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Effets de la lumière sur la photosynthèse et sur l’appareil

photosynthétique. Adaptation à l’éclairement de croissance.


Photoinhibition.

A Variation de l’assimilation de CO2 et de O2 en fonction de la lumière. ............................................. 3

1-La relation photosynthèse lumière. .......................................................................................................................................... 3


2-Réflexion, transmission et absorption de la lumière par les feuilles. .................................................................................... 4
3-ΦmCO2 apparent et ΦmCO2 vrai. Intérêt écologique de la mesure de la réflexion................................................................ 5
4- Le ΦmCO2 varie avec les conditions du milieu. ....................................................................................................................... 6
5- Implication de la différence de rendement quantique entre les plantes en C3 et en C4..................................................... 7
6- Le rendement quantique maximum de la photosynthèse dans des conditions non-photorespiratoires n’est pas
ou très peu variable chez les plantes terrestres. ......................................................................................................................... 7
8- Variation du ΦmO2 selon la qualité de la lumière de croissance. .......................................................................................... 8
7- Variation, à la lumière, du rendement quantique des centres PSII ouverts (Fv’/Fm’) et de la concentration
relative des centres ouverts (qp) en fonction de la DFQP. Evaluation par mesure de l’émission de la fluorescence
chlorophyllienne............................................................................................................................................................................ 9

B-Adaptation à l'éclairement de croissance............................................................................................. 11

1-Caractéristiques du milieu « ombre ».................................................................................................................................... 11


2-Les récepteurs sensibles à la lumière. .................................................................................................................................... 12
2- Plantes d’ombre et de lumière............................................................................................................................................... 22
5- Les signaux qui gouvernent la réponse ombre/lumière....................................................................................................... 28
6- Évitement de l’ombrage : la perception de la proximité chez les plantes .......................................................................... 31
7- Modifications au niveau de la plante et du couvert. ............................................................................................................ 32
8-La vie sous ombrage : plantes en C4 vs plantes en C3. ........................................................................................................ 33
9- La feuille est un milieu très hétérogène. ............................................................................................................................... 34

C- Utilisation de la lumière intermittente : les taches de soleil. ............................................................. 38

1- La période d'induction. .......................................................................................................................................................... 38


2-L’assimilation de CO2 est augmentée durant et après une tache de soleil.......................................................................... 39
3-Relation entre le flux d'électrons et l'assimilation de CO2 durant une tache de lumière .................................................. 40
4- La cause de la fixation post-illuminatoire de dioxyde de carbone...................................................................................... 41
5-Importance des taches de soleil dans le bilan carboné des plantes de sous bois................................................................. 41
6-Plantes en C4 vs plantes en C3. .............................................................................................................................................. 41

D-Effet des fortes lumières sur l’appareil photosynthétique. La photoinhibition. .............................. 42

1-Excès de lumière. Un exercice de style................................................................................................................................... 42


2-Mise en évidence de la photoinhibition ; ses caractéristiques.............................................................................................. 43
La cible primaire des fortes lumières est le PSII...................................................................................................................... 44
4-Mécanisme de la photoinhibition : études in vitro................................................................................................................ 46
5-Dégradation de D2................................................................................................................................................................... 48
6- Synthèse de DI et de D2.......................................................................................................................................................... 48
7- Interaction entre les fortes lumières et le métabolisme photosynthétique. Interaction avec les facteurs de
l'environnement. ......................................................................................................................................................................... 49
8- Mécanismes d'évitement des fortes lumières........................................................................................................................ 52
9- La photoinhibition dans les conditions naturelles. .............................................................................................................. 56

E- Résumé. .................................................................................................................................................. 57
Bibliographie............................................................................................................................................... 59

Gabriel Cornic, Mars 2007 1


Abréviations les plus courantes

A, Assimilation nette de CO2 par des feuilles intactes


APG, Acide 3-phosphoglycérique
CO2 normale, fraction molaire de CO2 comprise entre 350 et 380 ppm
CRY, cryptochrome
DFQP, densité de flux quantique photosynthétique
Phy, phytochrome
PSII et PSI, respectivement photosystème II et Photosystème I
RuBP, Ribulose-1,6-bisphosphate
Rubisco, Ribulose bisphosphate carboxylase/oxygénase
Rc et Rs, respectivement rouge clair et rouge sombre
PRc, phytochrome qui absorbe le rouge clair
PRs, phytochrome qui absorbe le rouge sombre
TP, Trioses phosphates
Λ, point de compensation le l’assimilation de CO2 pour la lumière
ΦmCO2, rendement quantique maximum de l’assimilation du CO2
ΦmO2, rendement quantique maximum du dégagement de O2

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A Variation de l’assimilation de CO2 et de O2 en fonction de la lumière.
1-La relation photosynthèse lumière. La relation entre A et la densité de flux quantique dans le visible
(DFQP) incidente à une feuille (relation A/L) a déjà été décrite. La Fig.Lu1, tracée à partir de mesures réalisées
sur une plante en C3, le Pois, montre que l’oxygène atmosphérique exerce son action inhibitrice à tous les
niveaux d’éclairement. Le point de compensation pour la lumière, Λ, est le plus élevé dans un air contenant 21%
de O2. Ceci est une conséquence de la photorespiration dans ces conditions. La pente à l’origine des relations
Fig.Lu1, permet de calculer le rendement quantique maximum de la fixation du CO2 : ΦmCO2 (encadré Fig.Lu1).
Dans le cas présent ΦmCO2 = 0,0612 molécules CO2 par photon dans un air normal ; il est plus élevé et = 0,09
molécules CO2 photon-1 dans un air contenant 1% de O2 : la photorespiration consomme une partie de l’énergie
absorbée par la feuille (voir aussi plus bas).

30
Figure Lu1. Relations entre A et l’éclairement
mesurées sur une feuille de Pois (Pisum sativum L.)
A, (μmoles CO2 m s )
-1

dans un air contenant 350 ± 4 ppm de CO2, 21% (z)


-2

20 ou 1% (|) de O2 à la température foliaire de 23 ±


0,2 °C. Le VPD (déficit de saturation en vapeur
d’eau de l’air était maintenu à 0,9 ± 0.3 kPa. La
12
flèche indique l’éclairement reçu par la feuille dans
8
10 les conditions de culture de la plante. Le rendement
A

4 quantique maximum de A est calculé en considérant


0 la pente à l’origine de ces deux relations (voir
-4 l’encadré dans la Figure).
0 0 100 200
DFQP

0 500 1000 1500


-2 -1
DFQP, (μmoles m s )
qqqq

Chez les plantes en C4, A répond de façon similaire à la DFQP à ce qui vient d’être décrit pour les
plantes en C3. Cependant, dans ce cas, l’oxygène atmosphérique n’inhibe pas l’assimilation de CO2, et ce quel
que soit l’éclairement. De plus, on note, en moyenne, que la DFQP nécessaire pour saturer A est la plus grande
chez les plantes en C4

L'assimilation photosynthétique de O2 (Fig.Lu2) augmente aussi avec la lumière incidente à la feuille. Les
plantes en C3 dans une atmosphère « normale » présentent une assimilation photosynthétique de O2 presque
aussi importante que celles de CO2 (voir aussi le chapitre X, en révision). L'assimilation de O2 mesurée à
l'obscurité est causée surtout par le fonctionnement de la Cyt.a3, en liaison avec le cycle des acides
tricarboxyliques dans la mitochondrie. De même que pour A, on détermine un ΛO2 pour l'assimilation
photosynthétique d'oxygène.
Le dégagement brut de O2, somme de l'assimilation et du dégagement net de O2, représente, quand il est
multiplié par 4, le flux d'électrons dans la membrane photosynthétique (une molécule de O2 provient de
l’oxydation de 2 molécules d’eau qui fournissent 4 électrons au PSII oxydé) : il augmente évidemment avec
l’éclairement. Le dégagement net de O2 suit exactement les variations de A : très généralement, le rapport
O2/CO2 chez les organismes photosynthétique à la lumière est en effet légèrement supérieur à 1, indiquant que
les électrons produits par l’activité PSII sont majoritairement utilisés pour fixer le CO2. De la même façon que
pour A, on calcule un rendement quantique maximum du dégagement nette de O2, ΦmO2. Le rendement
quantique maximum du dégagement brut de O2 lui est évidemment supérieur.

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Dégagement brut de O2
Dégagement ou assimilation de O2

Figure LU2. Schéma indiquant la relation


40 entre l’assimilation photosynthétique de O2,
Dégagement net de O2
le dégagement net de O2 et le dégagement
brut de O2. L’assimilation nette du CO2 (A)
(μmoles m-2 s-1)

30 est aussi indiquée en pointillés sur ce


A schéma. Les mesures de ce type sont faites
en utilisant un spectromètre de masse
20 isotopique et de l’18O2 (voir Gerbaud et
André 1980). Le schéma est évidemment
Assimilation de O2 représentatif d’une plante en C3, comme le
10 Pois ou l’Epinard… Chez les plantes en C4
l’activité photorespiratoire, est en effet très
faible, voire nulle.
0

0 500 1000 1500

DFQP, (μmoles m-2 s-1)

2-Réflexion, transmission et absorption de la lumière par les feuilles. La lumière qui arrive sur les feuilles
peut être réfléchie, transmise ou absorbée. Les valeurs de la réflexion, de la transmission et de l’absorption de la
lumière sont toujours exprimées en pourcentage de la lumière incidente. La Fig.3A montre, en prenant l’exemple
d’une feuille d’Haberlea, que les feuilles réfléchissent et transmettent peu la lumière entre 400 et 700nm, où l’on
note, respectivement pour ces deux phénomènes, un maximum dans le vert de 14 et de 8% environ. Par contre la
transmission et la réflexion augmentent considérablement au dessus de 700 nm atteignant respectivement à 800
nm 50 et 35%. L’absorption de la lumière suit une variation symétrique à celle de la somme (réflexion +
transmission) : elle est maximum dans le visible et diminue fortement lorsque la longueur d’onde augmente au
dessus de 700 nm. L’absorption présente un minimum dans le vert, couleur dans laquelle l’absorption de la
chlorophylle est très faible. Pour de nombreuses plantes, la fraction de la lumière absorbée dans le visible (entre
les deux traits verticaux sur la Fig.3) est assez voisine et comprise entre 80 et 90% : ce qui justifie la valeur
moyenne de 85% utilisée dans la pratique lorsque des mesures ne sont pas disponibles. Dans le cas d’Haberlea,
l’absorption de la lumière dans le visible est d’environ 90%.
Absorption, réflexion et transmission (%)

120
A B
100

80

60
Réflexion Réflexion
Transmission Tansmission
40 Absorption
Absorption
20

0
300 400 500 600 700 800 300 400 500 600 700 800
Longueur d'onde (nm) Longueur d'onde (nm)

Fig.3 Spectre d’absorption, de transmission et de réflexion de la lumière par des feuilles d’Haberlea. Haberlea est une
angiosperme réviviscente qui se trouve sur des sols caillouteux, des montagnes en Bulgarie. Fig. A : la feuille est éclairée
par la face supérieure (adaxiale) ; Fig.B : la même feuille est éclairée par la face inférieure (Résultats non plubliés).

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Les données de la Fig.3A ont été obtenues en éclairant la face supérieure (adaxiale) de la feuille, ce qui est une
situation naturelle. La Fig.3B montre que l’absorption de la lumière sur la même feuille est modifiée lorsque
c’est la surface inférieure (face abaxiale) qui est éclairée. Chez Haberlea, contrairement à la face supérieure qui
est glabre, la face inférieure est très pubescente (couverte de trichomes). La pubescence augmente la réflexion
dans le visible, qui atteint un maximum d’environ 24% dans le vert, et ce, sans affecter le % transmis. Cela a
pour conséquence de diminuer la quantité de lumière absorbée, qui dans ce cas est très légèrement supérieure à
80%.
La comparaison de ces deux Figs. montre l’intérêt de connaître la fraction de la lumière incidente qui
est réellement absorbée par les feuilles lorsqu’une connaissance précise de la réponse de la photosynthèse à la
lumière est requise. En effet les propriétés optiques des feuilles, peuvent dépendre de l’espèce considérée et des
conditions de cultures aussi. Seule la lumière absorbée peut être efficace pour la photosynthèse.

3-ΦmCO2 apparent et ΦmCO2 vrai. Intérêt écologique de la mesure de la réflexion. Comme on l’a vu dans la
section 1, on utilise couramment les valeurs du flux quantique incident pour établir la relation A/L et calculer
ΦmCO2 : on parle alors de ΦmCO2 apparent. Lorsque l'on utilise les valeurs du flux quantique absorbé par la feuille
pour faire ce calcul on parle de ΦmCO2 vrai.
Dans le cas de la feuille de Pois placée dans une atmosphère contenant 21% de O2 + 350 ppm de CO2
(Fig. Lu1), le ΦmCO2 vraie = 0,0612/0,85 = 0,072 molécules CO2 photon-1 si l’on considère que 85% de la
lumière à sa surface supérieure est absorbée. L’efficacité quantique de cette feuille dans de ces conditions est
donc 1/ΦmCO2 = 13 photons (molécule de CO2 )-1: il faut l’énergie de 13 photons dans le visible pour fixer une
molécule de CO2.

La différence entre ΦmCO2 vrai et ΦmCO2 apparent, et l'intérêt de considérer la valeur de la réflexion lorsque l’on
étudie l’effet de la lumière sur la photosynthèse foliaire, est illustrée par la comparaison de plantes dont la
pubescence des feuilles est différente (FigLu4). Comme on l’a vu Fig.3A et B, la pubescence augmente la
réflexion des feuilles et diminue la fraction de lumière qu'elles absorbent.
A, mesurée sur des feuilles d’Encelia farinosa, qui diffèrent par leur pubescence, et sur des feuilles
d’Encelia californica, qui ne sont pas pubescentes, n’est pas saturée pour des DFQP de 1500 µmol m-2 s-1 (
Fig.Lu4A). De plus, elle est d’autant plus faible (et ce à tous les niveaux d’éclairement examinés) que la
pubescence est forte : ΦmCO2 apparent est donc le plus faible chez les feuilles d’E farinosa présentant la plus
grande pilosité.
Par contre, la variation de la photosynthèse brute (estimée ici comme : photosynthèse nette +
respiration) de ces feuilles en fonction de la lumière qu'elles absorbent s'alignent sur une seule relation
(Fig.Lu4B). Ces feuilles ont donc toutes le même rendement quantique maximum vrai. Les différences entre les
courbes de la Fig.Lu4A sont bien entièrement expliquées par les différences de réflexion dues à la pubescence
(Ehleringer et Mooney, 1978).

40 A B Figure LU4. Relation entre A et la DFQP mesurée sur des


A, (μmoles CO2 m-2 s-1)

feuilles de Encelia californica qui différent par leur


30 pubescence. Pourcentage de lumière incidente absorbée : 80%
(|), 65% (…), 54% (Δ) et 44% (‘) : la diminution de
20 l’absorption de la lumière est corrélée à l’augmentation de la
pubescence. La même relation mesurée sur Encelia farinosa
10 est aussi indiquée (Q). Les feuilles d’E. californica ne sont pas
pubescentes et absorbent 88% de la lumière incidente. Durant
0 la mesure la température foliaire est de 30°C, la fraction
molaire ambiante de CO2 est de 330 ppm et le VPD de 1kPa
environ (d’après Ehleringer et Mooney, 1978).
-10
0 500 1000 1500 0 500 1000 1500
-2 -1
DFQP, (µmol m s )

La pubescence, qui réduit la lumière disponible pour la photosynthèse, empêche aussi les augmentations trop
fortes de température et de transpiration des feuilles exposées à un plein éclairement. Elle est considérée comme
une adaptation des plantes aux conditions arides et chaudes. Elle fait aussi partie des moyens de protections

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contre les effets négatifs des fortes lumières (voir la photoinhibition plus bas). Cette protection a un coût,
puisqu’elle se traduit par une réduction de photosynthèse.
En règle générale, les feuilles dans les conditions naturelles reçoivent un éclairement moyen qui est
limitant. Il est indiqué par la flèche sur l'exemple de la Fig.LU1. Cela montre l’importance de la valeur du
ΦmCO2 pour déterminer les entrées de carbones dans la plante

4- Le ΦmCO2 varie avec les conditions du milieu. Le ΦmCO2 des plantes en C3 varie selon la température
foliaire et les fractions molaires en CO2 (Ca) et en O2 qui prévalent dans l’air ambiant. Compte tenu de la
modulation qu’exercent ces trois facteurs sur la fonction oxygénase de la Rubisco, on prédit que le ΦmCO2
augmente lorsque la teneur en CO2 s’accroît et celle en O2 diminue, de même lorsque la température de la feuille
est abaissée. Dans ces trois situations le rapport O/C de la concentration de O2 à la concentration de CO2 dissous
dans le chloroplaste diminue, ce qui inhibe l'activité oxygénase de la Rubisco (voir chapitre diffusion du CO2
dans la feuille). Un exemple de l’augmentation de ΦmCO2 chez une plante en C3 dans un air pauvre en O2 a été
donné Fig. LU1. Sur le Pois, ΦmCO2 vrai dans 21% de O2 = 0,072 molécules CO2 photon-1, tandis qu’il est =
0,105 molécules CO2 photon-1 dans 1% de O2 : comme on l’avait indiqué alors une partie de l’énergie absorbée
par la feuille dans une atmosphère normale est utilisée pour l’oxygénation du RuBP (dont dépend la
photorespiration) et se trouve donc perdue pour la fixation du dioxyde de carbone.
On n’attend, par contre, aucune variation du rendement quantique maximum chez les plantes en C4 en
fonction de ces paramètres : la teneur élevée de CO2 dans les gaines périvasculaires inhibe en effet l’activité
oxygénase de la Rubisco.

Les Figures LU5 et LU6 résument les variations du ΦmCO2 en fonctions des fractions molaires de CO2 et de O2 et
de la température (Ehleringer et Björkman, 1977).
Les points essentiels qui ressortent sont les suivants.
ΦmCO2, (molécule CO2 photon-1)

C3, dans 2% de O2
0.08
Figure Lu5. Variations de ΦmCO2 en fonction de la
0.06 C4 dans 21% 02 teneur ambiante de CO2 chez les plantes en C3 dans
21% (⎯) ou 2% (------) de O2, et chez les plantes en
C4 dans 21% de O2 (……). Schéma d’après
0.04 Ehleringer et Björkman (1977). Les mesures sont
C3 dans 21% de O2 faites aux alentours de 25°C.
0.02

0 400 800 1200 1600


Ca, (ppm)

(1) Les ΦmCO2 des plantes en C3 et en C4 sont très voisins dans un air normal lorsque la température est
autour de 25°C (Fig.Lu5) : chez les plantes en C4, une fraction de l’énergie lumineuse absorbée, à peu près égale
à celle nécessaire pour l’oxygénation du RuBP chez les plantes en C3, est utilisée pour faire fonctionner le
mécanisme de concentration du CO2 au niveau de la rubisco dans les gaines périvasculaires.

Lorsque Ca est élevée le ΦmCO2 des plantes en C3 est plus grand que celui des plantes en C4 : la photorespiration
est en effet inhibée chez ces premières dans ces conditions. Enfin, on peut expliquer simplement pourquoi
ΦmCO2 n’est pas sensible au CO2 et sa valeur proche du maximum possible chez les plantes en C3 dans un air
contenant 2% de O2 : comme la fonction oxygénase de la Rubisco est alors fortement inhibée, l’énergie absorbée
par la feuille est utilisée principalement pour la fixation du CO2, et ce, quelque soit la fraction molaire de celui-ci
dans l’air ambiant.

(2) Dans un air normal (21% de O2 et 350 ppm de CO2) le ΦmCO2 des plantes en C3 est plus élevé que
celui des plantes en C4 lorsque la température est inférieure à 25°C (Fig.Lu6) : Dans ce cas, il y a relativement
plus de CO2 dissous que de O2 ce qui entraîne une modulation à la baisse de la photorespiration. La situation
s'inverse pour des températures supérieures à 25 °C. Les plantes en C4 sont mieux adaptées aux températures
élevées que les plantes en C3 (voir ci-dessous).

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ΦmCO2, (molécule de CO2 photon-1)

0.08
C3 Figure Lu6. Variations de ΦmCO2 en fonction de
0.06 la température foliaire et dans 21% chez les
C4
plantes en C3 (⎯) et chez les plantes en C4 (……).
0.04 Schéma d’après Ehleringer et Björkman (1977).
Les mesures sont faites lorsque Ca est voisin de
0.02
330 ppm. Schéma d’après Ehleringer et Björkman
(1977).
0.00
10 15 20 25 30 35 40
Température de la feuille, (°C)

5- Implication de la différence de rendement quantique entre les plantes en C3 et en C4. La production de


matière sèche et la répartition des plantes en C3 et en C4 dépendent en partie des valeurs du ΦmCO2.
L'éclairement dans une population végétale diminue avec la hauteur car les feuilles de rangs supérieurs
absorbent la lumière et ombragent les feuilles de rangs inférieurs. A la surface du sol, il peut être entre 5 et 15%
de la valeur qu'il avait avant de pénétrer dans le couvert. L'amplitude de l’extinction de la lumière dépend du
LAI (voir chapitre....). Ceci explique pourquoi la photosynthèse d'une population est rarement saturée par la
lumière. L'activité de la plupart des feuilles qui la compose se fait souvent, pour les feuilles de rangs supérieurs,
ou même toujours, pour les feuilles de rangs inférieurs, en lumière limitante. Dans ces conditions, la valeur du
rendement quantique est importante pour expliquer la production et la répartition des plantes. On s'attend ainsi à
ce que les plantes en C4, comparées aux plantes en C3, soient désavantagées dans des environnements frais, et
avantagées dans des environnements chauds, puisque le ΦmCO2 des plantes en C3 est plus élevés que celui des
plantes en C4 lorsque les températures sont modérées à faibles.
De fait, Ehleringer (1978) montra que la valeur du rendement quantique en relation avec la température
expliquait bien la répartition des plantes en C3 et en C4 aux USA : les plantes en C4 colonisent bien de
préférence les milieux chauds et la période estivale dans l'année, lorsque les températures sont les plus élevées.
Les plantes en C3 sont plus performantes dans les milieux frais, au printemps et en début d’été.

6- Le rendement quantique maximum de la photosynthèse dans des conditions non-photorespiratoires


n’est pas ou très peu variable chez les plantes terrestres. Les conditions non photorespiratoires (inhibition de
l’oxygénation du RuBP) peuvent être les suivantes : air contenant 2,0 ou 0,5% de O2 (+N2) et 360 ppm de CO2,
ou bien 1500 ou 2000 ppm de CO2 et 21% de O2,

a-ΦmO2 et rendement quantique de la photochimie du PSII, Fv/Fm.

ΦmO2 vrai et Fv/Fm


Björkman et Demmig, (1987) mesurent le ΦmO2 vrai (à CO2 saturant dans une atmosphère contenant 21% de
O2) et le rendement quantique de la photochimie du PSII, Fv/Fm, où Fm et Fv sont respectivement l’émission
maximum et l’émission variable de la fluorescence chlorophyllienne (voir chapitre fluorescence), sur des
feuilles de 47 plantes en C3 de milieux contrastés appartenant à des genres différents. Ils constatent que ces
deux paramètres
(1) ne varient pas ou très peu entre des plantes poussant sous ombrage profond comme Oxalis oregana
et Aloscasia macrorhisa ou sous pleine lumière comme Helianthus annuus, Vigna marina et Nerium oleander,
(2) varient peu ou ne varie pas du tout chez des plantes taxonomiquement très différentes.

Pour ΦmO2 ils trouvent la valeur


de 0,102 ± 0,006 chez les fougères,
de 0,112 ± 0,002 chez des conifères,
de 0,108 ± 0 ,002 chez les dicotylédones herbacées,
de 0,105 ± 0,002 chez les monocotylédones herbacées,
de 0,107 ± 0,001 chez les arbres à feuillage décidu etc…

Gabriel Cornic, Mars 2007 7


la valeur moyenne sur ces 47 espèces étant de 0.106 ± 0.001 molécules de O2 par photon, montrant qu’il faut
9,43 photons pour assurer le dégagement d’une molécule de O2.
La valeur moyenne du rendement quantique de la photochimie du PSII estimée sur les mêmes plantes,
en mesurant Fv/Fm, est aussi remarquablement constante et s’établit à 0,832 ±0,004.

ΦmO2 apparent.
Par contre, ΦmO2 apparent varie beaucoup entre les espèces : Cela résulte de la variation du coefficient
d’absorption de la lumière qui, en moyenne de 0,838 ± 0,006 (environ 84% de la lumière incidente à la feuille
qui est absorbée), passe de 0,890 chez Avicenia maritima à 0,775 chez Kalanchoe blossfeldiana (voir ci-dessus
section 3).
Björkman et Demmig (1987) montrent encore que le ΦmO2 vrai ne varie pas lorsque la concentration de
chlorophylle dans les feuilles change entre 100 et 700 mg m-2 (la concentration habituelle se situe autour de 500
mg m-2), tandis que ΦmO2 apparent suit exactement les variations du coefficient d’absorption des feuilles, qui
diminue avec la teneur en chlorophylle.

b- ΦmCO2. Comme le ΦmO2 vrai, le ΦmCO2 vrai mesuré sur des espèces très différentes (Long et al.
1993) dans un air contenant 1% de O2 et 330 ppm de CO2 ne varie pas significativement : ainsi, il est le même
chez Picea abies, Poa annua et Nerium oleander. Sa valeur moyenne calculée à partir des 11 espèces utilisées
par ces auteurs est de 0,093 ± 0,003, montrant qu’il faut environ 10,75 photons pour fixer une molécule de
dioxyde de carbone.
On remarque que cette valeur est supérieure de 12% environ à celle de ΦmO2 mesuré par Björkman et
Demmig (1987). Cela montre qu’une faible partie des électrons produits par le PSII réduit effectivement d’autres
accepteurs que le CO2 : l’oxygène via la réaction de Mehler et les nitrates sont les principaux accepteurs
alternatifs. Cela correspond bien aussi au fait que le rapport de l’oxygène émis au CO2 absorbé durant la
photosynthèse est légèrement supérieur à 1.
Le ΦmCO2 mesuré sur une base de lumière incidente est par contre très variable puisque le coefficient
d’absorption de la lumière varie de 0,65 chez Pilia microphylla à 0,90 chez Cicas revoluta. Long et al. (1993)
montrent aussi dans ce même article que le ΦmCO2 n’est pas modifié par l’age des feuilles, bien que la valeur de
A atteinte au plateau de saturation soit plus élevée chez les plantes jeunes. Chez toutes ces espèces, également, le
rendement quantique maximum de la photochimie du PSII (estimé aussi par le rapport Fv/Fm) est le même avec
une valeur moyenne de 0.838 ± 0.008, identique à celle trouvée par Björkman et Demmig (1987).

c-Conclusion. Les observations rapportées ci-dessus montrent que la structure de base qui permet la
capture et la transduction de l’énergie lumineuse en énergie chimique présente peu de variation chez les plantes
terrestres. Même des conditions d’environnement contrastées (plantes d’ombre et de lumière, de milieux secs ou
humides, Björkman et Demmig, 1987) ne paraissent pas affecter globalement son fonctionnement. Par contre, la
valeur de A au plateau de saturation est sujette à de grandes variations. Ces variations sont probablement le
résultat de modifications affectant la concentration des enzymes (notamment la Rubisco) intervenant dans la
fixation de dioxyde de carbone
De plus, les valeurs de ΦmO2 suggèrent (voir aussi le chapitre consacré au transport d’électrons dans le
thylacoïde), que les deux photosystèmes sont toujours excités en moyenne par la même quantité de photons : En
effet en adoptant cette hypothèse et en supposant que le rendement quantique conduisant à une séparation de
charge sur les photosystèmes est de 1, on calcule que la valeur du ΦmO2 théorique est de 0,125 O2 photon-1. Si,
maintenant, ΦmO2 théorique est calculé considérant un rendement quantique de la photochimie du PSII égal à 0,9
(ce qui est communément admis) on obtient la valeur de 0.112 O2 photon-1, très voisine de 0.106 ± 0.001 O2
photon-1 obtenue par Björkman et Demmig, (1987) pour des plantes originaires de milieux très divers. Cela
indique aussi l’existence de mécanismes contribuant, à court comme à long terme, à maintenir égale le partage
de l’excitation entre le PSI et PSII pour obtenir le rendement quantique maximum le plus élevé possible. Ceci est
important si l’on considère que la plupart des organismes photosynthétisants vivent sous faible éclairement, et
que, comme nous l’avons dit plus haut, les peuplements végétaux fonctionnent globalement plutôt en lumière
limitante.
L’existence d’une telle régulation peut être mise en évidence.

