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ÉDITION 2009

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Fiches techniques sur l’Union européenne – ÉDITION 2009


L’Union européenne
en un coup d’œil
L’objectif de ces fiches techniques est d’offrir
aux non-spécialistes une vue d’ensemble du
processus d’intégration européenne et de la
contribution du Parlement européen à cette
évolution.
De nouvelles fiches techniques sur des thèmes
actuels et sur les développements survenus au
cours des dernières années ont été récemment
mises en ligne, telles que: les réformes
institutionnelles introduites pour préparer
l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie;
les nouvelles perspectives financières; l’égalité
hommes/femmes; les politiques d’asile et
d’immigration; la gestion des frontières
extérieures; la coopération judiciaire en matière
civile et pénale; la politique sportive;
la stratégie de Lisbonne; la politique
européenne de voisinage; le Caucase du Sud

Fiches techniques
(Arménie, Azerbaïdjan, Géorgie); l’Asie centrale.
Avec 165 fiches mises à sa disposition, le
lecteur trouvera ici l’une des meilleures sources
d’information institutionnelle et politique.
Le contenu des fiches est structuré en six grands
thèmes, à savoir: le système de fonctionnement
de l’Union européenne; l’Europe des citoyens;
sur l’Union européenne
le marché intérieur; les politiques communes;
l’Union économique et monétaire; les relations
extérieures de l’Union européenne.
Les fiches techniques sont régulièrement mises à
jour sur le site internet du Parlement européen
en allemand, anglais et français
(http://www.europarl.europa.eu/).

Prix au Luxembourg (TVA exclue): 40 EUR


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Comment vous procurer les publications de l’Union européenne?
Publications payantes:
•  sur le site de l’EU Bookshop: http://bookshop.europa.eu;
•  chez votre libraire, en lui donnant le titre, le nom de l’éditeur et/ou le numéro ISBN;
•  en contactant directement un de nos agents de vente. Vous obtiendrez leurs coordonnées en consultant le site:  
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Édition 2009

Fiches techniques
sur l’Union européenne

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Sources des images:
Image «Carte»: © Digital Vision, Col. Antique maps
Image «Justice»: «Vignettes typographiques», Deberny et cie
Image «Mercure»: BNF/Gallica, «La métamorphose d’Ovide figurée», 1557
Image «Colonne»: BNF/Gallica, «architecture ou art de bien bastir», de Marc Vitruve Pollion, 1547
Image «Monnaies»: BNF/Gallica, «Le billon d'aur et d’argent», 1552
Image «Bateaux»: BNF/Gallica, illustrations de «Nova typis transact navigatio…», 1621
Manuscrit achevé en août 2008
Publication disponible en allemand, anglais, espagnol, français, italien et polonais
Ce manuscrit n’engage pas le Parlement européen en tant qu’institution.
Auteur de la publication: Parlement européen
Responsable de la publication: OLIVARES MARTÍNEZ Ismael, Directeur
Rédacteurs: ANDREANELLI Moira, ANDREICA Dana Maria, ANGELIDIS Angel, ANTOINE-GRÉGOIRE Jean-Louis,
APAP Johanna, ASIKAINEN Aila, BAHR Christine, BATTA Denis, BAUER Lothar, BAVIERA Saverino, BOEHNE
Thomas, BOSCHE Lars, BRAUN Judith Marion, BURSI Camilla, CALERS Hélène, CAMENEN François-Xavier,
CAPRILE Anna, CASALPRIM-CALVÉS Eva, CHAMBERS Graham, COMFORT Anthony, CRANFIELD Mairead, CSASZI
Levente, DALSGAARD Jens, D’ANGELO Sandro, DANKLEFSEN Nils, DELAUNAY Dominique, DOUAUD Armelle,
DUDRAP Thomas, EFTHYMIOU Maria, ENGSTFELD Paul, FULMINI Azelio, GADZHEVA Maya, GENTA Claire,
GHIATIS Georgios, GONZÁLEZ MONTES Ángela, GOOSEENS Yanne, GROTTI Marie-Claude, GYÖRFFI Miklos,
HEINZEL Huberta, HERNANDEZ-SANZ Ivan, HYLDELUND Karin, IBORRA MARTIN Jesús, IPEKTSIDIS Charalampos,
ITZEL Constanze, JAVELLE François, KAMERLING Josina, KAMMERHOFER Christa, KARAPIPERIS Théodoros,
KATSAROVA Ivanna, KAUFFELD Karin, KOWALKOWSKA Beata, KRAUSS Stefan, KRISTOFFERSEN Niels, LEHMANN
Wilhem, LENSEN Anton, LOPEZ ALVAREZ Olalla, LUCCHESE Anna, MACEDO Gonçalo, MAKIPAA Arttu, MASSOT
MARTI Albert, MC AVOY Robert-Francis, MECKLENBURG Karsten, MENEGHINI Gianpaolo, MUSTAPHA-PACHA
Mourad, NEVES Pedro, NUTTIN Xavier, OFFERMANN Klaus, OIKARINEN Jarmo, OLIVEIRA-GOUMAS Béatriz,
OLIVERT-AMADO Ana, OSTA-GAMEZ Rafaël, PABST Rheinhart, PACHECO Jose-Luis, PALINKAS Peter, PANIZZA
Roberta, PATTERSON George, QUILLE Gérard, RICHARD Pierre, RICHTER Jochen, ROSE Bryan, SCHELLING
Margret , SCHULZ Stefan, SOAVE Piero, SOSA IUDICISSA Marcello, SOURANDER Dag, SPINEI Cristina, SUBBAN
Andréa, TALSMA Adrian, TRONQUART Jean-François, TROUVÉ-TEYCHENNÉ Odile, VALENTINI Maria Rosaria,
VENTUJOL Philippe, VITREY Anne, WELIN Monika, WERNER Helmut, WINTHER Pernille, WITTENBERG John
Coordinateurs: ERHOLM Jari, GONZÁLEZ GARCÍA Isaac
Assistantes: BISCAUT Jackie, MACIAS LASO Beatrice

Europe Direct est un service destiné à vous aider à trouver des réponses aux questions
que vous vous posez sur l’Union européenne.
Un numéro unique gratuit (*):
00 800 6 7 8 9 10 11
(*) Certains opérateurs de téléphonie mobile ne permettent pas l’accès aux numéros 00 800 ou peuvent facturer ces appels.

De nombreuses autres informations sur l’Union européenne sont disponibles sur l’internet via le serveur
Europa (http://europa.eu).
Une fiche bibliographique figure à la fin de l’ouvrage.
Luxembourg: Office des publications officielles des Communautés européennes, 2009
ISBN 978-92-823-2471-4
© Communautés européennes, 2009
Reproduction autorisée, moyennant mention de la source
Printed in Spain
Imprimé sur papier blanchi sans chlore

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Note au lecteur

C ette édition 2009 des Fiches techniques sur l’Union européenne est la douzième depuis la
création de cette publication en 1979 à l’occasion de la première élection du Parlement
européen. Comme les précédentes, elle s’efforce de remplir l’objectif des Fiches techniques:
donner à des non-spécialistes un aperçu global de la construction européenne et de la
contribution du Parlement européen à ce processus, en demeurant simple, clair et concis et
en conservant une présentation matérielle aussi uniforme et aérée que possible.
Le nombre de fiches (165) et la structure du document n’ont été que légèrement modifiés
par rapport à l’édition précédente. Les développements survenus au cours des dernières
années, tels que la réforme de la politique agricole commune, le changement climatique ou
le développement du marché intérieur, y ont bien sûr été intégrés.
Chaque fiche est identifiée par un numéro, dont les deux premiers chiffres désignent la
partie et le chapitre auxquels la fiche appartient. Cette numérotation est utilisée pour les
renvois entre fiches. Au début du document, une table des matières donne la liste des fiches
ainsi numérotées, groupées en parties et chapitres.
Les articles des traités (traité instituant la Communauté européenne et traité sur l’Union
européenne) sont référencés sur la base de la numérotation introduite par le traité de Nice.
Les changements introduits par le traité de Lisbonne sont également référencés.
Cette nouvelle édition est fondée sur la situation législative existant en août 2008, date de
clôture de la rédaction.
Tout en actualisant l’ouvrage, nous espérons avoir encore progressé dans sa lisibilité et par
conséquent dans son utilité pour les lecteurs, en leur permettant d’acquérir rapidement une
connaissance suffisante de l’état d’avancement de tout aspect important de la construction
européenne. S’ils souhaitent approfondir cette étude, ils peuvent consulter des ouvrages
spécialisés, notamment les travaux réalisés par le secrétariat général du Parlement européen.
Les Fiches techniques sur l’Union européenne sont régulièrement mises à jour sur le site
internet du Parlement européen en allemand, anglais et français
(http://www.europarl.europa.eu/).
Signalons enfin que l’ouvrage est disponible sous la forme d’un CD-ROM (en 21 langues
officielles), que les lecteurs peuvent se procurer auprès de l’Office des publications des
Communautés européennes.

Secrétariat général du Parlement européen


Mars 2009

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Les fiches techniques
sur l’Union européenne

L’Union européenne en un coup d’œil

L’ objectif de ces fiches techniques est d’offrir aux non-spécialistes une vue d’ensemble du processus
d’intégration européenne et de la contribution du Parlement européen à cette évolution.
De nouvelles fiches techniques sur des thèmes actuels et sur les développements survenus au cours des
dernières années ont été récemment mises en ligne, telles que: les réformes institutionnelles introduites
pour préparer l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie; les nouvelles perspectives financières; l’égalité
hommes/femmes; les politiques d’asile et d’immigration; la gestion des frontières extérieures; la
coopération judiciaire en matière civile et pénale; la politique sportive; la stratégie de Lisbonne; la
politique européenne de voisinage; le Caucase du Sud (Arménie, Azerbaïdjan, Géorgie); l’Asie centrale.
Avec 165 fiches mises à sa disposition, le lecteur trouvera ici l’une des meilleures sources d’information
institutionnelle et politique.
Le contenu des fiches est structuré en six grands thèmes, à savoir: le système de fonctionnement de
l’Union européenne (UE); l’Europe des citoyens; le marché intérieur; les politiques communes; l’Union
économique et monétaire; les relations extérieures de l’Union européenne.

Le système de fonctionnement Les politiques communes

1 de l’Union européenne
L’Union européenne dispose d’un pouvoir
4 Pour agir d’une seule et même voix, l’Union
européenne a mis au point plusieurs
législatif et exécutif et d’un système politiques et actions que tous les pays
judiciaire indépendant, qui sont soutenus membres s’efforcent de suivre. Ces
et complétés par une série d’autres «politiques communes» concernent toute
institutions et organes. Les règles et les l’Union et visent des objectifs communs.
procédures de décision au sein de l’Union
sont définies dans les traités. Afin de L’Union économique et monétaire
réaliser ses objectifs, l’Union est dotée de
son propre budget.
5 L’Union économique et monétaire (UEM) est
le résultat d’un long processus dont le but
consiste à harmoniser les politiques
L’Europe des citoyens économiques et monétaires des États
2 Pour les citoyens de l’Union européenne, le
droit de circuler, de vivre et de travailler
membres de l’Union et à instaurer une
monnaie unique, l’euro. Seize États membres
librement dans l’Union peut être facilement ont à ce jour adopté l’euro qui est ainsi utilisé
considéré comme allant de soi. Mais pour quotidiennement par plus de la moitié des
jouir pleinement de ce droit, il est nécessaire citoyens européens.
de mettre en place et de maintenir une
protection effective des droits fondamentaux Les relations extérieures
à l’intérieur de l’Union.
6 de l’Union européenne
Le poids économique, commercial et
Le marché intérieur financier de l’Union européenne lui confère
3 Avec l’abolition des anciennes barrières, les
personnes, les biens, les services et les
une place de premier plan sur la scène
internationale. L’Union a tissé un réseau
capitaux circulent en Europe aussi librement d’accords bilatéraux et multilatéraux avec la
qu’à l’intérieur d’un État membre. Avec la plupart des pays et régions du monde. La
levée des obstacles et l’ouverture des politique étrangère et de sécurité commune
marchés nationaux, davantage d’entreprises (PESC) est l’un des instruments des relations
peuvent entrer en concurrence. extérieures de l’Union européenne.

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Table des matières

1 Le système de fonctionnement de l’Union européenne


1.1. Évolution historique de la 1.3. Les institutions et organes 1.3.11. Le Comité économique
construction européenne, 13 de l’Union, 41 et social européen, 67
1.1.1. Les traités initiaux, 13 1.3.1. Le Parlement européen: 1.3.12. Le Comité des régions, 68
1.1.2. Les évolutions jusqu’à l’Acte historique, 41 1.3.13. La Banque européenne
unique, 15 d’investissement, 70
1.3.2. Le Parlement européen:
attributions, 43 1.3.14. Le Médiateur européen, 72
1.1.3. Les traités de Maastricht
et d’Amsterdam, 18 1.3.3. Le Parlement européen: 1.4. Les procédures décisionnelles, 75
1.1.4. Le traité de Nice et la Convention organisation et fonctionnement, 45 1.4.1. Les procédures décisionnelles
sur l’avenir de l’Europe, 22 1.3.4. Le Parlement européen: de type supranational, 75
1.1.5. Le traité établissant une modalités d’élection, 48 1.4.2. Les procédures décisionnelles
Constitution pour l’Europe, 26 1.3.5. Le Parlement européen: relations de type intergouvernemental, 78
1.1.6. Le traité de Lisbonne, 30 avec les parlements nationaux, 51 1.4.3. La procédure budgétaire, 80
1.3.6. Le Conseil, 53
1.2. Caractéristiques essentielles 1.5. Le financement, 83
de l’ordre juridique 1.3.7. Le Conseil européen, 55
1.5.1. Les recettes et les dépenses
communautaire, 34 1.3.8. La Commission, 58 de l’Union, 83
1.2.1. Sources et portée du droit 1.3.9. La Cour de justice et le Tribunal 1.5.2. Le cadre financier pluriannuel, 86
de l’Union européenne, 34 de première instance, 61 1.5.3. L’exécution du budget, 90
1.2.2. Le principe de subsidiarité, 37 1.3.10. La Cour des comptes, 65 1.5.4. Le contrôle budgétaire, 92

2 L’Europe des citoyens


2.1. Le respect des droits 2.3. La libre circulation 2.5. Le droit de pétition, 108
fondamentaux dans l’Union, 97 des personnes, 102
2.2. Les citoyens de l’Union 2.4. Le droit de vote
et leurs droits, 100 et d’éligibilité, 107

3 Le marché intérieur
3.1. Principes et réalisation générale et la reconnaissance mutuelle 3.4. Le rapprochement
du marché intérieur, 113 des diplômes, 124 des législations, 144
3.2.4. La libre circulation des capitaux, 127 3.4.1. Marchés publics, 144
3.2. Les grandes libertés du marché
intérieur, 116 3.3. Les règles de concurrence, 130 3.4.2. Le droit des sociétés, 146
3.3.1. Politique générale de concurrence 3.4.3. Services financiers: le processus
3.2.1. La libre circulation et ententes, 130 Lamfalussy — Genèse et mise
des marchandises, 116 en application pratique, 151
3.3.2. Les abus de position dominante et
3.2.2. La liberté de circulation le contrôle des concentrations, 133 3.4.4. Services financiers: législation
des travailleurs, 120 3.3.3. Les aides d’État, 136 importante, 153
3.2.3. La liberté d’établissement, 3.3.4. Entreprises publiques et services 3.4.5. La propriété intellectuelle,
la liberté de prestation de services d’intérêt général, 139 industrielle et commerciale, 156

