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216 te Erlanger Zeitungen respectivement. Buffon, pouvait-il en avoir eu connaissance par 1'intermédiaire d'un de ces nombreux contacts en Angleterre? Un suspect probable est L'abbé Le Blanc, vieil ami de Buf- fon, et déja cél&bre pour ses Lettres d'un Francois concernant les év2- nenents anglais de 1"époquc. Tl est d'autant plus suspect qu'il devien- dra encore plus célébre, et Hume sur le continent d'un méne coup, par sa traduction des Discours politiques de Hune en 1754, Nalheureusement pour nous, Le Blanc ne fit connaissance de 1'écossais qu'en 1751. (171) De plus, il n'y a aucune Evidence que Le Blane # connu 1'ocuvre de Hume avant 1'époque de cette traduction. En effet, le seul dont on peut assuré avoir connu cet ouvrage & une date assez tét est Montesquieu, qui envoie une lettre d'appréciation A L'auteur le 19 mai 1749. (172) Maupertuis, a-t-il pu filer le titre & Buffon? L'abbé Le Blane en écri- vant A lhume le 30 aofit 1755, cite une lettre de Maupertuis oti ce der- nier dit qu'il a fait traduire les Philosophical Essays, qu'il a vu quelques sections des E: 1s, Moral and Political, et qu'il a entendu parler d'un autre ouvrage, les "Principes de Morale", probablement "Enquiry concerning the Hor: 1751, (173) On peut remarquer qu'il ne fait aucune mention du Treatise , imprimé & Londres en incipl de 1739-1740, remarque qui deviendra pertinente par 1a suite, et qu'en 1755 ce n'est pas surprenant que Maupertuis connaissait Hume, I a pu comnaftre les Philosophical Essays par les revues frangaises et alle- mandes citées ci-dessus. De toute fagon, Hume est une célébrité sur le continent aprés la traduction de Le Blanc en 1754. Assurément il sera imprudent d'avancer que Buffon a connu cet ou- vrage dés 1743, I1 faudra plutét scrutiner la possibilité qu'il a pu lire le Traité initial. Mais dés le début tout semble étre contre nous. D'apr®s Hume lui-néme, le Treatise "fell dead-born from the press" ("il mourut en naissant" dit 1a traduction francaise (174), et 1a tradition nous fait croire par la suite que liume était absolunent inconnu en ce qui concerne sa pensée philosophique jusqu'a sa renaissance chez Kant. Cassirer a essayé de dénontrer que Maupertuis était un des premiers pro- pagateurs de 1a philosophie humienne sur le continent, indiquant en particulier des textes de 1" ssai de cosmologie sous sa forne originale, le mémoire sur "les loix du mouvement et du repos déduites d'un prin- cipe de métaphsyique", mémoire publié dans le recueil de 1'Académie de 27 Berlin en 1746. (175) Malheureusement sa thse a été démontrée insou~ tenable (176); 11 est improbable qu'il eut connu Hune avant 1755, et née A cette Epoque il n'est pas de tout sr qu'il connaissait le Trai- té de 1739-1740. 11 semble qu'il y a une influence de Hume sur Mauper~ tuis qui se fait entre 1752 et 1756, c'est-A-dire entre "Essai de coi nologie imprimé dans les Oeuvres de Dresde et sa nouvelle édition dans celles de Lyon ~ le temps d'ajouter un Avant-propos. "Quelques-uns, dit- il, ne veulent point adnettre de causalité entre ce qu'on appelle mouve- ment, force, action, effet des corps." (177) Sa propre argumentation A propos de la causalité a 6té développée ci-dessus; ici il nous suffit de remarquer que ces "quelques-uns" semblent bien @tre une allusion & Hune. Plus loin dans le méme paragraphe {1 d6finira 1a cause comme ce qui précede toujours un phénontne, définition originale chez Hune. Si ce ménoire n'est pas suffisant A en témoigner la connaissance de Hume, on peut consulter également de la méme année, son "Examen philosophique de 1a Preuve de 1'Existence de Dieu". (178) "Tandis qu'on abuse des mots de cause & d'effets & qu'on les place partout; les arguments dont se sert pour cela un des plus grands honnes d'Angleterre (Mfr. Hune) sont assurément des plus ingénieux £ des plus subtils: cependant il me semble qu'entre trouver des causes partout & n'en trouver nulle part ++". Mais ici on entre il est un juste milieu ot se trouve le vra: dans un labyrinthe, celui de 1"histoire de 1a notion de causalité, qui n'est pas notre propos aprés 1749. Sommes-nous bornés & maintenir 1a position classique en ce qui con- cerne Buffon? Est-il vrai que "...1a philosophic de Hume fut, nous senble-t~il, trop tardivement connue en France pour marquer trés pro- fondément le développement de 1a pensée de Diderot [ou Buffon]. En effet, le chef-d'oeuvre philosophique de Hume, son Treatise of Human Nature, qui seul pourrait @tre invoqué ici [nous dirons 1a méne chose pour Buffon en 1749], avait été en son temps un véritable avortenent et doit Stre compl®tenent négligé"? (179) En manque de preuve explicite que Buffon a connu ce grand philosophe en Gerivant sa "Manitre de trai- ter d'histoire naturelle", nous somes foreés A procéder autrement. Abandons-nous 1a méthode déductive de beaucoup d'historiens des scien— ces; elle est pauvre et stérile. Dégageons les possibilités de cette 218 lecture de Hume, pour ensuite déterminer 1a probabilité par une analyse des deux positions philosophiques. Si Hume a raison que son Traité mourut en naissant, la possibili- té que Buffon 1'a connu semble mince. Cependant cette déclaration de lume a besoin d'éclaircissement. 11 n'est par vrai que le Traité a &chapé inapergu jusqu'aux attaques de Kames et Beattie. A 1'époque de son apparition, il était revu par des périodiques aussi bien britanni- ques que continentaux. Pour nous limiter A sa réception sur le conti- nent, on peut signaler les articles suivants: 1, Biblioth’que britannique, ou Histoire des ouvrages des scavans de la Grande-Bretagne. Sous le rubrique "Nouvelles littéraires de Londres" apparut une notice (180) sur un livre anonyme, of auteur essaye de rectifier Locke mais ob il est anené & des paradoxes les plus absurdes, comprenant celui de 1a non-Liberté des opérations de Lesprit. 2. Biblioth’que britannique. Le prochain numéro annonce qu'ils ont re~ trouvé l'auteur; ils attribuaient le Traité A auteur du récemment publié Treatise on Ancient Painting, George Turnbull. (181) 3. Biblioth@que ratsonnée des ouvrages des savans de 1'Furope. Identi- fiant correctenent 1'auteur, le livre est annoncé par un article pure- nent descriptif dans les "Nouvelles Littéraires de Londres", (182) Mossner (183) attribue L'article 3 Pierre Des Naiseaux, connaissance personnelle de Hume. Ltarticle, au contraire des autres, est nullenent négatif: l'auteur est signalé pour son “originalité" et pour sa "pro- fondeur" de pensée. 4, Biblioth?que raiso nte-neuf pages. La premi@re partie (184) se bornera A dis- Cette notice est suivie d'une revue détail~ Lée de qui cuter les propositions du preter livre en reléguant le deuxitme, "of the Passions" & une simple mention a la fin de Larticle. La deuxitne partie s'occupera de le troisitme livre, "Of Morals", qui est paru en 1740. (185) Une anaylse de la premi®re partie de cette revue nous aide- ra peut-8tre A mieux comprendre 1a réception des idées sur le continent. Dlabord il faut préciser que ce genre de périodique avait pour but "informer ses lecteurs des nouveautés littéraires. Bien des biblio~ théques par exemple les consultaient pour savoir ce qu'il fallait acheter selon leurs budgets. Les articles tendaient & @tre descriptifs, 219 chargés de paraphrases et nme des longs passages tirés de L'ouvrage. En ce qui concerne la revue du Traité de Hume, article de la Biblioth®— que _raisonnée senble avoir assez bien rendu compte du but, des argu- nents et de la nature de l'ouvrage, sauf A propos des conclusions que nous verrons tantét. L'esprit enpirique de lentreprise de Hume est Aiscerné dés le début: "Persuadé que Mr. LOCKE, Mylord SHAPTESBURY, le Dr. MANDEVILLE, Mr. HUTCHISON, le Dr. BUTLER, & quelques autres encore, ont rendu au Monde un plus grand service en excluant de la Morale des Hypoth®se & les Conjectures, que 1'illustre BACON en les chassant de la Physique pour y susbtituer les Observations & les Expériences, 41 se propose d'imiter ces modtles, en travaillant toutefois sur un autre plan. ...Son but est de donner une Anatomie exacte de la Nature de AMomme, en y procédant par 1a voie de 1'Expérience selon toutes les rBgles de 1a plus rigide Démonstration." Il est aussi avoué que "tout cet Ouvrage... est rempli de pensées originales & qui ont tout le mé- rite de la singularité." (186) L'article continue par une analyse des matigres de ce premier livre: la distinction des "idées" et des "im pressions" que Hume fait (187), la critique de 1a causalité (le point culminant de l'argument étant 1a critique de 1a notion de "force, pou- voir, faculté, energie") (188), sur 1'identité personnelle et la eriti- que de la notion de substance (189), et finalement 1a critique des no- tions en géométrie, et en particulier celle de 1'égalité. (190) Mal~ heureusenent 1a conclusion de l'article montre bien que Ion n'avait pas compris toute 1'éntendue de Trait. On traite Hune de Pyrrhonien dogmatique qui veut substituer des spéculations A la philosophie solide des plus grands philosophes. "Ce qu'il y a de plus choquant, c'est la confiance avec laquelle il débite ses paradoxes. Janais on ne vit de Pyrrhonien plus dogmatique. Ce n'est pas en doutant, qu'il ose substi- tuer ses spéculations au sentiments des plus grands philosophes sur les matidres les plus abstraites, come sur la nature de nos Idées, sur 1'Btendue, sur 1*Espace, sur le Vuide, sur 1"Identité &e. Ce n'est pas en doutant qu'il stavance jusqu'a soutenir, par exemple, qu'il faut que tout ce qui existe doive nécessairenent avoir une cause de son existen- ces que nous n'avons a priori aucune prewve de 1existence de Dieu; que les plus habiles Mathématiciens n'ont aucune certitude de la vérité de 220 leurs Découvertes, jusqu'a ce que le Public savant y ait applaudi; & quantité d'autres Propositions aussi hardies, pour ne rien dire de plus fort.... Nous sommes du nombre de ces personnes, qui n'appergoi- vent point encore 1’imperfection & labsurdité de toutes les Hypoth@ses quitl rejett -Tl a bien prévu encore, qu'il lui échape~ roit peut-&tre en écrivant de sortir des bornes d'un prudent Scepti- vulgaires cisme, & de faire trop souvent usage de ces fagons de parler qu'on emploie connunénent sii mal & propo: il est évident, il est certain, il est incontestable: mais il déclare expressément, que si la chose lui est arrivé, c'est par inadvertance, par une suite de 1a vive im pression que les objets ont fait sur lui, nullement par amour-propre, ou par gofit pour la Philosophie Dogmatique, dont il est, dit-il, trés @loigné. Et en vérité, il faudroit @tre furieusement Pyrrhonien, pour refuser de 1'en croire." (191) 5. Bibliothque raisonnée. Dans le méme numéro que cette premitre par- tie de L'exposé du Traité est annoncé dans les "Nouvelles littéraires Ik Lately Publ led A Treatise of Human Nature, etc., dont l’ateur est nomné: "NT Hume", Hume avait publié ce panphlet anonymenent, mais comme st c'étatt écrit de Londres" un pamphlet, 1! act of a par un autre pour supporter sa propre oeuvre contre 1'incomprshension générale qu'elle avait suscitée, ce qui est exprimé par la suite du titre: Wherein the Chief Arguments of that Book are further Illustrated and Explained. (192) 6. Nouvelle Biblioth’que, ou Histoire littéraire des principaux écrits qui_se publient. Une notic dres" pour octobre 1739 (193) est suivie d'un dans leurs "Nouvelles littéraires de Lon~ 2 revue de quarante-six pages dans les nunéros de juillet et de septenbre de l'année suivante. theque rai limite 2 une discussion du premier livre du Traité. 1a distinction des (194) Cone 1a revue de la Bibli jonnée, le commentaire se impressions et des idées est trouvée contradictofre; 1a discussion du vide, satisfaisant ni aux cartésiens ni aux newtoniens. L'essentiel de Ltarticle étant le méne que celui de 1a Bibliothtque raisonnée, inutile d'approfondir 1'analyse. 7, On peut également signaler, toujours d'aprés Mossner, deux revues allenandes, sans autres détails, puisque nous ne croyons pas que Buf- 221. fon était personnellement au courant des nouviles littéraires d'Alle- magne. a. Never Zeitungen von gelehrten Sachen de Leipzig, du 28 mai 1739, p. 351. b. Géttingische Zeitungen von Gelehrten Sachen, du 7 janvier 1739, pp. 9-12. 8. Derni®rement on peut signaler les périodiques qui n'ont pas revu cet ouvrage de Hume: Acta eruditorum, le Journal des savants, le Mer~ cure de France, Le Pour & le Contre, les Mémoires de Trévoux, les Mé- moires pour ser\ » Observations sur les écrits moderne: En général, ces revues peignent Kune comme un critique de Locke, un diciple de Berkeley et de Hutchison. L'accent était sur 1a connexion nécessaire de la cause et de l'effet, mais aussi le développement natu- rel du sentiment. Son scepticisne est souligné au frais de son systéme constructif. Dans quel sens peut-on comprendre 1a déclaration de Hume que son Traité mourut en naissant? Ce n'est certainement pas la manque d'atten- tion A 1'poque de son apparition, mére si la fureur qu'avait provoquée son ouvrage s'éteindra aussi-tét aprds, qui le poussait A 1a déception. On est force 3 croire que c'est L'inconpréhension (4 ses yeux, au moins) de son entreprise qui 1'indisposait, mais qu'il essayera de remédier par la refonte de 1748. on ne peut gure douter que Buffon a pris connaissance de 1"ou- vrage A cette époque. En 1739 il est occupé par les recherches pour 1a préface A sa traduction de Newton. $i Berkeley est nommé dans 1a Pré- face ("M. Berckey" (195)), et nous avons essayé d'établir que ce n'é- tait que par l'intermédiaire de Jurin que Buffon connaissait celui-ct A cette époque, ni Hume ni son ouvrage sont signalés. Mais cela ne peut point nous Stonner, car si la traduction est parue en 1740, elle Etait préteau mois de décenbre 1738, date quand il soumet son travail aux commissaires de 1'Acadénie des sciences. (196) Ceci n'empéche qu'il n'a pas connu Hune par les revues discutées ci-dessus, ou par un de ces nombreux correspondants anglais. Tl se tient au courant des affaires anglaises pendant les années quarante, Nous avons vu qu'il rencontrera 222 Martin Folkes pendant 1'té de 1739 (197), qui sera suivi d'une cor- respondance (198) et une étoit liaison avec 1a Royal Society de Lon- dres. (199) Buffon ne perdait pas de contacte avec les nouvelles Lit téraires de 1a Grande-Bretagne: en 1749 il cite les Lectures on muscu (200) Méme si le contacte avec Needham ne dura pas long temps - deux mois de recherches microscopiques ensemble & partir du 16 mars 1748 - et méne si Buffon avait déja formulé son hypothése des molécules or- ganiques avant cette rencontre (201), il a pu faire la connaissance de Ja pensée de Berkeley, sinon de llume, dans ses discussions avec Necd- ham, Dernitrement, Jurin senble @tre assez important dts 1a Préface de la traduction de Newton: dans les mémoires que Buffon consacrera aux couleurs accidentelles et aux causesdu.strabisme (202), Jurin est cité pour son “Essay on Distinct and Indistinct Vision", ouvrage qui 1'a frappé depuis 1743. Mais quelle est 1a relation entre Jurin et Ine? L'a-t-il connu? Jurin, a-t-il communiqué 1e nom & Buffon dans une let~ tre inconnue jusqu'A maintenant? Tout ce que 1'on peut affirner positivenent est que si Buffon a au moins lu les revues de 1'époque, il aurait di étre attiré par les ar- gunents contre le rationalisme de 1a causalité et par 1a eritique des abstractions en géonétric, clairement exposés dans ces revues, et in- cité par sa curiosité, de lire L'original. Quelles étaient les possibi~ Lités d'avoir un exenplaire a 1'époque? Nalheureusement nous maigris~ sons nos chances en posant cette question. Selon le contract entre Kune et son éditeur, John Noon, 1a premi®re @dition était linitée A mille exemplaires, avec des réstrictions concernant une deuxitme édition @ventuelle. En effet, au dix-huitime sitcle, L'ouvrage ne fut jamais réédité; il n'était pas traduit non plus, ni en francais ni en allemand, (204) C'était, senble-t-il, un livre rare - la Bibliothque du Roi n'a jamais posédé clle-méme cette édition. (205) Pendant son séjour en France de 1763 A 1766, Hume rencontrera Buf- fon en personne. Bien qu'il trouvait que celui-ci avait 1'air d'un naréchal de France plutét que d'un philosophe, #1 le trouva sympathique. (206) Buffon invitera Hume souper chez lui. (207) De son cété, Hume i connaissait 1" wrelle: 11 écrit A Adam Smith (208) qu'il a fallu rendre au libraire Dessaint et Saillard les deux volumes de Buf- 223 fon qu'il avait achetés, Buffon lui en ayant offerts. Mais du cété de Buffon, il y a silence compléte, toujours, en ce qui concerne le Traité ou 1MInguiry de Hune. Tout ce que nous pouvons affirmer positivement est que Buffon connaissait des ouvrages, sans savoir lesquels, et seule~ ment 2 une date tardive, Tl adresse une lettre & Hume en 1774 pour sa- voir lesquels des volunes de 1'llistotre naturelle lui manquait afin qu'il putsse donner "ordre & son libraire de les éxpédier. "Je lis, continue-t-il, souvent les vétres [ouvrages] avec le plus grand plaisir, et ni 1"éoignenent ni le tenps n'ont diminué les sentiments de mon ani- ti pour vous." (209) Toutes nos recherches nous senblent futiles, Et pourtant, n'ayant pas démontré LYimpossibilité de cette lecture, il faut voir A quel point Jes arguments ressenblent & ceux de Hune, A quel point les arguements sont originaux chez lui, ne pouvant venir que de lui, exception faite A une originalité indépendante chez Buffon, et & quel point les argu- ment stenboftent dans un systne de pensée si unique qu'une colncidence doriginalité devient improbable. IL peut sembler paradoxal d'appeler Hume un empiriste secptique. Si l'origine de sa critique de la raison est issue de ses réflexions sur la conception de 1a nature et 1a raison mathématique de la science de Newton, accepté d8s lors comme le point culminant de la méthode inductive, en quel sens powvait-il concevoir appliquer cette méne mé~ thode de recherche expérimentale & l'étude de 1"honme en mati’re de morale, de politique ou d'histoire? Lors de sa discussion "Of scepti- "“hoever has taken cism with regard to reason", i1 donne 1a réponse the pains torefute the cavils of this total scepticism, has really dis puted without an antagonist, and endeavour'd by arguments to establish a faculty, whose nature has antecedently implanted in the mind, and render'd unavoida>le." (210) Délimitant les bornes Ctroites de la capacité de 1'entendenent humain, et voila le sens de son "nitigated skepticisn" (211), sera peut-étre un grand avantage en montrant les limites des donaines qui sont mieux adaptés A notre vraie nature. Hume sera connu de 1a postérité pour sa négation de 1a raison de la causalité et son histoire des boules de billards. En effet, i1 semble bien que sa critique de 1a causalité vient de sa lecture de Locke et de Berkeley 4 propos de 1a gravitation universelle. Son cha 224 pitre "Of Knowledge and Probablility" suit en détail l'article 29 chapitre TIT, Livre IV, de 1'Essai de Locke. D'abord on distingue entre les "relations d'idées" et les “faits réels" ("matter of fact"). Des premi’res seulement sommes-nous capables d'une connaissance certaine et universelle, Elles concernunt les propositions de mathématiques, et é- tant découvrables par la seule opération de L'esprit, "without dependence on what is anywhere existent in the universe" (212), elles retiennent toujours leur certitude et Evidence, Nous avons affaire ici avec ce que Leibniz appelait les "propositions nécessaires". La nécessité vient de ce que les propositions sont de nature analytique; on n'a qu'A cher- cher si le prédicat fait partie de l'essence du sujet, c'est-a-dire s'il est nécessaire donné 1a nature du sujet. L'analyse est dominée par Ja “loi de contradiction". On peut dire qu'une proposition est néces— sairement vraie si son contraire implique contradiction, Fn ce qui con- cerne les "matters of fact", c'est-a-dire les propositions de 1'exis- tence réelle du sujet, nous n'avons pas 1a méme garantie de nécessité. "the contrary of every matter of fact is still possible, because i can never imply a contradiction and is conceived by the mind with the same facility and distinctnessas if ever so conformable to reality.""(213) Hune continue par L'exemple devenu célébre du soleil que se levera demain. Le contraire, qu'il ne se levera pas, n'est pas moins intelligible une proposition, et il n'inplique aucune contradiction. D'od vient notre certitude démonstrative des propositions contingentes? D'ok vient notre certitude démonstrative des "vérités physiques Hume a bien raison de signaler qu'"all reasonings concerning mat- ter of fact seem to be founded on the relation of cause and effect." Traditionnellement c'est ici que 1'on trouve la garantie de la véracité. L'existence étant contingente, I'affirmation ob 1a négation dine pro- istentielle ne sont pas contradictoires parce que la propo position ex sition est synthétique. D'aprés leibniz, elle est régie par le "Prin- cipe de 1a raison suffisante" ~ chaque existence réelle dépendant de sa cause réelle, De sa mani@re, Locke critiqua cette notion de cause. A vrai dire, nous ne pouvons apercevoir aucune "connection naturelle" entre les idées que nous avons des phénontnes naturels. "the things that, as far as our observation reaches, we constantly find to proceed regu~ 225 larly, we may conclude do act by a lav set them; but yet by a law that we know not: vhereby, though causes work steadily, and effects con- stantly flow from then, yet thetr connexions and dependencies being not discoverable in our ideas, we have but an experimental knowledge of them." (214) La conséquence nous anne au concept de force. "And therefore we shall do no injury to our knovledge, when we modestly think with ourselves, that we are so far from being able to comprehend the whole nature of the universe, and all the things contained in it, that we are not capable of a philosophical knowledge of the bodies that are about us, and make a part of us: concerning their secondary quali~ ties, powers, and operations, we can have no universal certainty." (215) Si nous ne pouvons pas prétendre attaindre une science parfaite des corps naturels, "the original rules and communication of notion being such wherein we can discover no natural connexion with any ideas we have", Locke néantnoins, profondézent affecté par la cohérence et Ja continuité des parties de la matitre, conclut que nous ne pouvons "but ascribe then to the arbitrary will and good pleasure of the Wise Architect." (216) Mais Hune montrera gue Locke faillissait en ce qu'il présumait la chose qui était en question: 1a nécessité d'une cause. (217) "We can never demonstrate the necessity of a cause to every new existence, or new modification of existence, without shewing at the same time the impossibility there is, that any thing can ever begin to exist without some productive principle; and where the latter proposi~ tion cannot be prov'd, we must dispair of ever being able to prove the former." (218) Gtest ici,d'ailleurs, ot tombent tous les arguments en faveur d'une providence divine. Le probl®me n'est pas celui formulé par Newton, qu'un Dieu sans empire, sans providence, et sans les causcs finales, sera rien d'autre que le Destin et 1a Nature. (219) 11 suppose 1a nécessité d'une cause, soit 1a Providence, soit 1a Nécessité. Mais 1a queleonque et Leffet est ce que nécessaire entre une ca Hume met en doute. C'est ici que l'enpirisme faillit. Nous n'expéri- mentons qu'A partir des effets, et "the mind can never possibly find the effect in the supposed cause by the most accurate scrutiny and examination, For the effect is totally different from the cause, and consequently can never be discovered in it." (220) Qu'une puissance 226 conme cause (par exemple, L'attraction comme cause de la gravitation (effet) des corps) n'est pas perceptible par expérience, elle n'est pas dénontrable come "relation d'idées" non plus, car elle a affaire avec Lexistence réelle d'un effet. Conme "natter of fact", la seule garantie logique étant 1a raison suffisante (ou son malogque), nous sommes entrés dans un cercle viscieux - car c'est justenent la notion de cause qui est en question. Par scrutin rationnel de la raison, Hume est forcé a de~ venir sceptique! Mais nous avons vu que Hune proposait une réponse & son propre scepticisme, Tout ce qu'il a pu démontrer c'est qu'il n'y a pas de lien rationnel entre la cause et l'effet. "The true state of the question is, whether every object, which begins to exist, must owe its existence to a cause, and this I assert neither to be intuitively nor denonstratively certain...", (221) I1 faut sortir la science du domaine de la métaphy- sique; 41 faut avouer qu'elle est faite par des hones. La logique des science se trouve dans la psychologic humaine. Diol vient dont notre idée de causalité? Par 1a connexion constan- te d'une suite particulitre d'évonements nous sommes amenés A croire, dans un lien causal. "To consider the matter aright, instinctivement, reason is nothing but a wonderful and unintelligible instinct in our souls, which carries us along a certain train of ideas, and endows them with particular qualities, according to their particular situations and relations. This instinct, 'tis true, arises from past observation and experience; but can any one give the ultimate reason, why past exper- ience and observation produces such an effet, any more than why nature alone shou'd produce it? Nature may certainly produce whatever can arise from habit: Nay, habit is nothing but one of the principles of nature, and derives all its force from that origin." (222) Lorsque Buffon écrit sur les genres de vérités, i1 doit prendre en considération non seulement les critiques de 1'attr: ion comme force pour la rendre intelligible; 1a question de 1a vérité implique les critiques épistémologiques plus profondes. Si Hume lui a fourni Ja matire de réflexion sur le concept de la causalité, i] lui a four- ni une solution d'ordre général sur les fins de la science ainsi que Ja certitude qu'elle puisse atteindre. (223) 227 ‘on reprendra A son tour, remonte La distinction des vérités que 3) distinction qui devrait nous elle-méme trés loin; ce n'est pas cett: étonner. Descartes, par exemple, reprendra la distinction scolastique entre la vérité de notre connaissance (veritas intellectus) et la véri- ni). (224) Mate dans son té de l'objet connu, ou de la réalits (¥ opre méthode pour aboutir & la entreprise scientifique, d'aprés certitude, il fallait renoncer & chercher A comprendre la nature des j la recherche, pour @tre fructueuse, doit se rap- choses (veritas ret); porter & 1'étude de leurs propriétés dans le but de construire la mathe- sis universalis. (225) Les vérités rathématiques, 1a relation des idées, deviendront, au moins & partir de Descartes, des vérités immuables (si- non éternelles) (226), ce par lequel notres esprit borné peut arriver aun certain degré de certitude. (227) C'est ainsi qu'elles deviennent la mesure de toutes les autres sortes de vérité. (228) Mais 11 semble que cette division arbitraire de la vérit6 laissait entrer toutes sortes d*hypothéses insoutenables en physique - et le pre~ meier de s'en plaindre était un critique acharné du vivant de Descartes lui-méme. Gassendi n'avait rien A faire avec la mathématisation % la manidre de Descartes - A tort ou & raison. Mais s'il n'a pas compris L'utilité des calculs en faits de physique, sa critique des "pures hypo thises des mathématiciens" n'était pas injuste, De quel droit, par exen- € al'infini en mathématique son ple, pouvait-on inférer de la divisibiii existence dans 1a nature? Gassendi est, bien entendu, atomiste. Mais son argument reste valable: "c'est une pure hypoth®se des nathématiciens, & s++ aisni il ne faut pas argumenter dans la Physique en supposant des choses que 1a Nature ne connait point." (229) La séparation de 1a mathé- matique et de la "physique" senblait alors infranchissable. Huygens, en faisant une hyphoth8se "purement géonstrique" du choc, pouvait nous en donner des lois correctes; Leibniz en cherchera son "interprétation physique". La loi du sinus a été dérontrer en Stant de L'optique ce qui était physique, 1a nature de 1a lusitre et des milieux, pour ne traiter que le rayon de lumitre conme une ligne en géom@trie. Leibniz nous mon- tre que pour comprendre le phénon’ne de la réfraction, il faut expliquer Itaction réelle de 1a lumi®re dans un milieu et dans l'autre, en prenant en compte les propriétés non géomét ues des nilieux. De cette manitre 228 A'hypoth&se de 1a canalisation de la lumidre est entrée dans 1'optique, grace A la resistance des milicux... ou 1"hypoth®se de L'attraction des corpuscules de la lumitre par le milieux plus dense. Ainsi chez Newton: "Yoces... attractionis, impulsus vel propensionis cujuscunque in centrum, indifferenter, et pro se mutuo promiscue usurpo, has vires non physice sed mathematice tantum considerando." (230) Done Newton, conmente Nouy B propos de ce passage, distingue te point de vue mathématique du point de vue physique. Or 1'expression voces (mots) sugg@re l'idée que les ma~ thématiques sont simplement un langage, un synbolisme dont 1a valeur de Vérité est inférieure. La vérité proprement dite est l'objet de 1a phy- siqué. La physique étudie les causes ou raisons, qui Schappent aux ma~ thénatiques. En effet, Newton continue dans ces termes: "unde caveat lector ne per hujusnod! voces cogitet me specien vel nodum actionis causanve aut rationem physican alicubi definire, des mots restent quand née; dans son syst@me, il considérera 1'at- ". La signification traction en termes d'hypothtse mathimatique. C'est justement pour cette raison que Malebranche rejetera les Principia de Newton. Si l'usage des "suppositions" est nécessaire pour construire 1a physique mathématique, ctest qu'il y a un cart imense entre L'abstraction mathématique et la nature coneréte. (231) "La nature n'est point abstraite, les leviers et les roues mécaniques ne sont pas des lignes et des cercles mathéma~ tiques... pour ce qui regarde l'astronomie, il n'y a point de parfaite régularité dans le cours des plan’tes;... on suppose, par exemple, que Jes plan8tes décrivent, par leurs mouvements, des cercles et des cllip- ses parfitement régulitres, ce qui n'est point vrai." (232) Buffon a mieux compris que lorsque I'attraction est supposée, les courbes des trajectoires de plan8tes se démontre avoir une parfaite régularité selon les calculs de Newton. Mais pour lui, les critiques de Nalebranche restent valables, Il employera ces argunents, nous avons vu, contre d'A~ lenbert. On peut faire abstraction des qualités physiques en ce qui con cerne le systtme du monde; on peut considérer les trajectoires comes des lignes et des plandtes comme des points griice A 1'imnense distance des corps célestes. ".,,leurs mouvenens sont d'ailleurs les plus ré- guliers que nous connoissons, & n'éprouvent aucun retardement par 1a résistence:...", (233) Mais les sujets en physique auxquels on peut 229 faire de telles abstractions sont fort rares. I1 faut que les matiéres si elles étaient des concepts soient capables d'étre réduites cons mathémattques "concrétisés", Ainsi le succts de la mathénatisation de L'optique fut possible "parce que 1a lumi’re Stant un corps pres~ qutinfininent petit, dont les effets stopérent en ligne droite avec une vitesse presqu'infinie, ses propriétés sont presque mathématiques, ce qui fait qu'on peut y appliquer avec quelque succ’s le calcul & les mesures géonétriques." Le succ®s de Newton est ainsi, trés limité; le succts de 1a mathématisation en philosohpie naturelle n'était possible qu'en Astronomie et en Optique, et ceci parce que les effets physiques pouvaient tre représentés adéquatenent par des constructions gGométriques sans beaucoup d'abstraction. Buffon fait aussi une excep- tion pour la mécanique rationnelle, qui est, dit-il, elle-néme ue science nathématique. Elle pose des principes de mécanique qui seront emprunté par “la Mécanique pratique ou 1art de faire & de composer les machines" en tenant compte des frottenents et des autres qualités phy- siques. "La dénonstration des effets méchaniques, comme de 1a puissance des leviers, des poulies, de 1'équilibre des solides & des fluides, de L'effet des plans inclinez, de celui des forces centrifuges, &c. appar- tenant entiérement aux Mathématiques, & pouvant étre saisie par les yeux de Ltesprit avec la derhitre évidence, i1 me paroft superflu de 1a re~ présenter & ceux du corps; le vrai but est au contraire de faire des expériences sur toutes les choses que nous ne pouvons pas mesurer par Je calcul, sur tous les effets dont nous ne connoissons pas encore les causes, & sur toutes les propriétés dont nous ignorons les circonstan ces, cela seul peut nous conduire & de nouvelles découvertes;...". (234) Curieux de trouver les mots de Malebranche ici! Non. En cherchant les propriétés physiques qui existent dans le monde ci-bas, dans 1a con~ tingence du monde "sub-lunaire" (235), le monde du devenir, dans le monde du quel s*occupe "Histoire naturelle, 1a certitude n'est possible qu'en fonction du probable. Sans la raison et 1a certitude absolue, comment éviter de tomber dans le scepticisme pur? C'est ici que Buffon reprend A sa maniére l'argument de Hunc. Selon Hume, seuls les objets des sciences abstraites, la quantité et le nombre, sont objets de la démonstration; essayer d'étendre "th: 230 more perfect species of knowledge" aux autres objets, en "philoso- naturelle" ou "philosophic morale",ce n'est que “nere sophistry and illusion, des carrés des deux autres cétés ne peut @tre connu, soit que les " (236) Que le carré de I*hypoténuse est égal A la sonme termes de la proposition sont définis si exactement, sans une suite de raisonnement et de recherche (inquiry). (237) Par la proposition qui suit, prise de la philosophie morale, concernant la relation de la propriété et la justice, nous comprenons que le but de Hume est de mon- tref L'impossibilité de démonstration dans les affaires humaines. Mais nous avons déja vu que la possibilité de démonstration dans les sciences de quantité et de nombre est d@e ala nature abstraite de leurs objets. Les démonstrations en mati@re de "relations d'idées" peuvent nous amener A l'évidence des propositions. Mais pour Buffon ce type de "vérité" faillit justement parce qu'elle est abstraite, "Ce qu'on appelle vérités mathématiques se réduit done Ades identités d'idées & n'a aucune réalité;...", (238) En fin de compte, Hume n'a pas dit autre chose. S'il trouve la possibilité de L"évidence entre les relations d'idées, il avait attaqué les entités abstraites en mathématique parce qu'elles ne correspondaient point & une réalité physique. (239) Nous ne pouvons raisonner gue sur les quan- tités et les nombres. "All other inquiries of men regard only matter of fact and existence, and these are evidently incapable of demonstra- tion." (240) vidence" en mathénatique. Les vérités Buffon convient de parler 4 mathématiques ont L'avantage d'6tre toujours exactes et démontratives, conme le veut Hume, Mais il faut en convenir que ceci n'est possible que grace a leur nature "abstraite, intellectuelle & aribtraire." (241) 11 convient encore une fois que dans 1a philosophic naturelle, “une suite de faite semblables ou, si l'on veut, une répétition fré. quente § une succession non interrompue des mémes évenemens, fait L'essence “. (242) Buffon doit accepter les conclusions de la vérité physiqu Jogiques de Hume, que lorsque 1'on fait le standard de notre jugement futur notre expérience passé, ces "arguments must be probable only, or such as regard matter of fact and real existence, according to the di- vision above mentioned [des relations d'idées ct le "matter of fact" 231 (243) Mais il fait de cette probabilité le standard méme de la certi-~ tude. "...ce qu'on appelle vérité physique n'est done qu'une probabili- té, mais une probabilité si grande qu'elle équivaut A une certitude." (244) A vrai dire, chez Buffon et chez Hune il y a deux sens du mot "probable". Le premier est relatif @ la connaissance. Lorsqu'une propo- sition ne peut @tre connue avec certitude, nous entrons dans le do- maine de 1a vraisenblance ou de 1a "probabilité". Ce sens du mot, ce que Descartes ne pouvait pas accepter en matitre de "science", est éga- Jenent rejeté par Hume et Buffon. "L'évidence mathématique & la cer- titude physique sont done les deux seuls points sous lesquels nous devons considérer la vérité; dts qu'elle s'éloignera de Lune ou de Lautre, ce n'est plus que vrai-senblance & probabilité," (245) Mais Hume démontre que tout raisonnecent & partir de L'expérience Stait fondé sur la supposition que le cours de 1a nature continuerait und nt de nme. Assurément sans la supposition de cette unifornité il n'y a, pour I'honme, pas d'utilité possible de 1'expéricnce, d'elle ne peuvent venir aucune inférence ni conclusion. (246) "Let men be once ny which can afford us a reason for drawin fully perswaded of these tvo principles, That there is ching in object, consider'd in itself, aconslusion beyond it; and, That even after the observation of the frequent or constant conjunction of objects, we have no reason to draw any inference concerning any object beyond those of which we have had experience;...". (247) Ctest ici que 1'on trouve 1a clef au scepticisme. Nous sentons que de 1"expérience du passé nous pouvons induire une proposition concernante une événenent futur. "The connexion of the ideas ideas is not habitual after one experiment; but this connexion is com prehended under another principle, that is habitual; which brings us back to our hypothesis. In all cases we transfer our experience to instances, of which ve have no experience, cither expres either direcly or indirectly." (248) Nous ne pouvons pas comprendre qu'il nty a pas "a kind of pre-established harmony between the course 2". Bien que cette pro- of nature and the succession of our ideas; position ne soit pas intuitive (249), ni démonstrative (a_priori) parce qutelle regarde un "natter of fact" et une existence réelle (250), cela 232 ntempéche qu'elle ne soit pas probable. Méme si ce n'est que la cou- tume qui nous pousse & croire (251), nous ne devrons pas nous en plain- dre. C'est cet instinct donné par la nature, plus sr que 1a raison elle- méne, raison qui est impuissante dans les mati®res de fait et d'exis-~ tence. "ALL these operations are a species of natural instincts, which no rasoning or process of thought and understanding is able either to produce or to prevent "(252) Comment done pouvons-nous batir une science A la portée des honmes, contenue & 1'intérieur des limites de son en- tendement? "Indulge your passion for science, says she [1a nature], but Jet your science be hunan and such as may have a direct reference to action and society. Abstruse thought and profound researches I prohibit and will severly punish by the pensive melancholy which they introduce, by the endless uncertainty in which they involve you, and by the cold reception your pretended discoveries shall meet with when communicated. Be a philosopher, but, amidst your philosophy, be still a man." (253) Cette perspective “anthropologique" est précisénent celle qui guidera Buffon lui-aussi. Un des premiers effets de cette perspective sera de délimiter le chanps de la science selon les capacités de notre entende- ment. De plus, c'est le notion de causalité qui sera le neoud du pro- lame. Lorsque nous pouvons nous étendre sur le mode de connaissance impligué par ce principe de causalité, qui est le ressort de toutes nos connaissance en matitre de fait, comme Hume 1'a démontré, nous la base d'une nouvelle 1 auron: taphysique des sciences. Buffon suivra en effet de trés prs la structure de 1'argument donné par Hume, (254) L'intérét sera aussi celui de la logique de 1a science expérienentale et inductive, Si les faits sont bien constatés par des "observations réitérées" et les “expériences exactes", la re~ cherche des raisons de ces ménes faits nous pose un tout autre pro~ bl@me, parce que nous sonmes "obligez d'avouer que les causes nous sont & nous seront perpétuellenent inconnues...". (255) Nous sommes “yéduits A tacher de déduire les effets, d'effets plus généraux... & " (256) Vos: comme la t@che et 1a limite des sciences expérimentale, "It is con~ renoncer & sgavoir au dela A ce que Hume avait présenté fessed that the utmost effort of human reason is to reduce the prin~ ciple productive of natural phenomena to a greater simplicity, and to 233 resolve the many particular effects into a few general causes, by means of reasonings from analogy, experience, and observation. But as to the causes of these general causes, we should in vain attempt their disco- very, nor-shall we ever be able to satisfy ourselves by any particular explication of them. These ultimate springs and principles are totally shut up from human curiosity and inquiry." (257) Pour éviter L"écuei1 de 1a non rationnalité de 1a causalits, cependant, Buffon préfére ap- peler la cause un “effet plus général". Les phénonBnes que nous étudi. ons "se succtdent & se rép&tent sans interruption & dans tous les cas [ils] sont le fondement de nos connoissances physiques." (258) Buffon préfere donc, A la suite de Hume, stipuler qu'il suffit qu'une chose arrive tofjours de 1a méne facon pour qu'elle fasse une certitude ou une vérité pour nous...". (259) La science n'est faite que par homme pour l'usage de sa vie. Avec cette reconnaissance nous pouvons fonder une science 2 mesure que nous reconnaissons une uniformité dans la suite de faits cemblables, suite qui "fait essence de la vérité physique", mais avec toutes les restrictions que cela importe: cette vérité n'est que probable en ce qu'elle ne peut espérer atteindre Lévidence des vérités mathématiques. De cette mani®re Buffon légitime la recherche de 1a "cause physique, c'est-a-dire 1'effet général dont ces effets particuliers dérivent." (260) Et lorsque l'on cherche les lois qui régissent dans 1a nature, lorsque L'on veut expliquer les faits en montrant de quelle manigre ils dépendent des lois, il faut chercher ces effets généraux que "sont pour nous les vraies loix de 1a Nature;...". (261) Si la vérité physique ainsi congue n'atteint pas 1"évidence des mathématiques, quel sera le standard de sa véracité? D'aprés Hume, en ces mati®res il n'y a que du probable, 1a raison a priori étant en faillite. Mais c'est ici que 1'on peut dégager un deuxi®me sens du con- es d'assurances et leurs calcu~ cept de probabilité, celui des compa: lateurs au XVIle sci@cle. La probabilité devient vite une discipline théoretique des mathématiques, et Buffon lut-méme en sera intrigué dis : ne serait-il pas élu "ad- sa jeunesse (c'est Cramer qui 1"initiera Joint mécanicien" A 1'Académie royale des sciences de Paris grace au travail qu'il envoya @ cette Académie, un ans auparavant, en 1733, sur 234 Je. jeu du frane-carreau? (262) Dans le troisitme volume de 1'Histoire naturelle, présenté en 1749, i1 publiera une table "des probabilités de 1a durée da 1a vie" pour accompagnier L'article "De la Vieillesse et de la Mort", table dressée par M. Dupré de Saint-Naur de 1'Acadénte francaise, sur les registres de douze paroisses de la canpagne ainsi que trois de Paris, Mais comment pouvait-on appliquer cette notion mathématique de la probabilité 4 1'épisténologie? Selon sa connotation de "vraisenblance", qui senblait miewx convenir aux "hypoth®ses" en physique, 11 lui était impossible d'espérer atteindre une certitude queleonque. "Omnis scientia est cognito certa & evidens", disait Des- cartes. "Atque ita per hane propositionem rejicinus illas omes proba- biles tantim cognitiones, nec nisi perfect? cognitis, & de quibus du- bitare non potest, statuimus esse credendum." (263) Réduit A adnettre qu'en philosophic naturelle il n'y a pas de dé- monstration a priori possible, Hume cherche aussi une autre méthode pour dénontrer quelque semblance de certitude & nos croyances. C'est Ace moment qu'il introduit la notion de probabilité qu'il emprunte A Locke. Locke avait admis 1a nécessité de discerner les degrés de probabi- 1ité & propos des idées dont 1a Matson n'était pas dénontrable. Lors~ que les idées ntont que 1'apparance d'accord ou de désaccord, ¢'est-a- dire dont la connexion n'est pas constante et immuable, il faut analyser Jes moyens par lesquels 1'esprit peut juger de la véracité d'une pro- position. (264) Et, comme le remarquera Locke dans le chapitre suivant, clest A cette notion de probabilité qu'il faut recourir "concerning some particular existence, or, as it is usvally termed, matter of fact...". (265) Dans le cas ot les expériences, toujours constantes et jamais en défaut, de homme concourent, les probabilités "rise so near to certainty, that they govern our thoughts as absolutely, and influen- ce all our actions as fully, as the most evident demonstration; and in what concerns us we make little or no difference between them and cer- tain knowledge. Our belief, thus grounded, rises to assurance." (266) Lexemple qu'en donne Locke est significatif; c'est bien L'origine de toutes les pensées de Hume. "Such are all the stated constitutions and uses and effects properties of bodies, and the regular proceedings of ¢ 235 in the ordinary course of nature. This we call an argument fron the nature of things themselves. For what our own and other men's constant observation has found always to be after the same manner, that we with reason conclude to be the effect of steady and regular causes; though they come not within the reach of our knowledge." (267) Hume reprendra ces considérations dans son chapitre du Treatise "Of the probability of causes" (268), accentuant L'argunent de Locke (269) que c'est la conformité de notre connaissance, 1'vniformité et constance de notre expérience dans 1a production de certains effets, n'ayant jamais trouvés dlirrégularité dans leurs opérations, qui font augmenter les probabili- tés de 1a véracité de nos croyances et de nos affirmations. Voila que nous rejoignons les critiques de Voltaire et de Nauper- tuis & propos du statut de la force d'attraction. Ils ont pu soutenir la probabilité de cette cause par 1'intégrité du systéme. Maupertuis admet qu'il ne peut pas prouver qu'il y ait de ‘attraction dans 1'uni- sibs vers; sa tache n'était que de démontrer sa Lté métaphysique. si elle ne renferme ni impossibilité ni contradiction, on peut (270) Apres examiner librement si les phénoménes 1a prouvent ou non. avoir présonté le syst®me cartésien et celui de Newton, il conclut que "c'est maintenant au Lecteur 2 examiner si l'attraction est suffisan- ment prouvée par les faits, ou si elle n'est qu'une fiction gratuite dont on peut se passer." (271) Par sa critique des vérités mathénatiques, par 1a nouvelle signi- fication de la théorie de la probabilité, Buffon peut affirmer la cer~ titude d'une vérité physique. Si L'attraction n'est pas une qualité physique, mais seulement une entité mathématique, elle n'avait pas assurément d'essence stable dans 1a nature des choses. Berkeley 1'avait bien dit, mais justement pour nier son existence réelle, (272) I la (273), ce qui n'est pas du niait en ce qu'elle représentait une la nouvelle per- domaine de la physique & déterminer. (274) Mais d spective épistémologique issue de 1a "solution au scepticisne" de Hume, et avec les nouvelles considérations de 1a notion de causalité, les conclusions de Berkeley sont défaites. Le physicien n'a pas A se borner A Gtablir les lois pour décrire 1a connexion des effets. Les notions abstraites des mathématiciens ne dominent plus en mati®re de "principes 236 mécaniques." (275) Distinguer le réel de 1'arbitraire, reconnaftre clairement les propriétés appartenant & la nature de celles que l'on lui préte, voil& les fondenents de 1a vraie méthode des sciences. (276) C'est en prenant 1'attraction pour une hypothése mathématique que Clairaut avait &té aseat 3 ses “erreurs scavantes". Clest en Stant des principes mécaniques leur fondement dang la réalité par moyen d'ab- , straction que d'Alenbert avait été anené A ses "paradoxes" (277), c'est en ignorant le vrai lien entre les mathématiques et la physique que Lon est amené & des “questions insolubles des Sciences abstraites" (278), & ne pas reconnaftre ses préjugés et ses incertitudes (279); par 1a nouvelle épistémologie des sciences espérimentales "on viendra alors & s'étendre sur la Métaphysique des sciences...". (280) Voila un nouveau statut pour la science, légué par Hume, Si Berkeley s'attaque aux bases de 1a philosophic naturelle pour faire renonter a 1a philo~ sophie premi&re, ou la métaphysique, 1"étude des choses incorporelles, Jes causes, la véracité et 1'éxistence des effets, dans le but de cher cher le si&ge actucl des forces ou des puissances actives dans un royaune plus haut (281), lume veut stattaquer & 1a notion de cause elle- méne, pour restaurer, par 1'épistémologie de 1a croyance et la probabi- 1ité, aux sciences expérimentales "La connaissance de toutes les véri- tés qui sont du ressort de I'esprit hunain", pour emprunter une formule B Buffon. (282) "If we take in our hand any volume ~ of divinity or school metaphysics, for instance ~ let us ask, Does it contain any ab~ stract reasoning concerning quantity or numbers? No. Does it contain any experimental reasoning concerning matter of fact and existence? No. Commit it then to the flames, for it can contain nothing but sophistry and illusion." (283) Ces derniers mots de Hume rejoignent 1a conclusion de Buffon, ayant déterminé 1a nature des vérités physiques et des vérités nathé- matiques, ainsi que les limites de 1'évidence et da la certitude qu'elles importent, ayant aussi esquisé 1a notion de probabilité en mati8res de connaissance, passons 2 la néthode méne que Buffon veut instavrer A la lumidre de cette nouvelle Métaphysique des sciences. NOTES AU CINQUIEME CHAPITRE ee (2) Bacon, Novum organum (n° 845), I, xliv; 164-165. (2) Ibid., 1, Ixits 1735 xiv & Ivy 174-176. (3) Buffon, 0.P. 23 B 20-21. (4) O.P. 23 B 35-40. (5) 0.P. 26 B 18-20 (6) Bacon, Novum organum (n° 845), xliv; 164, Nous soulignons. (1) Buffon, 0.P. 23 B 40-45. (8) La Nettrie, Histoire naturelle de 1"fine (n° 997), 133-134. (9) Buffon, 0.P. 24 A 7-21. (10) O.P. 25 B 5-26 A 6. (QD Le ménoire fut publié dans les NARSP de 1"année 1745, qui ne parut qu'en 1749. Voir (n° 370) de notre bibliographic. (12) Newton, Principes mathématiques de la philosophie naturelle (no 1177), I, 150-151. (13) Ibid., IT, 12. 24) Clairaut, "Du Syst@me du monde" (n® 370), 547-548. (15) La nouvelle expression de la loi que Clairaut proposait était: a.m Bout (16) Voir les Registres de 1"Académie, séance du 20 janvier 1748, p.17, et celle du 24 janvier 1748, pp.18-26. Le némoire, ainsi que toutes Jes réponses, soit de Clairaut, soit de Buffon, qui suiveront, furent également publiées dans les MARSP de 1745 (1749). Voir les (n° 11), (m9 12), (n° 13), et les (n® 365) & (n° 368) de notre bibliographic. (27) Clairaut, "Réponse aux Réflexions de M. de Buffon, sur la Loi de LAttraction & sur le mouvement des Apsides," Registres de 1'Aca mie, séance du 17 février 1748, pp,.51*-62. MARSP 1745 (1749)? 52: 48. Hanks, dans son Buff. t1 aturelle" (n° 198), précise dans sa bibliographie que Buffon n'a pas présentésou texte devant 1'Académie, et qu'il 1'a fait imprimé sans autorisation. La date présumée est de novembre 1748. (18) Cette dernitre volée se rapporte 31749. Est lu le 17 mai un “Aver= tissement de M, Clairaut, au sujet des Mémoires qu'il a donnez en as) (20) (1) (22) (23) (24) (25) (26) (27) (28) (29) 238 1747 & 1748, sur le syst®me du Monde dans les principes de 1'Attrac~ tion" qui apparait dans les MARSP 1745 (1749): 577-578. Les Registres de l'Académie pour le 11 juin 1749 (pp. 301-302) rend compte de la "Réponse & la réplique de M. de Buffon", publige la néme année (578- 580): le méme jour Buffon lit sa "Seconde addition au mémoire [etc.]" (UARSP 580-583; Registres de 1'Académie, séance du 21 juin 1749, pp. 319-320). Le dernier not dans les Mémoires est celui de Clairaut: "Réponse au nouveau Mémoire de M. de Buffon" (583-586). Nous deman- dons pardon de ces détails ennuyeux de bibliographie; 1a grande in- portance de préciser les dates deviendra claire par 1a suite. Buffon, "Seconde addition" (n° 13), 580. Buffon, "Réflexions sur la Loi d'Attraction" (n° 11), 497. Ibid. , 500. Ibid., 496-497. : Ibid., 497. Clairaut, "Réponse aux Réflexions" (n° 368), 542-546. Apr&s 1a "Seconde addition", Buffon ne répliquera plus pour défendre les raisons métaphysiques d'une loi qui exprime L'attraction par un seul terme dans les MARSP; plutét il consacrera la partie finale de son Premier discours ces considérations. D'aprés sa lettre & Jal. labert, le discours fut déja préparé pour lecture devant 1'académie des sciences pour 1a saison 1744/1745. (Voir pp. 29-30 ci-dessus) Mais ce mémoire préparé en 1744 ne senble avoir occupé que de 1a classification, en particulier celle de Linné, dont le Sy: tura vient de paraftre dans 1a grande 6dition parisienne de 1744 (oir (n° 562) de notre bibliographic). Cette derniére partie du Premier discours dc 1749, est-clle une addition issue de 1a contro- verse avec Clairaut? Avant l'automne 1748, la date la plus tardive qui puisse étre accordée 4 1'inpression du premier volume, nous avons les "Réflexions” de Buffon et 1a "Réponse" de Clairaut. La premitre addition de Buffon date, supposément, de cette méme époque. Ne serait-il possible que Buffon avait glissé quelques pages & ce discours de 1749, déja préparé? Ou bien, y a-t-il une autre raison de cette partie? Buffon, "Réflexions" (n° 11), 497. . Séance du 9 février 1743; suite, les 2 et 6 mars, selon les registres. Ces précesions viennent de Hankins, "Introduction" & la réimpres~ sion de 1'édition de 1758 du Traité de dynamique (n° 839), xvi. Histoire rapportée par Nadault de Buffon dans ses notes 8 la Cor~ respondance (n° 29), I, 274, (30) (31) (32) (33) (34) (35) (36) (37) (38) (39) (40) «ny (42) 43) (44) (45) (46) «ary 239 Ibid. D'Alembert, Traité de dynamique (n° 838), "Préface", i. Pour d'Alen- bert, les "simples hypotheses" ne sont que "de pure supposition", Tbid., x. bid., xviij. Ibid., xvi. Par exenple, dans les trois essays qui suivra: la théorie de la terre, la génération, 1'anthropologie. D'Alenbert, "Discours préliminaire," Encyclopédie (n® 835), xxviij. Ibid., xxvj. Ibid. Nous sonmes étonnés de 1'objectivité de ces remarques; leur justesse a &té reconnue de notre époque par Alexandre Koyré, "New- ton et Descartes” in oniennes (n° 1360), 93, qui fait une étude détaillée d physiques que Newton a emrunté de Descartes. que (n® 839), "Préfac > J-aj. D'Alenbert, Traité de dynat Descartes, Regulae (n® 912), Ragle IT; 365. Ibid., 365, 11. 16-19. D'Alembert, Traité de dynamique (n° 832), "Préface", ij-iij. Dans les Regulae Descartes distingue entre le "matheseos" et les "nathematica”. D'aprés le contexte, il est manifeste que le premier ‘a le sens d'une "science universelle", qui fait le sujet du texte présentement cité, et que le deuxiéme, les différents "integumenta" de la science plus générale, soit lalgdbre, soit la géonétrie, soit L'optique, etc. Voir en particulier Regulac, 378, 11. 4-11: “ac proinde generalem quadan esse debere scientiam, quae id onne explicet, quod circa ordinen é mensuram nulli speciali materiae addictam quaeri potest, eandemque, non ascititio vocabulo, sed jan inveterato atque vsu recepto, Mathesim vniversalem nominari, quo~ niam in hac continetur illud omne, propter quod aliae scientiae Mathematicae partes appellantur." (nO 912), R&gle IV; 374, 11. 7-12. Descartes, Regulac Ibid., VI, 381, 11. 8-9, Ibid., XIV; 440, 11. 2-9. D'Alembert, Tra (n° 832), "Préface", x-xi. 240 (48) Buffon, "De la Nature de 1'Honme," 0.P. 294 B 27-28. (49) O.P. 294 B 38-45. Voir également "Premier discours," 0.P. 23 A 5-15. (50) 0.P. 10 A 19-22. (51) Descartes, Regulae (n° 912), XIV; 440, 11. 16-20. (52) Ebid., 11. 21-27. (53) D'Alembert, Traité de dynamique (n° 838), "Préface", vij-viij. (54) Ibid., 43. (55) Ibid. Dans la deuxi&me édition de 1758 d'Alembert ajoute des exen- ples de ces propriétés sensibles: 1"impénétrabilité, la nature du mouvement, le principe métaphysique des lois de la percussion (p.ij). (96) Buffon, 0.P. 25 B 4h-46. (57) Est-ce une référence directe & d'Alembert, A son Traité de 1743, mais aussi au Traité de 1'équilibre et du mouvenent des Fluid (n® 840) de 17447 (58) Rappelons-nous que c'était d'Alembert qui avait dit que les sciences “gui traite du calcul des grandeurs, & des propriétés 1étendue... [étaient] marquées au sceau de 1'évidence dynamique (n 838), j-25. (59) Buffon, O.P. 26 A 11-19, (60) 0.P. 26 A 20-29. (61) D'Alembert, Traité de dynamique (n° 838), "Préface", xj-xij. Benal d"évoquer Buffon & ce point! (63) Cité ci-dessus a la p. 15, note 15. La "probabilité", et le prin- cipe de continuité sur lequel elle s'appuic, seront des causes d'une critique permanente de Lefbniz contre les théses cartésiennes. (64) D'Alembert, "Discours préliminaire," Encyclopédie (n° 835), xxxj. (65) En particulier, 1a notion de liaisons et de rapports entre les Sci~ ence, qui suit la continuité de la nature, aura une résonance bien buffonienne, "La Natrc, nous ne saurions trop le répéter, n'est composée que d'individus qui sont l'objet primitif de nos sensa- tions & de nos perceptions directes. Nous renarquons & la vérité dans ces individus, des propristés communes par lesquelles nous les conparons, & des propriétés dissenblables par lesquelles nous les discernons; & ces propriétés désignées par des noms abstraits, nous ont conduit A former différentes classes of ces objets ont été pla~ (66) (67) (68) (69) (70) 241 c&s. Mais souvent tel objet qui par une ou plusieurs de ses propri- étés a été placé dans une classe, tient a une autre classe par d'autre propriétés, & auroit pG tout aussi-bien y avoir sa place IL reste donc nécessairement de l'arbitraire dans la dividion géné- rale. L'arrangement le plus naturel seroit celui of les objets se succéderoient par les nuances insensibles qui servent tout a la fois A les séparer & A les unir. Mois le petit nombre d'@tres qui nous sont connus, ne nous permet pas de marquer ces nuances. ‘Univers n'est qu'un vaste Océan, sur 1a surface duquel nou apercevons quel- ques Tles plus ou moins grandes, dont 1a liaison avec le continent nous est cachée." Ibid., xv. Buffon, O.P. 24 A 41-52, Nous remarquons que mathesis se traduit incorrectement par le mot “mathématique". Il est vrai que les mathénatiquesfournissent le modele a la méthode cartésienne, selon ses propres aveux. Mais il n'est pas moins vrai que Descartes cherchait A trouver 1'unité A travers les sciences particuli@res, pour que leurs connaissances soient aussi certaines que 1a géométrie. La méthode s'occupe donc de 1a Science, la science universelle; ce dernier terme est une meilleure traduction. “Bt ainsi je pensai que les sciences des livres, au moins celles dont les raisons ne sont pas que probables, s'étant composées et grossies peu A peu des opinions de plusicurs diverses personnes, ne sont point si approchantes de la vérité que les simples raisonne ments que peut faire naturellenent un home de bon sens touchant des choses qui se présentent." Descartes, Discours de 1a néthode, (no 906), II; 13. Que les controverses scolastiques étaient en vain parce que seulement "vraisenblables", c'est un thme constant chez Descartes. On voit, par exemple, quelques pages plus haut: "Je dirai rien de la philosophic, sinon que, voyant qu'elle a été cul- tivée par les plus excellents esprits qui alent vécu depuis plu- sieurs siécles, et que néanmoins il ne s'y trouve encore aucune chose dont on ne dispute, et par conséquent qui ne soit douteuses, je n'avais point assez de présomption pour espérer d'y rencontrer mieux que les autres; et que, considérant combien i1 peut y avoir de diverses opinions, touchant une méne matiére, qui soient soute- nues par des gens doctes, sans qu'il y en puisse avoir jamais plus d'une seule qui soit vraie, je réputais presque pour faux tout ce qui n'était que vraisenblable." Thid., 8, 11. 18-29. Gilson note que L'emploie du terme "on ne dispute" rend transparente 1'allusion aux scolastiques. Remarquez que la moitié des passages que "!M. les Députés & Syndics de 1a Faculté de théologie" présenteront en 1751 comme Staat sujets A la censure, concerne le relativisme de la vérité. (0.2. 106-107) Descartes, Regulae (n® 912), R&gle XIT, 427 1.27-428 1.2: "Nullas rerum cogitationes was aliis obscuriores esse putandas, cum omnes ejusden sint naturac, et in sola reurm per se notarum conpositione consistant." 242 (71) Buffon, 0.P. 22 A 49-B 20. (72) 25-4 45-B 4. (73) 0.P, 26 B 21-34. (74) Voltaire, Let ¢ (n° 1247), Lettre XIV; 21. Vol- taire, bien q Jeterre pendant les années vingt, ne semble pas rendre justice de 1'état de affaires newtoniennes 2 1'in- téricur méme de ce pays. La cause peut avoir été sa volonté de con- battre le cartésianisme jusqu'alors résnant en France. Cependant il est regrettable qu'il n'eut pas considéré les arguments philosophi- ques d'un Berkeley, dont le De Motu, qui est paru en 1/21, montre des vrais problames que doit confronter une science dite "empirique” A propos des concepts de force, de grevitation et d'espace absolu. S'il n'a pas connu ce traité parce qu'il Stait obscure ou en latin, il a certainenent pu noter les Pri ledge 1710, qui contenait 1essentiel des critiques de Berkeley. (Voir en particulier les sections 97-98, 101-117.) La situation n'a pas changé chez Voltaire en 1738 lorsqu'il publie les Elémens de 1a philosophiedeNeuton, sauf que les opinions de "Barclay" sur la théorie de Ia vision sont intégrées dans les chapitres sur 1'opti~ que. Ti est pardonable qu'fl n'a pas connu Hume, dont les deux pre miers volunes du Tr re ne sont parus qu'A la fin de 1738 (bien que datés “London, 1739"). Cependant il semble qui 1'intérét primordial de Voltaire était de soutenir 1a philoso- phie naturelle de Newton contre les attaques des savants contincn- taux ~ contre les cartésiens en France ou les leibniziens en Alle~ magne, mais aussi, peut-@tre ici trop prés de son coeur, contre Madame du Chatelet, dont les Institutions de Physique parattront en 1740. Si Buffon était le chef du parti newtonien en 1740 (voir ci- dessus A la page 1, et n. 3), dix ans plus tard sa dévotion est une peu plus nuaneée, Nous évoquons Volatire seulement pour dénontrer qu'il s'est bien passé des choses che» Buffon entre 1a Préface 4 1a traduction de Newton et le "Premier discours" de 1'Histoire nat relle, évolution qui n'est point visible chez Voltaire. La nouvelle néthode ainsi que les nouvelles bases de 1a nétaphysique des science, Je retour a Bacon et l'empirisme A la manidre de 1'ilistoire naturelle, tous sugg®rent que Buffon a bien réfléchi sur les problémes que Ltattraction universelle avait posis. Du point de vue scientifique, nous avons étudié l'essentiel de son argumentation contre Clairaut et contre d'Alembert. Nous venoss maintenant aux fondements épisté- nologiques, et plutard les répercussions méthodologiques de ces controverses. (75) Newton, Prine: atiques (n° 1177), IIT, "Scolie générale"; IL, 179. GE. également, Newton, Opticks (n° 1176), 401. (76) Fontenelle, "Sur 1'Attraction Newtonienne" (n° 939), 116. Cet article de Fontenelle se rapporte au afnaize de Mewpertie, “Sur les Loix d'Attraction" (n° 1144). ici de Fontenelle se prouve @tre 1"'a~ justement de la lot arrester en ce qui concerne les particules 243 (77) Newton, Principes mathématiques (n° 1177), Déf. VIII; I, 7. (78) Ibid., IIT, Prop. II, Théor. II; II, 11. (79) Newton avait démontré mathématiquement que "la force centripete d'un corps que se meut dans une ligne courbe décrite sur un plan, & qui parcourt autour d'un point immobile, ou nf untfornément en ligne droite, des aires proportionnelles au temps, tend nécessaire- ment & ce point." Ibid., Livre I, Prop. II, Théor. II; 1, 52. Puis- que dans l'univers physique et réel la proposition tient, d'aprés la loi de Kepler, i1 faut qu'il y ait une force centripate. Mais selon la Ve définition cette force centripéte "est celle qui fait tendre les corps vers quelque point, conme vers un centre, soit qu'ils soient tirés ou poussés vers ce point ou qu'ils y tendent d'une fagon quelconque." Ibid., Déf. V; I, 3. Si Newton ne veut pas se prononcer sur la nature de cette force, i n'emp&che que dans son syst@me, la force doit étre présuner réelle et physique Il ne faut plus faire de Newton le positiviste par excellence, con- me on 1'a fait au sigcle dernier... (Voir note 89 ci-dessous.) (80) Buffon, 0.P. 25 B 14-22. (81) A propos de Hooke et I'attraction gravatique on peut consulter Koyré, Etudes newtoniennes (n° 1360), Appendice H "Newton et Des~ cartes", en particulier 220-221, ainsi que "Une lettre inédite de Robert Hooke A Isaac Newton" dans le méme recueil d'études. (82) Newton, Principes mathématiques (n° 1177); II, 179. (83) Ibid; IL, 179. (84) Par exemple: 1. Mtaphysique: 1'impossibilité de l'existence (phy- sique) des atones & partir de 1'hypothtse nétaphysique "de ce que nous connoissons clairenent & distinctement qu'vne chose peut estre diuisée, nous ferions de cette chose seroit contraire A la connois- sance que nous en auons." Descartes, Principes de la philosophic (x© 911), IT, 20; IX-2, 74, Hypothése physique: celle de 1a nature physique des corps (étant purenent étendue) et 1a conséquence d'une plénitude matérielle. Principes 11, 594 et 16; IX-2, 65 et 71-72. Hypothdse mécanique: 1a troisime loi de la nature, "Que, si vn corps qui se meut en rencontre vn autre plus fort que soy, il ne perd rien de son mouuement, & s'il en recontre vn plus foible qu'il puisse mouuoir, 11 en perd autant qu'il luy en donne." Principes II, 540; IX-2, 86. Hypothse des qualités voir le mots ménes de Newton (Ctes): "Ceux qui ont réel Tecours aux qualités occultes sont ceux qui, pour expliquer les mouuenens de la nature, font imaginé des tourbillons d'une matiére qu'ils forgent 3 plaisir, & qui ne tombe sous aucun sens." Newton, Principes mathématiques (n° 1177), "Préface"; 1, xxx. (85) Koyré, Etudes newtonicnnes (n° 1360), 63. (86) Descartes, Principes de la philosophic (n® 911), IIT, 443 1%-2, 123. 244 (87) Newton, Opticks (no 1176), 401. (88) CE. Lettre de Newton & Bentley, citée dans Gerd Buchdahl, Gravity and Intelligibility (n° 1293), 81. Notez que les lettres & Bent- Tey n'étaient publiées qu'en 1756, I1 est improbable que Buffon a connu ces lettres, néme en manuscrit, sauf si on les avait communi- quées (ou leur contenu) lors de ses recherches pour sa Préface sur le calcul infinitésinal. (89) Le terme "positive-agnostique” vient de Koyré: Etudes newtoniennes (n 1360), 198, Que la régle soit une grande erreur logique, c'est Ja position de Finocchiaro, "Newton's Third Rule of Philosophizing" (n® 1319). Nous ne considérons que ces deux auteurs pour illustrer notre contention. (90) Koyré, Etudes newtoniennes (n° 1360), 198-199. (91) Ibid., 200. » 201. (92) Ib; (93) Newton, Principes mathématiques (n° 1177), Régle III; 11, 4 (94) Ibid., 4. Discussion a suivre A la page 4 également. (95) Newton, Opticks (n° 1176), exxiii. (96) Ibid., 350. (97) Ibid., 376. (98) Newton, Principes mathématiques (n° 1177), "Scolie générale"; I1, 178-179. (99) Ibid., Déf. Vs I, 3. (200) Maupertuis, Discours (n° 1124), 98 et 94. (101) Par opposition & 1'avis contraire de Koyré, Etudes newtoniennes (n° 1360), 202. (202) Buffon, "Réflexions sur la Lois "Attraction" (n° 11), 497-498, (103) Ibid., 498. (104) Newton, Princtpes mathématiques (n° 1177), Préface de COtes; I, xxx. (205) Leibniz, Lettre & Hartsoeker du 6 février 1711. In: PI schen Schriften (n° 1027), TIT, 519. Lettre publiée pour la dans les Hémoire: anglaise dans les Nemoi1 Literature de 1712. Buffon a pu pren~ dre connaissance de 1a position de Leibniz pendant. ses recherches pour sa Préface & la traduction de Newton. oph fois s de Trévoux (1711), et ensuite dans une traduction (206) (107) (208) (209) (110) qi qu) (113) (14) ais) 16) 245 Privat de Moligres isique (n° 1192), IZ, 152. Ibid., 150-151. Privat de Moli’res, "Les Loix astronomiques des vitesses des Pla- netes dans leurs Orbes, expliquées méchaniquement dans le Systtme du Plein" (no 1193), 311. Fontenelle, "Sur 1a Conciliation des deux ragles astronomiques de Kepler dans le sisteme des Tourbillons" (n° 940), 95. Voir la Préface historique par Voltaire A la traduction de Newton par Nadane du Chatelet (Principes mathématiques (n® 1177), I, vij): "S'i1 y avoit encore quelqu'un d'assez absurde pour soutenir la natidre subtile & la cannellée, pour dire que 1a terre est un so- Jeil encrouté, que la lune a été entratnée dans le tourbillon de Ja terre, que 1a matire subtile fait la pesanteur, & toutes ces autres opinions romanesques substituées @ 1'ignorance des Anciens, on diroit: Cet honme est Cartésien, S'il croyait aux monades, ont diroit: Tl est Léibnitien; mais on ne dira pas de celui qui scait Jes lémens d'Euclide, Qu'il est Euclidien: ni de celui qui sgait d'aprés Galilée en quelle proportion les corps tombent, Qu'il est Galiléiste. Aussi en Angleterre ceux qui ont appris le calcul in- finitésimal, qui ont fait les expériences de la lumigre, qui ont appris les loix de 1a gravitation, ne sont point appellés Newto- niens: c'est le privilége de 1'erreur de donner son nom A une Secte." Leibniz, Correspondance Lei 98-99. larke (n° 889), 4e écrit, £45; Clarke, in ibid., 4e réponse, 545; 116. Clarke, ibid., 931; 114. Bien que ces mots, venant de l'article 18 du 4e réponse de Clarke, ibid., 112, entrent dans la discussion de 1a "liberté de Dieu" et Ta "raison suffisante", 1iées toutes les deux aux problémes de l'espace et le temps, nous nous croyons justifiés d'étendre 1"ana- th®me pour caracteriser, dans les yeux de Clarke, toute 1'argumen~ tation de Leibniz. Comparer avec le dernier article de cette 4e réponse: “If the word, NATURAL FORCES, means here MECHANICAL; then all ANIMALS, & even MEN, are as MERE MACHINES as a CLOCK. But if the word does not mean, MECHANICAL FORCES: then GRAVITATION may be effected by REGULAR & NATURAL Powers, though they be NOT MECHANI- CAL." Ibid, 116. Le passage en question est Locke, Essay, II, viii, 511; voir 1"édi- tion de Fraser (n° 1084), I, 171, 3 propos de ce passage. Locke's Reply to... Bishop of Locke, Mr. Loc Second Letter (no 1086), 408. qu7) ais) qs) (220) (21) 22) (23) (124) (125) (126) 27) (a28) (129) (130) a3) Locke, Essai (n° 1083), II, viii, §11; 90. Nous discuterons l'article 4 du chapitre wc, livre II: puissance", et l'article 28 du chapitre xxiii, livre IT idées complexes des Substances". Au contraire de l'article 28, lfarticle 4 fut sujet 3 des nonbreuses additions et révisions par- toutes les éditions du vivant de Locke. Locke, ibid, 11, xxi, §4; 182. Ibid., Il, xxiii, 528; 244. Ibid. Ibid., IV, iii, §29; 462. CE la fin de 1"0pticks (n° 1176), Query 31; 402. Le "Counsel of an intelligent Agent", pour rendre compte de l'Artifice magnifique de l'univers semble (Newton ne le dit pas spécifiquement) avoir créé les principes du mouvenent mentionnés au-dessus (c'est-B-dire, les Principes qui causent la gravitation, Ja fermentation, 1a cohésion des corps) "agent powerful and ever- living", qui "being in all Places, is more able by his Will to move the Bodies within his boundless uniform Sensorium, and thereby to form and reforn the Parts of the Universe, than we are by are Will to move the Parts of our own Bodies." C'est Justement l'activité de Dieu dans l'univers qui sera le sujet de l'une des plus impor- tantes polémiques dans le débat Liebniz-Clarke. Voir les articles 13 et 14 de 1a Troisi&me Réponse de Clarke: "That in the Case of a Humane workman making a MACHINE", ce qu'il contraste avec 1'univers, créé de 1"industrie divine, "the POWERS or FORCES by which the Ma- chine continues to move, are altogether independent on the Artifi cer." Gorrespondance Leibniz—Clarke (n® 889), 71. Fontenelle, "Eloge de HM. Neuton" (n° 935), 157. Ces renseignements viennent de Brunet, Maupertuis: phique (n° 1290), 10-12. Etude _biogra~ Fraser, Berkeley (n° 1323), 113. Berkeley, De Motu (n° 858), §17; 35. Pour faciliter la lecture, nous citons I'oeuvre de Berkeley dans 1a traduction anglaise qui acompagne le texte latin original dans les Works. Voir (n° 858). Maupertuis, Discours sur les 4 (n® 1124), 92. etres Berkeley, De Motu (n® 858), §522-23; 36-37. Ibid., 5245 37. Maupertuis, Discours (n° 1124), 96, Cf. Berkeley, D (n° 858), £31; 39: "From what has been said (132) 133) 34) 35) (136) 437) (138) 139) (140) 247 it is clear that those who affirm that active force, action, and the principle of motion are really in bodies are adopting an opi- nion not based on experience, are supporting it with obscure and general terms, and do not well understand their oun meaning." Que Lexpérience de ce texte pouvait étre comprise comme se rapportant exculisenent 2 l'expérience sensuelle par Maupertuis, ce n'était pas sans fondement. Berkeley part du principe que 1a gravitation, n'étant pas une "qualité sensible", est donc une "qulaité occulte" = ce qui est lui-mne une curieuse maniére de philosophiser... sauf si on comprend toute 1a philosophie ultérieure de Berkeley qui miera existence d'autre modes d'@tre que les "effets sensi- bles" dans 1'ame du sujet pensant. En ce qui concerne le De Motu spécifiquement, cependant, 1a critique de 1'attraction repose pres~ que uniquement sur le fait qu'elle n'est pas une qualité sensible. “and so men would do better to let the occult quality go, and at- tend only to the sensible effects." Berkeley, De Motu, 54; 32. De la m@ne mani&re, notre expérience (sensible) du mouvement ne nous permet pas de déterminer un principe de ce mouvement. Voir inmédiatenent ci-dessus, citation de De Motu, $31, ainsi que 540; 41: "We actually perceive by the aid of the senses nothing except the effects or sensible qualities and corporeal things entirely passive, whether in motion or at rest; and reason and experience advise us that there is nothing active except mind or soul." A vrai dire, Berkeley reconnait le réle de "la raison" dans "L'expérience". Reduire l'expéreince & des sensations c'est trop exagéré de notre part. Mais lorsque nous raisonnons & partir des sensations nous faisons des "abstractions", ce que Berkeley rejetera conne étant des inventions de l'esprit, peu utiles dans la compréhension de la réalité. Nous abstinons d'entre dans une longue étude sur le réle que la "raison" peut avoir eu dans la structure de la science selon Berkeley, car nous croyons qu'il a mené son argument contre les "abstractions" pour exclure cone "incompréhensible" ce qui bon le lui semblait, mais "raisonnable" en ce qui concernait le spiritu- alisme de sa théocracy. Maupertuis, Discours (n° 1124), 96-97. Ibid., 97. ‘Soul, mind and spirit" dirait Berkeley. De Notu (n° 858), £30; 38. Locke, Essay IV, iii. Locke nous revoie au chapitre x du méme livre. Passages cités: II, 193, Voir Berkeley, De fotu (n® 858), $526, 67 et 70. Maupertuis, Discours (n° 1124), 98. Ibi » 99. CE. Corenoy, Le Discernenent dv corps et de Mame (n° 903), cité par Mouy, Le ‘oppement de la phys rtésienne (n° 1391), quai) (442) (143) (144) (4s) 446) 47) 4s) (149) (150) asi) (152) (153) (154) 248 105: "Ce qu'on doit entendre, quand on dit que les corps meuvent les corps, c'est qu'étant tout impénétrables, et ainsi, les ménes ne pouvant toujours @tre nds du moins avec une égale vitesse, leur rencontre est une occasion A l'esprit qui a mi les premiers de mou- voir les seconds." Crest causes occasionnelles vont @tre reprises par Malebranche. Maupertuis, Discours (no 1124), 100-103. Ibid., 103. Ibid., 103. Prochain article §3, Maupertuis exposera les difficultés présentées par Newton dans les Principes mathénatiques. Maupertuis, Discours (no 1124), 104. Le vrai texte de Maupertuis est le suivant: "J'exposerai ensuite le syscéme de Newton, autant que je pourrai faire, en le dégageant de ces caleuls qui font voir [ete.]." Il ne faut pas oublier que ce Discours a été provoqué par 1a con- troverse entre les newtoniens et les cassiniens & propos de la figure de la terre. Ce n'est que quatre ans aprés le Discours que Maupertuis dirigera 1'expédition en Laponie avec, entre autres, Clairaut, pour déterminer L'are du méridien au péle. L'expédition au Pérou de Godin, Bouger et La Condamine entre 1735 et 1744 con- firmera "& mervetlle" 1a théorie de Newton! Maupertuis, Discours (n° 1124), 121. > 93. CE. ibid., 93: "Tout se devroit done réduire & examiner s'il est vrai que les corps aient cette tendance les uns vers les autres: & si l'on trouve qu’ils aient en effet, on peut se contenter d'en déduire L'explication des phénonénes de 1a Nature, laissant a des Philosophes plus sublimes la recherche de la cause de cette force. Ibid., 161. Voir le début de la "Lettre de Voltaire aM. de Naupertuis sur les Eléments de 1a philosophie de Newton" (n° 1246), 753 A: "Apr2s vous avoir renereié des lecons que j'ai recues de vous sur la philoso- phie newtonienne, voulez-vous bien que je vous adresse les idées qui sont le fruit de vos instructions?" Derniers mots de la Défense du newtonisme de 1739 (n° 1238), 753 A. Tbid., 750 A. Cél@bre fin de la XVe Lettre, Voltaire, Lettres philosophiques (ass) (156) (as7) (158) (159) (260) 61) (162) 249 (n° 1247), 26 A. On notera que Voltaire comenca cette conslusion par les mots "Newton aurait pu répondre & ces eritiques:...". Nous devons faire attention les propositions qu'aurait pu répondre Newton ~ elles sont celles de Maupertuis, et non pas des réponses trouvées dans les textes des Principes mathématiques ou de 1'Opti- que eux-néme. Voyez, par exemple, la deuxitme proposition mise dans 1a bouche de Newton: "Secondement je n'ai pas pu admettre L'impulsion; car il faudrait pour cela que j'eusse conn qu'une matigre céleste pousse en effet les planétes; or, non seulement je ne connais point cette matiare, mais j'ai prouvé qu'elle n'existe pas." Ibid., 26 A. La pensée de Newton sur l'existence de léther Stait bien publique & cette époque, comme nous avons vu A la fin de 1'0pticks. Mais cette proposition, qui en dépend d'une premi®re: "vous n’entendez pas plus le mot d'impulsion que celui d'attraction, et si vous ne concevez pas pourquoi un corps tend vers le centre d'un autre corps, vous n'imaginez pas plus par quelle vertu en corps en peut pousser un autre" (ibid.), ne pouvait pas venir de Newton, qui a manifestement essayé de proposer un mé: canisme percussif de l'attraction. L'augument logique vient d'em- blée de Maupertuis. Voltaire, Défense (n° 1238), 751 B. Au dernier article des Eléments (no 1246), III, xii; 746 A, Vol- taire cite le texted> la Scolie générale en traduisant ces mots par? "Je ne fais point d'hypothése", 1a traduction adoptée par Madame du Chatelet en 1756. La source de Voltaire est apparemment 1a ver- gion bilingue de 1a Correspondance Lei ‘larke, parue en 1717, [A Collection of Papers which passed Leibniz and Dr. Clarke, in the Years Principles of Natural Philosophy and Religion, with an Appendix... by Samuel Clarke..., London: James Knapton, MDCCXII; 1a traduction francaise est de N. de La Roche] ot, dans une note aux articles 110-116, & propos de laccusation que l’attraction soit une miracle, Clarke ¢ite en défense de Newton une partie de la Scolie générale. Du latin, il rend les mots célébres par l'anglais: "And Hypotheses I make not", ce qui devient dans la traduction frangaise "et je ne fait point. d'Hypothéses." Voltaire, Eléments (n° 1246), "A Mme la Marquise du Chatelet. Avant- propos", 668 B. L'ordre de la phrase est inverti. Ibid. Tout ce développement se trouve 2 ibid., III, iv; 729 B. Thid., TIT, 44%; 728 A. Voltaire, Lettres philosophiques (n° 1247), Lettre XV; 26 B. Voltaire, Eléments (n° 1246), IIT, 111; 727 B, mot souligné par nous. (163) (164) (165) (166) 67) 68) (69) azo) am 72) 73) a7) (75) 76) a7) 7s) a7s) 250 Ibid., III, iv; 728 B. Voir , I, is 674 A: Toute 1a philosophie de Newton conduit nécessairenent A la connaissance d'un Etre supréne, qui a tout créé, tout arrangé librement." Les sujets métaphysiques que le newtonisme discute sont exposés dans tout le prenter livre des Eléments, Il n'est pas nécessaire d'entreten détails ici. ‘Ibid., I, x} 689 A. ‘Ibid. Voltaire, Lettres philosophiques (n® 1247), XV, 26 B; nous soulignons. A cette époque, au moins. Voir les articles XXIV-XXV de Maupertuis, “Examen Philosophique de 1a preuve de l'existence de Dieu employée dans 1'Essai_de cosmologie" (n° 1129), de 1756. Hume, Vie de David Hume Scrite par lui-néme (n° 974), 13-14. Reseignements de la publication des ouvrages de Hume sont dispo- nibles dans The Life of David Hume (n° 1390) par Mossner. A propos des Philosophical Essays (nom primitif de 1"Inguiry concerning Human Understendiag), voir les pages 207 et 232. Sur les revues continentales, p.227. Monod-Cassidy, Un Voyagour-philosophe... Le Blane (n° 1384), 89. En 1748, Montesquiev 1it les Essays Moral and Political de Mune, et lui envoie un exemplaire de son Esprit des Lois. En échange, Hume lui offre les Philosophical Essays, avec une lettre datée du 10 avril 1748 (lettre publiée par Greig, in: The Lettres of David Hune (n° 971), I, 133 et suiv.), La réponse de Montesquieu est 1a Tettre du 19 mai, publiée par Burton, Letters of Eminent Persons to David Hume (n® 975), I, 456 et suiv. Le Blane A Hune, le 30 aofit 1755, in: Greig, Letters (n° 971), 1, 226. Hume, Vie de David Hume (n° 974), 9. Cassirer, Das isproblem in der Philos der neueren 7 300), 423 et suiv. Maupertuis, "Les Loix” (n© 590); voir aussi (n° 1134). Voir Oake, "Did Maupertuis read Hume's Treatise?" (n° 1395). Maupertuis, Essai de Cosnologie (n° 1127), “Avant-propos", vi-vit. Maupertuis, "Examen" (n° 1129). Citée est la sect. xxiv, 406. Mertz, “Les & (n° 1381), 699. Frangaises de Hume et le mouvement des idées" 251 (180) Biblioth&que britannique (n° 1269), oct., nov., déc. 1739. Vol. 40, preni@re partie, 216. asp jan., £6v., mars 1740. Vol. 40, 2e partie, 436. (182) Biblioth&que raisonnée (n° 1271), avril, mai, juin 1739. Vol. 22, 2e partie, 481-482. (183) Mossner, "The Continental Reception of Hume's Treatise" (n° 1389), qui nous a fourni les indications sur les revues continentales. Voir égalenent son The Life of David Hume (n° 1390). (184) Bibliothque raisonnée, avril, mai, juin 1740. Vol. 24, 2e partie, BV, 324-355, (185) Ibid., avril, mai, juin 1741. Vol. 26, 2e partie, $VIII, 411-427. (186) Ibid., 1740, Vol. 24, 2¢ partie, 326 et 328, (187) Ibid., 329-334. cass) 334-349. (189) qbid., 350-351. (190) 351-353. asi) 353-355. (192) Ibid., 481-482. Hume, Abstract of 2 Book (n° 967) (493) No Je bib: thBque (n° 1277), 1739. Vol. 4, 302. (194) Ibid., 1740. Vol. 6, 291-316; 1740, Vol. 7, 44-63. 454 B 25-26. (195) Buffon, 0.?. (196) Registres de 1'Académie des sciences. Séance du 23 décembre 1738, f. 199 ve. Selon Hanks, Buffon avant 1'"Histoi srelle" (n° 198), 108, Buffon commence a préparer 1a préface en février 1738. La tra~ duction anglaise de Colson que est 1a base de celle de Buffon date de 1736. (197) Voir ci-dessus, p. 1, 2 lan. 8. (198) Voir Brown, Buffon and + ne Royal Society of London (n° 119). (199) Qu'il soit élu membre de cette société, voir ci-dessus p. 1, a la ne 9 (200) Sur les expériences faites ensendle, voir Needham, servations (n® 1165), 145; volr également Roger, Les § ja (n® 1406), 498. 252 (201) Le premier, de 1745, est cité dans l'article "De 1a puberté," H.N. II, 514; le second, dans "De 1'Age viril," 0.P. 303 A note, est de 1747, tous les deux publiés 4 Londres. (202) Voir ci-dessus, n. 11 A 1a page 2, pour les références exactes. (203) Une derni@re possibilité est que Hume a rencontré Buffon person- nellenent pendant un de ses séjours en France. I1 séjoura de 1734 2 1737, 1'époque de 1a rédaction méne de son Treatise, installé pour la plupart a La Fléche, quoiqu'il se promena a Paris et a Rheims. Une deuxitme possibilité, plus proche 4 Buffon, se trouve lorsque L'ambassade du général Saint-Clair, dont Hume faisait par- tie 4 Turin, quitta cette ville pour rentrer en Angleterre, par la voie terrestre, en passant par Lyons et Paris, le 29 novembre 1748. @ossner, Life of David Hume (n° 1390), 210 et suiv.) S'ils se sont rencontrés & une de ces époques, pourquoi n'en parlent~ils, ni l'un ni lature? La facon dont Hume décrira sa rencontre éventuelle avec Buffon nie la possibilité de toute fagon. (Voir sa lettre A Hugh Blair de 1765 citée ci-dessous.) (204) Ces renseignements sur la publication du Treatise viennent de Mos sner, Life of David Hume (n° 1390), 213. (205) Nous n'avons pu trouvé de trace & la Bibliothque nationale de Paris. Buffon, nous le savons en ce qui concerne les récits de voyages, a souvent consulté des ouvrages de la bibilothaque du roi. (206) Voir 1a lettre que Hume adresse A Hugh Blair, datée de Paris, le 28 décenbre 1765, in Grieg, Letters of David Hume (n° 971), I, 530. (207) Voir 1a lettre de Buffon Hume du "Dimanche" 24 mars 1765, repro- duite par Milliken, Buffon a i the ish (n° 220), 452. m (208) Hume & Adam Smith, 1 aoft 1766. In: Grieg, Letters (n° 971), II, 82 et suiv. (209) Buffon & Hume, le 4 aoft 1774. In: Burton, Letters of Eminent Per- sons to David Hume (n° 975), 306. (210) Hume, Treatise (n° 973), I, iv, $4; 183. (211) Le terme "mitigated skepticisn" est de Citation: Treatise (n° 973), I, iv, $vi "Inquiry (n° 970), 170. 273. (212) Hume, Treati I, isi, 15 69 et suiv. Nous utilisons 1a terminolo~ gie de I"inguiry (n° 970), 40-41, Citation Inguiry, 41. (213) Mure, Inquiry (n° 970), 40. Nous avons invoqué Leibniz seulenent cone une “nesure" de la logique classique, syst@me dans lequel Hune travaille, (214) Locke, Essay (n° 1084), IV, iii, $29; IT, 222 253 (215) Ibid. (216) Ibi Ideas souligné par nous, (217) Dans le Treatise (n° 973), 1a iif section du livre I, part tii, intitulée “Why a cause is always necessary" est un examen logique de la position de Locke, ainsi que Clarke et Hobbes, qui ne se trouve pas dans 1'Inquiry de 1748. (218) Tbid., T, 411, $414; 79. (219) Newton, Principes mathématiques (n° 1177), "Scolie générale"; II, 178. (220) Hume, Inquiry (n° 970), 43. Nous citons de 1'Inquiry parce que Jexpression 1a plus succincte de 1'argument de Hume. Voir Tre tise (n° 973), 1, iii, §xiv "Of the idea of necessary connexio 162-172. (221) Hume, Treatise, I, iii, Sidi; 82. (222) Ibid., I, 144, Sxv; 179. (223) Cette interprétation est soutenue par le premier paragraphe méme de cette partie: 1. "La vérité, cet étre métaphysique..." (Buffon, O.P. 23 B 20). Les mots qui ouvrent ce paragrapht refl@tent 1a pré- occupation du Treatise de Hume. La vérité est un étre si métaphy- sique que ilune est anené au scepticisme. 