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GEJ7 C56
De la nature des anges. Amour et sagesse, cœur et raison
1. Nous étions encore profondément endormis quand le soleil se leva sur l'horizon.
Lazare et l'aubergiste s'éveillèrent, et ce dernier, se levant aussitôt, sortit éveiller les serviteurs
afin qu'ils nous préparent un bon et copieux repas. Il y eut bientôt dans toute la maison une
animation qui nous éveilla à notre tour, et, quittant nos sièges, nous sortîmes en plein air.
2. Or, il y avait devant la maison une fontaine qui donnait une bonne eau pure, et Je
dis à Lazare : « Frère, afin que Nicodème ne se scandalise pas, fais remplir des cruches d'eau,
afin que nous puissions nous laver les mains et qu'il ne soit pas dit que nous avons mangé
notre pain sans nous laver. »
3. Ce qui fut fait, et tous se lavèrent les mains, le visage et les pieds, puis on nous
présenta des linges propres pour nous sécher.
4. Quand nous eûmes terminé, notre Raphaël vint nous rejoindre et dit à Lazare que les
jeunes gens dormaient encore, faisant de beaux rêves, et qu'il ne fallait donc pas les éveiller
avant deux bonnes heures. Ainsi fut fait, car ces jeunes gens fatigués par un long et pénible
voyage en avaient grand besoin.
5. Cependant, Nicodème venait seulement de remarquer, à la lumière du jour,
l'éblouissante beauté de Raphaël, qu'il ne pouvait se lasser de contempler. Après s'être
émerveillé un moment en silence, il Me dit enfin : « Mais, Seigneur et Maître, qui est donc ce
jeune homme d'une beauté surnaturelle Quel est son nom ? Ah, je n'avais encore jamais vu
pareille beauté chez un homme ! A bien regarder, il y a certes, non loin de lui, une fort
aimable fillette : mais elle paraît bien trop de ce monde comparée à ce jeune homme d'une
beauté si céleste ! Ah, comme ses boucles d'or descendent joliment en vagues sur son cou
d'une délicatesse si éthérée, presque aussi blanc que neige ! Quelle grâce indescriptible dans
son visage ! Comme ses bras et ses pieds sont tendres et potelés, délicats et légers ! Tout en
lui est si bien fait et si recherché dans sa simplicité ! Moi qui suis l'un des plus anciens au
Temple et dans toute la ville, je n'avais jamais rien vu de tel, même en songe. En vérité, ce
jeune homme ne peut être de cette terre ! S'il avait des ailes, à l'instar des chérubins qui
veillent sur l'Arche dans le Saint des Saints, ce serait un parfait ange de Dieu ! »
6. Je lui dis : « Crois-tu donc que, pour être anges, les anges de Dieu doivent avoir des
ailes ? C'est là encore de ta part une grossière erreur ! Les trois hommes qui vinrent trouver
Abraham avaient-ils des ailes ? Les jeunes gens qui sauvèrent Lot en avaient-ils, ou l'ange qui
guida le jeune Tobie ? Nulle part dans l'Écriture il n'est fait mention de leurs ailes, que Je
sache. Et l'ange qui apparut à Abraham pour retenir son bras quand celui-ci devait sacrifier
son fils unique Isaac, l'Écriture ne lui donne pas d'ailes non plus.
7. Seuls les deux chérubins d'airain de Moïse ont dû être représentés symboliquement
pourvus d'ailes, afin de signifier aux Juifs, alors très sensuels encore, l'extrême célérité en
toute chose - pensée, décision, action et réalisation - des purs esprits venus du ciel de Dieu.
Or, l'homme de nature ne connaît pas sur terre de mouvement plus rapide que le vol des
oiseaux dans l'air, et c'est ainsi qu'afin de rendre plus sensible aux hommes la rapidité de
l'esprit, Moïse a dû, sur l'ordre de Dieu, munir d'ailes ses chérubins. Mais, dans la réalité,
aucun ange de Dieu n'a jamais eu d'ailes.
8. L'aile signifie donc seulement le haut degré de sagesse et de force de tout ce qui est
pur esprit, et certainement pas que, lorsque Dieu leur en donne l'ordre, les purs esprits doivent
descendre du ciel sur la terre et y remonter comme des oiseaux. De plus, dans le vrai ciel, il
n'y a ,jamais eu d'ange qui n'ait d'abord été un être humain sur cette terre ou une autre. Et les
purs esprits créés que vous imaginez tout à fait à tort comme étant les anges ne sont pas autre
chose que les puissances et les forces émanant de Dieu dans lesquelles se manifeste
l'omniprésence divine à l’œuvre dans l'infini tout entier, mais dont nul homme ne doit se faire
une représentation imagée, parce que vous comprenez sans peine. Je l'espère, qu'il est
impossible à un être limité d'avoir une représentation authentique de l'infini de Dieu.