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4 Les politiques communes
4.1. La stratégie de Lisbonne, 163 4.5.3. Le Fonds de cohésion, 223 4.9.6. Le dialogue social, l’information,
4.5.4. Le Fonds de solidarité, 225 la consultation et la participation
4.2. La politique agricole des travailleurs, 315
commune, 166 4.6. La politique des transports, 228 4.9.7. L’égalité hommes/femmes, 319
4.2.1. Le traité de Rome 4.6.1. Politique des transports: 4.9.8. Non-discrimination et inclusion
et les fondements de la politique généralités, 228 sociale des groupes vulnérables, 322
agricole commune, 166 4.6.2. Transports terrestres: accès
4.2.2. Les réformes de la politique agricole au marché, 231 4.10. La politique
commune, 169 4.6.3. Transports routiers: harmonisation de l’environnement, 326
4.2.3. Le premier pilier de la politique des dispositions légales, 234 4.10.1. Politique de l’environnement:
agricole commune: I — 4.6.4. Transports routiers: normes en principes généraux, 326
L’organisation commune 4.10.2. Mise en œuvre
matière de trafic et de sécurité, 238
de marché unique, 172 4.6.5. Transports aériens: accès du droit communautaire
4.2.4. Le premier pilier de la politique au marché, 240 de l’environnement, 330
agricole commune: II — Le soutien 4.6.6. Transports aériens: concurrence 4.10.3. Le développement durable et les
direct aux exploitations, 175 et droits des passagers, 242 questions environnementales, 332
4.2.5. Le deuxième pilier de la politique 4.10.4. Ressources naturelles et déchets, 336
4.6.7. Transports aériens: règles de trafic
agricole commune: la politique et de sécurité, 245 4.10.5. La protection et la gestion
de développement rural, 178 4.6.8. Transport maritime: accès des eaux, 341
4.2.6. Le financement de la politique au marché et concurrence, 248 4.10.6. Pollution atmosphérique
agricole commune, 181 4.6.9. Transports maritimes: les règles et sonore, 345
4.2.7. Le volet externe de la politique de trafic et de sécurité, 250 4.10.7. Changement climatique
agricole commune: l’accord 4.6.10. Navigation intérieure, intermodalité et environnement, 349
sur l’agriculture de l’Organisation et logistique, 253 4.10.8. Biodiversité, nature et sol, 355
mondiale du commerce, 184
4.2.8. Le cycle de Doha 4.7. Les réseaux transeuropéens, 256 4.10.9. Substances chimiques, 359
et l’agriculture, 187 4.10.10. La politique intégrée des produits
4.7.1. Réseaux transeuropéens — et les technologies industrielles, 363
4.2.9. La politique agricole commune Orientations, 256
et le traité de Lisbonne, 190 4.7.2. Le financement des réseaux 4.11. Protection des consommateurs
4.2.10. La politique agricole commune transeuropéens, 260 et santé publique, 366
en chiffres, 193
4.8. La politique industrielle, 263 4.11.1. Politique des consommateurs:
4.3. La politique forestière, 198 principes et instruments, 366
4.8.1. Les principes généraux
4.3.1. La stratégie forestière européenne: 4.11.2. Les mesures de protection
de la politique industrielle, 263
le cadre, 198 des consommateurs, 368
4.8.2. La sidérurgie, 265
4.3.2. La stratégie forestière européenne: 4.8.3. La construction navale, 268 4.11.3. La santé publique, 372
principes et actions, 201 4.8.4. L’industrie automobile, 272 4.12. Un espace de liberté, de sécurité
4.4. La politique commune 4.8.5. L’industrie chimique et de justice, 375
de la pêche, 202 et pharmaceutique, 274 4.12.1. Un espace de liberté, de sécurité
4.4.1. La politique commune de la pêche: 4.8.6. L’industrie aérospatiale, 277 et de justice: aspects généraux, 375
origines et évolution générale, 202 4.8.7. L’industrie audiovisuelle, 282 4.12.2. Politiques d’asile
4.4.2. Préservation des ressources 4.8.8. Les technologies et d’immigration, 378
halieutiques, 205 de l’information, 286 4.12.3. Gestion des frontières
4.4.3. L’aide structurelle de la pêche, 207 4.8.9. L’industrie biotechnologique, 291 extérieures, 384
4.4.4. Les relations internationales 4.8.10. L’industrie de la défense, 294 4.12.4. La coopération judiciaire
en matière de pêche, 210 en matière civile et pénale, 388
4.9. La politique sociale 4.12.5. La coopération policière
4.4.5. Contrôle des activités de pêche, 213 et de l’emploi, 297
4.4.6. La pêche européenne et douanière, 391
en chiffres, 215 4.9.1. Politique sociale et de l’emploi:
principes généraux, 297 4.13. Politique énergétique, 394
4.5. La politique régionale 4.9.2. Le Fonds social européen, 302
et de cohésion, 217 4.14. La politique de la recherche
4.9.3. La politique de l’emploi, 305 et du développement
4.5.1. La cohésion économique 4.9.4. Couverture de sécurité sociale des technologique, 400
et sociale, 217 déplacements transfrontaliers, 308
4.5.2. Le Fonds européen 4.9.5. Santé et sécurité sur le lieu 4.15. Les petites et moyennes
de développement régional, 220 de travail, 312 entreprises, 404

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4.16. Tourisme, 409 4.17.5. La politique de l’audiovisuel 4.18.3. Les droits d’accises sur l’alcool
et des médias, 426 et le tabac, 443
4.17. Culture et éducation, 411 4.17.6. Politique sportive, 429 4.18.4. Fiscalité de l’énergie, 447
4.17.1. La politique de l’éducation 4.17.7. Politique de communication, 432 4.18.5. L’imposition des sociétés
et de la formation et des personnes, 450
professionnelle, 411 4.18. La politique fiscale, 436
4.17.2. La politique de la jeunesse, 416 4.18.1. Généralités sur la politique
4.17.3. La politique linguistique, 418 fiscale, 436
4.17.4. La politique culturelle, 422 4.18.2. La taxe sur la valeur ajoutée, 439

5 L’Union économique et monétaire


5.1. Le développement de l’Union 5.3. La politique monétaire 5.5. L’encadrement des politiques
économique et monétaire, 457 européenne, 465 financières, 471

5.2. Les institutions de l’Union 5.4. La coordination des politiques


économique et monétaire, 461 économiques, 468

6 Les relations extérieures de l’Union européenne


6.1. La politique étrangère 6.3.3. La politique européenne 6.4.10. La République populaire de Chine
et de sécurité commune, 479 de voisinage, 508 et Taïwan, 540
6.1.1. La politique étrangère: objectifs, 6.4.11. Les pays d’Asie du Sud
mécanismes et réalisations, 479 6.4. Les relations avec certains pays et le sous-continent indien, 544
ou régions, 511 6.4.12. L’ANASE et la péninsule
6.1.2. La défense des droits de l’homme
et de la démocratie, 482 6.4.1. Les pays des Balkans Coréenne, 549
6.1.3. Politique européenne de sécurité occidentaux, 511 6.4.13. L’Australie et la
et de défense, 486 6.4.2. La Fédération de Russie, 516 Nouvelle-Zélande, 554

6.2. La politique économique 6.4.3. Le Caucase du Sud (Arménie, 6.5. La politique générale
et commerciale extérieure, 490 Azerbaïdjan, Géorgie), 520 du développement, 557
6.2.1. L’Union européenne, puissance 6.4.4. Asie centrale, 522 6.5.1. Aperçu général de la politique
commerciale, 490 6.4.5. Les pays du sud et de l’est du développement, 557
6.2.2. L’Union européenne de la Méditerranée, 526 6.5.2. Régimes commerciaux
et l’Organisation mondiale 6.4.6. Les pays de la péninsule Arabique, applicables aux pays
du commerce, 495 l’Iraq, l’Iran, 528 en voie de développement, 559
6.5.3. L’aide humanitaire, 561
6.3. Cadres de relations avec certains 6.4.7. Relations transatlantiques:
les États-Unis et le Canada, 532 6.5.4. Les relations avec les pays d’Afrique,
groupes de pays, 499 des Caraïbes et du Pacifique: des
6.3.1. L’élargissement de l’Union, 499 6.4.8. L’Amérique latine, 535 conventions de Yaoundé et de
6.3.2. L’Espace économique européen, 505 6.4.9. Le Japon, 538 Lomé à l’accord de Cotonou, 565

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Le système de

1
1 fonctionnement 4 Les politiques communes
de l’Union européenne
L’Union économique
2 L’Europe des citoyens 5 et monétaire

Les relations extérieures


3 Le marché intérieur 6 de l’Union européenne

Le système de fonctionnement
de l’Union européenne
Les pouvoirs conférés aux institutions de l’Union européenne découlent des traités fondateurs,
qui ont été négociés par les États membres et ratifiés par chacun d’entre eux. Le traité instituant
la Communauté européenne mentionne cinq institutions européennes stricto sensu.
Trois d’entre elles sont chargées de formuler les politiques et de prendre les décisions. Il s’agit
du Parlement européen, du Conseil de l’Union européenne et de la Commission européenne
(le triangle institutionnel). La défense du droit communautaire est assurée par la Cour de justice
des Communautés européennes. La Cour des comptes vérifie la légalité et la régularité des
recettes et des dépenses de l’Union et veille à sa bonne gestion financière. Plusieurs autres
organes et agences sont chargés de tâches spécifiques. Afin de réaliser les objectifs des traités,
l’Union est dotée de son propre budget.

1.1. Évolution historique de la 1.3.5. Le Parlement européen: relations


construction européenne, 13 avec les parlements nationaux, 51
1.1.1. Les traités initiaux, 13 1.3.6. Le Conseil, 53
1.1.2. Les évolutions jusqu’à l’Acte 1.3.7. Le Conseil européen, 55
unique, 15 1.3.8. La Commission, 58
1.1.3. Les traités de Maastricht 1.3.9. La Cour de justice et le Tribunal
et d’Amsterdam, 18 de première instance, 61
1.1.4. Le traité de Nice et la Convention 1.3.10. La Cour des comptes, 65
sur l’avenir de l’Europe, 22
1.3.11. Le Comité économique
1.1.5. Le traité établissant une Constitution et social européen, 67
pour l’Europe, 26
1.3.12. Le Comité des régions, 68
1.1.6. Le traité de Lisbonne, 30
1.3.13. La Banque européenne
1.2. Caractéristiques essentielles de l’ordre d’investissement, 70
juridique communautaire, 34 1.3.14. Le Médiateur européen, 72
1.2.1. Sources et portée du droit
1.4. Les procédures décisionnelles, 75
de l’Union européenne, 34
1.4.1. Les procédures décisionnelles
1.2.2. Le principe de subsidiarité, 37
de type supranational, 75
1.3. Les institutions et organes 1.4.2. Les procédures décisionnelles
de l’Union, 41 de type intergouvernemental, 78
1.3.1. Le Parlement européen: 1.4.3. La procédure budgétaire, 80
historique, 41
1.3.2. Le Parlement européen: 1.5. Le financement, 83
attributions, 43 1.5.1. Les recettes et les dépenses
1.3.3. Le Parlement européen: organisation de l’Union, 83
et fonctionnement, 45 1.5.2. Le cadre financier pluriannuel, 86
1.3.4. Le Parlement européen: 1.5.3. L’exécution du budget, 90
modalités d’élection, 48 1.5.4. Le contrôle budgétaire, 92

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Le système de Évolution historique de la
1 fonctionnement de 1 construction européenne
l’Union européenne

1.1. Évolution historique


de la construction européenne

1.1.1. Les traités initiaux


Les effets désastreux de la Seconde Guerre mondiale et la menace constante d’une confrontation Est-Ouest ont fait de la
réconciliation entre la France et l’Allemagne une priorité essentielle. Le partage de l’industrie du charbon et de l’acier par
six pays européens, mis en place par le traité de Paris de 1951, a été un symbole fort de la création d’un objectif commun
et a constitué la première étape vers l’intégration européenne. Les traités de Rome de 1957 ont renforcé les bases de cette
intégration ainsi que l’idée d’un avenir commun pour les six pays européens.

Bases juridiques d’expérimenter une formule susceptible d’être


— Le traité instituant la Communauté européenne du progressivement étendue à d’autres domaines
charbon et de l’acier (CECA) ou traité de Paris, signé le économiques, pour aboutir en fin de compte à l’Europe
18 avril 1951, est entré en vigueur le 24 juillet 1952. Pour la politique.
première fois, six États européens acceptaient de s’engager — La Communauté économique européenne a pour objectif
dans la voie de l’intégration. Le traité a permis de jeter les l’établissement d’un marché commun, fondé sur les quatre
bases de l’architecture communautaire en créant un libertés de circulation des biens, des personnes, des
exécutif appelé «Haute Autorité», une Assemblée capitaux et des services, et le rapprochement progressif
parlementaire, un Conseil de ministres, une Cour de justice des politiques économiques.
et un Comité consultatif. Conclu pour une durée limitée à
cinquante années en vertu de son article 97, le traité CECA — L’objectif de l’Euratom était de coordonner
est venu à échéance le 23 juillet 2002. La valeur nette du l’approvisionnement en matières fissiles et les programmes
patrimoine de la CECA au moment de sa dissolution a été de recherche que les États avaient déjà lancés ou
affectée, en vertu du protocole annexé au traité instituant s’apprêtaient à lancer en vue de l’utilisation pacifique de
la Communauté européenne (traité CE), à la recherche l’énergie nucléaire.
dans les secteurs de l’industrie du charbon et de l’acier au — Les préambules des trois traités révèlent l’unité
moyen d’un fonds et d’un programme de recherche du d’inspiration dont procède la création des Communautés, à
charbon et de l’acier. Les secteurs du charbon et de l’acier savoir la conviction de la nécessité d’engager les États
sont désormais soumis intégralement au droit commun du européens dans la construction d’un destin commun qui
traité CE. seul leur permettra de maîtriser l’avenir.
— Les traités instituant la Communauté économique
européenne (CEE) et la Communauté européenne de Principes fondamentaux
l’énergie atomique (CEEA, dite «Euratom») ou traités de
Rome, signés le 25 mars 1957, sont entrés en vigueur le Les Communautés européennes (CECA, CEE et Euratom) sont
1er janvier 1958. Contrairement au traité CECA qui a été nées de la lente progression de l’idée européenne inséparable
conclu pour cinquante ans (article 97), les traités de Rome des événements qui ont bouleversé le continent. Au
l’ont été «pour une durée illimitée» (article 240 du traité lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les industries de
CEE et article 208 du traité CEEA), ce qui leur a conféré un base, en particulier sidérurgiques, nécessitaient une
caractère quasi constitutionnel. réorganisation. L’avenir de l’Europe, menacé par l’affrontement
Est-Ouest, passait par une réconciliation franco-allemande.
— Les six pays fondateurs étaient l’Allemagne, la Belgique, la
France, l’Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas. A. L’appel lancé le 9 mai 1950 par le ministre français des
affaires étrangères, Robert Schuman, peut être considéré
comme le point de départ de l’Europe communautaire. Le
Objectifs choix du charbon et de l’acier était à l’époque hautement
— La création de la CECA n’était, selon les intentions avouées symbolique. En effet, au début des années 50, les
de ses promoteurs, qu’une première étape sur la voie qui charbonnages et la sidérurgie font encore figure d’industries
conduirait à la «fédération européenne». Le marché fondamentales, bases de la puissance d’un pays. Outre l’intérêt
commun du charbon et de l’acier devait permettre économique évident, la mise en commun des ressources

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françaises et allemandes devait marquer la fin de — l’instauration d’une politique commune dans l’agriculture
l’antagonisme entre ces deux pays. Le 9 mai 1950, Robert et les transports;
Schuman déclarait: «L’Europe ne se fera pas d’un coup, ni dans
— la création d’un Fonds social européen;
une construction d’ensemble. Elle se fera par des réalisations
concrètes, créant d’abord une solidarité de fait.» C’est sur ce — l’institution d’une Banque européenne d’investissement;
principe que l’Allemagne, la France, l’Italie et les pays du — le développement de relations plus étroites entre les États
Benelux (Belgique, Luxembourg et Pays-Bas) ont signé le traité membres.
de Paris, qui assure essentiellement:
Pour réaliser ces objectifs, le traité CEE pose des principes
— la liberté de circulation des produits et le libre accès aux directeurs et délimite le cadre de l’action législative des
sources de production; institutions communautaires. Il s’agit des politiques communes:
— la surveillance permanente du marché pour éviter des politique agricole commune (articles 38 à 43), politique des
dysfonctionnements qui peuvent rendre nécessaire transports (articles 74 et 75) et politique commerciale commune
l’instauration de quotas de production; (articles 110 à 113).

