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72 | METHODE LJEAN- CHRISTOPHE CHADANSON | CAROLINA MARTINEZ TABARES Changer sa mobilité pour changer la mobilité Linvitaion peut surprendre et pour- tant elle répond 3 une nécessit celle de penser local pour penser global Moins utiliser son automobile at profit autres modes plus durables représente le «prix» individuel & payer si nous voullons atteindrelocalement les objec- ‘if francais de réduction des émissions de gaz 3 effet de serre. En elle, déve~ lopper un réseau de tramway et de bus, construire des pistes cyelables sont des conditions nécessaires mais pas suffi- santes pour wansformer notre modele de mobilité. [és villes européennes comme Karlsruhe, Copenhague, Bern fou Zurich se situent au #palmares » des cités écomobiles parce quelles pré- sentent des offres de mobiliés alter- natives 3 la voiture et des politiques réduisane sa place mais aussi pace que leurs habitants ont une mobilité plus durable qu’en France. Nos wisins alé- rmaniques acceptent généralement des ddurées plus élevées de déplacement & vélo, 2 pied ou en transport collectf Levocation d'une différénce culurelle pour expliquer cette situation est un peu simpliste. Le role des pouvoirs publics nest pas neutre, notamment parce quils peuvent inciter 3 des chan gements de comportements. Quelques agglomérations francaises cont dja mis en place des démarches de marketing de la_mobilité. Elles Sappuient sur des outils de communi cation et dinformation qui sadressent aux usagers et les inctent 2 changer leurs comportements (mode de trans- port, horaires, activités, localisation...) Usilisées depuis de nombreuses années dans les transports collectifs, elles fidélisent les clients d'un réseau et en attirent de nouveaux autour d'zctions {qui portent sur des mesures incitatives (promotion, tarification), de la com- ‘munication (publicité, événements), de information multimodale et du mar- keting individuel. Design de services tt psychologie de l'engagement Parmi ces différentes actions, celles qui concernent le marketing individualisé iéritent une attention particuliére car elles ciblent la question du comporte- ‘ment. Cette technique vise & contacter chaque individu et 4 comprendre les raisons qui influencent ses choix d'iti- néraires, sa connaissance des modes alternatifs & la voiture et les réticences a leur utilisation Ces démarches sont peu développées dans les agglomérations francaises, sans doute parce quélles offrent un niveau de visbilité moindre par rapport 3 la réalisation @'équipements et dinfras- tructures de mobilité. La faible repro- uctbilité de ces démarches est aussi Gvoquée. Pourtant, deux méthodes complémentaires 4 celles habituelle- ‘ment mobilisées pourraient palier ces inconvénients : Ie design de services et la psychologie sociale dt engagement. Lapproche du design de services est basée sur tne description trés fine de Ja manitre de penser et de percevoir dun usager. Elle utilise différentes techniques afin de décrire Yexpérience des fucurs utilisateurs et notamment les dispositifs matériels et immatériels (signalétique, jalonnement, sites web, etc) au service d'une compréhension de Pinformation approche de la psychosociologie de engagement est quanta elle basée sur Tidée que Ia communication ne suffit pas 2 faire changer le comportement des usagers. C'est Texpérimentation dun autre comportement qui va pro- gressivement amener Pusager vers le changement. La question posée est la suivante : « Quels sont les actes qui vont permettre dexpérimenter tun compor- ‘ement différent et de le transformer en. engagement plus définitif ?» Ce nest pas ce que Fon pense qui induit ce que fon fait ;au contraire, cestce que Ton fait qui engendre ce que Ton pense. ‘Ainsi, daprés les tenants de la psycho= logie sociale de Yengagement, la com- ‘munication et la sensibilisation ont pew de chance 3 elles seules de se tradui par un réel changement tant que cer- taines conditions ne sont pas remplies. La premitre dentre elles est dinserire individu dans un contexte de liberté, Cest-a-dire d'inviter Pindividu a choisir «librement » son changement de com portement.-La seconde consiste & pro= poser un acte qui engage peu, qui cotte “nN sO ™ MOTIVER peu. Ce dernier prépare un second acte Qui engagera davantage este principe du «pied dans la porte» A ce stade, i test alors possible dexposer la personne 3 des arguments persuasifs. On parle de ‘communication engageante» Appliquée au projet actuel de Plan de Déplacements Urbains de la métropole bordelaise, ces théories ont permis de dégager un ensemble actions dont celle dite des «pionniers de la mobili. Pionniers de la mobilite’ : sensibiliser, expérimenter, changer Cette démarche a &€ mise en place pour offrir A un maximum de per- sonnes opportunité de tester pendant tune péfiode une autre figon de se déplacer grace & son engagement per sonnel. Plusieurs étapes la composent. La premitre consiste 2 rencontrer des habitants dans le cadre d'ateliers durant lesquels il leur est proposé de décrire et évaluer leur itinéraire quotidien du domicile vers le travail, den analyser le colt (frais de carburants, prix d'achat du véhicule), son incidence environne- mentale et sa vitesse. Un débat permet ‘ensuite d'évoquey les freins personnels et les leviers mobilisables dans Top- tique dune évolution vers un mode de déplacement plus durable (covoiturage, transports collectifs, vélo, marche 3 pied), Cette demande, facile & acceptet, PEs naire eb ‘err dann oe = ‘reer nie nian | 73 meTHODE EXPERIMENTER porte sur Tévaluation de son parcours. Elle est suivie d’une implication plus coliteuse : Sengager a modifier sa pra~ tique de déplacement. Cette seconde Gtape Sachéve lors de cette réunion, par Ih formalisation engagements de la parede ceuxcquiacceptent dexpérimen- ter, pendant une durée donnée, une autre manitre de se déplacer quotidien- nement, devenant ainsi «les pionniers de la mobilité », Ces volontaires signent tune charte d’engagement personnel. La troisitme étape est celle du test pen- dant loquel les pionniers expérimentent autres trajets, de nouveaux moyens de transports et, éventuellement, des hhoraires différents. Crest le temps de appropriation d'une pratique nouvelle La quatritme étape est celle du bilan Elle est décisive car une expérience positive se transforme souvent en pra tique habituelle. Au final, Taction est fondée sur trois principes : sensibiliser, cexpérimenter et changer Ainsi, deux défis sont 3 relever. Le pre~ ier est de nature méthodologique : il serait pertinent de construire une intel- ligence collective associant les savoirs des différents acteurs et professionnels du changement comportemental que sont les psychosociologues, les desi- gners de service, les spécialistes de la concertation et ceux de la mobilité. Le second est de nature organisationnelle il faudrait former des professionnels, définir des objectfs (en nombre d'habi- tants & solliciter pour patticiper 3 cette FAIRE LE BiLAN expérimentation de lécomobilité ou encore, en parts modales faire évoluer) et affecter un budget 3 cette nouvelle politique publique qui doit également Sarticuler avec les politiques inves tissement, par exemple en infrastruc- tures de transports, avee les nouveaux services et les autres mesures visant & engendrer des comportements plus vertueux itcwrrages

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