8- Variation du ΦmO2 selon la qualité de la lumière de croissance. Chow et al. (1990) rapportent les résultats
d’une expérimentation au cours de laquelle des Pois sont cultivés sous une lumière PSI ou sous une lumière PSII.
La lumière PSI ayant un maximum dans le rouge et le proche infra rouge, excite préférentiellement le PSI ; la
lumière PSII avec un maximum vers 600 nm, excite préférentiellement le PSII. L’intensité de ces deux sources
de lumière est réglée de telle sorte que la quantité de photons absorbés par les feuilles dans les deux cas est la
même.

Gabriel Cornic, Mars 2007 8


La composition des thylacoïdes dans ces deux conditions est très différentes (Tableau LU1). La
différence observée dans le rapport Chl a/b indique une différence dans la composition pigmentaire liée ou non à
un changement de concentration des photosystèmes. De fait, sous lumière PSI la concentration de PSII exprimée
par rapport à la chlorophylle est plus élevée que sous lumière PSII, tandis que sous lumière PSII la concentration
de PSI est plus élevée que sous lumière PSI. A noter aussi que la teneur en cytochromef demeure inchangée.

Tableau LU1. Rapport chl a/b (mole/mole) et concentration (en mmoles (mole Chl)-1) de cytochromef, PSII et
PSI de thylacoïdes de Pois cultivés sous une lumière PSI ou sous une lumière PSII (d’après Chow et al., 1990).
Noter que PSII/PSI = 1.8 chez des Pois cultivés en champs.

Chl a/b Cytochromef PSII PSI PSII/PSI


Lumière PSI 1,97 ± 0,02 1,17 ± 0,08 2.67 ±0,067 1,05 ± 0,09 2,5
Lumière PSII 2,24 ± 0,01 1,04 ± 0,07 1,97 ±0,05 1,73 ± 0,08 1,1

On peut penser que les mécanismes qui modulent la teneur en photosystèmes (voir chapitre sur le transfert
d’électrons dans le thylacoïde) dans les deux conditions de culture servent à maintenir un partage bien équilibrer
de l’excitation entre eux deux : sous lumière PSI le rapport PSII/PSI est plus élevé que sous lumière PSII ; ceci
étant dû à la fois à une diminution des centres PSI et une augmentation des centres PSII par rapport à ce qui est
observé sous lumière PSII. Ces deux changements dans les conditions de lumière PSI serviraient à rééquilibrer la
distribution de l’excitation dans un environnement où le PSI est favorisé.

On montre sur ces plantes que ΦmO2 vrai (considérant la lumière absorbée par la feuille) de feuilles intactes est
effectivement le plus élevé lorsque la mesure se fait en utilisant une lumière dont les caractéristiques sont celles
de la lumière de croissance. Ainsi l’utilisation d’une lumière de type PSII pour faire la mesure sur des feuilles
issues de culture sous lumière PSI entraîne une baisse du rendement quantique de 20% environ. De même
l’utilisation d’une lumière PSI pour faire la mesure sur des feuilles venant de la condition de croissance
« lumière PSII » (Tableau LU2)

Tableau LU2. ΦmO2 mesuré sur une base de lumière absorbée en utilisant de la lumière PSI ou PSII (voir texte)
sur des feuilles intactes de Pois cultivés sous une lumière PSI ou PSII (d’après Chow et al, 1990).

Mesure avec Lumière PSI Mesure avec Lumière PSII


Culture sous lumière PSI 0.108 0.080
Culture sous lumière PSII 0.091 0.097
Différence (%) +19 -21

Ce jeu de données montre que les changements de stœchiométrie des photosystèmes optimise le transport
d’électrons dans la membrane thylacoïdienne et permet ainsi de maintenir élevé le rendement quantique de la
photosynthèse.

7- Variation, à la lumière, du rendement quantique des centres PSII ouverts (Fv’/Fm’) et de la


concentration relative des centres ouverts (qp) en fonction de la DFQP. Evaluation par mesure de
l’émission de la fluorescence chlorophyllienne. (voir chapitre « L’émission de la fluorescence
chlorophyllienne-mesure et utilisation » La Figure Lu7 illustre ces variations dans le cas d’une feuille de soja.
On voit que Fv’/Fm’ et qp diminuent avec l’augmentation de l’éclairement tandis que A augmente pour tendre
vers un plateau de saturation vers 2000 µmoles m-2 s-1.

La baisse de Fv’/Fm’ indique qu’une fraction de plus en plus petite de la lumière absorbée par le PSII arrive aux
centres réactionnels où elle est utilisée. Une fraction croissante de l’énergie capturée par le PSII est dissipée

Gabriel Cornic, Mars 2007 9


thermiquement, très majoritairement dans les antennes collectrices. Ce phénomène participe à la protection des
centres réactionnels contre les effets négatifs des fortes lumières (voir ci-dessous, la photoinhibition).
La baisse de qp est irrégulière : sa valeur est encore égale à 1 (le pool des plastoquinones est très oxydé)
sous une DFQP de 200 µmoles m-2 s-1 pour décroître à 0.9 sous 400 µmoles m-2 s-1. Sous cette lumière la valeur
de A est environ la moitié du maximum atteint sous 2000 µmoles m-2 s-1. La diminution de qp montre qu’un
surplus d’énergie est absorbé par rapport aux capacités du système à l’éliminer : Le pool des plastoquinones
devient de plus en plus réduit.
La réduction du pool des plastoquinones est ralentie sous des lumières faibles par la baisse rapide de
Fv/Fm’ dans ces conditions : l’augmentation rapide de la dissipation thermique avec la DFQP diminue la
fraction de lumière absorbée atteignant les centres réactionnels, permettant alors de maintenir oxydé le pool des
plastoquinones.

25
1.0
20
A (µmol CO2 m-2 s-1)

Figure Lu7. Variations de A, Fv/Fm’ et qp en


15 Fv/Fm' et qp fonction de la DFQP. Les mesures sont faites sur
0.8
une feuille de Soja maintenue à 25 ± 0,2°C, dans
10 une atmosphère contenant 21% de O2 et 370 ± 3
0.6 ppm de CO2. Le VPD était de 0,8±0,5 kPa (Zhu et
5 Cornic, résultats non publiés).
0
0.4
-5
0 400 800 1200 1600 2000
-2 -1
DFQP (µmol m s )

Gabriel Cornic, Mars 2007 10


B-Adaptation à l'éclairement de croissance.
1-Caractéristiques du milieu « ombre ». Les milieux ombragés se caractérisent non seulement par une
diminution du niveau de l’éclairement, mais aussi par sa modification qualitative. Un couvert forestier dans nos
régions absorbe et/ou réfléchit au total 90 à 95% du rayonnement qu’il reçoit : entre 5 à 10% de la lumière
incidente au sommet du couvert arrive à la surface du sol, donnant habituellement une densité de flux quantique
dans le visible au sol qui varie, aux heures de midi, habituellement entre 20 à 50 µmoles m-2 s-1.

6
DFQP (µmol m s nm )
-1

5 Figure Lu8. Spectre de la lumière au dessus d’un champ blé


(_____) et à 60 et 20 cm dans ce champs de blé. Le champ de
-1

4
-2

blé à une hauteur de 90-95 cm (d’après Holmes , 1981). On


3 60 cm remarque l’atténuation générale du rayonnement à
l’intérieur du couvert. Cette atténuation est la plus forte dans
2 le rouge clair (environ de 660 à 690 nm) et dans le bleu (de
400 à 490 nm). Elle est faible dans le rouge sombre (environ
1 de 710 à 750 nm). Il en résulte une diminution du rapport
20 cm
Rc/Rs sous le couvert.
0
400 500 600 700 800
Longueur d'onde (nm)

Dans les forêts tropicales, où les couverts sont particulièrement denses, cette valeur peut être de 5 à 10 µmoles
m-2 s-1, c’est à dire tout à fait similaire à ce que l’on mesure au sol dans un champ de blé bien développé et dans
nos maisons et appartements, la nuit tombée lorsque nos lumières sont allumées….ou encore sous 70 m d’eau, à
la base de la zone photique des océans, des mers et des grands lacs, lorsque les eaux sont claires.
Le rayonnement traversant un couvert végétal est aussi fortement appauvri en rouge clair (de 620 à 690
nm) et en bleu (de 400 à 490 nm), longueurs d’onde absorbées préférentiellement par la chlorophylle des
feuilles ; il est aussi fortement enrichi en lumière rouge sombre (de 700 à 730 nm), qui par contre n’est que peu
absorbé par la végétation et dont la quantité devient relativement plus importante : sous un couvert végétal, le
rayonnement est appauvri en lumière PSII (environ 680 nm) et enrichi en lumière PSI (environ 700 nm)
(Fig.Lu8). La composition spectrale à proximité d’un couvert végétal est aussi enrichie en rouge sombre,
préférentiellement réfléchi par les feuilles (Fig.Lu9).

Fig.Lu9. Dans une pelouse, l’environnement lumineux des


plantes de petite taille se trouve enrichi en rouge sombre,
sans pour autant qu’elles soient ombragées par les plantes
de taille plus grande. En effet le rouge sombre, peu ou même
pas du tout utilisé par la photosynthèse, est réfléchi et
transmis par les feuilles des plantes dominantes. Une plante
détecte la présence d’une autre plante dans son voisinage en
réagissant à la proportion de rouge claire et de rouge
sombre.

Outre ces modifications du climat lumineux, le milieu ombre, comparé au milieu découvert, se caractérise aussi
par une humidité édaphique et aérienne plus élevée et par des écarts de températures diurnes nocturnes plus
faibles. La caractérisation du milieu ombrage dans les conditions naturelles ne peut pas se faire en ne prenant en
compte que le facteur lumière.

Gabriel Cornic, Mars 2007 11


2-Les récepteurs sensibles à la lumière. Une plantule qui se développe à l’obscurité est étiolée : dépourvue de
chlorophylle, ses feuilles sont petites et sa tigelle longue et mince avec des entrenoeuds très allongés. Ce type de
morphogenèse est appelé skotomorphogenèse. Chez A. thaliana, souvent utilisée pour les recherches dans ce
domaine, l’hypocotyle est très allongé (la germination de cette plante est épigée) et les cotylédons qui ne sont pas
étalés ont l’allure d’un crochet à son extrémité.
Des plantules étiolées brusquement exposées à la lumière verdissent ; la croissance de leur hypo- ou
épicotyle ralentit brutalement et des feuilles commencent à apparaître. Elles présentent un autre type de
morphogenèse appelée photomorphogenèse. La lumière module ou allume l’expression d’une grande variété de
gènes, par exemple, des gènes dont l’activité est reliée au fonctionnement de la photosynthèse.
Entre les deux extrêmes que représentent skotomorphogenèse et photomorphogenèse, les plantes à la lumière
perçoivent les variations de la composition spectrale de leur environnement et modifient leur croissance en
fonction des signaux reçus. Les végétaux enregistrent les changements du climat lumineux dans les régions
rouges et bleues du spectre, ainsi que dans l’ultra violet incluant les UV-A et UV-B. Pour cela elles possèdent au
moins trois types de récepteurs :

(1) les phytochromes, qui sont surtout sensibles aux changements se produisant dans le rouge de 650 nm
à 730 nm ;
(2) les cryptochromes et
(3) les phototropines, qui détectent les modifications survenant dans le bleu et les UV-A ;
(4) les récepteurs des UV-B, qui sont encore mal connus.
(5) Les chlorophylles et les protochlorophylles, font partie aussi de ces photorécepteurs.

Sont brièvement décrits ci-dessous, phytochromes, cryptochromes et phototropines. …D’autres


photorécepteurs restent certainement à découvrir.

a-Schéma du système de transduction des signaux lumineux. Les études, dans ce domaine, ont
beaucoup progressé, notamment grâce à l’étude de deux catégories de mutants d’Arabidopsis thaliana.
Des mutants présentant un hypocotyle allongé dont l’agrandissement est le même à la lumière et à
l’obscurité. Ils ont à la lumière le phénotype étiolé décrit plus haut : avec des cotylédons qui ne sont pas étalés et
placés à l’extrémité de l’hypocotyle. On les appelle hy (pour hypocotyle). Certains de ces mutants manquent
d’un phytochrome particulier, ou d’un cryptochrome, ou encore d’autres facteurs intervenant dans la
transduction du signal lumineux.
Des mutants dont l’hypocotyle est court à l’obscurité : ils ont un phénotype « lumière » à l’obscurité,
avec des cotylédons bien étalés, des entrenœuds très courts et des chloroplastes bien formés (et non des
étioplastes) contenant un système de thylakoïdes longs. Ils expriment aussi des gènes liés à l’activité
photosynthétique, comme RbcL, RbcS (formation de la petite et de la grande sous unité de la Rubisco) et PsbA
(synthèse d’une protéine du centre réactionnel du PSII). Cependant leurs chloroplastes sont dépourvus de
chlorophylle à l’obscurité : on sait en effet que plusieurs étapes de sa synthèse sont activées à la lumière.
Ces mutants ont un phénotype cop (constitutive photomorphogenis) ou det (de-etiolated) ou encore fus
(pour fusca, pourpre, en espagnol, car ils synthétisent des anthocyanes à l’obscurité).
Ces mutants cop/det/fus ont donc à l’obscurité la presque totalité des aspects présentés par les plantules
à la lumière. Cela montre que le programme « morphogenèse lumière » est le programme de développement qui
est suivi normalement par les plantes. Les produits des gènes COP/DET/FUS modulent le fonctionnement de ce
programme par défaut, et, en l’absence de lumière, contribuent à produire un phénotype étiolé en bloquant le
fonctionnement des gènes sensibles à la lumière : ils permettent le déroulement de la skotomorphogenèse.

Au total une dizaine de loci pleiotropiques (= responsables d’effets multiples) COP/DET/FUS ont été identifiés.
Des plantules d’A thaliana surexprimant COP1 (produit du gène COP1), cultivées sous une alternance normale
jour/nuit, montrent un phénotype partiellement étiolé (long hypocotyle en particulier) : COP1 exerce bien un
effet inhibiteur sur la photomorphogenèse (Wei et Deng, 1996).
La découverte de ces deux types de mutants montrait que les signaux lumineux étaient perçus par les
photorécepteurs et transformés pour supprimer et moduler l’activité d’un groupe de gènes contrôlant le
programme par défaut qui produit une « morphogenèse lumière ». Il a été montré que l’accumulation de
protéines issues de l’activité des gènes COP et le niveau des ARN messagers de DET1 n’était pas sujette à une
régulation par la lumière. La lumière agit donc en modulant les processus postraductionnels : il peut y avoir des
interactions protéines/protéines, des modifications de protéines ou des changements de localisation de protéines.
Bien sûr ces mécanismes ne s’excluent pas mutuellement. La Fig.Lu10 ci-dessus schématise sommairement ce
système.

Gabriel Cornic, Mars 2007 12


Figure Lu10. Le « système de gènes COP/DET/FUS » : les mutations qui affectent les gènes
COP, DET et FUS activent la photomorphogenèse En l’absence d’activité de ce système le
phénotype est un phénotype lumière. Son activité est modulée par des signaux lumineux de
l’environnement. Les récepteurs à la lumière sont sensibles au rouge claire et au rouge
sombre, aux UV-A et au bleu et aux UV-B (d’après Wei et Deng, 1996).
LUMIÈRE

gènes
COP/DET/FUS

Transduction du Modulation du
Récepteurs de la
signal Phénotype
lumière
lumière

Certains de ces gènes comme par exemple DET1, COP1, COP9, ont été clonés. Les polypeptides qu’ils codent
possèdent à peu d’exception près (DET2, par exemple) des séquences d’adressage pour le noyau où ils jouent
leur rôle. Il apparaît maintenant que les protéines du groupe COP/DET/FUS forment 4 entités biochimiques :
COP1, COP10, DET1 et le signalosome COP9. A l’obscurité ces protéines sont dans le noyau.
DET1 contrôle probablement des remaniements de la chromatine, et donc, se trouve sûrement impliqué
dans la régulation de l’expression de gènes.
COP10 est l’une des protéines (de type E2, voir encadré ci-dessous) qui est impliquée dans le marquage,
par de l’ubiquitine, des protéines à dégrader.
COP9 est composée de 8 protéines COP/DET/FUS. Il ressemble à l’une des sous-unités du protéasome
26 S (complexe servant à la dégradation des protéines marquées par l’ubiquitine voir encadré ci-dessous).
COP1 peut interagir directement avec le facteur de transcription HY5 notamment (et probablement avec
d’autres facteurs de transcription). HY5 active certains gènes sensibles à la lumière en se liant à leur promoteur.
En se liant avec HY5, COP1 marque cette protéine pour être dégradée. COP1 possède en effet un domaine
ressemblant beaucoup à une classe d’ubiquitine ligase (les E3s) qui sont impliquées dans le marquage des
protéines avant leur dégradation (FigLu11).
PREMIERES ETAPES DE LA
DEGRADATION DES PROTEINES
COP De nombreuses études on montré que
les protéines sont ciblées pour être
U HY5 dégradées lorsqu’elles forment une
E2 liaison covalente avec une ou des
molécules d’ubiquitines. L’ubiquitine
est une petite protéines de 8,5 kDa
U environ qui se trouve chez tous les
Dégradation eucaryotes et dont la séquence est très
U conservée jusqu’à l’homme. Trois
E2 U types d’enzymes sont impliquées dans
ADP ce marquage : E1 qui se lie à de
ATP
E1 U l’ubiquitine en utilisant de l’ATP ; E2
U qui récupère l’ubiquitine de E1 et se
fixe sur E3 capable de se lier elles
mêmes à la cible. La sélectivité avec la
Fig.lu11. Schéma montrant que l’interaction probable entre COP1 et HY5. COP1 protéine à dégrader se fait donc au
contribue à marquer HY5 pour une dégradation via le protéasone. (voire encadré niveau de E2 et de E3. Il peut y avoir
ci-dessus). E2 pourrait être COP10. U = ubiquitine (D’après Osterlund et al., des poly-ubiquitinisation des protéines
2000) à dégrader

Gabriel Cornic, Mars 2007 13


Il doit y avoir inactivation de COP1 lorsqu’une plante étiolée est mise à la lumière, ou bien encore un
changement de compartimentation de cette protéine. Sinon la photomorphogenèse reste inhibée. Les
mécanismes de cette inactivation sont encore mal connus. Plusieurs possibilités sont listées ci-après :

(1) Comme le montrent des observations faites sur des cellules d’A thaliana, la lumière provoque une
diminution de la concentration de COP1 dans le noyau, alors que celle dans le cytoplasme devient plus élevée.
Ces changements sont lents et demandent environ 24H ; ils traduisent probablement en partie une migration de
CP1 d’un compartiment à l’autre. Dans ce cas HY5 (et d’autres régulateurs positifs de la photomorphogenèse)
ne sont pas dégradés.
(2) COP1 dans le noyau peut se lier directement à un cryptochrome qui l’inactive.
(3) COP1 peut se lier à des régulateurs négatifs des phytochromes.

Les deux derniers modes d’action rendraient compte des effets rapides. Il est à noter que les mutants cop/det/fus
n’accumulent pas COP1 dans les noyaux des hypocotyles lorsqu’ils sont cultivés à l’obscurité. Cela suggèrent
bien que la lumière pourraient réguler l’abondance de COP1 dans ce compartiment via une modulation
d’activité des protéines COP/DET/FUS : Le signalosome COP9 en particulier pourrait contrôler la stabilité de
COP1 dans le noyau.

b-Réponses à la lumière rouge claire et rouge sombre : Les phytochromes.

(1)-Généralités. Les phytochromes contrôlent de nombreux aspects de la morphogenèse et de la reproduction


des plantes. Ils existent sous deux formes interconvertibles : Le PRc, qui absorbe principalement dans le rouge
clair (Rc, de 640 à 680 nm environ), et le PRs, qui absorbe surtout dans le rouge sombre (Rs, au-delà de 700 nm
surtout). On peut écrire sous la forme la plus simple :

RC RS

PRc PRs effets métaboliques

A l’obscurité PRs peut redonner PRc ou bien se dégrader. Il se dégrade aussi à la lumière. Ces réactions
contribuent à diminuer la quantité de PRs qui est la forme active. Les phytochromes sont synthétisés sous forme
de PRc. La protéine qui porte le chromophore (composé qui absorbe la lumière) est assemblée dans le
cytoplasme. Le chromophore (groupe tétrapyrolique ouvert, voir plus bas Fig.LU14), synthétisé dans le
chloroplaste, passe dans le cytoplasme où il se lie directement avec elle. La vitesse de dégradation de PRc à
l’obscurité est faible en comparaison de celle de PRs. Le spectre d’absorption de ces deux formes est donné Fig
Lu12.

100
PRc
Absorption (unité arbitraire)

80

60 Figure Lu12. Spectre d’absorption de la forme RC et RS du


PRs phytochrome. Noter la zone de recouvrement des deux
spectres entre 500 et 700 nm. La proportion de PRc et de
40 PRs est modulée par le rapport RC/RS mais aussi par des
lumières dont les longueurs d’onde varient, en particulier de
600 à 700 nm environ (d’après Smith, 2000).
20

0
300 400 500 600 700 800
Longueur d'onde (nm)

Gabriel Cornic, Mars 2007 14


Les proportions de PRc et de PRs peuvent être contrôlées par les proportions de Rc et de Rs dans la lumière
ambiante. La Fig.lu13 montre la variation du rapport PRc/PRtot, où PRtot est la quantité totale de phytochrome,
dans un hypocotyle de Pois étiolé (Morgan, 1981). Ce rapport ne varie plus guère lorsque le rapport Rc/Rs dans
la lumière ambiante est de 3 environ. Il est intéressant de remarquer que le rapport PRs/Ptot varie le plus dans la
gamme naturelle des changements de Rc/Rs (voir la légende de la Fig.lu13).

0.8
0.7
Fig.Lu13. Relation entre le rapport PRc/PTot, du phytochrome capable
d’absorbé le rouge clair et la quantité totale de phytochrome, au rapport
0.6 de rouge clair, Rc (exprimé en densité de flux quantique), sur rouge
sombre, Rs (même unité), dans la lumière ambiante. Les mesures sont
0.5
PRc/PTot

faite sur des tissus d’hypocotyle de pois étiolés (d’après Morgan, 1981).
0.4 La valeur de Rc/Rs dans les conditions naturelles est de 1-1,1
sauf le soir et le matin où il est inférieur à 1 (relativement plus de Rs).
0.3
Dans les couverts Rc/Rs peut être très faible (voir fig.Lu8). On voit que
0.2 le maximum de la variation de PRc/PTot se fait dans la gamme des
variations naturelles de Rc/Rs.
0.1
0.0
0 1 2 3 4
Rc/Rs dans la lumière incidente

De même, le rapport PRc/PRs change rapidement en faveur du Rc au couché du soleil, lorsque la proportion de
Rs s’accroît dans la lumière ambiante. Cette modification constitue un signal de fin de jour. Ce changement est
accentué durant la nuit où la forme PRs est transformée en PRc et surtout dégradée. Lorsque la nuit est longue
(jour court, typiquement de 8 à 9 heures) la forme PRc, inactive, sera très majoritaire. Lorsque la nuit est courte
(jour long, typiquement de 16 heures) la forme PRs, active, sera encore bien présente

On distingue habituellement trois types de réponses des phénomènes sous la dépendance des phytochromes selon
le flux quantique nécessaire pour leur déroulement :

(1) Réponse à très faible flux quantique : entre 0,1 et 1 µmole photons m-2s-1. La réponse n’est pas réversible et
dépend seulement de la quantité de photons reçus quelle que soit la durée de l’éclairement. C’est le cas de
l’induction de l’expression du gène LHCB (Light harvesting complex B, entrant dans la formation de l’antenne
collectrice du PSII) et de la germination des graines.

(2) Réponse à faible flux lumineux : entre 1 et 1000 µmoles photons m-2s-1. La réponse est réversible, et ne
dépend (comme dans le cas précédent) que de la quantité de photons reçus. C’est la réponse phytochrome telle
qu’elle est décrite classiquement et telle qu’elle a été rapportée sur la germination de la laitue par Borthwick et
al. (1952) et qui met en évidence les possibilités d’interconversion des formes PRc et PRs : ces auteurs
montrèrent en effet dans ce cas que la germination était induite par la lumière rouge clair mais qu’elle pouvait
être fortement inhibée par une lumière rouge sombre appliquée immédiatement après la lumière rouge clair.

(3) Réponse à flux lumineux élevé : supérieure à 1000 µmoles photons m-2s-1. La réponse n’est pas réversible et
ne dépend pas de la quantité de photons reçus ; comme c’est le cas de l’inhibition de la croissance des axes
principaux et de la croissance des cotylédons, lors du passage de plante étiolée de l’obscurité à la lumière. De
plus, ces réponses, pour celles qui impliquent spécifiquement un phytochrome, se font sous toutes les longueurs
d’onde, de la lumière ultra violette à la lumière rouge sombre (voir plus le spectre d’absorption du phytochrome
sous formes PRc et PRs, figLu12).

(2)-Structure et propriétés des phytochromes. Les phytochromes sont des dimères d’un polypeptide de 120
kDa environ. Ce polypeptide est constitué de deux parties principales connectées par un segment sensible à la
protéolyse. Le chromophore (molécule sensible à la lumière), qui est la phytochromobiline, est attaché de façon
covalente à une moitié NH2-terminal d’une cystéine (374 pour phyA). C’est un groupe tétrapyrolique (voir § )

Gabriel Cornic, Mars 2007 15


linéaire à la différence de ce qui est observé chez les chlorophylles et les cytochromes. La molécule est
constituée de deux domaines : une moitié N-terminale globulaire qui porte le chromophore et une moitié C-
terminale qui est relativement linéaire.

Fig.Lu14. Chromophore du phytochrome.


C’est un groupe tétrapyrolique lié à
l’apoprotéine par l’intermédiaire d’une
cystéine. Il est représenté sous la forme
PRc et PRs. Le passage de la forme PRc à la
forme PRs se fait par une isomérisation au
niveau des carbone 15 et 16 (d’après Andel
et al., 2000). La forme PRs du groupe
tétrapyrolique est instable.
.

L’absorption de la lumière rouge claire provoque initialement une isomérisation au niveau de la liaison entre le
carbone 15 et le carbone 16. Le groupe tétrapyrolique passe d’une conformation cis à une conformation trans. Le
noyau D est alors positionné de telle sorte que l’atome d’hydrogène porté par le carbone 17 bouge et se
positionne à côté de l’atome d’hydrogène porté par le carbone 13 du noyau C (Andel et al., 2000). Ce
mouvement provoque un changement de la conformation de la protéine (le domaine C-terminal des deux
polypeptides s’éloignent l’un de l’autre : la molécule « s’ouvre ») dont les propriétés sont modifiées, en
particulier en termes d’interactions avec les autres protéines.
Les phytochromes ont été trouvés chez toutes les plantes vertes dont les gymnospermes, mais aussi
chez les mousses, les fougères, les algues, les cyanobactéries et aussi les autres bactéries. Le domaine protéique
qui porte le chromophore est très conservé de la bactérie aux plantes supérieures. La nature du chromophore
chez les bactéries et certaines algues peut par contre être différente (voir Smith, 2000).

