriver là, Kodjo s'est plongé
dans des bouquins de droit. Il a découvert les particularités des contrats d'artiste, de licence ou de
distribution. A l'époque Nouvelle Donne n'était qu'une association. Il est parti négocier avec des
avocats. «Là, j'avais appris leur langue. Et je les ai bouffés. Même pour une virgule, je ne lâchais pas
l'affaire.» Le label de Kodjo est aujourd'hui une SARL, avec trois employés payés 7000 francs net par
mois. Des salariés également actionnaires, qui touchent donc sur les bénéfices. «Alors on peut dire
qu'on s'en sort. Oui, on brasse des thunes.»
Le groupe Lunatic, avec son titre «Le crime paie», a connu un buzz exceptionnel. Une force qui a
permis à leur label indépendant 45 Scientific de poser ses exigences auprès des plus grosses
maisons de disques: «On leur a dit qu'avec nous ce serait un contrat de distribution. C'était ça, sinon
rien.» C'est Jean-Pierre et Géraldo qui avaient pris les choses en main. La major n'a vu ses artistes
qu'au moment de la signature du contrat. «C'est du business. On est là pour faire des affaires, pas
pour leur ramener des copains. On leur a donné un album fini. Et quand tu mets comme ça tes
couilles sur la table, il est normal que tu gagnes plus d'argent que la multinationale qui se contente de
poser les CD dans les bacs. Ils nous disaient que ce serait trop lourd pour nous d'assurer. On a rigolé,
on les a laissé parler... Les pièces d'or, c'est jamais trop lourd!»
Avoir l'esprit hip-hop, c'est ça: y croire et «mouiller le maillot». Tout seuls, ils ont assuré leur promo.
Monté une équipe de street-marketing, avec des graffeurs, des potes armés de marqueurs et de
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stickers. «Un véritable carnage dans Paris.» Réalisé leur clip aussi, en louant du matériel, en filmant
les copains. «Et on a foutu la merde dans l'industrie du disque et chez les producteurs de clips parce
que nous leur avons prouvé qu'on pouvait y arriver sans passer par leur système. Qu'on a nous aussi
nos forces parallèles.» Lunatic s'est imposé sans la bénédiction de «la radio qui fait la pluie et le beau
temps dans le rap» (Skyrock), en s'appuyant juste sur le «bon vieux réseau de la rue», le plus vieux
moyen de communication du monde. Et dès sa sortie le disque était 10e au top-album. Finalement, le
groupe est resté le boss, et la maison de disques a fait office de sous-traitant.
Maintenant, ils disent: «On est libres d'écrire ce qu'on veut. Nous voilà dans la place, avec de l'argent.
Suffisamment pour payer des avocats quand nos textes dérangent trop.» Avec le recul, ils admettent
avoir été un peu «agressifs», mais ne regrettent rien. «Parce que nous sommes des bons produits du
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système, insiste Géraldo. Nous avons eu l'intelligence de le retourner contre lui-même. On ne veut
plus être seulement des artistes sur le dos desquels les multinationales se font leur thune.» C'est le
premier pas. Et le second consisterait à ne plus être regardés de travers parce qu'ils viennent d'en
bas, de la rue. Là, l'argent ne suffit pas. Géraldo et Jean-Pierre racontent que, même avec un
portefeuille bien plein, quatre blacks venus des quartiers pour demander l'ouverture d'une ligne
téléphonique ou la location d'un véhicule, ça reste «suspect». Pourquoi seraient-ils moins voués au
succès que n'importe qui d'autre? Pourquoi seraient-ils plus pointés du doigt que Chirac, qui découvre
la souris d'un ordinateur à plus de 60 ans, ou que Balladur, qui vient de se rendre compte qu'il faisait
chaud dans le métro? «Pourquoi, hein?»
Toujours le même problème: le manque de reconnaissance, qui nourrit un mal identitaire. A l'école,
Marko venait avec des marqueurs à gouache. Il «salissait» les pupitres. Viré pour manque de
discipline. Marko s'en moquait. Dans ses yeux de gosse, il n'y avait que le hip-hop qui l'éblouissait. Il a
dansé, rappé, caressé les platines dans son quartier de Saint-Denis. Mais le dessin, c'était son truc,
ça lui est tombé dans la main «comme une météorite». Marko est devenu Marko 93 (2), graffeur. «J'ai
choisi la discipline du hip-hop la plus souterraine, et par conséquent la plus à la traîne
économiquement parlant.» Que le graff s'impose commercialement n'est pas une priorité pour Marko.