2. "Les préjugés & les fausses applications se sont multipliez & mesure que nos hypoth8ses ont été plus savantes, plus abstraites & plus perfectionnées;..." (O.P. 23 B 25-29). Nous avons démontré que les "hypothéses" en question sont celles % propos de 1a force d'attraction & partir des controverses nenées avec Clairaut et d'Alembert. 3. "il est done plus difficile que jamais de reconnoftre ce que nous pouvons scavoir, & de le distinguer nettement de ce qui nous devons ig- norer." (0.P. 23 B 29-32) Voila, nous avons vu, le probléme cen- tral du scepticisme humien. (224) Voir 1a letter de Descartes au Pére Mersenne du 16 octobre 1639. Oeuvres (n° 910), II, 596-598. (225) Voir ci-dessus n. 66. (226) Descartes le niera. Dicu a créé les vérités, qui sont indépendantes de lui, conme il a établit les lois de la nature. Voir la lettre A Mersenne du 15 avril 1630. Oeuvres (n® 910), I, 145. (227) Etant créées par Dieu, et Dieu n'étant point trompeur, nous avons la garantie que les propositions que nous pouvens savoir par intut- tion (et par conséquent par déduction) sont vraies. (228) Cf. Nalebranche, Rech Fr (no 1112), VL,4, vs 11, 183, (229) (230) (231) (232) (233) (234) (235) 234 qui distingue luf-aussi différentes "sortes" de vérité. "I1 y a des rapports foudes vérités] de trois sortes. Il y en a entre les idées, entre les choses et leurs idées, et entre les choses seule~ ment. Tl est vrai que deux fois 2 font 4 : voila une vérité entre les idées. I1 est vrai qu'il y a un soleil: c'est une vérité entre la chose et son idéc. Il est vrai enfin que la terre est plus grande que 12 lune: voila une vérité qui est seulement entre les choses. De ces trois sortes de vérités, celles qui sont entre les idées sont éternelles et inmuables et, @ cause de leur inmuabilité, elles sont aussi les ragles et les mesures de toutes les autres; car toute ragle et toute mesure doit tre invariable." Francois Bernier, Abrégé de 1a philosophic de M. Gassendi (n° 867), I, xv, 153. Mouy, Développement de 1a physique cartésienne (n° 1391), 244. TI cite de Newton, Principes mathénatiques de 1687, 4-5. Evidennent que pour Malebranche, 1'attraction est une supposition gratuite .Ce sont les petits tourbillons que représentent 1a nature physique. Nous avons discuté ci-dessus 1'histoire de la transfor- nation de 1a notion d'attraction d'une hypoth@se mathématique 3 partir d'une qualité physique. Ce qui nous importe ici est la dis~ tinction entre "vérité mathématique" et "vérité physique". Malebranche, Recherche de la vérité (n° 1112), VI, ii, vidi I1, 272, Buffon, 0.P. 25 B 32-35. Retardement nécessaire si l'on adnettait des tourbillons. A propos de 1a premidre partie de cette phrase, nous avons vu que Nalebranche contestait 1a proposition. Buffon, 0.P. 25 B 51-57, puis O.P. 26 A 11-27. I1 est curieux que nous retrouvons chez Buffon, d'une forme moderne, la structure de la science aristotélicienne. Le ciel, qui est le domaine du vrai et de l'immuable, (l'astronomie de Newton... et optique en ce qui concerne 1a lumi&re, pour Buffon), est bien distingué du monde sub-lunaire, celui du probable. Tei-bas nous somes régis par la contingence, dans un mouvement perpétuel du flux. Descartes a fait de son mieux pour renverser cette attitude d'Aristote, et pour faire en sorte que le vrai et le faux soit le seul ressort de la science entiare, en Gtant 1a possibilité du pro~ bable. Aristote concevit le monde en naturaliste, et non pas e: nathénaticien, au contraire de Descartes. Selon Buffon lui-néne, clétait peut-étre 1'Histoire des animaux d'Aristote qui était "en- core aujourd'hui ce qui nous avons de mieux fait en ce genre..." (Q.P. 20 B 35-37), grace au “earact®re philosophique” de son ocuvre. 22 A 18-19) I1 sera intéressant de faire une comparaison dé- e des Histoires naturelles d'Aristote et de Buffon, ce que nous ne pouvons pas prétendre faire ici. Mais laissons ces quelques indications. 255 (236) Hume, Inquiry (n° 970), 171. Résuné succinct des démonstrations logiques du Treatise. Sur la éémonstabilité de la nécessité d'une cause, voir I, ili, $iii; 79 et suiv. La IV partie s'ouvre par ces mots: "In all demonstrative sciences the rules are certain and in- fallible; but when we apply then, our fallible and uncertain facul- ties are very apt to depart fron then, and fall into error." Ibid., I, iv, $i 180, Le troisime livre du Treatise, "Of Morals", es saye de démontrer la fausseté de 1'"opinion very industriously propagated by certain philosophers, that morality is susceptible of demonstration; and tho’ no one has ever been able to advance a single step in those demonstrations; yet 'tis taken for granted, that this science may be brought to an equal certainty with geo- metry or algebra. Upon this supposition, vice and virtue must con- sist in some relations; since 'tis allow'd on all hands, that no matter of fact is capable of demonstration.” Ibid., III, i, 54; 463. (237) Hume, Inquiry (n° 970), 171. (238) Buffon, 24 A 18-21. (239) Voir Hume, Treatise (no 973), I, Part II: "Of the ideas of space and time", en particulier la section iv, "Objections answer'd", oB Hume reprend les arguments de Berkeley A propos des infinitésimaux. Par exemple: "It has often been naintain'd in the schools, that ex tention must be divisible, in infinitum, because the system of ma~ thematical points is absurd; andtiatsystem is absurd, because a ma- thenatical point is a non-entity, and consequently can never by its conjunction with others form a real existence. This wou'd be perfectly decisive, were there no medium betwixt the infinite di- visibility of matter, and the non-entity of mathematical points. But there is evidently a medium, viz. the bestowing a colour or solidity on these points; and the absurdity of both the extremes is a demonstration of the truth and reality of this medium. The system of physical points, which is another medium, is too absurd to need a refutation. A real extension, such as a physical point is suppos'd to be, can never exist without parts, different from each other; and wherever objects are different, they are distin- guishable and seperable by the inaginsation." Ibid., 40. (240) Hume, Inquiry (n° 970), 171. (241) Buffon, 0.P. 24 A 39-40. (242) 0.P. 24 A 46-49. CE. Hume, Inquiry (n° 970), 42 (résumé de Treatise (n® 973), I, ili, ivi; 87 et suiv. -the knowledge of this re- lation [cause et effet, mais en Etant le principe de tout "matter of fact", nous pouvons 1'étendre au domaine entier des "vérités physiques". A propos de la relation particuliére de la cause et gon effet nous en revenons en quelques instente] ia not, in any instance, attained by reasonings a priori, but arises entirely from experience, when ve find that any particular objects are constantly conjoined with each other.” (243) (244) (245) (246) (247) (248) (249) (250) (251) (252) (253) (254) 256 Hume, Inquiry (n° 970), 49; résumé de Treatise (n° 973), I, iii, Siv; 91 et suiv. Buffon, 0.P. 24 A 50-52. 0.P. 24 B 17-22. Cf. Hume, Abstra atise (no 967), 188: "[t is evident that Adam, with all his science, would never have been able to demonstrate that the course of nature sust continue uniformly the same, and that the future must be conformable to the past. What is possible can never be demonstrated to be false; and it is possible the course of nature may change, since we can conceive such a change. Nay, I will go further and assert that he could not so much as prove by any probable arguments that the fu- ture must be conformable to the past.’ Hune, Treatise (n° 973), 89 Inquiry (n° 970), 52 Hune, Treatise, I, iii, Sxiis 139. Ibid., I, i441, Sviiis 105. Hume, Inquiry (n° 970), citation a 67; puis 48, Ibid., 49. Ibid., 68. Cf. Treatise (n° 973), 1, iv, Sii; 187: "Thus the scep- tic still continues to reason and believe, even tho’ he asserts, that he can not defend his reason by reason; and by the sane rule he must assent to the principle concerning the existence of body, tho' he cannot pretend by any arguments of philosophy to maintain its veracity. Nature has not left this to his choice, and has doub- less esteem'd it an affair of too great importance to be trusted to our uncertain reasonings and speculations.” Notez similarités avec L'argument de Pascal. Cf. Pensées #479, in Geuvres (n® 1179), 1221-1222. En particulier, 1222: "Plat & Dieu que nous n'en eus- sions au contraire jamais besoin, et que nous connussions toutes choses par instinct et par sentiment!" Hune, Inquiry (n° 970), 60. Nous citons encore une fois de Hume, Inquiry, 18, pour sa clarté, sa concision, et ici pour sa qualité littéraire. Mais ce n'est qu'un résuné de la "Conclusion" du livre I du Treatise (1, iv, fvii; point culminant: "Human Nature is the only science of man; and yet has been hitherto the most neglected." (p.273) Nous pensons & la section du chaptire "Doubts concerning the un derstanding", de 1 Inguiry (n° 970), 45, construction logique tirée du Treatise, mais que curicusement Buffon semble suivre proposition par proposition dans le texte A 0.P. 25 A (exception faite aux lignes 25-30, qui est une critique générale de 1a no~ tion de cause, qui n'est pas ici, en particulier, 4 1a page 45 de (255) 257 Hune, mais qui est la question principale de tout 1'Inguiry, et le sujet du premier livre du Treatise). Nous distinguons quatre chat- nons de l'argument: 1. les effets particuliers et les causes géné- rales (cause générale est de lune; Buffon dira plutét effets plus généraux); 2. les "ultimate springs of nature"; 3-4. le réle des mathématiques et la valeur des "lois", que nous devons mettre en- senble A cause de leur Liason intime pour Hume aussi bien que pour Buffon. Lorsque nous aurons démontré que 1'acheminement logique de L'argunent de chacun est identique, pouvons-nous douter de cette origine de 1a pensée de Buffon? Buffon, 0-P. 25 A 25-26. C'est ici le passage qui refléte la cri- tique générale des causes par Mune. La raison que Buffon en donne de cette impossiblité Je connaissance vient également de Mune: ". parce que nos sens étant eux-ménes les effets de causes que nous ne connoissons point, ils ne peuvent nous donner des idées que des ef- fets, & janais des causes", 0.P. 25 A 27-30. Tl est clair que ce nest parce que nous ne connaissons pas l'origine de nos sens que nous ne pouvons conclure qu'ils ne nous représentent adéquatenent que des effets, principe établi lors de 1a critique méthodologique. Nous supposons que le "sens" de la premitre partie de la phrase veut dire plutét "sensations", et que ce sont les sensations qui sont les effets de causes inconnues (parce que, peut-@tre, nous ne comprenoas point l'origine de nos sens), car c'est 1'ignorance du lien causal entre un objet extéricur et sa perception intérieure (la sensation) qui fait que nos sens ne peuvent nous donner des idées que des effets, & janais des causes. L'argument semble venir de 1a section vide Part III, livre I du Treatise . D'abord Ilume &ta~ DLit que "As to those impressions, which arise from the senses, their ultimate cause is, in my opinion, perfectly inex licable by human reason, and 'twill always be impossible to decide with cer- tainty, whether they arise fron the object, or are produc'd by the creative power of the mind, or are deriv'd inmediately from the author of our being." (I, iii, Svs 84. Fin= allusion a Berkeley. Dans la criti- que méthodologique Buffon a échappé & L'argument solipsistique de Berkeley.) A propos des causes, Hume continue dans la section vi: "It shall therefore be allow'd for a moment, that the production of one object by another in any one instance implies a power; and that this power is connected with its effect. But it having been already prov'd, that the power lies not in the sensible qualities of the cause; and there being nothing but the sensible qualities present to us; I askywhy in other instances you presume that the same power still exists, merely upon the appearance of these qual- ities?" (p. 91) Notre ignorance des puissance et principes naturels ne nous emp&che point de toujours présumer que de pareils effets sensilbes nous voyons de pareilles "puissances secrétes". (Inquiry, 47.) Mais en toute logique il faut conclure que "not only our rea~ son fails us in the discovery of the ultimate connexion of causes and effects, but even after experience has inform'd us of their constant conjunction, 'tis impossible for us to satisfy ourselves by our reason, why we shou'd extend that experience beyond those particular instances, which have fallen under our observation (Treatise T, ili, §vj 91.) $i Buffon suit l'argument de lume jus- 258 qu'ici, ce n'est pas pour le suivre dans son scepticisme A 1'é~ gard de la possibilité de la science. Le principe de chacune des critiques dialectiques a été Gtabli pour égarer 1a nouvelle néta~ physique que Buffon veut construire des précipices de scepticisme soit 4 la maniére de Berkeley en ce qui concerae la critique né- thodologique, soit A la mani@re de Pascal dans 1a critique gnosé~ ologique, soit & 1a mani®re de Locke pour batir les fondements logiques d'une science enpirique dans la critique logique. Nainte~ nant, c'est contre le scepticisme de Hume qu'il faut établir un principe métaphysique par lequel justenent nous pouvons adéquate- nent étendre notre expérience outre les instances particuliéres pour faire une science générale, et pour trouver des vraies opé- rations de la nature par lesquelles les effets particuliers peuvent 8tre expliqués dans un syst@me uni qui répond & celui de 1a nature. (256) Buffon, 0.P, 25 A 23-24 & 32. (257) Hume, Inquiry (n° 970), 45. (258) Buffon, 0.P. 25 A 4-7. (259) O.P. 25 A 7-9. Nous soulignons. (260) 25 A 43-45, (261) 0.P. 25 A 33-34. Nous soulignons. Notez que Ilume avait démontré que les lois de la nature sont découvertes par 1'expérience des phénommes seulenent, Voir Treatise (n° 973), I, 444, Sv; 91, cité dans la note 255 ci-dessus. Egalement: Inquiry (n° 970), 46: "all abstract reasoning in the world could never lead us one step to the knowledge of it [1a loi]." (262) Le rapport des commissaires figure dans les Registres de 1'Acadénie, séance du 25 avril 1733. Pour une analyse détaillée de ce travail, voir Hanks, Bu Miistoire naturelle" (no 198), 42-61. (263) Descartes, Regulac (n° 912), I; 362, 11. 5 & 13-16. Gilson note Gans son commentaire du Discours de 1a méthode (n° 906)(p197 3 la page 18, 1. 17) qu’en n'adnettant 1 la notion de la vérité aucun degré intermédiaire entre 1a certitude absolue & 1'ignorance [il faut préciser que Descartes ne parle que de ce qui concerne 1a ", La morale qu'il appelle "provisoire" peut en admettre pour L'usage practique de la vie.], Descartes "exclut 1a notion aristotélicienne de probabilité et s'oppose conscienment a 1a dia~ lectique scolastique du vraisenblable." (264) Locke, Essay (n° 1084), IV, xv, £15 IT, 363-364. (265) Iv, xvi, §5; IT, 374. (266) IV, xvi, £6; I1, 376. (267) Ibid. L'argunent est celui que nous avons vu reproduit chez Hume et (268) (269) (270) (271) (272) (273) (274) (275) Ib (276) (277) (278) (279) 259 chez Buffon. "Concerning the manner of operation in most parts of the works of nature: wherein, though we see the sensible effects, yet their causes are unknown, and we perceive not the ways and man- ner how they are produced. ...These [génération, nutrition, mouve- ment, magnétisme, lumiére et chaleur] and the like effects we see and Know: but the causes that operate, and the manner they are pro~ duced in,we can only guess and probably conjecture. For these and the like, coming not within the scrutiny of husan senses, cannot be examined by them, or be attested by anybody; and therefore can appear more or less probable, only as they more of less agree to truths that are established in our minds, and as they hold propor- tion to other parts of our knowledge and observation." Ib xvi, §12; Il, 379-380. Hume, Treatise (n° 973), I, £44, Sxiis 130-142. Voir Locke, Essay, Iv, xv, 86. Maupertuis, Discours sur les différentes figures des astres (no 1124), 103. Ibid. 133. Berkeley, De Motu (n° 858), 567. Ibid., $70; 51: "It is not established that there is force, virtue, or bodily action truly and properly causing such effects." Ibid., £69; 51: "Physically, therefore, a thing is explained not by assigning its truly active and incorporeal cause, but by show ing its connection with mechanical principles...". +» premi’re phrase de l'article 71; 51. Buffon, 0.P. 26 A 50-B 4. "Ce paradoxe [que plus la matiére est abstraite, plus leurs prin- cipes sont “exempts de nuages & faciles A saisir] ne paroftra point tel A ceux qui ont étudié ces Sciences en Philosophes...". D'Alembert, Traité de dynamique (n° 838), "Préface", ij. La clarté et la facilité ne sont que des attributs de la nature arbitraire des abstractions mathématiques et leurs démonstrations tautologi- ques, diait Buffon. Le vrai paradoxe est de vouloir représenter les corps par les entités mathénatiques. CF. 26 A 15-19. Par exemple, les infinitésimaux, Voir en général la critique logi- que des abstractions. Les newtoniens accusé les cartésiens d'avoir des " veur des tourbillons et des nleinn. Vote ef Soncue "préjugés” en fa (279) (280) (281) (282) (283) 260 Les newtoniens accusaient les cartésiens d'avoir des "préjugés" en fa~ veur des tourbillons et du plein, Les "incertitudes" peuvent @tre une allusion a la nature de I'attraction, d'autant plus qu'il est suivi de ces mots: "que nous portons nous-nénes dans les Sciences réelles (GP. 26 B 12-13.) Toutes ces considérations depuis les “erreus savantes" de Clairaut, sont une interprétation de 0.P. B 4-17. La "fausse démarche" de 1a Ligne B 6 peut @tre une allusion vague de 1a méthode (et métaphy~ sique) cartésienne que Buffon espére remplacer. Berkeley, De Motu (n° 858), S71. Buffon, 0.P, 26 B 18-20. C'est Buffon qui parle de la nouvelle Métaphysique des Sciences "...a la suite de l'expérience... [pour] arriver enfin A la connoissance de touts les vérités...[etc.]". O.P. 26 B 14-20. Hune, Inquiry (no 970), 173. Est-ce Loeuvre de Berkeley qui est Je "for instance" en question? Voir & la page 21: "The only method of freeing learning at once from these abstruse questions is to in- quire seriously into the nature of human understanding and show, from an exact analysis of its povers and capacity, that it is by no means fitted for such renote and abstruse subjects. We must submit to this fatique in order to live at ease ever after, and must cultivate true metaphysics with some care in order to destroy the false and adulterated.” VE LA METHODE BUFFONIENNE A bien des égards, le probléme central de 1a philosophic générale et de la philosophic scientifique du XVIile sitcle fut celui de 1*épis- témologie (1), car, lorsque les fondenents métaphysiques du rational- isme furent minés pour établir une psychologie a 1'échelle humaine (2), il n'y avait plus de reptre fixe, de rocher stable auquel on pouvait diriger son cours dans le flux des sensations, Ainsi on trouve une prolifération de traités & ce sujet, et autant de points de vue difté- rents que d'honmes pour les penser, Mais ce qui restait constant aprés qutont été posées les bases de 1a nouvelle psychologie par Locke, c'est la restriction que tout modle épisténologique devrait rendre compte de la génération de toutes nos idées, Ce que Buffon apporte de nouveau & ces questions tant discutées, c'estdone un mod@le, emprunté a la gé— nération des 6tres vivants, déja employé avec succ®s dans l'histoire de la terre, de 1'épigéndse. De plus, 1'épigénése fournit d'autant plus la clef & la meilleure compréhension des essais de 1749 qu'elle est le modéle qui correspond Je plus avec les exigences de 1a méthode buffonienne, En renversant ordre classique de 1a raison, la série de critiques dialectiques a- boutit a une métaphysique des sciences qui, ayant posé pour conditions d'une connaissance adéquate 1a distinction du réel et de l’arbitraire, Ja reconnaissance des propriétés qui appartiennent au sujet étudié et celles que nous lui prétons (3), trouve dans le mod@le épigénétique son plein épanouissement, La méthode, c'est-A-dire plus exactement, la nanitre de traiter I'histoire naturelle, n'est rien d'autre pour Buffon que L'application de ce mod@le aux problémes divers de cette histoire. Crest ainsi que les trois essais, comme cela 1'était pour Descartes, sont a la fois l'origine de sa réflexion sur le méthode et 1a preuve de sa fécondité, Pourquoi ce nod@le est-il si important pour Buffon? IL nous semble qu'il fournit le lien entre la théorie de 1a connaissance et la science, le lien entre 1'ordre de la raison et lordre de 1'ex~ périence, le lien entre 1a subjectivité de Mesprit et lobjectivité de la nature, Ce mod®le est exigé par la série de critiques dialectiques 262 en étant le seul qui puisse organiser les recherches scientifiques dans un syst8me relatif & notre esprit mais correspondant @ celui des opéra~ tions de la nature. En cherchant @ appliquer ce mod®le aux opérations naturelles nous viendrons désormais a s'étendre sur les principes de la vraie méthode, L'ordre de 1a raison étant inverti, Buffon échappe dans sa méthode et par son mod&le @ la fois au "cercle cartésien" et au “cercle" des sciences inductives telles que pratiquées jusqu'alors, Le "nexus rationun" par lequel Descartes voulait échapper au cercle a été écrit comme "L'interférence de deux séries novées l'une sur l'autre, celle du droit et celle du fait, celle de la pensée et celle du réel (4) Ayant mécompris 1a gen®se de nos connaissances, 1a méthode carté- sienne est en faillite; Descartes n'a pas trouvé un lien de légitimité entre Lordre de notre pensée et l'ordre de 1a nature. Et pour Buffon, Descartes ne pouvait pas le faire, En “anticipant" 1a nature, il ne peut pas faire conmensurable le syst®me A l"intérieur de notre esprit et le systtne extérieur. Tl doit y avoir, nécessairement, un cerele, néme si ce n'est pas celui de Dieu garant de 1a certitude et la certitude ga~ rante de Diew comme voulait Gassendi. (5) Et ce cerele entre la véracité de L'esprit et celle de 1a nature se retrouve dans 1a méthode qui veut réduire cette nature a un principe arbitraire et abstrait, qui veut réduire cette nature au systtme fournt par notre faible imagination, pour ensuite appliquer le principe, conforme a notre manitre de voir, 2 Ja science et dire que cette science correspond & 1a complexité de la nature, Cependant, il y avait un cercle parallele chez les "induction- istes". Induire un principe a partir des observations pour ensuite con- prendre les phénom®nes dans un syst®me bati sur ce principe n'était fEconde comme méthode, nous avons vu, que dans quelques sciences telles que L'astronomie et L'optique, o& les données pouvaient @tre traitées come des abstractions mathématiques; mais ",..1a dénonstration des effets mathématiques ne nous apprendra jamais que ce que nous sgavions déja." (6) Le vrai but de 1a méthode, pour chercher & sortir de ce cer~ cle des mathé atiques, cercle dans lequel se sont renfermés des d’Alen~ bert et des Clairaut, était de nous amener @ des nouvelles découvertes concernant “tous les effets dont nous ne connoissons pas encore les causes, & sur toutes les propriétés dont novs ignorons les circonstan- 263 ces...". (7) Quelle est cette méthode? quel est le lien avec le nodéle épigénétique? de quelle maniBre ces deux s'articulent-ils pour nous faire stentendre sur la vraie métaphysique des sciences, a Maffat des cercles viscieux qui ont saisi tant d'autres? Voila les questions qu'il faut résoudre dans ce chapitre, Toutefois i1 faut d'abord établir les modalités et le statut de ce modéle qu'emploie Buffon si heuristique- ment dans les essais qu'il présente en 1749. Le mod@le " pigénétique" est emprunté, bien entendu, a la théorie de la génération, Le mot semble avoir été donné usage courant par Har- vey, dans les Exercitationes de generatione animaliun (8), pour expli- quer le processus par lequel se forme l'embryon, graducllenent, partie apres partie, "L'idée, dit Roger, n'avait alors rien d'original, et Harvey a peut-8tre été amené 2 1a formuler avec tant de netteté parce qu'il connaissait dja la théorie contraire, cette 'préfornation des germes' qui retrouvait des partisans [par exesple, Gluseppe a" Aronatat de Venise] " (9) Défendre 1"épigén®se ne voulait pas seulement défendre la notion d'une formation graduelle et "partie aprés partie"; les pré- formationistes pouvaient comprendre ce principe dans leurs théories aussi, Tl y avait deux concepts fond:mentaux que 1'on sovtenait par ce modtle, Le premier était celui d'une matibre indifférenciée avant le commencement du développement, une esp&ce de pate a modeler sous quel- que forme qu'elle soit, Le deuxi®me, et plus important senble-t-il pour ses conséquences, Stait celui d'un principe organisateur par lequel cette matidre prenait la "forme" qu'il fallait pour étre des organes du corps futur, et par lequel ce corps prenait 1a "forme" d'un individu de son @spece. I1 faut supposer une force intérieure pour assurer que le développenent s'effectuatt selon un ordre, Le simple nécanisme de mati- @re et de mouvement ne suffisait pas pour satisfaire aux exigences de L'ordre. Sans principe organisateur, tout se faisait nécessairement par hasard, Si 1'embryon a été déja organisé dés son gerne, par la préfor- mation, ou plutard par la pré-existence, le simple nécanisme pouvait 2 la rigueur en expliquer le développement, Niant une pré-organisation quelconque du germe, il fallait trouver un principe organisateur. Défen- dre 1'épigendse c'est donc un choix philosophique: pourquot nier une pré- organisation? pourquoi préférer un "principe organisateur"? Pourquoi 264 Buffon a-t-il pris ce choix? La réponse est donnée par les concepts impliqués - de l'ordre et du hasard, du mécanisne de 1a pré-organisation et le dynamisme de 1'épigén@se, de 1a matitre et de la force. Ce n'est pas seulement les théories de 1a génération qui sont mises en question par ce choix; c'est toute 1a nétaphysique des sciences, Cependant il faut chercher dans 1a théorie de la génération les origines et les modalités du mod2le, puisque ctest ici qu'il est né, Des avant 1744, semble-t-i1, Buffon est en discussion avec Maupertuis A propos des faits de la réproduction, Selon Needham (10), c'était le nécontentement de 1a théorie des germes pré-existents dans la nature qui liait les deux savants, Si Buffon emprunte les arguments de Mauper- tuis, les faits d'hérédité comme exposés dans le Vénus physique de 1745, contre cette théorie de 1a pré-existence, il s'égare du type de réponse que suggere son colldgue. Maupertuis suggtre en effet un mod@le de "pré- formation" qui emprunte des éléments monadologiques de Leibniz, D'un c6té, si Maupertuis reprend les observations de Harvey sur 1a formation de l'enbryon pour les opposer @ 1a théorie de la pré-existence (11), i1 ne pouvait pas comprendre l'explication par L'analogie de la matrice fécondée au cerveau, plus "scolastique que physique", que "L'une congott le foetus, comme L'avtre les idées qui sty forment...", (12) Assurément les phénoménes de 1a génération sont d'une complexité qui semble dépas~ ser les limites de notre esprit, De autre edté, donc, en reprenant Ja théorie du mélange de deux senences de Descartes, bien que ce dernier soit bien éloigné d'avoir expliqué la mani®re de 1a formation du foetus, cette constatation du mélange fournissait la mati@re d'une éventuelle explication naturelle, Le mécanisme de Descartes était-i1 suffisant? es loix ordinaires du mouvenent y suffiroient-clles, ou faudroit~il appeller au secours des forces nouvelles?" (13) En effet Maupertius tourne 1a voie de recherche vers 1a chimie, pour étendre L'attraction newtonienne, dont il était le premier défenseur en France, aux "forces" et "rapports" de la chimie de Geoffroy, (14) Cependant sa conception de Ja mani@re par laquelle 1a formation de l"embryon doit se faire 1"éloig- nait d'une épigéntse harveienne, 11 s2 tourne vers la tradition antique, Epicure et de Démocrite, d'Anaxagore et d'iippocrate, ctest-a-dire la théorie du “defluxus", qui a 6t6 rencuvellée dans les temps modernes, 265 (15) S*41 récuse 1'explication cartésienne, n'est-ce pas pour reprendre celle de son adversaire, Gassendi? (16) Le probléme essentiel des deux, Maupertuis et Gassendi, n'était pas celui de la formation des parties du corps a partir de la semence, mais celui de la formation de la semen- ce elle-méne, Ctest tet que le nodtle atcaniste, aussi bien que 1a théo- rie de la pré-existence, et me 1'épigéntse A la manidre de Harvey, é- tait en défaut, T1s voulaient expliquer 1a formation sans avoir compris la matiare radicale, L'atomisme de Gassendi et 1a chimie de Maupertuis Gtant le visent, tous les deux, a établir 1a constitution de 1a semence lien entre les réproducteurs et le réproduit, il faut chercher les indi~ ces pour 1a compréhension de sa nature dans les phénon®nes éclaircissant ce Lien, 1a ressemblance et I'hérédité, Par la théorie du "defluxus", Maupertuis explique , de me que Gassendi (17), que “quant A la matidre dont _se formeront dans la semence de chaque animal des parties semblables A cet animal, ce seroit une conjecture bien hardie, mais qui ne seroit peut-tre pas destituée de toute vraisenblance, que de penser que chaque partie fournit ses germes." (18) Par un jeu d'affinités les parties ("no~ Iécules" chez Gassendi) de chaque semence viennent se juxtaposer pour eréer le nouveau corps; puisque ces parties sont analogues & celles du pre et de la mre, nous pouvons facilement voir qu'une solution au pro- bl@me de 1'hérédité et des hybrides est maintenant possible. Le dévelop- pement du foetus se fait probablement par une "épigéndse", conforme aux observations de Harvey, M@nes les monstres, phénonBne inconeiliable A tout autre syst®me, trouvent leur place dans celui-ci: "Si quelques parties se trouvent trop éloignées, ou d'une forme trop peu convenable, ou trop foibles de rapport d'union pour stunir a celles auxquelles elles . Mais s'il arrive que doivent @tre unies, 41 natt un monstre par défau! des parties superflues trouvent encore leur place, & stunissent aux par- ties dont L'union étoit déjA suffisante, voila un monstre par excts. (19) Ce mod@le, bien que satisfaisant sur le plan épistémologique aussi bien que théorique, laissait cependant des difficultés. Le syst®me de Maupertuis comme celui de Gassendi n'est, selon son propre aveu, qu'une “ebauche", (20) 11 reste un probléne irrésolu, mais probléme essenticl A éclaircir pour faire la possibilité du systéme m@me, Le mécanisme brut en défavt pour expliquer coment on arrive, a partir de 1a matitre pre- 266 mire, 2 lordre particulier qui est I'harmonie de 1'@tre vivant, 41 faut, pour Gtablir 1a vraisemblance du syst®me, s'étendre sur ce qui puisse @tre le principe par lequel storgenisent les parties. Voila 1Mimportance des quelques "doutes & .,,conjectures" par lesquels se conclut le Vénus yhysique . (21) Revenant sur la métaphysique de 1a cause du mouvement, qui l'avait préoccups depuis de Discours sur la figure des astres de 1732, Maupertuis ne peut concevoir que 1"union des parties se fait autrement que par un "instinct", analogue & cet “instinct des enimaux, qui leur fait rechercher ce qui leur convient, & fuir ce qui leur nuit", (22) Concevant 1e corps conme une “harmonic préétablie” (le terme est de Maupertuis lui-m®me), ne faut-il pas sup- poser que cet "instinct", ce qui "constitue proprement L'essence de I'animal" (23), ne se conserverait-elle pas inaltérablement dans son es- sence m@ne apr®s 1a mort? (24) Ctest ict que nous revenons aux "semen ces" de Gassendi, pré-existantes et parsemées partout 1a nature, le principe organisateur qui fait du "defluxus" la théorie la plus satis— faisante en permettant d'expliquer 1'hérédité ainsi que les monstres, sans tonber dans les pitges du mécanisme brut, mais aussi sans étre obligé de sortir des frontiers du naturalisme en cherchant une "Ame" A la manidre de Harvey-Aristote ou la pré-existence a la manitre des ovistes et les animaculistes, (25) Stil est vrai, et nous sommes tout-a-fait prét a L'accepter, que "le vrai mérite de pigéntse, ctest--dire, de ramener le probleme de la génération sur le upertuis,., c'était de rétablir le principe de 1'6- terrain des causes secondes, de rendre & la science une question qui avait été abandonnée a 1a métaphysique" (26), nous pouvons voir chez Maupertuis 1origine de la pensée de Buffon sur cette matitre. Gepependant 1'épigén®se ne semble pas désigner seulement 1a formation progressive pendant l'ontogense. Il nous semble que si Buffon emprunte Maupertuis, par sa critique méme de celui-ci, Iidée d'une épigénese pas son retour A une épigéntse plus pure et, pour ainsi dire, plus radi- cale, nous arrivons enfin au point de génie of il faut rompre les Liens de causalité dans le sens que nous avons donné au problimo de "1"origi- ne de la pensée", le point de synth?se of avait abouti les critiques, 267 le point d'originalité qui est 1a source de 1a nouvelle métaphysique des sciences, je veux dire le point culminant du syst&me de Buffon, le lien entre 1a méthode et les essais, 1'épigénése comme mod@le naturel par excellence. Conme Maupertuis, Buffon passe en revu les anciennes théories de 1a génération, surtout pour critiquer les théories d'une “pré-organisa~ tion". (27) Il reprend, lui-aussi, en grand détail, les observations de Marvey. Il y a des critiques 4 apporter, en particulier au réle de la semence du mile, mais elles sont, pense Buffon, des erreurs causées par 1'imperfection du microscope & son époque. (28) Mais comme historien des sciences, il se demande, & tort ou A raison, ce qu'il y a de nouveau dans ces observations de Harvey. "...il semble, quoiqu'il dise souvent le contraire, qu'Aristote 1'a guidé plus que L'expérience; car, & tout prendre, il a vG dans les oeufs tout ce qu'Aristote a dit, & n'a pas vi beaucoup au dela; 1a pldpart des observations essentielles qu'il . (29) Assurément Aristote rapporte, avoient été faites avant lu lui-néme s'est trompé sur le réle du afle dans 1a génération. Les ex- périences que rapporte Buffon dans les chapitres suivants dénontrent l'existence de la "senence" femelle aussi bien que male. (30) Mais par son principe de la génération, que "la matire qui n'est qu'une capaci- té de recevoir les formes, prend dans la génération une forme sembla~ ble A celle des individus qui la fournissent...", Aristote sauve la physique des prises de la "région des hypothéses" 8 1a manire de Pla~ ton, par exemple, pour faire appuyer 1a théorie de la génération ": ts & pari[ant] une langue plus des observations, rassewb1[ant] des £ intelligible...". (31) Un retour & une épigénése plus pure est un re~ tour & la notion d'une mati@re homogtne qui s'organise par un principe de force (ou forces). Si Buffon recevait avec plaisir et admiration le Vénus physique, clest, nous dit-il, parce que par ses "idées philosophiques" sur la gé- nération, “cet auteur est le premier qui ait commencé A se rapprocher de 1a vérité dont on étoit plus loin cue jamais depuis qu'on avoit ima— gin les oeufs & découvert les aninaux spermatiques." (32) C'est évi- damment parce que c'est une premire tentative de retourner a 1"épi- en que l'on y trouvera "des vies géndse que Buffon le félicite. Mais 268 générales qui ne s'6loignent pas infiniment des idées que j'ai données ++.".(33), 41 y a, lut semble-t-il, une mani&re de rappocher encore plus & la vérité, ce que, bien entendu, son propre systéne tente de faire. Nous croyons que le point de séparation entre Buffon et Mauper- tuis ne concerne nullement 1a théorie du "defluxus" que Buffon emprunte et développe, mais plutét les idées concernant le nature de L'organisa~ tion des parties de 1a matitre dans 1a formation de 1a nouvelle créa~ ture. Ce qui nous senble le plus curieux dans tout le Vénus physique est Je chapitre "Variétés dans les animaux", chapitre encore plus curieux Jorsqu'on le 1it en comparaison du chapitre par lequel Buffon avait ou- vert sa théorie de la génération, remarquons le bien, la "Comparaison entre les Animaux & des Végétaux", Maupertuis expose tous les moyens de réproduction chez les animaux connus 4 1'époque, depuis 1a méthode de copulation que pratique le taureau impétueux jusqu'au merveilleux poly- pe, qui faisait tant de bruit, en passant par tous les mystares que nous offre ‘histoire des insectes ~ les abeilles avec leur trois gen- res, les Limagons hermaphrodites, les pucerons parthogénétique. Mais au Lieu "utiliser cette variété dans 1a recherche d'un principe pour servir A l'histoire de la génération, conme en fera Buffon, Maupertuis nous dit, méme avant d'exposer cette variété, qu'"il y a sans doute quelqu'analogie dans les moyens que les différentes especes d'animaux emploient pour se perpétuer: car, malgré 1a variété infinie qui est dans 1a Nature, les changenens n'y sont jenais subits. Mais, dans L'ig~ norance of nous sommes, nous courons toujours risque de prendre pour des especes voisines des especes si Gloignées, que cette analogie, qui d'une espece & L'autre ne change que par des nuances insensibles, se perd, ou du moins est méconnoissable dans les especes que nous voulons comparer. (34) 11 nous semble que 1a raison de cette caution se trouve dans son incapacité de rendre dans un syst®me cohérent, la génération sexuée et la génération par bouture conme chez les polypes. (35) Le probléme est que sa théorie du "defluxus" implique un germe dans lequel viennent stassembler toutes les parties renvoyées par le corps. C'est dans ce germe que résidera le fameux "instinct" nonadique. Mais, se denande-t-il A propos de 1a génération du polype, "que peut-on penser de cette étran- 269 ge espece de génération; de ce principe de vie répandu dans chaque par- tie de 1'animal? Ces animaux ne seroient-ils que des amas d'enbryons tout préts A se développer d&s qu'on leur feroit jour? ou des moyens inconnus reproduisent-ils tout ce qui manque aux parties mutilées? La Nature, qui dans tous les autres animaux a attaché le plaisir A l'acte qui les multiplie, feroit-elle sentir A ceux-ci quelque espece de volup- té lorsqu'on les coupe par morceaux?" (36) Si Buffon cherche un principe plus radical il ne peut le faire qu'en explicant la nature de toute gé- nération, animale aussi bein que végétale; "...il y a des animaux qui se reproduisent comme les plantes, & par les mémes moyens; 1a multipli- cation des pucerons qui se fait sans accouplenent, est senblable & celle des plantes par les graines, & celle des polypes, qui se fait en coupant, ressenble A la multiplication des arbres par boutures." (37) Mais c'est précisément & cause de l'analogie de tous les étres vivants qu'il faut chercher un principe général de 1a génération. "On peut done assurer avec plus de fondement encore, que les animaux & les végétaux sont des étres du méme ordre, & que 1a nature semble avoir passé des uns aux autres par des nuances insensibles, puisqu'ils ont entr'eux des resemblances essentielles & générales, & qu'ils n'ont aucune différence qu'on puisse regarder comme telle." (38) En paraphrasant Maupertuis pour le critiquer, nous supposons que tout ce chapitre n'est écrit que pour établir 1'analogie entre les moyens de la génération, et ainsi pour poser 1a base pistémologique du principe de 1a génération. Prenant le type de génération le plus généralement répandu, celui des esp&ces "con munes & inférieures" (39), Buffon esp&re arriver A s'étendre sur le mécanisme le plus fondamental, qui s'appliquera par la suite @ toutes les variétés de moyens de réproduction connues. Chez les inférieurs, il faut supposer que "chaque partie contient un tout, qui par le seul développement peut devenir une plante ou un insecte." (40) Faut-11 sup- poser qu'il y a dans chaque partie de 1'étre des "germes" préts & tout moment & se développer? Faut-il Supposer qu'il y a dans chacun de ces germes des germes qui se développeront quelque tenps au futur, et ainsi contre une de suite A 1"infini? 11 y a des raisons épistémologiques telle théorie de pré-organisation. Nous les verrons dans un instant. Mais i1 y en a aussi des scientifiques qui montre son absurdité. Comment 270 peut chaque partie contenir un tout dans un germe? L'erreur était de ntavoir étudié que 1a génération de 1"homme ou de quelques espéces par- ticuligres d'animaux sans avoir cherché le principe de la réproduction, clest-A-dire L'analogie radicale entre 1a génération et toute autre mode de développement, en particulier 1a nutrition et la croissance. (41) Ctest ici que l'on voit qu'il n'y a point de pré-organisation, mais une vraie épigénése. I1 faut comprendre qu'un “individu n'est qu'un tout unifornément organisé dans toutes ses parties intérieures, un composé "une infinité de figures semblables & de parties similaires, un assen- blage de germes ou de petits individus de 1a m@me esp&ce, lesquels peu- vent tous se développer de la méme fagon, suivant les circonstances, & former de nouveaux tous composez come le premier" (42), en un mot, qu'il y a une matiére uniforme et primordiale, ce que Buffon baptisera les "nolécules organiques", A partir duquel se fait tout développement, Ja réproduction inclue. 11 n'y a pas de "defluxus" A la mani@re de Mau~ pertuis ou de Gassendi, c'est-a-dire chaque organe du corps n'envoie pas dans les organes réproducteurs des parties qui lui sont analogues. L'épigénése est plus radicale en ce que 1"on conmence d'enblée d'une mative homogéne, 1a, seule organisation étant celle qui est intéricure aux molécules "organiques" elles-mémes. 