Il y a trois principaux types de phytochromes appelés phyA, phyB et phyC. Chez Arabidopsis thaliana la famille
s’agrandit des phyD et phyE. On a retrouvé ces phytochrome chez de nombreuses autres plantes.
Le phyA est abondant chez les plantules étiolées. Sa teneur diminue jusqu’à 100 fois lorsque la
plantule étiolée passe à la lumière et qu’il est alors transformé en PRs : cela est due à la fois à une inhibition de
l’expression du gène PHYA par la lumière et à une dégradation rapide de la molécule même dans ces conditions :
sa demi-vie sous forme de PRc est d’une semaine environ, tandis qu’elle est de une à deux heures sous forme
de PRs. PhyA est parfois encore appelé phytochrome de type I.
PhyB-E sont moins abondants et stables à la lumière. Ils forment la classe hétérogène des
phytochromes de type II. Le phyB est le phytochrome de type II le plus abondant.
Chaque type de phytochromes à des fonctions particulières, mais l’étude des mutants montre que leur
fonction est souvent redondante.

Germination : Implique de différentes manières, phyA, phyB et phyE. PhyA induit une réponse irréversible sous
très faible flux quantique. phyB contrôle l’effet réversible du Rc et du Rs dans une réponse à faible flux
quantique. PhyE peut être directement impliqué dans la réponse ou bien être nécessaire au rôle joué par phyA.

Passage de l’obscurité à la lumière : cela implique une diminution de la vitesse de croissance en hauteur, la
croissance des cotylédons et la mise en place de l’appareil photosynthétique (expression des gènes CAB, RBCS,
PSBA et de ceux codant pour la FNR). L’inhibition de la croissance en hauteur de l’axe vertical est d’abord
contrôlé par phyA puis ensuite par phyB (Réponse sous flux quantique élevé). PhyC joue un rôle majeur dans la
croissance des premières feuilles (réponse à flux quantique élevé). PhyE ne paraît jouer aucun rôle dans tous ces
processus.

Gabriel Cornic, Mars 2007 16


Evitement de l’ombrage : Implique une croissance rapide des tiges, qui présentent alors de grands entre-nœuds,
et la croissance rapide des pétioles. Se trouve sous le contrôle du rapport Rc/Rs de la lumière (voir plus bas). Met
en jeu PhyB, phyD et phyE

Floraison : PhyA phyB, phyD et phyE. PhyB-D-E sont sensibles à la lumière rouge sombre fournie en fin de
jour. Cette lumière transforme le PRs en PRc inactif.

(3)-Mode d’action des phytochrome (Fig.15).

Les phytochromes peuvent se comporter comme des phospho-kinases. Ainsi, phyA catalyse la
phosphorylation d’une protéine cytoplasmique, la PKS1 (phytochrome kinase substrate), qui régule
négativement la photomorphogenèse spécifique à phyB. De plus, les cryptochromes (voir ci-dessous) sont
également la cible de cette activité phospho-kinase, soulignant les interactions entre l’activité des différents
récepteurs. Cette phosphorylation est régulée par la lumière ; elle est deux fois plus élevée lorsque phyA est
sous forme PRs. Elle peut être l’origine d’une cascade de phosphorylations régulant, dans le cytoplasme, certains
aspects du métabolisme. PhyA/PRs peut probablement former une association stable avec la PSK1entraînant la
séquestration de phyA.

Séquestration

Rouge clair signaux


PRc PRs
Rouge sombre Action

PKS

NDPK
Rouge clair
PRc PRs
Rouge sombre

Cytoplasme

Noyau

PIF3
Rouge clair
PRc PRs
Rouge sombre PIF3
Gène régulé par un phytochrome

NDPK

Cascade de phosphorylations

Fig.Lu15. Schéma donnant une structure pour comprendre les mécanismes possibles d’action des phytochromes. PKS : protéine
kinase substrate. PSK1 régule négativement le signal phyA, et ce, peut être en entrant en compétition avec d’autres composés qui sont
phosphorylés aussi par phy, ou en empêchant la migration de phy vers le noyau. On connaît une PSK2 qui comme la PSK1 interagit
avec les réponses de phyA qui se produisent à très faible niveau de RS. PIF3 :phytochrome interacting factor 3. C’est une protéine
« bHLH »(basic Helix Loop Helix) qui interagit spécifiquement avec le promoteur des gènes régulés par la lumière. Une interaction a
été décrite entre le phyB actif et le PIF4. Contrairement à la PIF3, la PIF4 régule négativement le rôle de phyB. NDPK, nucleoside
diphosphate kinase, interagit surtout avec phyA acif. (d’après H. Smith, 2000)

Gabriel Cornic, Mars 2007 17


Le phytochrome A interfère aussi avec une nucléoside diphosphate kinase, NDPK, dont l’activité kinase
est doublée lorsque phyA est sous sa forme PRs. Cela peut être aussi le point de départ d’une cascade de
réactions conduisant à la régulation du métabolisme. NDPK se trouve à la fois dans le cytoplasme et dans le
noyau.

PhyA et phyB peuvent passer du cytoplasme dans le noyau. C’est la forme PRs de phyB qui migre dans le
noyau, cette migration est lente et peut prendre plusieurs heures. Par contre, la forme PRs de phyA passe très vite
(en 10 à 20 minutes) du cytoplasme au noyau. Le PRc venant de la conversion du phyA PRs dans le noyau peut
aussi migrer du noyau vers le cytoplasme. Le PRs dans le noyau peut se lier (entre autres) avec une protéine, la
PIF3 (phytochrome interacting factor 3), facteur de transcription. L’association PRs/PIF3 peut se lier aux
promoteurs de certains gènes régulés par la lumière pour initier ou réguler la transcription. Une mise au point
récente concernant ces interactions avec une liste des facteurs de transcription qui sont la cible des pytochromes
peut se trouver dans Spadling et Folta (2005) (voir Fig.Lu15).

Enfin, récemment, il a été montré que les phytochromes de type II pouvaient interagir entre eux et former des
hétérodimères de type phyB/C, phyB/D etc.. ou même des complexes dimériques de type phyB/B lié à phyD/D.
Seul le phyA ne peut rentrer dans la constitution de tels complexes, se trouvant toujours sous la forme phyA/A. Il
est évident que la formation des ces hétérodimères ajoute un degré de complexité au réseau de régulation dans
lequel les phytochromes interviennent (Sharrock et Clack, 2004).

c-Réponses à la lumière bleue et aux UV-B. De nombreux aspects du développement et des réponses
des plantes à l’environnement sont contrôlés par la lumière bleue. C’est le cas du mouvement des feuilles et des
chloroplastes ; également du phototropisme (négatif ou positif), terme désignant la courbure d’un hypocotyle ou
d’une tige vers une source lumineuse ou bien dans la direction opposée à la source. La lumière bleue est aussi,
de façon spectaculaire, indispensable aux champignons. Par exemple, elle active la croissance du mycélium et
permet la formation de carpophores ou de pycnides (fructification des champignons) : Les champignons ont
besoin de lumière.
On a constaté très rapidement que les spectres d’action de ces réponses variées présentaient des
similitudes avec le spectre d’absorption de la FAD (Falvine Adénine Dinucléotide). On a donc pensé que les
photorécepteurs impliqués dans ces réponses étaient des flavoprotéines. Cependant, l’identité du ou des
récepteurs en cause est restée longtemps débattue : en effet les réponses dans le bleu pouvaient être aussi dues à
la présence de caroténoïdes ou encore de pigments rétiniens. Comme la nature de ces récepteurs sensibles au
bleu est restée longtemps élusive (Cashmore et al., 1999), et qu’ils se trouvaient largement répandus chez les
cryptogames (Lin, 2002), on leur à donné le nom de cryptochromes.

(1)-Les cryptochromes

C’est l’observation d’un mutant d’A. thaliana chez qui la lumière bleue n’inhibait pas l’élongation de
l’hypocotyle (cry1, d’abord appelé hy4) qui permit d’isoler un gène CRY1 codant pour une flavoprotéine, le
premier cryptochrome connu : CRY1. C’est bien parce que le gène codant pour ce récepteur a été isolé le
premier, que les récepteurs de la même catégorie furent appelés cryptochromes. Une deuxième catégorie de
récepteurs sensibles au bleu et aux UV-B fut nommée, en référence au phototropisme, phototropines (voir plus
bas).
Il y a un second cryptochrome (CRY2) chez A. thaliana. CRY1 et CRY2 ressemblent beaucoup aux
photolyases, qui sont aussi des flavoprotéines, et dont la fonction est de réparer des dimères pyrimidiques
apparaissant dans l’ADN exposé au rayonnement ultra-violet. Ce sont des protéines solubles de 70 à 80 kDa qui
possèdent deux domaines bien distincts (Fig.16) :

(1)-le domaine N-terminal (appelé ici PTY, pour photolyase) qui présente beaucoup de ressemblances
avec la photolyase et qui porte le chromophore (FAD sous sa forme réduite FADH-) ;

(2)-le domaine C-terminal (appelé ici CT) sur lequel se produisent les interactions avec les autres
protéines (Lin et Shalitin, 2003).

CRY1 inhibe l’élongation de l’hypocotyle chez A. thaliana : les mutants cry1 présentent une sensibilité à la
lumière bleue très diminuée. Par contre, les plantes chez lesquels CRY1 est surexprimé ont une sensibilité
accrue à ce stimulus : la sensibilité des plantes à la lumière bleue dépend au moins en partie de la concentration

Gabriel Cornic, Mars 2007 18


du photorécepteur dans la cellule. CRY2 inhibe aussi l’élongation de l’hypocotyle et stimule l’ouverture des
cotylédons, mais, contrairement à CRY1, CRY2 joue ce rôle sous une faible lumière : il est très instable sous
une lumière bleue dont la DFQP est supérieure à 5 µmol m-2 s-1 ; il est probablement dégradé dans ces
conditions. Il serait surtout important au début de la morphogenèse, lorsque la plantule reçoit peu de lumière.
Ce que l’on connaît du mécanisme du fonctionnement des cryptochrome vient surtout de ce que l’on
sait sur celui de photolyases. Ces dernières portent deux chromophores : le FAD, qui est aussi le centre
réactionnel de la molécule, et une antenne collectrice (le 5,10-méthenyltétrahydrofolate ou la dea-zaflavin)
récupérant l’énergie lumineuse pour la transférer sur le FAD, (voir Cahsmore et al, 1999). La photolyase se lie
spécifiquement aux dimères de pyrimidines sur l’ADN endommagé et transfère un électron du FAD excité vers
ces dimères, qui, après isomérisation donnant les pyminidines originales, renvoie l’électron au FAD.

Figure Lu16. Modèle de fonctionnement du


Lumière cryptochrome.
1-Une antenne passe l’énergie d’excitation de la
A lumière bleue à une molécule de FADH- (flèche en
B pointillés) qui la passe à un partenaire, A, portant un
chromophore et qui va transmettre le signal en dehors
de la molécule.
2-Un électron partant de la FADH- (flèche en trait
plein) réduit hors de la molécule un partenaire, B,
Antenne C
premier élément dans la chaîne de transduction du
FADH- signal.
CT 3-L’électron peut être transmis (flèche en trait plein),
PTY dans le cryptochrome même à un partenaire, C, qui, à
l’état réduit, modifie la conformation du
cryptochrome. Ce dernier peut alors interagir avec
d’autres molécules. (d’après Cashmore et al. 1999).
PTY : partieN-terminale de la molécule ressemblant
aux photolyase. CT : partie c-terminale de la molécule
qui peut être en interaction avec d’autres partenaires.

Le schéma Fig.Lu16 résume diverses hypothèses sur le fonctionnement du cryptochrome. Sur ce schéma les
flèches en pointillés indiquent un transfert de l’énergie d’excitation et les flèches en traits pleins, un transfert
d’électrons. Dans ce dernier cas, quelques auteurs ont conclu que des cytochromes seraient les partenaires
capables de recevoir et de transmettre des électrons faisant ainsi voyager le signal. Cependant si cela se produit il
faut mettre dans le jeu un composé capable de réduire le FADH- qui a été alors oxydé, sinon tout ce système ne
pourrait fonctionner qu’une seule fois ! Le NADH produit par la respiration pourrait-il être un candidat à cette
fonction éventuelle ?

Cry1 se trouve principalement dans le noyau à l’obscurité, mais surtout dans le cytoplasme à la lumière, tandis
que cry2 est constitutivement dans le noyau.
Il y a un troisième cryptochrome, cry3, dont la structure est un peu différente de celle de cry1 et cry2. Il
est formé de la partie permettant l’accrochage du FAD, et d’un peptide de transit permettant son adressage dans
le chloroplaste ou la mitochondrie.

L’une des fonctions des cryptochromes est de contrôler le développement lors de la germination. Ils inhibent
l’élongation de la tigelle, stimulent l’expansion des feuilles, induisent le développement des chloroplastes. Tout
ceci se fait en conjonction avec les phytochromes. Pour ce faire, ils interviennent à différents niveaux : en
stimulant dans le cytoplasme des messagers secondaires impliqués dans des voies aboutissant à la régulation de
l’expression des gènes, ou en altérant eux-mêmes l’expression des gènes (au niveau de la transcription et de la
traduction).
Par exemple, ils peuvent activer rapidement des canaux anioniques, ce qui provoque une dépolarisation
du plasmalesme et une inhibition de l’élongation cellulaire. Ils peuvent aussi utiliser le calcium comme messager
secondaire : la lumière bleue qui active la chalcone synthase (enzyme clef de la synthèse de flavonoïdes) sur une
culture de cellule d’A thaliana provoque un efflux de calcium parallèle à cette activation dans le cytoplasme.

Cry1 et Cry2 interagissent aussi directement avec COP1 dans le noyau, par l’intermédiaire de leur unité CT,
supprimant son action à la lumière. Ceci se fait probablement en 2 temps : le premier est l’absorption de la

Gabriel Cornic, Mars 2007 19


lumière sur PTY qui modifie la conformation de CT ; le second, rendu possible par ce changement de
conformation, est la phosphorylation de CT entraînant l’inactivation de COP1.

(2)-Les phototropines.

La découverte de mutants phot d’A. thaliana ne présentant pas de phototropisme fut à l’origine de la découverte
des gènes PHOT. Les récepteurs phot1 et phot2, contrôlent le phototropisme, la migration des chloroplastes dans
les cellules, et l’ouverture des stomates qui dépend de la lumière bleue. Comme l’ont écrit Briggs et Christie
(2002), ils contribuent à optimiser la photosynthèse dans des conditions extrêmes d’éclairement.

Phototropines et ajustement à différents niveaux d’éclairement ? Le phototropisme positif est


intéressant chez les plantes ombragées à la recherche de trouées de lumière dans la canopée qui les recouvre. De
même l’accumulation des chloroplastes à la surface des cellules photosynthétisantes perpendiculairement au
rayonnement incident, augmente l’interception de la lumière, tandis que l’ouverture très rapide des stomates au
petit matin, lorsque la lumière du jour contient beaucoup de bleu, permet très vite de mettre en route
l’assimilation du dioxyde de carbone. Sous forts éclairements, le phototropisme négatif et le changement
d’orientation des chloroplastes, qui se placent alors parallèle au rayonnement incident, peuvent être considérés
comme protégeant l’appareil photosynthétique des effets négatif des lumières trop élevée (voir plus bas section
concernant la photoinhibition).
Dans une publication récente, Takemiya et al. (2005) montrent que les phototropines (phot1 et phot2,
excitées par le bleu contribue à l’accroissement de la biomasse fraîche d’A thaliana.
Cultivées sous lumière rouge (dont la densité de flux quantique est de 25 µmol m-2 s-1), le type sauvage,
les mutants phot1 et phot2 et le double mutant phot1 et phot2 ne présentent aucune différence de croissance.
Par contre si l’on ajoute à cette lumière rouge un faible flux quantique de lumière bleue (0.1 µmole m-2 s-1) on
constate que seules les plantes portant le gène PHOT1 (le type sauvage et les mutants phot2) ont une croissance
plus élevée. Lorsque le flux quantique de lumière bleue durant la croissance est multiplié par 10 (1µmoles m-2 s-
1
) la croissance est aussi stimulée chez les plantes portant le gène PHOT2 (type sauvage, phot1 et phot2, mais
pas le double mutant photIphot2). Les auteurs concluent que les 2 phototropines sont impliquées dans la
croissance, qu’elles ont probablement la même fonction dans ce domaine mais que la sensibilité de phot1 est
plus grande que celle de phot2. Les résultats sont similaires lorsque les cultures se font sous une lumière rouge
de densité de flux quantique de 75 µmoles m-2 s-1. La lumière bleue stimule la croissance des plantes faible
lumière en contrôlant et en intégrant des réponses qui optimisent leur fonctionnement dans ces conditions.

Structure. Les phototropines sont des protéines de 120 kDa environ dont la partie N-terminal porte le
chromophore. La partie C-terminal présente une activité phosphokinase. A l’obscurité, elles sont localisées dans
la membrane plasmique. Le récepteur phot1 à une masse molaire un peu supérieur à celle de phot2.
Les deux phototropines ont chacune :

Fig.LU17. Représentation
LOV1 LOV2 Kinase
schématique de la structure de phot1
et phot2. Phot1 a une masse
moléculaire plus grande que celle de
phot1 phot2. Tous les deux contiennent deux
domaines LOV1 et LOV2 auxquels se
trouvent liés de façon non covalente
Phot2 deux molécules de FMN. Noter que
les molécules ont chacune un
domaine ave une activité
phosphokinase (d’après Briggs et
Christie, 2002)

(1)-deux domaines LOV (Light, Oxygen, Voltage), LOV1 et LOV2 (FigLu17). Un domaine LOV est constitué
d’une centaine d’acides aminés et montrent des similarités de séquence avec une famille de protéines impliquées
dans des processus de signalisation des Archea aux mammifères. Ces protéines peuvent être régulées par la
lumière, l’oxygène ou le voltage (charges électriques de la membrane dans laquelle elle se trouve incluse), d’où
leur nom. Une molécule de FMN (Flavine adénine mononucléotide) est liée à chacun de ces deux domaines

Gabriel Cornic, Mars 2007 20


LOV de façon non covalente. L’absorption de la lumière bleue par la FMN provoque la formation d’une liaison
covalente entre elle et une cystéine très conservée du domaine LOV (Fig.Lu18). Cette réaction implique la
présence d’un donneur de protons dont l’identité reste à confirmer.
(2)-Un domaine phosphokinase qui permet la phosphorylation de protéines

Fig.Lu18. Réaction impliquant la FMN liée aux domaines LOV lors de l’absorption de la lumière bleue. La partie active
de la FMN se trouve liée de façon covalente à une cystéine très conservée dans le deux domaines LOV. Cela se fait
après protonation de la molécule à partir d’un donneur X .Voir le chapitre « transfert d’électrons dans la membrane du
thylacoïde » pour la structure complète de la FMN. (D’après Briggs et Christie, 2002)

Le changement de conformation qui résulte de l’absorption de la lumière bleue, entraîne l’activation de la kinase,
qui phosphoryle alors le récepteur lui-même. Les phototropines activées par la lumière se détachent de la
membrane plasmique et, dans le cytoplasme, se lient rapidement à des protéines de type 14-3-3. Ce type de
protéines favorise la régulation de l’activité des cibles auxquelles elles se lient, ou bien modifient les interactions
qu’elles peuvent avoir avec d’autres protéines.
Une H+-ATPase cytoplasmique est très rapidement phosphorylée après l’activation de phot1. Cette
activation ne se fait pas en présence d’inhibiteur de flavoprotéines suggérant que la phototropines est bien la
phosphorylase impliquée dans cette réaction. D’autres protéines sont probablement incluses dans les voies de
signalisation branchées sur les phototropines. Certaines n’ont pas de fonctions connues, d’autres, comme les
transporteurs d’auxine, dans la membrane, sont certainement impliquées dans les réponses de tropisme qui
impliquent en particulier un changement de répartition de cette hormone dans l’organe placé dans un
environnement lumineux dissymétrique.
LOV1 et LOV2 ont des fonctions différentes (Chistie et al., 2002). Chez phot1, LOV2 est le récepteur
principal de la lumière bleue et joue le premier rôle dans l’autophosporylation de la molécule. LOV2 est à lui
seul capable de déclancher le phototropisme positif de l’hypocotyle chez A. thaliana, tandis que LOV1 seul ne
peut accomplir cette fonction.

Gabriel Cornic, Mars 2007 21


2- Plantes d’ombre et de lumière. Les espèces végétales ont colonisé des habitats variés. En particulier,
certaines d’entre elles se trouvent dans des milieux ouverts où elles reçoivent la pleine lumière, tandis que
d’autres se trouvent dans les sous-bois où elles ne reçoivent qu’une lumière fortement atténuée par la canopée
qui les domine. Les premières sont dites "plantes de lumière" et les secondes "plantes d’ombre". Entre ces deux
extrêmes il y a des espèces qui tolèrent plus ou moins l’ombrage.
Dans une zone géographique donnée, on peut classer les espèces selon leur tolérance à l’ombrage en
calculant le rapport TO de leur fréquence sous couvert (Nc) à leur fréquence dans tous les autres sites (Nt)
(Grime, 1988) :

TO = NC/NT

Le TO varie de 0 à l’infini. Par exemple, une espèce dont la fréquence est faible sous couvert et forte dans les
autres sites a un TO faible. A contrario celle dont la fréquence est forte sous ombrage et faible dans les autres
sites a un TO élevé. TO = 1 pour l’espèce qui vit aussi bien sous ombrage qu’en pleine lumière. Le tableau TL3
donne le TO pour un certain nombre d’espèces de la flore anglaise.

Tableau 3. Tolérance d'espèces végétales à l'ombrage mesurée par l'indice de Grime : To, Fréquence de l'espèce
sous couvert/fréquence dans tous les sites de la même région (d'après Johnson et al. 1993).

_______________________________________________________
Espèces Tolérance à l'ombrage
__________________________ ___________________________
Chenopodium album 0
Senecio squalidus 0
Trifolium repens 0,10
Arrhenatherum elatius 0,64
Lapsana communis 0,91
Fragaria vesca 1,25
Holcus mollis 1,95
Hedera helix 2,67
Brachypodium sylvaticum 3,03
Stellaria holostea 4,29
_______________________________________________________

Les plantes présentent deux réponses extrêmes à l’ombrage : une réponse d’évitement et une réponse de
tolérance. La réaction d’évitement chez les dicotylédones se caractérise par une élongation rapide des
entrenœuds aux dépends du développement foliaire. Les plantes chez lesquelles se manifeste cette réaction
dominent les peuplements, avec leurs feuilles jeunes bien exposées à la lumière : l’élongation rapide tend à
maximiser l’utilisation de la lumière. L’évitement se rencontre chez les espèces pionnières (qui colonisent les
milieux ouverts). Elles ont habituellement une croissance rapide.
Les plantes qui tolèrent l’ombrage axent leur stratégie sur la conservation et l’utilisation des ressources.
Elles ont généralement une croissance faible. Elles présentent à l’ombrage des modifications au niveau foliaire
qui tendent à optimiser l’assimilation photosynthétique du carbone.
Quoiqu’il en soit, la plupart des végétaux (y compris les espèces qui ont la capacité d’éviter l’ombrage)
possèdent une grande plasticité qui leur permet de supporter des ensoleillements très variés. Cette plasticité se
retrouve à la fois au niveau de la plante et de la feuille. Ainsi Alocasia macrorhyzia, plante d’ombre que l’on
trouve dans les sous bois des forêts tropicales du Queensland, par exemple, et qui vivent très bien sous une
DFQP de 5 à 10 μmoles photons m-2 s-1, peuvent se rencontrer dans les jardins botaniques australiens, subissant
des DFQP de 1500 μmoles photons m-2 s-1 ou plus. Certaines plantes se trouvent sous ombrage parce qu’elles ne
supportent pas la compétition interspécifique à laquelle elles sont soumises en milieux découverts.

a-Variation de l’assimilation nette de CO2 en fonction de la lumière de feuilles de plantes d’ombre


et de lumière. Les caractéristiques de la réponse photosynthétique à l'éclairement (Λ, valeurs de la respiration et
de l'éclairement pour lequel la photosynthèse est saturée) des plantes d'ombre et des plantes de lumière sont
telles qu'elles permettent la meilleure exploitation possible des ressources lumineuses dans leurs conditions de
croissance. Pour ces raisons, ces caractéristiques sont considérées comme des caractères adaptatifs. Tous les
caractères qui contribuent à augmenter l'activité de la photosynthèse de feuilles qui se développent sous un
éclairement donné sont d’ailleurs vus comme adaptatifs.

Gabriel Cornic, Mars 2007 22


La Figure Lu19 illustre les différences classiquement observées dans la réponse de la photosynthèse
foliaire à la lumière entre les plantes d’ombre et les plantes de lumière. Elle montre les cas d'Encelia californica,
plante du désert de la mort californien qui est toujours exposée au soleil, de Nerium oleander (le Laurier rose)
qui pousse en touffe également au soleil mais qui reçoit en moyenne un éclairement plus faible que la plante
précédente, et de Cordyline rubra, vivant dans les sous-bois tropicaux sous des éclairements très faibles. Dans
ces trois exemples les mesures ont été faites sur des plantes prises dans leur milieu d'origine (d’après Björkman,
1981). La plante d'ombre se distingue des plantes de lumière par les points suivants :
Une respiration plus faible;
Un point de compensation pour la lumière, Λ, atteint pour des éclairements plus faibles.
Une valeur de A plus petite au plateau de saturation.
Un éclairement plus faible nécessaire pour atteindre le plateau de saturation.

Figure Lu19. A : Relations entre l’assimilation nette de


A B CO2 de feuilles intactes et la densité de flux quantique
1
A, (μmoles CO2 m-2 s-1)

A, (μmoles CO2 m-2 s-1)


40 15 mesurées chez Encelia californica et Nerium oleander
(plantes de lumière, 1 et 2 respectivement) et Cordyline
30 rubra (plante d’ombre, 3). Les mesures sont faites dans
2 10
des conditions normales de CO2 et de O2 à des
20 températures foliaires variant de 25 à 30 °C. B :
5 Agrandissement de la Figure Lu15A dans la zone des
faibles éclairements pour mettre en évidence les valeurs
10
3 0 du point de compensation pour la lumière et de la
respiration à l’obscurité chez ces trois plantes. (D’après
0 Björkman, 1981).
-5
0 1000 2000 0 200 400
DFQP, (μmoles m-2 s-1)

Par contre ΦmCO2 est le même dans les trois cas : le niveau de l’éclairement de croissance ne modifie pas les
besoins énergétiques de la fixation du CO2. La Fig. LU19B montre que l’assimilation du dioxyde de carbone
par la feuille de Cordyline rubra est positive à partir d’une DFQP de 10 μmoles photons m-2 s-1, tandis que celle
des feuilles de N. oleander et de E. californica est encore largement négative dans cette zone d’éclairement. La
plante d’ombre exploite mieux les faibles éclairements que les plantes de soleil.
La DFQP nécessaire pour atteindre le plateau de saturation est la plus élevée chez les plantes de lumière
et correspond chez les plantes d’ombre à un éclairement déjà largement saturant. Les plantes de lumière peuvent
donc utiliser les forts éclairements qui prévalent couramment dans leur milieu. A partir d'une DFQP de 200
μmoles photons m-2 s-1 la courbe de Cordyline rubra a été continuée en pointillé pour indiquer qu'au-delà de
cette valeur il est impossible chez cette plante d'obtenir une absorption stationnaire de CO2 : l'appareil
photosynthétique est en effet alors endommagé par l'excès de lumière (voir plus bas, la photoinhibition).