Il dit: «On peut toujours décorer un magasin, un appart, ça rapporte. Mais le graff n'a pas besoin de
construire son industrie pour survivre. C'est tout le milieu qui le fait vivre. Les rappeurs sont là, ils
alimentent la machine, ouvrent des portes et nous, on suit derrière.» Travailler dans l'ombre des
rappeurs est le confort des graffeurs, pourvu que leurs talents ne pourrissent pas dans une cave.
Mais Marko a quand même besoin d'argent s'il veut continuer à graffer. «Quoi qu'on pense, la maille,
c'est important.» Le système D, «à la hip-hop», reste efficace: chaque année, il pose un de ses
dessins sur des tee-shirts qu'il fabrique et vend en série limitée, de la main à la main. Pour le groupe
de rap K Spécial, des amis du quartier, il a conçu le logo de leur album «Cause à effet» (3). «En une
semaine, tu peux te faire 10000 francs, et après plus rien. Je n'ai pas de situation sociale fixe, mais
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dans un sens c'est la rançon de la liberté.» Celle de prendre le temps de transmettre aux petits, en
dessinant sur un mur du quartier une fresque de 250 mètres carrés avec d'autres graffeurs. Ou
d'évoluer dans son art, en mêlant au graff des calligraphies arabes ou des photos; en important la
discipline du mur vers la toile. En tentant doucement de passer de l'underground à la lumière.
Marko 93 a exposé ses toiles à la Bastille, en août 2000. Il était programmé pour un mois. Le
lendemain du vernissage, Marko a remballé ses cliques et ses claques. Parce qu'une de ses toiles
représentait un bloc de shit, produit illégal. On l'accusait de prosélytisme. «Non, je fais du réalisme
social et artistique. Le shit fait partie de ma vie, c'est une valeur économique qui existe chez moi,
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avec un mode d'emploi bien précis. Ma toile vaut bien plus que n'importe quelle pub pour lessive. Les
gens ne le comprendront que trop tard.»Car les loups sont désormais entrés dans Paris.
evigoureux@nouvelobs.com
(1) Tous les mardis à 21h30, Phatstaff anime avec Lion Scot et DJ Rohdg l'émission «One Shot» (sur
88.2).
(2) Site internet: www.marko93.com
(3) Dans les bacs fin octobre.
Elsa Vigoureux
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Challenges N° 160 - 1/7/2001
le grand D...bat Naomi Klein, journaliste canadienne, et Robert Louis-
Dreyfus, ex-PDG d'Adidas, s'expliquent sur le pouvoir des grandes
marques
Quelle a été votre première impression après la lecture du livre de Naomi Klein ? Robert Louis-
Dreyfus. C'est un ouvrage très documenté. Mais je suis en désaccord à peu près sur tout.
Commençons par l'une de ses affirmations comme « les marques tuent la production ». L'un des
métiers qui a le plus licencié en Europe ces vingt dernières années est l'industrie sidérurgique. Or
l'acier est le produit sans marque par excellence ! Naomi Klein affirme aussi que, si les parts de
marché de Nike ont progressé plus vite que celles de Reebok entre 1992 et 1997, c'est grâce à des
dépenses publicitaires supérieures. Pourtant, pour cette période, la croissance d'Adidas et de New
Balance a été beaucoup plus rapide, et leurs budgets publicitaires bien inférieurs. Savez-vous que,
entre mon arrivée à la tête d'Adidas et mon départ, les effectifs sont passés de 5 000 à 15 000
personnes ? Naomi Klein. No Logo n'est pas un livre sur l'histoire des restructurations industrielles
européennes. Je me place d'un point de vue aussi bien culturel qu'économique. L'objectif de ce livre
est d'expliquer pourquoi les grandes marques sont confrontées à des réactions hostiles, surtout chez
les jeunes. Des marques comme Adidas, et surtout Nike, imprègnent leur vie, à travers un sponsoring
massif dans les universités ou les écoles. Elles se présentent comme un symbole culturel. En même
temps, ces entreprises en font de moins en moins sur le plan social. Certaines ont délocalisé leur
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production en Asie, et leurs sous-traitants font travailler des gens, parfois des enfants, dans des