11 faut cependant concevoir, pour toute théorie épigénétique, un principe organisateur. Voici L'ori-~ gine de ce célabre, et énigmatique, "moule intérieur". Toutefois i1 n'est pas aussi inintelligible que 1"on avait pensé. Formulée, semble-t- il, par les adversaires de 1a pré-existence de 1a fin de XVIIe sicle, renouvelée par Bourguet dans sa tentative de faire accorder 1a pré-exis- tence du germe avec un mécanisme naturel, assimilée dans le Vénus physs— que sous le nom d'instinct", Buffon emprunte cette notion de noule in- térieur pour lui donner un nouvel éclat. Bien qu'incapable de rompre avec L'idée qui dominait son époque, 1a pré-existence, 1a contribution de Bourguet merite d'@tre soulevée en ce qu'elle nous offre des pitces capitales A une théorie de la génération qui seront reprises par Mauper- tuis et Buffon. C'est par les phénoménes de 1a génération qui ne s'ac~ cordent point avec 1a théorie de la pré-existence que commence Bourguet d"importance particuliére sont le mélange de deux liqueurs seminales, la ressenblance de l'enfant aux parents & aux aiculs, les hybrides, l'effet an de "imagination de 1a mére qui se maifeste par des marques visibles sur les enfants, et enfin les monstres ~ les "difformes", les "défoctu- eux", "ceux qui ont trop de parties.” (43) Les "moules" inventés par les mécanistes épicuriens de la fin du siacle précédant ont leurs avan~ tages; ils fournissent les moyens d'une explication mécanique de 1'a similation de la matiére brute au corps organique, par exemple dans la nutrition et la croissance. Ce principe des mécanistes, pense Bourguet, que "L'Organique produit 1’Organique," n'est pas entiérement faux. Ces moules peuvent expliquer done que "les Molécules qui se transforment en Chyle, passent dans le sang & se distribuent ensuite dans tout le Corps organisé, & s'y arrangent dans les places convenables pour augmenter les dimensions de ses organes." (44) La difficulté reste, cependant, que mme si chaque organe, si artistenent construit, peut transformer Je sue qu'il regoit du sang pour 1'assimiler, on est embarrasser pour Prononcer sur la question: "ol trouver le Moule du Corps entier du L'oeuf, sert-il de moule A 1'enbryon? ou, existe-t-il dans quel- Foetus qu'une des parties voisines de Lovaire un mowle tel qu'il faut pour un effet si merveilleux? ou, faut-il dire que le corps entier de la mére sert de noule naturel au foetus qu'il doit produire? Ce moule général explique bien des faits d'hérédité ct d'hybridisation, mais il ne peut pas rendre compte du sexe (en particulier le masculin) de 1enfant, ni de 1a conception des jumeaux, soit de deux sexes différents, soit d'un seul.Les moules de chaque partie ne suffisent point. Doit-on recourir Aun nouveau, "ou A quelque principe qui puisse ranger toutes ces par- ties comme i1 faut, pour qu'il en resulte une machine aussi composée qu'est le Corps humain, ou celui d'un Animal"? Prisonnier de 1'esprit de son époque, Bourguet a recours 4 la pré-existence pour expliquer organisation primordiale de 1'8tre. Prisonnier ~ au moins pour Mau- pertuis ou pour Buffon, car il y avait des moyens d'échapper au prises de ce syst®me A 1"intéricur méme de son propre discours. Admettant, comme il fait, que le développement de 1'animal se fait par l'assimi- lation des "particules organisées" (45), démontrant que la semence des parents se fait & partir des particules envoyées de tout le corps du réproducteur, ce qui expliquait d'ailleurs les faits d'hérédité, ayant donc formulé le mécanisne de base pour le développement, pourquoi faut— 272 lication stérile et non-naturelle de la pré-existen- il recouriz 3 1'e: nt souligné que "le Mécanisme Organique n'est autre ce du germs? chose que 2s Coabinaison du mouvenent d'une infinité de Molécules Ethe- snes, Aqueuses, Oleagineuses, Salines, Terrestres &c. ac~ riennes, A! 1 recourir A la commodées = syst@nes particuliers", pourquoi faut et & lorigine du temps pour expliquer 1'harmonie du Pourquoi est~il nécessaire de concilier tous les systémes pour dire que “les Moules se trouvent dans toutes les parties du Corps Humain, La fi gure idéale ou sigillée se trouve dans les parties les plus spiritueuses du sperne ces niles & des fenelles, parce qu'elles renfernent en petit tout ce qu'il y a de différens mouvemens dans le Grand Corps organisé; L'Embryon préformé, se trouve enfin dans 1'oeuf, au sens du systéme des Develo=zerens, qui contient les autres, sans avoir des difficultés." (47) Synth?se bizarre et non-nécessaire! Ce n'est pas, curieusement, que Maupertuis, ov Bufon & cet égard, veut rejeter 1'idée d'une "Activité ou Monade sinzulfre § doninante, & laquelle celles qui entre dans son eyst®me sont subordonnées." Pas de tout; la particule d'"instinct" ou le "noule ‘ntérieur" ne sont autres que des monades dominantes. Le pro- blame étai de les rendre "naturels", de faire de 1a génération une his- toire "naturelle", qui expliquera des processus sans recours & Dieu ou io et ex nihilo, ce qu'implique 1a pré-existence. 2 partir des éléments présentés par Bourguet que se construit 12 Yénus physique, et puis, de ces deux, 1'Histoire générale Maupertuis 2 le mérite d'avoir repris et développé les des animau::. ité et les monstres, Buffon n'est point sa- arguments concernant 1'hér tisfait du principe organisateur qu'il avait sugeré. Cet "instinct" lui parait tro> anthrepomorphique. "Nous ne irons pas, avec quelques Philo- sophes (48>, cue la mati@re sous quelque forme qu'elle soit, connoft son existence 4 ses facultés relatives; cette opinion tient & une question de Nétaphy= que nous ne nous proposons pas de traiter ici... la ma tire inanizée n'2 ni sentinent, mi sensation, ni conscience, ni d'exi- outons "ni d'instinet"], & que de lui attribuer quel- cul stence [no ques-unes 22 ces » ce seroit lui donner celle de penser, d'agir 273 & de sentir & peu prés dans le méne ordre & de 1a méne fagon que nous pensons, agissons & sentons, ce qui répugne autant a la raison qu'a la religion." (49) Il a pu reprocher & Maupertuis ce qu'ils reprochaient tous les deux & Bourguet, que les éléments du systéme sont bons - c'est Je principe qui est nauvais. Nous avons vu déja les raisons pour les- quelles Buffon recuse 1a théorie du "defluxus" telle que présentée par Maupertuis (et Bourguet). Pour démontrer la possibilité d'une véritable épigén’se, il fallait trouvait le principe "naturel" par lequel on ex- pliquait le développenent organisé & partir d'un anas de mati@re indif- férenciée. Le mécanisne classique en faillite, come 1'ont bien vu Mau- pertuis et Bourguet, par un principe dynamique, les "forces pénétrantes", Buffon peut reprendre 1'idée de moule de Bourguet, expliquer de quelle maniére il peut @tre un moule général du corps sans pré-cxistence, et corriger Maupertuis en ce qui concerne les "parties organiques" et le vrai principe organisateur de 1'épigéntse. Le moule intérieur ne nous semble pas @tre un objet de tout. Voila ce que 1"on n'a pas compris chez Buffon. Ce moule est une disposition des forces qui fait, soit & partir des nolécules organiques des "petits corps organisés" (ce qu'il appelle aussi des "parties organiques"), soit A partir des "parties or- inition du moule intérieur conme la ganiques" un corps total. Cette d disposjtion des forces apparait dans la discussion, pas toujours trés claire, "De la Réproduction en général", Ayant démontré contre le mé- canisme classique qu'il y a véritablenent dans la nature des "forces", notion dont nous avons suivi le développement jusqu'a Buffon dans la critique métaphysique, ayant spécifié que cette qualité que l'on nomme “pesanteur" travaille & 1'intérieur du corps et non pas & la surface, ayant fait lanalogie entre le moule et cette force pour en faire un moule relatif 4 1'idée de 1a masse, nous ne devons pas concevoir ce moule par des images géométriques. Le moule est le principe de l'organt- sation spatiale des molécules organiques (pour en faire des particules organiques) et des particules (pour en faire un corps). La force est, pour Buffon, une qualité de la matigre, qualité générale qui "deviendra un nouveau principe tout aussi méchanique qu'aucun des autres...". (50) Les "forces pénétrantes" travaillent comme 1"attraction universelle de : 274 Newton: "...cette force vient de quelque cause qui pénétre jusqu'au cen- tre du Soleil & des planétes, sans rien perdre de son activité; elle n'agit point selon la grandeur des superficies, (comme les causes méca- niques) mais selon la quantité de la matiére; & son action s'étend de toutes parts a des distances immenses, en décroissant toujours dans la raison doublée des distances." (51) Mais enfin, pourquoi accuse-t-on Buffon de ne pas avoir parvenu 4 se libérer d'une représentation méca- niste et spatiale de l'organisation? n'est-ce pas le but de toute thé- orie de la génération? On l'accusait aussi pour la raison suivante - d'un tout autre ordre, remarquons le. Pour gue le germe, en se dévelop- pant, devienne l'animal entier, il faut qu'il soit déja cet animal, avec toutes ses parties parties matériellement et actuellement formées. Buffon donc imagine le germe exactement comme l'imaginaient les partisans de la pré-existence. Non, non - d'abord nous croyons que tout ce que l'on peut dire c'est qu'il l'imaginait comme l'avaient fait les partisans de la pré-formation. Mais méme cela n'est pas exact. Nous voulons démontrer que c'est plut6t parce que Buffon restait prisonnier de sa conception de la force (si cela est d'étre prisonnier), que le moule intérieur n'est pas de tout une image géométrique, mais qu'elle est plut6t dynamique, et que, derniérement, il y a véritablement une épigénése en ce qui concerne la reproduction, puisque l'on n'a rien de pré-existant ni de préformé dans le "germe" autre que la matiére et un principe organisateur (non pas un objet organisé). Curieusement, la meilleure exposition de sa pensée sur la généra~ tion ne se trouve pas dans ces chapitres que nous avons étudiés, mais plutét dans "De la formation du foetus" -curieusement, car aprés l'intro- duction des moules intérieurs dans les chapitres II, III et IV, chapitres ot. il présente son hypothése en termes théoriques, pour la fonder scien- tifiquement et épistémologiquement, ils ne sont guére repris dans 1'ex- position détaillée des observations et des preuves de sa théories dans les chapitres qui suivront (a l'exception, bien entendu, de la "Récapi- tulation"). Outre quelques renvois généraux 4 ce concept: que la réunion des parties organiques ne peuvent se faire qu'au moyen du moule intérieur, que la substance nutritive peut produire l'animal ou le végétal lors- qu'elle "trouve un moule intérieur, une matrice convenable et analogue 205 A L'un & @ L'autre comme nous L"avons expliqué dans les premiers chapi~ tres", que les parties organiques des semences pénétrent "dans toutes Jes parties du moule intérieur de la matrice, opérée [1a pénétration] par des forces senblables & celles qui contraignent 1a nourriture & pénétrer le moule intéricur du corps, & qui produisent le développement sans en changer 1a forme" (52), qui sont importants au moins en ce qu'ils nos informent que "la matrice" est une espace de moule intéricur elle-méme, le concept n'est pas évoqué dans les deux cent cinquante-deux pages qui expliquent les détails du mécanisme de la génération, depuis Ja formation de la semence jusqu'au développement du foetus et L'accou- chenent. Toute cette exposition se fait, par contre, par le jeu des "no- lécules organiques" et les "parties organiques". En particulier, le cha~ pitre "De 1a formation du foetus" est trés riche en ces particules, mais aussi trés riche en des éléments de 1a pensée de Buffon. Analysons les; clest ce capitre-el plutét que les chapitres préliminaires (53), qui nous montre en quoi consiste 1'épigénése. Ayant déterminé par des obser- vations de ses propres expériences (Chapitre VI), observations en accord avec celles de Lecuuenhock (Chapitre VIL), que chaque semence, celle de Ja fenelle aussi bien que du nile, est constitué de parties organiques vivantes, les preni®res assemblages de molécules organiques, envoyées de chaque partie du corps comme des parties superflues de 1a nutrition (tout cect dans le Chapitre VIII: "Réflexions sur les expériences pré~ cédentes"), i1 ne restait qu’a expliquer 1a formation du petit au sein de la mre A partir du mélange de ces deux substances. Le principe de 1a génération est le m@me, nous l'avons vu, que celui de la nutritio: une pénétration de parties organiques se trouvant dans les semences dans Je “moule intérieur" qui est 1a matrice. Voila en termes généraux le mo- dle théorique. Qu'est-ce qui se passe en réalité? "Je congois... que par ce mélange des deux liqueurs séminales, ...[1'] activité des molé cules organiques de chacune des deux liqueurs est conme fixée par 1'ac~ tion contre-balancée de l'une & de Iautre, en sorte que chaque molécule organique venant A cesser de se mouvoir, reste A la place qui lui con- vient, & cette place ne peut étre que celle de 1a partie qu'elle occu- pait auparavant dans I'animal, ou plust6t dent elle a &té renvoyée dans le corps de l'animal;... par conséquent ces nolécules formeront néces 276 sairement un petit étre organisé, senblable en tout 2 1'aninal dont elles sont lextrait." (54) Toute la formation du foetus se fera par le jeu des molécules organiques et de leur activité; par le recours Ala notion de force (forces pénétrantes), par le dynamisne de l'action et réaction, Buffon &chappe aux prises du mécanisme brut pour expliquer natur cette formation. Pour que le développement se fasse, il faut que tivité ou 1a force" des molécules d'un des parents soit contrebalancée par "la résistence ou le mouvement contraire" des molécules de l'autre: “sans cette espéce d'équilibre entre L'action de ces molécules de deux individus différens, il ne peut résulter 1’état de repes, ou plustét 1 tablissenent local des parties organiques qui est nécessaire pour la for- mation de L'animal". (55) Cette nécessité de "fixité" am&ne Buffon a con- sidérer que toute génération ne peut se faire sons les particules "males" et "femelles"; le développement du chaque bouton qui peuvent devenir un petit arbre n'est possible que si le parent envoie les deux genres de molécules, "en sorte que dans ce sens tous les &tres vivans ou végétans doivent tous avoir les deux sexes conjointement ou séparément, pour pro- duire leur semblable", Toutes les fois donc que les molécules des li- queurs séminales de chaque individu mle et femelle, “étant également organiques & actives" peuvent se fixer "en agissant mutuellement les unes sur les autres", il y a formation des corps organisés. Tandis que cette différentiation de molécules m@les et femelles, ct 1a nécessité de leur union pour "Fixer" leurs activités, explique pourquoi la formation ne commence pas dans le corps de chacun des parents, au moins dans la génération dite sexuée (Buffon expliquera & partir de son systéme aussi bien la génération des végétaux que celle des hermaphrodites et des par- thénogénétiques, variations dont nous avons vu 1"importance pour la dé- termination théorique du mod@le épigénétique). Mais nous nous limitons A la génération dite sexuée (dite, parce qu'd partir de 1a constatation que les molécules "nfles & fenelles" sont nécessaires pour toute repro- duction, & 1a rigueur toute génération peut Gtre appelée "sexuée” ["... Ja nature..." (56))), Je probléme principal de Buffon dans ce chapitre est que méme si elle on pourra dire que les sexes se trouvent partout di est, dit-il, "la man: ¢ de reproduction 1a plus ordinaire" (57), elle ntexplique point Morganisation du foetus. Les molécules, renvoyées de 277 de chaque partie du corps des deux parents, lorsque placées ensemble, ne peuvent pas détruire les mouvenents des unes des autres parce qu’étant sinilaires,elles n'ont pas des "forces" contraires (58); qu'est-ce que donc le "point d'appui" nécessaire & le réunion des molécules pour en for- ner un corps organisé entier? TL faut chercher ce centre de force dans des molécules d'un sexe qui seront différentes de celles des autres, “seules qui puissent avoir un effet différent pour réagir contre les autres,, & arréter leur mouvement." I1 faut chercher des parties dissen- blables: " sexuelles". (59) L'argunent de Buffon n'est pas toujours cohérent, nous ces parties sont les molécules qui proviennent des parties semble-t-il. Les molécules provenant du sexe masculin, nous dit-il, se- ront le point "appui des molécules provenant "de toutes les parties du corps de la femelle", et vice versa, ce qui explique d'ailleurs pour~ quoi les garcons ressenblent davantage & leur mére qu'& leur pére, et les filles plus au pére qu’ la mére. (60) Cependant, pour expliquer 1a ressemblance que enfant a & chacun des partents, une hérédité mélangée, il pense qu'autour du point fixe qui est formé des molécules provenant des parties sexuelles, soit du pére, soit de la mére, “selon que les molécules organiques de 1'un ou de Iautre individu se trouvent @tre plus abondantes ou plus voisines de ce point d'appui, elles entrent en plus ou moins grande quantité dans 1a composition du nouvel &tre qui se forne ~ (61) Autour de ce point d'appui viennent s'organiser toutes les molécules or- de cette fagon au milieu d'une liqueur homogtne et cristalline. ganiques renvoyées de chaque partic des corps des parents, s*arrangeant "suucessivenent, & dans le mine ordre of elles Etoient dans le corps de L'individu", cela selon "les lois d'affinités qui sont entre ces diffé~ rentes parties & qui déterminent les molécules & se placer comme elles ". (62) Nous ajoutons 1'étoient dans les individus qui les ont fournies. un détail avant que de donner nos conclusions. On peut se demander ce qui s'est passé des molécules des parties sexulles de l'autre parent qui n'ont pas servies de point d'appui A l'eabryon. Eh bien, elles deviennent le point d'appui autour duquel viennent s'organiser les molécules qui le, une molécule nasale de 1a mere n'entrent pas dans le foetus (par exes qui se trouvait trop Gloignée de la téte, et qui a perdu, par conséquent, dans 1a concurrence avec la molécule nasale correspondante du pore qui 278 Stait plus proche), pour former le placenta et les enveloppes contenant les vaisseaux qui servent & 1a nutrition de 1'enbryon. (63) Nous ne préten- dons pas faire un exposé complet de la théorie de 1a génération chez Buffon. Mais ces détails que nous avons choisis de présenter nous montre plus clairement I'essenticl du nod@le épigén@tique en ce qui concerne 1a reproduction. Comparons notre résultat avec le mod&le de Maupertuis, et dégageons les Elémants du nodBle qui seront appliqués si heureusement & la théorie de 1a terre et a celle de 1*honne, Conme Maupertuis 1'a fait, i1 y a un “defluxus" qui fait que les molécules de 1a liqueur séminale sont analogues aux parties du corps d’od elles avait été envoyées. (64) "Que la Miqueur sfminale de chaque espéce d'animaux contient une multitude innonbrable de parties propres & former par leurs assenblages des animaux de néme esp8ce", et, conme Je voulait Maupertuis: "Que dans la Liqueur séminale de chaque individu, les parties propres A former des traits senblables A ceux de cet indivi- du sont celles qui d'ordinaire sont en plus grand nonbre, & qui ont le plus d'affinté ; quoiqu'il y en ait beaucoup d'autres pour des traits différents"; voila le point de départ pour Buffon aussi. (65) Buffon ne sera pas tout & fait contre 1texplication de 1'hérédité A la mani&re de Naupertuis (66), mais il ne stentend pas particuliérenent sur les faits d'hérédité, C'est surtout contre le troisidme fait "que 1'expérien- ce nous [c'est-a-dire Maupertuis] force d'admettre": que chaque partic du corps fournit ses zernes". (67) Tout ce qu'envoicnt les parties du corps est, pour Buffon, des molécules, analogues @ chaque partie de laquelle elles se dérivent, analogues " puisqu'elles étoient destinées A nourrir cette partie". (68) Tl n'y a pas de germe parce qu'il n'y a pas d'organi~ sation intérieure, pas d'instinct qui “comme 1'esprit d'une République, est... répandu dans toutes les parties qui doivent former le corps... ou, Gotime déns un Etat monarchique, n'appartient... qu'a quelque partie in- divisible". (69) I1 n'y a que la matire et ses affinités - des "forces pénétrantes", une "matiére organique todjours active, tofjours préte a se mouler, @ s'assimiler & A produire des tres senblables & ceux qui la regoivent...". (70) Cest la disposition des molécules, disposition qui se fait par le jeu des affinités de la matiére, qui se passe de génGra~ tion en génération, et qui assure la fixité de 1'esptce. Buffon ne se 279 livrera pas A des conjectures sur 1'origine de la vie ni des esp®ces; il faut attendre les Epoques de la nature pour que toutes ses réflexions viennent s'arranger dans un syst®me harmonieux qui explique et 1a forma~ tion de la terre et celle des étres vivants. Ici, en 1749, i accepte co: la vie existe, et, pour en venir & son origine élénentaire, une donnée q que les molécules sont dotées de vie: "la vie de l'animal ou du végétal ne paroit @tre que le résultat de toutes les actions, de toutes les pe- tites particulires (s'il m'est permis de m'exprimer ainsi) de chacune de ces molécules actives dont 1a vie est primitive et paroft ne pouvoir "et de "vie" qui le Sere détruite:. (71) Crest L'apposition dMactivit est significative ici. Au début de cet Histoire il avait dit que vivant & Lanimé, au licu d'étre un degré métaphysique des Gtres, est une propriété physique de la matidre." (72) Cette propriété est la "for- co"; 1a vie n'est pas autres choses que 1a dispositions de ces forces agissant d'une naniére particuliére sur 1a matiére. Voila ce qui fait que les nolécules sont "organiques"; voilA ce qui fait dispension de Linstinct; voila enfin ce qui rend 1a notion de "noule", enpruntée & Bourguet, naturelle. Bien que non explicit en 1749, par diverses expres~ sions parsenées dans ces textes, nous pouvons supposer que la pensée de ision lu- Buffon sur L'origine de la vie et des espéces repose sur une crétienne. ".,.i1 semble que tout ce qui peut étre, est; la main du Cré~ ateur ne paroft pas s'étre ouverte pour donner 1'étre A un certain nom- bre déterminé d'esp8ces; mais i1 semble qu'elle ait jetté tout-a-la-fois un monde d'@tres relatifs & non relatifs, une infinité de combinaisons harmoniques & contraires, & une perpétuité de destruction & de renouvel- lemens." (73) I1 n'y a pas de germes pré-organisés dans 1a nature, mais il y a de l'ordre. La recherche de cet ordre par des moyens naturels est est précisément 1a raison d'étre du mod&le épigénétique. 11 y a une in- finité de combinaisons harmoniques, mais qu'est-ce qui fait 1"harmonic? L'Histoire naturelle est la recherche des lois naturelles qui régnent dans le monde matériclle pour en faire une harmonie. Pour tout ce qui nous parait en désordre, i1 y a un ordre caché. "ALL Nature is but Art, unknown to thee; ALL Chance, Direction, which thou canst not sees (ay ALL Discord, Harmony, not understood... 280 Le but de l'histoire naturelle est de chercher cette ordre, au moins re- Jatif a notre entendement; la seule méthode pour 1a faire concerne 1'ap- plication du modBle épigénétique, car c'est 1'épigénése seule, conmengant Par une mati@re et un principe organisateur, 1a disposition des forces dans 1a nature, qui pufsse découvrir lordre caché de Lunivers. Dans la théorie de 1a génération, le moule intérieur, principe organisateur, nest rien d'autre que cette disposition de forces. Dans les deux autres essais qui l'acconpagnent, Buffon cherche également @ appliquer son mo- dle pour expliquer ordre caché du désordre apparent. Nous donnons des briaves indications. Ds la premire phrase du second discours, "Histoire et théorie de Ja Terre", nous voyons le but que Buffon se propose pour, 1'Histoire natu- relle: "Il n'est pas ici question ni de 1a figure de la Terre, ni de son mouvement, ni des rapports qu'elle peut avoir A l'extérieur avec les au~ tres parties de 1'Univers; c'est sa constitution intérieure, sa forme & sa mati8re que nous nous proposons d'examiner." (75) Cette déclaration n'est pas Etonnante lorsque lue en rapport avec la fin du Premier dis~ cours qui 1a précédée inmédiatement. Nous avons vu déja que 1'Histoire naturelle ne doit pas s'occuper de ce genre de probléme qui appartient plus proprement aux sciences "nathématiques". Newton nous a donné la ré- ponse de toutes ces questions de la figure de 1a terre, de son mouvement, les rapports extérieurs de l'univers, etc., par des caleuls trés exacts. Cependant 1a question de la constitution de la terre reste irrésolue. _ Newton nous a donné des mesures précises, il nous a proposé une cause de 1a cohérence des phénoménes, 1a pesanteur, mais en prenant la terre et le syst®me solaire pour des objets de fait, dans un systéme établi, il ne nous a pas expliqué leurs constitutions particuliéres, parce qu'il ne s'est pas étendu sur leur formation. Ala premi8re inspection de 1a surface de la terre, nous ne découvrons "aucune régularité, aucun ordre. Si nous pénétrons dans son intéricur, nous y trouverons des nétaux, des minéraux, des pierres, des bitumes, des sables, des terres, des eaux & s comme au hazard & sans aucune régle des natiBres de toute espece, plac apparente;.., [les mati@res & la surface sont] toutes m@lées & dans une espace de confusion qui ne nous présente d'autre image que celle d'un amas de débris & d'un monde en ruine." (76) Par contre, continue Buffon, 281 ces ruines sont habitées; on découvre une régularité partout, depuis Je mouvement des eaux et des aires jusqu'aux saisons périodiques et cer- taines, "...tous nous paroft @tre dans l'ordre; la terre qui tout a Itheure n'étoit qu'un cahos, est un séjour délicieux of régnent le caine & L'harmonic, of tout est animé & conduit avec une puissance & une intel- ligence qui nous renplissent d'admiration & nous élévent jusqu'au Créa teur." (77) Cependant cette admiration du Créateur doit @tre limitée dans 1'étude de 1'Histoire naturelle. On peut en avoir recours pour expliquer Ja création ex nihilo, la création de 1a mati®re et de 1a force attrac~ tive; "mais comme on doit, autant qu'on peut, en Physique s'abstenir ture" (78), ceux, come d'avoir recours aux causes qui sont hors de la X Burnet, Whiston ou Woodward, qui ont attribué la constitution de la terre re, et done l'ordre apparent, & un acte immédiat du créateur, n'ont pré- ché qu'une préformation (pré-organisation) de la terre. Ils ont rendu im- possible toute explication par des causes naturelles, de la formation initiale de la terre, d'un cété, et "des changenens & des révolutions qui peuvent & doivent arriver dans 1'Univers" (79) de l'autre. Voila de nouveau dans L'histoire de Ja terre exactenent le méme esprit que Buffon conbattera dans I'histoire de 1a génération. La recherche de Lordre par des moyens naturels est exclu par toute théorie de la pre-organisation. Encore une fois il faut remonter A Bourguet pour l'origine de 1a pensée de Buffon, non seulement en ce que la sur la théorie de la Terre qui accompagnait les Lettres philosophiques fournit toute 1a mati@re pour la théorie de Buffon, mais aussi en ce qu'il présente l'orientation de toute recherche scientifique. "Ainsi il seroit vrai de dire que tout est organisé dans la mati@re, & que 1irrégularité & 1"inorganisation que nous voyons dans une infinité d'Amas, ne sont qu'apparentes, parce que nous ne saurions appercevoir que de loin, le régulier & L'organisé [1'a~ nalogie, empruntée A Lucrce, d'un honme qui observe une arnée de 1a haw teur d'une montagne suit].... Ils sont soumis aux Régles générales de la Mécanique qui procéde, comme il a 6té dit, de la volonté tout sage de Dicu, & leur arrangements naturels & accidentels produisent tous les Phénontnes du Monde materiel, ce qui n'a pf se faire d'abord, que par une Institution libre, qu'on nonme 1a Création." (80) Buffon n'est pas tout A fait honnéte envers Bourguet. Tl fait référence plusieurs fois aux 282 Lettres philosophiques, en louange ou en critique; mais ce n'est pas as~ sez. D'abord tous les phénomines énunérés par Bourguet, phénom8nes qui doivent @tre expliqués dans toute théorie de la terre (Bourguet ne donne sa théorie que conme "un échantillon du systdme qu'il méditoit, mais qu'il n'a pas proposé, ayant été prévenu par 1a mort" (81)), seront tous repris par Buffon. "I1 faut rendre justice A cet auteur, personne nta mieux rassemblé les phénomfnes & les faite, on lui doit méme cette belle & grande observation qui est unc des clefs de la théorie de la terre, je veux parler de la correspondance des angles des montagnes." (82) Malgré cette louange, Buffon emprunte librement tous les phénontnes que Bourguet avait apportés, sans en faire mention de l'origine, sauf pour quelque cour- tes références & cing des soixante phénontnes de son devancier. (83) Lors- qu'il dit,en termes généraux, que "les matidres terrestres sont remplies de coquilles & autres debris de 1a mer", il cite Bourguet, mais seulement parmi une multitude d'autres sources: "Sténon, Woodward, Ray, Scheuchzer, Jes Trans, Phil., les Mém. de 1"Acad., &c." (84) Assurément le fait est devenu banal avant ce milieu du si&cles cependant nombreux autres des phénontnes apportés par Bourguct, que les plus hautes montagnes "sont entre les tropiques , & au milieu des Zones temperées; Les plus basses sont vers les Cerles polaires & les poles" (85), que les deux mouvements généraux de 1a mer sont celui d'orient en oceident et celui du flux et du reflux (86), que "tous les différens Natériaux de ces Couches de Mon~ tagnes & de 1a Terre ne gardent pas to@jours dans leurs arrangement, les Loix de la pésantcur specifique" (87), sont repris par Buffon en raison de leur importance & sa théorie de la terre. Il ne faut pas tarder sur ces détails de phénontnes qui ne sont pas originaux chez Bourguet. Lors~ que Buffon déerit la thtse de Bourguet, i1 en fait un abrégé qui laisse croire que ce n'était qu'une autre & 1a manidre des Whiston, des Burnet ou des Woodward, qu'il venait de décrire. Cependant dans les "Propos: tions Déduites des Phénoménes précédens pour servir de fondenent 2 un ESSAI d'une nouvelle Theorie de la Terre", qui terminent le Mémoire de Bourguet, il y en a, particulirement parmi celles éffacées par Buffon, qui montrent une attitude autre que celle que Buffon décrira. 11 est vrai que la structure de l'ensemble reste celle du XVITe sigele: d'un cSté, une terre formée dans un méne temps, sa matidre en dissolution 283 dans une eau universellement répandue, condense pour former les montagnes en couches successivenent déposées, remplies de debris de cette vaste mer, et de l'autre cété, L'enbrasement général, résultat de 1'état actu- el du globe "par un effet naturel des dispositions que la Sagesse supréne a mises", 1a consommation du monde "dont les anciens philosophes ont par~ 16, en suivant une Tradition que venoit des premiers Hommes". (88) Entre la création et 1a dissolution du globe terrestre il y a un mouvement cy clique de la mati&re dans un processus lente et uniforme, ce qui est le coeur de la théorie de Buffon. Bourguet veut lui-aussi découvrir 1a rai~ son de la régularité qu'il trouvait dans 1a structure de ces grandes masses, les montagnes. (89) Les auteurs "n'auroient jamais eu recours, ens de i des inondations particuliéres; A des Quragans, ou A des Trenbli Terre épouvantables, a des Repandués ou Alluvions de dix-mille & de tren- te mille ans; & des Cometes,& des Pericycloses ou Circulations perpétuel- Jes tc. parce que leur grande pénétration leur auroit fait voir d'abord que ces belles inventions ne sauroient staccorder d'aucune mani@re avec les Phénoménes qu'on vient d'indiquer, sans parler des autres qui ne s'y accordent pas mieux." (90) I1 semble bien que Bourguet cherchait une mé- canique naturelle pour expliquer Lordre du désordre apparent. Un extrait d'une lettre du Pére Feuillée de 1723 qu'il cite le montre clirement: "Quoique notre Globe ait souffert des changemens trés-considérables, ce- "pendant les Loix admirables de la Méchanique établies dés le Conmence- “ment par le puissance & par la sagesse du Dieu, qui l'ent formé & qui “Le conservent, sont encore les mémes aujourd'hui." (91) Buffon ne sera pas d'accord sur la premiére formation de la terre ~ la formation des (92), si re, que les montagnes pendant que le globe fut dans un état de "Fluidité on le comprend dans le sens d'une dissolution de la mat auteurs antérieurs attribuaient @ L'action du Déluge. Mais c'est L'action perpétuelle de Leau , ctest~a-dire 1a régularité des courants (flux-re~ flux aussi bien que le mouvement général d'orient en oceident), qui expli- que lordre des masses terrestres. "...c'est précisément 4 la Révolution anteur des Eaux, & du Clobe au Cours de la Lune, au Mouvement & 2 la p A la Direction du vent combinées avec le mouvement que tous les Agens communiquérent aux parties de la Terre, qui vienoit récenment de rece~ voir un certain degré de Condensation, qu'est di I'é1évation des Mon- 284 tagnes, Labaissement des Vallées & des Plaines; & 1a formation des Vou~ tes softerraines & sous-marines, & celle du Lit des Riviéres, des Fleu- (93) Par les mots de la derni~ ves, des Etangs, des Lacs & de 1a Mer Bre partie de cette phrase, que les montagnes ont été fornées par la "condensation" de 1a mati8re, nous apercevons tout de suite qu'elle n'est pas de Buffon, Toutefois, que l'eau a sculpté la terre, voila une ide naitresse que Buffon n'oubliera pas. La recherche de l'ordre par action constante des causes naturelles, et en particulier L'action continue de 1eau, est ce qui fait 1a différence entre les théories an~ térieures et celle de Bourguet. Buffon ne nous 1'a pas dit. (94) I1 nlavait pas tout a fait tort; sa théoric est trés différente malgré les principes empruntés @ Bourguet. Ce qu'il y a de nouveau est 1'applica~ tion du mod@le épigénétique & 1'histoire de la terre. Si Bourguet com- nence par une matidre en dissolution, Buffon cherche 1'origine plus ra~ dicale. Comme pour 1a théorie de 1a génération, 11 commence avec une ma- tiBre homogtne, ici la natidre "vitrifiée" ou "vitrifiable"; i1 éprouve néme le besoin de consacrer plusieurs pages pour démontrer son homogéné- ité. (95) Ltaction de l'eau sera ensuite responsable pour les diverses irrégularités de 1a surface de la terre. Cependant il faut remonter en- core plus loin pour expliquer 1a mise en position de ces facteurs de changement. Buffon veut A tout prix éviter une pré-organisation quelcon- que. Ainsi i1 fait remonter son histoire de 1a terre A sa naissance du soleil, lorigine de sa matire, et A sa mise en mouvenent par I'action d'une conBte, Cette mise en mouvement est importante pour 1'épigéntse précisément parce qu'elle nous donne l'origine, l'origine historique et non pas métaphysique, du systéme qui se ticnt par la force d'attraction. Llattraction, voilA le principe organisateur: I'attraction de solet! tiendra les plan&tes dans leurs trajectoires, une fois cette matiére Sbranlée fut donné 1'élan initial; L'attraction réciproque entre les particules de cette matidre sera responsable de la condensation et la 3a du flux et reflux de la mer, c'est-i-dire l'origine des montagnes. La formations des globe teraction de la lune sera la cause constante mati8re honogéne, le principe organisateur, voila les deux piliers d'une thé, € Spigénetique qui expliquera 1'ordre général de la nature. Toutes les "preuves de la théorie de la terre" ne sont apportées gue pour démon- exer cet orire, Les cbservattons histoire naturelle n'y figurent pas pour constituer une encyclopédie de connaissances & propos de 1'histoire de la terre. Elles sont soigneusement choisies pour démontrer que dans ce désordre apparent il y a véritablement un ordre, et pour découvrir la constitution de cet ordre qui régne selon le mod@le épigénétique. T1 y a déjA sélection des "Instantias Ostensivas", des "Instantias Constuti+ vas", "Instantias Monodicas (Irregulares sive Heteroclitas)". Mais nous reviendrons sur les parall@les A 1a méthode baconienne tout & l'heure. Nous avons étudier d'abord la théorie de la génération en ce qu'el- Je est, stricto sensu, lorigine du mod@le "épigénétique"; nous aurions dG, toutefois, conmencer par celle de la terre, car nous y voyons plus clairenent ce que c'est que 1'histoire" chez Buffon. Si c'est par 1'é~ pigén®se que la nature a constitué (ou constitue) ses ouvrages, c'est pour les créer dans un état of ils se conserveront, jusqu'a leur péris- sement, par un mouvenent cyclique. L'histoire, dans le sens moderne du terme, renplace la création: mais une fois créés, les @tres se conservent par 1'équilibre des forces, Dans l'histoire de la terre, le premier des trois essais, il y a un changement continuel "de terres en mers, & de mers en terre", sujet de la dernifre preuve'de la théorie de la terre. (96) L'épigéndse n'est qu'un mod@le pour expliquer les origines, mo- dBle de 1a création qui nous sauve des thése du type préformationiste (pré-organisationiste). L'histoire naturelle, & proprement parler, est Ihistoire du cycle de 1a vie (vie de 1a terre, des animaux, de 1"honme, etc.) Le deuxiéme essai de 1749, que nous avons baptisé incorrectement "de la génération", s'appelle en réalité "Histoire générale des animaux". Mais ce n'est que maintenant, ayant compris les sens des termes "histoi- re" et “origine", que nous pouvons conprendre 1a division de 1"ouvrage de 1749. L'"Histoire générale des animaux" s'occupe effectivement de la génération (de tous les animaux, 1 honme inclu); mais ce n'est qu'un prélude aux volumes qui suivront. Elle est générale en ce qu'elle expli- dire selon le modéle que 1a formation des animaux, en général, c'est: Spigénétique. Les histoires particulitres qui succéderont dans les volu~ espbces particuliéres, lumes A partir de 1749 (97), présentent 1a vie des clest-A-dire un "cycle" que répétera chaque individu le 1"espéce, une fois donné naissance par les lois générales de 1a génération établies 286 dans cette histoire générale des animaux. Le troisime essai s'occupe de 1'homme, non pas de sa formation, ayant été établie en général avec Jes autres animaux, mais du cycle de s2 vie. Mais ici notre analyse se complique en ce que 1'homme a deux faces distinctes. De sa vie matérielle, étant un animal, il y a épij son corps, et cycle de sa vie. En ce qu'il est composé d'un esprit, il y a véritablement une épigén8se épistémologique, ce qui lentrafnait en controverse avec Condillac. Puisque ceci reléve (dans notre thése) plu- tOt de 1a “critique méthodologique", nous mettrons notre étude & plus tard, dans la discussion des quatres critiques comme fournissant les exi- gences A la méthode du mod&le épigénétique. La vraie richesse de 1a pen- sée anthropologique de Buffon se trouve dissimulée dans L'article par le- quel il termine ses essais de 1749, auguel i1 faut tourner maintenant. "Tout ce que nous avons dit jusqu'ici de 1a génération de 1"honme, de sa formation, de son développement, de son état dans les différens Ages de sa vie, de ses sens & de la structure de son corps, telle qu'on la connoft par les dissections anatomiques, ne fait encore que l'histoire de individu, celle de L'esp8ce demande un détail particulier, dont les faits principaux ne peuvent se tirer que des variétés qui se trouvent entre les honmes des différens climats. La premitre & 1a plus remarquable de ces variétés est celle de la couleur, la seconde est celle de 1a for- me & de la grandeur, & 1a troisiéme est celle du naturel des différens peuples:...". (98) Dans ce paragraphe introductoire de l'article "Varié- tés dans L'espéce humaine", paragraphe qui semble offrir rein de nouveau ni d'étonnant, Buffon récume en vérité les hypothéses principales énon~ cées dans 1'Histoire naturelle jusqu'A ce point, et nous invite A lire ces histoires des différentes nations qui peuplent la terre conme autant de prewves de son systéme, Si "1"histoire de 1'espece demande un détail particulier", c'est parce que I'histoire de Lesptce et celle de 1"in- divide ne se confondent pas comne chez les animaux, thse évoquée dans son attaque d’un La Mettrie. (99) Si cette histoire ne peut tirer ses faits principaux que des variétés qui se trouvent entre les honmes de aiff: nts climats, en outre que cela nous donne deux raisons de plus pour effirmer la distance qui nous sépare des animaux (100), nous son mes renvoyés A 1a méthode buffonienne elle-néme ~ A partir des histoires 287 particulidres se dégage une histoire générale, a partir des particula~ rités locales se dégagent des lois naturelles. (101) Si les deux pre~ nidres et plus renarquables de ces variétés se rapportent a 1'espece en ce qui concerne son @tre corporel, la troisitme, nous le verrons, impli- que cette "autre nature" que Buffon vient d'établir solidement comme une partie essentielle de 1'étre. (102) Ce que Buffon vient d'établir par analyse de 1'individu humain, individu coume représentant de l'espice, 4 va maintenant dénontrer pour Mespice entitre par synth3se de toutes les histoires particuliéres des races humaines. re de base; ceci établit (cela sera L'épigén’se présume une mat: IMhistoire individuelle des articles préliminaires), la recherche des effets plus généraux qui expliqueront le développement de tout le poten- tiel du sujet doit occuper le naturaliste. Nous arrivons enfin 3 la pleine portée de ce premier paragraphe des "Variétés" cité ci-dessus. L'histoire naturelle de 1'individu étant une histoire générale, elle sert comne matiére de base A une histoire de l'esptce “qui demande un détail particulier". C'est que 1'épigéndse 6tant un mod@le, elle peut s'appliquer & différents niveaux d'étude, et s'embofter les niveaux con- sidérés les uns dans les autres. L'histoire est générale de 1"individu (numain) par rapport a celles, particuliéres, des races (ici 1'histoire cyclique de 1"individu étant la matitre de base, les conditions du mi- lieu le principe organisateur de 1'épigénése); mais son histoire était auparavant particuliére 4 1"honme, par rapport 4 celles des autres ani-~ maux, par la reconnaissance de sa nature particuliére, une nature double (ici la mati®re de base étant soit le corps soit 1'ame; l'histoire épi- génétique, soit le développement de ce corps qui se termine dans le cy- cle de la vie, soit Ihistoire du développement de 1'ame qui termine dans le cycle des sens). Et pour continuer L'embottement des épigéndses, Lhistoire du développement du corps commence avec celle du germe... Lorigine bien entendu du modéle. 