A B
30
15 Figure Lu20 : A : relations entre l’assimilation nette
A, (μmoles CO2 m s )

A, (μmoles CO2 m s )
-1

-1

de CO2 de feuilles intactes et la densité de flux


-2

-2

quantique mesurées chez Atriplex triangularis


20 10 cultivées en conditions contrôlées sous un DFQP de
920 (tirets) ou de 92 µmoles m-2 s-1(trait plein).
Mêmes conditions expérimentales que
5
10 précédemment. B : Agrandissement de la Figure
Lu20A dans la zone des faibles éclairements pour
0 mettre en évidence les valeurs du point de
0 compensation pour la lumière et de la respiration à
l’obscurité chez les plantes issues des deux
0 1000 2000 0 200 400 conditions de culture. (D’après Björkman, 1981).
DFQP, (μmoles m-2 s-1)

Gabriel Cornic, Mars 2007 23


Les caractéristiques "ombre" et "lumière" s'observent aussi sur des feuilles similaires d'une même espèce
cultivée sous faible ou sous fort éclairement. Ceci est illustré ici par la Fig. Lu20 montrant la réponse de feuilles
d'Atriplex hastata dont la croissance s'est faite sous 92 ou 920 μmoles photons m-2 s-1 (d’après Björkman, 1981).
La photosynthèse des Atriplex cultivées sous ombrage utilise efficacement les éclairements faibles mais ne
"supporte" pas les éclairements forts (partie en pointillés de la relation A/DFQP, Fig.Lu20A). Cet exemple
illustre la plasticité des végétaux : ils peuvent adapter leur fonctionnement aux conditions qui prévalent durant
leur croissance.

b-Changements au niveau des chloroplastes et complexité de la réponse aux modifications


durables de l’éclairement.

(1)-La réponse à un changement durable de l’éclairement est une réponse intégrée.


Les modifications vues au niveau de la photosynthèse foliaire sont le résultat de transformations
profondes dans les chloroplastes. Ces transformations montrent que la réponse "ombre" et "lumière" est une
réponse intégrée : elle implique la totalité de l'appareil photosynthétique dont les différents éléments se
modifient en ajustant leur fonctionnement les uns par rapport aux autres.
Les transformations qui affectent les plantes d'ombre contribuent d’abord à augmenter leurs possibilités
de capture de l'énergie. Par rapport aux plantes de lumière, elles présentent en effet :
-des chloroplastes généralement plus volumineux,
-des thylacoïdes qui forment un système relativement plus développé dans le stroma (rapport volume du
stroma à celui des thylacoïdes plus petit)
-des empilements granaires beaucoup plus importants. Il peut y avoir jusqu'à 100 empilements par
granum. La concentration de chlorophylle (par chloroplaste) y est par conséquent plus élevée (la chlorophylle ne
se trouve que sur la membrane du thylacoïde).
-un rapport Chl a/b est plus bas. Il est typiquement compris entre 1,8 et 2,5 chez les plantes d'ombre et
entre 2,5 et 4,0 chez les plantes de soleil indiquant qu’il y a relativement plus de Chl.b que de Chl.a chez les
plantes d'ombre. On sait qu'il n'y a pas de Chl.b dans les centres réactionnels, celle-ci ne se trouvant que dans les
antennes collectrices. On conclut donc à un développement relativement plus important des antennes chez les
plantes d'ombre. Cette conclusion est cohérente avec le grand développement des empilements granaires dans
ces conditions, puisque les accolements de la membrane du thylacoïde se font au niveau des antennes du PSII.

Sous un ombrage naturel, la lumière est enrichie en rouge sombre : le PSI est donc préférentiellement excité.
L’augmentation de la taille des antennes PSII tend à ré-équilibrer le fonctionnement de la chaîne
photosynthétique, en forçant l’énergie vers le centre le plus défavorisé par le climat lumineux.
Les activités chloroplastiques liées à la fourniture de NADPH et d’ATP et concernant la fixation du CO2 vont
diminuer chez les plantes d’ombre, s’ajustant ainsi aux faibles flux quantiques disponibles dans leur milieu.

Comme on peut s’y attendre, compte tenu des faibles flux quantiques disponibles dans leur milieu (peu d’énergie
disponible), l'activité de la chaîne de transport d'électrons chez les plantes d’ombre (mesurée par exemple par la
réduction du NADP+) est réduite. L'activité de la Rubisco et celles des autres enzymes qui permettent le
P

déroulement du CPRC/O se callent évidemment sur la disponibilité en pouvoir réducteur et en ATP (comme le
montre la Fig.Lu19 l'assimilation photosynthétique du dioxyde de carbone par les feuilles d'ombre est également
faible). De toute façon, le rapport du volume du stroma à celui du thylacoïde est beaucoup plus faible chez le
chloroplaste : si cela permet effectivement la mise en place d'un système développé de capture de la lumière,
cela ne laisse guère d'espace pour les enzymes du cycle de réduction du carbone.

(2)-Un exemple : le Pois cultivé sous différents niveaux d’ombrage.


La Fig.Lu21 résume les changements induits par l'ombrage dans le cas du pois cultivé sous plusieurs
niveaux d'éclairement (Anderson et al, 1988). Ces derniers sont repérés sur l'axe horizontal par la mesure du
rapport Chl a/b : les niveaux d'ombrage les plus élevés sont donc représentés par les données les plus à gauche
dans les graphes (valeurs les plus petites du rapport Chl a/b).
Les trois premiers graphes de cette Figure se rapportent aux changements dans le système de capture de
la lumière. On voit dans ce cas que la quantité de Chl. n'est pas modifiée avec le niveau de l'ombrage (A) : ici, le
nombre de chloroplastes diminue avec le niveau d'éclairement pendant la culture (ce n'est pas toujours le cas), ce
qui maintient à peu près constant la teneur en chl exprimée par rapport à la surface de la feuille. (B) Sous
ombrage, effectivement plus de chlorophylle est allouée au LHCII dont l'importance relative par rapport aux
centres réactionnels PSII est alors la plus grande (C). L’augmentation observée dans C quand le rapport Chl a/b
diminue est due aussi dans ce cas à une diminution des centres PSII.
Les autres graphes de la même figure décrivent les changements d'activité de la chaîne photosynthétique
de transport d'électrons. Cette activité augmente avec le rapport Chl a/b (G). Et ceci est bien corrélé avec un

Gabriel Cornic, Mars 2007 24


accroissement de la quantité de plastoquinones (D) de cyt.f , de sites permettant la liaison de l'atrazine (E) et de
l'activité du complexe CF1 de l'ATPase (F). L'atrazine est un herbicide qui s'accroche sur la protéine D1 du centre
PSII à la place de la quinone QB qui récupère les électrons venant de QA; elle bloque ainsi le transfert
d'électrons dans la membrane du thylacoïde. L'augmentation du nombre de sites permettant l'accrochage de
l'atrazine signifie donc que les quantités de protéine D1 et de quinones Q pouvant s'accrocher au PSII
augmentent. Cela indique globalement qu’il y a une augmentation des PSII. Pris ensemble les faits ci-dessus
montrent que les changements dans la membrane du thylacoïde expliquent bien une capacité accrue du transfert
d'électrons lorsque la lumière de croissance est plus élevée. Cela permet une réduction plus importante de
NADP+ et une synthèse plus forte d'ATP qui s'ajustent ainsi à la demande du métabolisme carboné causée par
l'augmentation de la synthèse des enzymes impliqués dans le CPRC/O dans ces conditions.

Contenu en Cyt.f, Q et PQ, (mmoles mole Chl)


90
-2

0.5 A D
Chl. content
mmoles m

PQ

-1
0.4 80
0.3 70
0.2 60
LHCII, (%Chl.)

60 B E 5
56
Q
52
48 4
44
3
C
-1

8
(coeur PSII)

2
LHCII

6 Cyt.f

4 1
80 400
X Axis G F
Activité CF1
MV

300
60
200
40
H2O

100
2.0 2.4 2.8 3.2 2.0 2.4 2.8 3.2

[Chl.a]/[Chl.b]

Figure Lu21. Corrélations entre le rapport Chl. a/b et les concentrations de quelques
composants ainsi que de quelques activités de la membrane de thylacoïdes de Pois cultivés sous
différents éclairements. Un faible rapport Chl. a/b indique des individus cultivés sous ombrage.
La DFQP maximum dans ces études est d’environ 400 µmoesl m-2 s-1 et la DFQP minimum
d’environ 60 µmoles m-2 s-1 (d’après Anderson et al., 1988).

Les caractéristiques photosynthétiques peuvent basculer très rapidement du côté "ombre" ou "lumière"
lorsque l'éclairement est modifié dans l'environnement. Ainsi lorsque du Pois cultivé sous une DFQP de 60 μmol
m-2 s-1 est transféré sous une DFQP de 390 μmol m-2 s-1 l'assimilation photosynthétique du CO2 augmente
rapidement pour doubler en une semaine. Dans cette même période, exprimés par rapport à la chlorophylle, la
quantité de sites sur lesquelles l'atrazine peut se lier, et de cyt.f sont multiplier par 1,7 environ. Le tout est
accompagné d'un accroissement des activités de l'ATPase et de la Rubisco dans les mêmes proportions et du
passage de 2,8 à 3,3 du rapport Chl a/b. La modification du climat lumineux a donc rapidement entraîné une
modification profonde de l'organisation du chloroplaste (Chow et Anderson, 1987). Cette acclimatation demande
non seulement de l'énergie mais aussi des matériaux de base puisés dans l'environnement. On montre qu'elle ne
peut se faire lorsque les plantes sont cultivées sur un substrat où l'azote est très limitant. Enfin, la même feuille
peut posséder à la fois des chloroplastes d'ombre et des chloroplastes de lumière : si l'on ombrage une partie
d'une feuille laissant l'autre partie exposée au plein éclairement, les chloroplastes se trouvant dans la partie
ombragée acquièrent des caractéristiques d'ombre.

Gabriel Cornic, Mars 2007 25


c- Variété de la réponse des plantes à l’ombrage et effet du rouge sombre dans l’ombrage naturel
sur la teneur en centres PSII et PSI. Murchie et Horton (1998) étudient 4 espèces dont la tolérance à
l’ombrage est très différente : Brachypodium sylvaticum Beauv. (plante bien associée à l’ombrage), Digitalis
purpurea L., Chamerion angustifolium L. (plantes moyennement associées à l’ombrage) et Plantago lanceolata
L. (plante faiblement associée à l’ombrage).
Ces plantes sont cultivées sous un niveau de lumière blanche (LB, dont le maximum de flux quantique
se trouve entre 400 et 700 nm) élevé (LBE ; DFQP : 300 µmoles m-2 s-1) ou faible (LBF ; DFQP : 50 µmoles m-
2 -1
s ). La lumière blanche « faible » peut être enrichie (LBF-RS) ou non (LBF) en lumière rouge sombre
(longueurs d’onde au-dessus de 700nm).
Le tableau Lu6 montre une grande variété des réponses de la teneur en Chl, du rapport Chl. a/b et de
Amax (photosynthèse mesurée par le dégagement de O2 en lumière et à CO2 saturant, utilisée ici comme indice
de la modification de la réponse de la relation entre la photosynthèse et la lumière, voir Fig.19). Les
changements induits par l’ombrage sont dépendants de l’espèce. Ainsi, chez B. sylvaticum (fortement associé à
l’ombrage), la teneur en Chl. augmente très substantiellement sous LBF, tandis qu’elle n’est pas modifiée sous
LBF-RS ; par contre, elle présente peu de variations chez D. purpurea et C. angustifolium, tandis qu’elle est la
plus faible dans la condition LBF-RS chez P. lanceolata (faiblement associé à l’ombrage).
On note en particulier que Amax et Chl a/b varient peu chez B sylvaticum (faible réaction à l’ombrage)
et que les faibles modifications rapport Chl a/b chez P.lanceolata sont accompagnées par des changements de
grandes amplitudes de Amax. La réponse de ces plantes est donc différente à cet égard de celle présentée
Fig.Lu21.

Ce tableau illustre pourquoi les effets de l’ombrage reportés dans la littérature peuvent sembler parfois un peu
contradictoires : les résultats de l’acclimatation dépendent de l’espèce et du climat lumineux. Cependant on note
dans tout ceci, que la réponse du rapport PSII/PSI est remarquablement constante. Chez toutes les plantes
examinées il est le plus faible sous ombrage (comparer LBE versus LBF), et, sous ombrage, il est le plus élevé
lorsque la lumière est enrichie en rouge sombre (LBF versus LBF-RS).

Tableau LU6. Contenu en Chl.(mg m-2), rapport Chl. a/b, Amax (µmoles O2 m-2 s-1) et rapport PSII/PSI mesurés
chez différentes plantes cultivées sous lumière blanche élevée (LBE), lumière blanche faible (LBF) et lumière
blanche faible avec un appoint de rouge sombre (LBF-RS). Les plantes diffèrent par leur degré d’association à
l’ombrage : de faiblement associée (P. lanceololata) à fortement associée (B. sylvaticum). (D’après Murchie et
Horton, 1998).

P. lanceolata C. angustifolium D. purpurea B. sylvaticum


Chl. LBE 272 ± 26 127 ± 11 279 ± 10 144 ± 17
LBF 236 ± 34 165 ± 7 222 ± 8 246 ± 24
LBF-RS 135 ± 11 130 ± 9 282 ± 14 143 ± 11

Chl a/b LBE 3,64 ± 0,07 4,21 ± 0,15 3,87 ± 0,06 3,41 ± 0,12
LBF 3,69 ± 0,08 3,73 ± 0,10 3,42 ± 0,08 3,38 ± 0,08
LBF-RS 3,93 ± 0,17 3,00 ± 0,08 3,19 ± 0,05 3,36 ± 0,09

Amax LBE 21,0 ± 1.5 8,70 ± 0,80 11,9 ± 1,3 5,40 ± 0,50
LBF 6,2 ±0,09 6,04 ± 1.58 6,60 ± 0,6 3,78 ± 0,19
LBF-RS 4,4 ± 0,6 2,20 ± 0,40 7,00 ± 1,0 4,65 ± 0,50

PSII/PSI LBE 2,08 2,83 1,83 1,93


LBF 1,56 1,36 0,90 1,21
LBF-RS 1,85 1,72 1,79 1,56

Cet effet du rouge sombre sur la quantité de PSII et de PSI a déjà été décrit au chatpitre « transfert
d’électron dans la membrane thylacoïdienne » ; Il est probablement lié à l’état d’oxydation du pool des
plastoquinones qui module l’expression du génome (via un système sensible à l’état redox : SSER). Il est en
accord avec l’idée d’un rééquilibrage dans les conditions naturelles en faveur du PSII qui, sous ombrage, se
trouve dans un climat lumineux qui ne lui convient pas parfaitement. Cela montre aussi que la stœchiométrie des

Gabriel Cornic, Mars 2007 26


photosystèmes est contrôlée par le métabolisme. En effet l’état redox du pool des plastoquinones est contrôlé en
partie par la capacité du métabolisme photosynthétique à utiliser l’énergie captée par les photosystèmes.

d- La réponse des plantes à l’ombrage n’est pas linéaire. La variété des réponses à l’ombrage qui
sont rapportées dans la littérature peut encore avoir une autre origine. En effet, la quasi-totalité des études sur
l’acclimatation aux niveaux de lumière a été faite habituellement en n’utilisant que deux niveaux contrastés
d’éclairement : l’un représentant les forts éclairements et l’autre les faibles. Il n’existe pratiquement pas de
résultats montrant comment une même plante s’acclimate à des niveaux de lumière allant d’un fort ombrage à un
plein éclairement (sauf cependant le travail illustré Fig.21)
Récemment, Bailey et al. (2001) publient les résultats d’une étude montrant comment A. thaliana
s’acclimate à des DFQPs de croissance allant de 35 à 600 µmoles m-2 s-1. Les paramètres examinés sont les
suivants Amax (défini plus haut, tableau Lu6), le rapport Chl a/b, le contenu de Rubisco exprimé par unité de
Chl, le contenu en PSII et PSI, ainsi que la variation de quelques polypeptides appartenant à ces photosystèmes
et à leurs antennes. Comme le montre la Fig.Lu22A l’augmentation de Amax et du rapport Chl. a/b n’est pas
linéaire avec l’éclairement de croissance. Les changements entre 200 et 400 µmoles m-2 s-1, sont faibles voire
inexistants. Ainsi le rapport Chl a/b passe de 3 chez les plantes cultivées à 35 µmoles m-2 s-1 à 3,5 chez celles
cultivées sous 200 µmoles m-2 s-1. Il conserve la même valeur chez les cultures sous 400 µmoles m-2 s-1, puis
augmente ensuite jusqu’à 4,8 environ lorsque la DFQP de croissance est de 600 µmoles m-2 s-1. Les changements
en fonction de l’éclairement de croissance des contenus en PSII et du rapport PSII/PSI ont la même allure. Le
contenu en PSI ne change pas de 600 à 100 µmoles m-2 s-1, par contre, sa valeur est multipliée par deux chez les
plantes croissant sous 40 µmoles m-2 s-1 (Fig.Lu22B). Le contenu en Rubisco suit les mêmes variations que celle
du rapport Chl a/b.

Figure Lu22. A : variation en fonction de l’éclairement de croissance de Amax (● ; le dégagement de O2 lorsque


la teneur en CO2 est saturante) du rapport Chl a/b (○), B : des contenu PSII (○) et PSI (●) et du rapport
PSII/PSI. La plante utilisée est Arabidopsis thaliana (d’après Bailey et al. 2001)

120
A 5.0
Amax (µmoles O 2 m -2 s -1 )

100

4.5
80
Chl. a/b

60 4.0

40 3.5

20
3.0
B
Contenu en photosystèmes

8 8
(mmoles mole chl-1 )

6 6
PSII/PSI

4 4

2 2

0 0
0 100 200 300 400 500 600
DFQP de croissance (µmoles m-2 s-1)

Il existe donc deux types de réponse d’A thaliana à l’éclairement de croissance : une réponse qui se
produit à basse lumière et une autre qui a lieu lorsque l’éclairement est élevé. L’acclimatation à l’éclairement de
croissance est donc plus complexe que ce que l’on pouvait suspecter. D’autres auteurs ont constaté, sur le Pois,

Gabriel Cornic, Mars 2007 27


que Amax et le rapport Chl a/b présentaient une relation biphasique avec l’éclairement de croissance : une
augmentation d’abord rapide suivi d’un accroissement beaucoup plus lent. Il est possible dans ce cas que la
gamme d’éclairements utilisés n’ait pas été assez étendue pour voir apparaître, comme dans le cas d’A. thaliana,
les réponses à faibles et fortes lumières.
La variabilité des résultats concernant l’acclimatation à l’ombrage reportés dans la littérature (voir
tableau Lu6) pourrait être due aussi à la réponse non linéaire des critères utilisés (Amax, Chl.a/b, etc..) à
l’éclairement de croissance.

Bailey et al (2001) notent aussi des changements au niveau des antennes collectrices, du PSII notamment. Ces
modifications, rapportées par centre PSII, sont comme suit :

(1) Une diminution avec l’augmentation de l’éclairement de croissance de la teneur (exprimée par PSII)
3 polypeptides associés à l’antenne majeure du PSII (LHCIIb). Avec :
la diminution du Lhcb3, faible et graduelle,
la diminution du Lhcb1, très forte et terminée lorsque la DFQP de croissance est de 400 µmoles m-2 s-1 ;
la variation du Lhcb2 intermédiaire avec une forte diminution qui s’arrête lorsque DFQP de croissance
est de 200 µmoles m-2 s-1.

Cela rend compte principalement de l’augmentation du rapport Chl a/b chez les plantes de lumière et montre
l’étendue et la complexité des changements dans le système de capture de l’énergie.

(2) Le contenu en Lhcb5 (CP 26) et Lhcb6 (CP 24) ne varient pas entre 400 et 100 µmoles m-2 s-1, mais
est multiplié par 2 à 35 µmoles m-2 s-1, et divisé par 2 sous 600 µmoles m-2 s-1. On pense en particulier que ces
deux polypeptides se trouvent à raison d’une unité par centre réactionnel. On doit donc admettre, lorsque la
lumière de croissance est faible, qu’il pourrait y avoir des PSII particuliers, sans que l’on sache où se placent les
Lhcb6 et Lhcb5 supplémentaires (Bailey et al. 2001). Comparativement Lhcb4 (CP29) varie peu.

5- Les signaux qui gouvernent la réponse ombre/lumière.

a-Les phytochromes et un cryptochrome (CRY1) module l’acclimatation mais ne joue pas le rôle
« d’interrupteur général » dans le processus. Certains ont supposé l'intervention de phytochromes dans
l’acclimatation des plantes au niveau d’éclairement. La lumière des sous bois est en effet relativement enrichie
en rouge sombre. Cependant, on sait depuis longtemps que des réponses "ombre et lumière" peuvent être
obtenues expérimentalement sans modification de la qualité de la lumière : on fait la comparaison, toutes choses
étant égales par ailleurs, entre des plantes cultivées en pleine lumière et des plantes cultivées sous écrans neutres
(qui ne modifient pas la composition spectrale de la lumière).
Le problème a été abordé sur A. thaliana en utilisant des plantes présentant des mutations affectant les
phytochromes, les cryptochromes et certains gènes dont les produits sont impliqués dans la transduction des
signaux lumineux (Walters et al, 1999). Les mutants utilisés dans cette étude balayent une large gamme de
dysfonctionnements :
cry1, qui porte une mutation affectant la synthèse du cryptochrome 1;
phyA et phyB respectivement dépourvus de phytochromes A et B ;
hy1, qui ne peut pas synthétiser le chromophore des phytochromes ;
hy5, chez lequel manque le facteur de transcription répondant aux phytochromes.

Si les abréviations cry (cryptochrome) et phy (phytochrome) sont immédiatement compréhensibles, hy tient pour
hypocotyle et désigne les mutants dont l’hyptocotyle reste très long à la lumière. PhyA, phyB et cry font partie
des hy.
L’acclimatation du type sauvage à une lumière faible se traduit « normalement » chez cette plante par
une diminution de la photosynthèse maximum, de la teneur en Rubisco, du rapport Chl a/b et de la concentration
en PSII. Comme on l’attend aussi, la taille des antennes collectrices augmente. Tous les mutants montrent cette
même capacité d’adaptation bien que certains d’entre eux aient des phénoptypes très différents (teneurs en
chlorophylle, Rubisco et centres PSII) de celui du sauvage. Cependant l’amplitude de variation des critères
utilisés varie d’un mutant à l’autre.
Ainsi, sous pleine lumière, le rapport Chl a/b de 4,20 ± 0,05 chez le sauvage est de 14,16 ± 1,38 chez
hy1, tandis que sous faible lumière ils sont respectivement de 3,23 ±0,05 et de 5,67 ± 0,017. L’acclimatation de
phyA à la lumière, suivie également par la mesure du rapport Chl a/b est, par contre, pratiquement identique à
celle du type sauvage. D’autres observations, faites sur des mutants de tomates dépourvus de phytochrome A,
montrent également les différences attendues entre ombre et lumière lorsqu'on les cultive sous ombrage naturel.

Gabriel Cornic, Mars 2007 28


Walters et al. (1999) concluent que les principaux récepteurs n’interviennent pas directement dans la
réponse d’acclimatation. Leur intervention n’est qu’indirecte : ils contrôlent l’amplitude de la plage dans laquelle
se manifeste cette acclimatation (voir la réponse de hy1 décrite plus haut).

b-Les gènes COP/DET/FUS interviennent dans l’acclimatation. Walters et al. (1999) ont étudié
l’acclimatation d’autres mutants d’A. thaliana portant des mutations sur les gènes DET1 et COP1. Comme
l’allèle cop1 est létal, dans le cas de la mutation du gène COP, l’étude a été faite sur des hétérozygotes
COP1/cop1. De plus, comme les mutants ne sont pas disponibles sur le même écotype d’A. thaliana, les
comparaisons ont été faites en considérant les types sauvages correspondant : comparaison écotype Columbia
(col-0) versus det1(col-0) et écotype Wassiliewskija (Ws-2) versus COP1/cop1(Ws-2) (Tableau LU7).
L’écotype columbia (Col-0) s’acclimate aux faibles éclairements : Amax et Chl a/b sont les plus petits
sous faibles lumières. Par contre les individus portants la mutation det-1 ne peuvent pas s’acclimater : Amax et
Chl a/b sont les mêmes dans les deux conditions de cultures ; le phénotype par défaut est le phénotype lumière
(Amax et Chl a/b sont les plus élevés chez les mutants det1).

La situation est intermédiaire chez les individus hétérozygotes COP/cop1 (Ws-2). Ils demeurent capables de
s’acclimater, mais l’on note que Amax et Chl. a/b de COP/cop1(Ws-2) sont plus élevés que chez Ws-2 dans la
condition LF : l’amplitude de l’acclimatation a été la plus faible chez l’hétérozygote. On note enfin que Amax et
Chl. a/b sont les plus élevés chez COP/cop1(Ws-2). Pris globalement, ces résultats indique le rôle direct ou
indirect (les voies de régulation contrôlée par les gènes COP/DET/FUS, sont en partie communes avec celles
mises en œuvres lors de l’acclimatation) des gènes COP/DET/FUS dans l’acclimatation à la lumière.
Quoiqu’il en soit un phénotype lumière paraît bien être réprimé par les gènes COP/DET/FUS. Il serait là
aussi le type « par défaut ».

Tableau LU7 acclimatation de deux écotypes d’Arabidopsis thaliana l’un portant une mutation du gène DET (det1) et
l’autre, hétérozygote, portant une mutation du gène COP1, COP1/cop1. Les deux écotypes sauvages correspondant sont
respectivement Columbia (Col-0) et Wassilewskija (Ws-2). LE : lumière élevée (PFD :400 µmol m-2 s-1) ; LF : lumière faible
(PFD :100 µmol m-2 s-1) ; Amax (µmol O2 (mol Chl)-1 s-1) est mesurée lorsque la fraction molaire de dioxyde de carbone
dans l’air ambiant est saturante (d’après Walters et al., 1999).

Col-0 det1(col-0) Ws-2 COP/cop1(Ws-2)


Amax LE 87,4 ± 3,3 113,1 ± 5,1 92 ± 5,1 110,8 ± 10,2
LF 55,1 ± 1,3 119,7 ± 3,2 44,5 ± 3,3 67,5 ± 4,3

Chl a/b LE 3,77 ± 0,01 3,97 ± 0,06 4,30 ± 0,06 4,41 ± 0,05
LF 3,32 ± 0,01 4,05 ± 0,06 3,32 ± 0,03 3,44 ± 0,02

c- Malgré la réponse ombre/lumière présenté par le mutant CRY1, la lumière bleue joue quand
même un rôle dans l’acclimatation. Un rôle pour les phototropines ?
En l’absence de lumière bleue A. thaliana ne s’acclimate pas à l’ombrage : Amax et le rapport Chl a/b
ne sont pas modifiés chez les plantes cultivées sous faible éclairement rouge (au-dessus de 600 nm, sans
lumière bleue ; Walters et Horton, 1995) comme cela se produit sous une faible lumière blanche (qui contient des
radiations bleues ; voir le tableau LU7).
Ces auteurs montrent aussi que la régulation du rapport PSII/PSI dépend de la lumière bleue : en
ajoutant une faible lumière bleue à un éclairement rouge de croissance, ils provoquent une forte augmentation de
la teneur en PSII.
Il n’existe actuellement aucune expérience d’acclimatation faite sur des mutants dépourvus de
phototropines. Il est certain que de telles expériences seraient très utiles.

d-Schémas de synthèse : une hypothèse intégrant le rôle des récepteurs à la lumière. On peut
résumer l’ensemble en mettant en perspective les rôles de la lumière bleue, des gènes COP/DET/FUS et, dans les
chloroplastes, du SSER (Walters et al., 1999). La présence du SSER dans l’ensemble est indispensable, car l’état
rédox du pool des plastoquinones, ou d’autres signaux émanant de la chaîne de transfert d’électrons, modulent la

Gabriel Cornic, Mars 2007 29


synthèse des protéines directement impliquées dans la capture et la transduction en énergie chimique de la
lumière.