conditions terribles. Robert Louis-Dreyfus. Dans les chaussures de sport, la délocalisation est
inévitable. Si je pouvais faire comme le fabricant des montres Swatch et monter une chaussure avec
six pièces ce que nous avons tenté de faire depuis mon arrivée, sans succès , alors je pourrais le
faire en Europe. Mais quand vous avez entre 120 et 160 pièces dans une chaussure, il est impossible
d'automatiser. Il faut aller là où la main-d'oeuvre coûte le moins cher. En revanche, sur le textile, vous
faites erreur. Nous réalisons plus de 35 % de notre production en Europe. Naomi Klein. Autrefois, des
entreprises comme Adidas détenaient toutes leurs usines. Elles faisaient de la publicité pour des
produits qu'elles fabriquaient en totalité. Adidas ne possède plus aujourd'hui que onze usines sur les
575 qui travaillent pour la marque dans le monde. Robert Louis-Dreyfus. L'une des premières choses
que j'ai entreprises quand je suis arrivé chez Adidas a été d'emmener avec moi en Chine, au Vietnam
et en Indonésie les membres du conseil de surveillance six représentants de la direction et six
représentants syndicaux, issus en majorité des usines de la maison. Ils sont revenus en disant que la
qualité du travail et l'organisation étaient meilleures qu'en Europe ! Naomi Klein. Ce n'est qu'une
anecdote. Il y a eu de constants problèmes relatifs au contrôle de qualité dans ces usines. Cette
détérioration de la qualité s'explique par la volonté des marques de sortir de leur domaine de
compétence. Elles veulent être partout : lunettes de soleil, tissus, chaussures... Robert Louis-Dreyfus.
La qualité des produits Adidas est meilleure aujourd'hui que lorsque je suis arrivé ! Le consommateur
est beaucoup moins idiot qu'on ne le pense. Je vais vous donner un exemple. Nous avons des
chaussures baptisées Copa mundial. Elles sont produites en Allemagne, en Chine et en Indonésie. La
paire allemande vaut 10 marks de plus. Personne n'en veut ! Le coût de nos chaussures s'élève à 13
dollars. Je prends 40 % de marge pour payer le design, le marketing, et pour faire notre profit. Le
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reste est prélevé par la distribution. Si vous me dites que vous, consommateur, vous êtes prêt à payer
des chaussures trois fois leur prix, je serai enchanté de vous les vendre ! Personne ne conteste la
dureté des conditions de travail chez certains sous-traitants asiatiques de grandes marques... Robert
Louis-Dreyfus. Adidas n'a jamais été mis en cause en ce qui concerne le travail des enfants. J'ai
embauché, il y a cinq ans, le spécialiste du travail des enfants à l'Unesco pour surveiller nos usines en
Asie. Il n'y a pas d'enfants dans nos usines. Naomi Klein. Le contre-pouvoir n'est pas d'embaucher un
type de l'Unesco pour avoir la conscience tranquille. Dans ces usines, toutes les tentatives pour créer
des syndicats sont battues en brèche. Or une économie libérale a besoin de syndicats. Ce sont eux
qui se sont opposés à l'exploitation des ouvriers dans des ateliers insalubres. Et, grâce à eux, il n'y a
plus de sweatshops (usines bagnes) en Europe et aux Etats-Unis. Robert Louis-Dreyfus. Avez-vous
visité notre principale usine en Chine ? Pensez-vous qu'il s'agisse d'un sweatshop ? Naomi Klein.
152
Cela dépend de votre définition du sweatshop. Si, pour vous, c'est une usine où les ouvriers travaillent
plus de soixante heures par semaine pour des salaires de misère, oui c'est le plus propre des
sweatshops dans le monde. Robert Louis-Dreyfus. Mais si vous comparez avec les salaires chinois en
général, c'est mieux. Naomi Klein a globalement raison pour le textile. Mais elle est à côté de la
plaque pour les chaussures. Celles-ci sont produites dans de grosses usines qui offrent de bien
meilleures conditions de travail. Et nous avons rompu avec beaucoup d'entreprises, surtout dans le
textile, pour les motifs que vous dénoncez. Je pense que ce n'est pas idéal, mais c'est déjà mieux.