— le respect des règles de concurrence et de transparence Le marché commun devait permettre la libre circulation des
des prix; marchandises, la mobilité des facteurs de production (libre
circulation des travailleurs et des entreprises, liberté de
— le soutien à la modernisation du secteur et à la prestation de services, libération des mouvements de
reconversion. capitaux).
B. Au lendemain de la signature du traité, alors que la France 2. Le traité CEEA visait des objectifs très ambitieux et
s’oppose à la reconstitution d’une force militaire allemande notamment «la formation et la croissance rapide des industries
dans un cadre national, René Pleven imagine un projet nucléaires». Mais, en fait, en raison du caractère complexe et
d’armée européenne. La Communauté européenne de délicat du secteur nucléaire, qui touche aux intérêts vitaux des
défense (CED) négociée en 1952 devait être accompagnée États membres (défense et indépendance nationale), le traité a
d’une Communauté politique (CEP). Les deux projets furent dû limiter ses ambitions.
abandonnés à la suite du refus par l’Assemblée nationale
française d’autoriser la ratification du traité le 30 août 1954. D. La Convention relative à certaines institutions
communes, signée et entrée en vigueur en même temps que
C. Les efforts de relance de la construction européenne après les traités de Rome, avait décidé que l’Assemblée
l’échec de la CED se sont concrétisés lors de la Conférence de parlementaire et la Cour de justice seraient des institutions
Messine (en juin 1955) sur le double terrain de l’union communes. Il restait à fusionner les «exécutifs», et le traité
douanière et de l’énergie atomique. Ils aboutissent à la instituant un Conseil unique et une Commission unique des
signature du traité CEE et du traité CEEA. Communautés européennes du 8 avril 1965, dit «traité de
1. Le traité CEE prévoit, entre autres: fusion», est venu parachever l’unification des institutions.

— l’élimination des droits de douane entre les États membres;


g Roberta PANIZZA
— l’établissement d’un tarif douanier extérieur commun; Juillet 2008

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Le système de Évolution historique de la
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l’Union européenne

1.1.2. Les évolutions jusqu’à l’Acte unique


Les principales évolutions des premiers traités concernent la création de ressources propres pour la Communauté, le
renforcement des pouvoirs budgétaires du Parlement européen, l’élection au suffrage universel direct et la mise en place du
système monétaire européen. En 1986, l’entrée en vigueur de l’Acte unique européen, qui modifie notablement le traité de
Rome, a renforcé l’idée de l’intégration par le biais de la création d’un vaste marché intérieur.

I. Les grandes réalisations donner décharge à la Commission sur l’exécution de celui-


ci. Ce traité institue également la Cour des comptes,
de la phase initiale organisme de contrôle comptable et de la gestion
— L’article 8 du traité de Rome prévoyait la réalisation d’un financière (1.3.10), qui entre en fonction le 25 octobre
marché commun pendant une période transitoire de 1977.
douze ans, divisée en trois étapes, se terminant le — Le PE a usé de manière systématique de ses pouvoirs en
31 décembre 1969. matière budgétaire pour développer l’action de la
— Ambition première, l’union douanière est réalisée plus Communauté.
rapidement que prévu. La période transitoire consacrée à 4. Enfin, l’acte du 20 septembre 1976 confère au PE une
l’élargissement des contingents et à la disparition légitimité et une autorité nouvelles en prévoyant son élection
progressive des douanes internes se termine dès le au suffrage universel direct par les peuples de la
1er juillet 1968. Dans le même délai, l’Europe adopte un tarif Communauté. La première élection aura lieu en juin 1979
extérieur commun à l’égard des pays tiers. (1.3.1).
— L’Europe verte est le deuxième grand chantier de la
B. Élargissements
construction européenne. En 1962, les premiers
règlements sur la politique agricole commune (PAC) sont Par ailleurs, la Communauté s’élargit: le Royaume-Uni y adhère
adoptés et le Fonds européen d’orientation et de garantie le 1er janvier 1973, en même temps que le Danemark et
agricole (FEOGA) est créé. l’Irlande, le peuple norvégien ayant refusé l’adhésion par
référendum.
— De son côté, la Cour de justice a interprété les règles
relatives à la période de transition de façon à ce que, lors La Grèce devient membre en 1981, l’Espagne et le Portugal en
de son expiration, nombre de dispositions du traité aient 1986.
un effet direct (articles 13, 30, 48, 52 et 59) (3.2.3). C. À la suite des premiers élargissements, on a exigé une plus
— Pourtant, à la fin de la période transitoire, d’importants grande rigueur budgétaire et une réforme de l’Europe verte. Le
obstacles à la libre circulation subsistaient: le marché Conseil européen de 1979 parviendra à un accord sous forme
unique n’était pas achevé. de mesures complémentaires. Les accords de Fontainebleau
de 1984 trouveront une solution durable sur la base du
principe selon lequel tout État membre supportant une
II. Les premières modifications des traités charge financière excessive au regard de sa prospérité relative
est susceptible de bénéficier d’une correction.
A. Améliorations institutionnelles
1. La première modification institutionnelle est réalisée par le
traité de fusion des exécutifs du 8 avril 1965, entré en
III. L’évolution du projet global
vigueur en 1967, qui institue un Conseil et une Commission d’intégration
uniques des Communautés européennes (CECA, CEE, CEEA) et
qui impose le principe d’unité budgétaire. Sur la lancée des premiers succès de la communauté
économique, l’objectif de créer également une unité politique
2. La décision du Conseil du 21 avril 1970 crée un système des États membres est revenu au premier plan au début des
de ressources propres à la Communauté, remplaçant les années 60, cela en dépit de l’échec essuyé par le projet de
contributions financières des États membres (1.5.1). Communauté européenne de défense en août 1954.
3. Pouvoirs budgétaires
A. Échec d’une tentative d’union politique
— Le traité de Luxembourg du 22 avril 1970 accorde au 1. Le plan Fouchet
Parlement européen (PE) certains pouvoirs budgétaires Au sommet de Bonn de 1961, les chefs d’État ou de
(1.3.1). gouvernement des six États fondateurs de la Communauté
— Le traité de Bruxelles du 22 juillet 1975 donne au européenne ont chargé une commission
Parlement européen (PE) le droit de rejeter le budget et de intergouvernementale, présidée par l’ambassadeur français

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Christian Fouchet, de présenter des propositions relatives au réunions de 1961 et de 1967, les conférences gagnèrent de
statut politique d’une union des peuples européens. Cette l’importance avec le sommet de La Haye des 1er et 2 décembre
commission d’étude essaya en vain à deux reprises, entre 1960 1969, qui permit l’ouverture des négociations sur
et 1962, de soumettre aux États membres un projet de traité l’élargissement de la Communauté ainsi qu’un accord sur le
acceptable pour tous. Le plan Fouchet était fondé sur le strict régime des finances communautaires. À noter par la suite le
respect de la personnalité des États membres, il refusait donc sommet de Paris d’octobre 1972 qui décida d’utiliser aussi
l’option fédérale. Trois objections entraîneront l’échec de la largement que possible toutes les dispositions du traité, y
négociation: l’incertitude sur la place du Royaume-Uni, les compris l’article 235 (maintenant article 308), dans les
divergences sur la question d’une défense européenne domaines de la politique de l’environnement, de la politique
aspirant à l’indépendance par rapport à l’Alliance atlantique, le régionale, sociale et industrielle, ainsi que le sommet de
caractère trop intergouvernemental des institutions proposées Fontainebleau (décembre 1974) qui prit d’importantes
qui risquait de vider de leur substance supranationale les décisions politiques concernant les élections directes, le Fonds
institutions communautaires existantes. régional européen et la procédure de décision du Conseil. À
2. De l’échec du plan Fouchet jusqu’à l’initiative Spinelli, en cette occasion, il fut également décidé de se réunir à l’avenir
1984, il n’y a plus eu de tentative de révision fondamentale des en «Conseil européen» trois fois par an pour traiter des affaires
traités communautaires. Le débat relatif à la configuration communautaires et de la coopération politique (1.3.7).
d’une future union politique se poursuivit sur un plan Afin de relancer la construction européenne, le Premier
pragmatique dans un certain nombre de rapports et de ministre belge, Léo Tindemans, fut chargé d’élaborer un
résolutions. rapport sur l’Union européenne. Ce rapport, présenté le
3. Le substitut à l’absence de communauté politique fut la 29 décembre 1975, consistait en un ensemble de propositions
coopération politique européenne (CPE) (6.1.1). À la sur les relations extérieures, la politique économique et
conférence au sommet de La Haye en décembre 1969, les monétaire et l’Europe des citoyens. Il n’a cependant pas mené
chefs d’État ou de gouvernement ont décidé d’étudier la à des réformes concrètes.
meilleure manière de réaliser des progrès dans le domaine de D. La fin des années 70 a été marquée par les réactions
l’unification politique. Le rapport Davignon, adopté par les diverses des États membres face à l’aggravation de la crise
ministres des affaires étrangères en octobre 1970 et complété économique, ce qui ébranla la convergence des politiques
par la suite par d’autres rapports, a constitué la base de la CPE économiques et fiscales. Les chefs d’État ou de gouvernement
jusqu’à l’entrée en vigueur de l’Acte unique. ont décidé en 1978 de créer un comité de trois sages
B. La crise de 1966 (MM. Biesheuvel, Dell et Marjolin) pour «réfléchir aux
Une crise importante se produisit alors que se profilait le cap adaptations des mécanismes et des procédures des
délicat du passage à la troisième étape de la période de institutions permettant d’assurer le fonctionnement
transition (1er janvier 1966), à l’occasion de laquelle les harmonieux des Communautés et les progrès dans la voie de
modalités de vote devaient changer au sein du Conseil l’Union européenne». Mais ce comité se limita à des
(passage de l’unanimité à la majorité qualifiée dans certains suggestions pratiques sur l’organisation du travail au sein du
domaines). Ce changement de vote traduisait une Conseil et sur les rapports avec la Commission et le Parlement,
accentuation de la supranationalité dans la Communauté. dont certaines seulement seront reprises.
S’opposant à un ensemble de propositions de la Commission Pour résoudre le problème de l’instabilité monétaire et de ses
traitant entre autres du financement de la politique agricole effets pervers sur la politique agricole commune et la cohésion
commune, la France cessa de participer aux principales entre les États membres, les Conseils européens de Brême et
réunions communautaires («politique de la chaise vide») et de Bruxelles en 1978 ont mis en place le système monétaire
exigea, pour reprendre sa place, un accord politique sur le rôle européen (SME). Établi sur une base volontaire et différenciée
de la Commission et le vote majoritaire qui impliquait une (le Royaume-Uni décida de ne pas participer au mécanisme de
révision d’ensemble du système des traités. Finalement, on change), le système monétaire européen reposait toutefois sur
parvint, le 30 janvier 1966, au fameux compromis de l’existence d’une unité de compte commune, l’écu (5.1).
Luxembourg (1.3.6), selon lequel, lorsque des intérêts très
importants d’un ou de plusieurs pays sont en jeu, les membres Au Conseil européen de Londres de 1981, les ministres des
du Conseil s’efforcent d’arriver à des solutions qui puissent être affaires étrangères d’Allemagne et d’Italie, MM. Genscher et
adoptées par tous dans le respect de leurs intérêts mutuels. Colombo, ont présenté un projet d’«Acte européen» portant
sur des sujets divers: coopération politique, culture, droits
C. L’affirmation des «sommets» européens fondamentaux, harmonisation des législations en dehors des
De leur côté, quoiqu’en dehors du cadre institutionnel des domaines couverts par les traités communautaires, lutte
Communautés, les conférences des chefs d’État ou de contre la violence, le terrorisme et la criminalité. Il n’a jamais
gouvernement des États membres ont été amenées à jouer un été adopté en tant que tel, mais certains de ses éléments ont
rôle d’impulsion politique et à résoudre des problèmes que le été repris dans la «déclaration solennelle sur l’Union
Conseil ordinaire ne pouvait surmonter. Après les premières européenne» adoptée à Stuttgart le 19 juin 1983. Ce texte est

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Le système de Évolution historique de la
1 fonctionnement de 1 construction européenne
l’Union européenne

un élément important de la toile de fond sur laquelle a été conclusions qui ont été mises en forme par les ministres des
élaboré l’Acte unique européen (AUE). affaires étrangères le 27 janvier 1986.