11 y a deux fagons, disait Buffon, de présenter les observations d'Histoire naturelle dans un ordre naturel: sla premi&re est de remonter des effets particuliers 4 des effets toutes plus généraux, & l'autre de descendre du général au particulie deux sont bonnes, & le choix de I'une ou de 1'autre dépend plutét du génie de L'Auteur que de 1a nature des choses, gui toutes peuvent étre 288 également bien traitées par l'une ou l'ature de ces mani@res". (103) Le mod@le épigénétique est le len entre 1'analyse et 1a synthise, mais aussi entre la science et le fonctionnement de 1a nature. Dans ce sens, 11 faut lire les "Variétés dans 1'esp2ce humaine" comme le point culminant des essais de 1749, et le paralléle anthropo- e des an: logique 1'histot imaux qui sera publiée & partir de 1749. D'un cSté, la recherches des origines des différentes races a 1'intérieur de Lesp&ce humaine selon des causes naturelles, que nous étudierons & 1'in- stant, sera étendue & la considération des différentes esp8ces "animaux. De l'autre cdté, 1a distribution géographique des ces races humaines de~ viendra un concept extrémenent important pour l'étude des espéces ani- males. Mais l'article est aussi le point culminant en ce qu'il nous amBne au plus haut degré de développement par 1'épigéndse, la société humaine, société qui, & proprement parler, n'a point de corrélat dans le monde aniné. Il nous senble difficile de savoir si, pour Buffon, l'homme se ré- unissent en société par sa volonté (ce qui releverait de sa nature spi- rituelle) ou par son organisation matérielle (c'est-A-dire un instinct qui releverait de sa nature animale). Partout cette mosaique de peuples, il est tenu pour acquis que 1honme est un @tre social. Mais tous les degrés de perfectionnenent dans la société, de police ov de civilité, sont rencontrés. En conparant les deux extrénes, i1 semble que c'est par choix rationel qu'on la fait, conscient des bienfaits possibles par une telle union. "Un peuple policé qui vit dans une certaine aisance, qui est accofitumé une vie réglée, douce & tranquille, qui par les soins d’un bon gouvernement est a 1'abri d'une certaine misire, & ne peut manquer des choses de premi®re nécessité, sera par cette seule raison, composé d"honmes plus forts, plus beaux & mieux faits qu'une nation sauvage & indépendante, of chaque individu, ne tirant aucun se~ cours de la société, est obligé de pourvoir A sa substance, de souffrir alternativenent la faim ou les excts d'une nourriture souvent mauvaise, de s'épuiser de travaux ou de lassitude, d'éprouver les rigueurs du cli- mat sans pouvoir s'en garantir, d'agir en un mot plus souvent conme ani- nal que cone homme." (104) Si ce n'est pas par choix rationel que Lon se forme en société, 11 semble que c'est od 1"intelligence des bienfaits 289 manque que les hommes ne l'ont pas fait et subsistent toujours dans les conditions aussi misérables. Dans le tome qui suivra en 1753 Buffon 6— claircira sa position a 1'égard de 1a société humaine. (105) "Parmi les hommes, 1a société dépend moins des convenances physiques que des rela~ tions morales. L'homme a d'abord mesuré sa force & sa fotblesse, il a comparé son ignorance & sa curiosité, il a senti que seul {1 ne pouvoit suffire ni satisfaire par lui-méne & 1a multiplicité de ses besoins, i1 a reconnu I'avantage qu'il auroit A renoncer A Iusage illimité de sa volonté pour acquerir un droit sur la volonté des autres, il a réfléchi sur 1'idée du bien & du mal, 41 1'a gravé au fond de son coeur A la fa~ veur de la lumiére naturelle qui lui a été départic par 1a bonté du Gr ateur, il a va que la solitude n'étoit pour lui qu'un état de danger & de guerre, i1 a cherché la sfireté & la paix dans 1a société, {1 y a por- té ses forces & ses lumitres pour les augmenter en les réunissant & cel- Jes des autres: cette réunion est de 1homme l'ouvrage le a fort, i1 n'est grand, il ne commande & 1'Univers que parce qu'il a sf se as age _le plus sage. En effet il n'est tranquille, il n'est mmander A lui-m@me, se doxpter, se sofimettre & s’imposer des loix; qu’ (106) Au début de son chapitre "Sociétés animales et sociétés hunaines" Lhomme en un mot n'est homme que pai sii se réunir A 1honme." chez Buffon, Duchet (107), s'appuyant sur ce texte d'Homo duplex que nous venons de cité, conclut que "de néne qu'un ‘sens supérieur! confére & L"individu une supériorité naturelle sur n’importe quel animal, de néne, au niveau du groupe, i1 n'y a aucune commune mesure entre le méca- nisme qui rasseuble les esptces aninales en "troupes", ct le libre choix des individus qui s'organisent en sociétés." Nous croyons cependant que ce texte est plutot une fanfare de "sublimité” littéraire que Lexpres- sion d'une position scientifique. La véritable pensée de Buffon sur cet~ te question est assurément beaucoup plus complexe, comme Duchet elle-néne le montre. (108) En effet, il est plus avantageux & notre thse du modéle Spigénétique que 1'honme soit un animal social primordialement, non pas come une idée innée, mais comme une partie de son instinct animal. Si au contraire la raison créait 1a société, il faudrait chercher un prin- cipe ailleurs que dans 1a nature parce que les Limitations et faiblesses ne L'auraient pas laisser survivre. "Il est vrai que tout a rel 290 concours & rendre I"honme sociable; car quoique les grandes sociétés, les sociétés policées, dépendent certainenent de Lusage & quelquefois de L'abus qu'il a fait de sa raison, elles ont sans doute été précédées par des petites sociétés, qui ne dépendoient, pour ainsi dire, que la Nature, Une famille est une société naturelle, d'autant plus stable, d'au- tant mieux fondée, qu'il n'y a plus de besoins, plus de causes d'attache~ ment. [Cause naturelles d'attachement suivent]" (109) Nous soutenons que pour interpréter adéquatement tous ces passages A propos des sociétés il faut les réévaluer en termes de son nod&le épigénétique de 1'Histoire naturelle. I1 faut done distinguer deux choses, que Buffon ne fait pas qe m@me ni explicitement, ni & vrai dire, clatrenent: L'origine et 1a cause de 1'épigénse. Et nous soutiendrons que 1"épigénése particuliére de l'esp8ce humaine est moulée par la partie spirituelle de 1"homme, ce qui fait la différence entre les sociétés animales et celles des honmes. De méne que 1"individu se distinguait des individus animaux par sa cré- ativité personnelle, et surtout par sa “perfectibilité", toutes les deux grfce A sa raison, de méme les sociétés hunaines, les honmes réunis pour leur avantage mutuel, sont distinguées par la variété dans leurs ouvrages mais, plus important, par la perfectibilité de la race, par le moyen des institutions de la société, L'listoire est done possible chez les diverses nations du globe grace & la raison. En effet, L'histoire dans ce sens présuppose une faculté de raison dans l'espéce concernée, pour Buffon. Les animaux ne peuvent pas avoir, A proprement parler, une His~ toire. L'esp&ce animale a une histoire naturelle, mais les individus doivent obéir servilenent aux exigences de leur nature. L'épigénse de Ja nature implique un état cyclique lorsque le point de perfectionnement est pleinement achevé. S'il n'y a pas de transformisme chez Buffon, et et particulier en 1749, c'est parce que 1"idée de cycle, nécessitée par le modBle Spigénétique, couplée avec cette conception de 1'Histoire, ne lui a pas laisser méme la possibilité de le considérer. 11 est done in~ correct de poser 1a question du transformisme chez Buffon @ cette date. Il faut attendze, aprés son expérience avec 1a myriade d'espéces animales qui peuplent chaque territoire du monde, qu'il soit susceptible de con- sidérer d'une maniére nouvelle 1'Histoire du globe et de ses habitants, Nature, Mais pour revenir @ l'article 291 des "Variétés", 1'Histoire est elle-néme congue sur le modéle épigénéti- que. Elle doit répondre aux exigences de 1'histoire naturelle en ce qui concerne 1a mati@re avec laquelle elle sera construite. Et pour cette raison il est absolunent nécessaire d'étudier les peuples primitifs, les sauvages si méconnus, pour voir l"honne avant l'Histoire, pour déterminer ce qui vient de 1'éduction, de 1"imitation, de Iart et de 1'exemple, pour déterminer enfin 1a mati’re primaire dans le mod®le épigénétique. La société est proprement humaine, en ce qu'elle développe par L'accord mutuel des menbres, qui travaillent ensenble, 4 1a lumfare de Ja raison, pour le bienfait du groupe. On ne peut pas appliquer la néme notion aux esp&ces animales. Dans son article sur le castor, Buffon dis- tinguera "la société libre de homme, de laquelle, aprés Dieu, 41 tient toute sa puissance; 1a société génée des animaux, to@jours fugitive de- vant celle de 1"homme; & enfin la société forcée de quelques petites bétes, qui naissant toutes en méne lieu, sont contraintes d’y demeurer ensemble." (110) I1 est évident que 18 of L'instinct régit, {1 ne peut pas avoir de société "Libre"; "[1es] travaux qui n'étant que le produit d'une nécessité physique, un résultat de mouvemens continus, s'exercent tofijours de la méme fagon, dans tout les temps & dans tous les 1eux, par une multitude qui ne s'est point assemblée par choix, mais qui se trouve réunie par force de nature. Ge n'est donc pas la société, c'est le nombre seul qui optre ici; c'est une puissance aveugle, qu'on ne peut comparer & la lumiBre qui dirige toute société", (111) La notion de société est peut-Gtre celle 1a plus digne et 1a plus véngrable pour cet homme cosmopolite et éclairé. Cependant, {1 faut la laisser, car bien qu'elle soit une des questions abordées dans les "Va~ auvage" A celle de riétés" (par exemple, le rapport de la notion de société), elle n'est pas la plus riche, ni la plus importante. I1 faut étudier les "variétés", ct en particulier l'origine de ces variétés dans L'espce humaine. C'est ici ot on trouve le lien entre 1'anthropologie et I'histoire naturelle, entre l'histoire de 1'houme et celle des ani- maux. Conmengons done par un exanen de cet article, pour dégager tous Jes paranttres d'une pensée trés riche, aprés lequel nous serons plus en état de faire de justes comparaisons, et d'en tirer des résultats géné 292 Lorsque 1"énumération de tous les peuples de la terre était com pl&te, Buffon pouvait commencer 3 chercher les causes des variétés de Lespace - les variétés tant essentiellement, d'aprés lui, celles de la couleur, de la forme et de la grandeur, et du naturel. La question était d'autant plus importante que Lesp®ce était unique, que toutes les nuan— ces possibles se trouvaient dans 1a couleur, dans les coutumes, et dans Ja civilité, mais que la marche de 1a Nature, qui se faisait ailleurs toujours par degré imperceptible, etait interrompue entre 1'homme et les autres @tres vivants par une bréche infranchissable, celle de la distance infinie entre ses facultés et celles des animaux. Bien que ces variations étaient superficielles, la preuve étant que elles sont toutes reconnues, nous le verrons, pour réversibles, 41 fallait chercher leur cause, si ce n'etait que pour démontrer 1'unité de 1espace (des nouvelles obser vations qui viendront vérificr les résultats déjA établis), cette unité A travers le globe entier qui se contraste de la diversité des espa 6 animales, et, plus généralencnt mais plus essenticllement, les rapports de Ihonme A la Nature. Buffon n'avait pas & aller trés loin pour en trouver ces causes, car les voyageurs qu'il connaissait bien, et qu'il a déployés dans 1a recherche de matériaux pour 1a rédaction de son chapitre (112), avaient eux-mémes offert des raisons classiques: 1"influence du climat, mais aussi celle des mocurs. Nous ne prétendons pas donner toute une histoire des réflexions sur 1a cause des variétés dans 1'esptce humaine, ni de celle sur 1'influence du climat. Mais nous voulons suggérer que cette pensée a unc tradition bien établie 1'époque de Buffon. Nous pouvons remonter au moins jusqu'au XVIe si&cle, sans chercher des indications dans L'autorité de 1"Antiquité. (113) Bien que Montaigne s'appuie sur la diversité des coutumes & des lois des différents peuples pour démon- trer que "la raison humaine est une teinture infuse environ de pareil pois 2 toutes nos opinions et moeurs, de quelque forme qu'elles soient: infinie en catiere, infinic en diversité” (114), c'est plutét son suc~ cesseur Charron (115), espérant rédiger une morale pratique fondée sur Ja “lumiére naturelle" ~ "rayon de divinité" - une "preud'homie libre, franche, généreuse, riante, constante", non soumise aux "religions, lois et coutunes" (116), qui cherchait les caures des différents naturels des 293 peuples dans le climat, Essai trés général, les plus grandes différences entre les nations se rapportent A trois bandes latitudinales, quoiqu’il adnit que, plus localement, les différences physiques aussi bien que cel- Jes des “facultés de 1'ane" sont aussi diverses que les assiettes du monde, selon leur terrain, L'influence du ciel et du soleil, lair et le climat. (117) Pascal, lorsqu'il faisait face a ces thtses libertines, était d'accord sur le principe, mais non pas sur les conclusions. "On 1a verrait [cette maxine, "la plus générale de toutes celles qui sont parni les hommes, que chacun suive les moeurs de son pays"] plantée par tous les Etats du monde et dans tous les tenps, au lieu qu'on ne voit rien de juste ou d'injuste qui ne change de qualité en changeant de climat (118) Cette diversité des mocurs parmi les hommes prouvent que les lois humaines, qu'une justice qui résiderait dans les lois naturelles, ne sont pas universelles, mais qu'elles dépendent de 1a caprice des hones. “Trois degrés d'élévation du péle" - il est manifeste que c'est la tra- dition charronienne qui est visée ici. Du point de vue humaine: "Chaque chose est ici vraie en partie, fausse on partie. La vérité essentielle n'est pas ainsi: elle est toute pure et toute vraie. Ce mélange la dés- honore et L'angantit. Rien n'est purenent vrai; et rien n'est vrai, en A'entendant du pur vrai." (119) Pascal trouve le défaut ailleurs: "I1 y a sans doute des lois naturelles: mais cette belle raison corrompue a tout corrompu..." (120), pour fonder la vraie loi, la loi Gternelle et inmuable de Dieu, la loi donnée & Mol'se et le peuple juif, la plus con- stante et 1a plus parfaite. (121) Bien que Locke distinguat entre "in- nate laws" et les “laws of nature" (122), {1 suivra la tradition pasca~ lienne en ce qu'a partir de la diversité des moeurs, 11 conclua que les principes moraux ne sont pas innés (123), mais qu'ils doivent @tre exa~ minés (124), contraire & Pascal, & le lumidre de la révélation et 1a iasn". (125) Pour revenir A l'histoire naturelle, un des grands problémes pour “enthous raison, en particulier pour prévenir 1 les naturalistes du début du sidcle était d'expliquer la couleur des noirs, ce qui n'était qu'un cas particulier du probléme de 1a possibili- té de variétés dans 1'espdce humaine en général. Si le "systtme des ceufs" pouvait expliquer que 1a noirceur est transmise par la génération, indépondamment de 1'influence du clinat, "puisqve si I'on transporte un 294 noir et une noire d'Afrique en un Pays froid, leurs enfants ne laissent pas d'estre noirs aussi bien que tous les descendants jusqu'd ce qu'ils marient avec des femmes blanches" (126), Bourguet, et par la suite Mau- pertuis, montra les complexités de la question. Le "systéme des ocufs", tel que congu jusqu’alors, est en défaut, et nous avons vu que Bourguet tente une explication de la génération qui incorporerait les faits de I hérédité et des monstres. Pour démontrer que le nfle apporte autant que la femelle, il décrit le "Bif" et le "Baf", respectivement des hy- brids entre une anesse et un taureau, et une jument et un taureau, des "Jumarres de Piedmont", (127) Mais il souléve également le fait que les enfants nés de parents de différentes couleurs portent les traits de chacun des parents. (128) "ais, dit-on [les défenseurs de la pré-exie~ tence, que nous venons de voir], les Noirs transplantés en Europe font des Enfans qui leur ressemblent. Cela est vrai. T1 faudroit pourtant Lexpérience de plusieurs sitcles, pour votr s'il n'y arriveroit aucun changenent. Que si le Climat n'est pas suffisnt pour avoir produit 1a noirceur dans 1a peau de Mores, il ne seroit pas deraisonable de juger que conme 1’extréne blancheur des Lépreux est un défaut, 1a Noirceur le soit aussi...". (129) Maupertuis reprend le probléme a son tour, et il semble suivre dans la méme Lignée de Bourguet. 11 ne faut pas oublier que c'est la réflexion sur le Négre-blanc, apporté & Paris en 1744, qui a inspiré la dissertation de la méne année. Si cet événement ne fut que Loceasion pour présenter une nouvelle théorie de 1a génération, il n'en reste quand méme que c'était précisément parce que, né "& ce qu'on as~ sure, de pére & de mére afriquains, & tris-noirs", la théorie de 1a pré- existence se démentissait tout-A-fait. (130) $i l'on consid@re cette blancheur comme une "maladie de 1a peau", c'est un accident qui, cepen- (31) Qutest-ce que done L'explication de l'origine des Noirs et des Blancs? dant, “se perpétue, & qui subsiste pendant plusicurs générations. Selon la théorie des ovistes (1a méne chose tient également pour les animaculistes), "si les hommes ont été d'abord tous formés d'ocuf en oeuf, il y auroit eu dans Ja premiere mere des ocufs de différentes couleurs qui contenoit des suites innonbrables d'ocufs de 1a méme espece, mais qui ne devofent éelore que dans leur ordre de développement aprés. un certain nombre de générations, & dans les temps que 1a Providence avoit 295 (232) La théorie est assujettic A de nonbreuses difficultés, en particulier parce narqués pour lorigine des peuples gui y étoient contenus. que ce n'est point “au blanc & au noir qui se réduisent les variétés du genre humain; on en trouve mille autres: £ celles qui frappent le plus notre vue ne cofitent peut-8tre plus 8 la Nature que celles que nous n'ap- percevons qu'A peine." (133) Il faut plutdt croire que "la Nature con- tient le fonds de toutes ces variétés: mais le hasard ou l'art les met~ tent en ocuvre." (134) I1 ne faut pas de tout lire la théorie darwinien- ne ici. Certes, il y a chez Maupertuis 1'idée de sélection artificielle: Frédéric Guillaume 2 choisi les hommes pour sa garde par une sélection (135); les sultans bla~ des individus "de hautetaille & de belle Figure’ sés dans leurs serails qui ne renferment que des femmes de toutes les esp8ces communes, pourquot "ne font-ils pas faire des especes nouvelles?" (436) 11 y a aussi I'histoire des pieds courts des chinoises; & vrai dire il n'y a pas ici "sélection" chez Maupertuis. Mais i1 note que ce n'est "pendant les premiers temps de leur enfance on tient pas seulenent que leurs pieds serrés, pour les empécher de croftre. Mais il y a grande ap- parence que les Chinoises naissent avec des picds plus petits que les fenmes des autres nations. C'est une renarque curieuse 4 faire, & qui mérite Lattention des voyageurs." (137) ayant lu, aprés essai d'ex- plication des phénonénes d'hérédité - la production des variétés acciden- tales, la succession de ces variétés d'une génération & l'autre, et enfin L'établissement ou la destruction des espdces ~ que 1'expérience de le mutilation des animaux pendant plusieurs générations pour diminuer peu A peu les parties retranchées, et pour, 4 la fin, les anéantir (138), on est ancné A croire que chez les Chinoises il stagit plutdt de 1'h rédité des caract@res acquis que d'une sélection artificielle. Toutefois, lorsque Maupertuis dit que "la sage Nature, par le dégofit qu'elle a in- spiré pour ces défauts, n'a pas voulu qu'ils se perpétuassent; chaque pere, chaque mere fait de son mieux pour les éteindre; les beautés sont plus sirement héréditaires" (139), en ce qui concerne les variétés dans L'espBce humaine, il senble qu'il y 2 véritablement une sélection con- sciencieuse. A propos de Frédéric Guillaune, “la fortune rendoit heureux tous ceux que la Nature avoit formés grands", 1a fortune étant le godt “excessif" de ce "Roi du nord" pour les honmes "de haute taille & de bel- 296 le figure". (140) "...ceux [des variétés] dont l'industrie s"applique & satisfaire le gofit des curieux, sont, pour ainsi dire, créateurs d'es- péces nouvelles. Nous voyons paroftre des races de chiens, de pigeons, de serins, qui n'étoient point auparavant dans 1a Nature." (141) Oui, des pigeons, st chers A Darwin! Maintenant {1 ne parait pas aussi bizarre que Maupertuis explique lorigine des "Nains" et des "Géants", qui ne se trouvent que vers les péles, aussi bien que les Noirs, dans les zones torrides, en ce que, considérés par leurs confréres comme des monstres, ils étaient forcés de migrer vers les terres moins habitables. (142) Liessai de Maupertuis n'est que cela ~ une tentative d'expliquer les phénoménes de la génération. 11 y a donc, & cOté de cette explication par sélection artificielle, celle de 1'influence du milieu. Comment peut~ on rendre compte de la différentiation des hommes dont les variétés sont si conformes aux nuances du climat? Conment faut-il interpréter 1"hono- généité de 1a couleur selon les bandes de latitude? "Le phénomene le plus remarquable, & la loi 1a plus constante sur la couleur des habitans de la Terre, c'est que toute cette large bande qui ceint le globe d'o~ rient en occident, qu'on appelle 1a zone torride, n'est habitée que par des peuples noirs, ou fort basanés. Malgré les interruptions que la ner y cause, qu'on la suive a travers 1"Afrique, "Asie & 1'Anérique, soit dans les isles, soit dans les continens, on n'y trouve que des nations noires: car ces hones nocturnes dont nous venons de parler, & quelques Blancs qui naissent quelquefois, ne méritent pas qu'on fasse ici d'ex~ (143) La pensée se trouvait mot pour mot chez Charron, et buf- ception. fon n'oublira pas 1a lecon. (144) Il n'y a pas dualité dans 1a pensée de Maupertuis. Les variations accidentelles se produisent au miveau des germes envoyés 4 Ja liqueur séminale, de toutes les parties du corps, ce qui explique d'ailleurs Ihérédité des caractdres acquis. Mais, dit-il, "quoique je suppose ici que le fonds de toutes ces variétés se trouve dans les liqueurs séminales m@mes, je ntexclus pas 1influence que le climat & les aliments peuvent y avoir. I1 semble que la chaleur de 1a zone torride soit plus propre & fomenter les parties qui rendent 1a peau noire, que celles qui la ren~ ‘oli peut aller cette influence du climat dent blanche: & je ne sais jusq suites de sidcl ou des aliments, aprés de longues 8." (145) Les varia~ 297 tions sont véritablement induites par 1"influence du climat; néannoins il nty a nullement de sélection naturelle dans le sens de Darwin, car la "fortune" qui jouait un réle dans la sélection artificielle, par exemple Je goat de Frédéric Guillaume, ne joue point de réle dans 1a nature. Maupertuis n'a pas pu trouver d'analogie de la sélection artificielle dans la nature. Il y a d'autres textes qui invoquent une espéce de sélec~ tion & la mani@re de Lucr&ce, (146) Mais bien que dans le Vénus physique il y a des variations fortuites, et leur perpétuité par des générations répétées d'individus qui les ont, ou leur effacement par des générations répétées de ceux qui ne les ont pas, Naupertuis ne peut pas, par les exigences de sa propore théorie de la reproduction, échapper & 1a pensée que les variations sont accidentelles, et peuvent se perdre aussi facile- ment qu'elles sont venues. C'est ainsi que le milieu prend le dessus, en ce que action continue des conditions extérieures est nécessaire pour assurer la continuité de laccident. C’est pourquoi {1 peut penser que le fait qu'il y a plus d'enfants nés blancs pat accident parmi les noirs, que de noirs parmi des blancs (réapparition d'un "germe" acquis d'un aieul). La noirceur n'est qu'un accident devenu héréditaire par 1'influ- ence continuée de climat de la zone torride (les "noirs" ayant été ex- pulsés par des blancs comme des monstres). Le livre de Maupertuis, petit en volume, n'est pas moins riche en idées. Et si nous avons déviés pour faire ressortir toute sa complexité, clest parce qu'il faut lavoir bien conpris avant d'analyser le texte de Buffon. Ici Buffon ne fera pas une théorie de la variation par rapport Asa théorie de la génération. Mais par les paralléles qui se trouvent entre lorigine des races humaines et celle du foetus de 1"individu, toutes les deux se constituant selon le mod@le @pigénétique, nous ne pouvons pas croire qu'il s'éloigne trop de la pensée de Maupertuis. Ce qui est evident c'est que "influence du milieu, le climat par tous ses effets (non seulment selon la distance du péle, nais aussi les vents, humidité, les effets particuliers des terrains, etc.) est la cause de 1 dit Ja couleur, et la nourriture, 1a cause de 1a forme. (147) Lorsqu "que le germe de la noirceur est communiqué aux enfans par les Jes méres", ou que non obstant la noirceur de lenfent malgré le pays de naissance, “aprés un certain nombre de générations, cette couleur ne 298 changeroit pas sensiblement, i1 y a... toutes les raisons du morde pour présuner que comme elle [1a couleur] ne vient originafrement que de I"ardeur du climat & de l'action long-temps continuée de la chaleur, elle s'effa- ceroit peu 8 peu par la température d'un climat froid, & que par conse- quent, si L'on transportoit des Négres dans une province du nord, leurs descendans A la huitiéme, dixitme ou douzitme génération seroient beav coup moins noirs que leurs ancétres, & peut-@tre aussi blancs que les peuples originaires du climat froid ot ils habiteroit" (148), nous sonmes obligés de revenir & Maupertuis pour lorigine de sa pensée, Conme pour le dire une dernitre fois, dans le dernier paragraphe de l'article, il répétera les causes de 1a variation: "1'influence du climat,... la dif- férence de la nourriture,... celle de 1a maniére de vivre,... les mala~ dies épidémiques, & aussi... 1¢ mélange varié A 1'infini des individus plus ou moins ressenblans; que d'abord ces altérations n'étoient pas si narquées, & ne produisoient que des variétés individuelles; qu'elles sont ensuite devenues variétés de esp8ce, parce qu'elles sont devenues plus générales, plus sensibles & plus constantes, par 1’action continuée de ces ménes causes; qu'elles se sont perpétuées £ qu'elles se perpétucnt de génération en génération comme les difformités ou les maladies des pares & des mBres passent leurs enfans; & qu'enfin, comme elles n'ont &té produites originairement que par le concours des causes extéricures & accidentelles, qu'elles n'ont été confirmées & rendues constantes que par le temps & l'action de ces mémes causes, il est trés~probable elles disparoitroient aussi peu A peu, & avec le temps, on méme elles deviendroient différentes de ce qu'elles sont aujourd'hui, si ces mémes causes ne subsistofent plus ou si elles venoient & varier dans d'autres circonstances & par d'autres conbinaisons" (149), comme s'il voulait, pour une derni&re fois, souligner, par ce serment d'allégeance qu'il était redevable A Maupertuis. Malgré que les grandes lignes fussent tracées par Naupertuis, L'ori ginalité de Buffon se montre dans son emploi de L'influence du climat, nétique. Le "Variétés dans 1'es- et cela par 1'appliction du moddle ép pace humaine" cherche A conprendre Morigine de ces variétés, non pas dans le mécanisne de la génération, mais dans Ihistoire naturelle dc lfespéce. OB i1 se trouve une race particulidre, 18 i1 y a 1"influence 299 d'un climat particulier A Lendroit de la terre habité. La matidre de base est le corps hunain, dont 1homogénéité est encore une fois vigou- reusement défendue par Buffon:"fout concourt done A prouver que le genre hunain n'est pas composé d'espéces essentiellenent différentes entre elles, qu'au contraire il n'y a eu originairement qu'une scule espace a"honmes, qui s’étant multipliée & rSpandue sur toute 1a surface de la terre, a subi différens changemens...", (150) Si le corps est la matitre de 1'épigén’se, le principe organisateur est le milieu. Mais pour rendre compte des variétés actuellenent existantes, Buffon parcourra 1a mosallque de peuples, aussi nuancés dans 1'espace hunaine que les autres espaces dans le syst®me de 1a nature, Conme l'esp2ce est unique, il faut supposer une mi- gration des peuples vers des defférentes parties de Ja terre. Par un jeu de migrations et de "circonstances" particulitres selon les nouvelles patries, les races se constituent. (Voir la premi®re figure) De méne que Je principe organisateur général, dans I'histoire de la terre, était le mouvement des eaux, pour constituer en général les montagnes comme nous les connaissons, ainsi le principe dans I'anthropologie naturelle est celui de la chaleur, une espéce de "force pénétrante" qui agit sur la mati&re du corps. (151) Mais pour rendre compte des races particuliéres aThommes, 11 faut trouver les facteurs qui font les circonstances pax Liculi@res: ici, selon les vents, les terrains, 1humidité, comme dans Ahistoire de la terre les contours particuliers de la surface de la terre sont des effets des petits courants des eaux, les vents, les effets secondaires de la pluie ou le mouvement des rivitres. Voici, d'ailleurs, pourquoi 1a théorie de 1a différentiation des races selon la distance du pole se démentit tout & fait dans le cas de 1"Anérique. (152) Mais les races américaines ne font que micux la preuve du mod@le épigénétique - Linfluence générale du climat sur le peuple immigré de 1'Asic. Nous voulons terminer cette section par un court apergu de 1ap- plication de ce nod@le dans I'histoire des ani naux qui suivra ces volu- mes, en conjonction avec les lois générales déterminées pour 1*honme dans ce dernier article du triptyque de 1749. Bien que 1a critére pour dis~ tinguer une espce, que nous avons découverte lors de 1a critique logique Bere 1a descendance, restera A peu pros fixe partout les volumes de I'ilistoire naturelle, {1 y a de plus en plus de variation admise dans ssesuite aprés la premi®re figure, A la page 317 PREMIERE FIGURE EXPLICATION DE LA PREMIERE FIGURE 301 Pour mieux comprendre le texte des "Variétés dans L'espéce humaine", nous présentons sous forme visuelle d'une répartition géographique, sur des cartes préparées pour l'article "Géographie" des "Preuves de 1a théorie de la terre" de 1749 par Buffon lui-n@ne, une analyse de deux notions qui ne semblent que tenir une place secondaire dans son anthropologie de 1749, mais qui deviendront capitales par la suite, en particulier dans son étude de la distribution géographique des especes animales. La premi®re, celle de "race", ne peut faire concurence 2 la notion que Buffon croyait essentielle A cette date de 1"intté de 1'espce humaine. On n'a qu'a remarquer la négligeance avec laquelle Buffon emploie ce terme de race} nous avons retenu la répartition le plus constant, et Jes groupes les plus larges, Pour atteindre 1'exhaustion, il aurait fal- Ju transcrire le texte entier, car bien que nous divisions 2 ltencre et A la rBgle notre globe terrestre, i ne faut jamais oublier que pour Buffon il n'y a que des nuances entre les pidces de cette mosaique de peuples. Ainsi 11 était impossible de diviser 1'E rope selon les races, ou m@me d’affirner que les peuples d'Europe étainent une race unique, Buffon se refBre peu & 1a "race européenne", et les exemples que nous trouve dans les descriptions d'autres citons od il emploie le terme régions du monde en se demandant si un tel peuple ne tire pas leur ori- gine de la "race européenne". L'autre notion concerne les origines des nations variées - les migrations et les mélanges de peuples. Buffon nous semble donner que des hypoth@se qu'il a pu affirmer avec probabilité. La position monogéniste est explicitement défendue, mais ici Buffon n'hasarde pas des conjectures sur l'origine radicale de Mhomme, Selon les in~ dications que nous avons recucillies, il semble que l'Asie centrale soit Je lieu d'origine de 1’espdce humaine, & exception de 1'Afrique qui est dite d’8tre "trés-anciennement peuplée". Il faut aussi supposer un pont entre la Tartarie et le Nord de 1'Europe, officin: Buffon ne fait pas dans son texte. Ainsi nous voulons présenter cette analyse, od chaque division sera supporter par un passage des "Variétés", conme aide visuelle de certains remarques que nous feisons dans notre présent travail L'Asie 302 Races: ... les Lappons Danois, Suédois, Moscovites & Indépendans, les Zenbliens, les Borandiens, les Samofedes, les Tartares septen- trionaux, & peut-8tre les Ostiaques dans 1'ancien continent, les Groenlandois & les sauvages au nord des Esquimaux dand 1'autre continent, senblent @tre tous de 1a mé@me race qui s'est étendue & multiplige le long des Stes des mers septentrionales dans des déserts & sous un climat inhabitable pour toutes les autres ") nations “Pour connoftre les différences particuli®res qui se trouvent dans cette race Tartare, ... les Calnouques, ... les Tartares du Daghestan, ... les petits Tartares ou Tartares Nogais, qui habi- tent pres de la mer noire, ... les Tartares Vogolistes en Sibérie s+. les Tartares Bratski, « sss on doit les regarder conme étant de 1a u@me race, Les Tar- tares Bratski sont, selon le P, Avril, de la méme race que les Calmouques. A mesure qu'on avance vers 1'Orient dans 1a Tartarie indépendante, les traits des Tartares se radoucissent un peu, mais les caracttres essentiels 3 leur race restent todjoursy & enfin les Tartares Mongoux qui ont conquis la Ghine...".(2) FR "e+eles Chinois ne sont pas A beaucoup prés aussi différens des Tartares que le sont les Moscovites, & il n'est pas méne str “.) “Les Japonais sont assez semblables aux Chinois pour qu'on puis~ qu'ils soient d'une autre race; se les regarder comme ne faisant qu'une seule & méme race d'hom- "(ay "Les Japonais & les Chinois sont donc une seule & n@me race d'hon- mess mes qui se sont tr&s-anciennement civilisez, & qui différent des 2G) Tartares plus par des mocurs que par la figure. (1) "variétés" (2) Ibid, 381-382. (3) Ibid.) 384-385. + 389. (5) Thid., 390. III, 372. L'Asie (suite) 303 Races: "TL en est de n@me [que les Cochinchinois] des Siamois, des Péguans, des habitans d'Arcan, de Laos, &c, tous ces peuples ont les traits assez ressemblans a ceux des Chinois, & quoiqu'ils en diffrent plus ou moins par la couleur, ils ne different cependant pas tant des Chinois que des autres Indiens."(1) samme "Ces peuples de Malaca, de Sumatra & des petites Isles voisines, quoique différens entre eux, le sont encore plus des Chinois, des Tartares, &c, & seublent @tre issus d'une autre race; cependant Jes habitans de Java qui sont voisins de Sumatra & de Nalaca, ne leur ressenblent point & sont assez senblables aux Chinois, 2 la couleur prés, qui est, comme celle des Malais, rouge m@lée de (2) noir. “Les peuples d'une autre e6té de 1a Nouvelle-Hollande (3), A vingt~ deux ou vingt-trois degrés latitude sud, semblent @tre de 1a méne race que ceux dont nous venons de parler [habitans de la cdté de qa A, qui est 2 16 degrés 15 minutes de latitude méridionale & au midi de 1'isle de Timor], ils sont extrémement laids, ils ont de méne le regard de travers, 1a peau noire, les cheveux crépus, Je corps grand & é6148,"(4) "ceux [les peuples] de 1" isle Formose & des isles Marianes se ressenblent par la hauteur de la taille, la force & les traits; ils paroissent former une race a part différente de toutes les autres qui les avoisinent."(5) “IL me paroit que ces Bedas de Ceylan, aussi bien que les Cha- erelas de Java, pourroient bien @tre de race européenne, d"autant plus que ces houmes blancs & blonds sont en trés-petit nombre :"(6) Le not "race" starréte de paratte ici, et son emploi ne sera pas repris avant l'Afrique. II1, 392-393, @ wonatess; (3) TAustralie (4) "Variéeé" WN. TIT, 409-210, () Ibid, 41 (6) Ibid., 415-416. Races: "Asie (suite) 304 "Les Mongols & les autres peuples de la presqu'isle de 1"Inde ressenblent assez aux Européens par la taille & par les traits, mais ils en différent plus ou moins par la couleur."(1) "Les Persans sont voisins des Mongols & ils leur ressenblent assez, ceux sur-tout gui habitent les parties méridionales de la Perse, ne différent presque pas des Indiens;...". (2) “Les peuples de la Perse, de la Turquie, de l'Arabie, de 1'Egypte & de toute la Barbarie peuvent @tre regardez comme une méme nation qui, dans le temps de Mohamet & de ses successeurs, s'est extré- mement Gtendue, a envahi des terrains immenses, & s'est prodi- gieusement m@lée avec les peuples naturels de tous ces pays."(3) "Tous les peuples qui habitent entre le 20" & 1e 30” oule 35™° degré de latitude nord dans L'ancien continent depuis ‘empire du Mongol jusqu'en Barbarie, & méme depuis le Gange jusqu'aux cétes eccidentales du royaune de Maroc, ne sont donc pas fort différens Jes uns des autres, si l'on excepte les variétés particuliéres oc~ casionnées par le mélange d'autres peuples plus septentrionaux, 24) qui ont conquis ou peuplé quelques-unes de cas vastes contrée: "Les Mingréliens sont, au rapport des voyageurs, tout aussi beaux Ss ci PP yan & aussi bien faits que les Géorgiens ou les Circassiens, & il semble que ces trois peuples ne fassent qu'une seule & méme race d"honmes ."(5) “Les Turcs.., sont un peuple conposé de plusieurs autres peuples, les Arméniens, les Géorgiens, les Turcomans se sont mélés avec les Arabes, les Egypticns, & méme avec les Eurpoéens dans les temps des Croisades, il n'est donc gure possible de reconnoitre des habitans naturels de 1'Asie mineure, de la Syrie, & du reste de 1a Turquies.."(6) @) Wariétés: WN. 111, 411. (2) Ibid., 419) (3) Tbid.; 423, (4) Tbid., 432-433. (5) Tbid.} 436. (6) Teid., 437-438, LiAste (suite) 305 Origines: 2s «-tls [les Ostiaques] me paroissent faire la nuance entre la race Lappone & la race Tartare, ou, pour mieux dire, les Lappons, Jes Samoiedes, les Borandiens, les Zembliens, & peut-@tre les Groenlandois & les Pygeses du nord de L'Anérique, sont des Tartares dégénérez autant qu'il est possible, les Ostiaques sont des Tartares qui ont moins dégenéré; les Tonguses encore moins que les Ostiaques, parce qu'ils sont moins petits & moins mal- faits, quoique tout aussi laids."(1) + cette race de patits Tartares [Tartares nogais) a perdu une partie de sa laideur, parce qu'ils se sont m@lez avec les Circassiens, les Moldaves & les autres peuples dont ils sont voisins."(2) ..:les Tartares Mongoux qui ont conquis 1a Chine. ..",(3) ".. cette nation [des Kabardinski] si différente des Tartares qui Ienvironnent, vient originairement de 1'Ukraine, A ce que dit M. Sanchez, & a été transportée en Kabarda il y a environ 150 ans."(4) "Ce sang Tartare s'est mélé d'un cdte avec les Chinois & de 1" autre avec les Russes Orientaux, & ce mélange n'a pas fait disparoitre en entier les traits de cette race, car il y a parmi les Moscovites beaucoup de visages Tartares; & quoiqu'en général cette nation soit du méne sang que les autres nations Eurpofennes, on y trouve cependant beaucoup d'individus qui ont Ja forme du corps quarrée, les cusses grosses & les jJambes courtes commen les Tartares:...".(5) (1) "Variétés" H.N. III 379. (2) Ibid, 382. (3) Tbid., 382. (4) Ibid., 384. (5) Tbid., 384. LtAsie (suite) 306 Origines: =n =) "Par toutes ces relations on peut juger que les habitans de Java ressenblent beaucoup aux Tartares & aux Chinois, tandis que les Malais & les peuples de Sunatra & des petits isles voisines en different & par les traits & par la forme du corps, ce qui a pO arriver trés-naturellement, car la presqu'isle de Malaca & Jesisles de Sumatra & de Java, aussi-bien que toutes les autres isles de 1'Archipel Indien, doivent avoir été peuplées par les nations des continens voisins, & méme par des Européens qui s'y sont habituéz depuis plus de deux cent cinquante ans, ce qui fait qu'on doit y trouver une trés-grande variété dans les honmes, soit par les traits du visage & 1a couleur de 1a peau, soit pour la forme du corps & 1a proportion des membres. ... [Frangois Pyrard] dit aussi que chaque isle a son langage particulier, & qu'on doit croire qu’elles ont été peuplées par a différentes nations "Si l'on remonte vers le nord, on trouve Manille & les autres isles Philippines, dont le peuple est peut-@tre le plus m@le de L'Univers, par les alliances qu'ont fait ensemble les Espagnols, les Indiens, les Chinois, les Malabares, les Noirs, &."(2) "1 paroft par toutes ces descriptions, que les isles & les ctes de 1'océan Indien sont peuplées d'hommes trés-différens entre eux, Les habitans de Malaca, de Sumatra & des isles Ni- cobar semblent tirer leur origine des Indiens de la presqu' isle de 1"Inde; ceux de Java, des Chinois, a l'exception de ces hom mes blancs & blonds qu'on appelle Chacrelas, qui doivent venir des Eurpoéens; ceux des isles Moluques paroissent aussi venir pour la pipart, des Indiens de 1a Presqu'isle; mais les habi- tants de l'isle de Timor qui est la plus voisine de 1a Nouvelle- Hollande, sont & peu prés senblables aux peuples de cette con- (1) Wariétés" HN. TIT 398-399. (2) Ibid, 400-401, L'Asie (suite) 307 Origines: (1) "Variétés" H (2) Ibid., (3) Tid trée, Ceux de L'isle Formose & des isles Marianes se res— semblent par la hauteur de la taille, la force & les traits; ils paroissent former une race a part diférente de toutes les autres qui les avoisinent."(1) "on ne sait point l'origine de cette nation [les Bedas] qui niest pas fort nombreuse, & dont les famflles deméurent sépa- rées les unes des autres. 1 me paroft que ces Bedas de Geylan, aussi bien que les Chacrelas de Java, pourroient bien étre de race Européenne, d'autant plus que ces honmes blancs & blonds sont en trés-petit nombre, I1 est trés-possible que quelques hommes & quelques fenmes Furopéennes alent &té abandonnez autrefois dans ces isles, ou qu'ils y aient abordé dans un naufrage, & que dans la crainte d'étre maltraitez des naturels du pays, ils soient demeurez eux & leurs descendans dans les bois & dans les 1ieux les plus escarpez des montagnes od ils continuent & ener la vie de Sauvages, qui peut-étre a ses douceurs lorsqu'on y est accofitumé."(2) “On croit que les Maldivois viennent des habitans de 1'isle de Ceylan, cependant ils ne leur ressemblent pas, car les habitans de Ceylan sont noirs & mal-formez, au Lieu que les Maldivois sont bien formez & proportionnez, & qu'il y a peu de différence deux aux Européens, & l'exception qu'ils sont d'une couleur olivatre; au reste, c'est un peuple méle de toutes les na~ tions."(3) “Le sang de Perse, dit Chardin, est naturellement grossier, cela se voit aux Gu®bres qui sont le reste des anciens Perses, ils sont laids, mal-faits, pesans, ayant 1a peau rude & le teint coloré; cela se voit aussi dans les provinces les plus + 410. 415-416. 416, LiAsie (fin) 308 Origines: “Variétés" H.N. TIT qa) Q) (3) Toke (4) Tia y proches de 1"Inde od les habitans ne sont gure moins mal-faits que les GuBbres, parce qu'ils ne s'allient qu'entr’eux; mais dans le reste du royaune le sang Persan est présentement devenu fort beau par le mélange du sang Géorgien & Circassien,...".(1) "...sans le mélange dont je viens de parler, les gens de quali- té de Perse seroient les plus laids honmes du monde, puisqu'ils "@) sont originaires de 1a Tartarie. “Les peuples de la Perse, de la Turquie, de 1'Arabie, de 1" gypte'& de toute 1a Barbarie peuvent @tre regardez comme une m@me nation qui, dans le temps de Mohanet & de ces successeurs, stest extrémement étendue, a envahi des terrains immenses, & s'est prodigicusement m@lée avec les peuples naturels de tous ces pays."(3) “Les Tures.,.sont un peuple composé de plusieurs autres peu- ples, les Arnéniens, les Géorgiens, les Turcomans se sont nlés avec les Arabes, les Egyptiens, & néme avec les Européens dans les temps des Croisades, il n'est done guére possible de reconnoftre des habitans naturels de 1'Asie mineure, de la Syrie, & du reste de 1a Turquie:...".(4) "on a prétendu que les Juifs, qui tous sont originairement de la Syrie & de 1a Palestine, ont encore aujourd'hui le teint brun comme ils 1'avoient autrefois;..."(5) 420-421. 421, 423. 437-438, (5) Tbid., 440. L'Europe 309 Race: "LL me paroft que ces Bedas de Ceylan, aussi bien que les Charcrelas de Java, pourroient bien étre de race Européenne...".(1) "\,,mais, comme le :narque fort bien Frangois Cauche, il y a plus G'apparance qu'ils les Malgaches sont de race Evropéenne...".(2) Origines: ZW “Tout lemonde sait que les Nations du nord ont inondé toute 1'Europe (3)." (4) (2) "Wariétés" HAN, IIT, 415-416. (2) Ibia., 478. (3) "La Fabrique des peuples", Montesquieu, parlant des peuples du nord de l'Europe et leur conquéte du midi “en hommes libres", mentionne Je Goth Jornandés (a) qui a appelé "le nord de 1'Burope 1a fabrique du genre humain.[en note: Humani generis officinam.]" (b) (4) "Wariétés" HN, TIT, 444 os (a) Evéque de Ravenne (Vie sie), auteur d'une Histoi d'un abrégé de 1 histoire universelle. (b) Montesquieu, Esprit des Lois (n° 1156), XVII, vy 528 L'Afrique 310 Races: Q) "ariétés" HN "Audelade cette étendue de terrain [1a Barbarie ], sous le 17™° ou 18° degré de latitude nord & au méme paralléle on trouve les Nagres du Sénégal & ceux de 1a Nubie, les uns sur la mer océane & les autres sur la mer rouge; & ensuite tous les autres peuples de 1'Afrique qui habitent depuis ce 18™° degré de latidude nord jusqu'au 18° degré de latitude sud, sond noirs, & l'exception des Ethiopiens ou Abyssins: 11 parott donc que la portion du globe qui est départie par 1a Nature a cette race d'homnes, est une Stendue de terrain paralldle & Lequateur, d'environ neuf cens Jieues de largeur sur une longueur bien plus grande, sur-tout au nord de L'équateur; & au dela des 18 ou 20 degrés de latitude sud les hommes ne sont plus des Négres, comme nous le dirons en par- lant des Caffres & des Hottentots."(1) "On a €té long-temps dans I"erreur au sujet de la couleur & des traits du visage des fithiopiens, parce qu'on les a confondus avec les Nubiens leurs voisins, qui sont cependant d'une race dif- férente."(2) "TL est done nécessaire de diviser les noirs en différentes races, & 41 me senble qu'on peut les réduire A deux principales, celle des Negres & celle des Caffres; dans la premi@re je comprends les noirs de Nubie, du Sénégal, du Cap vert, de Ganbie, de Sierra~ liona, de lacétes des Dents, de la céte d'Or, de celle de Juda, de Bénin, de Gabon, de Lowango, de Congo, d’Angola & de Benguela jusqu'au Cap-ndgre; dans la seconde je mets les peuples qui sont au dela du Cap-negre jusqu'3 la pointe de 1'Afrique, ob ils prennent le nom de Hottentots, & aussi tous les peuples de la céte orientale de 1'Afrique, comme ceux de la terre de Natal, de Soffala, de Mononotapa, de Nosam- bique, de Mélindes TIT, 448-449, (2) Ibi., 449, Races: 0 a Var: (2) Ibia. Afrique aun ines seront aussi des les noirs de Madagascar & des isles voi: "cD Caffres & non pas des Nagres "Ces deux espBces d’honme noirs [Negres et Caffres} se ressemblent plus par la couleur que par les traits du visage, leurs cheveux, leur peau, 1odeur de leur corps, leurs moeurs & leur naturel sont aussi trés-différens."