Faut-il édicter des minima sociaux au niveau mondial ? Robert Louis-Dreyfus. Instituer un salaire
minimal mondial relève de l'utopie. En revanche, il faut réglementer le temps de travail. Pour nous,
soixante heures de travail au maximum, c'est colossal, mais ce serait déjà un progrès pour ces pays.
Naomi Klein. Pourquoi aucun représentant d'Adidas n'est-il venu s'expliquer devant la commission
éthique de la Communauté européenne ? Robert Louis-Dreyfus. La raison pour laquelle nous n'y
sommes pas allés est peut-être que nous pensions que l'on y ferait le procès de Nuremberg des
usines qui fabriquent des chaussures pour les grandes marques. Je pense, en outre, que, si on met
trop de règles, cela ne marche pas. Naomi Klein. Il n'y a rien de scandaleux dans le fait que les
marques rendent des comptes à leurs gouvernements ! L'organisation indépendante Global Alliance a
publié récemment un rapport accablant sur les conditions de travail chez les fournisseurs de Nike en
Asie. Nike n'a pas tenu les promesses « éthiques » faites en 1998. Quand les caméras ne sont plus
braquées sur vous, rien ne bouge.
Jean-Pierre de La Rocque
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Challenges N° 156 - 1/3/2001
AGROALIMENTAIRE
Si la crise sociale gronde, le groupe Danone ne s'est jamais aussi bien porté. Son
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secret : la marque. En cinq leçons, la méthode qui a fait du français un maître dans
l'art de vendre.
Alerte à Danone : un clignotant est passé au rouge. Un social warning, comme l'ont appelé les
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C'était le 19 septembre, lors d'un comité d'entreprise international qui se tenait à Genève. Depuis, cet
avertissement est devenu une sirène hurlante. Dans d'autres entreprises, on s'en moquerait. Pas ici :
Franck Riboud se déclare « garant d'un modèle » façonné par son père, Antoine, auquel il a succédé
en 1996. « La fonction sociale doit être un contre-pouvoir face aux priorités économiques », affirme le
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PDG. La culture du groupe permet de porter cette ambition. Mais, face à des hypermarchés qui
exercent une pression colossale, à une concurrence devenue mondiale, à des actionnaires toujours
plus voraces, Danone doit absolument vendre et gagner davantage. La gestion humaniste et la
flexibilité industrielle, inscrites dans les gènes de l'entreprise, ne suffisent plus. Pour s'imposer comme
leader des biscuits, de l'eau ou des produits laitiers frais, Danone est devenu un maître en marketing,
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copié par Unilever et par Nestlé. Car Danone, aujourd'hui, est une marque avant d'être une entreprise
ou une collectivité humaine. C'est même celle que préfèrent les Français, selon une enquête BVA
réalisée pour le cabinet de consultants spécialisés Géodys. Ce capital-confiance est son principal
actif. Le fruit de près d'une décennie de travail : abandon du nom BSN pour celui de Danone en 1994,
recentrage sur les produits consommés partout dans le monde, internationalisation à marche forcée.
The New Danone, nom du nouveau projet d'entreprise, peut maintenant s'attaquer à d'autres
territoires comme la livraison d'eau à domicile, s'imposer sur des marchés inexplorés comme le petit
déjeuner, ou encore élargir les frontières de ses marques avec, par exemple, le lancement de l'eau
Danone Activ'. Il sait aussi propager plus rapidement le succès d'une innovation comme Actimel. C'est
d'une faiblesse que tout est parti : Danone était beaucoup plus petit que les mastodontes du secteur
(Coca-Cola, PepsiCo, Nestlé, Unilever, Kraft Food). « Il était impossible de se battre à armes égales,
explique le PDG. Nous avons donc choisi d'être leaders sur trois métiers : l'eau, les biscuits, les
produits laitiers frais. » Vendus, les soupes Liebig, les bonbons La Pie qui chante et Carambar, les
pâtes Panzani, la moutarde Amora et, tout récemment, la bière Kronenbourg. Achetés, McKesson, le
spécialiste américain de l'eau livrée à domicile, et les activités de United Biscuits en Europe centrale.