(1) La lumière bleue active la synthèse d’un composant du système de régulation, peut être du SSER,
dont l’expression dépend des gènes COP/DET/FUS (flèche 1 sur la Fig. 23a). Ou encore, et peut être en même
temps, les gènes COP/DET/FUS contrôlent l’activation de gènes dont les produits passent dans les chloroplastes
pour activer le SSER (flèche 2). Ces produits agiraient comme un interrupteur. On explique ainsi pourquoi la
lumière bleue est indispensable et pourquoi des mutations sur les gènes COP/DET/FUS, peuvent bloquer la
régulation redox de l’expression des gènes photosynthétiques.

NOYAU CHLOROPLASTE

COP/DET/FUS SSER

Activation de gènes

2
Produits

(2) Dans le chloroplaste, le métabolisme photosynthétique est enregistré par le SSER. Celui-ci va
envoyer des signaux pour moduler la transcription et la traduction de gènes chloroplastiques et aussi pour
interagir avec les gènes COP/DET/FUS dont certains produits vont moduler l’activité de gènes nucléaires
responsables de la synthèse de polypeptides des complexes se trouvant sur la membrane thylacoïdienne.

NOYAU CHLOROPLASTE

COP/DET/FUS SSER

thylacoïdes
Gènes

gènes
produits

Figures Lu 23 a et b. Schémas résumant les hypothèses concernant les signaux mis en jeux lors de l’acclimatation de la
photosynthèse à la lumière de croissance. Fig.15a rôle joué par la lumière bleue à travers l’activité des gènes
COP/DET/FUS. Fig.15b rôle joué par le SSER. Voir texte pour les explications.

Gabriel Cornic, Mars 2007 30


Ce qui vient d’être décrit est un système qui contrôle directement l’acclimatation de la photosynthèse. Venant
des autres récepteurs (phytochromes) et de la plante (sucres et phytohormones) existent d’autres signaux qui
agissent aussi sur les gènes COP/DET/FUS et potentiellement sur l’activité de gènes nucléaires codant pour des
protéines photosynthétiques. Cependant ces signaux ne fixeraient qu’une gamme de conditions physiologiques
dans laquelle pourrait s’exprimer l’acclimatation. Cela est conforme aux réponses d’acclimatation observées
chez les mutants Hy d’Arabidopsis par Walters et al. (1999 ; voir plus haut).

6- Évitement de l’ombrage : la perception de la proximité chez les plantes. L’évitement de l’ombrage se fait
par l’intermédiaire d’une réponse de croissance contrôlée par le rapport Rc/Rs dans la lumière ambiante. Le
rouge sombre est peu absorbé par les feuilles. Elles transmettent une partie de ce rayonnement, et sous une
canopée l’atténuation de la lumière va de pair avec son enrichissement en Rs. Elles en réfléchissent une autre
partie, se comportant à cet égard comme des miroirs. Cela se traduit par un enrichissement en Rs de leur
environnement immédiat (voir Fig.LU9).
Les plantes détectent cette augmentation de Rs et répondent à la proximité de leurs compagnes en
accélérant leur croissance en hauteur, sans être pour autant ombragées. L’élongation des entrenœuds est en effet
très sensible au rapport Rs/Rs dans la lumière ambiante. Cette réponse est contrôlée par les phytochromes. Dans
un article de revue publiée en 1981 Morgan rapporte les observations suivantes sur des plantules de Moutarde
blanche :

(1) la vitesse d’élongation est multipliée par 3 environ en ajoutant simplement du Rs (pics à 719 ou 739
nm) dans la lumière blanche que reçoivent ces plantes dans leur condition de croissance (Fig.Lu24).

(2) le temps de réponse au Rs est remarquablement court : environ 15 minutes lorsqu’il est dirigé
directement sur les entrenœuds.

(3) l’accroissement de la vitesse d’élongation est d’autant plus grand que le rapport Rc/Rs est plus faible
(augmentation de Rs), c’est à dire quand le rapport PRS/Ptot (où Ptot est la quantité totale de phytochrome) est le
plus petit.
Vitesse d'élongation (µm min )

4
-1

Figure 24. Effet d’un éclairement rouge sombre (719 nm)


3 sur la vitesse d’élongation de la moutarde blanche
(Sinapis alba L.). La plante se trouve d’abord sous une
+ Rs faible lumière blanche (DFQP = 23 µmoles m-2 s-1 avec
2 - Rs
un Rc/Rs de 0.65), à laquelle la lumière rouge sombre est
ajoutée pour 90 minutes. Durant cette période Rc/Rs =
1 0.46. (d’après Morgan, 1981)

0
0 60 120 180 240
Temps (minutes)

De plus, le même groupe de recherche (Morgan et Smith, 1979) met aussi en évidence l’existence d’une relation
linéaire entre le log10 de l’élongation des tiges chez différentes plantes et le rapport PRs/Ptot (Fig.Lu25). Les
deux points cruciaux suivants émergent.

(1) La réaction se fait lorsque PRs/Ptot varie de 0,2 à 0,8 environ. Ces valeurs sont observées pour des variations
de Rc/Rs constatées en conditions naturelles : de 0,1 environ, que l’on trouve sous ombrage profond, à 1,1,
valeur proche du maximum possible et que l’on peut mesurer sous plein éclairement (voir aussi Fig.Lu13).

(2) Le rouge sombre a un effet très marqué sur les plantes qui proviennent de milieux ouverts comme
Chenopodium album L. Sinapis alba L., Senecio vulagaris L.. Ce sont les espèces qui a priori supportent le
moins l’ombrage qui présentent la plus grande réaction d’évitement. Comme on peut s’y attendre, son effet est

Gabriel Cornic, Mars 2007 31


par contre réduit sur les plantes provenant de milieux ombragés (par exemple : Teucrium scorodonia L. et
Mercurialis perrennis L.). L’un des lieux de la perception des lumières Rs et Rc responsables de la modulation
de la vitesse d’élongation des tiges se trouve au niveau même des entrenoeuds.
Vitesse d'élongation (log10 cm j )
-1

0.10
Figure 25. Relation entre le log10 de la vitesse
0.08 d’élongation d’une tige de Chenopodium album
cultivé durant 9 jours dans un environnement
0.06 simulant l’ombrage. Les différents PRs/PTot sont
obtenus en ajoutant à la lumière ambiante
différentes densités de flux quantique de lumière
0.04
Rs. PRs/PTot est calculé à partir d’une relation de
même type que celle montrée Fig.Lu9 et établie
0.02
aussi sur des plantes étiolées (d’après Morgan,
1981)
0.00
0.2 0.4 0.6 0.8
PRs/PTot

Enfin Ballaré et al. (1990) montrent sur le terrain que les plantes ont vraiment des réactions d’évitement
contrôlées par le rapport Rc/Rs dans la lumière. Ces auteurs présentent des résultats obtenus sur des plantules
Datura ferox et de Sinapis alba cultivées en populations dont les densités ont été choisies pour que les individus
ne s’ombragent pas réciproquement (le LAI reste faible). Ils mettent autour du premier entrenœud de certains
individus un filtre qui permet l’absorption du Rs, et constatent que ces individus ont la plus faible croissance en
hauteur. Le Rs réfléchit par les feuilles est donc bien perçu par chaque plantule au niveau des entrenœuds et, qui
plus est, avant que la lumière photosynthétique ne soit réduite à leur niveau. Cette capacité de croissance en
hauteur est certainement un facteur important à prendre en considération dans les études portant sur la
compétition interspécifique. Chez les dicotylédones formant une rosette, la réponse à un accroissement du
rapport Rc/Rs dans la lumière reçue se traduit par une augmentation de la croissance du pétiole et l’adoption
d’une position érigée par les feuilles. Chez les plantes fourragères cela entraîne habituellement une réduction du
tallage accompagnée par un redressement des feuilles durant leur croissance.
Récemment Maddonni et al. (2002) ont étudié le déterminisme de l’orientation des feuilles dans une
culture de Maïs en plein champ. Dans ces cultures, le maïs est habituellement planté en rangées espacées de 70
cm environ, les plants dans chaque rangée étant distants les uns des autres d’à peu près de 20cm. Il résulte de cet
arrangement que la composition spectrale de la lumière reçue par un plant dans de telles cultures est très
hétérogène : le rapport Rc/Rs de la lumière dans la rangée est petit (beaucoup de rouge sombre relativement), car
les plantes sont serrées les unes contre les autres ; par contre le rapport Rc/Rs de la lumière entre les rangées est
plus grand (relativement moins de rouge sombre) car les rangées sont éloignées les unes des autres.
Dans cet arrangement ils constatent, chez un hybride (DK696), que l’orientation principale des feuilles
est perpendiculaire à la rangée. De plus, ils vérifient qu’un plant de cet hybride, cultivé isolément en recevant
sur un côté une lumière pauvre en Rc et riche en Rs, oriente la croissance de ses feuilles vers l’environnement le
plus riche en Rc : les feuilles « évitent » donc la lumière contenant beaucoup de Rs. La conclusion est la
suivante : les feuilles de cette variété de maïs en champs orientent leur azimut de croissance pour éviter les
feuilles de leur voisines ; cette réaction est contrôlée par le rapport Rc/Rs dans la lumière.
Ces mêmes auteurs constatent qu’un autre hybride de maïs (Exp980) ne présente pas ces réactions.
Planté en champs, ses feuilles dans une rangée restent distribuées au hasard. Cet hybride, contrairement à
DK696, montre une réduction du tallage et une augmentation de la croissance en hauteur en réponse à la
réduction de Rc dans la lumière qu’il reçoit.
Les mesures directes au champ et l’utilisation de modèles montrent que l’orientation des feuilles
perpendiculaire à la rangée entraîne un accroissement de 10% de l’interception de la lumière par un champ de
maïs. Cela se traduit généralement par un accroissement du même ordre de grandeur de la production en grains.

7- Modifications au niveau de la plante et du couvert. Le tableau LU6 montre que les caractéristiques de
l'adaptation à l'ombre et à la lumière observées au niveau de la feuille, de la plante entière et du couvert. A ce
niveau d'organisation aussi, les caractères observés sous ombrage peuvent être compris comme contribuant à
optimiser l'absorption de la lumière. Et les réactions que présentent les plantes dans ces conditions peuvent nous
faire penser, comme Pangloss, que la nature est bien faite! Leur possibilité plastique a certainement été
sélectionné par les fluctuations mêmes de l'environnement qu'elles affrontent. Les plantes peu mobiles n'ont,

Gabriel Cornic, Mars 2007 32


d'ailleurs, guère le choix : il leur faut faire de la résistance passive et se plier au mieux à leur environnement
actuel.
Sous ombrage, les plantes d'ombre investissent la matière qu'elles synthétisent de préférence dans la
fabrication des feuilles tandis qu'elles en allouent peu aux racines : les milieux ombragés sont aussi les plus
humides. Les feuilles et les rameaux latéraux sont horizontaux : ce qui permet la capture d'un maximum de
lumière. Les bourgeons axillaires ne se développent pas ou peu : les plantes sont peu touffues ce qui évite un
auto-ombrage (auto-ombrage = ombrage porté par les feuilles du sommet de la plante sur celles qui sont à la base
de la plante) excessif. Les feuilles sont minces, ce qui permet aux chloroplastes situés côté "face inférieure" de
recevoir suffisamment de lumière dans un environnement où l'éclairement est faible. Au niveau du couvert, le
LAI est plus faible permettant une meilleure pénétration de la lumière dans la végétation.
Les feuilles d'ombre ont peu, ou n'ont pas du tout, de parenchyme palissadique. Le mésophylle n'est
souvent constitué que d'un parenchyme lacuneux. Dans cette situation la diffusion des gaz à l'intérieure de la
feuille est facilitée.

Tableau Lu8. Résumé des principales différences morphologiques au niveau des feuilles, de la plante entière et des couvert
entre les plantes d'ombre et les plantes de lumière (D’après Björkman, 1981)

LUMIERE OMBRE
Au niveau de la feuille
Epaisseur Grande petite
Orientation Dressée horizontale
Densité stomatique Elevée faible
taille des stomates Petite grande
Parenchyme palissadique/Parenchyme lacuneux Elevé faible

Au niveau de la plante
Matière allouée aux feuilles Petite élevée
Matière allouée aux racines Elevée petite
Investissement dans la reproduction Elevée faible

Au niveau du couvert
LAI Elevé petit
Développement des bourgeons axillaire Grand faible
Orientation des rameaux secondaires Dressée horizontale

La plupart de ces modifications (élongation des entrenœuds, amincissement des feuilles, renforcement
de la dominance apicale et changement de la répartition de la matière synthétisée en faveur de la formation des
parties aériennes) peuvent être produite en augmentant simplement la quantité de rouge sombre dans la lumière
ambiante (faible rapport Rc/Rs) ; elles accompagnent l’augmentation de l’élongation chez les plantes qui
pratique l’évitement via la perception du Rs réfléchit par leurs voisines.

8-La vie sous ombrage : plantes en C4 vs plantes en C3. Dans des peuplements mixtes (plantes en C3 et C4
ensemble), le recouvrement et la biomasse des plantes en C4 ne commencent à décliner seulement lorsque
l’éclairement est inférieur à 50% de la pleine lumière. Dans les savanes africaines, par exemple, cette diminution
devient très importante dans les milieux où le couvert réduit l’éclairement de 70%.
De fait, les plantes en C4 sont peu nombreuses dans les sous bois, à l’exception de quelques cas
notables comme Microstegium vimineum, Poacée, et de Chaemasyce forbesii, Euprobiacée, qui se trouvent dans
les sous bois humides des forêts hawaïennes. Ces plantes sont donc capables de s’adapter à l’ombrage, et
présentent bien alors les caractéristiques de « plantes d’ombre » telles qu’elles sont décrites plus bas (Sage et
Pearcy, 2000). Ces observations indiquent que le syndrome C4 n’interdit pas l’adaptation aux faibles
éclairements de croissance et suggèrent que dans les conditions de sous bois les plantes en C3 sont de meilleures
compétitrices que les plantes en C4.

Pourquoi le seraient-elles ?
Dans les sous-bois la lumière est fortement limitante et la valeur du rendement quantique est
déterminante pour les entrées de carbone dans les plantes.
Au moins deux facteurs concourent à favoriser les plantes en C3 dans ces conditions :

(1) les sous bois sont des milieux où les températures dépassent rarement 30°C, même dans les zones
tropicales ;

Gabriel Cornic, Mars 2007 33


(2) la fraction molaire de CO2 y est élevée compte tenu de la décomposition intense de la matière
organique (feuilles mortes et détritus organiques divers) et de la faible agitation de l’atmosphère. On a pu
estimer, durant la journée, que la fraction molaire de CO2 dans la strate forestière où se trouve les plantes
herbacées et les petits arbustes pouvait être 10% plus élevée que dans l’air ambiant.

Ces deux conditions (températures et teneur en CO2 élevées) favorisent évidemment les plantes en C3 dont le
rendement quantique est alors effectivement plus élevé en moyenne que celui des plantes en C4 (voir Fig.Lu6).
Enfin les sous bois sont des milieux humides, dans lesquelles les plantes en C4 ne peuvent guère faire jouer leur
capacité à utiliser plus efficacement l’eau (Sage et Pearcy, 2000). L’évolution des plantes en C4 est relativement
récente, et peut être n’ont-elles pas eut le temps encore de s’adapter à tous les milieux.
De plus les plantes en C4 utilisent moins efficacement les taches de soleil. Leurs stomates se ferment en
effet plus rapidement lors du passage de la forte à la faible lumière, et les enzymes participant à la fixation de
CO2 se désactivent alors plus vite. Elles sont donc moins capables que les plantes en C3 de profiter du passage
de taches de lumière successives (voir plus bas la section concernant l’utilisation des taches de soleil)

9- La feuille est un milieu très hétérogène. Les analyses faites ci-dessus prennent en compte une réponse
moyenne de la feuille. Cette dernière est en fait un milieu très hétérogène. Schématiquement on distingue deux
types de feuilles.

(1) Les feuilles qui sont orientées parallèlement au sol : elles sont souvent constituées de deux
parenchymes bien différents, l’un où les cellules sont conjointes, laissant peu d’espace entre elles, l’autre, où par
contre, elles sont largement séparées. Le nom donné à ces deux parenchymes est très descriptif à cet égard :
comme on l’a déjà vu, le premier est le parenchyme palissadique et le second est le parenchyme lacuneux. Dans
ce cas la face supérieure (adaxiale) est exposée à la pleine lumière, tandis que la face inférieure (abaxiale) ne
reçoit que la lumière filtrée par le parenchyme palissadique, à laquelle s’ajoute la lumière réfléchie par
l’environnement (autres feuilles, le sol…).

(2) Les feuilles qui sont orientées verticalement au sol : elles ont souvent une structure plus homogène,
avec deux parenchymes palissadiques, un sous chaque face, et souvent un parenchyme lacuneux central, comme
c’est le cas chez les eucalyptus.

Les feuilles orientées verticalement se rencontrent plutôt chez les plantes de milieux secs et/ou de milieux très
ensoleillés tandis que les feuilles en position horizontale se trouvent plutôt à l’ombre. L’angle d’une feuille
dépend aussi de sa position dans une canopée. L’examen de 38 espèces pérennes d’Australie montrent que
l’angle de la feuille avec le sol varie entre 27 ° et 74° avec une variation considérable pour une espèce donnée
(Falster and Westoby (2003) cité par Evans et Vogelmann (2006)).

a-La réponse à la lumière de la photosynthèse d’une feuille horizontale dépend de la face qui est
éclairée. Le tournesol en particulier a des feuilles horizontales. La figure Lu26 montre la différence de réponse
de A à la DFQP lorsque la face supérieure ou la face inférieure d’une feuille de Tournesol est éclairée
(Terashima, 1986). La relation obtenue en éclairant la face inférieure est moins convexe et ne présente pas de
plateau de saturation dans la gamme des DFQPs utilisées. Terashima (1986) montre que A est identique dans les
deux cas seulement lorsque la DFQP est d’environ 4200 µmol m-2s-1 (environ 2 fois la pleine lumière solaire).

20
A (µmoles CO2 m s )
-1

15
Fig.Lu26 : relation entre A et la DFQP d’une
-2

feuille de Tournesol illuminée sur la face


10 supérieure (adaxiale) ou sur la face inférieure
(abaxiale). La température foliaire est de 25°C
et la fraction molaire du CO2 ambiant de
5
face adaxiale éclairée
450ppm (d’après Terashima, 1986)
face abaxiale éclairée
0

0 500 1000 1500 2000


-2 -1
DFQP (µmoles m s )

Gabriel Cornic, Mars 2007 34


b-Les chloroplastes d’une feuille horizontale forment une population très hétérogène. Comme le
montrent Terashima et Saeki (1983 ; Fig Lu27) la lumière arrivant sur la face supérieure des feuilles est
fortement atténuée : les couches cellulaires directement sous le rayonnement ombrageant les couchescellulaires
plus profondes. Les différentes couches de la feuille, de la face adaxiale à la face abaxiale, ne reçoivent donc pas
le même éclairement : les cellules du parenchyme lacuneux fonctionnant sous très faible lumière. Leurs
propriétés photosynthétiques sont donc très différentes des cellules du parenchyme palissadique qui reçoit plus
de lumière (voir plus haut la section plantes d’ombre et plantes de lumière). Les chloroplastes extraits d’une
feuille constituent une population très hétérogènes (voir l’analyse plus bas).
Transmission de la lumière incidente

1.2

1.0

0.8
Fig Lu27: Lumière transmise à différentes profondeurs
0.6 dans une feuille de Camellia japonica dont l’épaisseur
est de 400 µm. La feuille est éclairée sur sa face
0.4 supérieure (adaxiale) par une lumière de 680 nm
(rouge) (d’après Terashima et Saeki, 1983)
0.2

0.0
0 100 200 300 400
Distance à partir de la face supérieure (µm)

La Fig. 28, montre, en effet, que l’activité du PSII est la plus faible à proximité de la face abaxiale : son activité
varie de 75% environ lorsque l’on passe d’une face à l’autre de la feuille. De plus, le rapport Chl a/b diminue de
3,4 à 2, 6 de la face adaxiale à la face abaxiale, indiquant que les chloroplastes côté face abaxiale sont des
« chloroplastes d’ombre » : les PSII recevant moins de lumière développent des antennes collectrices plus
importante. C’est ce que montre la baisse du rapport chl a/b, car les centres réactionnels ne contiennent pas de
chl b (seulement de la chl a) tandis que les antennes collectrices sont associées à de la chl a et de la chl b (voir
l’analyse dans la section plantes d’ombre et plantes de lumière plus bas).

3.8 90
Activité PSII: réduction du DCP

3.6 80 Fig. Lu28: Variation du rapport chlorophylle a/b et


Chl a/b de l’activité PSII de différentes couches cellulaires
(mmol mol chl s )
-1

Activité PSII 70 d’une feuille d’épinard. La feuille est coupée en 10


3.4
Clorophylle a/b

60 tranches (de 70 µm chacune, environ) dans le sens


3.2 horizontal (coupe paradermale de la feuille en
-1

50 utilisant un microtome). Chacune des tranches est


3.0 analysée. L’activité PSII est évaluée en mesurant la
40
vitesse de réduction du dichlorophénol indo phénol
2.8 (DCP), qui accepte les électrons immédiatement
30
après Le PSII, à la place des plastoquinones.
2.6 20 D’après Térashima et Saeki (1983)
2.4 10
0 100 200 300 400 500 600 700
Distance de la face adaxiale (µm)

Gabriel Cornic, Mars 2007 35


Sur une feuille d’Epinard aussi, la concentration de chlorophylle augmente dans la feuille avec la distance de la
face adaxiale (Fig.29) pour atteindre un maximum vers 170 µm de profondeur dans la feuille. Elle reste alors
plus ou moins constante puis diminue à nouveau dans le parenchyme. La séparation entre parenchyme
palissadique et lacuneux est située environ à 350 µm de la face adaxiale (Vogelmann et Evans, 2002). La
diminution dans la zone proche de la face abaxiale s’explique au moins en partie par la décroissance du nombre
de cellules dans cette partie du parenchyme lacuneux.
Le profil de la capacité photosynthétique maximum et l’activité maximum de la Rubisco sont très
parallèles et sont les plus élevées à 170 nm environ (Fig.29). Dans cette expérience les mesures de la fixation du
CO2 se font sous une forte lumière (600 µmol quanta m-2 s-1). La baisse de ces deux paramètres à 150 µm sous
la face adaxiale, lorsque la teneur en chlorophylle ne varie plus guère, témoigne probablement d’une
acclimatation de la photosynthèse dans les couches profondes de la feuille, telle qu’elle a été vu sur des feuilles
de Pois Fig Lu 17, chez lesquelles les changements d’activité dans les membranes thylacoïdiennes se font alors
que la teneur en chlorophylle reste constante.

1.2 60 Fig. Lu29. Variation de la capacité photosynthétique


Chlorophylle (fixation de CO2 : zz), de l’activité maximum de
la Rubisco (VV) (en fraction de la valeur
maximum de la Rubisco (valeur relative)

Contenu en chlorophylle (µmoles m-2)


maximum observée) et du contenu de chlorophylle
Capacité photosyntétique et activité

50
1.0 (………..) dans la feuille d’Epinard, en fonction de la
CO2 distance de la face adaxiale.
40 La feuille est découpée en 17 sections
0.8 horizontales (mesures d’activité de la Rubisco) ou 14
sections horizontales (mesures de la fixation de
30 CO2). (1) L’activité Rubisco est mesurée sur
chacune de ces sections. (2) Mesure de la fixation
0.6 de CO2 : la feuille est d’abord sectionnée dans le
20 sens verticale, puis la section est exposée à la
lumière (longueur d’onde : 690 nm) en présence
0.4 d’une atmosphère riche en CO2 dont la radioactivité
10 spécifique est élevée (= contenant beaucoup de
Rubisco 14
CO2).La feuille est alors découpée en 14 tranches
horizontales dans lesquelles on mesure la
0.2 0 radioactivité (d’après Vogelmann et Evans, 2002 et
0 200 400 600 800 Evans et Vogelmann, 2003).
Distance de la face adaxiale (µm)

Lorsque la lumière est faible (Fig.30, ici flux quantique très limitant pour la photosynthèse de 150 µmol quanta
m-2 s-1) le profil d’absorption dépend très fortement de la longueur d’onde. Les différences s’estompent aux flux
quantiques élevés. On voit ici que la lumière verte pénètre plus profondément dans la feuille que la lumière
bleue, l’absorption de la lumière augmente jusqu’à un maximum à 65 µm de profondeur pour le bleu et de 110
µm pour le vert. Ceci est bien en accord avec le fait que les chlorophylles a et b absorbent fortement dans le bleu
et peu dans le vert.
De même, la quantité de lumière bleue est très faible à proximité de la face adaxiale tandis que la
lumière verte y est encore bien présente. La capacité photosynthétique sous bleu et vert suit globalement les
variations l’absorption de ces longueur d’onde : la photosynthèse suit les changements de l’éclairement. Enfin,
on voit que c’est la lumière verte qui active la photosynthèse des couchez profondes des feuilles : la situation est
semblable à celle d’un peuplement forestier où les plantes de sous bois reçoivent relativement plus de vert.
Absorption relative de la lumière et

1,2
absorption du vert
Fig.30 : variation de l’absorption de la lumière bleue et de la
abssorption du bleu lumière verte à différentes profondeurs dans la feuille
capacité photosynthétique

1,0 fixation de CO2 sous vert


d’épinard. Les changements de la capacité photosynthétique
fixation de CO2 sous bleu
dans la feuille sous ces deux lumières sont aussi indiqués.
0,8 L’absorption de la lumière à différente profondeur
est mesurée en regardant, sur la section d’une feuille, à l’aide
0,6 d’un camera, la lumière émise par fluorescence. Comme
indiqué dans le chapitre « Emission de la fluorescence
0,4
chlorophyllienne », le flux quantique émis par fluorescence
dépend (1) de la lumière absorbée et (2) de la quantité de
0,2
chlorophylle. La fraction de lumière absorbée dépend donc de
l’extinction de la lumière dans la feuille (voir Figure 26) et de
0,0
0 200 400 600 la quantité de chlorophylle aux différents niveaux considérés
(Evans et Vogelmann, 2003).
Distance de la face adaxiale (µm)

Gabriel Cornic, Mars 2007 36


8-Conclusion. L'adaptation de l'activité photosynthétique à l'ombrage s'observe à différents niveaux
d'organisation :

(1) Au niveau de l'individu dans une population végétale. Dans ce cas les plantes dominantes sont des plantes de
lumière tandis que les plantes dominées sont des plantes d'ombre.

(2) Sur un même individu : les feuilles situées à la périphérie de la couronne d'un arbre ou d'une touffe dense de
végétation peuvent avoir des caractéristiques photosynthétiques de lumière tandis que celles à l'intérieure de la
couronne ou de la touffe ont des caractéristiques d'ombre.

(3) Au sein d'une même feuille. Par exemple, lorsqu'une feuille d'épinard est maintenue bien horizontale
perpendiculairement au flux lumineux, les chloroplastes des cellules de la face exposée à la pleine lumière ont
des caractéristiques de lumière alors que ceux des cellules de la face inférieure ont des caractéristiques d'ombre
(Terashima et Inoue, 1985). La lumière est en effet fortement atténuée après la traversée d'une feuille : les
chloroplastes côté face inférieure reçoivent non seulement moins de lumière que ceux situés côté face supérieure,
mais aussi une lumière dont la qualité est différente : comme les chloroplastes de la face supérieure absorbent
préférentiellement la lumière rouge claire et la lumière bleue, ils reçoivent de la "lumière d'ombre" enrichie en
rouge sombre et appauvrie en bleu.

Gabriel Cornic, Mars 2007 37


C- Utilisation de la lumière intermittente : les taches de soleil.