(2) "On trouve en quelques endroits, au nord & au midi du fleuve [a rividre du Sénégal], une espece d*honme go'on appelle Foules, qui semblent (sic) faire 1a nuance entre les Maures & les Négres, & qui pourrofent bien n'@tre que des Mulatres produits par le mélange des deux nations;...".(3) "I1 paroft par ce que nous venons de rapporter, que les Négres proprement dits sont différens des Caffres, qui sont des noirs d'une autre espace,...".(4) A L'Afrique (suite) 312 Origines: Wy, K a "Vardérés' "Les Nations nonbreuses qui habitent les cétes de la Méditer- range depuis 1'Kgypte jusqu'a l'océan, & toute la profondeur des terres de Barbarie jusqu'au mont Atlas & au dela, dont des pouples de différente origine, les naturels du pays, les Arabes, Jes Vandales, les Espagnols, & plus anciennement les Ronains & Jes Heyptiens, ont peuplé cette contrée d"hommes assez dif- férens entr’eux,..."(1) la couleur naturelle des Ethiopiens est brune ou olivatre, comme celle des Arabes méridionaux, desquels ils ont probab- lement tiré leur origine, ..,au midi, 1'Ethiopie est bornée par les Bédouins, & par quelques autres peuples qui suivent la loi Mahométane, ce qui prouve encore que les Ethiopiens sont originaires d'Arabie, ils n'en sont en effet séparez que par le détroit de Babel-Mandel, il est donc assez probable que les Arabes auront autrefois envahi 1'fthiopie & qu'ils en auront chassé les naturels du pays qui auront été forcez de se retirer vers le nord dans 1a Nubie."(2) “On trouve en qualques endroits, au nord & au milieu du fleuve [1a rivitre du Sénégail, une esptce d'honnes qu'on appelle Foules, qui semble faire 1a nuance entre les Maures & les Negres, & qui pourroient bien n'@tre que des Mulatres produits par le mélange des deux nations;..."(3) Jes habitans naturels de cette partie de 1'Afrique [au dela de 1a Nubie, dans un climat encore plus méridional, & sous 1"- quateur méme] sont les Nubiens, qui sont noirs & originairement noirs, & qui demeureront perpétuellement noirs tant qu'ils habiteront le m@me climat & qu'ils ne se m@leront pas avec les blancs, les fthiopiens au contraire, les Abyssins, & mine ceux de Nélinde, qui tirent leur origine des blancs, puisqu'ils ont IIT, 430. (2) wid., 49 © 1-452. 456. LtAfrique (fin) 313 Origines: Q) Mari (2) Ibia Ja m@me religion & les mines usages que les Arabes, & qu'ils leur ressemblent par la couleur, sont & la vérité encore plus basanez que les Arabes méridionaux,..."(1) "Kutant 41 y a d'uniformité dans 1a couleur & dans 1a forme des habitans naturels de 1"Anérique, autant on trouve de vari- &té dans les peuples de l'Afrique, cette partie du nonde est trés-anciennenent & trés-abondanment peuplée,...".(2) étés" H 517. TIT, 482. —I op f q oo ™ a = a SS ™“ LANCIEN CONTINENT Selon plas arande lengtcar dinastrats ‘dps fe Pointe deaTartarie Orientale FurguiaeCap deBorieFaperance: Droste Sots ls yrus de MPDx BORON ‘Perle SRobert deveagondy Bb eMtRoanne Cage! ond Boi a L'anér: Races: ique 315, "11 n'y donc, pour ainsi dire, dans tout le nouveau continent, qu'une seule & m@me race d’honme,.. @ l'exception du nord de amérique...".(1) "Les Sauvages de 1a baie de Hudson & du nord de 1a terre de Labrador ne paroissent pas @tre de la méme race que les premiers [Lapons de 1'Anérique septontrionsle] , quoiqu'ils sofent laids, petits, mal faits,...".(2) Origines: "Je serois done proté a croire que les premiers hommes qui sont venus en Amérique, ont abordé aux terres qui sont au nord-ouest de 1a Californie, que le froid excessif de ce climat les obligea & gagner les parties plus méridionales de leur nouvelle demcure, qu'ils se fixtrent d'abord au Mexique & au Pérou, d'od ils se sont ensuite répendus dans toutes les parties de L'Amérique septentrionale & méridional;...".(3) “on peut aussi présumer avec tne trés-grande vrai-semblance que les habitans du nord de 1'Anérique au détroit de Davis, & ies parties septentrionales de 1a terre de Labrador, sont venus du ce détroit qui n'est pas fort considérable; ... quant & la mani- are dont le Groenland aura été peuplé, on peut croire avec tout autant de vrai-semblance que les Lappons y auront passé depuis qa le Cap-Nord qui n'en est Gloigné que d'environ cent cinquante lieues; & d'ailleurs, comue 1'isle d'Islande est presque con— tigue au Groenland, que cette isle n'est pas Sloignée des Orca- des septentrionales, qu'elle a été trés-anciennement habitée & 4) néme fréquentée des peuples de 1'Europe Variétés" H.N. IIT, 510, (2) Ibid,, 485, (3) Thid., 515. () Db de, 516, orn 3u7 les groupes animaux. La constitution de "familles" et les effets qui le climat puisse affectuer pour séparer les esptces sont tels que 1'ne, as3), entre dans 1a méme famille que le cheval et le zebre lorsque nous arri- de 1766. (154) Une Lec- qui en 1749 et 1753 est “un Ane, & n'est point un cheval dégénér vons A Larticle "De 1a Dégénération des Animas ture assidue & ce dernier article prouve que les mots clefs sont "famille" et "dégénération", mots que nous trouvons pour la premidre fois en 1749. I1 n'est pas étonnant que Buffon ouvre cet article de 1766 par un rappel des résultats de l'anthropologie: unité de 1'esp&ce humaine (famille), et dégénérations sous différents clinats. C'est ce principe emprunté A Ahistoire de 1"honme qui sera employé pour expliquer la variation des animaux. Dans l'article des "Variétés", il devient manifeste par une lec~ ture attentive que c'est l'unité de 1'esp8ce qui est principale. La no- tion de "race" n'est pas seulement trés vague, elle change en cours de route! Au début, ce sont les types de peuples qui semblent @tre désignés par ce mot, types plus ou moins différents des autres par 1influence du climat. Les peuples qui habitent L'extréme nord sont appelés une race, les Tartares une autre; les Chinois ne semblent pas assez différents de ces derniers pour constituer une race A part. (Voir Planche 1.) La notion est une de convenance; en réalité il n'y a pas de différence essentielle entre les races, elles sont toutes fornées d'étres humains. Tl y a assez de fluctuation dans l'emploi du terme - dans un endroit, les "Lappons, " etc., constituaient, nous Danois, Suédois, Moscovites & Indépendans avons vu, une race; dans un autre, "puisqu'ils se ressenblent par 1a forme, par la taille, par la couleur, par les moeurs, & méme par la bi- zarrerie des coftunes", ils sont appelés tous des hommes "de méme espece" (155), ce qui est d'autant plus curieux que dans cet article "Vartétés dans L'espéce [au singulier] humaine", le principe de base est l'unité de cette espace, dont nous avons souligner 1"importance 2 maintes repri~ ses. Cepandant, malgré 1a manque de rigueur dans 1a terminologic, pour désigner la "race", i1 y a, au fur et A mesure que lon avance, un autre concept qui est attaché au mot. A partir de la description des pouples de 1'Afrique, le terme est toujours enployé A propos de 1a couleur: " suite en examinent en particulier les différens peuples qui composent chacune des races noires, nous verrons autant de variétés que dans les 318 races blanches...". En soi, la délaration est trés générale, et elle pouvait @tre prise dans 1'ancienne acceptation du mot. Mais Buffon con- tinue: "& nous y trouverons toutes les nuances du brun au noir, comme nous avons trouvé dans les races blanches toutes les nuances du brun au blan : (156) La "race des noirs" et 1a "race des blancs" sont employées couramment; un exemple suffira @ 1'illustrer: "...les Ethiopiens & les autres nations de cette partie de l'Afrique, qui, quoiqu’extrémement bruns, tiennent plus de la race blanche que de la race noire". (157) Né- annoins, quoiqu'en soit cette signification fluctante du mot, il est toujours tr8s évident que le concept ne peut @tre appliqué que trés gé- ralement; ce sont toujours les "nuances" qui dominent, et il y a autant de nuances que de lieux géographiques différents. (158) Aussi importante que cette notion de "nuance" est celle qui fait sa possibilité - 1a mi- gration des peuples. Si l'esp&ce est unique, on ne peut expliquer la dif- ferentiation que par un jeu de migration et d'influence du climat. Selon Je mod@le épigénétique, donc, 1a notion d'origine devient extrémement important. D'apés la table de migrations qui nous avons dressée selon les indications de Buffon lui-méne, nous sommes portés A croire que la race primitive est la tartare, ou au moins d'un peuple venant de quelque part en Asie centrale. Buffon n'aborde pas 1a question de l'origine ra~ dicale de 1honme, et en particulier, il est & noter qu'il ne fait ja~ mais de conjecture sur 1a parenté entre les races noires de Afrique et les Tartares. Lorsqu'on arrive aux Epoqu: cure, Buffon, plus sfir de lui-méne, déclarera que le premier séjour de 1"homne fut dans les asa) S'il est vrai que L'espdce a comme source un peuple qui habitait “hautes terres de 1'Asie" l'Asie centrale, il est diffificle A concevoir comment les rai par- ticulires seraient des "dégénérations" 3 partir de cette premiare, dans Je sens et selon la théorie exposée en 1766. Le concept est employé dans l'article des "Variétés" a propos, par exemple, des peuples septentrio- naux, et nous voyons tei de quoi se dégéndrent les races particuli’res: "ces hommes qui paroissent avoir dégénéré de 1'esp8ce humaine, ne lais~ sent pas que d'étre assez nombreux & d'occuper de trés-vastes contrées " smpSchy + (160) $i cette gent nordique vient des Tartares, cela n’ que Buffon dit expressément qu'elle est “déginéré de 1 espce humaine", 319 Mais il devient difficile A expliquer conment les Européens, ces beaux Européens, bien que dérivés des Tartares, ne sofent dégénérés, 11 ne faut lire 1a notion de dégénération non pas par rapport & 1'@tre primi- tif et original de l'esp8ce, mais plutét par rapport 8 1"idée du type, Cheval" de ou prototype, comme est manifeste dans le dél@bre passage du 1753. (161) Dans ce sens Buffon peut dire que c'est des peuples qui ha- bitent entre les paralléles du quarantine degré jusqu'au cinquantiéme "qu'on doit prendre le mod@le ou 1'unité A laquelle i1 faut rapporter toutes les autres nuances de couleur ou de beauté: les deux extrémes sont Sgalenent Gloignés du vrai & du beau:...". (162) Toutes les causes de 1a dégénération des animaux se trouvent d6ja dans cet article anthropologique de 1749; elles seront seulement étendues pour démontrer une plus grande et plus importante ganne d'effets de 1'in- fluence du climat, et une dégénération qui, dans le temps, créera des races ou des espéces dans une néne farille si différentes des autres, qu'elles ne seront plus capables de produire ensemble une postérité £é— conde. Ce n'est nullement par hasard que l'article de 1766 par une ré- capitulation des principes établis dans 1'histoire de 1*honme. Cependant le mod8le de la dégénération n'est plus le méme que celui de 1749. T1 ne se trouve plus d'épigénése dans le sens des premiers volumes de manmi- fBres. Il y a maintenant une véritable histoire qui s'est introduite dans 1'Histoire naturelle. Jusqu’en 1765, les variétés étaient toujours produites 4 l'intéricur d'une esp8ce, sme si 1a notion d'espace s'élar- giti le boeuf est reduit A la méme esp8ce que le buffle (1764), le mouf- flon au ch8vre (1764). Mais le critére est toujours la possibilité de mélange et de la fécondité de 1a progéniture. Pour cette raison, le zebre, en cette année de 1764, n'est pas un cheval. Tout A coup en 1765, les "noufettes" comprennent un genre de deux ou trois espéces. Les "pa~ cos" ne sont au lamas qu'une espce succursale, 4 peu-prés comme 1'ane lest au cheval"! (163) Ce n'est pas ici le lieu de suivre cette histoire des animaux pour chercher le développezent de 1a pensée de Buffon sur la 1a notion d'espce; mais nous voyons qu'il y a un changement fondanental de Lattitude de Buffon, qui n'est que L'abandon du mod®le épigénétique pour adopter un mod@le "historique", Nous croyons que 1a date de 1765 est capitale: c'est la date de la prenitre impression des Nouveaux 320 Essais de Leibniz. Considérant 1a célébre phrase rapportée par Hérault de Séchelles A propos de cing plus grands génies (164), il est curieux que celui qu'il attaquait si férocément dans la "Préface" & la traduction de Netwon y figure ~ Leibniz. A-t-i1 lu ses ouvrages avant 1'apparition des % ‘ouvenux Essais en 1765 ou de 1"édition des Opera omia de Dutens Lannée suivante? En 1749 il fait mention de Leibniz & quelques reprises: une premi’re, dans I'histoire de 1a terre, il fait 1'analyse de la Pro: togaea dans 1a version imprinée dans 1'Acta eruditorum de 1693 (165); dans 1'"Exposition des Systénes sur la génération", le principe de la “raison suffisante" est condamné comme n'étant qu'une cause finale (166)3 Buffon cite I'histoire du chien auquel on avait appris quelques mots dtallonand et de frangais, histoire qu'il attribue a Leibniz. (167) On ne peut pas parler 1égitimement d'une influence de 1a philosophie leibnizienne sur Buffon en 1749; d'aprés notre étude des volumes qui suivaient, nous hasardons la date de 1765-1766. (168) Nous terminons par ces suggestions pour guider le lecteur des volumes & suivre. Les histoires des animaux seront doninées par les résultats de 1'histoire de L'honme; le modéle général, appliqué si heureusenent @ l'homme en 1749, le sexa encore a la suite, au moins jusqu'en 1765. Ayant déterminé l'origine et application scientifique du modéle Epigénétique dans les trois essais de 1749, cherchons son statut par rapport au programne de la nouvelle métaphysique des sciences. Dans quel. sens devons-nous interpréter la serie de critiques dialectiques & 1a lu~ mi&re de ce mod&le? Dans quel sens pouvons-nous dire qu'il est le lien entre 1a nouvelle métaphysique et la méthode? La réponse, qui est la néme B ces deux questions, nous senble évidente par tout ce que nous avons dit jusqu'A maintenant: en établissant une théorie de 1a conna: sance elle-m@me fondée, sur le modéle épigénétique, en déuontrant 1a nécessité d'appliquer un tel modBle A 1a nature,en fornulant des pré- ceptes d'une nouvelle méthode qui répondront aux exigences et de notre esprit ct de la réalité extéricure, nous faison le pont entre 1a sub- jectivité et l'objectivité, entre les lois de l'esprit et celles de la nature, entre 1a science et son objet. Voila que nous nous étendrons sur la vraie métaphysique des sciences! Stil est vrai, et nous le croyons bien, qu'il était une conviction 321 Presque universelle des philosophes frangais de cette époque, que toute explication (de l'homme, des idées ov des institution) résidait dans ses origines (169), 1a maniére de définir la gen&se n'était pas de tout uni- verselle, Les divergences entre Buffon et Condillac ne font qu'accentuer les différentes interprétations possibles. L'analyse génétique, selon le mod&le géométrique de Condillac, veut réduire toutes les opérations de L'ame A un moindre facteur commun, qui sera pour celui-ci les sensations. La circonstance qui fait la liaison entre nos idées, et ainsi l'origine de toutes les opérations de notre ame, est le besoin. "Je me crois donc en droit de conclure que le pouvoir de réveiller nos perceptions, leurs nons, ou leurs circonstances, vient uniquenent de 1a liaison que 1'atten- tion a mise entre ces choses, et les besoins auxquels elles se rappor- tent, Détruisez cette Liaison, vous détruisez 1'imagination et 1a mémoi- re." (170) Crest done 1a nécessité du nonde physique et réei qui semble @tre le garant de la véracité de nos idées d'une manire pragmatique. ™,,,avoir des idées claires et distinctes, ce sera, pour parler plus brigvement, avoir des idées; et avoir des idées obscures et confuses, ce sera n’en point avoir." (171) logy." (172) Oui, justement. Et Buffon veut Schapper a toutes ces piages ‘The 'truth' so verified becopes a tauto~ dans lesquelles Condillac est tombé. De une qu'il avait attaquait les vérités mathématiques conme "certaines mais arbitraires", ainsi il se défendra contre la méthode géonétrique de Condillac. De méme qu'il défend Ja notion de la "force", cette "qualité occulte", 11 garde la faculté de Ja réflexion comme puissance organisatrice de nos idées. Tl est inutile de se contenter & remarquer que "ce seroit A la physique & remonter a d'autres causes [des opérations de 1'ane], s'il étoit possible de les con- noftre." (173) Avec quelle insistance Buffon défendait cette faculté de réflexion contre l'organisation matérielle de La Mettrie! Une gendse niest possible que dans la mesure qu'il y a préalablenent une mati8re et un principe organisateur. D'aprés le nodéle épigénétique, 1'épisténolo~ gie buffonienne a pour matiére les sensations et pour principe la facul- Lanimal, Buffon a déja re- té de réflexion, au moins chez 1"homne. C marqué le "sens intérieur" que nous pouvons appeler "instinct", manifeste dans L'uniformité de leurs ouvrages. Par son enthousiasme de vouloir ban~ nir toute "innéité" de la philosophie, Concillac nie l'existence de méme 322 un instinct, qu'il consid®re comme étant un résidu de 1a notion des "idées innées", et L'exclut de sa psychologie. 1 consacra quelques paragraphes en 1746 8 établir 1a position que les bétes ne sont pas des purs automats et qu’elles ont une Ame, bien qu'elle soit inférieure A la notre. Son nod@le génétique de 1a connaissance s"appliquera done aussi bien aux bétes, ce qui deviendra le théme du Trai! é des Animaux de 1755, dans lequel il attaquera explicitement les positions prises par Buffon. Ainsi les honmes et les animaux se ressenblent en ce que toute leur connaissance est acquise 3 partir de leurs sensations, selon la disposition de leurs corps et leurs besoins, Si Buffon a tant insis- t6 dans le premier chapitre de 1'istoire de 1'honme sur 1a supériorité de 1'€tre hunain sur les bétes, par 1a nature particuli@re de son ame, on peut bien croire que c'est pour défendre aussi sa conception de 1'6~ pistémologie, contre les théses émises par Concillac, qui étaient aussi pauvres dans leur étendue que le matérialisne de La Mettrie. (174) Clest ce modtle Epigénétique qui donne 1a cohérence aux chapitres sur les sens. On y voit a la fois une affirmation des positions lockien~ nes, clairées et approfondies par cette nouvelle perspective, et une réfutation d'un autre modéle de gentse, celui avancé d2e 1746 par Condil- lac. (175) $1 Condillac cherchait un mod@le géonétrique de 1a gentse de 1a connaissance, Buffon cherchait un mod@le enprunté A 1'histoire naturelle. Et c'est en ceci que réside toute leur controverse. A la dif- férence de Condillac, dont Ja statue, bien qu'organisée intérieurement comme nous, sera fait de marbre (176), Buffon nous présente un homme “dont le corps & les organes seroient parfaitenent fornez, mais qui s' vellleroit tout neuf pour lui-mime & pour tout ce qui 1'environne." (177) Ctest done un homme, dont nous connaissons dja sa double nature, qui raconte ce "récit philosophique" de 1'origine de 1a connaissance. Les objections que Condillac fera contre le texte de Buffon se porte~ Font cur cette nature intime de I*honme donc. Lorsque l'on lit atten~ tivenent les critiques faites par Condillac, il devient évident que ce qu'il refuse est Ja possibilité que Ihonme soit un @tre animé avant tout. "Je m'affermissois dans cette pensée naissante [que tous les ob- jets faisaient partic de moi-méme] lorsque je tournai les yeux vers L'astre de la lumiére, son éclat me blessa; je fermai involontairement 323 la paupigre, & je sentis une légére douleur" (178), raconte Buffon; "Cela, réplique Condillac, est encore bien difficile A concevoir. Tour- ner les yeux vers un objet, n'est-ce par le chercher hors de soi? Peut- il savoir ce que c'est que diriger ses yeux d'une fagon plutét que d'une autre? En sent-il le besoin? Sait-il méme qu'il a des yeux? Remarque(z) que cet honme se meut sans avoir aucune raison de se mouvoir. Ce n'est pas ainsi qu'on a fait agir la statue." (179) T1 est évident que chez Con- dillac il s'agit d'une statue, car il veut établir un mécanisme psycho- Jogique. Buffon prend un @tre animé, un tre qui bouge, qui sent, qui expérimente: il prend un enfant et veut décrire l'histoire naturelle du développement de son intellect. A la différence de la statue de son adversire, Buffon décrit le développement d'un hone, pour démontrer L'épigén’se, c'est-a-dire un développement de la pensée qui se fait par degrés, et par un apprentissage (plutdt que d'admettre 1'innéité des idées), mais grace @ un principe organisateur. Par la crainte excessive de la "chimBre" des facultés innées, Condillac est amené @ une conclusion logique que Buffon peut facilement démontrer comme absurde. Si un homme Stait privé des moyens de 1a sensation, i1 ne pourrait pas développer Jes “opérations" supérieures, et ainsi, conclut Condillac, 11 ne pour- rait pas parvenir 3 des notions complexes. L'interprétation des expéri- ences de Cheselden est aussi tenue pour suspecte: Condillac contredit les opinions de Molyneux, de Locke et de Berkeley, parce qu'il veut &tablir L'autonomie des sens contre une faculté mystérieuse de jugement. Si Buffon défend, jusqu'd un certain point, avec vigueur la thse de Berkeley, c'est justement pour démontrer la nécessité d'une faculté qui co-ordonnera les informations des sens. Mais le probléme fondamental est ici voilé par ces considérations épistémologiques. Les deux systénes que nous présentons pivotent sur des questions plus radicales; ils ne sont que des résultats de deux points de vue scientifiques enti&rement différents, et c'est ici qu'il faut chercher la cause de leur divergence. Si Condillac recusait les syst@nes métaphysiques, tels que ceux construits par les grands philosophes du XVITe sigcle, ce n'est pas par~ ce qu'il refusait 1a notion de "syst@ne", ni celle de "métaphysique". 11 mettra ses positions au clair dans le Traité des sistémes de 1749. Le probl@me ne concerne pas les syst®mes en général, mais plutét de savoir 324 distinguer les vrais systémes des faux. D'aprés la définition que Con- @illac donnera dans le Dictionnaire des synonymes (180), il est manifeste que le systéme, établi 4 la maniére des géom@tres, c'est-a-dire "un pri- principe bien développs", ne répugne pas au scientifisme de Condillac. La nétaphysique doit @tre préliminaire & toute étude scientifique, en ce qu'elle définit les bases sur lesquelles 1a dite science sera édifiée. (181) Le "syst@ne" qu'il veut batir dans 1'Essai de 1746 répondra a ceux de Newton ou de Locke eux -niGmes. Et il vise & établir une métaphysique moins ambitieuse, nous dit L'introduction, contenue dans les bornes de Lesprit humain. (182) Ctest d'aprs 1a logique mathématique, le more geometrico du XVile siécle, que tout le systtme épistémologique sera dé- duit. (183) Les étapes de cette déduction seront donc de déduire a un seul principe les opérations de 1'4me; on montrera ensuite la genése des autres opérations & partir de celle-ci. (184) Mais cette gentse suivra elle-néne le mod8le géonétrique: 1a synthése A partir d'un seul premier principe. Ainsi, de méne que Spinoza veut définir un cercle selon sa gentse, le mouvement d'une droite dont une extrémité est fixe et l'autre mobile (185), de méme Condillac veut définir les opérations de 1'ane & partir de la perception des sensations. Et toute la connaissance sera construite conne L'algtbre, par la différente conbinaison des signes, qui sont les mots. Par contre, méme si I'on peut définir un cercle, ou des mots, il est plus difficile 2 démontrer que nos idées correspondent A une réalité extérieure. N'est-ce pas le probléme que Diderot a bien vu, lorsqu'il prévient Condillac des résultats "absurds" que peut pro- voquer le solipsisme de 1'idéalisme" de Berkeley? L'erreur fondanentale de la gen&se nore geonetrico de 1a connaissance sera la construction tautologique, inévitable lorsque l'on veut établir une épistémologie fondée sur un principe unique, ici les sensations. En renversant le principe de la théorie de 1a connaissance, par la critique méthodologique, Buffon mine les bases du systtme de Condillac. Par ce renversenent, s'étendant sur la vraie genése des idées, gentse du type épigénétique & partir des sensations et 1a faculté organisatrice de la réflexion, il établit en méme temps le principe de 1a nouvelle métaphysique. En ce qui concerne 1a critique gnoséologique, ayant déterminé 1a 325 place de 1"homme dans 1a nature du point de vue philosophique, comme ob- servateur du systéme, mais de 1'intérieur du syst®me, le modéle épigéné- tique est le seul qui puisse comprendre 1'histoire naturelle de 1"homne dans ce systme naturel en général. Si l'on accepte un mod@le quelconque de “pré-organisation", le théologique 3 Ja mani&re de Pascal, ou le na~ térialiste 4 la mani&re de La Mettrie, il devient impossible de sortir de cette intériorité, et tout est réduit A une subjectivité pure, parce qu'il pose d'emblée le lien entre L'observateur et 1a nature comme étant donné. Dans ce sens il n'y a pas d'anthropologie possible, parce que ce lien étant déja connu, 1a réponse & la question centrale de cette sci- ence, les rapports des hones entr'eux et avec 1a nature, est donnée en n&ne temps. Par la perspective méme que Buffon établit dans la critique gnoséologique, et par le mod@le qu'il trouve nécessaire pour expliquer les phénonéns de I'histoire de l'homme, i1 erée véritablement une nou- velle science, celle de 1'Anthropologie - définie depuis circa 1870, comme une des grandes branches des sciences naturelles, celle qui étudie Lhonme comme espéce animale, "...1'étude du groupe humain, envisagé dans son ensenble, dans ces détails et dans ses rapports avec le reste de la nature.” (186) Pour mieux apprécier l'ampleur, mais aussi 1'importance, de la perspective buffonienne, considérons 1'évolution de la notion d'anthro- pologic au cours du XVIIIe sigcle. (187) I1 y a d'abord le sens théo- logique, ce qui est rappelé dans 1'article "Anthropologie" de 1"Encyc~ lopédie. (188) Mais, ajoute Diderot, "dans 1'économie animale, c'est un traité de 1"honme." Le sens scientifique au milieu du sigcle, ce~ pendnat, se rattache au vocabulaire anatomique, signifiant "étude du corps humain", comme en témoinge l'article "Anatomie de 1'Encyclopédie. (189) 11 semble que le mot prend une autre valeur plus tard dans ce si8- cle. "C'est en effet en 1788 qu'un certain Chavannes, professeur de thé- ologie A Lausanne, publie une Anthropologie ou sciences générale de Ahonme, distribuée en neuf parties: Anthropologie physique - Ethnologie ou ‘science de 1'homne considéré come appartenant & une espéce répandue sur le globe et divisée en plusieurs corps de société...‘ - Noologie ou "science de 1"honme considéré conme dows de volonté' - Glossologie ou "science de 1'honme parlant’ ~ Etymologie ~ Lexicologique - Granmatolo- 326 gie - Mythologie... (190) A cet exemple de Duchet, nous ajoutons les divisions de L'anthropologie concues par Kant, dans 1"Anthropologie in pragmatischer Hinsicht de 1789: 1. Anthropologie théorique ou psycholo~ gie empirique, c'est--dire la connaissance de 1'honme en général et de ses Facultés; 2. tique, 1a connaissance de 1*hom- me tournée vers ce qui peut assurer et accoftre 1"habilité humaine; 3. Anthropologie morale, 1a connaissance de 1"homme tournée vers ce qui doit produire la sagesse dans la vie, conformément aux principes de la métaphysique des mocurs. (191) Buffon n'employe pas le terme d'anthropologie” (192); cette par- tie de 1'Histoire naturelle, générale et particuli®re s'intitule "His~ toire naturelle de 1'Homne". Mais puisque 1'Histoire naturelle doit "la description complete avoir pour but, selon son propre aveu (193), & I'histoire exacte de chaque chose en particulier" (194), Buffon semble approcher le plus & la définition de Broca: 1'Histoire d'une espéce (195), dans ses détails (comme esp&ce unique d'une double nature, et les conséquences particuliéres de sa partie “spirituelle"), et dans ses rap- ports avec le reste de la nature (196) (ce que nous avons dégagé conme thse principale de Buffon tout au long de son Histoire de 1"homme). Ce n'est pas la premire fois que l'on a abordé le problme de 1"honme d'une telle mani@re. D'un cdté, les récits de voyageurs sont pleins de réflexions sur le naturel, les mocurs, les coutumes des peuples visités. (197) De l'autre, toute 1a tradition libertine (198), contre laquelle Pascal combattra si férocément & partir des exigences de sa position théologique, en font usage. Méme si Buffon n'est pas le premier A cher~ cher les causes de la variété des races dans les conditions du milieu et A'historique des mocurs, il est peut-Etre celui qui en fait un syst@ne conme partie intégrante de 1"Mistoire naturelle. Lrespéce étant unique, 1a matidre primordiale étant de 1a méne Stoffe, i1 faut qu’A partir d'un Lieu d'origine, le globe fut peuplé par des migrations diverses. Il y a ensuite deux types d'épigéntse de cette mati&re qui est I'honme: la premiere ‘selon les liewx habités, dont nous avons étudié les conséquences en détail dans 1a théorie des races, et 1a deuxime, vers laquelle 41 faut tourner maintenant, plus & propos de la critique gnoséologique, 1'épigéntse selon 1a démographie, L'an- 327 cienneté d'habitation, la maniére de vivre, et les moeurs, c'est-a-dire I'histoire de L"homme en société. Nous avons déj& vu 1"importance de la notion de "société" chez Buffon. Ici nous voulons 1'examiner d'un point de vue particulier: L'origine épigénétique des sociétés et les rapports que les sociétés ont avec 1a Nature, pour dégager ce que Buffon entend par loi par rapport A l'anthropologie. Lorsque l'on lit les "Variétés", comment ne peut-on pas penser tout de suite a Montesquieu, dont 1'Esprit des Lois est paru quelques mois auparavant? (199) Selon le raportage d'Hérault de Séchelles, Buf- fon aurait dit de Montesquieu qu'il 1'a "beaucoup connu" (200); mais la date de leur premi8re rencontre, ou 1'étendue de leurs rapports nous reste une énigne. Puisque publié & Gen&ve, est-ce Cramer, dans une let- tre perdue jusqu'A maintenant, qui inforna Buffon de l'existence du livre de Montesquieu? Ou peut-Gtre était-ce son vieil ami Helvétius, gui avait lu, et était ravi par, le manuscript de Montesquieu vers 1747, (201), qui 1'a fait connaftre 1'oeuvre? Si ce n'etait pas par 1'inter~ médiare de Cramer, d'Helvétuis, ou d'un autre, 1'Esprit des Lois semble avoir été un succts dés son apparition, et Buffon, bien au courant des Evénenents littéraires de son époque, n'a pas pu le laisser passer ina~ pergu. Nous ne croyons pas que Montesquieu a pu 1"influencer en ce qui concerne l'origine de sa pensée, sauf s'ils étaient en relation bien avant 1749; les grands principes de I'histoire naturelle et le nodéle Epigénétique sont déja évidents avant 1a fin de 1748. Cependant, 41 sera utile de comparérer les deux ouvrages, si proches par leur perspec- tive radicale. Buffon a méme pu emprunter des exemples, des principes ou des explications particuliers & propos d'un peuple ou un autre, conme sera évident dans notre analyse faite dans 1'Appendice I. L'idée d'un esprit des lois était de trouver le principe derizre les lois positives, tant variées parmi les différentes nations. Ce prin- cipe rendra compte, d'une part, de la variété par les liens nécessaires avec les conditions de I'histoire, des mocurs, 1a politique, le milieu physique, mais, d'autre part, il devra nous anener & pouvoir appliquer la raison humaine aux lois, pour imposer. progressiveneat, une idéal "...8'11 [Montesquieu] n'a cherché les faits particuliers que pour les réduire A des lois générales, il a voulu, par la découverte de ces lois 328 générales, donner @ l'esprit le pouvoir de dominer les faits, de prévoir les effets, et d'imposer peu A peu, A la réalité, par un effort prudent et progressif, la forme de 1'idée." (202) Ce qui est fondanental chez Montesquieu, conme le note Lanson, est la recherche des lois de 1'exis- tence et du dévoloppement des sociétés, pour @tre capable, dans le sens baconien, de maftriser 1a nature, en se sounettant (203), pour qu'un jour les lois positives de la société seront la réplique de 1"idéal de justice. Ce que Montesquieu veut faire en ce qui concerne 1a vie morale, woilA le projet de Buffon dans le domaine du naturel. Les honmes, mattres de la terre, pouvent contraindre 1a nature sous les lois de 1'idéal, pour faire de son habitat un délice. (204) Cet idéal est moins apparent dans l'article des "Variétés"; ici, Buffon cherche plutét 2 établir ce principe qui rendra compte des dif- férentes races. Ce qui retient notre attention est que le principe est le me: @ que chez Montesquieu. Les lois sont des rapports, selon la dé- finition donnée par Montesquieu, inmuables parce qu'établis par le Cré- ateur, qui se dérivent de la nature des choses (205); le principe, c'est , dont la loi est intermédiaire entre cette Ja raison primitive qui ré + (206) Le projet de Montesquieu tombe parfaite- raison et les @tres créés ment dans les exigences métaphysiques que Buffon Stablit dans le Premior discours, Nous précisons, La notion de "rapport" qui se trouve chez Mon- tesquieu dans la définition de la loi, a peu affaire aux "rapports" dans le sens qui va @tre Stabli par les savants du XIXe sitcle. Ici, la lod n'est pas une description des rapports constanment retrouvés entre les phénommes. Les lois sont des rapports, notons le bien, entre 1a » rapports nécessaires qui dérivent raison primitive et les Gtres cr de 1a nature des choses. Ce sont, dans le langage de Buffon, des "véri~ tés physiques", non pas des rapports mathématiques, parce qu'elles ré~ pondent 2 la nature des objets en question, des propriétés et de ce qu'il y a "du réel" dans un sujet. Tomber dans les exigences métaphysi- ques du premier discours, c'est, justement, poser 1a question des lois en termes de la nature des choses, car c'est, au fond, @ propos de cette nature, ov ses manifestions au moins, qui fonde 1a métaphysique des sci- ences chez Buffon par des migrations diverses. I1 y a ensuite deux types d'épigéndse de cette mati@re qui est l'homme: 1a premi?re ‘selon les lieux habités, dont nous avons étudié les conséquences en détail dans la théorie des race 329 Ne nous égarons pas de 1a question principale - les variétés dans L'espace humaine. Pour Montesquieu comme pour Buffon, il ne faut pas voir dans cette variété une "belle raison humaine [qui] brouille et con- fond le visage des choses selon sa vanité et inconstance” 3 la manidre de Montaigne, ni la preuve de la nature déchue de 1"honne et de 1'infir~ mité de sa raison, & celle de Pascal. La variété des races, des noeurs et les niveaux de civilisation, est enfin de compte réductible aux lois naturelles: 1"influence du climat, du terrain, des facteurs géographiques quelconque - et celles morales: 1a religion, le gouvernenent, 1'histotre. Nous avons vu le méne souci chez Buffon et chez Montesquieu, en particu- lier dans 1'appendice I, des rapports naturels; mais venons plus précisé ment sur la question delasociété, D'abord, 11 faut chercher les lois de Ja nature humaine qui se dérivent uniquement de 1a constitution de notre Stre. Pour le faire, Montesquieu considére 1honme avant 1'établissement des sociétés - considération qui, a vrai dire, est idéale en ce que, ré~ ellement, il n'y a pas d'état avant la société, (207) Voila ce que Buf- fon reprochera & Rousseau. Les lois selon 1a nature hunaine sont (8 part celles qui nous porte vers le Créateur), la paix, 1a recherche de la nourriture, l'union des sexes, le désir de vivre en société, toutes les quatres qui se dérivent duprincipe de 1a conservation de 1'étre, dit Montesquieu. (208) Les quatres lois ne sont que distingées idéalement, car, au fond, se relevant du méne principe, elles conduisent toutes vers le méme but - 1"homme en société. Sans cette société, les lois positives ne seront point possibles. Et on peut facilement transferer L'argunent A Buffon. L'union qui est la famille n'est que la préfiguration (idéale) de 1a société, qui se forment pour la conservation des membres, pour la paix de la communauté, et pour la nourriture. (209) A partir de ces lois naturelles, ou plutét & partir du principe (principe organisateur orga nisateur dans le mod&le épigénétique), les sociétés variées se sont dé— veloppées, 2 leur tour, sous 1influence des circonstances ot se trou- vait chaque peuple. "Plusieurs choses gouvernent les homes: le climat, Ja religion, les lois, les maximes du gouvenenent, les exemples des cho- ses passées, les mocurs, les maniéres; d'oii il se forme son esprit géné— ral qui en résulte, (Paragraphe) A mesure que, dans chaque nation, une de ces causes agit avec plus de force, les autres lui c&dent d'autanc. 