Partout où l'entreprise s'implante, elle exige la première marche du podium dans l'un de ses trois
pôles. « Et, si possible, largement devant le deuxième, afin d'imposer nos prix et nos innovations »,
indique Thierry Zurcher, vice-président du pôle biscuits. En Chine, l'industriel français contrôle déjà 50
% du marché des eaux embouteillées. En République tchèque, il réalise à lui seul deux tiers des
ventes de biscuits. Au Brésil, il est numéro un des ventes de produits laitiers frais. « Dans
l'agroalimentaire, les marges du leader sont, en moyenne, de 2 à 3 % supérieures à celles du suivant
», explique Lionel Zinsou, associé-gérant de la banque d'affaires Rothschild et ancien directeur de
Danone. Pour optimiser ses dépenses publicitaires, qui atteignent... 5 milliards de francs, Danone
s'est également concentré sur quelques marques phares. Cinq d'entre elles, dont Danone, LU et
Evian, représentent aujourd'hui 62 % du chiffre d'affaires du groupe. Paradoxe : alors que la crise
sociale gronde, tous les indicateurs économiques sont au vert. La divulgation par le quotidien Le
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Monde d'une restructuration du pôle biscuits en Europe, avec 3 000 licenciements, dont 1 700 en
France, a provoqué la fureur des salariés. Car l'entreprise ne s'est jamais aussi bien portée. En 2000,
la hausse du chiffre d'affaires (hors acquisitions) de Danone a atteint 7 %, quasiment deux fois plus
qu'Unilever. Depuis cinq ans, les marges ont progressé de plus de 20 %. Implanté surtout en Europe
occidentale en 1995, le français a réalisé l'an dernier plus de 40 % de ses ventes à l'international. La
valeur de l'entreprise en Bourse dépasse 140 milliards de francs, deux fois et demie plus qu'à la
nomination de Riboud fils. Danone est en passe de devenir l'une des cinq grandes marques
alimentaires dans le monde. Son OPA sur le créneau de la santé, à l'image de la nouvelle gamme de
biscuits Taillefine, lui ouvre des horizons infinis. Pour un groupe qui n'a pas trente-cinq ans
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d'existence, la mutation est époustouflante. « Il y a quinze ans, l'entreprise comptait 40 000 salariés,
dont 35 000 en France, indique Jean-René Buisson, le directeur des ressources humaines.
Aujourd'hui, elle emploie 85 000 personnes à l'étranger, sur un total de 100 000. » Mais l'accélération
secoue la maison. A force de racheter des entreprises, le groupe perd ses repères. La diffusion de son
modèle bute sur des cultures d'entreprise et des divergences de management, de l'Indonésie aux
Etats-Unis en passant par l'Argentine. Sur les 8 000 managers du groupe, 400 seulement sont des
expatriés. Les autres reçoivent des leçons accélérées que diffuse la direction des ressources
humaines. Y compris sur la responsabilité sociale. Pour continuer à ce rythme, Danone doit
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impérativement conquérir de nouveaux marchés. Mais lesquels ? Aller au-delà du tiers des ventes
actuellement réalisées dans les pays émergents exposerait le groupe à des revers brutaux du type de
la crise asiatique de 1997. La priorité, c'est donc les Etats-Unis, où il fait figure de nain. Pour être
numéro un ou deux sur ce pays, il faut des moyens colossaux. Au cours des douze derniers mois, cinq
deals gigantesques se sont négociés à 100 milliards de francs en moyenne ! Unilever a croqué
Bestfoods, PepsiCo a racheté Quaker Oats, Nestlé a pris le contrôle de Ralston Purina... « Danone
peut mobiliser jusqu'à 100 milliards de francs », estime un analyste. A condition que les actionnaires
acceptent. Pour leur garantir la perspective de revenus élevés, Franck Riboud a renoncé à acheter le
fabricant de biscuits Nabisco, puis le spécialiste des céréales Quaker Oats. Trop cher ! A part
Kellogg's, il ne lui reste plus de grand groupe à portée de main. « Danone talonne les cinq leaders
mondiaux, mais pèse deux à trois fois moins lourd en Bourse qu'eux », souligne Lionel Zinsou. Franck
Riboud veut se convaincre qu'il peut faire autrement. « Le groupe a les moyens de croître
annuellement de 5 à 7 % au cours des trois prochaines années tout en continuant à améliorer les
marges », affirme-t-il. Il y a bien des foyers de croissance dans le monde. Depuis trois ans, le PDG a
fait afficher dans tous les sites Danone les trois valeurs maison : ouverture, enthousiasme,
humanisme. Son plus grand défi sera de les respecter tout en conquérant le monde.