E. Le projet Spinelli


V. L’Acte unique européen: une étape
Quelques mois après sa première élection au suffrage
universel en 1979, le Parlement européen connut une crise
importante
sérieuse dans ses relations avec le Conseil, à propos du budget Le 17 février 1986, neuf États membres ont procédé à la
de l’année 1980. Sous l’impulsion du parlementaire Altiero signature de l’AUE, suivis par le Danemark (à la suite du résultat
Spinelli, fondateur du mouvement fédéraliste européen et positif d’un référendum), la Grèce et l’Italie le 28 février 1986.
ancien membre de la Commission, un groupe de neuf Ratifié par les États membres au cours de l’année 1986, l’AUE
parlementaires se réunit au restaurant «Le Crocodile» à est entré en vigueur le 1er juillet 1987 avec six mois de retard
Strasbourg, en juillet 1980, pour débattre des moyens de en raison d’un recours engagé devant les juridictions
relancer le fonctionnement des institutions. En juillet 1981, le irlandaises par une personne privée.
Parlement européen a créé une commission institutionnelle
dont Spinelli était rapporteur-coordinateur en vue d’élaborer L’AUE constitue la première modification substantielle du traité
un projet de modification des traités existants. Très vite, le de Rome.
groupe Spinelli puis la commission institutionnelle ont choisi
A. Extension des compétences de l’Union
de formuler un schéma de ce que devait être l’Union
européenne. Le projet de traité fut adopté à une forte majorité 1. Par la réalisation du grand marché intérieur
le 14 février 1984. Faisant un saut important, il prévoyait de À achever pour le 1er janvier 1993, cette réalisation consiste à
transférer de nouvelles compétences dans des domaines reprendre et à amplifier l’objectif du marché commun prévu
essentiels. Le pouvoir législatif devait s’exercer dans un en 1958 (3.1).
système de bicaméralisme très proche de celui d’un État 2. Par la création de compétences nouvelles:
fédéral. Ce système visait à instaurer un équilibre entre le — capacité monétaire,
Parlement européen et le Conseil.
— politique sociale,
Le processus qui mena à l’AUE était ainsi déclenché.
— cohésion économique et sociale,

IV.  L’évolution vers l’Acte unique européen — recherche et développement technologique,


— environnement,
Le Conseil européen de Fontainebleau de juin 1984, après
avoir mis un terme au contentieux budgétaire communautaire — coopération en politique étrangère.
des années 80, décida la création d’un comité ad hoc de B. Amélioration de la capacité de décision du Conseil
représentants personnels des chefs d’État ou de
La majorité qualifiée:
gouvernement (comité Dooge, du nom de son président). Ce
comité était chargé de faire des suggestions pour 1. a remplacé l’unanimité pour quatre des compétences
l’amélioration du fonctionnement du système communautaire existantes:
ainsi que de la coopération politique. Il a établi un rapport — modification du tarif douanier commun,
intérimaire qui a été adressé au Conseil européen de Dublin,
tenu en décembre 1984. Dans ce rapport, le comité proposait — libre prestation des services,
un saut qualitatif important, notamment dans le domaine — libre circulation des capitaux,
institutionnel. Le Conseil européen de Dublin a estimé que le
comité devait poursuivre ses travaux afin de parvenir à un — politique commune des transports maritimes et aériens;
accord: trois représentants sur dix ont en effet émis des 2. a été prévue pour plusieurs compétences nouvelles:
réserves substantielles sur le texte du rapport. Mais le Conseil
— marché intérieur,
européen de Milan de juin 1985 décida à la majorité (7 voix
contre 3), procédure exceptionnelle en son sein, de convoquer — politique sociale,
une Conférence intergouvernementale ayant pour objet les — cohésion économique et sociale,
pouvoirs des institutions, l’extension de la Communauté à de
nouveaux champs d’activité et l’établissement d’un «véritable» — recherche et développement technologique,
marché intérieur. — environnement;
Cette Conférence intergouvernementale s’est réunie pendant 3. a fait l’objet d’une modification du règlement intérieur du
l’été et l’automne 1985 et, en présence de désaccords assez Conseil pour se conformer à la déclaration de la présidence
nombreux, a présenté un ensemble de textes quelque peu relative à l’article 149, paragraphe 2, du traité CEE, contenue
disparates au Conseil européen de Luxembourg (2 et dans l’acte final de l’AUE. Un vote peut intervenir dorénavant
3 décembre 1985). Celui-ci a adopté, non sans difficultés, des au Conseil sur l’initiative de son président, mais aussi à la

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demande de la Commission ou d’un État membre si une — en instituant la procédure de coopération avec le Conseil
majorité simple des membres du Conseil y est favorable. Une (1.4.1) qui lui confère des pouvoirs législatifs authentiques
telle demande doit être communiquée aux membres du bien que restreints: applicable à une dizaine de bases
Conseil deux semaines à l’avance. juridiques à l’époque, cette procédure marque un tournant
décisif pour la transformation du PE en un véritable
C. Accroissement du rôle du Parlement européen colégislateur égal au Conseil.
Les pouvoirs du PE ont été renforcés:
— en soumettant à son avis conforme la conclusion des g Wilhelm LEHMANN
accords d’élargissement et des accords d’association; Juillet 2008

1.1.3. Les traités de Maastricht et d’Amsterdam


Le traité sur l’Union européenne modifie les précédents traités européens et crée une Communauté européenne fondée sur
trois piliers: les Communautés européennes, la politique étrangère et de sécurité commune et la coopération policière et
judiciaire en matière pénale. En vue de l’élargissement de l’Union, les traités d’Amsterdam et de Nice ont visé à opérer les
adaptations nécessaires au bon fonctionnement d’une Europe à quinze.

I. Le traité de Maastricht Compétences de l’Union


L’Union créée par le traité de Maastricht se voit attribuer par
Le traité sur l’Union européenne, signé à Maastricht le 7 février
celui-ci des compétences classées en trois grands groupes,
1992, est entré en vigueur le 1er novembre 1993.
communément appelés «piliers»:

Structures de L’union — le premier «pilier» est constitué par les Communautés
européennes, dans le cadre desquelles les compétences
En instituant une Union européenne (UE), le traité de ayant fait l’objet d’un transfert de souveraineté des États
Maastricht marque une nouvelle étape dans le processus membres dans les domaines régis par le traité sont
créant «une union sans cesse plus étroite entre les peuples de exercées par les institutions communautaires;
l’Europe». L’UE est fondée sur les Communautés européennes
(1.1.1 et 1.1.2) complétées par les politiques et formes de — le deuxième «pilier» est formé par la politique étrangère et
coopération instaurées par le traité sur l’Union européenne. de sécurité commune (PESC) prévue au titre V du traité sur
L’Union dispose d’un cadre institutionnel unique, composé par l’Union européenne;
le Parlement européen, le Conseil européen, le Conseil de — le troisième «pilier» est constitué par la coopération
ministres, la Commission européenne, la Cour de justice des policière et judiciaire en matière pénale (JAI) prévue au
Communautés européennes et la Cour des comptes. Le titre VI du traité sur l’Union européenne.
Conseil européen a vocation à définir des orientations
politiques générales. Le Parlement européen, le Conseil, la Les dispositions des titres V et VI organisent une coopération
Commission, la Cour de justice et la Cour des comptes qui, au de type intergouvernemental qui utilise les institutions
sens strict, sont les seules «institutions» des Communautés, communes et qui est dotée de certains éléments
exercent leurs attributions conformément aux dispositions des supranationaux, notamment l’association de la Commission
traités. Le Parlement européen, le Conseil et la Commission européenne et la consultation du Parlement européen.
sont assistés d’un Comité économique et social européen et
d’un Comité des régions exerçant l’un et l’autre des fonctions A. La Communauté européenne (premier pilier)
consultatives. Un Système européen de banques centrales et La Communauté a pour mission d’assurer un développement
une Banque centrale européenne sont institués selon les harmonieux, équilibré et durable des activités économiques,
procédures prévues par le traité et s’ajoutent aux institutions un niveau d’emploi et de protection sociale élevé, l’égalité
financières préexistantes du groupe BEI que sont la Banque entre les hommes et les femmes, une croissance durable et
européenne d’investissement et le Fonds européen non inflationniste, un haut degré de compétitivité et de
d’investissement. convergence des performances économiques, un niveau élevé

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Le système de Évolution historique de la
1 fonctionnement de 1 construction européenne
l’Union européenne

de protection de l’environnement, le relèvement du niveau et — lutte contre l’immigration irrégulière;


de la qualité de la vie, la cohésion économique et sociale et la
— politique commune d’asile.
solidarité entre les États membres. La Communauté poursuit
ces objectifs, dans les limites des compétences qui lui sont
confiées, par l’établissement d’un marché commun et des II. Le traité d’Amsterdam
mesures connexes visées à l’article 3 du traité CE, ainsi que par
l’instauration d’une politique économique et d’une monnaie Le traité d’Amsterdam modifiant le traité sur l’Union
unique visée à l’article 4. L’action de la Communauté doit européenne et les traités instituant les Communautés
respecter le principe de la proportionnalité et, dans les européennes et certains actes connexes, signé à Amsterdam le
domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, le 2 octobre 1997, est entré en vigueur le 1er mai 1999.
principe de la subsidiarité (article 5 du traité CE).
A. Accroissement des compétences de l’Union
B. La politique étrangère et de sécurité commune 1. Communauté européenne
(deuxième pilier)
— Au niveau des objectifs, un accent particulier a été mis sur
L’Union a pour mission de définir et de mettre en œuvre, selon un développement équilibré et durable et sur un niveau
une méthode de type intergouvernemental, une politique d’emploi élevé.
étrangère et de sécurité (6.1.1). Les États membres sont tenus
d’appuyer cette politique activement et sans réserve, dans un — Un mécanisme de coordination des politiques de l’emploi
esprit de loyauté et de solidarité mutuelles. Elle a comme des États membres ainsi que la possibilité de certaines
objectifs: mesures communautaires dans ce domaine ont été créés.
— la sauvegarde des valeurs communes, des intérêts — L’accord sur la politique sociale a été intégré au traité CE
fondamentaux, de l’indépendance et de l’intégrité de avec quelques améliorations (suppression de l’opt-out).
l’Union, conformément aux principes de la charte des
Nations unies; — La méthode communautaire s’appliquera désormais à
d’importants domaines relevant jusqu’alors du «troisième
— le renforcement de la sécurité de l’Union sous toutes ses pilier» tels que l’asile, l’immigration, le franchissement des
formes; frontières extérieures, la lutte contre la fraude et la
— le maintien de la paix et le renforcement de la sécurité coopération douanière, ainsi qu’à une partie de la
internationale, conformément aux principes de la charte coopération «Schengen» dont l’acquis complet est repris
des Nations unies, ainsi qu’aux principes de l’acte final de par l’Union et les Communautés.
Helsinki et aux objectifs de la charte de Paris, y compris 2. Union européenne
ceux relatifs aux frontières extérieures;
— La coopération intergouvernementale dans les domaines
— la promotion de la coopération internationale; de la coopération judiciaire et de la police est renforcée par
la définition d’objectifs et de tâches précises ainsi que par
— le développement et le renforcement de la démocratie et
la création d’un nouvel instrument juridique analogue à
de l’État de droit, ainsi que le respect des droits de
une directive.
l’homme et des libertés fondamentales.
— Des adaptations sont apportées aux domaines des
C. La coopération dans les domaines de la justice politiques de l’environnement, de la santé publique et de la
et des affaires intérieures (troisième pilier) protection des consommateurs.
L’Union a la tâche d’élaborer une action commune dans ces
domaines selon une méthode de type intergouvernemental — De nouvelles dispositions ont été introduites à l’égard de
(4.12.1) afin de réaliser l’objectif d’offrir aux citoyens un niveau problèmes spécifiques, tels que les services d’intérêt
élevé de protection dans un espace de liberté, de sécurité et général, la diversité culturelle et l’utilisation des langues, le
de justice. régime applicable aux régions ultrapériphériques, régions
insulaires, pays et territoires d’outre-mer.
Elle porte sur les domaines suivants:
— Les instruments de la politique étrangère et de sécurité
— règles de franchissement des frontières extérieures de la commune ont été développés ultérieurement, notamment
Communauté et renforcement des contrôles; par la création d’un nouvel instrument (la stratégie
— lutte contre le terrorisme, la grande criminalité, le trafic de commune, dont la mise en œuvre devrait normalement se
drogue et la fraude internationale; faire par décision majoritaire), d’une nouvelle fonction (le
«secrétaire général du Conseil responsable pour la PESC»)
— coopération judiciaire en matière de justice pénale et civile;
et d’une nouvelle structure (l’«unité de planification et
— création d’un Office européen de police (Europol) doté d’alerte rapide»). En matière de sécurité, une référence aux
d’un système d’échange d’informations entre les polices missions dites «de Petersberg» définit la portée
nationales; d’éventuelles futures actions communes.

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— Dans le domaine de la politique économique extérieure, le b. Avec les seules exceptions de la politique agricole et de la
Conseil a été habilité à étendre le champ d’application aux politique de la concurrence, la procédure de codécision
services et aux droits de propriété intellectuelle. s’applique à tous les domaines dans lesquels le Conseil est
habilité à prendre des décisions à la majorité qualifiée. Dans
B. Renforcement du Parlement européen quatre cas (les articles 18, 42 et 47, ainsi que l’article 151 sur la
1. Pouvoir législatif politique de la culture qui est resté inchangé), la procédure de
a. La procédure de codécision est étendue à quinze bases la codécision se combine toujours avec l’exigence d’une
juridiques existantes dans le traité CE: décision unanime du Conseil. Les autres domaines législatifs
— article 12: interdiction de discriminations, soumis à l’unanimité ne relèvent pas de la codécision
(l’article 166 sur les programmes-cadres de recherche,
— article 18: libre circulation des citoyens de l’Union, auparavant soumis à l’unanimité, est passé à la décision à
— article 42: libre circulation des travailleurs, majorité qualifiée).
— article 47, paragraphe 1: reconnaissance des diplômes, c. Dans le cadre de la procédure de codécision simplifiée
(article 251), le Parlement européen et le Conseil deviennent
— article 67: procédure en matière de visa,
colégislateurs pratiquement sur un pied d’égalité, notamment
— article 71: politique des transports y compris transport à cause de la nouvelle possibilité d’adopter un acte en
aérien, première lecture en cas d’accord entre les deux branches de
— article 141, paragraphe 3: mise en œuvre de l’égalité de l’autorité législative, et à cause de l’élimination du pouvoir du
rémunération pour un même travail, Conseil d’imposer unilatéralement sa position en troisième
lecture. Toutefois, une solution satisfaisante des problèmes
— article 148: mise en œuvre du Fonds social européen, posés par la délégation des actes d’exécution continue à faire
— article 150, paragraphe 4: mesures de formation défaut, la déclaration n° 31 se limitant à charger la Commission
professionnelle, de présenter une nouvelle proposition en matière de
«comitologie».
— article 153, paragraphe 4: protection des
consommateurs, 2. Pouvoir de contrôle
— article 156: réseaux transeuropéens («autres mesures»), — Outre le vote d’approbation de la Commission en tant que
collège, le Parlement procédera également à un vote
— article 162: mise en œuvre du Fonds européen de d’approbation préalable du président désigné de la future
développement régional (FEDER), Commission (article 214).
— article 172: mise en œuvre des programmes-cadres de — Le traité d’Amsterdam confirme expressément la
recherche, protection des droits fondamentaux dans le cadre de
— article 175, paragraphe 3: mesures dans le domaine de l’application du droit communautaire, jusqu’alors assurée
la protection de l’environnement, par la jurisprudence de la Cour de justice des
Communautés européennes. Il y ajoute un mécanisme de
— article 179: coopération au développement;
sanctions politiques qui peuvent être décidées en cas de
ainsi qu’à huit bases juridiques nouvelles: violation grave et persistante par un État membre des
— article 129: mesures d’encouragement en matière de principes sur lesquels l’Union est fondée (liberté,
l’emploi, démocratie, droits de l’homme, État de droit).