9. Mais puisque l'âme de tout homme est en vérité appelée à devenir un ange du ciel de
Dieu, ce beau et très chaste jeune homme peut fort bien être sur cette terre, même sans ailes,
de la même façon que Je suis à présent incarné au milieu de vous, Moi, l'unique Seigneur du
ciel et de la terre, et vous enseigne en personne sans cesser de maintenir l'infini tout entier. Au
reste, n'est-il pas écrit : "En ce temps-là, vous verrez les anges de Dieu monter et descendre
pour servir le Seigneur" ? Ce jeune homme peut donc fort bien être un ange lui aussi. - Qu'en
penses-tu ? »
10. Nicodème dit : « Oui, oui, il est à l'évidence plus qu'assez beau pour cela ;
pourtant, Je ne le vois pas monter et descendre entre le ciel et la terre !
11. Je dis : « O aveuglement des hommes ! Toi, un homme d'une si grande expérience,
comment peux-tu supposer que les anges vont monter et descendre du ciel matériel à cette
terre tout aussi matérielle, et que les hommes les verront faire cela, et aussi Me servir ?! Ces
allées et venues des anges signifient seulement l'ascension de l'amour vers la vraie sagesse,
puis, avec la sagesse, le retour vers l'amour, qui est en vous le véritable esprit vivant de Dieu.
12. Lorsqu'un homme éveille dans son cœur le véritable amour de Dieu et du prochain,
il s'élève par là vers la sagesse, c'est-à-dire la vraie connaissance profonde de toute chose. Et
lorsqu'un homme a atteint une telle connaissance et qu'il reconnaît et comprend toujours
mieux l'amour, la sagesse et la puissance sans limites de Dieu, il est plein d'humilité et d'un
très grand amour de Dieu. Et c'est ainsi qu'il redescend vers son cœur, qui est donc toujours
plus éclairé et plus brûlant d'amour pour Dieu.
13. "Mais, te dis-tu en toi-même, cette terre représente-t-elle donc l'amour et le ciel la
sagesse, alors qu'il y a si peu d'amour sur terre et que du ciel nous viennent tant de bontés - et
si rarement des choses un peu moins bonnes ?"
14. Oui, il est vrai que dans le cœur humain, siège de l'amour, il n'y a bien souvent que
fort peu d'amour, et pourtant, le cœur est bien le siège de l'amour. Mais, à lui seul, l'amour du
cœur ne porterait pas plus de fruits que la terre n'en porterait sans la lumière du soleil. Et le
soleil, pour le cœur de l'homme, c'est sa raison naturelle. Celle-ci descend sur terre, c'est-à-
dire dans le cœur de l'homme, dans les pensées et les idées bonnes et ordonnées qu'elle
éclaire, et éveille le germe des bonnes actions. Si, telle la lumière du soleil en hiver, la lumière
de la raison est encore faible, le cœur devient certes plus intelligent : mais, comme il demeure
encore en lui beaucoup d'amour de soi, les bons germes n'y lèveront pas, ne grandiront pas et
ne porteront pas de vrais fruits dans l'action. Mais quand, par son zèle et par le bon usage qu'il
fait de ses talents et de ses facultés, un homme fait grandir en lui la lumière de la raison, cette
lumière réchauffe toujours plus puissamment son cœur, et les graines des bonnes actions qui
sommeillent en lui vont se mettre à germer, à grandir et à fructifier, pour porter bientôt dans
l'action de bons fruits bien mûrs qui lui vaudront une riche moisson de vie.
15. Dans ce cas, il faut donc entendre par "anges" les pensées et les idées de la raison
éclairée, qui est pour l'homme - bien sûr à une échelle très réduite son ciel de sagesse. Ces
pensées montent et descendent, servant l'esprit divin encore caché dans le cœur de l'homme, et
cet esprit a nom amour de Dieu et amour du prochain. Mais, de même que bien des hommes
n'ont pas reconnu et ne respectent pas cet esprit vivant de Dieu au cœur de l'homme - alors
que le salut temporel et éternel de l'homme en dépend tout entier -, Je n'ai pas été reconnu,
Moi, le Seigneur et l'origine de tout être et de toute existence, par le monde des hommes, bien
qu'ils voient les grandes pensées et idées qui, à travers Moi, montent et descendent du ciel de
Dieu à cette terre, illuminant le cœur, le réchauffant et le vivifiant pour qu'il porte des fruits
vivants dans l'action. Et c'est pourquoi il y a beaucoup d'appelés, mais peu d'élus qui
comprennent Mes paroles, les prennent à cœur et, par leurs actes, en font une riche moisson
de vie.
16. Vois-tu un peu plus clairement à présent qui sont exactement, dans ce premier cas,
les anges qui montent et descendent entre le ciel et la terre pour Me servir. Moi, le Dieu
éternel, venu temporairement sur cette terre pour vous, hommes appelés à devenir les enfants
de Dieu et qui êtes ainsi précisément Son cœur et Sa terre ? »