Kira Mitrofanoff
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Challenges N° 157 - 1/4/2001
ARTICLES DE SPORT Des consultants ont interrogé 4 000 ouvriers du
groupe
Nike n'est pas bien dans ses baskets. En publiant fin février les résultats de l'audit social effectué
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dans des usines de ses fournisseurs indonésiens, Nike s'est mis dans une situation délicate. Car les
conditions de travail dans ces lieux s'avèrent catastrophiques. Une enquête adroitement menée par un
organisme privé, Global Alliance, auprès de 4 000 ouvriers interviewés de façon anonyme révèle de
nombreux cas de harcèlement aussi bien verbal ou physique que sexuel. Pris à son piège ? Pas sûr. Il
s'agit pour le fabricant américain d'articles de sport de renverser la tendance. Cela fait dix ans que des
ONG se chargent de dénoncer les abus observés chez les sous-traitants du groupe. Nike n'en disait
mot. Cette fois, il met lui-même l'étude sur la place publique. Nike, tout en s'avouant non éthique,
chercherait à passer pour plus moral. CQFD. Selon Pascal Erard, coordinateur du collectif De l'éthique
sur l'étiquette, « sous l'apparente volonté de transparence, c'est aussi une véritable campagne de
marketing ». Il n'empêche que Nike a décidé de prendre (enfin !) le taureau par les cornes. La
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pression de l'opinion semble commencer à porter ses fruits. « Si l'on peut se poser la question de la
bonne foi de l'opération médiatique, il faut toutefois avouer que la société est parmi les plus avancées
en la matière », ajoute le militant. Ses concurrents, comme Reebok ou Décathlon en France, sont loin
derrière : ni communication ni action. Nike prend aussi un indéniable risque en communiquant
ouvertement sur la question. Désormais, on l'attend au tournant. Et si l'effort est réel, aucune efficacité
n'est assurée pour autant. La marque de sport sous-traite auprès de quelque 750 entreprises qui
emploient plus de 500 000 personnes dans 55 pays ! Ainsi, être leader sur son marché impose des
responsabilités morales et sociales difficiles à assumer. « Quand on ne les prend pas, comme Nike
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auparavant, on s'en prend plein la figure. Et quand on les accepte, on est soupçonné d'en profiter »,
confie, impuissant, un ancien cadre de l'antenne française. A. M.
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Le Nouvel observateur
marketing
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c'est de « faire parler » des produits par des gens à la mode. Aux Etats-Unis, les
grandes marques vont même jusqu'à payer des acteurs pour poser en clients
béats…
Vous sirotez un cosmopolitan dans un bar branché de Manhattan lorsqu'une sublime inconnue
vous susurre dans le creux de l'oreille : « J'ai besoin de votre aide. S'il vous plaît, appelez-
moi ! » Elle glisse une carte de visite dans votre poche et vous plante là, subjugué par son
sourire aguicheur et sa minijupe noire. Le lendemain, au sommet de l'Empire State Building,
un groupe de touristes vous demande de les prendre en photo. Vous acceptez, et restez ébahi
devant le téléphone portable avec appareil photo intégré qu'ils vous mettent entre les mains.
Quelques jours plus tard, à Los Angeles, un groupe de jeunes gens perchés sur des Vespa à
l'entrée de votre hôtel attire votre attention. Vous vous joignez aux curieux qui les écoutent
vanter les vertus du célébrissime deux-roues et repartez avec la ferme intention de vous en
procurer un pour sillonner Sunset Boulevard.
La jolie brune ? Kelly Majestic, un personnage fictif incarné par des dizaines de mannequins
déployées dans les grandes villes américaines par Ammo, un groupe de marketing embauché
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pour lancer le jeu vidéo Majestic sur internet. Ceux qui appellent le numéro de la carte de
visite sont invités à se connecter sur le site du jeu. Les touristes ? Des acteurs recrutés par
Sony pour hanter les sites touristiques et exhiber le T68i, un téléphone multifonction. Quant
aux jeunes en scooter, ils sont des agents du plus grand concessionnaire Vespa de la côte
Ouest, payés pour se garer devant les lieux branchés et faire l'éloge de la marque. Vous vous
êtes fait piéger ? Bienvenue dans le monde du « buzz marketing », le royaume du faux
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bouche-à-oreille…
A l'origine de ce nouveau phénomène, un ras-le-bol évident à l'égard de la pub classique.