— article 135: coopération douanière, 3. Élection et statut des députés


En matière de procédure pour l’élection au suffrage universel
— article 137, paragraphe 2: politique sociale,
direct du Parlement (article 190), le pouvoir de la Communauté
— article 152, paragraphe 4: protection de la santé, d’arrêter des principes communs s’ajoute au pouvoir existant
mesures dans les domaines vétérinaire et d’adopter une procédure uniforme. Dans le même article, une
phytosanitaire, base juridique permettant l’adoption d’un statut unique des
— article 255: principes régissant l’accès aux documents, députés a été insérée. Toutefois, une disposition permettant de
prendre des mesures en vue du développement des partis
— article 280: lutte contre la fraude, politiques au niveau européen (article 191) continue à faire
— article 285: statistique communautaire, défaut.
— article 286: institution d’un organe chargé de surveiller C. Coopérations renforcées
la protection des personnes à l’égard du traitement des
Pour la première fois, les traités fondateurs contiennent des
données.
dispositions générales permettant sous certaines conditions à
Elle s’applique ainsi désormais à la plupart des domaines un certain nombre d’États membres de se prévaloir des
législatifs. institutions communes pour organiser une coopération

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Le système de Évolution historique de la
1 fonctionnement de 1 construction européenne
l’Union européenne

renforcée entre eux. Cette faculté s’ajoute aux cas de État membre, une nouvelle Conférence intergouvernementale
coopération renforcée régie par des dispositions spécifiques, (CIG) doit procéder à un réexamen complet des dispositions
comme l’Union économique et monétaire, la création de institutionnelles des traités.
l’espace de liberté, de sécurité et de justice et l’intégration de
3. Le recours du Conseil au vote à la majorité qualifiée est
l’acquis de la coopération dite «Schengen». Les domaines
certes prévu dans un certain nombre de bases juridiques
susceptibles de faire l’objet d’une coopération renforcée sont
nouvellement créées par le traité d’Amsterdam [voir ci-dessus
le troisième pilier et, sous conditions particulièrement
et les décisions sur les orientations en matière d’emploi
limitatives, les matières relevant d’une compétence
(article 128, paragraphe 2) et concernant les régions
communautaire non exclusive. Les conditions auxquelles toute
ultrapériphériques (article 299, paragraphe 2)]. Cependant,
coopération renforcée doit satisfaire ainsi que les mécanismes
parmi les politiques communautaires existantes, seul le
de décision prévus sont conçus de manière à garantir que
domaine de la politique de la recherche connaît, avec les
cette nouvelle modalité du processus d’intégration restera une
articles 166 et 172, de nouveaux cas de vote à la majorité
solution d’exception et que, en tout cas, elle ne pourra être
qualifiée. Dans le seul traité CE, 44 articles requièrent toujours
utilisée qu’afin de réaliser des progrès dans le processus
l’unanimité, dont environ 20 concernent des domaines
d’intégration et non de reculer.
législatifs tels que l’harmonisation fiscale (article 93), le
D. Simplification rapprochement des législations (article 94), la culture
(article 151), la politique industrielle (article 157), les Fonds
Le traité d’Amsterdam élimine des traités européens toute structurels (article 161) et certains aspects de la politique
disposition devenue caduque ou obsolète par l’évolution du environnementale (article 175).
temps, tout en évitant que les effets juridiques qui en
découlaient dans le passé ne soient affectés par cette F. Autres sujets
suppression. Il prévoit aussi une nouvelle numérotation des — L’acquis de la pratique communautaire dans l’application
traités. Pour des motifs juridico-politiques, le traité a été signé du principe de subsidiarité est repris dans un protocole à
et soumis à ratification sous forme d’amendements aux traités ce sujet.
en vigueur.
— La transparence est améliorée par de nouvelles dispositions
E. Réformes institutionnelles dans la perspective en vue de l’accès aux documents (article 255) et de
de l’élargissement l’ouverture des travaux du Conseil dans le domaine
législatif (article 207, paragraphe 3).
1. Le traité d’Amsterdam a fixé le nombre maximal des
membres du Parlement européen, conformément à la
demande de celui-ci, à 700 (article 189). Rôle du Parlement européen
2. La composition de la Commission et la question de la Consultation avant la convocation d’une Conférence
pondération des voix font l’objet d’un «protocole sur les intergouvernementale. En outre, le Parlement est associé aux
institutions» annexé au traité. Selon les dispositions de celui-ci, Conférences intergouvernementales selon des formules ad
dans une Union élargie à un maximum de vingt États hoc; lors des trois dernières, il a été représenté, selon le cas, par
membres, la Commission sera composée d’un national de son président ou par deux de ses membres.
chacun des États membres, à condition qu’à cette date la
pondération des voix au sein du Conseil ait été modifiée. En g Roberta PANIZZA
tout cas, un an au moins avant l’adhésion d’un vingt et unième Juillet 2008

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1.1.4. Le traité de Nice et la Convention sur l’avenir
de l’Europe
Le traité de Nice était censé résoudre les «reliquats» d’Amsterdam. Or, il n’a préparé l’Union européenne que partiellement
aux importants élargissements vers l’Est et le Sud du 1er mai 2004 et du 1er janvier 2007. La Convention sur l’avenir de
l’Europe, présidée par M. Giscard d’Estaing, s’est donc efforcée d’élaborer une nouvelle base juridique pour l’Union sous la
forme du traité établissant une Constitution pour l’Europe.

I. Le traité de Nice d’Amsterdam ainsi que toutes les modifications nécessaires


pour préparer l’élargissement.
Signé le 26 février 2001, il est entré en vigueur le 1er février
2003. C. Contenu
La Conférence intergouvernementale (CIG) a commencé le
A. Objectifs 14 février 2000 et a conclu ses travaux le 10 décembre 2000 à
Conformément aux conclusions du Conseil européen de Nice par un accord sur les questions institutionnelles
Helsinki (10 et 11 décembre 1999), confirmées à Nice en mentionnées ci-dessus et sur d’autres points, à savoir:
décembre 2000, l’Union européenne (UE) devait être en
mesure d’accueillir, à partir de la fin de 2002, les nouveaux — une nouvelle répartition des sièges du Parlement
États membres prêts à l’adhésion. Or, le 1er mai 2004, l’Union européen,
européenne a accueilli dix nouveaux États membres. Ces — une coopération renforcée rendue plus souple,
adhésions d’États peu ou moyennement peuplés accentuent
le poids relatif de l’ensemble des États moins peuplés au — le contrôle des droits fondamentaux et des valeurs au sein
détriment des États les plus peuplés (seuls deux des douze de l’Union européenne ,
pays candidats à l’adhésion sont plus peuplés que la moyenne — le renforcement du système judiciaire de l’UE.
des pays membres). Le traité de Nice vise donc à:
1. Pondération des voix au Conseil
— rendre les institutions communautaires plus efficaces et
légitimes; Dès le début de la CIG, il fut évident que la clé de tout autre
accord serait la nature du futur système de vote à la majorité
— préparer l’Union au grand élargissement vers l’Est. qualifiée utilisé au Conseil. Liant le système de vote au Conseil
à la composition de la Commission et, en partie, à la répartition
B. Historique
des sièges au Parlement, le Conseil européen a pris en compte
Certains problèmes institutionnels avaient été traités en partie le fait que l’enjeu principal de ce sommet était la modification
par les Conférences intergouvernementales de Maastricht et du poids relatif des États membres et leur capacité d’exercer
d’Amsterdam (1.1.3), mais n’avaient pu être résolus (les leur influence, sujet qu’aucune CIG n’avait abordé depuis le
«reliquats» d’Amsterdam): taille et composition de la traité de Rome.
Commission, pondération des voix au Conseil, extension du
vote à la majorité qualifiée. Le protocole sur les institutions Deux méthodes pour définir la majorité qualifiée étaient déjà
annexé au traité d’Amsterdam prévoyait que, pour un envisagées dans le protocole sur les institutions annexé au
élargissement ne dépassant pas cinq pays, la Commission se traité d’Amsterdam: une nouvelle pondération (adaptation du
composerait d’un membre par État, à condition que la système actuel) ou bien l’application d’une double majorité
pondération des voix au sein du Conseil ait été modifiée (de voix et de population), solution proposée par la
entre-temps (le cas d’un élargissement supérieur à cinq pays Commission et soutenue par le Parlement.
n’était pas prévu).
La CIG a choisi la première solution et a décidé que le nombre
Le Conseil européen de Cologne (3 et 4 juin 1999) avait donc de voix attribuées à chaque État membre serait modifié à
décidé qu’une prochaine Conférence intergouvernementale partir du 1er janvier 2005. Dans une déclaration annexée au
devait être convoquée au début de 2000 et s’achever à la fin traité, elle a également défini une position commune de
de cette même année. Le mandat de la Conférence devait l’Union lorsqu’il s’agira de fixer le nombre de voix des États
porter sur les questions institutionnelles qui n’avaient pas été candidats dans le cadre des négociations d’adhésion. Dans
réglées à Amsterdam et sur les nouvelles modifications du une Union à quinze États membres, la majorité qualifiée devait
traité qui se révéleraient nécessaires dans ce contexte. En vue être obtenue par 169 voix sur 237, soit 71,3 % des voix. Dans
de cette décision et sur la base d’un rapport de la présidence une Union à vingt-sept États membres, la majorité qualifiée
finlandaise, le Conseil européen de Helsinki confirma l’ordre du doit être obtenue par 255 voix sur 345, soit 73,9 % des voix.
jour de la conférence dans ce sens: les trois reliquats Auparavant, il fallait 62 voix sur 87, soit 71,27 %. Au cours du

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Le système de Évolution historique de la
1 fonctionnement de 1 construction européenne
l’Union européenne

processus d’élargissement, le seuil de la majorité qualifiée est 3. Le Parlement


donc devenu plus élevé. a. Composition
En outre, lors de l’adoption d’une mesure, un État membre Le traité d’Amsterdam avait, en principe une fois pour toutes,
pourra demander de vérifier que la majorité qualifiée fixé à 700 membres l’effectif maximal du PE. À Nice, il a paru
comprend au moins 62 % de la population totale de l’Union. nécessaire au Conseil européen, dans la perspective de
Dans le cas contraire, la décision ne serait pas adoptée. l’élargissement, de revoir le nombre de députés par État
membre ainsi que le nombre total de députés. La nouvelle
Les voix étaient distribuées de la manière suivante: 29 pour
composition du PE a été également utilisée pour
l’Allemagne, la France, l’Italie et le Royaume-Uni; 27 pour
contrebalancer la pondération des voix au Conseil.
l’Espagne et la Pologne; 14 pour la Roumanie; 13 pour les Pays-
Bas; 12 pour la Belgique, la République tchèque, la Grèce, la Le traité de Nice a fixé le nombre maximal des parlementaires
Hongrie et le Portugal; 10 pour la Bulgarie, l’Autriche, la européens à 732. Pour la législature 2004-2009, chacun des
Slovaquie et la Suède; 7 pour le Danemark, l’Irlande, la Lituanie 25 États membres s’est vu attribuer un nombre de sièges
et la Finlande; 4 pour l’Estonie, Chypre, la Lettonie, le correspondant à la somme des sièges qui leur sont attribués
Luxembourg et la Slovénie; 3 pour Malte (total 348). dans la déclaration n° 20 annexée à l’acte final du traité et du
nombre de sièges résultant de l’attribution des 50 sièges qui
Bien que le nombre des voix ait augmenté pour tous les États n’iront pas à la Bulgarie et à la Roumanie. Le nombre de sièges
membres, la part des États membres les plus peuplés a attribués aux États membres actuels a été réduit de 91 (de 626
diminué: de 55 % des voix auparavant, elle est passée à 45 % à 535). Seuls l’Allemagne et le Luxembourg conservent leur
depuis l’adhésion des dix nouveaux pays et à 44,5 % le nombre de députés. Cette réduction ne s’appliquera que pour
1er janvier 2005. Les nouvelles dispositions, telles que «le filet l’assemblée élue en 2009.
de sécurité» démographique, pourraient donc révéler ici toute
leur utilité. Puisque de nouveaux États membres sont entrés dans l’Union
pendant la période d’activité de 2004-2009, le nombre
2. La Commission maximal de 732 sièges au PE a temporairement pu être
a. Composition dépassé afin de faire siéger les députés des pays qui sont
Depuis 2005, la Commission comprend un seul commissaire arrivés après les élections européennes de 2004.
par État membre. Dès que le traité d’adhésion pour le 27e État b. Pouvoirs
membre aura été signé, le Conseil, statuant à l’unanimité,
devra prendre une décision: Le PE pourra, de la même manière que le Conseil, la
Commission et les États membres, former des recours
— sur le nombre de commissaires; juridictionnels pour incompétence, violation des formes
— sur les dispositions pour un système de rotation, étant substantielles, violation du traité instituant la Communauté
donné que les États membres sont traités sur un pied européenne ou de toute règle de droit relative à son
d’égalité en ce qui concerne la détermination de l’ordre de application, ou détournement de pouvoir, contre les actes du
passage et du temps de présence de leurs membres au Conseil, de la Commission ou de la Banque centrale
sein de la Commission et que chaque Commission doit européenne.
refléter les différentes caractéristiques démographiques et À la suite d’une proposition de la Commission, l’article 191 a
géographiques des États membres. été transformé en une base juridique opérationnelle qui
b. Mode de désignation permettra l’adoption, par la procédure de codécision, d’un
statut des partis politiques européens et de règles relatives à
Le président de la Commission est désormais désigné à la
leur financement. Le statut des membres du PE sera approuvé
majorité qualifiée par le Conseil européen. Une fois cette
par le Conseil statuant à la majorité qualifiée, à l’exception des
désignation approuvée par le PE, le Conseil statue également à
dispositions relatives au régime fiscal.
la majorité qualifiée pour désigner, en accord avec le président,
les autres membres de la Commission. Après un nouveau vote Les pouvoirs du PE ont été élargis en étendant légèrement le
du PE pour approuver la composition de l’ensemble de la champ d’application de la procédure de codécision et par
Commission, le Conseil nomme officiellement le président et l’approbation exigée pour l’établissement d’une coopération
les membres de la Commission à la majorité qualifiée. renforcée dans un domaine couvert par la codécision. Le PE
sera également invité à donner son avis lorsque le Conseil se
c. Organisation interne
prononce sur le danger d’une violation sérieuse des droits
Le traité de Nice poursuit une évolution déjà entamée à fondamentaux dans un État membre.
Amsterdam, en accordant de larges pouvoirs au président sur
l’organisation de la Commission. Le président répartit les 4. La réforme du système juridictionnel
responsabilités entre les commissaires et peut remanier cette a. La Cour de justice
répartition en cours de mandat; il choisit les vice-présidents et La Cour de justice comprendra, comme par le passé, un juge
en définit le nombre. Le nouveau traité institue ainsi un par État membre. Mais elle disposera désormais de plusieurs
pouvoir hiérarchique au sein de la Commission. formations: elle pourra siéger en chambres (composées de