330 La nature et le climat dominent presque seuls sur les sauvages; les ma- nigres gouvernent les Chinois; les lois tyrannisent le Japon; les moeurs donnofent autrefois le ton dans Lacédénone; les maximes du gouvernement et les mocurs anciennes le donnoient dans Rome." (210) La gradation de civilité reflate les différentes influences. Chez les sauvages, les “causes physiques" dominent. Nais c'est moins que le progrés de la civi- lisation donne peu & peu 1a prépondérence aux "causes morales"; ce qui est important est qu'il en dépend de causes. Cela devient évident lors- que Montesquieu distingue les "peuples sauvages" des "peuples barbares". "Il y a cette différence..., que les premiers sont de petites nations dispersées, qui, par quelques raisons particulires, né peuvent se réunir; au Lieu que les barbares sont ordinairenent de petites nations qui peu- vent se réunir." (211) Les Tartares sont des barbares, car toutes les hor‘es peuvent. se réunir; il nty a pas de néceasité physique qui s'y op- pose, comme chez les peuples de la Sibéric, qui ne sauraient vivre en corps uni, parce qu'ils ne pourraient pas se nourrir. Dans le méme esprit Buffon attribue a 1'insuffisance de population et A la trop courte durée depuis leur tablissement sur le nouveau continent, la manque de nations civilisées en Anérique. Voila des "quelques raisons particuliéres" déter- minges pour les sauvages anéricains. En effet, 41 sera avantageux de nieux étudier ces sauvages, dit Buffon, car nous avons ici une manitre d'évaluer "au juste 1a force des appétits de la Nature, 41 [le natura~ liste] y verroit lame 2 découvert, i en distingueroit tous les mouwve- mens naturels, & peut-@tre y reconnoftroit-il plus de douceur, de tran t quillité & de caine que dans 1a sienne, peut-@tre verroit-i1 elairen que 1a vertu appartient A l'homme sauvage plus qu'A 1'homne civilis¢, & que le vice n'a pris naissance que dans la société." (212) Ces nots, sont-ils de Buffon, celui qui fait le haut point de la création 1"honme eivilisé? I1 faut croire que ce n'est qu'une image idéale de 1honme A laquelle Buffon songe, ce vers laquelle la société, 1'état nécessité par la nature de I"homne, doit se diriger. Ainsi, nous venons par une autre voie a 1'idéalisme de Montesquieu. Notez, nous vous prions, que pour Montesquieu, ainsi que pour ce qui senble @tre 1a pensée de Buffon dans ce passage, cette douceur du sauvage, c'est-A-dire les sentiments d'infériorité et de peur qui se manifestent par le désir de paix, ténoig~ 331 ne d'une nature, bonne en elle-néme, (213) Il faut lire la phrase de Buffon avec Montesquieu a cété: ce dernier veut détruire "argument d'un Hobbes, que 1"honme cherche par nature de subjuger ses confréres. Non, par_nature 1"homme est timide, cherchant & se réunir avec un partenaire pour créer une famille. Le désir de 1a conquéte ne vient que plus tard: “site que les hommes sont en société, ils perdent le sentiment de leur fotblesse; L'égalité, qui étoit entre eux, cesse, et l'état de guerre commence." (214) Le modle épigénétique done peut bien expliquer les origines des différents peuples: selon l'aspect de 1honme matériel, les causes phy- siques le peignent de couleurs différentes, le sculptent de formes va~ riées; selon sa nature spirituelle, les causes morales forment les soci- &tés, en accord avec les exigences des causes physiques. I1 n'y a pas de déterminisme en ce qui concerne les causes morales; il y a un idéal de I'honme raisonnable, idéal qui pour Buffon s'étendra aussi bien sur le progés de la civilisation que dans l'anélioration de 1a nature elle-néne. S'il n'y a pas d’influence majeure de 1'Esprit des lois sur 1'Histoir nat urelle en 1749, il y a compatibilité fondamentale d'attitudes; peut~ @tre vaut-il mieux étudier le texte de Montesquieu et le développement ultérieur de la pensée de Buffon, mais cela n'est pas notre travail. Revenons au propos de cette partie de notre thése. Le modéle épi- génétique est, en partie au moins, exigé par la critique gnoséologique en général, et par 1'anthropologie en particulier, parce qu'il est le seul, pense Buffon a cette époque, qui puisse satisfaire aux exigences de la science & 1'intérieur de notre esprit. I1 le fait en explicant com- ment une lof, qui est aussi ce que toute société cherche & établir, tient compte de la nature de l'objet (ou des objets) étudié, mais par 1"appli- cation d'un principe qui satisfera les exigences de 1a logique de notre esprit. De plus, nous échapperons 4 une subjectivité totale, et c'est la seule mani&re de le faire, par l'application de ce modéle, parce qu'il ne pourra pas manquer de répondre & la nature réelle. Les effets parti- culfersne peuvent Stre expliqués A partir de la nature des choses et de leurs lois s'il n'y a pas de cohérence entre 1a nature, le principe or- vent. Sans des abstrac~ ganisateur et les lois, et les effets qui s'en s tions, qui sont A vrai dire inutiles et vides de sens, l'esprit peut con- 332 naftre les propriétés qui appartiennent aux corps, le réel du sujet (et voilA le grand principe métaphysique de Buffon), et avec une garan- tie de réalité en ce que 1a naissance des effets particuliers est éclair- cie par une heureuse application du modéle. A la fin du Premier discours, Buffon vient enfin discuter le but de 1'isoire naturelle, le "principe", dit-il, par lequel on peut "s'é~ tendre sur 1a Métaphysique des Sciences". (215) "C'est ici le point le plus délicat & le plus important de 1'étude des Sciences: scavoir bien distinguer ce qu'il y a de réel dans un sujet, de ce que nous y mettons d'arbitraire en le considérant, reconnattre clairement les propriétés qui lui appartiennent £ celles que nous lui prétons, me paroft étre le fondenent de la vraie méthode de conduire son esprit dans les Sciences; s+e"s (216) Maintenant nous comprenons pourquol Buffon dit que c'est le point le plus "délicat": aprés 1a critique méthodologique et 1a gnoséo~ Jogique, 1a Science, qui est dés lors intéricrisée dans le sujet qui fait la science, doit avoir un moyen de savoir ce qui existe réellement dans la nature, de savoir les principes et les opérations du systme de 1a nature, duquel il fait partie, sans le méprendre pour un des petits systmes de son esprit, qui soit projeté pour la réalité, de savoir quelles sont les propriétés et les lois par lesquelles la nature fonc- tionne sans les assujettir aux contraintes de sa compréhension bornée. Maintenant nous comprenons pourquoi ce point est aussi le plus "impor- tant": par la critique logique et 1a métaphysique, nous avons découvert que nos abstractions ne sont plus capables d'embrasser 1a nature dans la Tichesse de ses manifestations et de ses opérations. Cependant Buffon ajoute, et cela est capital, que ce principe est "le fondenent de 1a vraie méthode". Qu'est-ce que donc cette méthode? pourquot le principe métaphysique est-il son "fondenent"? si le mod@le épigénétique a été né- céssité, de méme que ce principe, par les critiques philosophiques, quel Jein y a-t-il entre le modéle, le principe ct 1a méthode? Si Buffon critiquait si vivement 1a méthode qui ne sera qu'une “anticipation de la nature", selon le formule de Bacon, c'est bien en- 333 tendu pour instaurer la méthode de son "interprétation". La méthode énon- cée dans ce Premier discours sera le Novum organun renovatum. Si Bacon a guidé Buffon dans 1a critique philosophique, il sera également la source de la vraie méthode. Malgré les grands éloges de Bacon au XVIIIe si®cle, on peut se demander, au nom de Buffon, si ceux qui font sa lou- ange avaient compris sa méthode d'induction, et ce qu'elle impliquait. L'induction ne sera, ni chez Bacon, ni chez Buffon, une compilation "histoire particuliares. Cette mani&re "induction est en défaut conne Lest 1a méthode a priori des mathénatiques que Buffon critiquera sous Ja dénomination des "vérités mathématiques". Ntest-ce pas ce que Buffon reproche & ses contemporains qui ont cultivé, aux dépens de 1a philoso- les méthodes de phie, "les Arts qu'ont veut appeller scientifiques Calcul & de Géonétrie, celles de Botanique & d'Histoire Naturelle, les formules,enun mot, & les Dictionnaires [qui] occupent presque tout le monde...", (217) La raison de cette critique sévire de ses contemporains est tr&s indicative: elle nous montre la source de sa pensée et de sa ",..on stimagine sgavoir davantage, parce qu'on position philosophique. a augmenté le nombre des expressions symboliques & des phrases sgavantes, 4 on ne fait point attention que tous ces arts ne sont que des échafau- dages pour arriver A la science, & non pas la science elle-méne...", (218) La méthode a priori des mathématiques et celle des dictionnaires qui abondent en histoire naturelle sont véritablement les deux écueils a viter: soit de n'avoir aucune méthole, soit de vouloir tout rapporter a un syst@me particulier. (219) Les rationalistes et les empiriques, que nous avons rencontrés dans les Idoles du théatre, se sont également éga~ rés de la vraie méthode. Si Buffon trouve chez Bacon cette vraie métho- de, clest parce qu'elle fait le lien entre la raison et 1'empirique: hoc modo inter empiricam et rationalem facultatem (quarum morosa et inauspicata divortia et repudia omnia in humana familia turbavere) con~ jugium verum et legitimum in perpetuun nos firmasse existimamus", avait proposé Bacon dans la Préface au Novum organum. (220) En effet, le con- traste entre les faiseurs de syst®mes et des compilateurs est aussi frappant chez Buffon que chez Bacon, Invoquons 1a cé1@bre analogie de ce dernier: "Empirici, formicae more, congerunt tantum et utunturs Ra~ tionales, aranearum more, telas ex se conficiunt: apis vero ratio media 334 est, quae materian ex floribus horti et agri elicit, sed tamen eam pro~ pria facultate vertit et digerit." (221) I1 n'y a pas de meilleure des~ cription de la méthode que Buffon veut construire que celle de 1'abeil- le de Bacon! C'est véritablement 1'union des deux facultés, celle des ns (l’empirique, ou, par leur expansion, 1'expérimental), et celle de la raison (1'entendement), union nécessité par la critique méthodo~ Jogique, que nous avons vu par les critiques de Condillac et de Descar- tes. (222) En histoire naturelle, la compilation 2 1a mani&re d'un Al~ érovande est aussi fautive que le petit syst@me £116 par un Linné... deux écueils également dangereux. Apercevant ce vaste spectacle qui est la Nature, rassemblant des Schantillons de tout ce qui peuple 1univers, L'esprit est ébloui, T1 faut que toute méthode nous amne & la compréhension d'un ordre entre ces objets, car ce n'est que par cet ordre que nos études puissent por- ter fruit et ouvrir des nouvelles "routes pour arriver & des découvertes utiles." (223) Renarquons que ses réflexions sur 1a méthode se relévent €u me souci preguatique que chez Bacon. (224) La vraie méthode doit partir des innonbrables faits naturels si nous ne voulions pas tomber dans un @ priorisne répugnant. "Les gens senséz... sentiront to@jours que la seule & vraie science est la connoissance des faits, L'esprit ne peut pas y suppléer, & les faits sont dans les Sciences ce qu'est (225) Bien entendu, le probléne de Ltexpérience dans la vie civile. la méthode sera celui de 1'instructio et coordinatio" des faits, qui sont "tantus... particularium numerus et quasi exercitus", conme disait Bacon. (226) L'induction que propose Buffon n'est rien d'autre que celle de Bacon ~ i'union du ratione! et de lempirique, pour retrouver vn ordre par Iesprit qui sera la réplique de Lordre naturel. C'est pour cette raison que Buffon nous a dit que I'anour de 1'étude de la nature “suppose dans l'esprit deux qualités qui paroissent opposées, les grandes vies d'un génie ardent qui enbrasse tout d'un coup d'oeil, & les petites attentions d'un instinct laboricux qui ne s'attache gutA un seul point." (227) La méthode d’induction par simple énumération est autant en défaut que celle de 1'anticipation rationnele. Le but que l'ondoit se poser en Histoire naturelle, est, au début au moins, de rassesbler les descriptions exactes et de s'assurer des 335 faits particuliers; "mais il faut tAcher de s'élever 2 quelque chose de plus grand & plus digne de nous occuper, c'est de combiner les observa~ tions, de généraliser les faits, de les lier ensenble par la force des analogies, & de tacher d'arriver a ce haut de degré de connoissance of nous pouvons juger que les effets particuliers dépendent d'effets plus généraux, o& nous pouvons comparer 1a Nature avec elle-méme dans ses grandes opérations, & d'od nous pouvons enfin ouvrir des routes pour perfectionner les différentes parties de 1a Physique." (228) Voila que nous sommes arriver enfin & la méthode elle-méne. Cette phrase si cé- Aebre mérite une analyse particulitre, car bien que simple en apparence, elle est tr&s chargée d'idées et de nouveantés: A vrai dire, toute notre thse peut-@tre lue comme la préparation 4 l'analyse de cette phrase. D'abord, en ce qui concerne 1a méthode, nous avons en face de nous rien d'autres qu'une déclaration de 1'adhésion a 1a méthode inductive de Bacon. Le but de la méthode est d'arriver 3 une compréhension des opé- rations de la nature. Les effets particuliers n'ont gure d'intérét en eux-méme. "Les choses par rapport A nous ne sont rien en elles-ménes, elles ne sont encore rien lorsqu'elles ont un nom, mais elles comnencent A exister pour nous lorsque nous leur connoissons des rapports, des propriétés;...". (229) Par les critiques logique et métaphysique qui sont en jeu ici, nous savons que les ééfinitions abstraites ainsi que re des vérités mathé les rapports arbitraires a la man tiques nous an’nent nulle part. La connaissance des "rapports, des propriétés” nous améne, par contre, au coeur de la métaphysique des sciences, en ce que son principe vise justement 1a connaissances de ceux-ci. Mais Ja nature ne peut pas @tre connue, sinon par ses opérations, et c'est ce fonctionnement que toute méthode doit nous amener 2 concevoir. La loi naturelle n'est autre chose que 1a description d'une opération, la Joi étant, par la liaison qui est le nod@le épigénétique, nous le ver- rons, ce qui régle les opérations. Mais n'avangons par trop vite, et Stendons nous sur la méthode inductive de Buffon. Le but de 1a combi- naison des observations, la généralisation des faits, leur liaison par la force des analogies, était de pouvoir juger “que les effets particu- Nous savons par la critique Lers dépendent d'effets plus généra nétaphsyique que cette dépendance est elle-méme limitée par les consi- 336 dérations épistémologiques de cause et d'effet... la cause étant "un effet général". (230) Les effets les plus généraux ne peuvent point @tre interprétés comme étant des "causes" dans le sens, courant a 1'é- poque, de causes premi@res ou finales. Si Buffon rejoint Hume pour con- danner la notion de cause, i1 ne peut pas cependant tonber dans le méne scepticisme; parce qu'il reconnait que les mémes effets particuliers se produisent toujours (constatés au moins par des "observations réitées"), il y a la possibilité de remonter @ un effet plus général, d'ot suivent constanment ces effets particuliers. "Ces effets généraux sont pour nous les vraies loix de 1a Nature...". (231) La méthode ne sera d'autre que de faire la conbinaisons d'effets particuliers, de les lier ensen- ble, de les généraliser pour venir enfin A saisir l'effet général, clest-A-dire de venir A 1a connoissance de 1a loi par laquelle 1"opéra~ tion naturelle se fait. Mais tout ceci n'est qu'un renouvellement de Bacon, mais enrichi de nouveaux concepts pistémologiques pour répondre au scepticisme par Jequel Hume espérait détruire 1a logique méme de 1induction. "Recte poattur; Ver set: ire. ...Licet enim in natura 5S PE nibil vere existat praeter corpora individua edentia actus puros in- dividuos ex lege; in do: inis tamen, illa ipsa lex, ejusque inquisitio et inventio atque explicatio, pro fundamento est tam ad sciendum et operandun. Eam autm legen, ejusque paragraphos, Formarum nomine intel ligimus; praesertin cum hoc vocabulum invaluerit et familiariter oc~ currat." (232) L'induction nous amne 2 la connaissance des lots par Ja fameuse échelle des axiones, par laquelle nous remontons, par étapes graduelles et successives, des particuliers aux "axiomata minora", et de ceux-ci aux "axiomata media", et finalement vers les “generalissima". (233) Par des Tables de découverte nous remontrons des particuliers & formuler un premicr axiome pour expliquer les phénoménes. Cet axiome vise & découvrir la "forme" de la "nature" étudiée, ou son équivalent, dit Bacon, "sive natura naturantem", (234) Bacon est un honme de son forme" soit comprise dans un Spoque, et il faut certainenent que la sens plus scolastique: par les concepts de genus et species. (235) e Bacon est de chercher 1a "forme" ou "na- Cela n'empfche que le but ture" qui rend compte des opérations de la Nature. "Itaque de praccepto 337 it certum, li vero et perfecto operandi, pronuntiatum erit tale; ut berum, et disponens sive in ordine ad actionem. Atque hoc ipsum idem est cum inventione Formae verae. Etenim Forma naturae alicujus talis est ut, ea posita, naturadata infallibiliter sequatur. Itaque adest perpetuo quando natura illa adest, atque ean universaliter affirmat, atque inest omi, Eaden Forma talis est ut, ea amota, natura data in- fallibiliter fugiat." (236) La méthode de Buffon est baconienne en ce qu'elle cherche & dé- couvrir les lois et les opérations de 1a nature par 1"échelle des axi- comes, LA od Bacon cherchait 1a “natura naturans", Buffon cherche les “propriétés réelles" du sujet, le ploint le plus délicat mais le plus important de l'étude des sciences, Tous deux seront trés sévéres dans leur critique des mathématiques, car le réle de ceux-ci dans 1a re- cherche de cette "natura naturans" ou ces "propriétés réelles" est nécessairement extrémement limité, étant donnée leur nature abstraite. Les "vérités physiques" s'occupent de la nature des choses: par des effets particuliers nous induisons 1'effet plus général, c'est-a-dire le princpe, tiré des propriétés des choses, par lequel les lois agis- sent comme elles le font, pour donner la multitude d'effets particu- Liers comme nous les voyons. Le principe et 1a loi se confondent dans Ja nature, car notre expérience est limitée aux phénom’nes. Tl n'y a, dans la réalité, que des individus, qui sont manifestations singuliéres des propriétés générales selon les lois générales, mais aussi des cir- constances particulitres qui les donnent leur existence. Le but de Ihistoire naturelle est done pour Buffon de chercher non pas dans les @tres abstraits, mais dans les manifestations individuelles, des natu- res, des proprigtés, des lois. Voila pourquoi Buffon attaque les syst@mes des classificateurs - ils cherchent les rapports entre les @tres créés en ne condidérant que quelques parties de leur @tre, et en faisant ab- straction de leur unité individuelle. Voila 1a voie par laquelle 1'ar- bitraire est entré dans leurs néthodes. Si la vraie méthode est “la description compléte & 1'histoire exacte de chaque chose en particu- "41 n'existe réellement dans la Nature que des lier", c'est parce qu’ es ntexistent que individus, & que les genres, les ordres & les clas: dans notre imagination." (237) Cette position philosophique exige 1a 338 méthode baconienne: "Licet enim in natura nihil vere existat praeter corpora individua edentia actus puros individuos ex lege; in doctrinis tamen, illa ipsa lex, ejusque inquisitio et inventio atque explicatio, pro fundamento est tam ad sciendum quan ad operandum. Eam autem legem, ejusque paragraphos, Formarum nomine intell{gimus; praesertin cum hoc vocabulun invaluerit et familiter occurrat." (238) Lorsque nous avons abordé 1a question de la nécessité du modéle épigénétique selon les exigences des quatres critiques dialectiques, il fallait laisser 1a question de cété en ce qui concerne 1a critique logique et la critique métaphsyique, parce que leurs exigences font le Lien entre 1a néthode et le mode. Maintenant que nous avons établi quelques préceptes de 1a méthode, nous pouvons en revenir. Ayant dé- truit, lors de la critique méthodique 1a garantie de certitude entre Ja connaissance de 1a nature et de son objet, et plus grave, lors de la critique gnoséologique, 1a garantie de lien entre L'esprit et la nature, et la possibilité d'une science dite objective, en particulier lorsqu'il y a l'erreur des abstractions, Buffon doit remplacer 1a ga~ rantie de certitude par la certitude probable, que nous pouvons avoir par la succession constante des effets particuliers qui se dérivent des effets plus généraux. Le modéle épigénétique devient Ivi-néme le garant logique parce qu'il n'a pas affaire avec des abstractions, mais plutét avec des essences réelles. Le modle vise 4 fixer les propriétés qui en découlent de cette essence, car conme Locke L'a bien dit, les essences en eux-néne sont inconnaissables. Le nouveau garant de certi- tude, aussi probable qu'elle soit, est 1a celle des opérations Si les abstractions sont en défaut, c'est parce qu'elles fournis- sent des liens viscieux entre 1'idée et la nature. Maintenant {1 faut rappeler Montesquieu. Parce que 1a loi est 1a description des rapport: qui se dérivent de la nature des choses, chercher la loi & partir des propriétés va répondre A la nature. Le mod@le Spigénétique est ce Men tant cherché entre L'esprit qui fait la science et son objet, la nature. La matiére de base est la nature des choses, comme manifeste dans ses propriétés. Le principe organisateur est 1a loi. 1a méthode cherche & établir les rapports entre cette mati®re et ce principe, Pour garantir que nous sommes venus & s'étendre sur les vrais rapports, ce qui devient 339 Ja question ultime de la nouvelle métaphysique, il faut démonter qu'a partir de ces rapports hypothétiques pour l'instant, par les lois, déja trouvées pour d'autres phénoménes et reconnues pour vraies, nous pou vons rendre compte des phénoménes, que 1'effet général que nous avons induit peut expliquer tous les effets particuliers observés. Les faits sont le garant de 1a véracité, mais une heureuse application du mod@le épigénétique pour retrouver l'ordre réel dans le désordre apparent est Ja certitude que nous avons pu sortir de nous némes, que notre esprit A toucher un monent de la réalité, enfin que nous nous sommes étendus sur la vraie métaphysique des sciences. Cette montée aux vrais rapports, & le haut degré de connaissance “ol nous pouvons conparer 1a Nature avec elle-néne dans ses grandes opérations" (239), est la réplique de 1a méthode baconienne: 1a montée de 1'échelle des axiones devient 1a montée des effets particuliers aux effets plus généraux. VoilA 1a portée de 1'"induction", méthode qui satisfera aux ex gences de l'esprit et la nouvelle métaphysique aussi bien que celles de 1a nature, par laquelle toute science devient pos- sible, contre le scepticisme A la manitre de Berkeley, ou de Pascal, ou de Locke, ou de ilune. (240) Lorsque Kant rétablit les conditions qui fait la possibilité de la science, sont-elles autres que les principes de la métaphysique des sciences de Buffon? Revenons une derni®re fois a Bacon. "Verum via nostra et ratio (ut saepe perspicue diximus et adhuc dicere juvat) ea est; ut non opera ex operibus sive experimenta ex experimentis (ut enpirici), sed ex operi- bus et experimentis causas et axionata, atque ex causis et axiomatibus Tursus nova opera ct experimenta (ut legitimi Naturae Interpretes), ex- trahamus." (241) La combinaison des observations, la généralisation des faits, leur liaison par la force des analogies, toute terminologie qui vient d'enblée de Bacon, nous am@nent a un haut degré (dans la scala axiomata), pour juger que les effets particuliers dépendent des effets plus généraux, tout A fait le progranne baconien, méthode qui a pour but d'ouvrir des routes pour perfectionner les différentes parties de la physique, 1'utilitarisme par 1a descente depuis les axiomes (décou- verts par la montée A partir des effets particuliers) dans les ouvrages, Je but pragnatique Gtant la fin de toute méthode. 340 Si Buffon a cru, comme beaucoup de ses contemporains, que Newton Scrivait ses Principia avec Bacon sous la main gauche (242), pour appli- quer aux phénom’nes célestes une "forme" induite & partir de ceux du monde ci-bas, c'est--dire 1'attraction universelle, et pour ensuite calculer 1a loi de son action et expliquer le systtme du monde entier, il n'est arriver, aussi difficile que cela fut, qu'A la premi@re étape dans la scala ta, celle de 1a Vindeniatio prima, Ayant 6tabli Lexistence de cette propriété de 1a matiare (1'attraction), propriété selon Buffon, mais nous avons vu que c'était la pensée de Newton aussi, il n'est pas, ou n'a pas pu, allé au dela, A concevoir 1'épigéndse du monde, c'est-A-dire 1"opération par laquelle, & partir de la propriété &tablie, et sa loi, sont advenus les phénomtnes particuliers de 1a natu- re. "A L'égard de Newton, disait Buffon a Nérault de Séchelles, 11 a dé- couvert un grand principe; mais {1 a passé toute sa vie A faire des cal- culs pour le dénontrer." (243) C'est Buffon qui, par son nodtle épigéné- tique, démontrera plus ex isément la perfection du principe et 1exis~ tence de la propriété, L'ordre, tant cherché par toute méthode, ne peut &tre expliqué que de sa naniére (ou quelq ‘une analogue), ree que si Lon admet une esp&ce de pré-organisation, comme 1"a fait Newton lui- méne, {1 n'y a pas de moyen a démontrer la nécessité de 1a loi ou de la propriété en question, par 1'établissement de l'ordre. Le désordre ap- parent nest pas un ordre caché; il ne peut pas s‘appeler "ordre" que dans le sens que Dieu 1'a créé ainsi. Déterminer un order & partir d'une nature donnée, des lois et un processus épigénétique, c'est dépasser la Vindemiationem primam pour s'étendre sur les "grandes opérations de la Nature". Pour ces ratsons, Buffon formulera sa théorie de la terre en gé~ oth’se de la néral, et pour expliquer l'origine du syst®ne solaire, 1' conBte qui sillonne le soleil, en particulier. Qu'est-ce que lorigine philosophique de cette hypothds: Un des problénes, et le plus délicat de 1a nouvelle méthode buffo~ nienne, concerne justement le réle des hypothéses. Apres 1" introduction Je Newton en France, il était difficile de les faire entrer dans un sys~ de Itusage que} time. Nous ne voul pas entrer dans une discussion ton lui~m@ne en a fait des hypotheses, (244) Tl suffit que les conten~ 341 s non fingo, et ils ont sév@renent critiqué Buffon pour les avoir employées dans sa théroie de porains de Buffon tenaient au dictum é'ilypothe Ja terre ou de 1a génération. Mais Buffon non seulement les emploie, {1 les trouve nécessaires pour établir son systtme, et les légitime selon les préceptes de sa nouvelle métaphysique. Revenons & l'article "De 1a Reproduction en général". Nous avons vu lors de la critique logique que la question du but de 1a science a oceupé Buffon: c'est A partir d'elle qu'il renverse le principe logique des syst®mes classiques. Ayant renvoyé les questions du "pourquoi" et du "comment", en ce qu'elles rendaient 1a science impossible, il pose que la vraie est de chercher les moyens cachés que 1a nature a employés dans ses productions, c'est-A-dire les opérations et les lois par lesquelles elle travaille. Et puis il continue: "Par 1a question méne 41 est done permis de faire des hypoth’ses & de choisir celle qui nous paroftra a~ (245) Pourquoi "par 1a question méme" sont les hypothéses admissibles? Si la voir plus d'anslogie avec les autres phénonnes des la Natures. loi de attraction fonctionne réellerent dans la nature, il semble in- utile d'en faire une hypothése concernant sa vraie nature. Nous ne la saurons probablement jamais; mais nous n'avons pas besoin de toute facon pour en faire la science. Non. Etablir la loi et décrire les phénonénes, ce n'est pas faire de la science. $'il faut que nous nous occupions de quelque chose plus digne de notre attention, c'est justenent qu'il faut établir le lien entre les opérations de 1a nature et ses productions. Si Buffon fait une métaphysique de la science, c'est pour s'étendre sur la connaissance des propriétés réelles du sujet. Par la critique gnoséologique, et 1"intéri- orisation de la science, il devient plus difficile d'assurer une garan- tie entre 1a connaissance et son objet. L'existence du monde extérieur est elle-méme une hypothtse: Buffon n'a pas oublié de le préciser contre les théses d'un Descartes ou d'un Condillac & propos de la validité de nos idées (critique méthodologique). I1 revient donc & 1a doctrine de Locke: "Sur 1a connoissance des corps nous devons nous contenter de ti~ rer ce que nous pouvons des expériences particulieres, puisque nous ne sgaurions former un Systéme complet sur 1a découverte de leurs essences réelles, & rassembler en un tas la nature & Les propriétés de toute 32 Lespece." (246) Pour expliquer done les phénomBnes, Locke doit intro- duire 1a notion d'hypothtse, précisément parce qu'il ne peut pas connat- tre avec certitude L'essence réelle des choses. Mais ce n'est pas tout. Lorsque Buffon fait du but de la science la rercherche de "vérités physiques", c'est-A-dire la recherche des ef- fets plus généraux qui expliquent les effets plus particuliers, il pré~ cise que, puisque l'essence de ce genre de vérité est "une répétition fréquente & une succession non interrompue des mémes événenens" (247), cette vérité ne peut €tre qu'une probabilité. Nous n'apercevons que des effets particuliers; nous induisons l'effet plus général qui les a pro- duits. Il n'y a pas de lien évident, au sens mathématique, entre les deux parce que c'est une vérité physique qui dépend de 1a structure de la nature, structure qui est justenent ce que l'on cherche. Les vérités physiques, en échappant & la tautologie des mathénatiques en ce qu'elles dSpendent de cette structure cherchée et non pas connue a priori par LMentendement, ont I"inconvénient de ne pas étre aussi cetraines, au sens classique du mot, que les vérités mathématiques. La certitude en physique roulera sur 1'idée de la probabilité. La pensée de Buffon se complique encore une fois lorsque nous in- troduisons le mod8le épigénétique. L'Histoire naturelle ne peut pas se un fait donné - nous n'apprenons rien de ses satisfaire du syst8me com opérations par ce moyen. La question "pourquoi les animaux & les vég! taux se produisent" (248), étant une de fait, elle est insoluble, Toutes les réponses ne peuvent étre que des hypothéses, en ce que 1'on cherche Ja cause des effets particuliers (faits), et ne peuvent @tre que des nauvaises hypothse: elles doivent rouler sur les causes finales qui, nous avons appris par la critique logique, prenant 1a question pour un fait, ne peuvent pas expliquer les opérations par lesquelles 1a reproduc- tion se fait, et ne peuvent que porter sur "des rapports arbitraires & sur des convenances morales...". (249) Si, au contraire, nous nous Lini- tons A l'empirisme le plus borné, pour Stablir comment chaque espéce ani- male ou végétale se reproduit, nous tombons dans le néme inconvénient: chaque histoire n'est qu'un fait particulier, et nous ne sonmes pas plus avancer dans la recherche de Ja cause de 1a génération par 1a compilation de ces effets particuliers. Par tant d'histoires nous ne pouvons espérer 343 trouver que des maximes générales, par exemple, qu'il ne se fait point de fécondation hors du corps", "tout vivant vient d'un ceuf, toute géné- " (250) Ces maximes pchent par la grande ration suppose des sexes, fe erreur logique de l'empirisne - elles ne sont vraies que pour les exen- ples étudiés, et il est interdit d'en faire des hypothtses plus généra~ les. I1 faut chercher le moyen caché par lequel Ja nature op@re, c'est- A-dire l'effet plus général. "Cherchons donc une hypoth®se qui n'ait aucun des défauts dont nous venons de parler, & par laquelle on ne puisse tomber dans aucun des inconvéniens que nous venons d’exposer; & si nous ne réussissons pas A expliquer 1a méchanique dont se sert 1a Nature pour opérer 1a reproduction, au moins nous arrivons & quelque chose de plus (251) Pour éviter cet 6- vrai-senblable que ce qu’on a dit jusqu'ict ceuil de prendre 1'opération pour un fait, Buffon cherche les causes se- Jon le mod8le épigénétique, les opérations naturelles qui mettent en mouvement le cycle des phénom’nes. Ici encore il a besoin de 1"hypothese. Dans la théorie de la terre, 11 n'est pas suffisant d'éclaircir les lois par lesquelles les plan8tes suivent leurs trajectoires autour du soleil. Il faut aussi donner une explication de l'origine du systéme qui rendra compte des phénom’nes. La "conformité de position & de direction dans le mouvement des planttes, suppose nécessairement quelque chose de commun dans leur mouvement d'impulsion, & doit faire soupgonner qu'il leur a &té communiqué par une seule & méne cause." (252) Invoquer 1a main de Dieu qui donna le branle A l'Univers, c'est un recours A une cause hors de la nature; c'est prendre le fait pour la fin, enfin c'est faire une hypothse qui ne peut pas rendre compte des opérations naturelles. Mais pulsque nous n'avons que des observations sur le mouvement actuel, 1a position ct direction des plandtes, novs sonmes obligés de faire une hy- pothése pour expliquer comment est arrivé cet ordre. L'épigéntse s'at- taque au probléme de la genése de l'ordre naturel. Mais puisque nous sommes déj& A 1"intérieur de l'ordre établi, ce n'est que par une hypo- thése que nous posons son origine; 1'histoire est une matiére de fait, une vérité physique, dont le syst@me échappe & 1a méthode newtonienne. Cependant, conme une vérité physique nous pouvons et devons pesé les probabilités de 1'hypoth’se que nous ferons, pour rendre 1"hypothése si probable quelle devient une certitude, Le branle d'une conte qui donne 344 1'impulsion 2 une partie de la mati&re solaire pour créer les plan’tes n'est pas aussi absurde que 1'on a pensé. Et Buffon consacra plusieurs pages A démontrer 1a probabilité de son hypoth®se, (253) Et il conclut: "Quelque grande que soit 4 mes yeux la vrai-semblance de ce que j'ai dit Jusqu'ici sur la formation des plantes & de leurs satellites, conme chacun A sa mesure, surtout pour estimer des probabilités de cette na~ ture, & que cette mesure dépend de 1a puissance qu'a l'esprit pour com- biner des rapports plus ou moins éloignez, je ne prétends pas contraindre ceux qui n'en voudront rien croire. J'ai cru seulement semer ces idées, parce qu'elles m'ont paru raisonnables & propres & éclaircir une matidre sur laquelle on n'a jamais rien écrit, quelqu’inportant qu'en soit le sujet, puisque le mouvenent "impulsion des planttes entre au moins pour moitié dans la composition du systéme de 1'Univers, que 1'attraction seule ne paut pas expliquer." (254) VoilA 1'aveu de plusieurs points in- portants que nous avons soutenus: le moddle épigénétique est original chez Buffon; il s'agit véritablement de ce mod@le parce que l'origine du systdme est au moins la noitié de sa composition, le -cycle actuel du syst®me étant L'autre noitié; 1hypothise est nécessitée par ce modéle parce que les lois du syst®ne actuel, et les forces qui travaillent ac~ tuellement dans le systme, me peuvent rendre compte de L'origine natu- relle en faits d'histoire. Lorsque l'on parle de la nécessité de L'hypoth®se en mati&re d'his- toire, on peut se denender pourquoi Buffon dit qu's1 veut au moins scner des idées propres "A éclaircir une matiére sur laquelle on n'a jamais rien écrit"? Si Newton ne feigne pas é'hypothtses, s'il ne veut pas s'é- tendre sur l'origine du syst@me, Descartes 1'a certainement fait. Pour- sont raisonnables & propre @ éclair~ oi Buffon pense-t-il que ses idées cir cette matidre? Il était facile de 1'accuser d'avofr fait un “ronan de physique", de méme qu'il en accusait Burnet. (255) Cependant, en étu- diant de plus prés le réle de 1'hypothése, au moins chez Descartes, et Ja structure de son "histoire" de la terre tant vantée, nous découvrons non seulement loriginalité de Buffon, mais aussi sa perspicacité. Avant de se lancer dans sa physique dans les Principes de 1a Aosophic de 1644, Descartes fait une petite digression dordre méth logique. Son but étant de découvrir les causes des phénoménes du monde 345 sublunatre, i1 trouve nécessaire d'exaniner 1a certitude avec laquelle il peut les poser. D'abord il démontre, par le principe métaphysique de la véracité divine, qu'il n'est pas vraisenblable que les causes & par- tir desquelles on peut déduire tous les phénom’nes du monde soient faus- ses. (256) Le premier probl&me qui pourrait se poser & celui qui a étu- dier mme un peu Descartes, est ceuli de la "vraisemblance", car pour Descartes il y a du vrai et du faux, du connu et de 1"inintelligible, mais il n'y a nulle place pour la vraisenblance. (257) Ne faut-il donc pas interpréter d'emblée le paragraphe comme un persiflage, et que la véritable pensée de Descartes est 1'affirmation absolue de 1a connais~ ance vérace de la cause lorsque tous les phénom®nes en peuvent 8tre dé- duits. Passons. Etant donné 1"importance du sujet, Descartes ne veut pas démontrer la vérité des causes qu'il introduit: "...je desire que ce que j'éeriray soit seulement pris pour vne hypothese, laquelle est peut estre fort @loignée de 1a verité; mais encore que cela fust, je croiray auoir beaucoup fait, si toutes les choses qui en seront déduites, sont entiere- ment conformes cux experiences: car si cela se trouue, elle ne sera pas guion_sten pourra aturelles 3 moins vtile 2 la vie que si elle estoit vraye, pour: seruir en mesme facon pour disposer les cau roduire les (258) Si Descartes a relegué son au tiroir fon: lorsqu'il apprit le résultat de 1'affaire de Galilée, on pourra croire, et c'est L'interprétation classique, que c'est par peur de 1"Inquisition qu'il pose ses causes conme des "hypothéses", selon la formule tradition- nelle de "sauver les phénomBnes", c'est-A-dire que méme si 1'hypothse soit fausse, sa valeur heuristique dans 1'explication des phénomnes nous permis de 1'étudier et de L'employer. Et voila, continue 1'argument classique, pourquoi Descartes pouvait dire qu'il supposera méne quelques unes qu'il croyait fausses. (259) Pour échapper & la censure de la Sor- bonne, il fallait présenter son histoire de 1a terre par une évolution mécanique et naturelle, thése qui se hourtait si manifestément contre la se. Le cahos des podtes n'est doctrine de 1a Genése, conne une hypot! qu'une fausse hypoth@se; {1 maintient que la toute-puissance de Dieu a tout créé d&s le commencenent avec autant de perfection que l'on en trouve actuellement. (260) Quelles sont ces hypothéses ou "suppositions"? “Supposons donc, s'il vous plaist, que Dieu a diuisé au commencement 346 toute 1a mati&re dont il a composé ce monde visible, en des parties as~ sez égales entr'elles qu'elles ont pi estre, & dont 1a grandeur estotent nédiocre..."; supposons aussi que Dieu a mis toute cette matiére en mou- vement, par une force égale, en deux diverses fagons: le tourbillon au- tour d'un centre, et puis plusieurs tourbillons disposés en méme facon dans l'univers. (261) Maintenant nous venons A l'article crucial: "Ce peu de suppositions me semble suffire pour m'en servir comme de causes ou de principes, dont je déduiray tous les effets qui paroissent en la nature, par les seules loix cy-dessus expliquées [c'est-a-dire les lois de la nature établies dans la Ie partie,§537, 39 & 40]. Et je ne croy pas qu'on puisse imaginer des principes plus simples, ni plus intelligi- bles, ni aussi plus vraysemblables, que ceux cy." (262) Que les supposi- tions vont servir de causes, Descartes 1'a dit tout au long. Mais tout d'un coup 41 ajoute "causes ou de principes". D'aprés 1a préface aux Principes de la philosophie, les principes sont les "premieres causes" (263), clest-a-dire celles qui n'ont pas de cause elles-m@nes pour exis- ter. La "cause" doit @tre interprétée au sens logique - 1a raison pour laquelle quelque chose existe. (264) "Quidquid est realitatis sive per- fectionis in aliqua re, est formaliter vel eminenter in primi & adaequa~ t@ ejus causa." (265) Lorsque Descartes suppose donc que les deux prin- cipes soient la mati8re et le mouvement, il ne veut que démontrer que toute la perfection et toute la réalité de cet univers sont dérivées de des deux principes ontologiques. Elle sont hypothétique parce que les choses de ce monde “ayant pf estre ordonnées de Dicu en vne infinité de diuerses fagons, c'est par la seule experience, & non par la force du xaisonnenent, qu'on peut scauoir laquelle de toutes ces facons il a chot~ sie." (266) Les lois du mouvement qui régiront le mouvement de 1a matiare ne sont nullenent des hypothéses. Elles ont été déduites des premiers principes métaphysiques, et ayant été ainsi déduites avec 1"évidence, nous sonnes garantis de leur véracité. A partir des phénoménes nous fai- sons L'analyse jusqu'A quand nous venons aux principes de matiare et du mouvement. 02 est le lien entre ces principes dérivés par analyse, et Jeur garant, les principes métaphysiques? Il n'y en a pas; 1"expérience seule peut nous apprendre lesquels ont Gté choisis par Dieu. Par les exigences de sa méthode néme, Descartes doit les appeler des "hypoth8ses" 347 ou "suppositions" Mais i1 y a un deuxiame endroit oi Descartes avait fait appel aux supposition. Dans chaque Essai de 1637 qui sauivait le Discours de la néthode, Descartes commence par annoncer des suppositions relatives & la matidre présentée. Dans la Dioptrique il se serve de "deux ou trois comparaisons" pour concevoir les propriétés de la lumi@re, imitant, dit il, les astronones qui présentent des suppositions, aussi fausses ou in- certaines qu'elles soient, pour ordonner les phénomtnes observés. (267) Dans les Méteores il faut encore en faire, a propos de la nature de la natire: ici, il trouve nécessaire de le faire parce que, dit-il, 1a con- naissance des choses dépendant des principes généraux de la matiére, pour éviter de donner ces principes, puisqu'il ne veut point donner toute sa phsyique, il faut faire des suppositions. Et dans 1a préface aux Essais, le Discours de 1a méthode, {1 donne des précisions A propos de cette manibre de procéder: "...je ne les ai nonmeées des suppositions, qu'afin qu'on sache que je pense les pouvoir déduire de ces premigres vérités que j'ai ci-dessus expliquées [1es principes nétaphysiques], nats que j'ai voulu expressément ne le pas faire, pour empécher que certains esprits, qui s'imaginent qu'ils savent en un jour tout ce qu'un autre a pensé en vingt années, sitét qu'il leur en 2 seulement dit deux ou trois mots, et qui... [etc.]". (268) Descartes pense (dit-il) pouvoir déduire Ja nature de la lumitre ou de la matitre céleste des premidres vérités. Nous ne croyons pas que c'est A cause de 1a peur de ces certains esprits qu'il n'a jamais fait la déduction des principes des premi&res vérités, car pourquoi ne 1’a-t-il pas fait dans son Monde ou Traité de 1a lumiére, texte qui ne fut jamais publié pendant son vivant? Mais pourquoi, et celle-ci est une question plus importante, lorsqu'il reprend les "suppo- sitions" dans les Principes, n'est-il pas question de les déduire des deux parties antéricures of il est précisément question de la métaphy- sique? N'act-il pas compris entre le Monde et les Principes qu'il n'y pas de liaison nécessaire entre les preniers principes et les principes de la nature créée, parce que ceux que Dieu a choisisentre une infinité de diverses possibilités, ne peuvent pas étre déterminés par la force Lles sont précisément du raisonnenent, mais seulement par 1'expérience? des hypoth’ses parce que nous ne pouvons pas les connaftre par intuition, 348 comme on peut le faire pour les premiers principes. Descartes ne peut pas déclarer que ses suppositions soient “évidentes", c'est-a-dire si claires et si distinctes que l'on ne puisse jamais les revoquer en doute. Il est réduit & dire qu'elles sont "vray-senblables". Si Descartes trouve nécessaire de poser les causes premiares de la nature créée, bien qu'il nfen soit pas certain de leur véracité, c'est par L'exigence de sa méthode. Et toute 1"énigme autour de ces paragraphes des Principes, et en particulier 1'interprétation moderne que Descartes fit profession de foi et 1'adhérence a la Gen&se par peur de 1"Inquisi- tion, sa vraie intention étant de faire une histoire de 1a terre & par- tir de la matitre, le mouvement, et les lois de 1a nature, trouve sa solution dans 1a Régle VI des Regulae ad directionem ingenii. “Ad res sinplicissimas ab involutis distinguendas & ordine persequendas, oportet in_ynaquaque rerum serie, in qua aliquot veritates vnas ex alijs direct® deduxinus, observare guid fit maxim’ simplex, & quonodo ab hoc cactera agis haec propositic videatur, praecipuum tamen continet artis secretum, nec goania minis, vel aequaliter removeantur. Et nihil valde novum vlla vtilior est in toto hoc Tractatus:...". (269)Qu'est-ce que ce prin- cipal sccret de a mét ode? "Atque in hoc totius artis secretum consti tit, vet in omnibus ullud maxim absolutum diligenter advertamus." (270) Toute la méthode roule sur cette mise en série; toute certitude, sur 1'ab- solutisme du prenier terme. Dans sa physique, répliquant sa méthode, les phénoménes, c'est-a-dire le complexe, doivent @tre expliqués par le sim- ple, les principes supposés. "Et je croy pas qu'on puisse imaginer des principes plus simples, ni plus intelligibles, ni aussi plus vraysembla bles que ceux cy" (le texte latin donne "probabiliora" pour "vraysenbla- bles"), avait dit Descartes A propos des principes “dont je déduiray tous les effets qui paroissent en 1a nature". (271) IL y a, dans toute serie, des termes relatifs et des termes abso~ lus. "Absolutum voco, quidquid in se continet naturan puram & simplicem, de qua in quaestio: vt onne id quod consideratur quasi independens, cau~ sa, simplex, vniversale, aequale, simile, rectum, vel alia hujusmodi; atque idem primum voco simplicissimum & facillimum, vt illo vtamur in questionibus resolvandis." (272) Ces “suppositions" qui servent donc de Principes sont des termes absolus dans 1a déduction 4 suivre: elles sont les plus simples et les plus factles que l'on puisse imaginer, in~ dépendantes des phénoménes, et leur cause. Tous les phénontnes de L'uni- 349 vers sont des termes relatifs & ces principes, relatifs parce qu'ils participent de cette nature absolue, et renferment en eux-ménes des “respectus": "tale est quidquid dicitur dependens, effetus, compositun, particulare, multa, inaequale, dissimile, obliquum, &c." (273) I1 faut noter tout de suite que cette distinction entre "absolu" et "relatif" ne comporte aucune signification ontologique. La distinction porte sur les termes dans la série de 1a déduction. C'est selon L'ordre des rai- s certaine de ce qui est, que Descartes établit sa méthode. (274) Tl n'y a ns que Descartes les distingue; c'est pour parvenir A une connaissance pas d'histoire de la terre, il y a généalogie des connaissances, "...vt melius intelligatur nos hfc rerum cognoscendarum series, non vniuscujus~ que naturam spectare, de industria causan & acquale inter absoluta nu- meravimus, quanvis corun natura fit ver® respectiva: nam apud Philoso- phos quidem causa & effectus sunt correlativa; hfe verd si quaeramus qualis sit effectus, oportet pritis causam cognoscere, & non contra." (275) Voila pourquoi dans les Principes Descartes appelle les supposi- tions des causes: ce sont elles qui répondent au terme absolu du série qui vont expliquer les phénoménes; ce sont elles qui nous donnent la connaissance des natures en question. Ce n'est pas qu'au début Dieu a créé 1a matidre et le mouvement, et qu'il a laissé ensuite 1a nature prendre son cours, d'aprés les lois de la nature, pour former ce monde~ ci. Pour rendre compte de 1a complexité des phénontnes, 11 fait suivre I'enchainement de cause-effet (absolu-relatif) selon lordre de la rai- son. "..,comme on connolstroit beaucoup mieux quelle a esté la nature d'Adan & celle des arbres du Paradis, si on avoit examiné comment les ap. sortent de leurs semences, que si on auoit seulement consideré quels enfans se forment p. res, & comment les plantes ils ont esté quand Dieu les a créez: tout de mesne, nous ferons mieux entendre quelle est generalement Ja nature de toutes les choses qui sont au monde, si nous pouvons imaginer quelques principes qui sofent fort intelligibles & fort simples, desquels nous facions voir clatre- tout le monde visible auroit pa ment que les autres & la terre, & enfii estre produit ainsi que de quelques semences, bien que nous scachions qu'il n'a pas esté produit en cette fagon; que si nous le décriuions bien c us croyons qu'il a esté crea." seulement conme i1 est, 350 (276) Ce long détour A travers 1a perisGe de Descartes est absolument nécessaire pour dissiper quelques erreurs communément admises. Son in- troduction des hypoth’ses n'est exigée que par ses considérations mé- thodolegique. Tl ne fait pas d'histoire de 1'univers ni de la terre; il ne fait qu'une exposition en série, pour avancer depuis les prin- cipes les plus simples jusqu'aux phénon®nes les plus complexes pour dé- montrer dans Lordre rationnel, 1a dépendance des effets de leurs cau- ses (principes) naturelles. I1 a besoin de 1a matitre et du mouvement, dont lexistence ne peut pas @tre démontrée a priori A partir des prin- cipes métaphysiques, et pour cette raison il les appelle des hypothéses. 