« Les consommateurs sont saturés et de plus en plus méfiants, explique Marc Schiller, le
président d'Electric Artists, une compagnie new-yorkaise spécialisée dans le buzz par internet.
Ce qui compte, c'est ce que les gens se disent entre eux. Ils savent ce qui intéresse leurs amis
et sont francs avec eux. » La nouvelle tendance publicitaire cherche donc à exploiter un outil
de communication vieux comme le monde : le bouche-à-oreille (de buzz, « bourdonnement »,
en anglais). D'après une étude réalisée par McKinsey en 2001, 67% des ventes sont en effet
influencées par le téléphone arabe. Fini le placard publicitaire ou la pub télé dont tout le
monde profite pour aller aux toilettes : c'est désormais votre voisin qui vous conseille une
marque de voiture ou votre meilleure amie, un certain rouge à lèvres. « Faites en sorte que vos
cibles parlent de votre marque sans qu'elles s'en rendent compte : ça, c'est le vrai buzz »,
résume la brochure de Big Fat, une autre compagnie de Manhattan dont le chiffre d'affaires a
quintuplé depuis 1999. Le bouche-à-oreille n'a que des avantages : non seulement il permet de
s'infiltrer directement au coeur du groupe de clients potentiels, mais en plus il ne coûte pas
cher. Le rêve absolu ? Reproduire les succès phénoménaux - et sans budget publicitaire - du
premier « Harry Potter » ou du « Projet Blair Witch ».
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Dans la bible du buzz, « The Tipping Point », Malcolm Gladwell décrit comment un petit
groupe de New-Yorkais branchés a relancé à lui seul une marque de chaussures qui était en
vogue dans les années 1970. Comme tous les changements de comportement, les modes sont
des « épidémies » et « les idées, les produits, les messages et les comportements se propagent
comme des virus », note Gladwell. Un autre best-seller, « The Anatomy of Buzz », reprend la
métaphore : une rumeur se propage « comme un rhume » et le but est d'« accélérer la
contagion » grâce au « marketing viral ». Le secret d'une bonne infection ? Repérer dans
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chaque tribu les individus qui influencent les autres, qui les « contaminent ». Et si possible via
internet, lieu de prédilection du buzz, où la rumeur se propage à la vitesse de l'éclair. Selon
une étude réalisée pour AOL, 8% d'internautes influencent les opinions et les habitudes des
92% restants. Comme tous ses concurrents, Electronic Artists s'emploie donc à repérer ces
tastemakers, « faiseurs de goût », et à cultiver des relations très étroites avec eux. Ce sont des
responsables de fan-clubs en ligne, des maniaques des groupes de discussions ou des éditeurs
de lettres d'information, bref, des gens qui passent des heures scotchés à l'écran et adorent
communiquer. Le fichier de la compagnie en compte 300 000, minutieusement classés par
âges, passions, préférences artistiques, etc. « Avec notre base de données, nous pouvons
atteindre 6 millions de personnes, assure Schiller. Cela suffit. » L'équipe leur envoie des
messages créatifs - jamais de simple pub - et
attend qu'ils les diffusent en les reprenant à
leur compte. Pour 100 000 à 200 000 dollars par campagne, Electric Artists travaille
notamment pour les plus grands studios de cinéma et s'est spécialisé dans les films
indépendants ou étrangers comme « Amélie Poulain » ou « Mulholland Drive ». « Ce dernier
film pouvait être frustrant parce qu'il est complexe, analyse Schiller. On a lancé des dialogues
explicitant le film, pour le rendre plus compréhensible. » Lors du lancement du DVD de
« Jurassic Park » ou de la sortie du film « Memento », par exemple, Electronic Artists a fait
circuler un lien vers un site de voyage imaginaire dans le monde Jurassic et des courriels
mystérieux « rédigés » par le personnage amnésique de « Memento ».