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trois ou de cinq juges), en grande chambre (composée de dans tous les domaines où une coopération améliorée se
onze juges) ou en assemblée plénière. Le Conseil, statuant à rapporterait à une question soumise à la codécision.
l’unanimité, pourra augmenter le nombre des avocats 7. Protection des droits fondamentaux
généraux, qui reste fixé à huit. Si la Cour de justice conserve la
Un paragraphe a été ajouté à l’article 7 du traité UE, relatif aux
compétence pour étudier des questions faisant l’objet d’un
décisions à prendre en cas de «violation grave et persistante»
renvoi préjudiciel, son statut prévoira la possibilité de déléguer
des droits fondamentaux par un État membre, afin de viser les
au Tribunal de première instance des catégories d’affaires
cas où, sans qu’il y ait violation avérée des droits
autres que celles énumérées à l’article 225 du traité CE.
fondamentaux, il y a un «risque clair» de violation de ces droits.
b. Le Tribunal de première instance Le Conseil statue à la majorité des quatre cinquièmes de ses
Les compétences du Tribunal de première instance sont membres, après avis conforme du PE, pour constater
élargies notamment à certaines catégories de recours l’existence d’un tel risque et adresser à l’État membre en cause
préjudiciels. Des chambres juridictionnelles seront créées par des recommandations appropriées.
décision du Conseil statuant à l’unanimité. Une déclaration D. Le rôle du Parlement européen
prévoit la création rapide d’une chambre juridictionnelle
Comme lors des Conférences intergouvernementales
compétente pour statuer en première instance sur les litiges
précédentes, le PE a activement participé à la préparation de la
entre la Communauté et ses fonctionnaires. Toutes ces
CIG de 2000. Il s’est exprimé sur l’ordre du jour, le déroulement
dispositions de fonctionnement, notamment les compétences
et les objectifs de la Conférence dans ses résolutions des
du Tribunal, se trouvent dorénavant dans le traité lui-même.
3 février et 13 avril 2000. Il a également exprimé son avis sur le
5. Procédures législatives contenu et la portée juridique de la charte des droits
fondamentaux en adoptant une résolution et une décision
Bien qu’un nombre considérable (27) de nouvelles politiques
(résolution sur l’élaboration d’une charte des droits
et dispositions aient été soumises au vote à la majorité
fondamentaux de l’Union européenne et décision du
qualifiée au Conseil, la codécision a été étendue seulement à
14 novembre 2000 sur l’approbation du projet de charte des
quelques domaines mineurs (articles 13, 62, 63, 65, 157, 159 et
droits fondamentaux de l’Union européenne).
191 du traité CE; pour l’article 161, l’avis conforme est requis).
Dans sa résolution du 31 mai 2001 sur le traité de Nice et
6. Coopérations renforcées l’avenir de l’Union, le PE a critiqué fortement le traité, lui
À Nice, l’idée de base a été de compenser l’extension reprochant avant tout de ne pas préparer suffisamment les
insuffisante du vote à la majorité qualifiée et d’éviter une prochaines adhésions. Il se déclare toutefois satisfait des
impasse décisionnelle après l’élargissement. réformes substantielles introduites dans la structure et le
fonctionnement du système juridictionnel qui devraient
Comme le traité d’Amsterdam, le traité de Nice contient des
préserver l’unité du droit communautaire et renforcer ainsi la
dispositions générales, applicables à toutes les coopérations
cohérence de l’Union.
renforcées et des dispositions propres au pilier concerné.
Toutefois, alors que le traité d’Amsterdam réservait les Le PE a estimé que le bon fonctionnement de l’UE dépendra
coopérations renforcées au premier et au troisième pilier, celui des résultats du débat sur l’avenir de l’Europe annoncé dans
de Nice prévoit leur possibilité dans les trois piliers. une déclaration annexée au traité, qui débouchera sur une
réforme prévue pour 2004. À ce propos, il a exigé que la
Comme auparavant, les coopérations renforcées ne peuvent prochaine CIG suive un processus radicalement différent du
être lancées qu’en dernier ressort. Sur ce point, toutefois, le modèle traditionnel: un processus transparent, ouvert à la
traité de Nice apporte deux modifications: jusqu’alors, une participation des parlementaires européens, des parlements
coopération renforcée ne pouvait être lancée que «lorsque les nationaux et de la Commission, et aux contributions des
objectifs des traités ne pourraient être atteints en appliquant citoyens, et qui devrait aboutir à un document de caractère
les procédures pertinentes qui y sont prévues» (article 43 du constitutionnel.
traité UE); dorénavant, les coopérations renforcées ne pourront
être engagées que «lorsqu’il a été établi au sein du Conseil
que les objectifs qui leur sont assignés ne peuvent être
II. La Convention sur l’avenir de l’Europe
atteints, dans un délai raisonnable, en s’en tenant aux
dispositions pertinentes des traités». Le renvoi au Conseil A. Fondement
européen ne sera donc plus possible, et le concept du «délai En accord avec la déclaration n° 23 du 11 décembre 2000
raisonnable» clarifie la formule trop souple de l’article 43 du annexée au traité de Nice, le Conseil européen de Laeken a
traité UE. décidé de créer une Convention rassemblant les principales
parties prenantes au débat sur l’avenir de l’Union européenne.
Le rôle du PE dans la procédure d’autorisation a été renforcé.
Dans le troisième pilier, son droit d’être informé est converti en B. Objectifs
consultation obligatoire. Dans le premier pilier, la consultation Préparer de façon aussi transparente que possible la prochaine
reste la règle générale, mais l’avis conforme du PE est exigé CIG en traitant les quatre grandes questions que soulève le

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Le système de Évolution historique de la
1 fonctionnement de 1 construction européenne
l’Union européenne

développement de l’UE: une meilleure répartition des 4. Organisation des travaux de la Convention
compétences, la simplification des instruments, davantage de Les travaux de la Convention se sont déroulés en trois phases:
démocratie, de transparence et d’efficacité, et l’élaboration
— une phase d’écoute durant laquelle il s’agissait de recueillir
d’une Constitution pour les citoyens européens.
les attentes et les besoins des États membres et des
C. Structure citoyens européens;
1. La Convention — une phase de réflexion consacrée à l’examen des idées
— 1 président (M. Giscard d’Estaing) émises;
— 2 vice-présidents (MM. Amato et Dehaene) — une phase de proposition correspondant à la synthèse des
réflexions.
— 15 représentants des chefs d’État ou de gouvernement des
États membres La première phase a débuté en février 2002 avec le lancement
de la Convention et s’est achevée le 14 juin 2002 avec la
— 30 membres des parlements nationaux (2 par État
création de 11 groupes de travail pour aller plus en avant sur
membre)
certains thèmes ne pouvant être approfondis en session
— 16 membres du PE plénière.
— 2 représentants de la Commission À la fin de l’année 2002, les groupes de travail (dont les thèmes
Les pays candidats à l’adhésion peuvent eux aussi, et dans les étaient «subsidiarité», «chartes», «personnalité juridique»,
mêmes conditions, participer aux débats, mais ils ne doivent «parlements nationaux», «compétences complémentaires»,
pas empêcher le consensus qui pourrait exister entre les États «gouvernance économique», «action extérieure», «défense»,
membres. La Convention compte donc un total de «simplification», «liberté, sécurité et justice» et «Europe
105 membres. sociale») ont soumis leurs conclusions à la Convention. Le
praesidium, quant à lui, a présenté un avant-projet de
2. Le praesidium de la Convention Constitution européenne le 28 octobre 2002.
Outre le président et les vice-présidents, le praesidium
Durant le premier semestre de 2003, la Convention a rédigé et
comprend 9 membres issus de la Convention:
débattu en plusieurs étapes un texte qui est devenu le projet
— les représentants de tous les gouvernements qui exercent de traité instituant une Constitution pour l’Europe. Le
la présidence du Conseil pendant la tenue de la praesidium a entendu, au cours de 26 sessions plénières,
Convention (l’Espagne, le Danemark et la Grèce); 1 812 interventions de conventionnels; le site internet de la
— 2 représentants des parlements nationaux (M. Bruton et Convention a reçu 692 250 visites, dont 97 000 pour le seul
Mme Stuart); mois de juin 2003; enfin, il y a eu 5 995 amendements des
conventionnels aux différents projets d’articles.
— 2 représentants du PE (MM. Hänsch et Méndez de Vigo);
La partie I (principes et institutions, 59 articles) et la partie II
— 2 représentants de la Commission européenne (charte des droits fondamentaux, 54 articles) ont été soumises
(MM. Barnier et Vitorino). au Conseil européen de Thessalonique, le 20 juin 2003. La
Il comprend également un «invité» désigné par les États partie III (politiques, 338 articles) et la partie IV (dispositions
candidats à l’adhésion, M. Peterle, représentant du Parlement finales, 10 articles) ont été présentées à la présidence italienne
slovène à la Convention. Le praesidium a joué un rôle le 18 juillet 2003. S’y ajoutent cinq protocoles et une
d’impulsion vis-à-vis de la Convention et lui a fourni une base déclaration.
de travail. Le 18 juin 2004, la Conférence intergouvernementale a adopté
3. Le secrétariat de la Convention ce texte avec un certain nombre d’amendements, notamment
Composé d’un secrétaire général, d’une adjointe au secrétaire dans les dispositions institutionnelles et les domaines
général, d’un porte-parole, d’un cabinet du président (deux d’application de la majorité qualifiée. Toutefois, la structure
membres) et d’une quinzaine de fonctionnaires issus des essentielle du projet de la Convention a été conservée.
services du Conseil, du PE et de la Commission, le secrétariat a
apporté son aide aux membres de la Convention sur toutes les g Wilhelm LEHMANN
questions qui se sont posées lors de leurs travaux. Juillet 2008

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1.1.5. Le traité établissant une Constitution pour l’Europe
Signé par les 25 États membres le 29 octobre 2004, le traité établissant une Constitution pour l’Europe renforce les pouvoirs
des institutions européennes et apporte d’importantes modifications à la répartition des compétences et à plusieurs
politiques européennes. Malgré l’importance que ce traité revêt pour l’avenir de l’Union européenne, il n’a été ratifié ni par
la France ni par les Pays-Bas et n’a pas pu entrer en vigueur.

Signé le 29 octobre 2004 et approuvé par le Parlement A. La structure de base


européen le 12 janvier 2005, le traité doit être ratifié par 1. Préambule
chaque État membre selon ses propres règles 2. Quatre parties principales contenant 448 articles:
constitutionnelles (article IV-447). Son entrée en vigueur est
— Partie I: dispositions fondamentales concernant les
envisagée, sous réserve du bon déroulement des ratifications,
objectifs, les compétences, les institutions et organes, les
soit pour le 1er novembre 2006 soit pour le début du deuxième
instruments et procédures, la vie démocratique et les
mois suivant la dernière ratification.
finances de l’Union ainsi que les règles d’appartenance à
cette dernière.
Objectifs et historique
— Partie II: la charte des droits fondamentaux.
1.1.4. I.
— Partie III: les politiques internes et externes et le
fonctionnement de l’Union.
Contenu — Partie IV: dispositions générales et finales.
La nature du document, intitulé «Traité établissant une 3. 2 annexes et 36 protocoles
Constitution pour l’Europe», a suscité différentes
4. 50 déclarations
interprétations politiques. Cependant, aucun doute ne persiste
sur sa valeur juridique. Le texte représente un traité du même
genre que les traités antérieurs qu’il remplace (article IV-437). B. Des institutions plus efficaces
Trois éléments clés le prouvent: les dispositions sur son entrée 1. Un Parlement européen aux pouvoirs renforcés
en vigueur (nécessitant l’accord de chaque État membre), sur Les pouvoirs législatif et budgétaire ainsi que les fonctions
sa révision (à l’unanimité, article IV-443, paragraphe 3) et sur la consultatives et de contrôle politique du Parlement européen
possibilité accordée aux États membres de se retirer de l’Union ont été une fois de plus étendus (article I-20).
(article I-60). Tous les trois démontrent que l’Union continue à
Avec l’introduction de la procédure dite «procédure législative
relever des États membres.
ordinaire» (article III-396), qui correspond à l’actuelle procédure
Quoique ce nouveau texte mette un terme à la notion de de codécision avec le Conseil statuant à la majorité qualifiée, le
«piliers», son contenu conserve la structure hybride de l’UE. rôle du PE en tant que colégislateur est réaffirmé. Le champ
Certains éléments communautaires (supranationaux) ont été d’application de cette procédure a été étendu à 34 domaines
renforcés, notamment dans le domaine de la justice et des (dont l’agriculture, l’asile et l’immigration). À quelques
affaires intérieures (JAI), tandis que d’autres champs comme la différences minimes près, la procédure couvre désormais aussi
politique étrangère et de sécurité commune (PESC) la procédure budgétaire (1.4.3). L’abolition de la différence
demeurent de nature intergouvernementale (1.4.1 et 1.4.2). Le entre les dépenses obligatoires et les dépenses non
traité contient néanmoins certaines innovations importantes, obligatoires permettra au PE de négocier à égalité avec le
aussi bien au niveau des dispositions générales et des Conseil l’adoption de l’ensemble du budget communautaire
politiques qu’en matière de réformes institutionnelles. Il faut (article III-404). Quant aux autres procédures législatives, la
relever: «procédure de coopération» est supprimée; celle de l’«avis
conforme» continue d’exister sous le nom d’«approbation» et
— la reconnaissance de la personnalité juridique de l’Union s’appliquera entre autres aux modalités concernant les
(article I-7); ressources propres de l’UE (article I-54). Seule la procédure de
— l’intégration de la charte des droits fondamentaux, qui consultation reste inchangée. À titre d’exemple, le PE sera
marque un progrès majeur pour la protection des droits désormais consulté dans le domaine de la protection
des citoyens au sein de l’Union; diplomatique et consulaire.

— l’élection d’un président du Conseil européen; Concernant les pouvoirs de contrôle et de désignation, il
faut surtout relever le nouveau droit du PE d’élire le président
— la création d’un poste de ministre européen des affaires de la Commission sur proposition du Conseil européen. Ce
étrangères. dernier choisit le candidat à la majorité qualifiée en tenant