Les couverts végétaux sont loin d'être homogènes. Les peuplements naturels sont souvent constitués d’espèces
différentes et d'âges variés. Dans les cultures, les individus sont rarement distribués régulièrement , et, de plus,
présentent souvent une forte variabilité de morphologie et de vitesse de croissance. Toutes ces hétérogénéités
entraînent la formation de taches de soleil à la surface du sol ou à des profondeurs variables dans la végétation.
L'augmentation d'éclairement qui en résulte est transitoire : en effet la hauteur du soleil au-dessus de l'horizon
varie régulièrement au cours de la journée et la végétation est souvent agitée par le vent.
En un point donné les taches de soleil se caractérisent par leur fréquence, leur durée et l'intensité
maximum de l'éclairement qu'elles apportent. La Fig.Lu31A donne les variations de la densité du flux quantique
mesurées, par beau temps, sur le sol de la forêt tropicale Hawaïenne entre 13h et 15h. On voit que les
fluctuations de l'éclairement sont très rapides (de l'ordre de la seconde ou de la minute) et de grandes amplitudes:
le flux quantique peut augmenter en l'espace de quelques secondes de 10 à plus de 1000 µmoles m-2 s-1. La
Fig.Lu 31B montre, sur ce site, que 2/3 des taches de soleil avaient une durée inférieure ou égale à 30 secondes :
un petit nombre d'entre elles duraient plus de 5 min (Pearcy, 1983).

A
% du nombre de taches de soleil
Densité de flux quantique dans

1200 60 B
le visible (μmoles m s )
-2 -1

1000

800 40

600
20
400

200
0
0 0 30 60 90 120 150 180 210 240
0 20 40 60 80 Temps (secondes)
Temps (minutes)

Figures Lu31. A : Variation du flux quantique sur le sol d’une forêt tropicale des îles Hawaï entre 13H et 14H20, heure
locale. B : fréquence des taches de soleil de différentes durées enregistrées sur le même site (d’après Pearcy, 1983)

Les taches de lumière correspondent aussi à un changement brutal de la composition spectrale : une
augmentation transitoire de la lumière bleue et du rapport Rc/Rs : la lumière arrivant au sol n’est plus filtrée par
la végétation. Les clairières présentent un cas extrême d’hétérogénéité qui permet la formation de taches de soleil
de longue durée. Elles se forment dans les forêts à la suite d’un chablis (chute d’arbres).
Jusqu’à 80% de la lumière reçue par les sous bois peut être apportée par les taches de soleil. Cette
lumière n'est utilisable par les plantes que si leur métabolisme est capable de s’ajuster rapidement aux nouvelles
conditions. L'augmentation de la photosynthèse des feuilles soumises à un accroissement brutal d'éclairement
n'est pas instantanée. La nouvelle valeur stationnaire est atteinte après une cinétique complexe que l'on appelle
période d'induction. Le cas des plantes en C3 est, seul, abordé ici.

1- La période d'induction. Plusieurs processus sont sollicités chez une feuille qui passe d’un faible à un fort
éclairement. Ces processus réagissent avec des pas de temps différents.

(1) L’augmentation de la capture de la lumière et de sa transduction en énergie chimique sont quasiment


instantanées, de l’ordre de la ms.

(2) L’augmentation du flux de carbone dans le CPRC qui en résulte est de l’ordre de la seconde (voir
section..), mais est réduite, car quelques enzymes photosynthétiques, largement inactivées, imposent une
limitation au processus. La faible ouverture des stomates qui prévaut également dans ces premières secondes
contribue aussi a freiner la diffusion du CO2 de l’air ambiant vers les chloroplastes.

Gabriel Cornic, Mars 2007 38


(3) L’activation des enzymes du cycle photosynthétique sous le nouvel éclairement peut prendre de 2 à
10 minutes et l’ouverture stomatique, de 20 minutes et plus. L’accroissement de A chez une feuille soumise à
une tache de soleil est limité successivement par des mécanismes différents.
.
La Fig. Lu32 illustre le cas de Alocasia macrorhiza (Pearcy et al. 1996), plante des sous-bois tropicaux qui reçoit
couramment dans son habitat naturel une DFQP comprise entre 5 et 10 μmol m-2s-1. La flèche indique son
passage d'une DFQP de 10,5 à 610 μmol m-2s-1. L'augmentation de A jusqu'à un niveau stationnaire présente 2
phases : une augmentation rapide durant environ 120 secondes suivie d'une augmentation lente durant environ
1300 secondes. L’ouverture stomatique, d’abord très lente, est plus rapide 10 minutes environ après le
changement de DFQP.

8 80
A, (μmoles CO2 m s )
-1

Figure Lu32. Variations de l’assimilation de CO2 (A :


gc, (mmoles m s )
6 -1 ______
-2

60 ) et de la conductance stomatique pour la


-2

diffusion du CO2 (gc : ……) d’une feuille d’Alocasia


macrorhiza d’une DFQP de 10,5 à 610 μmoles m-2s-1 .
4 La flèche pointée vers le haut indique le moment où la
40 DFQP est augmentée (d’après Pearcy et al. 1996).

2
20

0
0 400 800 1200 1600 2000 2400
Temps, (secondes)

(1) Durant la première phase, l’assimilation du CO2 (A) utilise l’énergie (ATP et NADPH+H+) fournie à
partir de l’activité des photosystèmes et le RuBP présent dans les chloroplastes : A augmente rapidement.

(2) Durant la seconde phase la photosynthèse est limitée par la vitesse de régénération du RuBP,
contrôlée par l'état d'activation de la Rubisco, de la Fructose 1,6-bisphosphatase (FBPase) et d’autres enzymes
du CPRC dont l’activité dépend de leur état réduit. La FBPase est activée très rapidement en 3 ou 4 minutes via
le système thiorédoxine ferredoxine, tandis que le changement d'activation de la Rubisco, gouverné par la
rubisco activase, demande habituellement 8 à 10 minutes.

(3) La photosynthèse est enfin limitée par l'ouverture des stomates qui peut être encore plus lente que
celle présentée ici.

Lorsque la feuille est restée très longtemps à l’obscurité l’état de désactivation de la Rubisco et des autres
enzymes du CPRC peut masquer la première étape de cette cinétique en imposant l’activité minimale.

2-L’assimilation de CO2 est augmentée durant et après une tache de soleil. Ceci est illustré dans le cas
d'Alocasia macrorhiza soumis à une tache de lumière durant 20 secondes (Fig. Lu33A : passage d’une DFQP de
10,5 μmoles m-2s-1 à une DFQP de 600 μmoles m-2s-1, puis retour sous la lumière d’origine). La tache de lumière
apporte un supplément d’assimilation non seulement durant les 20 secondes de forte lumière mais aussi pendant
une centaine de secondes après le retour de la feuille sous lumière faible. Dans ce cas, on peut calculer que le
gain de carbone après retour sous faible lumière est environ 6,5 fois plus élevé que celui durant la forte lumière.

L’effet d’une même tache de lumière sur une feuille est complètement différent si sa photosynthèse a été
préalablement activée par une longue période de forte lumière. L’état d’activation des enzymes impliquées dans
la photosynthèse, de la Rubisco notamment, disparaît lentement et persiste partiellement sous faible éclairement
même si cela n’est plus perceptible sur la fixation de CO2 qui est alors limitée par la lumière. De même, la taille
des pools métaboliques impliqués dans le fonctionnement du CPRC ne décroît pas instantanément. La feuille est
alors capable d’utiliser plus efficacement la tache de lumière qu’elle reçoit (Fig.Lu33B). Lors du retour sous une
DFQP de 10,5 μmoles m-2s-1 on observe encore une fixation post-illuminatoire induite par la tache. Mais le gain

Gabriel Cornic, Mars 2007 39


de carbone durant cette période est cette fois relativement le plus faible que celui illustré Fig.Lu33A : il ne
représente, en effet, que 0,7 fois environ celui durant la forte lumière.

A
1.2 Figure Lu33. Variation de l’assimilation nette de
CO2 d’une feuille d’Alocasia macrorhiza éclairée
0.8 brutalement par une DFQP de à 600 μmoles m-
A, (μmoles CO2 m s )

2 -1
s durant 20 secondes. Début du fort
-1

éclairement : flèche pointée vers le haut ; fin du


-2

0.4
fort éclairement : flèche pointée vers le bas. Avant
B et après la période de forte lumière la feuille se
6 trouve sous une DFQP de 10,5 μmoles m-2s-1 . La
feuille a été maintenue sous faible (A) ou sous fort
4
(B) éclairement avant l’observation. Dans le
premier cas les mécanismes de la photosynthèse
n’avaient pas été activés (d’après Pearcy et al.
2 1996).

0 30 60 90 120 150 180


Temps, (secondes)

3-Relation entre le flux d'électrons et l'assimilation de CO2 durant une tache de lumière. Cette relation est
étudiée en examinant sur la même feuille les variations du dégagement de O2, témoin du flux d'électrons (le
dioxygène est produit par l’activité PSII), en même temps que les variations de l'absorption du CO2.

Figure Lu18 variation de


Absorption de CO2 ou dégagement de O2

14

12
Figure Lu34. Variations de l’assimilation nette de CO2
(pointillés) et du dégagement net de O2 (trait plein) d’une feuille
(μmoles m-2 s-1)

10
d’Alocasia macrorhiza éclairée brutalement par une DFQP de
8 à 600 μmoles m-2s-1 durant 20 secondes. Début du fort
éclairement : flèche pointée vers le bas ; fin du fort éclairement :
6 flèche pointée vers le haut. Avant et après la période de forte
lumière la feuille se trouve sous une DFQP de 10,5 μmoles m-2s-1
4 . La photosynthèse de la feuille avait été complètement induite
avant l’observation (d’après Pearcy et al. 1996).
2

0
100 150 200 250
Temps, (secondes)

Lorsqu'une feuille est soumise à une tache de lumière on observe un découplage transitoire du transport
d'électrons et de l'assimilation du CO2.

(1)-Le pic de dégagement de O2 montre que le flux d’électrons utilise d’abord sans frein l’afflux supplémentaire
de lumière (Fig.Lu34).

(2)-Le dégagement d'oxygène diminue rapidement pour atteindre une valeur stationnaire en une dizaine de
secondes tandis que de l'absorption de CO2 augmente graduellement. Le flux d’électrons s’est ajusté rapidement
à la fixation de CO2.

Gabriel Cornic, Mars 2007 40


On remarque que le dégagement stationnaire d'O2 reste toujours un peu plus élevé que l'absorption de CO2. Cette
différence témoigne de l’existence d’accepteurs d’électrons autres que le dioxyde de carbone.
Lorsque la photosynthèse a atteint un état stationnaire, le transport d'électrons est étroitement couplé à
l'assimilation du CO2 Ce couplage s’établit lorsque la production d'énergie de la chaîne photosynthétique excède
les capacités du CPRC/O à utiliser cette énergie, entre autres, par le biais de la régénération du NADP+ et de
l'ADP à partir du NADPH et de l'ATP utilisés par la photosynthèse. Si trop de NADPH et d'ATP sont formés il
ne reste plus suffisamment de NADP+ et d’ADP pour accepter l’énergie fournie par la chaîne de transfert
d’électrons dont l’activité est alors régulée à la baisse.
Lorsque la tache de lumière disparaît, l'éclairement retournant à son niveau antérieur, le dégagement
d'oxygène s'arrête brutalement tandis que l'assimilation du CO2 demeure élevée pendant une vingtaine de
seconde.

4- La cause de la fixation post-illuminatoire de dioxyde de carbone. La fixation « post-illuminatoire » de


CO2 résulte d’une production excédentaire d’énergie (pouvoir réducteur et potentiel de phosphorylation) durant
la période de forte lumière. Cet excédent est visible Fig.Lu34 : dans les premières secondes de lumière il y a plus
de dioxygène dégagé que de CO2 absorbé.
L’énergie excédentaire n’est pas stockée sur le NADP+ et l’ADP car leur concentration ne peut
expliquer ce phénomène. De même le pool des plastoquinones ne peut stocker qu’une toute petite partie des
électrons produit par le PSII (environ 10 à 15% du total dans le cas présenté).
L’importante assimilation du CO2 qui suit le passage d’une tache de soleil se fait grâce à la présence de
RuBP et surtout de TP.
L’énergie parait stockée dans les intermédiaires du CPRC, notamment dans l’APG et les TP. On a
constaté en effet que le pool d’APG diminue rapidement durant une tache de soleil pour donner en excès des TP
et du RuBP. Lors du retour sous faible éclairement le dioxyde de carbone est fixé sur le RuBP présent avec
production d’APG qui s’accumule car la production de NADPH diminue brutalement (le flux d’électrons décroît
immédiatement lors de la baisse d’éclairement ; Fig.Lu34). La régénération du RuBP se poursuit grâce à l’ATP
fournit, d’une part par la dissipation du gradient de pH formé de part et d’autre de la membrane du thylakoïde
sous forte lumière, et d’autre part par le fonctionnement même de la chaîne de transfert d’électrons sous faible
éclairement.

5-Importance des taches de soleil dans le bilan carboné des plantes de sous bois. L'estimation du rôle des
taches de soleil dans le bilan carboné des plantes de sous-bois est difficile. Le groupe de Pearcy (Université de
Californie, Davis) qui a une position de leader dans ce domaine, estime, par jour clair que 30 à 60% de
l'assimilation des plantes des sous-bois tropicaux est réalisée grâce aux taches de soleil (Pearcy et al. 1996).
L’énergie qu’apportent les taches de soleil dans ces forêts représente d’ailleurs à peu près la même fraction de
l’énergie lumineuse totale qui arrive au sol.
D'autres estimations arrivent à des valeurs plus faibles, notamment dans les forêts européennes. Il faut
évidemment prendre en considération le fait que la proportion d'éclairement direct par rapport à l'éclairement
diffus peut varier beaucoup selon le climat. En effet une proportion élevée d'éclairement diffus diminue l’énergie
apportée par les taches de soleil. De plus par temps très nuageux il n'y a guère de taches de soleil, ou bien
l'augmentation de la DFQP qu'elles induisent sur le sol des forêts est faible.

6-Plantes en C4 vs plantes en C3. Les plantes en C4 sont capables, comme les plantes en C3 d’utiliser les taches
de lumière. Cependant quelques différences notables sont à souligner. Chez les plantes en C4, après le passage de
la tache, les enzymes impliquées dans la photosynthèse se désactivent plus rapidement et les stomates se ferment
plus vite que chez les plantes en C3. Ces deux éléments sont évidemment défavorables pour l’utilisation des
taches de lumière. Comme le montre des études sur Microstegium vimineum la fermeture rapide des stomates chez
les plantes en C4 améliore comparativement aux plantes en C3 l’efficacité de l’utilisation de l’eau, mais cela est
peu utie dans les sous bois où l’humidité estle plus souvent assez élevée (Sage et Pearcy, 2000).

Gabriel Cornic, Mars 2007 41


D-Effet des fortes lumières sur l’appareil photosynthétique. La photoinhibition.
L'appareil photosynthétique de feuilles d'ombre soumises brutalement à de forts éclairements (supérieures à ceux
nécessaires pour saturer la photosynthèse) peut être endommagé lorsque la réorganisation des membranes
photosynthétisantes nécessaire à l'adaptation aux nouvelles conditions n'est pas assez rapide. Il se produit alors
une photoinhibition de la photosynthèse. Ce phénomène peut s’observer, par exemple, lors d’un chablis ou
durant une modification anthropique de l’environnement, mais aussi lorsque la photosynthèse est limitée par des
températures fraîches ou d’autres facteurs contraignants de l’environnement. Il se manifeste au niveau de la
feuille lorsque les processus de réparation mis en œuvre par la plante ne sont pas suffisamment rapides pour
réparer les dommages causés
Avant d'aborder les réactions de l'appareil photosynthétique aux fortes lumières, il est nécessaire de
définirce qu’est la lumière excédentaire

1-Excès de lumière. Un exercice de style. La FigLu35A (z______z) montre la variation de l’assimilation de CO2
en fonction de l’éclairement chez une feuille de Maïs. On rappelle que le Maïs est une plante est en C4. Comme
telle, elle ne présente donc pas d’absorption importante de O2 à la lumière (pas de photorespiration, voir Fig..).
De plus, comme le rapport (O2 dégagé)/(CO2 absorbé) durant la photosynthèse est très voisin de 1, les électrons
fournis par l’oxydation de l’eau servent très majoritairement à réduire le CO2 : l’assimilation brute du CO2,
Abrute, est donc directement proportionnelle au flux d’électrons dans les membranes thylacoïdiennes.

On estime A brute, l’assimilation brute de CO2 de la façon suivante :

Abrute = A + Rn

où Rn est la respiration à l’obscurité


Le nombre de photons nécessaires pour l’assimilation d’une molécule de CO2 est déterminé en mesurant
le rendement quantique maximum ΦmCO2: en effet en lumière strictement limitante toute la lumière absorbée par
la feuille est utilisée uniquement pour faire fonctionner la chaîne photosynthétique de transfert d’électrons (Ceci
est un rappel car ce calcul a déjà été fait avec les données présentées Fig.lu1). Dans le cas présent, ΦmCO2 = 0,06
molécules CO2 photon-1 : il faut donc 16 photons pour fixer une molécule de CO2.
A, (µmoles CO2 m s )
-1

A
24
-2

18 Figure Lu35. A : Variation de l’assimilation nette de CO2 A,


en fonction de la densité du flux quantique chez une feuille de
12 Maïs bien hydratée (z). On a supposé qu’un facteur de
6 l’environnement, comme la sécheresse, affectait le plateau
sans modifier le rendement quantique de cette relation („), et
0
qu’un autre, comme les fortes lumières, affectait le rendement
quantique sans modifier le plateau de saturation (c).
B
1800
2
B : Variations, sur la feuille de Maïs bien hydratée,
de la DFQP nécessaire au fonctionnement de la chaîne
1200 photosynthétique d’électrons (courbe 1,●, voir texte), de la
DFQP absorbé par les pigments photosynthétiques (courbe 2,
DFQP, (µmoles m s )
-1

600 1 □) et de la DFQP excédentaire (∆).


-2

C : variation de la DFQP excédentaire dans le cas


0 d’une baisse du plateau de saturation sans modification du
C rendement quantique („), et celui d’une baisse du rendement
1800
quantique sans modification du plateau de saturation (c
(voir A). La courbe en tirets permet la comparaison directe
1200 avec la lumière excédentaire estimée sur la feuille bien
hydratée.
600 Voir le texte pour le détail des calculs.

0
0 500 1000 1500 2000
-2 -1
DFQP, (μmoles m s )

Gabriel Cornic, Mars 2007 42


La DFQP strictement nécessaire pour assurer la fixation du CO2 se calcule dès lors par : A brute (µmol
CO2 m-2 s-1) x 16 (µmol photon). Cette estimation est donnée courbe 1 (z______z) sur la Fig.Lu35B.
Cependant, la quantité de lumière absorbée par les chlorophylles, ou tout autre pigment, varie linéairement en
fonction de l’éclairement arrivant sur la feuille, et ce, bien au-delà des valeurs physiologiques. Si l’on suppose
dans le cas présent que le flux d’électrons n’est limité que par la lumière, l’estimation de la DFQP absorbée
s’obtient en prolongeant sur toute la gamme d’éclairements la pente à l’origine de la courbe 1 (Fig.Lu35B) pour
obtenir la courbe 2 de la même Figure (□_______□).
La différence entre les courbes 1 et 2 de la FigLu35B, donne, pour tous les éclairements arrivant sur la
feuille, la lumière en excès au niveau de l’appareil photosynthétique (Δ⎯Δ). On voit que la lumière est
excédentaire à partir d’une DFQP voisine de 180 µmoles m-2 s-1.

La fraction de lumière excédentaire au niveau des systèmes photosynthétiques dépend non seulement de la
lumière qu’ils absorbent mais aussi de leur activité. La diminution de l’activité photosynthétique sans
modification du rendement quantique maximum, obtenue en plaçant la feuille dans un air pauvre en CO2 ou bien
en déshydratant la plante (FigLu35A, ________), entraîne une augmentation de l’excédent de lumière
(Fig.Lu35C : ________, la courbe en pointillés rappelle la variation de la lumière excédentaire fig.Lu35B).
Si par contre le rendement quantique est plus faible, par exemple 0,03 molécules O2 par photon, et que
le plateau de saturation n’est pas modifié (Fig.Lu35A, _____, c’est un cas de figure que l’on rencontre chez
des plantes qui ont été soumises à un éclairement élevé, voir plus bas), la DFQP à partir de laquelle la lumière est
excédentaire augmente de 180 à 500 μmoles m-2 s-1 environ. De plus, il y a une réduction globale de la DFQP en
excédent (…….. : Fig. Lu35C).

Pour résumer : une baisse de la valeur de A au plateau de saturation se produisant sans modification du
rendement quantique augmente la lumière excédentaire, tandis qu’une baisse du rendement quantique sans
modification de la valeur de A au plateau de saturation augmente la valeur de la DFQP à partir de laquelle la
lumière est excédentaire tout en diminuant globalement l’énergie excédentaire.

2-Mise en évidence de la photoinhibition ; ses caractéristiques.

a- Une baisse du rendement quantique de la photosynthèse liée à une dégradation de protéines


dans le photosystème II. L'exposition d'une feuille de haricot pendant trois heures à une lumière largement
excédentaire (2000 μmoles m-2s-1 dans ce cas) provoque une baisse de rendement quantique de l'assimilation
photosynthétique du CO2 (Fig.Lu36). Dans le cas présent, le rendement quantique passe de 0,090 molécules
CO2 photon-1, avant le traitement, à 0,036 molécules CO2 photon-1 après le traitement : l'inhibition induite est
donc d'environ 60%. On remarque ici que les mesures ont été faites à une fraction molaire ambiante élevée de
dioxyde de carbone et faible de dioxygène : la fonction oxygénase est inhibée dans ce cas et les électrons
produits par le PSII réduisent très majoritairement le dioxyde de carbone.

24
21
A, (μmoles CO2 m s )
-1

Figure Lu36. Variation de A en fonction de la DFQP chez


18
une feuille de Haricot placée dans une atmosphère dont
-2

15 la teneur en O2 est de 1% et celle de CO2 1200 ppm. La


12 température de la feuille est de 23 ± 02°C durant la
mesure. Mesures avant (Q) et après () une période de
9
trois heures sous 2000 µmoles m-2 s-1 et dans un air
6 normal (21% de O2 et 355 ppm de CO2).
3
0

0 50 100 150 200 250


-2 -1
DFQP, (μmoles m s )

L'amplitude de la photoinhibition est fonction de la durée d'exposition des feuilles aux fortes lumières. De plus,
lorsque cette durée est suffisamment grande, il se produit aussi une baisse de la photosynthèse mesurée sous une
lumière saturante. Ce phénomène est illustré FigLu37 dans le cas de Elatostema repens, plante des sous bois
tropicaux du sud-est asiatique. Les feuilles de cette plante d’ombre, placées dans des conditions normales,

Gabriel Cornic, Mars 2007 43


atteignent leur plateau de saturation pour une DFQP de 200 μmoles m-2s-1. Les résultats décrits dans cette Fig.
sont obtenus en les soumettant à un éclairement excédentaire de 750 μmoles m-2s-1 dont la durée est variable.
Une heure trente de fort éclairement réduit le rendement quantique à 70% de sa valeur d'origine, sans affecter la
photosynthèse sous éclairement saturant. Par contre, 4 heures de traitement réduit le rendement quantique de
60% et la photosynthèse sous lumière saturante d’environ 20% (Legouallec et Cornic, 1988).

100
% de la valeur initiale

Figure Lu37. Variations du rendement quantique de la


photosynthèse (______) et de la photosynthèse à
80 saturation lumineuse (……) de Elatostema repens en
fonction du temps d’exposition à une lumière
excédentaire de 750 µmoles m-2 s-1. Les mesures sont
60 faites dans des conditions normales de CO2 et de O2 à
une température d’environ 23°C (d’après Legouallec et
Cornic, 1988).
40

0 1 2 3 4
Durée de la période de forte lumière, (H)

Noter : c’est la lumière visible, c'est-à-dire la même qui est nécessaire au fonctionnement de la photosynthèse,
qui a cet effet inhibiteur.
L’inhibition de la photosynthèse en lumière limitante et en lumière saturante se fait sans modification
de la teneur en chlorophylle. Seules, des expositions à fortes lumières pendant de longues durées, ou bien une
brève exposition à des éclairements exceptionnellement élevés, provoquent une photooxydation de la
chlorophylle, visible par l’apparition de taches blanches sur les feuilles.

La cible primaire des fortes lumières est le PSII. La baisse de rendement quantique chez des feuilles soumises
à de fortes lumières montre à l’évidence que ce sont les réactions limitées strictement par la lumière qui sont
d’abord touchées. En effet, le flux linéaire d’électrons mesuré (par réduction du ferricyanure ou du méthyl
viologène) sur des thylacoïdes isolées de ces feuilles est fortement inhibé. Une analyse plus précise montre, dans
la grande majorité des exemples étudiés, que le PSII est la cible primaire des fortes lumières, le PSI n’étant que
peu ou pas touché.

A DFQP = 40 μmoles m s
-2 -1
0.72

Figure Lu38. Variations du rendement


0.68
quantique de la photochimie du PSII (A,
Fv/Fm

Fv/Fm) et de l’activité PSII mesurée avec une


0.64 parabenzoquinone après un traitement de 3
heures de feuille de E. repens par une
0.60
Obscurité
lumière excédentaire de 750 µmoles m-2 s-1.
Les mesures sont faites sur des feuilles
(μmoles O2 mg chl min )

140 intactes (A) ou des cellules isolées


-1

-2 -1
B DQFP = 40 μmoles m s
rapidement (B) à partir de feuilles. Les
120
reprises d’activité après photoinhibition sont
Activité PSII,

100 faites dans différentes conditions (voir Fig.).


-1

Obscurité
Les mesures de Fv/Fm sont faites après 15
80 minutes d’obscurité (d’après Legouallec et
Cornic, 1988).
60 -2 -1
40 μmoles m s + strepto.
40

0 30 60 90 120
Temps après la période
de fortes lumières, (minutes)

Gabriel Cornic, Mars 2007 44


La photoinhibition est un phénomène réversible. Le rendement quantique de la photosynthèse (Fig.Lu38A),
ainsi que l’activité du PSII (Lu38B) regagne lentement leur activité d’origine lorsque les feuilles qui ont subi de
fortes lumières sont remises sous un éclairement limitant. On montre que des inhibiteurs de la synthèse
protéique, comme la streptomycine, la rifampicine ou la lincomycine, empêchent la reprise d’activité dans ces
conditions. La réparation des dommages provoqués par la lumière exige donc une synthèse de protéines. D’où
l’on déduit que la photoinhibition résulte de la dégradation d’une ou de plusieurs protéines du PSII. On voit enfin
que la reprise d'activité après photoinhibition est fortement freinée, voire inhibée, à l'obscurité : cette reprise
nécessite de l'énergie.
De plus, comme l’effet inhibiteur de la lumière sur le PSII est plus grand chez des feuilles infiltrées
d’un inhibiteur de la synthèse protéique, on conclut que la photoinhibition apparaît lorsque la vitesse de
dégradation de la, ou des protéines concernées est supérieure à la vitesse de sa (leur) synthèse (Fig.Lu39).
Il apparaît ici une idée générale: les systèmes endommagés chez des plantes soumises à contraintes sont
constamment réparés. La baisse d’activité d’une fonction se produit lorsque la vitesse de destruction des
systèmes qui en sont responsables est supérieure à celle de leur réparation. Cette réparation qui contribue à
maintenir l’intégrité de la plante sous contrainte est consommatrice d’énergie. Cette énergie représente l’un des
coûts de la contrainte.

100
% de la valeur initiale

80 Sans streptomicyne
Figure Lu39. Variation de l’activité PSII (voir Fig . LU22B)
60 en fonction du temps d’exposition de feuille d’E repens à une
lumière excédentaire en présence ou en l’absence de
40 streptomycine (d’après Legouallec et Cornic, 1988).