11 veut venir enfin s'étendre sur la nature de l'univers, sur ses lois et sur son fonctionnement, et non pas sur l'origine de sa perfetion. Chose incompléte et imparfaite, conment pouurais-je espérer venir & connattre L'origine de la perfection? De méme qu'il exclut 1a possibi- lité de @tre incomparablenent moins parfait que Dicu ne doit pas présumer étre L'infini, 6tant un @tre fini et borné, de méme un prend capable de s'étendre sur lorigine de la perfection de 1a nature créée. je ne doute point que le monde n'ait esté creé au commencement auec + 277) Peut-€tre objectera-t-on qu'il importe peu a savoir si Descartes autant de perfection qu'il en a.. a véritablenent voulu faire une histoire de l'univers, que de toute fa~ gon les cartésiens par la suite lont pensé, et qu'ils en ont fait de néne. Burnet, Woodward, Whiston, ils ont tous repris le mod@le carté- sien, et si Buffon prend la plume contre ces théories, ce n'est que pour écrire un roman A sa facon. La vérité est que nous avons chez Buf— fon une nouvelle méthode avec toutes autres exigences, Par sa théorie de la terre il ne veut ni poser des premi&res causes de 1a nature créée, ni s'étendre sur sa nature essentielle. A la suite de Newton, il n'en feigne point d'hypoth®ses A ces propos. I1 veut parvenir a les opéra- tions par lesquelles L'ordre actuel s'est instauré. Du désordre appa~ rent 11 faut chercher un ordre caché, et de cet ordre caché, les opéra~ tions par lesquelles il est apparu. L'hypothése ne doit pas servir de principe tel qu'on en pourrait déduire 1'ensenble des phénom®nes. Comme herche les'"verae causae". Pu Newton, i1 squ'il est nécessaire A ex- 351 pliquer L'ordre actuel par le mod@le épigénétique, ce qui met le sys t@me en mouvenent ne peut étre déterminé que par 1"intermédiaire d'une conjecture, douteuse au début du raisonnenent, mais destinge 3 @tre vé- rifiée par l'accord de toutes les conséquences avec les phénonBnes et Lordre observé. Plus le syst@me est unifié sous Ihypothése, plus elle devient probable. Mais puisque c'est une question de fait, le fait his- torique dans le cas de l'histoire de la terre, ce fait est hypothétique en ce qu'évidamment il ne peut pas @tre observé, ni vérifié par une ex- périence actuelle. Lige 2 sa métaphysique de 1a "vérité physique", 1"hypothése montre une toute autre perspective méthodologique chez Buffon. Et en ceci, 1iée au nodBle épigénétique, 1a méthode dépasse m@ne celle de Bacon, qui pourtant avait founi les principes généraux: la montée & partir des phénonnes observés, par la généralisation des faits et la force des analogies, vers les premiers axiomes (les effets plus généraux). Mais tandis que Bacon, n'étant monté que jusqu'a la premiére vendange ou le commencement de i'interprétation de la nature, a montré le chemin, Buf- fon est parvenu & ce haut degré de connaissance ob il pouvait comparer Ja Nature avec elle-méme dans ces grandes opérations, mais plus impor tant, il est parvenu & fonder une métaphysique des sciences qui ouvra Lfentendenent jusqu'A ce que esprit pouvait fait l'image du monde comme en effet il est. NOTES AU SIXIEME CHAPITRE 352 (2) Ctest 1a th8se exposée, par exemple, par Cassirer, Die Philosophie der Aufklurung de 1932. (Voit (n® 1301).) (2) Da point de vue épistémologique, on pourrait croire que le plus grand coup fut celui de Locke, 1a mort de 1'innéisme, car en niant cette source inébranlable de certitude, on était foreé de chercher dans les sensations 1a source des connaissances humaines, En re~ vanche, la psychologie ne peut rien garantir de certain; c'est ainsi que cette nouvelle perspective posait plus de problémes et de con- troverses pour le sitcle des lumi@res, soit A propos de la certitude des connaissances, soit A propos de la validité de 1a raison elle~ néme, qu'elle a résolus. (3) Buffon, O.P. 26 A 51-B 2, Cité en tBte de notre these, (4) Clest Ferdinand Alquié qui récuse Iobjection de cercle faite contre Descartes, en substituant a la "series rationun" le "nexus rationun", Notre citation est de Picrre Magnard, "Pascal dialecticien" (n° 1375), 259, (5) Instances de Gassendi, In Medit, IV, dubic, 4, Inst, 2, Citée et iscvtee par Gilson dans son conmentaire du Discours de 1a méthode (n® 908), 360. (5) Buffon, O.P. 26 4 27-29. (7) Buffon, 0 26 A 23-25, (3) William Harvey, Exercitationes (n° 493), 121. (9) Jacques Roger, Les S Ja vie (n° 1406), 120. (20) John Turberville Needham, Observations upon the Generation (n® 1167), 19. (21) Pierre-Louis Moreau de Maupertuis, Vénus physique (n° 1146), 81. (22) Toid., 45. (23) Tbid., 87. (24) Totd., 87-89. (23) Sur la théorie du "defluxus" et son histoire, voir Roger, Les Sciences de (n° 1406) 54, 87, 127, etc, (Voir "Deflu (théorie de)" dans son index.) id., 135-140, 5) Nos renseignements sur Gassendi viennent de Roger, que nous ne citerons pas A chaque reprise. 353 (17) ",..41 est manifeste que 1a semence est hétérogene, et fornée des nénes parties dont les parties organiques elles-némes se consti- tuent graduellement et par un enchafnement continu", Gassendi, Syntagma philosophicum (1658) II, livre IV, ch. iii, 280, 2€ col. Cité par Roger, Les Sceinces (n® 1406), 136. (18) Maupertuis, (no 1146), supposition 3°, 120-121, s_phys (19) Ibid., 99. (20) Ibid., 130, sur laveu de Gassendi, voir Roger, Les Sceinces (m0 1406), 138, (21) Au moins dans le texte comme présenté dans les Oeuvres de 1756 (n® 1135), Sur les éditions variées de ce texte, voir Roger, Les Sciences (n° 1406), 474, n. 87. (22) Maupertuis, Vénus physique (n° 1146), Conjecture I, 131. (23) Ibid., Conjecture IZ, 132, (24) Ibid., Conjecture IIT, 133. (25) Nous ajoftons , car nous croyons 1a remarque inutile en ce qui con- cerne la réaction de Buffon a la th®se de Maupertuis, que cette "partie" indivisible, l'essence de 1'animal, inaltérable et dissi- pée partout, n'est rien d'autre qu'une monade dominante de 1'école leibnizienne (Wolf). (26) Roger, Les Sciences (n° 1406), 477. (27) Soit une pré-formation, soit une pré-existence. Sur la différence entre les deux, voir Roger, ibid., 325-326. Nous parlons de "pré- organisation" pour désigner les deux, car Buffon veut s'attaquer aux deux en ce qu'il ne peut pas comprendre 1a notion d'une pré- organisation, de quelque mani&re qu'elle soit. Nous avons congu ce mot pour sa valeur heuristique, non pas historique, ce qui nous permet de voir d'un coup le probléne central de Buffon, en méne temps que d'éviter la répétition A chaque fois des noms des deux types de "pré-organisation". La critique des auteurs antéricurs se trouve dans le chapitre "Exposition des Syst®mes de la Génération" du ITe volume de 1'Histoire naturelle, in 0.P. 256 B-287 A. TL serait sans doute trés intéressant de faire une étude de "Buffon, historien des sciences", & propos de 1a génération aussi bien que I'histoire de la terre; malheureusenent nous ne pouvons pas la faire ici. (28) Buffon, 0.P. 271 A 7-8. Tout le paragraphe est une énumération des erreurs de Harvey, erreurs constatées par les observations ultéri- (29) Buffon, Q.P. 268 A 55-B 3. 354 (30) Voir L'article "Réflxions sur les expériences précédentes," H.N. II, 255 et suiv. (GL) Buffon, 0.P. 258 A 13-24. (32) 0. 285 B 35-39. (33) O.P. 285 B 33-34. (34) Maupertuis, Vénus physique (n° 1146), 51. (35) Pour ne parler que du régne animal, comme Maupertuis le fait lui- (36) Maupertuis, Vénus physique (n°1146), 63. (37) Buffon, O.P. 236 A1-8. (38) 236 A 9-17. (39) (40) 238 B 36-35. + 238 B 38-40. (41) Voir chapitre III, "De la Nutrition & du Développement". Le but du prenier chapitre était de distinguer, par une comparaison des an maux et des plantes, ceux-ci des Stres bruts, en remarquant que leurs ressemblances, c'est-a-dire la reproduction et la croissance ge ces Stres vivants, Gtaient plus tmportantes ct plus frappantes que leurs différences. (42) 0.2. 238 B 42-51. (43) Phénonénes énumérés par Bourguet, Lett Josophigues (n° 335), 93-95. spl (44) Ibid., 95-96; développement A suivre, jusqu'a 98. (45) Ib: gv Ad3s: (46) Ibid., 164-165. (47) Ipid., 165. (48) Roger, Les Sciences de 1: (n® 1406), 550 n.122, sugére que Buf fon fait ailusion & Maupertuis. (49) 233 B 30-36, 234 A 3-11. (50) (2) (53) (54) (55) (56) G7) (58) (59) 355 (n° 1177), "Scolie générale"; II, 178-179. Respectivement: H.N. IL, 258; 303; 326-327. Chapitres reproduits dans les 0.?., que l'on a micux étudiés et estimés... Buffon, H.N. IT, 329-330. Ibid., 336-337. A suivre, ibid., 337. Ibi » 344. Ibid., 343. Ibid., 330. Tout ce développement se trouve A ibid., 341-342. (61) (62) (63) (64) (65) (66) (67) (68) (69) (70) ap (72) (73) (74) (75) Ibid., 348. Ibid., 347-348. Voir ibid., 338-340 & 348-349. Nous suivrons 1a "Récapitulation" que Buffon fait lui-néme. 0.P. 287-289. Maupertuis, Vénus physique (n° 1146), 120. Buffon, 0.P. 287 A 21-31. Maupertuis, Vénus physique (n° 1146), 120. Ibid., 120-121. Buffon, 0.P. 288 B 45-48. Maupertuis, Vénus physique (n° 1146), 132. Buffon, 0.P. 289 A 13-B 4. Buffon, H.N. II, 340. Buffon, 0.P. 238 A 51-B 3. O.P. 9 B 43-51. Pope, Essay on Man (n° 1188), I, 289-291. Buffon, 0.P. 45 A 1-7. 356 (76) 0.2. 46 A 40-B 4. (77) .2. 46 B 14-21, (78) Buffon, "Preuves de la téorie de 1a Terre. §1," 0.P. 66 B 21-23. (79) 0.2. 66 B 30-32. (80) Bourguet, Lettres philosophiques (n° 335), 58-59. (81) Bugfon, 86 B 23-25. (82) 0.P. 86 B 26-31. Cette théorie des angles correspondants chez Bour- guet et chez Buffon nous a perplexé, aussi simple quelle soit en réalité, faute d'avoir saisir visuellement de quoi il s'agissait. Pour aider le lecteur de ces théories de la terre, nous donnons un petit schéma. La clef pour comprendre 1'image est dans l'analogie faite avec les ouvrages de fortification (pensez A une forteresse de Vauban) (voir Bourguet, Lettres philosophiques (n° 335), 1813 Buffon, H.N. I, 322.), c'est faut faire une image vue d'en haut, et non pas horizontalement. “A magix wotZiea WAG egie wemesone angle rentrant ~ NSS angle saillant ffon, HN. I, 314° Bourguet, Naa Snoméne XXV; I, 314-315=196, Phen. XVII; H | XXVI; OP. 05 A= 205, Phan. XXXVIT; O.P. 95 Aq} XVIIT. (83) Bu hilosophique (n° 335), 199, - 1, 332 * 199, 05, Phén. (84) Buffon, O.P. 49 A 57. (85) Bourguet, Lettres philosophigues (n° 335), 195, Phén. XII. Buffon répétera ce fait plusicurs fois: Voir "Preuves de la théorie de la terre. §1, De 1a Fortation des plandtes," 0.P. 77 B 3-9 et "Preuves SIX, Sur les ingqualités de la surface de la terre,” H.N. I, 319- 320. (86) Bourguet, Lettres philosophiques (n® 335), 200, Phén. XXVII. Faut- il donné déji 1a solution de Buffon A 1a toute la théorie de 1a terre? Ces phénon’nes sont établis dans le "Discours second," 50 B, 51 A, etc.. eB, (87) Bourguet, Lettres philosophiques (n° 335), 203, Phén. XXXII. Buffon contradira Woodward qui avait affirmé une déposition de matidre se~ Jon 1a pesanteur spécifique. Pourquot Buffon n'a-t-il pas citer jourguet A ce moment? "Preuves. SVIII, Sur les Coquilles et les autres productions de 1a mer qu'on trouve dans L'intérieur de la terre," 0.P. 101 A 50-54. (88) Voir respectivement: Bourguet, Lettres philosophiques (n® 335), P'ro- (89) (90) oD (92) (93) (94) (95) (96) (97) 357 positions 1-9; 211-212, que Buffon rapporte littéralement dans son chapitre "Preuves 55. Exposition de quelques autres systémes," .P, 86 B 44-87 A 11 (Les Propositions 6 et 7 sont omises, la 7e Etant assez importante: "Qu'on ne peut donner absolument aucune raison solide de la Configuration des parties de la Terre, sans admettre son mouvements sur son Axe, autour du Soleil", dont L'inportantce sera pour Buffon 1. Figure applatie da 1a terre, selon Newton, confirmée théoriquenent par Maupertuis en 1732 dans le Discours sur les differentes figures des astres (n° 1124), et scientifiquenent par les expéditions de Maupertuis et al. en Laponie (voir le rapport de 1'expédition La Figure de la Terre (n® 589)) et La Condamine, Bouguet et Godin au Pérou (voir le rapport par Bouguer, "Relation abréegée du Voyage fait au Péroi (n° 332)). 2, Mouvement général des eaux d'orient en occident & cause de la rotation de la terre; Propositions 19, 20-23; 215-216, rapportées par Buffon, 0.P. 87 A 12-23. Les citations viennent de la propostion 26 (non citée par Buffon); 217. Bourguet, Lettres philosophiques (n° 335), 181. Ibid., 183. Ibid., 185. Ibid., Proposition 2; 211. Nous croyons que Bourguet pense plutdt Bune dissolution générale de 1a natidre dans une mer universelle qu'a un état de Liquéfaction, ce gui est’ témoigné par 1a deuxiéme "partie" de 1'Essai projeté, p. 219: "Examen des phénonénes qui prouvent que les parties solides ont été fornées dans une liquide." Ibid., Proposition 15; 214, Voir également ibid. Proposition 12; 213: "Que les sommets des Montagnes aquit (sic) d'abord la figure des Ondes de la Mer, la~ teralenent des Poles vers 1'Equateur, & de 1'Equateur vers les Poles, en gardant néanmoins une direction d'Orient en Occident, suivant le plus ou moins de résistence de leur Matiére A la direc lu mouvement du Globe d'Occident en Orient"; Proposition 16; ‘Que la Dissolution successive de la matiére de 1"Ancien Monde, & 1'élévation graduelle des Couches du Nouveau, sont la vraye cause, de la variété alternative des Lits de matiére ot 1'on trouve que les Lois de la Pésanteur spécifique ne sont pas obser- Buffon, "Preuves. §XIX, - 1, 580-609. Notez que le titre général de l'ouvrage est Histoire naturelle, générale et particuli®re, et non pas Histoire naturelle des "nam- miféres” ou des “quadrupédes", quotque les tones s'occuperont dveux, conme sera le cas pour les volumes plus tard: Histoire na~ 358 turelle des Oiseaux ou des Minéraux. (98) Buffon, 0.P. 312 B 3-18. (99) Voir 0.P. 297 A, et notre commentaire dans la Critique gnoséologi- que, 108 et suiv. (200) Nous dégageons ces deux raisons en liaison avec certains textes, m@ne postéricurs & celui-ci; ainsi c'est nous qui faisons la dé- duction A ce point de 1'listoire naturelle, et non pas le lecteur de 1'époque. Nous le faisons pour démontrer 1a consistance dans Ia pensée de Buffon, aussi bien que pour démontrer la place in- portante que tient i'homme dans le développenent de sa pensée biologique en général. 1. L'homme se distingue de l'animal en ce qu'il peut habiter différents climat. Chaque esp8ce vivante a s2 situation dans cette biosphtre, puisque seulement des organismes matéricls; 1'honme par sa raison a pu trouver les noyens de sup- porter les climats les plus rigoureux et les terrains les plus désolés. L'expression la plus nette de cette idée se trouve dans Marticle "Le Lion" de 1761: "...i1 [1"homne] est fait pour rég~ ner sur cette terre, que le globe entier est son domaine, il semble que 12 nature se soit prétée A toutes les situations;... Dans les animaux au contraire, 1'influence du climat est plus forte & se marque par des caractres plus sensibles, parce que les esp&ces sont diverses & que leur nature est infiniment moins perfectionnée, moins étendue que celle de Iho: ~chacun a son pays, sa patrie naturelle dans laquelle chacun est retent par nécessité physique, chacun est fils de 1a terre qu'il habite...". 378 A 15-18, 22-28 {nous soulignons), 41-44. Z, Les variétés de 1"honme, esptce unique, est possible a cause de numéro un. Elle ne Lest pas, A cette époque pour Buffon, a l"intérieur des esp8ces animales: 1'ane n'est pas une variation du cheval. Puisque l'organisation animale est le résultat de son noule intérieur, celui-ci étant fixe, les variétés senblent étre un caractére unique 4 l'homme. "Cela [sa distribution partout la terre] seul suffiroit pour nous dénontrer qu'il y a plus de force, plus d'étendue, plus de flexibilité dans 1a nature de 1'homme que dans celle de tous les autres Gtres; car les végétaux, & presque tous les animaux sont confinés chacun a leur terrain, a leur cli- mat; & cette étendue dans notre nature vient moins des propriétés du corps que de celles de 1'ame; c'est par elle que 1'honme a cher~ ché les secours qui étoient nécessaires A la délicatesse de son corps; c'est par elle qu'il a trouvé les moyens de braver 1"in~ clémences de I'air, @ de vaincre 1a dureté de la terre. TL stest, pour ainsi dire, soumis les élémens; par un seul rayon de son in~ telligence, il a produit celui du feu, qui n'existoit pas sur 1a surface de la terre; il a su sc vétir, s'abriter, se loger; il a compensé par l'esprit toutes les facultés qui manquent & la ma~ tidre;...". "De la Dégénération des Animaux" (1766), 0.P. 394 A 31-B 5. (Notez que le début de Marticle avait souligné 1untté de Lespece humaine, ainsi que sa flexibilité, par rapport aux animaux, mais aussi l'extériorité et la superficialité des “vari- 339 ations" lorsque comparées aux différences entre les esp8ces ani- males.) (101) Voir ci-dessous, p, 298 et suiv. (102) Ge qu'il faut bien retenir partout 1a lecture de cet article. Crest aussi A cause de son insistence sur cette nature spirituelle de l'homme, comme partie essentielle de son histoirc, que, selon Duchet, "...i1 [Buffon] n'est plus "L'historien de la nature”, il pense en anthropologue, il traite de la nature spécifique de I'honme, de son "organisation", de l'originalité des sociétés hunaines." Duchet, Anthropologie et histoire ausitcle des lunidres (a? 174), 235. (103) Buffon, 0.P. 26 B 44-53. (104) Buffon, "Variétés dans L'espéce humaine, - TIT, 446-447. (105) Dans 1'Homo Duplex" du "Discours sur la nature des animaux,” HN, IV. Reproduit dans 0.P. 337-350. (106) 0.P. 345 A 7-34. Clest nous qui soulignons les passages qui mon- trent la prétendue raison des sociétés. Notez que Buffon dit ict que les idées du bien et du mal sont "gravé[es} au fond de son coeur", qui impliquent des vérités éternelles et imnuables, parce que congue & 1a faveur de la luniére naturelle qui lui a été dé- partie par "la bonté du Créateur". Nous doutons que ceci soit sa Vériteble pensée; tout ce que nous avons dit & propos de l'article "De 1a Nature de'1'onne" le démentit. I1 ne faut pas oublier que cet atricle-ci a 6té précédé par les désaveux nécessités par les censeurs de 1a Sorbonne, au début de ce quatrizue volune. Un tiers des passages relevés comme n'étant pas "conformes & la Religion", concernait justenent les réflexions de Buffon sur la vérité (phy- sique - mathématique); on notera en particulier le VITTe qui Etait dénoncé par la Faculté de Théologie de Pari parlerai point des autres ordres de vérités, celles de 1a morale, par exemple, qui sont en partie réelles & en partie arbitraires elles n'ont pour objet que des convenances & des probabili- tés". Buffon ne pouvait dire rien d'autre dans 1'Homo duplex, ayant répondu A la Sorbonne: "...quand j'ai dit que les vérités de la morale n'ont pour objet & pour fin que des convenances & des pro- babilités, je n'ai jamais voulu parler des vérités réelles, telles que sont non-seulenent les préceptes de la Loi divine, nafs encore ceux qui appartiennent & 1a Loi naturelle; & que je néentends par vérités arbitraires en fait de morale, que les loix qui dépendent de 1a volonté des honmes & qui sont différentes dans différens pays, & par rapport & la constitution des différens Etats." Objec tion: 0.P. 107 A 37-41; Réponse de Buffon: 0.P. 108 B 10-21. (107) Duchet, Anthropologie et histoire (n° 174), 238-249. Citation a trouve & 1a page 2 (108) Sa position est modifiée un peu lorsque l'on arrive a la fin du (209) (10) ain qi) 413) aia) (115) 360 chapitres il nous senble que c'est & cause d'avoir mal compris la juste valeur d'une pensée trés complexe, celle de Buffon. A la page 238 ce n'est que le "sens intérieur" que est responsable, selon Duchet, des sociétés; ici, sans explication d'une contra- diction apparente, elle déclare (p. 244) que Buffon "n'entend seulement que l'homme civil est le produit de 1a vie sociale, mais que la société est consubstantielle & I Individu, qu'elle est le Lieu of {1 se confond avec 1'esptce entire." Buffon, O.P. 346 A 35-45. I1 faut noter que ce texte suit inmédi atement le paragraphe cité ci-dessus oti il semblait que 1"honue se réunissait ensemble par 1a volonté et par la conscience raison- nable. Buffon, “Le Castor," H.N. VIII (1760), 283. Ibid., 284, Buffon semble avoir bien connu les récits des voyageurs contempo~ rains et antéricurs; le nombre et la variété des références dans l'Histoire naturelle. On peut en ajouter la correspondance qu'il tenait avec les naturalistes et voyageurs tout au long de sa ca~ rigre. Nous n'avons pas, malheureusement, un inventaire des livres de la biblioth?que personnelle de Buffon. Mais i1 y en a d'autres indications de sa lecture. Duchet, par exemple, a retrouvé le Registre de Prét (N° 5) de la Biblioth®que du Roi, et l'entrée qui nous montre que Buffon avait emprunté les trois premiers volumes du Recueil des Voyages du Nord (de 1'édition de 1731, 10 volumes in-120), en 1746, (Duchet, Anthropologie et histoire (n° 174), 76) Et il cite des voyageurs en grande variété. A propos de Lettres édifiantes, par exemple, un analyse détaillée des articles cités par Buffon, qui se trouve dans notre Bibliographie de Buffon (voir (n® 812)), nous voyons clairement que Duchet ne 1'a pas fait, et conclut & tort qu'il ne faut pas croire qu'il a lu “toute la col- lection des Lettres: le petit nombre des relations citées, tou- jours les mémes, prouve le contraire." (p. 79) T1 cite d'un grand nombre des tomes, et le plus souvent, il ne cite un auteur qu'une fois. Les emprunts sont toujours choisis par rapport 2 son sujet. Il ne démontre que mieux que "Buffon est sans doute 1"homme de son si&cle qui a le mieux connu et exploré la littérature des voyages, parce que cette connaissance était 1a base méne de son oeuvre." @uchet, p. 232.) Selon L'aveu de Buffon lui-néme, il ne faisait qu'ajouter des preuves & une opinion "fort vraisenblable" des anciens. Voir "Va riétés," H.N, TIT, 481. Montaigne, Essai (n° 1153), I, xxiii; 100. Voir aussi Livre III, chap. xtii. Charron a vecu un certain temps A Bordeaux, of i] a connu Montaig~ ne, En 1601 les trois volumes de son ouvrage De © apparais~ 361, sent, qui semblent avoir été “aussi lus au XVITe que les Essais [de Montaigne] dont ils reprennent, avec moins de piquant, beau- Coup de thémes et de formules." Cette citation, ainsi que celles du paragraphe avant cette note, est de, et sont rapportées par, Gandillac dans son commentaire de Charron, dans "La philosophic de la ‘Renaissance’ ," Histoire de la philosophie (Paris: Galli- nard, "Encyclopédie de la PI > 1973), TT, 307. (116) Gandillac, ibid., 305. (217) La lecture du chapitre concernant 1a répartition de globe selon les conditions géographiques nous a tellement frappés, que nous avons cru @tre justifiés 8 rapporter le texte entier en appendice, avec des notes pour comparer 12 pensée de Buffon et du XVITIe si&cle A celle de Charron. (118) Pascal, Pensées #230. In: Oeuvres (n° 1179), 1149. (119) Ibid., #228 "Pyrrhonisme"; 1148. (220) » #230; 1150. qa2iy & 408; 1195-1196. Cf. Voltaire, Remarques sur les M. Pascal (n° 1251), 87. (122) Locke, Essay, I, 4i, $13. (123) Ibid., 1, G4, 689, 10, 11, 12. (124) Ibid., 527. (125) Voir ibid., IV, xviii & xix. (126) "Nouvelle division de la terre par les différentes espéces ou Races d'hommes...," Journal des scavans du 24 avril 1684, 135; eité par Roger, Les Sciences de la vie (n° 1406), 216. (127) Buffon reprendra le sujet des "jumars", qu'il fait dérivé de Col- lumelle et Gesner, pour montrer non seulement qu'ils sont en ré- alité des mulets nés du croisement des chevaux et des nes, mais aussi que "1a nature du taureau est trop éloignée de celle de la jument, pour qu'ils puissent prodvire ensemble." "De la Dégénéra~ tion des Animaux," 0.P. 405 B 16-19. (128) Bourguet, Lettres philosophiques (n® 335), 161-162. (429) rbid., 163. (130) Maupertuis, Vénus physique (n° 1146), 116. (431) Ibid., 117. (132) Ibid. , 106-107. (133) (34) (135) (136) 437) (438) (439) 40) aay (42) (143) (a4ay (4s) (246) (47) (148) (149) (150) asp 362 Ibid., 108-109. Ibi » 110. Ibid., 112. Ibid., 110-111, Sericto sensu, on pourrait nous objecter qu'il n'y a pas de rtificielle" dans le sens de Darwin ici. Mais il est certainement question de sélection, et Maupertuis Ltutilise pour démontrer la possibilité de la création d'espaces nouvelles. Ibid., 113-114. Ibid., 119-120. Ibid., 111. Ibid., 112. Ibid., 110. Ibid., 129-130. Ibid., 102-103. Exactenent la mése pense se trouve chez Charron (voir 1"appen- dice I, p. 231 de Charron; notre p. 377, 11. 1-6) et chez Buffon, & Lexpetion toutefois de 1'Amérique (voir la note [7] de cette appendice). Maupertuis, Vénus physique (n° 335), 123. Voir le texte apporté par Roger, et sa trés sage remarque, dans Les Sciences de 1a vie (n° 1406), 470-471, et n. 66. Buffon, O.P. 313 A 18-22. Buffon, “Variétés," H.N. IT1, 523-524, 313 B 25-52. O.P. 313 B 18-24. wlons pas entrer ici dans le détail de 1a notion de et L'important réle qu'elle a joué dans 1'oeuvre de A, notion qui prendra considérablement plus d' importance dans les volumes antérieurs, ct en particulier dans les Epoques de_la nature. Notez seulement que Buffon a déja attribué L'assi~ milation de la substance nutritive a la “chaleur intéricure" du corps ani 245 B.25 et suiv.), et, plus important, la chaleur extérieure", designée comme un "agent", (as2) (453) (154) (ss) (1s6) as7) ass) ass) (160) (161) (162) (463) (164) (165) (66) 363 qui met les organes du foetus, formés par 1a combinaison de mo~ lécules organiques, en "action" (H.N. II, 353 et suiv.). Voir 1'Appendice I, note 8. Buffon, 0.P. 357 B 52-358 A 1, Voir aussi 0.P. 19 B 31-38. Voir 0.P. 401 B 35-57. Buffon, "Variétés," H.N. III, 377. ‘Ibid. 454. Ibid., 481-482. Il nous semble que la discussion de cette notion de race est tout & fait insuffisante chez Duchet. Outre L'erreur (incompréhen- sible) d'avoir attribué & Buffon la division des peuples de la terre en quatres races principales - européenne, africaine, amé- ricaine, et chinoise (et celle-ci serait "tartare" plutdt que “chinoise") (Anthropologie et histoire (n° 174), 271) - elle n'a pas dégager 1a pleine signification de la théorie raciale qu'éla- bore Buffon, ce qui est important pour comprendre aussi bien ses discussions ultérieure sur cette question, face aux théses de Voltaire ou Klingstedt ("Additions aux Variétés," H.N.S. IV (1777), 450-478), que toute 1'Histoire naturelle des animaux & suivre, au moins jusqu'en 1766. Buffon, Les Epoques de la Nature (n® 81), 5e Epoque, p. 190 du texte de 1778 (161 de 1'édition de Roger). Buffon, "Variétés," H.N. III, 371-372. Buffon, 0.P. 352 B 25-33: "Il y a dans la Nature un prototype gé- néral dans chaque espéce sur lequel chaque individu est modelé, mais qui semble, en se réalisant, s'altérer ou se perfectionner par les circonstances; en sorte que, relativenent & de certaines qualités, il y a une variation bizarre en apparence dans la suc- cession des individus, & en née temps une constance qui paroft admirable dans L'esp&ce enti@re:... [etc.]". Buffon, "Variétés," H.N. IIT, 528. Buffon, "Les Pacos," H.N. XIII (1765), 28. Voir notre p. 6 ci-dessus. Buffon, 0.P. 86 A 37 et suiv. Buffon donne, A tort, 1a date de "1683"; 3 0.P. 72 B, il avait donné la date, incorrecte encore, de "1692", O.P. 258 A 42-45. 364 (167) 0.P. 296 B 58-59. (168) Cf. Phillip R. Sloan, "The Buffon-Linnaeus Controversy" (n° 234), 368. Sloan a tort de nous faire croire que "the correspondence of the succession of ideas with the determinate order of contin- gent phenomena” se trouve dans le "Discours de la confomité de la foi avec la raison" qui ouvre 1'Essai de théodicée. Toute rela~ tion entre Buffon et Leibniz en 1749 est, en effet, "énigmatique"s clest la relation d'un détracteur qui n'a pas lu celui qu'il attaque (exception faite & la Protogaea). Pauvre Leibniz - tout Je monde lui est contre, mais pas grand nombre 1'a lu! (169) Knight, The Geonetric Spirit (n° 1357), 28. (170) Condillac, Essai sur l'origine des connoissances hunaines (n® 894), I, 44, i11,°932) 18 B 1-8. (71) Ibid., 1, 4, if, $13; 10 A 20-24. (272) Knight, The Geometric Spirit (n° 1357), 37. (173) Condillac, Essai (n° 894), I, ii, v, $53; 23 B 13-15. (174) "Mais, puisque la perception ne vient qu'a la suite des impressions qui se font sur les sens, il est certain que ce premier degré de connoissance doit avoir plus ou moins d'étendue, selon qu'on est organisé pour recevoir plus ou moins de sensations différentes. Prenez des créatures qui soient privées... de lavue et de l"oule, et ainsi successivement; vous aurez bientét des créatures qui, &tant privées de tous sens, ne recevrons aucune connoissance." Ibid., 1, if, i, $3; 11 A 14-35. Rappelons ce que Buffon avait dit 2'1occasion de ce matérialisme: "...qu'on détruise successi- venent ces trois moyens de sensation dans l'homme qui en est pour vi, L'ame n'en existera pas moins, ses fonctions intéricures sub- sisteront, & le ponsée se monifestera tofjours au dedans de lui- néme:...". Buffon, 0.P. 295 A 13-18. (Q75) ...1e controverse Buffon-Condillac continuera, bien entendu, aprés 1749. Bien que 1'Essai de 1746 ne fGt que la premiére épreuve du systéme Epistémologique de Condillac, son meilleur exposé étant Je Traité des sensations de 1754, toute sa pensée pouvait s'y trouver d@ja. On a bien vu dans la célébre statue du Traité une réplique & 1'homme primitif de Buffon. Grimm, qui ne seuble avoir eu aucune sympathie pour le pauvre Condillac, disait que ce dernier “avoit noyé la statue de M. de Buffon dans un tonneau d'eau froi- de." (Grimm, Correspondance (n° 947), 1°F novembre 1755; III, 112). Grimm avait déja reve le Traité dans la lettre du 1eT décembre 17543 en exposant 1'ouvrage de Condillac, i1 prend Ja partie de Buffon. "Vous ne trouverez pas dans ce Traité [de Condillac] ces traits de génie, cette imagination sublime et brillante, admirable jusques dans ses carts, ces lueurs qui vous font entrevoir de Join une lumi®re que vous ne découvririez jamais, cette hardicase (176) (477) a7) (179) (480) asi) 365 enfin qui caractérise 1a métaphysique de nos Buffon et de nos Di-~ derot; mais vous y trouverez beaucoup de sagesse et d'exactitude, une clarté et une précision rares, beaucoup de sagacité et des observations trés ingénieuses. M, 1'abbé de Condillac n'exige de son lecteur que de L'attention. M. Diderot et M. de Buffon suppo- sent aux leurs de la force et du courage pour les suivre, lors nme qu'audactousement ils se perdent dans les abfmes inmenses lespace." Si les allusions faites 4 Buffon dans ce Traité pou vaient échapper aux lecteurs de 1'époque, l'année suivante est paru le Traité des animaux, of le sous-titre mettait les points bur les apras avolr fait des observations critiques. sur Je sentinent de Descartes, et sur celui de M. de Buffon, on entre- prend d'expliquer leurs principales facultés. Mais nous croyons que l'on n'a pas assez chercher l'origine de cette polémique. Tl faut préciser, ce qui était l'objet de la critique méthodologique, que la premi&re réplique était celle de Buffon qui, dans 1'étude des sens, posait des principes inconciliables, mais aussi en op- position, avec ceux de 1"épisténologie condillacienne tels qu'an- noncés en 1746. Condillac, Traité des sensations (n° 901), "Dessein de cet ouvra~ ge"; 222 A 16-24. Buffon, 0.P. 309 B 26-29. O.P. 310 A 5-9. Condillac, cité dans Buffon, 0.P. 310 note 17 - soit, Traité des animaux (n° 900), T, vi; 350 5 48 351 A 2. Condillac, Dict (n° 892), 511-512: "SISTEME, 8. m. qui s'appliquent successi- venent les unes aux autres, et qui naissent toutes d'un néme prin~ cipes en sorte qu'un bon sistéme n'est qu'un principe bien déve- loppé. Je sais que beaucoup de personnes prennent ce mot en mau~ vaise part, croyant que tout sisténe est une hypothese gratuite, ou quelque chose de pire, comme les reves des métaphisiciens. Ce~ pendant cet univers n'est qu'un sist@me, c'est & dire une multi- tude de phénozenes, qui, 1iés les uns aux autres, conme causes ou effets, résultent tous d'une premiere loi. (paragraphe) Chaque partie’ un peu conposée est un sist@me, homme est un sist@uc, Si done on renonce aux sist@mes, coment sera-t-il possible d'appro~ fondir quelque chose? Je conviens qu’en général les philosophes ont tort: ils font des sist@mes, or il n'en faut pas faire, il faut découvrir ceux que l'auteur de 1a nature a faits. Si l'on me dit que j'ai écrit contre les sist@mes, je prie de lire mon ou- vrage jusqu'au bout, quoiqu'il soit humiliant pour un écrivain de reconnoftre qu'on ne le lit pas jusqu'au bout. Si du moins on 1i- soit bien le conmencenent on verroit que je ne rejette pas tous les sist@nes.” Voir Condillac, De L'Art de Ra nner, qui fait partie du Co (182) (183) aga) ass) (186) (187) ass) 89) (190) qs) aga) 493) (aga) 95) 366 d'études (n° 891), 619 B 18-45. Voir ci-dessus, p. 40, a la note 7. Voir Knight, The Geometric Spirit (n° 1357). En particulier, voyez Je chapitre 3 pour une analyse, dans ce sens, de 1'Essai de Con- dillac. «-le seul moyen d'acquérir des connoissances, c'est de remonter A lorigine de nos idées, d'en suivre la génération et de les con- Parer sous tous les rapports possibles; ce que j'appelle analy: Condillac, Essai (n° 894), I, ii, viii, 567; 27 A 4-8. Voir Gueroult, Spinoza (n° 1337), I, Appendice I: 419-422. Broca, Article "Anthropologie," Dictionnaire de Richet, cité par que de_1a phi losophie, Se éd. (Paris: P.U.F., 1947), Article “Anthropologie”. Nous employons librement les exemples donnés par Duchet, Anthro~ pologie et histofre (n° 174), 12-13. Action de parler hunainement des choses divines. Voir définition exacte donnée par 1'Encyclopédie de Diderot, rapportée in Duchet, Anthropologie et histoire (no 174), 12. Texte témoin apporté également par Duchet. T1 semble étre le sens le plus habituel en science jusqu'A cette époque. Voir les exen- ples de Teichmeyer et de Drake, in ibid., 12-13. Ibid., 12. Nos rensiegnements sur Kant viennont d'André Lalande, Voc: (voir n. 186 ci-dessus pour référence exacte), Article “Anthropo- logic". Peut-@tre parce que sa connatation, en suggérant 1"anatomie, Laurait exclué du projet de 1'Histoire naturelle: "...ce scroit un objet &tranger A 1'Histoire Naturelle que d'entrer dans un examen anatomique trop circonstancié, ou du moins ce n'est pas son objet principal...". Buffon, 0.P. 16 B 14-17. O.P, 14 B 6-8. Nous renvoyons le lecteur A la discussion générale de 1a néthode, Je but et l'objet de 1'Histoire & la fin du premier chapitre. Comme 41 expliquait dans son Discours de 1a méthode Ihis- toire d'un animal doit 8tre non pas l'histoire de 1'individu, mais celle de L'espéce entitre de ces animaux;...". O.P. 16 A 51 53. Dans le cas de 1'honme, Buffon ne trahit pas sa méthode. Cha~ que partie de I'llistoire de I*home s'attaque & un problime de (196) a7) (a9s) a99) (200) (201) (202) (203) 367 Lespéce, soit en étant un individu de l’espBce (cycle de la vie; cycle des sens), soft en étant un petit ensemble dans 1'espéce (races; sociétés). Selon sa propre exigence que "I'histoire doit suivre la descrip- tion, & doit uniquement rouler sur les rapports que les choses naturelles ont entre elles & avec nous (.P. 16 A 48-51), 1a perspective de cette histoire particuliére ne différe pas du plan général de son oeuvre. Méme si Buffon veut établir l'existence de 1'Ane chez L'honme, d'une autre nature, ce n'est pas pour sauter un autre niveau de discussion, c'est-a-dire 4 la métaphysique. Les effets de cette nature rationnelle de 1'honme fait partie intégrale de son histoire naturelle. Toute la littérature des voyages, que Buffon a bien connu et sou- vent citée conme appui de ses remarques et de ses arguments, a 8té Gtudige trds soignousement par Duchet, Anthropologie et His- toire (n° 174), Premi&re partie: "Du mythe aux images.” Nais ce que ces voyageurs rapportent sont toujours des observations faites au cours de leurs expéditions. Est-ce Buffon, naturaliste, le pre- mier qui int@gre les détails épars dans un systéme anthropologique ordonné? Bien que la discussion plus compl&te de cette tradition, en ce qu'elle apporte & la question de la variété (des races ou des moeurs) ft donnée ci-dessus, nous voulons noter ici que si Mon~ taigne ou Charron ne discutaient pasen anthropologues, nais en philosophes, le but de leur ethnologie étant de fournir une are pour défendre leur pyrrhonisae, ils arrivaient, comme le prouve L'Appendice I que nous avons ajouter 3 cette cause, A définir 1"honme par rapport & son milieu naturel. En dépit d'un syst®ne anthropologique, ce sont eux qui veulent situer 1’homme dans le nilieu naturel, ce contre lequel Pascal trouve nécessaire de com battre, conme étant un trop puissant adversaire. Pour les dates de composition et de publication (fin 1748), voir A'Introduction de Jean Brethe de la Gressaye A son &dition De L'Esprit des Loix (n° 1157). Nous avons vu que le troisi®me volume de 1'Histoire naturelle fut impriné aux alentours de juin 1749, (Voir p. 30 ci-dessus.) Hérault de Séchelles. Voyage i Montbard (n° 201), 620. Lettre d'Helvétius & Montesquieu (1747). In: Montesquieu, Corresp. (n® 1155), IT, NO 361, 16-21. Voir aussi 1a lettre d’Welvétius & Saurin (1747-1748), in ibid., Appendice de 1a Correspondance, IT, 564-566. Gustave Lanson, "Le Déterminisne historique et l'idéalisme sociale (n° 1364), 199, (204) (205) (206) 1. (207) (208) (209) (210) (yp (212) (213) (214) (215) (216) (219) 9 (220) (221) (222) 368 Voir notamment 1a cél&bre contraste que Buffon peindra entre la nature brute et la terre cultivée dans Premigre vue! de 1764. (Q.P. 33 B-34 B.) La définition est de Montesquieu, Esprit des lois (n° 1156), T, 4, 15 232. .a dénomination de "principe" est 1a ndtre. Mais L'argument vient de Montesquieu, ibid., I, 1, 1; 232. Voir la 94e Lettre persane de Montesquieu, oi 11 se moque des recherches sur lorigine des sociétés; si d'aprds 1a quatridme loi naturelle, qu'il établit & Esprit de. lois (n° 1156), I, 4, 25 236, Lhonme a "le désir de vivre en société”, il ne peut y avoir un état antérieur & la société, cela va de soi. Montesquieu, Esprit des lois (n° 1156), I, 25 235-236. Buffon, 0.P. 373-374, pour culmincr 8 375 A 1-5: "Ainsi l'homme, en tout état, dans toutes les situations & sous tous les climata, tend également & la société; c'est un effet constant d'une cause nécessaire, puisqu'elle tient a L'essence méne de l'espace, c'est- A-dire, & sa propagation." Buffon, qui parle en naturaliste, pout échanger "conservation" pour "propagation Montesquieu, Esprit des lois (n® 1156), XIX, 43 558. Ibid., XVIII, 11; 537. Buffon, "Variétés," _ TIL, 492-493. Ce qui suit se trouve A Montesquieu, Esprit des lois (n° 1156), I, ii 235. Notez qu'il emploie 1"exemple du sauvage trouvé dans les foréts d'Hanovre, exemple apporté également par Buffon, bien que Montesquieu L'emploie pour un autre motif. Ibid., I, iii; 236. Buffon, 0.P. 2685, 14-15. + 26 A 49-8 4, + 13 BS4-14 A 2. Bacon, Nouvum organum (n° 845), "Praefatio"; 131. Ibid., I, xevs 201. Bacon, pour terminer I'aphorisme, dit: "Neque al philoso- 369 phiae verun opificium est; quod nec mentis viribus tantum aut praecipue nititur, necque ex historia naturali et mechanicis experimentis praebitan materiam, in memorian integram, sed in intellectu mutatam et subactam, reponit. Ttaque ex hatum facul~ tate (experinentalis seilicet rationalis) arctiore et sanctiore foedere (quod adhuc factum non est) bene sperandun est." Ibid., T, xev; 201. (223) Buffon, O.P. 8 A 13-14. (224) Bacon, Novum organum (n° 845), I, exxiv; 216: "Itaque ipsissimae res sunt (in hoc genere) veritas et utilitas:...". (225) Buffon, 0.P. 15 B 49-53. (226) Bacon, Novum organum (n° 845), T, cits 204. (227) Buffon, 0.P. 7 A 35-B 3. (228) 0.P. 23 A 5-18. (229) 0.P. 14 B 17-22. (230) 25 A 31-32. (231) O.P. 25 A 33-34. (232) Bacon, Novum organum (n® 845), IT, ii, 228. (233) Ibid., 1, civ; 205. (234) Ibid., IT, 45 227. (235) Voir par exemple ibid., IT, iv; 230: "Itaque de axiomate vero et perfecto sciendi, pronuntiatum et praeceptum tale est; ut inveni~ antur natura alia, quae sit sum natura data convertibilis, et tamen sit limitatio naturae notioris, instar generis ve joir Ggalenent 1'article de M.Hesse, Francis Bacon (n° 1349). (236) Bacon, Novum organum (n° 845), IL, iv; 229-230. (237) Buffon, 0.P. 14 B 6-8 & 19 A 13-16. (238) Bacon, Novum organum (n° 845), IZ, ii; 228. (239) Buffon, O.P. 23 A 13-15. (240) Faut-il remarquer que ces quatre types de scepticisne de la pos- sibilité de la science sont ceux qui sont apparus lors de chacune des quatres critiques, chacun se basant sur un faux principe, que Buffon invertira et pour sauver 1a science, et pour fonder la Staphysique de la science sauvée. Le solipsisnede Berk 370 eley est Svité par le renverscment du principe méthodologique pour &tablir 1a coordination des perceptions venues de l'extéri- eur avec 1a perception de 1'intérieur par un symbolisne de la Faculté de 1a réflexion; 1a vanité des sciencesfaites par 1*home déchue de Pascal est battue par le principe de la critique gnos' ologique qui établi une science faite 3 1’intéricur de lesprit de 1'8tre qui se place au plus haut point de 1a nature .créée; par Ja critique logique, le but des science enpirique étant non pas Ja recherche de essence abstraite des étres, mais leurs proprié- tés réelles, le scepticisme de Locke est confondu; enfin 1’impo: sibilité de la science en ce qu'elle stoccupe des causes et des effets n'a plus de sens lorsque 1'on a min les bases philosophi- ques de L'argument de Hume, pour établir le principe de la "cer- titude probable" des “expériences réitérées". (241) Bacon, Novum organun (n° 845), I, cxviis 212. (242) Nous demandons pour ce qui concerne Buffon, puisqu’il sera inutile dtentrer ici dans une étude de la vraie méthode employée par New~ ton. (243) Hérault de Séchelles, Voyage & Montbard (n® 201), 619. (244) Voir les articles d'I.Bernard Cohen, "The First English Version of Newton's Hypotheses non fingo" (n° 1302), et “ilypotheses in Newton's Philosophy” (n° 1304). (245) Buffon, 0.P, 243 A 61-45. (246) Locke, Essai (n® 1083), IV, xii, 512; 528. (247) Buffon, 0.7. 24 A 47-49. (248) 243 A 2-3. (249) 0.P. 243 B 11-12. (250) 0.P. 243 B 16-17, 18-19. (2s) + 243 B 25-34. (252) O.P. 67 A 10-16, @ 67-74. (254) 0.P. 73 B 27-45. (255) Voir 0.P. 83 B15. (256) Descartes, Principes de 1a philosophic (n° 911), ITI, §43; VIIT-1, 995 1X-2, 123. am. (257) A vrai dire le texte latin donne 1a réponse A notre probléme: le titre de l'article emploie 1'adverbe "vix", "Vix fieri posse quin causae, ex quibus omnia phaenorena clar® deducuntur, sint verac." Mais la traduction des Principes se faisait sous le contréle de Descartes lui méme, et 11 n'a pas pu laisser passer le titre fran- gais inapercu. (258) Descartes, Principes (n° 911), ILL, 5445 IX-2, 123. (259) Ibid., $45; 123-124, (260) Ibid., 945; 124. (261) Ibi +5 8463 125. (262) Ibid., $475 125. You des principes" a été ajouté au texte fran- gais, cf. 1'8dition latine, VITI-1, 101. (263) Ibid., Préface; IX-2, 2. (264) Voir Descartes, Méditations (n° 908), Deux: I; VIL, 1653 IX-1; 127: “causa sive ratio". me objection, Axione (265) Ibid., Axiome IV; VIL, 165; IX-1, 128. (266) Descartes, Princ es (n° 911), TIT, 5465 124. (267) Descartes, Discours de 1a (n° 906), 83. (268) Ibid., 76, 11. 22-31 [-77, 1. 3]. (269) Descartes, Regulae (n° 912), VI; 381, 11. 2-9. (270) Ibid., 382, 11. 17-19. (271) Descartes, Principes (n° 911), £47; VITI-1, 102; IX-2, 125. (272) Descartes, Regulae (n° 912), VI; 381, 1.22-382, 1. 2. (273) Tbid., 382, 1. 7-9. (274) Que ces séries ne se rapportent pas a quelque "genus entis", comme Jes scolastiques voulaient faire avec leurs catégories et substan- ces, voir ibid., 381, 11. 17-21: "vt autem id rect? fieri possit, notandum est res omnes, eo sensu quo ad nostrum propositum vtiles esse possunt, vbi non illarum naturas solitarias spectamus, sed illas inter se comparamus, vt vnae ex alijs cognascantur, dict posse vel absolutas vel resoectivas." (275) Ibid., 383, 11. 1-9. (276) Descartes, Principes (n° 911), TIT, 845; VIII-1, 100, 11. 7-18,

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