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Le système de Évolution historique de la
1 fonctionnement de 1 construction européenne
l’Union européenne

compte du résultat des élections européennes. Le PE présidence du Conseil, le principe d’une rotation égale a été
approuve également la Commission dans son ensemble. retenu. Dorénavant, il y aura des présidences par équipe
destinées à mieux assurer la continuité des travaux.
Concernant l’organisation interne du Parlement, le seuil du
nombre des députés a été fixé à 750 au maximum. Avant les 4. La Commission européenne
élections de 2009, le Conseil européen est chargé de décider, La Commission européenne conserve ses fonctions
sur l’initiative du Parlement et avec son approbation, de la traditionnelles (article I-26): elle promeut l’intérêt général de
distribution des sièges. Le système sera basé sur le présent l’Union, veille à l’application du droit communautaire et exerce
mécanisme de représentation «dégressivement des fonctions de coordination, d’exécution et de gestion. Pour
proportionnelle», avec un seuil minimal de 6 sièges et un seuil assurer le bon fonctionnement du processus de prise de
maximal de 96 sièges par État membre. décision au sein d’un collège grandissant, la Convention avait
2. Un Conseil européen à l’importance accrue proposé une réduction du nombre des commissaires. À la
suite d’une sévère contestation par les plus petits États
Le traité reconnaît pour la première fois le Conseil européen
membres, cette idée a été abolie par la CIG. L’accord obtenu
comme institution de l’UE (article I-19). Principalement
prévoit la formule «un commissaire par État membre»
chargé de donner à l’Union les «impulsions nécessaires à son
jusqu’en 2014. Après cette date, la Commission sera composée
développement» et de définir les priorités politiques
d’un nombre de commissaires correspondant aux deux tiers
générales (article I-21), sa capacité d’influer sur les choix
du nombre des États membres, choisis sur la base d’une
politiques cruciaux au sein de l’UE semble avoir été renforcée.
rotation égale entre les États.
Les nouveaux règlements sur son organisation interne
contribuent à cette notion. La présidence tournante telle Dans le même but d’une promotion de la cohérence et de
qu’elle existe sera remplacée par une présidence stable, élue l’efficacité du travail, le rôle du président de la Commission a
à la majorité qualifiée des membres du Conseil européen pour été considérablement renforcé (article I-27). Grâce à son
un mandat de deux ans et demi, renouvelable. Dans le but élection par le PE, il pourra dorénavant s’appuyer sur une plus
d’améliorer la cohérence et l’efficacité du travail du Conseil grande base de légitimité. De plus, il aura la capacité de
européen, cette présidence devra avant tout veiller à un climat décider de l’organisation interne de son institution
favorable à la recherche d’un consensus, qui demeure la règle [désignation des commissaires, répartition des portefeuilles,
générale pour l’adoption des décisions au sein de l’institution. demande de démission d’un(e) commissaire].
De plus, elle devra assurer la représentation extérieure de l’UE
5. Le ministre européen des affaires étrangères
concernant les matières relevant de la PESC, sans contrarier les
compétences du ministre européen des affaires étrangères. Nouvelle création institutionnelle, le ministre européen des
affaires étrangères sera nommé par le Conseil européen à la
3. Le Conseil des ministres de l’Union majorité qualifiée avec l’accord du président de la Commission
Le Conseil des ministres de l’UE continue à exercer des européenne (article I-28). Il sera responsable de la politique
fonctions législative, budgétaire et de coordination étrangère et de sécurité commune de l’Union dans son
(article I-23). En règle générale, il prend ses décisions à la ensemble. Dans ce but, il dispose du pouvoir de proposition. Il
majorité qualifiée. Afin de faciliter la prise de décision dans un présidera le Conseil des affaires étrangères et sera en même
Conseil élargi, le système de pondération des voix établi dans temps le vice-président de la Commission («double
le traité de Nice a été réformé. Très contestée tout au long du chapeau»).
processus de réforme, la CIG a finalement opté pour la solution La continuité et la cohérence du travail du ministre seront
suivante: à partir du 1er novembre 2009, un système de assurées à travers la mise en place d’un service européen
double majorité d’États et de population sera mis en place. pour l’action extérieure, composé de fonctionnaires du
Une décision sera adoptée au sein du Conseil si elle réunit au secrétariat général du Conseil et de la Commission ainsi que
moins l’accord de 55 % des États membres représentant un de diplomates nationaux (article III-296).
minimum de 65 % de la population de l’Union. Une minorité
de blocage nécessite la participation d’au moins quatre États C. Des instruments et procédures simplifiés
membres. Si l’initiative de la Commission n’est pas nécessaire 1. Une répartition des compétences plus claire
ou lorsqu’une décision n’est pas adoptée sur l’initiative du
Pour la première fois, le traité établit un catalogue distinguant
ministre des affaires étrangères, la majorité requise est
clairement entre trois catégories de compétences (article I-12):
renforcée (72 % des États et 65 % de la population).
— les compétences exclusives (article I-13): seule l’Union
En ce qui concerne l’organisation de ses travaux, les
peut légiférer; les États membres mettent en œuvre les
réunions des formations spécialisées du Conseil seront
actes juridiques de l’UE;
désormais divisées en deux parties: celles consacrées aux
délibérations législatives auront lieu en public, celles — les compétences partagées (article I-14): les États
consacrées aux thèmes non législatifs se tiendront à huis clos. membres peuvent légiférer et adopter des actes
Un Conseil des affaires étrangères sera créé et présidé par le juridiquement obligatoires dans la mesure où l’Union ne le
ministre européen des affaires étrangères. Quant à la fait pas;

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— les compétences d’appui (article I-17): l’UE adopte des un acte législatif (article I-50). Par ailleurs, les citoyens auront
mesures en vue d’appuyer ou de compléter les politiques un droit constitutionnel d’accès aux documents des
des États membres. institutions, organes et organismes de l’UE.
2. Une réduction du nombre des instruments juridiques E. Les politiques de l’Union
Une nouvelle «hiérarchie des normes» simplifie l’exercice des Parmi les dispositions relatives aux politiques internes et
compétences en réduisant le nombre d’instruments juridiques externes de l’Union (partie III du traité), les changements
de l’UE. Le traité distingue entre deux catégories d’actes principaux par rapport aux traités précédents touchent avant
(article I-33): tout les domaines de la justice et des affaires intérieures
a. les actes législatifs (article I-34), qui sont généralement (4.11.1), de la politique économique et monétaire (5.1 à 5.5)
adoptés à travers la procédure législative ordinaire: et de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC)
(6.1.1).
— la loi européenne est directement applicable et obligatoire
dans tous ses éléments; F. Autres dispositions
— la loi-cadre européenne lie tout État membre destinataire 1. Le rôle des parlements nationaux et les principes
quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances de subsidiarité et de proportionnalité
nationales le choix des moyens; La volonté de créer «une Europe plus proche des citoyens» se
b. les actes non législatifs (article I-35), qui seront adoptés traduit entre autres par la modification importante de deux
par le Conseil européen, le Conseil des ministres, la protocoles annexés au traité (1.2.2).
Commission, ou, le cas échéant, par d’autres institutions: a. Le protocole n° 1, «Le rôle des parlements nationaux dans
— le règlement européen est un acte de nature réglementaire l’Union européenne», promeut une implication renforcée des
de portée générale; parlements des États membres dans le processus politique de
l’UE en leur accordant des droits d’information et de
— la décision européenne a une portée individuelle ou contrôle qui incluent:
générale;
— la transmission directe de projets d’actes législatifs ainsi
— la recommandation et l’avis expriment un point de vue et que d’autres documents des institutions européennes aux
sont non contraignants. parlements nationaux;
D. La vie démocratique, les droits des citoyens — le respect d’un délai de six semaines entre la transmission
et la transparence d’un projet d’acte législatif et son inscription à l’ordre du
Toute une série de dispositions visent à promouvoir davantage jour du Conseil et de dix jours entre l’inscription à l’ordre du
les droits démocratiques et les droits des citoyens au niveau jour du Conseil et son adoption.
européen (2.1. à 2.5). b. Le protocole n° 2, «L’application des principes de subsidiarité
Concernant les bases démocratiques de l’UE, le traité fait et de proportionnalité», contraint les institutions européennes à
pour la première fois référence aux trois principes prendre en considération les deux principes lors de
fondamentaux de l’égalité démocratique, de la démocratie l’élaboration d’actes législatifs. Il accorde aux parlements
représentative et de la démocratie participative. S’agissant de nationaux le droit:
cette dernière, la possibilité d’une initiative populaire est — de s’exprimer sur l’application correcte des deux principes
prévue (article I-47). 1 million de citoyens européens issus de («mécanisme d’alerte précoce»). Si un tiers (ou un quart
plusieurs États membres peuvent signer une pétition afin de lorsqu’il s’agit d’une proposition concernant le domaine de
demander à la Commission de prendre une initiative la JAI) des parlements considère que les principes n’ont pas
législative. été suffisamment respectés, la Commission devra
Dans le domaine de la protection des droits fondamentaux, réexaminer sa proposition et décider de la retirer, de la
les citoyens européens pourront désormais profiter d’une maintenir ou de la modifier en donnant les raisons précises
garantie de leurs droits plus complète que jamais (article I-9). de sa démarche;
Elle se traduit non seulement par l’adhésion prévue de l’UE à la — d’introduire devant la Cour de justice, par l’intermédiaire de
convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme leur État membre, un recours pour violation du principe
et des libertés fondamentales, mais surtout par l’intégration de de subsidiarité par un acte législatif.
la charte des droits fondamentaux dans le traité. L’Union se
dote ainsi d’un catalogue de droits qui sera juridiquement 2. Les éléments de souplesse
contraignant pour ses institutions et organes et pour les États a. Les «clauses passerelles» et les «freins de secours»
membres lorsqu’ils appliquent le droit européen. Malgré la généralisation de la majorité qualifiée (article I-23), la
Dans l’intention de rendre le système politique de l’UE plus prise de décision au sein du Conseil de ministres continue à
transparent, le Parlement et le Conseil seront dorénavant nécessiter l’unanimité dans certains domaines importants. Afin
obligés de siéger en public lorsqu’ils examinent et adoptent de permettre à l’avenir un meilleur fonctionnement du travail,

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Le système de Évolution historique de la
1 fonctionnement de 1 construction européenne
l’Union européenne

une clause passerelle générale (article IV-444) a été inscrite obligatoire. Le Conseil européen peut décider, à la majorité
dans le traité. Elle permettra au Conseil européen, statuant à simple et après approbation du PE, de renoncer à une telle
l’unanimité et après approbation par le PE, d’autoriser le convocation;
passage du vote à l’unanimité au vote à la majorité qualifiée
b. une procédure simplifiée (article IV-445) qui s’applique
ou, le cas échéant, d’une procédure législative spéciale à la
uniquement aux politiques et actions internes de l’Union
procédure législative ordinaire concernant tout domaine
mentionnées dans le titre III de la partie III du traité. Elle permet
mentionné dans la partie III du traité. Sont exclues de ce
au Conseil européen de modifier le traité sans devoir
mécanisme les décisions touchant le domaine de la défense
convoquer une CIG. Toute modification passe par une décision
ou ayant une implication militaire. Cependant, un seul
unanime du Conseil après la consultation du PE et de la
parlement national peut empêcher l’entrée en vigueur de la
Commission et doit être ratifiée par tous les États membres.
décision en s’opposant dans les six mois au recours à la clause
passerelle. Outre la clause passerelle générale, il existe des
clauses passerelles spécifiques qui s’appliquent à des Rôle du Parlement européen
domaines circonscrits tels que la politique sociale En réclamant des réformes supplémentaires avant
(article III-210) ou la PESC (articles I-40 et III-300). Dans plusieurs l’élargissement à 25 États et en soumettant des propositions
domaines, des «freins de secours» ont été introduits précises concernant les méthodes de préparation et le
permettant à un État membre qui estime qu’un projet législatif contenu des réformes, le PE a été l’un des moteurs principaux
ou une procédure porterait atteinte aux principes du processus de réforme dit «post-Nice».
fondamentaux de son système judiciaire de faire appel au
Ce processus s’est avéré un succès remarquable pour le
Conseil européen pour qu’il se saisisse du cas en question.
Parlement compte tenu du fait qu’il a pu réaliser un grand
b. Les coopérations renforcées nombre de ses objectifs initiaux, notamment en ce qui
Dans le cadre des compétences non exclusives de l’UE, concerne la hiérarchie des normes, la procédure législative
plusieurs États membres peuvent instaurer entre eux une ordinaire, l’extension du vote à la majorité qualifiée, la
coopération renforcée afin d’atteindre des objectifs de l’Union répartition des compétences, l’élection de la Commission et
(article I-44 et articles IV-416 à IV-423). Une telle coopération l’intégration de la charte des droits fondamentaux. Dans sa
ne peut être lancée qu’en dernier ressort et doit associer au résolution sur le traité du 12 janvier 2005, le Parlement se
moins un tiers des États membres. L’autorisation est accordée félicite donc avec raison de cette «amélioration considérable»
par le Conseil statuant à l’unanimité, sur proposition de la que représente le traité.
Commission et après approbation du Parlement. Les décisions Néanmoins, il faut également noter que certains domaines
prises par les États qui y participent ne s’appliqueront qu’à eux restent en grande partie en dehors de sa zone d’influence.
seuls. Parmi ceux-ci figurent avant tout les révisions des traités, les
3. La révision du traité réformes institutionnelles, la PESC et la politique de défense.
Outre l’introduction d’une révision simplifiée à travers le Pendant le processus de réforme, le PE a largement profité des
mécanisme des clauses passerelles, deux dispositions ouvrent méthodes de travail de la Convention puisqu’elles
la voie à une révision du traité: privilégiaient — du moins dans les premières phases —
l’ouverture et la délibération au détriment de la fermeture et
a. une procédure de révision ordinaire (article IV-443) qui
de la négociation diplomatique, caractéristique de la méthode
prévoit deux nouveautés:
intergouvernementale classique des CIG. Dans le même esprit,
— le PE pourra désormais soumettre des projets de révision le PE a obtenu pour la première fois une participation pleine et
du traité; entière à l’ensemble des étapes de la CIG.
— le président du Conseil européen pourra décider de
convoquer une convention pour préparer les travaux d’une g Wilhelm LEHMANN
CIG. Cependant, la convocation d’une convention n’est pas Novembre 2005

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1.1.6. Le traité de Lisbonne
Le présent chapitre décrit la toile de fond et les dispositions essentielles du traité de Lisbonne. Il vise à rappeler le contexte
historique qui a vu émerger ce très récent texte fondamental de l’Union européenne et à le distinguer de celui des
précédents (1.1.5). Les dispositions spécifiques (avec les références des articles) et leurs effets sur les politiques de l’Union
européenne sont expliqués plus en détail dans les fiches techniques suivantes consacrées à des politiques et à des aspects
particuliers.

Base juridique terme «Communauté» est remplacé par «Union» tout au long
Traité de Lisbonne modifiant le traité UE et le traité CE du texte. L’Union prend la place de la Communauté, elle est
(JO C 306 du 17.12.2007) son successeur sur le plan juridique. Le traité de Lisbonne ne
crée pas de symboles étatiques pour l’Union comme un
drapeau ou un hymne. Certains termes, comme «Constitution»,
Historique «loi» ou «ministre des affaires étrangères», utilisés dans le traité
Le traité de Lisbonne a débuté à la fin de 2001 sous la forme constitutionnel ont également disparu. Bien que le nouveau
d’un projet constitutionnel (déclaration du Conseil européen texte ne soit donc plus un traité constitutionnel que de nom, il
sur l’avenir de l’Union européenne, ou déclaration de Laeken). préserve bien la plupart de ses réalisations majeures.
Il a été suivi, en 2002 et 2003, par la Convention européenne
Le traité de Lisbonne ne transfère aucune nouvelle
(1.1.5). L’un des objectifs majeurs de cette entreprise
compétence exclusive vers l’Union. Néanmoins, il change la
consistait à remplacer le droit communautaire primaire
façon dont l’Union exerce ses pouvoirs existants et certains
existant par un fondement juridique modernisé pour l’Union
nouveaux pouvoirs (partagés) en améliorant la participation et
européenne (UE).
la protection des citoyens, en créant une nouvelle
Néanmoins, après plus de cinq ans de débats et de configuration constitutionnelle et en modifiant les processus
négociations constitutionnels, c’est un autre traité modifiant le décisionnels en vue d’une efficacité et d’une transparence
droit primaire existant qui a été signé. Comme on le sait, ce accrues. Le contrôle parlementaire et la responsabilité
changement de stratégie est intervenu à la suite du résultat démocratique s’en trouvent ainsi renforcés.
négatif des deux référendums sur le traité établissant une
Constitution pour l’Europe (traité constitutionnel) tenus en mai 2. La suprématie du droit communautaire
et en juin 2005, en conséquence de quoi le Conseil européen À la différence du traité constitutionnel, le traité de Lisbonne
a décidé de s’accorder une «période de réflexion» de deux ans. ne contient aucun article consacrant formellement la
En mars 2007, la présidence allemande a réussi à ranimer suprématie du droit communautaire sur la législation
l’effort de réforme lors d’une célébration marquant le nationale, mais une déclaration a été jointe au traité à cet effet
50e anniversaire des traités de Rome. La déclaration de Berlin, (déclaration n° 17), en référence à un avis du service juridique
adoptée par tous les États membres, consacrait leur volonté du Conseil qui réitère la jurisprudence constante de la Cour.
commune de se mettre d’accord sur un nouveau traité à 3. Les limites des compétences de l’Union
temps pour les élections européennes de 2009.
Le traité de Lisbonne organise et clarifie pour la première fois
Sur la base de la déclaration de Berlin, le Conseil européen des les pouvoirs de l’Union. Il établit une distinction entre trois
21, 22 et 23 juin 2007 a adopté un mandat détaillé en vue types de compétences: les compétences exclusives, où seule
d’une Conférence intergouvernementale (CIG) ultérieure sous l’Union est habilitée à légiférer, les États membres se limitant à
la présidence portugaise. La CIG a conclu ses travaux en mettre en œuvre la législation de l’UE; les compétences
octobre 2007. Le traité a été signé lors du Conseil européen de partagées, où les États membres peuvent légiférer et adopter
Lisbonne du 13 décembre 2007. Le texte devrait être ratifié par des actes juridiquement contraignants dans la mesure où
les États membres et entrer en vigueur avant les élections l’Union ne l’a pas fait; les compétences d’appui, où l’UE adopte
européennes de juin 2009. des mesures pour soutenir ou compléter les politiques des
États membres. Les compétences de l’Union peuvent
Contenu désormais être retournées aux États membres au cours d’une
révision du traité.
A. Objectifs et principes juridiques
1. Objectifs de la réforme 4. La disparition des piliers
Afin d’accroître la légitimité, l’efficacité et la transparence de a. Personnalité juridique de l’UE
l’UE, le traité de Lisbonne revient à la méthode traditionnelle Le traité de Lisbonne accorde à l’UE la pleine personnalité
consistant à modifier les traités existants. Le traité instaurant la juridique. L’Union obtient par conséquent la capacité de signer
Communauté européenne est rebaptisé «traité sur le des traités internationaux dans les domaines relevant de ses
fonctionnement de l’Union européenne» (traité FUE) et le compétences ou d’adhérer à une organisation internationale.