20 Avec streptomicyne

0
0 60 120 180 240
Durée de la période
de fortes lumières,(minutes)

b-La protéine D1 est la cible principale des fortes lumières. Les protéines entrant dans la constitution
d’un organisme ont une durée de vie limitée : elles finissent par être dégradées et remplacées. La vitesse de ce
renouvellement est appelée couramment turn-over
La protéine D1 a le turn-over le plus rapide des protéines chloroplastiques : son ordre de grandeur, de
30 à 60 minutes, augmente avec la lumière reçue. Au-delà d’une quantité critique de lumière absorbée par le
PSII, la dégradation de D1 est plus rapide que son remplacement. C'est principalement la disparition de cette
protéine sous forte lumière qui est la cause principale de la photoinhibition.

100 A 100
23°C
Vitesse relative de transfert d'électrons

80 80
Figure Lu40. Variations relatives de la
Concentration relative en D1

concentration de D1 (trait plein) et du transfert


60 60 d’électrons (pointillés) dans la chaîne
photosynthétique lors de l’exposition de
40 40 thylacoïdes isolés de feuilles d’épinard à une forte
lumière. Ils sont maintenus en suspension dans
100 B 100 une solution tampon à pH 7,6. A : Mesures faites à
23°C. B : mesures faites à 3°C à la lumière puis à
80 3°C 23°C 80
23°C à l’obscurité (d’après Aro et al., 1990 )

60 60

40 40
0 25 50 75 100
Temps, (minutes)

Gabriel Cornic, Mars 2007 45


Une expérience très élégante (Fig.Lu40) faite par un groupe finlandais, indique les événements qui concourent à
la dégradation de D1. Cette expérience se déroule en deux temps.

(1) Des thylacoïdes isolés de feuilles d'épinard sont soumis à une lumière capable de provoquer une
photoinhibition dans un milieu réactionnel dont la température est maintenue à 23°C ou bien à 3°C. A 23°C on
observe une diminution parallèle de la quantité de D1 et du flux linéaire d’électrons dans la chaîne
photosynthétique. A 3°C le flux linéaire d’électrons est aussi inhibé mais la quantité de D1 n’est pas modifiée.

(2) Si, après le traitement à 3°C, on place les thylacoïdes à l’obscurité en montant rapidement la température du
milieu réactionnel à 23°C, on constate une disparition de D1.

On conclut que la dégradation de D1 ne nécessite pas de lumière, mais que la lumière provoque des
modifications sur D1 qui permettent sa dégradation. Les processus impliqués dans sa dégradation sont inhibés à
basse température tandis que ceux qui préparent sa dégradation ne sont pas inhibés dans ces conditions. Les
modifications de D1 à la lumière provoquent un changement de sa conformation qui inactive le PSII (baisse de la
vitesse du transfert d'électrons) et la rend susceptible à l’action d’une protéase. Cette protéase a été trouvée
fortement liée à la membrane du thylacoïde.

4-Mécanisme de la photoinhibition : études in vitro. Le fonctionnement même de l’appareil photosynthétique


produit des espèces chimiques qui peuvent entraîner des dommages à la machinerie. Comme indiqué dans un
chapitre précédent, la chlorophylle à l’état non excité est sous forme singulet (les électrons périphériques sont
tous appariés et de spin antiparallèle). Après avoir été excitée par un photon elle peut se désactiver en donnant
une chlorophylle à l’état triplet dont la durée de vie est longue (de l’ordre de la seconde). L’état triplet de la
chlorophylle n’est pas dangereux en lui-même, mais il peut réagir avec l’oxygène, qui lui, de base est à l’état
triplet. Il passe alors à l’état singulet, très toxique. Habituellement l’état triplet de la chlorophylle disparaît en
réagissant principalement avec les caroténoïdes.

Selon les hypothèses courantes, la photoinhibition peut être induite lorsque le pool intra thylacoïdien des
quinones est trop réduit ou lorsque la vitesse de fourniture des électrons à partir de l’oxydation de l’eau est plus
faible que la vitesse d’arrivée des électrons sur QB. Le premier mécanisme est lié au côté accepteur du PSII,
tandis que le second concerne le côté donneur de ce photosystème.

a-Mécanisme côté accepteur. Cette inhibition se produit quand le pool des plastoquinones est trop
réduit. La fréquence d’occupation de la niche QB sur D1 (voir chapitre...) diminue parce qu’il y a de moins en
moins de quinones oxydées dans le thylacoïde. Dans ces conditions QA, qui, habituellement, ne reçoit qu’un
électron des phéophytines voisines, peut être réduite 2 fois. Dans cet état elle est très faiblement liée à son site
sur D2, et, après sa protonation, peut rejoindre le pool de quinones dans le thylacoïde. On remarque que cette
quinone se trouve alors dans une situation similaire à celle de QB dans les conditions normales (où l’éclairement
n’est pas photoinhibiteur).
Cette situation est irréversible et, lorsque se produit la séparation primaire de charge, c’est à dire lorsque
se forme le couple P680+/Phéo-, la charge négative des phéophytines ne trouvant pas d’accepteur aval retourne
sur P680+, formant P680 à l’état triplet (il y a recombinaison de charges). P680 à l’état triplet peut réagir
rapidement avec l’oxygène pour former l’oxygène singulet très réactif capable d’oxyder P680 lui-même, ou
quelques acides aminés de la protéine D1, la rendant susceptible à l’action d’une protéase.
Ce mécanisme ne se déroule qu’en présence d’oxygène (puisqu’il implique la formation d’oxygène
singulet). On voit que c’est l’activité photochimique primaire du PSII qui est « suicidaire » (Ohad et al., 1994).

b-Mécanisme côté donneur. Il peut être mis en évidence sur des centres PSII isolés, ou sur des
particules PSII isolées qui, outre les protéines D1 et D2, comportent quelques autres polypeptides antennes
comme le CP43, ou bien encore le cyt. b559. Ces particules sont dépourvues du complexe manganèse qui oxyde
l’eau (COE) : le P680 oxydé par la lumière ne peut donc pas récupérer normalement l’électron qu’il a perdu. En
l’absence de donneurs d’électrons à la lumière, il se forme P680+ et TyrZ+ qui sont très oxydants. Leur potentiel
rédox est de 1 à 1,2 V. Elles peuvent donc oxyder aisément leur environnement immédiat, endommageant
localement D1 qui devient susceptible à l’action de protéases.
Le fonctionnement de ce mécanisme in vivo implique, bien sûr, que l’activité côté accepteur soit
d’abord réduite. La perte d’activité du COE peut être due à la baisse de pH qui se produit dans le lumen à la
lumière. Cette baisse de pH peut entraîner une fuite du Ca++ entrant dans la composition du COE et bloquer
l’oxydation de l’eau. Ce type de photoinhibition peut se produire à la fois en présence ou en l'absence de O2. La

Gabriel Cornic, Mars 2007 46


photoinhibition qui est induite lorsque le COE est peu ou n'est pas actif nécessite, comparativement à celle
produite par le mécanisme « côté accepteur », peu de lumière.

c-les deux mécanismes concourent probablement à l’inhibition observée. Le mécanisme côté


donneur (§b ci-dessus) peut aussi résulter de la dégradation même de D1 et de D2 induit par un mécanisme de
type "côté accepteur" (§ a ci-dessus). En effet la disparition de D1 et de D2, sur des membranes
photosynthétiques isolées exposées à la lumière, provoque le démantèlement des centres PSII : les antennes
mineures (voir section « le transfert d’électrons dans la membrane du thylacoïde »), de même que les
polypeptides qui forment l’ossature du complexe oxydant de l’eau sont fortement liés à ces protéines. La
reconstitution de l'ensemble fonctionnel, autour de D1 et D2, ne serait pas possible ou difficile sous forte
lumière, parce qu'il serait détruit avant même que le complexe oxydant l'eau soit correctement repositionné et en
état de marche.
Dans le cas présenté Fig.Lu38, par exemple, la reprise d'activité, rapide sous 40 μmoles m-2 s-1, ne peut
se faire sous une DFQP de 160 μmoles m-2 s-1, qui normalement n'induit aucune photoinhibition apparente. La
photoinhibition serait donc non seulement due à une augmentation de la vitesse de dégradation de D1, mais aussi
à une impossibilité de réparer nombres de centres démantelés sous les lumières excédentaires (Legouallec et al.,
1991). Récemment, Nishiyama et al.(2006) distingue aussi deux effets des lumières fortes sur le PSII.

(1) un effet destructeur direct (destruction de D1 et D2) ;


(2) un effet inhibiteur de la réparation des PSII endommagés.

Ces auteurs pensent que les espèces actives d’O2 inhiberaient la synthèse de D1 au moment de sa traduction.

d-Dommages in vivo. La photoinhibition « vraie » s’observe à tous les niveaux d’éclairement. La


photoinhibition qui est directement observée comme baisse du rendement quantique de la photosynthèse après
une période de lumière excédentaire est une photoinhibition nette, puisqu’elle est le résultat d’une dégradation et
d’une réparation simultanée. Les dommages causés par la lumière peuvent être étudiés in vivo en présence de
lincomycine. La lincomycine inhibe la synthèse de protéines dans le chloroplaste, et empêche la réparation des
polypeptides endommagés. Tyystjärvi et Aro (1996) en mesurant la variation du rendement quantique maximum
de la photochimie du PSII (Fv/Fm, voir chapitre fluorescence) sur des feuilles de courge (Cucurbita pepo L.) en
fonction du temps d’exposition à la lumière montrent que la photoinhibition est une réaction de premier ordre
(Fig.41).

Figure Lu41. Variation de Fv/Fm mesurée sur des feuilles


1.0 de courges cultivées en serre, en fonction de la durée
d’illumination sous les DFQP indiquées sur la figure. Les
0.8 feuilles coupées ont absorbé pendant plusieurs heures à
l’obscurité une solution de lincomycine (1g par litre). La
0.6
Fv/Fm

lincomycine inhibe la synthèse des protéines dans le


9 chloroplaste. Le trait continu a été obtenu sur des feuilles
0.4 placées à l’obscurité en présence de lincomycine, ou sur des
32 feuilles placées sous une DFQP de 15 µmoles m-2 s-1 en
0.2 l’absence de lincomycine. Dans tous les cas (sauf celui des
548 307 « témoins » la décroissance est exponentielle (d’après
0.0 Tyystjärvi et Aro, 1996).
0 30 60 90 120
Durée de l'illumination (min)

Dans cette expérience le rendement quantique maximum du PSII est mesuré après une ou deux heures
d’obscurité, période nécessaire à la relaxation des mécanismes rapides d’extinction de la fluorescence
(dissipation thermique induite par la lumière, voir plus bas). De plus, l’activité PSII et la quantité de protéine
D1, mesurées sur des thylacoïdes isolés de feuilles traitées, suivent exactement la même cinétique que Fv/Fm
durant les traitements.

La décroissance du rendement quantique maximum suit bien une cinétique de premier ordre pour tous les
éclairements utilisés. Et l’on peut écrire :

ln(Fv/Fm) = - kPI + ln(Fv/Fm)0

Gabriel Cornic, Mars 2007 47


relation mise en évidence si l’on prend une échelle Réaction de premier ordre:
logarithmique pour l’axe verticale de la Fig. 41, où (Fv/Fm)0
est le rendement quantique . Ce qui permet de calculer kPI, La diminution de la concentration des PSII
la constante de vitesse de la photoinhibition de l’activité actifs est proportionnelle à la
PSII. concentration des centres actifs PSII
présents à un moment donné Dans le cas
La constante de vitesse de la photoinhibition du PSII, kPI, présent on écrit avec (PSII), la
varie linéairement avec l’éclairement durant la période de concentration des centres ouverts
lumière (Fig.Lu42). Les plantes cultivées en champs (ronds
noirs) ou en chambre de culture (figurés blancs) suivent la -d(PSII)/dt = kPI (PSII), où kPI est la
même loi. De plus, on voit que la photoinhibition constante de vitesse de photoinhibition.
(dommages en l’absence des mécanismes de réparation) se
produit à tous les niveaux d’éclairements. Sans le d’où en réarrangeant :
mécanisme de réparation, les plantes ne pourraient pas d(PSII)/(PSII) = - kPI dt, dont
survivre sous faible lumière. Dans les conditions l’intégration donne bien
« normales » les mécanismes de réparations sont
suffisamment rapides pour empêcher l’expression des ln (PSII) = - kPI t + ln (PSII0)
symptômes de la photoinhibition.

0.5

0.4 Figure Lu42. Variation de la constate de vitesse de


la photoinhibition KPI avec la DFQP durant
l’illumination. KPI est calculée à partir de la
KPI (h-1)

0.3
décroissance exponentielle de Fv/Fm en présence de
lincomycine (voir Fig.25). Les Figurés noirs se
0.2 rapportent à des résultats obtenus sur des courges
cultivées en plein champ. Les autres ont été obtenus
0.1 sur des courges poussées en serre (d’après
Tyystjärvi et Aro, 1996).
0.0
0 500 1000 1500 2000
DFQP (µmol m-2 s-1)

Cette relation indique aussi que le rendement quantique de la photoinhibition n’est pas modifié dans la gamme
des DFQPs utilisées (de 0 à 2000 µmoles photons m-2s-1) : les réactions qui sont responsables de la
photoinhibition sont les mêmes dans cette gamme d’éclairement et ce qu’elles qu’aient été les conditions de
culture : ici plantes de serres et plantes de plein champ soumises aux variations journalières de l’environnement.
Cette relation suggère aussi que les photons absorbés par le PSII ont tous la même probabilité de provoquer des
dommages.

5-Dégradation de D2. L’exposition aux fortes lumières provoque aussi la destruction de D2. Cette destruction
se déroule selon un processus analogue à ce qui a été décrit pour D1: la lumière provoque une modification de
D2 la rendant disponible à l’action de protéases. Il est possible de montrer, comme dans le cas de D1, que sa
dégradation à 23°C peut se faire à l’obscurité après une exposition à la lumière et à basse température (2°C).

6- Synthèse de DI et de D2. Deux gènes du génome chloroplastique, appelés respectivement psbA et psbD,
codent pour D1 et D2. L’expression de ces gènes est très élevée à la lumière, et cela pourrait bien être reliée à
l’augmentation, dans ces conditions, du turn-over des protéines dont ils contrôlent la synthèse. Ces deux
protéines sont synthétisées dans le chloroplaste et insérées dans la membrane. La régulation, dans le
chloroplaste, de ces synthèses au niveau de la transcription, traduction et des mécanismes post-traductionnels, se
fait grâce à des protéines codées par le génome nucléaire, traduites sur les ribosomes du cytoplasme, puis
importés dans le chloroplaste (Nichelsen et Rochaix, 1994). On rappelle qu’in vivo des PSII sont sous forme
dimérique (voir section « transfert d’électrons dans la membrane des thylacoïdes »).

Gabriel Cornic, Mars 2007 48


A la lumière,
(1) des centres PSII (CP43-D1-D2-CP47) sont phosphorylés. Leur phosphorylation est d’autant plus
grande que l’éclairement est élevé (Baena-Gonzalez et al., 1999).

(2) Dans les zones accolées des thylacoïdes courts qui forment les grana, les centres PSII phosphorylés
sont sous forme dimérique.

(3) Il se produit une momérisation des dimères probablement après que D1 ait été endommagé. Et c’est
sous forme monomérique que les centres qui se sont alors dissociés des antennes migrent dans les thylacoïdes
longs. C’est là que va avoir lieu la réparation. Les thylacoïdes longs sont en effet au contact direct avec le stroma
où se trouve la machinerie nécessaire.

(4) Dans les thylacoïdes longs, les monomères sont graduellement déphosphorylés ; cela permet la
séparation des différents complexes polypeptidiques qui les compose.CP43 est tout d’abord déphosphorylé, puis
D1 et D2.

(5) Une nouvelle copie de D1 (éventuellement de D2) est faite. Et un nouveau centre est formé (CP43-
D1-D2-CP47). Les polypeptides non endommagés sont réutilisés en l’état.

(6) Les nouveaux centres migrent vers les grana, se dimérisent et s’associent aux antennes.

(7) À noter. La phosphorylation des monomères prévient probablement leur dégradation tant que la
réparation ne peut pas se faire.

(8) La déphosphorylation pourrait servir à la fois à la séparation des polypeptides composant les centres
et à la protéolyse de D1 en coordination avec le fonctionnement des ribosomes dans le stroma.

On pense que la vitesse de démantèlement du PSII n’est pas une étape limitante dans la plupart des
conditions environnementales. La vitesse de dégradation de D1 est par contre probablement limitante et met un
frein sur la vitesse de synthèse.

7- Interaction entre les fortes lumières et le métabolisme photosynthétique. Interaction avec les facteurs de
l'environnement. Tout facteur qui diminue le métabolisme photosynthétique, augmente la quantité de lumière
excédentaire et par conséquent est susceptible d'accroître la photoinhibition.

a-Effet de la fraction molaire de CO2 et de O2 ans l’air ambiant. Un rôle protecteur de la


photorespiration? L'effet de la concentration de CO2 durant une période de forte lumière (la DFQP durant le
traitement est de 2000 μmoles m-2 s-1) sur la photoinhibition est présenté Fig.Lu43A dans le cas d'une plante en
C3 (Powles et Osmond, 1978), le Haricot , (Phaseolus vulgaris). Les feuilles utilisées dans cette expérience sont
placées dans 1% de O2, condition qui inhibe la photorespiration. Lorsqu'une feuille de plante en C3 est dans cette
situation, les électrons produits par le PSII sont très majoritairement utilisés pour réduire de dioxyde de carbone.
Dans le cas présent, la photoinhibition est évitée lorsque la fraction molaire de CO2 durant la période sous la
DFQP 2000 μmoles m-2 s-1 est de 60 ppm environ (Powles et Osmond, 1978).
On peut mesurer que l'activité photosynthétique juste nécessaire pour éviter les dommages induits par
la période de forte lumière est d'environ 7 μmoles CO2 m-2 s-1.
En admettant que l'absorption de 9 photons est nécessaire à l'assimilation d'une molécule de CO2 on
calcule que cette activité a permis l'élimination de 63 μmoles photons m-2 s-1, ce qui représente seulement (63/
2000)x100 = 3,15% de la lumière incidente à la feuille.
Si l'on admet que 80% de la lumière incidente a été absorbée (ce qui est le cas pour la plupart des
plantes de culture), on calcule que l'activité photosynthétique durant le traitement a permis l'élimination de
(63/1600)x100 = 3,94% de la lumière absorbée. L'activité photosynthétique "protectrice" ne consomme donc
qu'une toute petite partie de l’énergie apportée par la lumière arrivant sur la feuille.
Il est peu probable que cette activité protectrice exerce son rôle en drainant quantitativement l'énergie
absorbée par les pigments photosynthétiques. Elle joue plutôt son rôle en permettant le fonctionnement
harmonieux de la chaîne de transfert d'électrons et des mécanismes de protection contre les fortes lumières (voir
plus bas).
La Fig.Lu43B montre que la photorespiration peut être associée à un flux d'électrons suffisant pour
permettre le fonctionnement de ces mécanismes de protection. En effet une feuille de Moutarde blanche
maintenue dans un air sans CO2 est protégée de l'effet des fortes lumières lorsque la concentration d'oxygène
durant le traitement est d'environ 5% . Ce type d'expérience a permis de supposer que la photorespiration pouvait

Gabriel Cornic, Mars 2007 49


avoir un rôle dans l’appareil photosynthétique (Cornic, 1976, 1978) suivant la suggestion faite par Osmond et
Björkman (1972).
Ce rôle serait important chez les plantes soumises à sécheresse. Dans cette situation, la concentration de
CO2 s'abaisse dans les feuilles car il est consommé par les chloroplastes plus vite qu'il n'est fourni par sa
diffusion à partir de l'air ambiant : la fermeture des stomates freinant cette diffusion (Cornic, 2000). Ceci est
favorable au fonctionnement de l'activité oxygénase de la Rubisco et donc de la photorespiration. Un flux
minimum d'électrons est ainsi maintenu dans les membranes photosynthétisantes : il permet le fonctionnement
des mécanismes de dissipation thermique de l'énergie lumineuse absorbée.

100
A 50 B
80

% d'inhibition
40
%d'inhibition

60 30
40 20
20 10
0 0
-20
0 20 40 60 80 0 1 2 3 4

Ca, (ppm) teneur en O2, (%)

Figure Lu43. A : Relation entre l’inhibition du rendement quantique de l’assimilation de CO2 de feuilles de Haricot et la teneur
en CO2 ambiante (Ca) durant une exposition sous 2000 µmoles m-2 s-1 dans une atmosphère contenant 1% de O2. Le rendement
quantique est mesuré avant et après le traitement sous la forte lumière : ce qui permet le calcul d’un % d’inhibition ((Avant-
Après)100/Avant). Chaque point correspond à la réponse d’une feuille placée dans une atmosphère contenant 1% de O2 à une
teneur particulière en CO2 (d’après Powles et Osmond, 1978). B : Relation entre l’inhibition de la photosynthèse de feuilles de
moutarde blanche et la teneur en O2 (%) durant une exposition sous 700 µmoles m-2 s-1 dans une atmosphère dépourvue de
CO2. Le protocole utilisé est similaire à celui exposée en A (d’après Cornic, 1978).

Récemment Takashi et Murata (2006) montre sur des cellules intactes de Chlamydomonas reinhardii que
l’interruption de la fixation de CO2 via le CPRC (milieu sans CO2 ou inhibiteur du CPRC) n’induit pas une
dégradation plus rapide de D1 mais plutôt inhibe sa synthèse après qu’elle ait été dégradé. Sur des chloroplastes
intacts, ils observent que cette inhibition est levée en présence d’acide phosphoglycérique (APG). Comme l’APG
est réduit par le NADPH produit par l’activité de la chaîne de transfert d’électrons dans le chloroplaste, les
auteurs supposent que cela diminue la production d’espèces active d’oxygène et freine l’inhibition de la synthèse
de D1.

b- Interaction avec les températures basses. La Fig.Lu44A montre que l'exposition d'une feuille de
Haricot pendant trois heures sous une DFQP de 2000 μmoles m-2 s-1 dans un air normal (contenant 350 ppm de
CO2 et 21% de O2) ne provoque aucune photoinhibition (mesurée par la diminution du rendement quantique
maximum mesuré à 25°C) lorsque la température durant le traitement reste supérieure à 12 °C. La
photoinhibition augmente lorsque la température pendant le traitement est plus faible que cette valeur critique.
La Fig.Lu44B illustre une expérience similaire réalisée aussi sur une feuille de Haricot. Dans cette
expérience la température de la feuille durant le traitement de trois heures est maintenue à 5°C sous une DFQP
qui varie de 300 à 2000 μmoles m-2 s-1. Ce traitement est sans effet sur le rendement quantique maximum jusqu'à
ce que la DFQP durant le traitement dépasse 500 μmoles m-2 s-1. Passée cette valeur la photoinhibition s'accroît
avec la DFQP. Ces deux expériences montrent bien l'interaction entre le froid et les fortes lumières. Dans les
conditions naturelles les dommages causés par les fortes lumières peuvent s'ajouter à ceux provoqués par les
basses températures (Powles et al, 1983).

Dans le cas des basses températures, on montre que l'oxygène est impliqué dans les réactions qui conduisent à la
photoinhibition. En effet, si l'on donne un traitement dans un air contenant 1% de O2 et 350 ppm de CO2, on
prévient très largement la baisse de rendement quantique (Powles et al. 1983). En présence de O2 et à basse
température il y a probablement fabrication d'espèces actives d'oxygène, peut être par l'intermédiaire d'une

Gabriel Cornic, Mars 2007 50


réaction de Mehler. Ces espèces actives provoqueraient les dommages observés car les enzymes participant à la
leur détoxication seraient fortement inhibées à basse température.

Inhibition du RQM, (%)


80 100
% Inhibition de ΦCO2
A B
80
60
60
40
40
20
20

0 0
0 5 10 15 20 25 0 500 1000 1500 2000
Température foliaire, (°C) DFQP, (μmoles m-2 s-1)

Figure Lu44. A : variation de l’inhibition du ΦCO2 produit par une période de forte lumière (2000 µmoles m-2 s-1) de trois
heures en fonction de la température durant la période de forte lumière. B : variation de l’inhibition du ΦCO2 produit par une
période de lumière de trois heures données à la température de 5°C, en fonction de l’éclairement durant la période de
lumière. Les mesures sont faites sur des feuilles de Haricot maintenues dans un air normal contenant 350 ppm de CO2 (D’après
Powles et al., 1983). Dans tous les cas l’inhibition de ΦCO2 est mesurée à 25°C.

c- Interaction avec la sécheresse.


Vitesse du transfert d'électrons,

100
(% de la valeur initiale)

Figure Lu45 Variation de l’inhibition du transfert d’électrons


80
mesurée sur des thylakoïdes isolés de feuilles de N. oleander
cultivé sous pleine lumière (z) ou sous ombrage (o) et soumis
60
à sécheresse, en fonction du potentiel hydrique foliaire durant
la sécheresse. Le transfert d’électrons est mesuré in vitro en
40 présence de méthyl viologène (D’après Björkman et Powles,
1984).
20

0
-6 -4 -2 0
Potentiel hydrique foliaire, (MPa)

L'interaction entre les fortes lumières et la déshydratation a été démontrée la première fois sur le Laurier rose
(Nerium oleander), en arrêtant l'arrosage de plantes cultivées sous plein éclairement ou sous ombrage et en
regardant, dans ces deux cas, les dommages qui apparaissent sur les membranes photosynthétiques isolées, en
fonction du degré de déshydratation. Cette étude, menée par Björkman et Powles (1984), a montré que l'activité
totale de la chaîne de transport d'électrons dans les thylacoïdes diminuait dès que les plantes cultivées à la
lumière présentaient un déficit tandis qu'elle demeurait inchangée chez les plantes cultivées à l'ombre jusqu'à ce
que le potentiel hydrique foliaire s'abaisse à -3 MPa environ (Fig.Lu45).

Cependant dans d'autre cas, comme ceux du cotonnier et du tabac l'interaction entre sécheresse et fortes lumières
n'a pas pu être mis en évidence. On ne comprend pas actuellement la raison de la différence de réponse entre ces
espèces. La sécheresse augmente aussi l’effet des fortes lumières sur l’inhibition du rendement quantique
maximum du photosystème II chez le Maïs. Dans ce cas, on montre qu’il n’existe pas de mécanisme spécifique
de photoinhibition induit par la sécheresse (Saccardy et al., 1998).

Gabriel Cornic, Mars 2007 51


8- Mécanismes d'évitement des fortes lumières. Il faut tout d’abord noter l’importance des caroténoïdes dans
la protection contre la lumière : les inhibiteurs de leur synthèse sont des herbicides. Les caroténoïdes sont en
effet capables d’éliminer les états triplets de la chlorophylle ainsi que l’oxygène singulet qui peut se former lors
du fonctionnement de l’appareil photosynthétique. Les mutants dépourvus de caroténoïdes ne peuvent pas être
cultivés sous une lumière supérieure à 50 µmoles m-2 s-1, qui normalement est proche du point de compensation
pour l’assimilation du CO2. Les antioxydants comme l’αtocophérole, l’acide ascorbique, le glutathion (voir
chapitre « transfert d’électrons dans la membrane du thylacoïdes ».), sont aussi importants lorsque les espèces
actives d’oxygène ont pu se former.
Les feuilles des plantes exposées à la pleine lumière, dans un milieu où l'eau est limitante, présentent
souvent une pubescence bien développée qui augmente leur réflectance et diminue ainsi la lumière qu'elles
absorbent. Cela a été examiné ci-dessus au paragraphe A2. La réflectance peut être aussi augmentée grâce à la
présence de cires sur l'épiderme. Les chloroplastes des feuilles soumises à de fortes lumières peuvent aussi se
déplacer de telle sorte que leur position dans ces conditions minimise l'absorption de la lumière.