Reste à appâter les tastemakers. « On ne les paie jamais, assure Schiller. Il faut qu'ils soient de
véritables fans, sinon ils ne seront pas crédibles. Ce qu'ils veulent, c'est être au courant avant
les autres. On leur donne simplement des tickets de cinéma gratuits, des tee-shirts… » « C'est
une race à part, confirme Amy Finn, la fondatrice d'Ammo à Los Angeles, qui met en
relations ses clients avec les influencers, comme elle les appelle. Ils ont un autre état d'esprit :
ils veulent être les premiers à découvrir les produits. Ils s'assimilent totalement au succès
d'une marque et deviennent des évangélistes. Et il en existe dans toutes les catégories : depuis
les barmen des boîtes, pour les alcools, jusqu'aux mères de famille pour les couches. »
Pour casser l'image un peu plan-plan de Volvo, Ammo a prêté pendant deux semaines les
nouveaux modèles de la marque, plus sexy, à une centaine d'« influenceurs » de l'élite
hollywoodienne : producteurs de MTV, responsables chez Sony Pictures, assistants de stars…
Mission accomplie : les Volvo se sont retrouvées devant les boîtes et les restaurants à la
mode, le long des plages et des marchés bio. Et tout le monde en a parlé. A Miami, Ford a fait
la même chose avec ses derniers modèles et DaimlerChrysler devrait à son tour exploiter le
filon.
Certaines campagnes de buzz vont plus loin : au lieu de chercher des « influenceurs », elles
préfèrent les fabriquer et les munir d'une rumeur sur scénario. C'est la version « guérilla », ou
clandestine, employée par Sony ou Vespa, qui prend le client au dépourvu, dans son propre
environnement. L'été dernier, en plus des faux touristes, Sony a envoyé dans les bars une
soixantaine de mannequins munis du T68i. Ils ou elles devaient engager « naturellement » la
conversation sur leur nouveau téléphone, démonstration à l'appui. Plusieurs milliers de faux
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portables ont aussi été « égarés » dans les toilettes des bars et dans les taxis. Sur l'écran, on
pouvait lire l'adresse d'un site internet où jouer et gagner un téléphone. Mais l'exercice n'a pas
fait que des émules. La démarche de Sony a été critiquée par la presse, et Commercial Alert,
un groupe de défense des consommateurs, a même hésité à poursuivre en justice la marque
pour cette publicité qui ne veut pas dire son nom. « On utilise les acteurs avec parcimonie,
reconnaît Amy Finn. Il faut faire très attention à ne pas braquer les gens. » Pour Jonathan
Ressler, fondateur de Big Fat, « le problème avec le buzz, c'est que tout le monde va vouloir
essayer et qu'on risque de saturer les consommateurs ». En attendant, au rayon ménager du
supermarché, méfiez-vous de cette grand-mère qui vous recommande chaleureusement une
marque de lessive…Julie Pêcheur
ferme qui fait douter de son âge : 22 ans. Tina, pourtant, a déjà une sacrée
expérience. Elle a fondé sa compagnie, le Buzz marketing Group, en 1996. A
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l'époque, elle commentait des produits de beauté dans un magazine pour ados et a
eu une idée de génie : pendant près d'un an, elle a demandé aux marques de lui
envoyer des échantillons pour faire des études de marché gratuites auprès de ses
amis et de ses relations, grâce au bouche-à-oreille sur la Toile.
Aujourd'hui, son entreprise compte une trentaine d'employés et un réseau internet
d'un millier de buzzSpotters, des détecteurs de tendance, dont une vingtaine vivent
en Europe, et même un au Népal ! Elle s'est spécialisée dans l'étude de marchés et
les événements promotionnels pour jeunes. Mais Tina ne sonde plus gratis. Elle
facture 250 dollars de l'heure pour donner son avis, et 3 500 dollars pour réunir
quatre de ses ados autour d'une table, devant un chef d'entreprise qui vise le marché
des jeunes. Pour connaître les tendances du milieu ado et affiner leur campagne,
des dizaines de marques comme Nike, MAC ou même la banque d'investissement
Bear Stearns font appel à ses services.
La formule magique ? « Vendre une pub, ça ne suffit pas, il faut que les gens en
parlent, résume Tina. De cette manière on peut s'infiltrer à l'intérieur d'un lycée,
toucher des milliers de jeunes. » L'année dernière, le Buzz marketing Group a
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gagné 1,5 million de dollars. Mais Tina garde la tête froide : elle habite toujours chez
ses parents, avec ses cinq frères et soeurs - elle en a embauché quatre. J. P.
Julie Pêcheur
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