Il y a deux types de mécanismes : les mécanismes "en amont" qui empêchent l'absorption de la lumière par les
chloroplastes et les mécanismes "en aval" qui provoquent la dissipation de l'énergie absorbée par les antennes
collectrices avant qu'elle n'atteigne les centres réactionnels.

a- Mécanismes "en amont".

(1)-Le mouvement des feuilles peut aussi faire partie des mécanismes d'évitement des fortes
lumières. Le parahéliotropisme désigne le mouvement qui place la feuille parallèle au rayonnement solaire. Ce
mouvement et ses conséquences sur l'expression de la photoinhibition sont examinés ici chez une plante de
sous bois que l'on rencontre en Californie : Oxalis oregana. Cette plante, exposées habituellement à des DFQPs
d'environ 4 μmoles photons m-2 s-1 dans les sous-bois, subissent des périodes de fortes lumières lorsqu'elles sont
exposées à des taches de soleil. Ces fortes lumières, qui, dans bien des cas sont supérieures à ce que ces plantes
tolèrent, peuvent provoquer une photoinhibition.

0
Figure Lu46. Changements d’angle mesuré à partir de
Angle de la feuille avec
l'horizontale (degré)

4 1590 4 l’horizontal d’une feuille d’Oxalis oregana lors de changement


20
soudain de l’éclairement. La séquence est la suivante : DFQP
de 4 µmoles m-2 s-1 puis de 1590 µmoles m-2 s-1 et de 4 µmoles
40
m-2 s-1 à nouveau (D’après Powles et Björkman, 1981).
60

80

100
0 10 20 30 40 50 60 70
Temps (min)

Dans la lumière des sous bois les feuilles d'Oxalis oregana sont horizontales. Soumises à une tache de soleil
elles changent d'orientation de façon remarquablement rapide, en s'écartant de l'horizontale en direction du sol.
Leur mouvement se termine lorsqu'elles sont parallèles au rayonnement direct. Lorsque la tache de lumière
disparaît, la feuille reste un moment dans cette position, puis regagne lentement l'horizontale (Fig.46). Si l'on
maintien les feuilles horizontales durant le passage d'une tache de lumière, on constate une photoinhibition
mesurable par le changement de rendement quantique. Ces mouvements de feuilles sont sous la dépendance de la
lumière bleue. En laboratoire, la feuille reste horizontale si l'on place devant la lampe qui l’éclaire un filtre qui
coupe les longueurs d'onde inférieures à 500 nm. Si l’éclairement est alors suffisamment élevé, la feuille peut
souffrir de photoinhibition. Le mouvement d’évitement est remarquablement rapide puisqu’il est terminé en 10
minutes environ. Il est sous la dépendance d’un pulvinus, organe situé à la base du pétiole, dans son
prolongement et qui entoure complètement le système vasculaire : lorsque la feuille évite la lumière, les cellules
de la partie supérieure du pulvinus deviennent très turgescentes, tandis que les cellules de la partie inférieure
perdent leur turgescence : cela provoque le mouvement vers le sol. Lorsque la feuille regagne sa position
horizontale, ce sont les cellules de la partie supérieure qui deviennent turgescentes et celles de la partie

Gabriel Cornic, Mars 2007 52


supérieure perdent leur turgescence. Les pertes et les gains d’eau par ces cellules sont gouvernés par des
mouvements de K+ principalement, mais aussi d’acides organiques et de Ca++. Ces mouvements d’ions ont
beaucoup de similarité avec les mouvements observés lors de la fermeture et de l’ouverture des stomates.

(2)-Les mouvements des chloroplastes. Les chloroplastes des feuilles exposés à la lumière peuvent
changer d'orientation et se placer grand diamètre parallèle à la lumière incidente, se regroupant souvent le long
de la paroi cellulaire parallèle au rayonnement. Leur réorientation est possible grâce à des mouvements du
cytosquelette déclenchés par la lumière bleue (réponse via les phototropines). La réorientation des chloroplastes
contribue, chez certaines plantes, de façon très significative à la protection contre les fortes lumières. Elle
entraîne une diminution de la quantité de lumière absorbée, vue généralement grâce à une augmentation de la
transmission et dans une moindre mesure de la réflexion des feuilles exposées. Ces mouvements associés aux
changements de propriétés optiques des feuilles ont été observés chez Oxalis oregana, Marash fabaceus
(Brugnoli et Björkman, 1992), et chez tradescantia albiflora (Park et al. 1996); Par contre on ne les observe pas
chez le Pois. Ces mouvements sont rapides et sont terminés 20 minutes environ après le début de la période de
fort éclairement. Ils peuvent entraîner une baisse de 20 à 30% de la lumière absorbée.

b-Mécanismes "aval" : La dissipation thermique au niveau du PSII. Si, malgré les mécanismes
d'évitement qui ont été décrits ci-dessus, les centres réactionnels du PSII sont soumis à des lumières
excédentaires, une partie de l'énergie absorbée par les antennes collectrices est dissipée sous forme de chaleur.
L'excitation qui atteint les centres réactionnels est alors plus faible à tous les niveaux d'éclairement auxquels sont
exposés les feuilles : l'accroissement de la dissipation thermique se manifeste par une diminution du rendement
quantique de la photosynthèse.

Comment se met en place cette protection ?

Quand l'énergie collectée par les photosystèmes excède la capacité du métabolisme photosynthétique à
l'utiliser, l'ATP n’est plus synthétisé assez vite et les protons s’accumulent dans le lumen dont le pH s’abaisse
alors. L’acidification du lumen est le point de départ d’une série de réactions qui va modifier l’importance
relative des voies de dissipation de l’énergie absorbée dans les antennes par les chlorophylles, voies qui sont en
compétition entre elles. Lorsque la dissipation par voie thermique augmente, la dissipation via la photochimie et
l’émission de fluorescence diminue. On utilise les modifications de l’émission de la fluorescence
chlorophyllienne pour estimer la dissipation thermique en mesurant NPQ (Non Photochemical Quenching, NPQ
= (Fm – Fm’)/ Fm’ ; voir chapitre « L’émission de la fluorescence chlorophyllienne-mesure et utilisation ») c’est
à dire l’extinction de la fluorescence indépendante de la photochimie.
Une augmentation de NPQ indique un accroissement de la dissipation thermique.
NPQ comprend au moins 3 composantes : qE, qT et qI.

a-qE, le quenching énergétique.

La dissipation thermique liée à la baisse de pH dans le lumen et son renforcement par la formation
d’anthera- et de zéaxanthine. La baisse du pH dans le lumen induit une augmentation immédiate (de l’ordre de
la seconde) de NPQ. Cette rapidité de réaction est suffisante pour prendre en charge toutes variations
d’éclairement dues à des passages nuageux. qE est rapidement réversible.
Sur des thylacoïdes isolés et incubés à la lumière, un quenching non photochimique est rapidement
induit ; il disparaît rapidement à l’obscurité ou lorsque l’on ajoute au milieu réactionnel un découpleur qui
dissipe le ∆pH de part et d’autre de la membrane thylacoïdienne. Si l’on incube des thylacoïdes isolés à
l’obscurité, on peut induire un quenching non photochimique en ajoutant de l’ATP dans le milieu : l’ATP est
hydrolysé par l’ATP synthase fonctionnant comme hydrolase entraînant une diminution du pH dans le lumen
(voir Müller et al., 2001, pour plus de détails).

Lorsque le pH dans le lumen reste bas suffisamment longtemps une enzyme la violaxanthine dé-époxydase
(VDE), est activée : elle catalyse la transformation de la violaxanthine en anthéraxanthine elle-même
transformée ultérieurement en zéaxanthine (Fig.Lu47. Son pH optimum d’activité est d’environ 5,2. Elle utilise
de l’acide ascorbique, seulement sous sa forme acide, comme source de pouvoir réducteur. Protonée, elle
s’associe fortement à la membrane du thylacoïde lorsque le pH est inférieur à 6,5. A pH 7, elle est mobile dans le
lumen.

L’acide ascorbique utilisé vient du stroma d’où il diffuse librement à travers le thylacoïde dans le lumen.
L’activité de la VDE est probablement aussi régulée par la disponibilité en acide ascorbique. En effet :

Gabriel Cornic, Mars 2007 53


(1) Il est possible d’inhiber l’activité de la VDE sur des chloroplastes intacts isolés en ajoutant au milieu
réactionnel de l’H2O2. L’ascorbate se trouvant dans le stroma est alors utilisé pour éliminer le peroxyde
d’hydrogène via la série de réactions décrite chapitre « transfert d’électrons dans la membrane du thylacoïde » et
moins d’acide ascorbique est disponible pour alimenter la réaction catalysée par la VDE dans le lumen
(Neubauer et Yamamoto, 1994).

(2) En prenant en compte le pKa de l’acide ascorbique (4,2), le pH du lumen à la lumière (environ 8) et
une concentration moyenne d’ascorbate de 50 mM dans le stroma, il est possible de calculer que la concentration
d’acide ascorbique qui est disponible pour la diffusion vers le lumen est de 8 µM environ, ce qui est bien
inférieur au Km de la VDE pour ce composé. La concentration d’acide ascorbique dans le lumen peut donc
contrôler la vitesse de la réaction.

(3) Lorsque la concentration d’ascorbate est augmentée de 4 fois dans une feuille de maïs après son
infiltration par un intermédiaire de sa synthèse (le L-galactono-1,4 lactone, voir chap…) il se produit une
accélération de la dé-époxydation de la violaxanthine.

Lumen Stroma

DHA GSH NADP+

AsA GSSG NADPH

Violaxanthine NADP+
V
D Anthéraxanthine
Z
E E
Zéaxanthine
NADPH
AsA
O2
DHA

Fig.Lu47. schéma montrant la dé-époxyadation de la violaxanthine en Anthéra- puis Zéaxanthine. L’enzyme qui catalyse
cette réaction, la violaxanthine dé-époxydase (VDE) utilise la forme acide de l’ascorbate (AsA) qui diffuse librement à partir
du stroma, en traversant la membrane thylacoïdienne. Le déhydro-ascobate produit par cette réaction doit repasser dans le
lumen pour être réduit en AsA à l’aide du gluthation. La VDE s’associe à la membrane lorsque le pH est inférieur à 6,5. La
Zéaxanthine peut être époxydée sous l’action de la Zéaxanthine époxidase (ZE) en présence de O2 et de NADPH+H+.

Après son utilisation par la VDE, l’acide ascorbique donne de l’acide déhydroascorbique (DHA) qui doit migrer
dans le stroma à travers le thylacoïde, pour donner à nouveau de l’AsA sous l’action de la déhydroascorbate
réductase utilisant le du glutathion (GSH). En effet le système régénérant l’acide ascorbique à partir de l’acide
déhydroascorbique n’existe pas dans le lumen. Peut être un transport actif du DHA du lumen en échange de
l’ascorbate du stroma existe-il (Eskling et al., 1997). Dans ce cas, l’ascorbate arrivant dans le milieu acide du
lumen serait protoné pour donner la forme acide utilisée. La zéaxanthine amplifie et stabilise l’effet de la baisse
de pH dans le lumen. Pour un même pH du lumen, le NPQ est plus élevé en présence de zéaxanthine. Ces
réactions se déroulent en quelques minutes (5 à 10).
L’époxydation de la zéaxanthine en anthéraxanthine puis en violaxanthine, réactions qui complètent le
cycle des xanthophylles, est catalysée par la zéaxanthine époxydase (ZE) dont le fonctionnement nécessite de
l’O2 et des ferrédoxines réduites ou du NADPH+H+. La ZE est localisée côté stroma sur la membrane
thylacoïdienne. Son activité est la plus élevée à pH 8, et l’on pense qu’elle est constamment active, à la lumière
comme à l’obscurité.

Gabriel Cornic, Mars 2007 54


En résumé : l’augmentation du NPQ à la lumière est d’abord indépendante de la formation de
zéaxanthine, puis devient dépendante de l’accroissement de sa concentration. Lors du retour de la feuille à
l’obscurité la dissipation thermique diminue d’abord rapidement en suivant l’augmentation de pH qui regagne
une valeur voisine de 7 (éloignée de l’optimum pour l’activité de la VDE), puis lentement, limitée par la vitesse
de l’époxydation de la zéaxanthine.
Cependant, si l’on place la feuille dans une atmosphère pauvre en O2 (0,1 à 0.5%) la zéaxanthine n’est
pas ré-époxydée et la dissipation thermique diminue très lentement (Cornic et al., 2000).
Il est a noter que les corrélations entre NPQ et l’activité du cycle des xanthophylles sont bien meilleures
lorsque l’on prend en compte à la fois la formation d’anthéra- et de zéaxanthine : l’un des cycles de la molécule
d’anthéraxanthine est réduit tandis que les deux le sont dans la molécule de zéaxanthine. Si bien qu’une pratique
courante consiste à exprimer l’état d’époxidation de la violaxanthine par le rapport des concentrations (anthéra-
+ zéaxanthine)/ (anthéra- + zéa- + violaxanthine).

Mécanisme de qE. La baisse du pH dans le lumen permet la protonation de certaines protéines « antennes ».
D’autres part, la zéaxanthine pourrait être diriger vers des sites spécifiques encore mal connus (voir Morosinotto
et al., 2003). Cela entraînerait un changement de conformation de l’antenne facilitant la désactivation rapide de
la chlorophylle excitée à l’état singulet sous forme de chaleur. Peut être les CP29 et les CP26, polypeptides
faisant le lien entre l’antenne périphérique et l’antenne interne, et qui ne contiennent que de la chl.a sont-ils
concernés ? Cela reste encore discuté (Anderson et al, 2001). En tout état de cause, il apparaît bien que la
protéine Psbs soit nécessaire pour l’établissement de qE. Psbs appartient à la famille des protéines antennes
(voir chapitre « transfert d’électrons dans la membrane du thylacoïde ») bien qu’elle possède 4, et non 3, hélices
transmembranaires. En effet, des mutants dépourvus de cette protéine sont incapables de quenching non
photochimique (Li et al., 2000). La position de PsbS n’est pas encore connue. Elle pourrait interagir avec
l’antenne périphérique trimérique du PSII.
La baisse de pH dans le lumen est liée à des changements d’absorption des feuilles ou des chloroplastes
isolées.
L’un de ces changements s’observe à 505 nm et est caractéristique de l’absorption par la zéaxanthine.
L’autre se mesure à 535 nm et dépend à la fois de l’établissement d’un bas pH dans le lumen et aussi de
la formation de zéaxanthine. On pense qu’il témoigne du changement de conformation dans les membranes
thylacoïdiennes. L’établissement d’un quenching non photochimique est toujours accompagné d’une
modification de l’absorption des feuilles à 535 nm. On utilise ses changements d’absorption sur des feuilles
intactes pour suivre la formation de Zeaxanthine et l’énergisation de la membrane thylacoïdienne.

L’intervention du cycle des xanthophylles dans l’établissement de qE a été étudiée en utilisant un


inhibiteur de la violaxanthine dé-époxydase et des arabettes mutantes. Un autre rôle pour la zéaxanthine.
Le dithiotreitol (DTT) est un inhibiteur assez spécifique de la VDE. On inhibe l’augmentation de NPQ à la
lumière chez une feuille coupée en lui fournissant du DTT par le flux transpiratoire. En même temps, on la rend
plus sensible à la photoinhibition. Une série de mutants, chez lesquelles, entre autres, il n’y a pas d’activité VDE,
a été isolée chez A. thaliana (mutants npq). Ces mutants ne peuvent pas, ou seulement faiblement, développer un
quenching non photochimique à la lumière. Leur sensibilité à la photoinhibition est aussi plus grande.
Certains de ces mutants accumulent de la zéaxanthine quelles que soient les conditions. Cependant dans
ce cas, NPQ doit être induit par une baisse de pH dans le lumen. Cela montre bien que l’établissement du bas pH
est central dans le mécanisme. Cela indique aussi que la zéaxanthine peut jouer un autre rôle dans l’appareil
photosynthétique. De fait, la majorité des molécules de zéaxanthine reste dans la couche bilipidique des
thylacoïdes ; peu d’entre elles, relativement, s’associent aux protéines des photosystèmes. Les molécules de
zéaxanthine qui demeurent libres dans la membrane tendraient à rigidifier les thylacoïdes. En effet, leur longueur
correspond exactement à l’épaisseur de cette membrane dans laquelle elles joueraient le rôle de rivets (voir
chapitre « effets de la température sur la photosynthèse ». Cette rigidification contribuerait

(1) à la résistance de l’appareil photosynthétique aux températures élevées et

(2) probablement aussi aux changements de conformation liés aux modification de l’absorption à 535 nm.

b-qT. C’est la partie du quenching non photochimique qui est due à la migration de la partie mobile de
l’antenne du PSII, lorsqu’elle est phosphorylée, sur le PSI (voir « chapitre sur le transfert d’électrons dans la
membrane du thylacoïde »). Il est peut probable que ce processus, qui conduit à une diminution de la section de
capture de la lumière par le PSII joue un rôle dans la protection contre la lumière excédentaire : en effet, lorsque
le flux quantique dépasse 100 à 150 µmol m-2 s-1 les polypeptides sont déphosphorylés et pourraient regagner
leur position d’origine. Dans ce cadre, qT ne serait qu’une composante très mineure de NPQ.

Gabriel Cornic, Mars 2007 55


c-qI. Représente le quenching due à la dégradation des protéines PSII. Il contribue à la baisse du
rendement quantique maximum, et dans cette optique, peut être aussi considéré comme un mécanisme
protecteur : une partie du système étant dégradé pour sauver l’autre partie ! Lors du retour à la lumière, ce
quenching disparaît lentement (pas de temps de plusieurs heures).

d-Comment peut-on connaître la part due à la baisse de pH et au cycle des xanthophylles, et celle
due à la photoinhibition dans la baisse du rendement quantique induit par des lumières excédentaires ? La
dégradation de D1 comme l’augmentation de la dissipation thermique, provoque une baisse du rendement
quantique maximum du dégagement de O2. Dans ce dernier cas, en effet, l’énergie lumineuse est absorbée par
les photosystèmes mais n’est pas utilisée pour oxyder P680. Il en résulte donc une baisse du rapport (O2
dégagé)/(énergie absorbée).
L’une des façons de répondre à la question posée en tête de cette section, est de regarder la relaxation à
l’obscurité, ou mieux, sous une lumière rouge sombre (730 à 750 nm), du NPQ. Si le quenching non
photochimique est entièrement relaxé en 15 à 20 minutes, on conclut que seul la baisse de pH dans le lumen
associé à la formation de zéaxanthine a été mise en œuvre à la lumière.
Pourquoi la lumière rouge sombre est-elle nécessaire ?
Dans ces conditions on active le PSI et on oxyde la totalité du pool des plastoquinones, permettant
l’ouverture rapide de tous les centres PSII (voir chapitre « L’émission de la fluorescence chlorophyllienne-
mesure et utilisation »).
On peut aussi prélever un fragment de la feuille qui a été soumise à une forte lumière, et la laisser
incuber sous faible lumière (3 à 4 µmoles m-2 s-1, ce que l’on a au bord d’une paillasse dans un laboratoire) sur
une solution de lyncomicine (3 à 5 mM). Si après plusieurs heures dans ces conditions, le rendement quantique
n’est pas égal à celui avant le traitement, il y a eu une dégradation des protéines PSII (la réparation ne se fait pas
en présence de cet antibiotique). Dans le cas contraire, seules les réactions liées au pH et à la formation de
zéaxanthine sont impliquées.

9- La photoinhibition dans les conditions naturelles. La photoinhibition s'observe dans les milieux naturels où
les conditions sont contraignantes. Elle a été en particulier mesurée dans les mangroves et dans les pays froids.

a- Cas des mangroves. Les mangroves sont des formations végétales de zones tropicales qui se
trouvent en bordure de mer le long de l'embouchure des rivières. Les plantes qui les composent ont leurs racines
qui plongent dans des milieux très humides contenant beaucoup de sels. Cette forte salinité est très contraignante
car elle entraîne une faible disponibilité de l'eau (la solution dans laquelle plongent les racines a un faible
potentiel hydrique) induisant un déficit en eau dans les feuilles.

Tableau.Lu5. Effet de l'exposition et de l'orientation des feuilles chez 4 espèces appartenant à la mangrove. Les
mesures sont faites dans les conditions naturelles au cap Ferguson (Queensland d u Nord, Australie) (D'après
Björkman et al. 1988). La fraction molaire de CO2 durant les mesures est d’environ 5%. C’est donc le
rendement quantique maximum qui est mesuré.

Espèce Exposition Φ O2

Aegielitis annulata Ombragée 0.078


Exposée Sud 0.060
Exposée Nord 0.054
Avicennia marina Ombragée 0.078
Exposée Sud 0.071
Exposée Nord 0.043
Rhizophora stylosa Ombragée 0.075
Exposée Nord 0.047
Sonneratia alba Ombragée 0.078
Exposée Nord 0.036

Gabriel Cornic, Mars 2007 56


De fait les plantes des mangroves, comparées aux plantes qui ne sont pas des halophytes, présentent une
photosynthèse plus faible liée à une conductance stomatique plus faible et une concentration de CO2 plus petite
dans les espaces intercellulaires (Voir chapitre « Diffusion du CO2 dans la feuille »). Dans ces milieux les
feuilles exposées directement à la lumière solaire peuvent être soumises à des DFQP atteignant 2000 μmoles m-2
s-1.
Le Tableau Lu5 montre, dans le cas de quatre espèces d'une mangrove située au cap Fergusson au Nord
du Queensland (Australie), que les feuilles directement exposées à la lumière solaire présentent un plus faible
ΦO2 que les feuilles ombragées par leurs voisines. Chez les feuilles exposées, celles qui sont orientées vers le
soleil (azimut Nord, le Queensland est dans l'hémisphère Sud), présentent la plus grande diminution du ΦO2.
Lorsque les feuilles exposées sont ombragées, il y a une reprise progressive d'activité : le ΦO2 atteint sa valeur
maximum en plus d'une semaine chez Avicennia marina et Rhizophora stylosa et en un peu plus de 2 jours chez
Sonneria alba.
La baisse durable de rendement quantique diminue la quantité de lumière excédentaire (voir Fig.26).
Mais ceci a un coût : l'activité photosynthétique est réduite par rapport à son niveau potentiel lorsque
l'éclairement est faible durant la journée (lorsqu'il est dans la zone où il limite la photosynthèse), c'est à dire au
moins au petit matin et dans la soirée.

b-Les températures fraîches. Les données météorologiques indiquent, lors de l'émergence des cultures
en Europe de l'ouest (début mars à fin avril), qu'il peut se produire des épisodes de températures fraîches liées à
des ensoleillements importants. Les risques de photoinhibition sont importants dans ces conditions (voir la Fig.
35). En Europe du nord, les températures basses sont souvent associées à un ciel clair dans les mois d'Avril et
Mai, lorsque la végétation redémarre après l'hiver. Là aussi, les risques de photoinhibition sont évidents. Les
risques sont encore plus grands si les plantes subissent l'hiver, comme c'est le cas de certains arbres à feuilles
persistantes, ou même de certaines plantes cultivées comme le chou.
De fait, une photoinhibition a été mise en évidence sur des cultures de Maïs faites en Essex
(Angleterre). Durant les 60 premiers jours de culture, les feuilles directement exposées à la lumière montrent
une réduction d'environ 45% du rendement quantique maximum de la fixation du CO2 lorsque des températures
d'environ 10°C étaient associées à un ciel clair. Cette inhibition du rendement quantique est lentement réversible.
Il faut au moins deux jours de temps chaud et couvert pour que les effets du temps clair disparaissent.
La photoinhibition a été vue durant l'hiver, sur des aiguilles de semis de Pinus sylvestris, sur des feuilles
d'Eucalyptus pauciflora appelée encore en Australie du nom évocateur de Snowgum, enfin sur les feuilles de
Ilex aquifollium. Dans tous les cas la photoinhibition disparaît progressivement lorsque les feuilles sont
ombragées ou mises à l'obscurité.

c-Autres. La photoinhibition a été aussi observée sur le phytoplancton. En particulier, le phytoplancton


qui demeure en surface dans les eaux se trouvant proche ou au niveau de l'équateur lorsqu'un thermocline se
forme durant la journée entre 2 et 5 m de profondeur, se trouve exposé à de fortes lumières qui induisent une
photoinhibition de grande amplitude. Cette photoinhibition est suffisante pour diminuer fortement leur fixation
de carbone. Ceci est plus difficile à saisir dans les eaux tempérées où le mélange beaucoup plus rapide entre les
eaux de profondeurs différentes entraîne une circulation verticale intense du phytoplancton.

E- Résumé.
Le métabolisme photosynthétique est modulé rapidement par la lumière. L’assimilation du CO2 augmente avec
la lumière pour atteindre un plateau de saturation. Le point de compensation pour la lumière est l’éclairement
pour lequel l’assimilation de CO2 compense exactement les pertes de CO2 par la plante ou la feuille. Plantes en
C3 et plantes en C4 peuvent s’adapter à l’ombrage. Cette adaptation implique des modifications à différents
niveaux d’organisations : sous ombrage, la respiration, le point de compensation pour la lumière et
l’assimilation de CO2 sous lumière saturante sont plus faibles. Cela permet de maintenir l’acquisition du carbone
dans ces conditions. Concomitamment les plantes investissent leur énergie dans le développement des
thylacoïdes aux dépens des enzymes du CPRC. Le phénotype par défaut est le phénotype lumière dont
l’expression est modulée par la lumière bleue et l’état de réduction du pool des plastoquinones. Les plantes
présentent des réactions d’évitement en percevant l’augmentation relative du rouge sombre réfléchi par leurs
voisines dans la lumière ambiante via les phytochromes.
Le passage répété de taches de soleils sur les plantes de sous-bois, active progressivement les enzymes
du cycle de réduction du carbone entraînant une augmentation graduelle de l’assimilation du CO2 sous la lumière

Gabriel Cornic, Mars 2007 57


de fond à laquelle elles sont soumises. Le pouvoir réducteur (surtout sous forme de trioses phosphates) et
l’énergie s’accumulent aussi durant une tache de soleil : cela permet le maintien d’une fixation de CO2 plus
importante durant plusieurs secondes après le retour des conditions normales d’éclairement. La productivité des
plantes des sous-bois est dépendante de leur capacité à utiliser l’énergie apportée par les taches de soleil.
Lorsque les plantes sont soumises à un fort éclairement il se produit une photoinhibition de la
photosynthèse apparente qui se traduit au niveau de la feuille par une diminution du rendement quantique
maximum de l’assimilation de CO2. Les dommages causés par les fortes lumières se trouvent principalement au
niveau du PSII où la protéine D1, mais aussi D2, est dégradée. La dégradation est produite par l’oxygène
singulet formé par la désactivation de la chlorophylle à l’état triplet qui se forme lorsque l’excitation ne peut être
évacuée par voie photochimique. La photoinhibition est apparente au niveau de la feuille, lorsque la vitesse de
dégradation de D1 devient supérieure à sa vitesse de synthèse. La photoinhibition vraie se produit à tous les
niveaux de lumière et peut être étudiée en utilisant des inhibiteurs de la synthèse des protéines chez des feuilles
éclairées. Il existe des mécanismes d’évitement des fortes lumières à différents niveaux d’organisation. Ils
incluent (1) le mouvement des feuilles et des chloroplastes, qui se mettent parallèle au rayonnement lorsque
celui-ci devient excédentaire, (2) la baisse de pH dans le lumen couplé à la formation de zéaxanthine à partir de
la violaxanthine qui entraîne un accroissement de la dissipation thermique de l’énergie captée par les
photosystèmes, empêchant l’arrivée d’un excès d’excitation sur le P680. La photoinhibition est une composante
commune de l’effet produit par les autres contraintes environnementales comme les températures fraîches, le
manque d’eau et l’excès de sel. On peut observer la photoinhibition dans les conditions naturelles.

Gabriel Cornic, Mars 2007 58


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