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Le système de Évolution historique de la
1 fonctionnement de 1 construction européenne
l’Union européenne

Les États membres ne peuvent signer des accords C. Une nouvelle configuration institutionnelle
internationaux qu’à condition que ceux-ci soient compatibles 1. Le Parlement européen
avec le droit communautaire. Conformément à l’article 14, paragraphe 2, du traité UE, le
b. Domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice (LSJ) Parlement européen, désormais, «est composé de
Le traité de Lisbonne achève l’absorption des aspects restants représentants des citoyens de l’Union», et non plus de
du troisième pilier de la LSJ (police et coopération judiciaire représentants des «peuples des États», comme l’établissait
dans les matières criminelles) par le premier pilier. Sa structure l’article 189 du traité CE.
intergouvernementale disparaît du fait que les actes législatifs Les pouvoirs législatif et budgétaire du PE se sont accrus tant
adoptés dans ce domaine sont soumis à la procédure par la nouvelle «procédure législative ordinaire» qui
législative ordinaire (majorité qualifiée et codécision) ainsi correspond à l’ancienne procédure de codécision que par
qu’aux instruments juridiques de la méthode communautaire l’abolition de la distinction entre dépenses obligatoires et
(règlements, directives et décisions), sauf disposition contraire. dépenses non obligatoires. Par ailleurs, la procédure législative
5. Révision des traités ordinaire s’appliquera dans plus de 40 nouveaux domaines de
compétence, portant leur nombre total à 73. La procédure
Le Parlement européen sera habilité à proposer des
d’avis conforme est maintenue, devenant la procédure
modifications aux traités, comme c’est déjà le cas du Conseil,
d’«approbation», et la procédure de consultation demeure
du gouvernement d’un État membre ou de la Commission.
inchangée.
Une telle modification requiert normalement la convocation
d’une convention. Il sera toutefois possible de réviser les traités La nouvelle procédure budgétaire crée la parité totale entre le
sans convoquer une CIG, au moyen de procédures de révision Parlement et le Conseil concernant l’approbation du budget
simplifiées, relatives aux politiques et actions internes de annuel. Le cadre financier pluriannuel doit bénéficier de
l’Union (article 48, paragraphe 6, et article 48, paragraphe 7, du l’accord du Parlement (approbation).
traité UE). L’accord du Parlement européen est nécessaire afin Le PE élit désormais le président de la Commission à une
de décider de ne pas convoquer de convention lorsque majorité de ses membres sur proposition du Conseil européen,
l’ampleur des modifications ne le justifie pas. qui est tenu de désigner un candidat à la majorité qualifiée en
B. Démocratie renforcée et meilleure protection tenant compte du résultat des élections européennes. Le PE
des droits fondamentaux continue d’approuver la Commission en tant que collège.
1. Démocratie participative Le nombre maximal de députés européens a été fixé à 751. Le
Le traité de Lisbonne exprime les trois principes fondamentaux nombre maximal de sièges par État membre sera ramené à 96,
que sont l’égalité démocratique, la démocratie représentative le nombre minimal sera porté à 6.
et la démocratie participative. La démocratie participative 2. Le Conseil européen
prend la forme nouvelle d’une initiative citoyenne: 1 million de Le traité de Lisbonne reconnaît formellement le Conseil
citoyens européens issus d’un nombre «significatif» d’États européen comme une institution de l’UE, chargée de donner à
membres (à déterminer par un règlement) peuvent demander l’Union «les impulsions nécessaires à son développement» et
à la Commission de prendre une initiative législative. de définir ses «orientations et priorités politiques générales».
2. La charte des droits fondamentaux Le Conseil européen n’a aucune fonction législative.
La charte des droits fondamentaux ne sera pas incorporée Une présidence de longue durée remplacera le système actuel
directement dans le traité de Lisbonne mais elle acquiert un de la rotation semestrielle. Le président est élu à la majorité
caractère juridiquement contraignant grâce à l’article 6, qualifiée des membres du Conseil européen pour un mandat
paragraphe 1, du traité UE, qui octroie à la charte la même renouvelable de trente mois. Cela contribuera à renforcer la
valeur juridique que les traités. Comme le dit clairement la continuité et la cohérence de son travail. Le président assurera
charte, celle-ci ne s’étend pas aux compétences de l’Union également la représentation extérieure de l’Union, sans
telles que définies par les traités. Un protocole introduit des préjudice des attributions du haut représentant de l’Union
mesures spécifiques pour le Royaume-Uni et la Pologne pour la politique étrangère et de sécurité commune (voir
concernant des exceptions à la justiciabilité de la charte infra).
devant les tribunaux nationaux.
3. Le haut représentant (HR) pour la politique étrangère
3. La convention européenne de sauvegarde des droits et de sécurité commune
de l’homme (CEDH) Le HR de l’Union pour la politique étrangère et de sécurité
L’UE adhérera à la convention européenne dès l’entrée en commune (PESC) sera nommé à la majorité qualifiée par le
vigueur du 14e protocole à la CEDH, qui autorise non Conseil européen avec l’accord du président de la Commission
seulement les États mais également les organisations européenne. Le HR sera responsable de la politique étrangère
internationales à devenir signataires de la CEDH. L’acte et de sécurité commune de l’UE et il aura le droit de formuler
d’adhésion doit cependant être ratifié par tous les États des propositions. Outre la présidence du Conseil des affaires
membres de l’UE. étrangères, il sera également le vice-président de la

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Commission (double casquette). Le HR mettra en place un 6. La Cour de justice européenne
service européen pour l’action extérieure, comprenant du La juridiction de la Cour de justice européenne est élargie à
personnel du secrétariat général du Conseil, de la Commission toutes les activités de l’Union à l’exception de la PESC. Le
et des services diplomatiques nationaux, afin de disposer des nombre d’avocats généraux est porté de huit à onze. Des
ressources nécessaires pour mener une politique étrangère tribunaux spécialisés peuvent être institués moyennant
efficace. l’approbation du Parlement. L’accès à la Cour est simplifié pour
4. Le Conseil de ministres les citoyens.
La structure fondamentale des réformes relatives aux Un parquet européen est institué afin de rechercher, de
procédures de vote prévues dans le traité constitutionnel et poursuivre et de faire juger les infractions portant atteinte aux
qui avaient été contestées restera en place, notamment le intérêts financiers de l’Union.
principe de la double majorité (citoyens et États membres). Les
règles de vote actuelles demeureront cependant en vigueur D. Une élaboration des politiques plus efficace
jusqu’en 2014; entre le 1er novembre 2014 et le 31 mars 2017, et plus démocratique
les nouvelles règles seront d’application mais tout État 1. Flexibilité accrue et coopération renforcée
membre sera libre de demander l’application des Plusieurs «clauses passerelles» permettent un changement du
pondérations actuelles. mode de décision, du vote à l’unanimité au vote à la majorité
La majorité qualifiée est atteinte lorsque 55 % des États qualifiée, et de la procédure de consultation à la codécision
membres, représentant au moins 65 % de la population, (article 31, paragraphe 3, du traité UE, article 81,
soutiennent une proposition. Lorsque le Conseil ne statue pas paragraphes 312 et 333, du traité sur le fonctionnement de
sur proposition de la Commission ou du haut représentant, la l’Union européenne, ainsi que certaines procédures du type
majorité nécessaire d’États membres passe à 72 % (article 238, passerelle relatives à la coopération judiciaire en matière
paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union pénale). Le recours à une telle passerelle est soumis à une
européenne). Pour former une minorité de blocage, quatre décision unanime du Conseil européen et à l’approbation du
pays au moins doivent s’opposer à une proposition. Un PE. Les matières comportant des implications militaires sont
nouveau régime inspiré du «compromis de Ioannina» exclues. Par ailleurs, tout changement de ce type peut être
permettra à 75 % (55 % à partir du 1er avril 2017) des États empêché si un seul parlement national s’y oppose dans les
membres de demander, dans un «délai raisonnable», six mois à compter de la date de la notification.
la reprise en considération d’une proposition par le Conseil Dans les domaines où l’Union ne dispose pas de la
(déclaration 7 jointe au traité). compétence exclusive, au moins neuf États membres peuvent
instaurer une coopération renforcée. L’autorisation doit être
À l’avenir, le Conseil siégera en public lorsqu’il délibère et vote
accordée par le Conseil après l’approbation du Parlement
sur un projet d’acte législatif. À cette fin, chaque réunion du
européen. Concernant la PESC, le Conseil doit approuver toute
Conseil sera divisée en deux parties qui traiteront
coopération renforcée à l’unanimité. Les actes adoptés dans le
respectivement des actes législatifs et des activités non
cadre d’une coopération renforcée ne lient que les États
législatives.
membres participants.
La présidence du Conseil poursuivra la rotation semestrielle
2. Le rôle des parlements nationaux
mais des présidences par groupe de trois États membres et
longues de dix-huit mois permettront d’assurer une meilleure Le traité de Lisbonne renforce considérablement le principe de
continuité du travail. Exception à cette règle, le Conseil des subsidiarité en impliquant les parlements nationaux dans le
affaires étrangères sera présidé en permanence par le HR pour processus décisionnel. Le protocole sur le rôle des parlements
la politique extérieure et de sécurité commune. nationaux dans l’Union européenne permet de faire en sorte
que ceux-ci soient régulièrement informés de toute nouvelle
5. La Commission proposition législative.
Afin de faire en sorte que le processus de prise de décision se
Le protocole sur l’application des principes de subsidiarité et
déroule harmonieusement dans une UE élargie, en 2014, le
de proportionnalité accorde aux parlements nationaux un
nombre de commissaires sera réduit aux deux tiers du nombre
délai de huit semaines pour examiner une proposition
total d’États membres. Le recours au principe de l’équilibre
législative, et, s’ils le souhaitent, ils peuvent donner un avis
géographique permettra de traiter tous les États membres sur
motivé expliquant pourquoi ils considèrent que le texte n’est
un pied d’égalité.
pas conforme au principe de subsidiarité. Si un tiers d’entre
Dans la mesure où le président de la Commission sera choisi et eux (ou un quart dans le cas où la mesure proposée concerne
élu en tenant compte des résultats des élections européennes, la liberté, la justice et la sécurité) considère la proposition
sa légitimité s’en trouvera accrue. Le président est responsable incompatible avec le principe de subsidiarité, celle-ci devra
de l’organisation interne du collège (désignation des faire l’objet d’un réexamen par la Commission (carte jaune). Si
commissaires, répartition des portefeuilles, demande de elle décide de la maintenir, la Commission doit formuler un
démission dans des circonstances particulières). avis motivé au pouvoir législatif de l’Union (Conseil et

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Le système de Évolution historique de la
1 fonctionnement de 1 construction européenne
l’Union européenne

Parlement) expliquant pourquoi elle considère la mesure membre victime d’une catastrophe naturelle ou d’un attentat
compatible avec le principe de subsidiarité. terroriste.
Si une majorité simple des parlements des États membres est Une «coopération structurée permanente» est ouverte à tous
opposée à la proposition, celle-ci doit à nouveau être les États membres qui souscrivent des engagements en
examinée (carte orange). Si la Commission décide de matière de capacités militaires et fournissent des unités de
maintenir la proposition, elle doit soumettre son avis au combat disponibles pour une action immédiate. Afin d’établir
législateur, ainsi que les avis des parlements nationaux. En une telle coopération, il est nécessaire de disposer d’un vote à
vertu d’une majorité de 55 % des membres du Conseil ou la majorité qualifiée au Conseil, après consultation du HR.
d’une majorité des suffrages exprimés au Parlement européen,
le législateur peut ensuite décider qu’il n’y a pas lieu de
poursuivre l’examen de la proposition législative. Rôle du Parlement européen
3. Nouveaux pouvoirs Voir les fiches 1.1.4 et 1.1.5 pour les contributions du Parlement
à la Convention européenne et son implication dans les CIG
Un certain nombre de politiques nouvelles ou élargies ont été
précédentes.
introduites dans la politique environnementale, qui inclut
désormais la lutte contre le changement climatique, et dans la Concernant la CIG 2007, qui a conduit à la signature du traité
politique énergétique, qui formule de nouvelles références à la de Lisbonne, le Parlement a pour la première fois envoyé trois
solidarité ainsi qu’à la sécurité et à l’interconnectivité des représentants (qui n’étaient plus appelés des «observateurs») à
approvisionnements. Par ailleurs, les droits de propriété la conférence qui se déroulait sous la présidence portugaise.
intellectuelle, le sport, l’espace, le tourisme, la protection civile Selon le président du Parlement, lors de son discours
et la coopération administrative pourront désormais faire d’ouverture en février 2007, veiller à ce que «la substance du
l’objet d’une éventuelle décision de l’UE. traité constitutionnel, y compris le chapitre consacré aux
4. Politique européenne de sécurité et de défense valeurs, devienne une réalité juridique et politique d’ici aux
prochaines élections européennes» constituait l’une des
Dans la politique européenne de sécurité et de défense (PESD),
priorités les plus importantes du Parlement durant la seconde
le traité de Lisbonne introduit une clause de défense mutuelle
moitié de sa sixième législature.
qui dispose que tous les États membres sont tenus de fournir
une aide à un État membre attaqué. Une clause de solidarité
dispose que l’Union et chacun de ses États membres doivent g Wilhelm LEHMANN
offrir, par tous les moyens possibles, leur assistance à un État Juillet 2008

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1.2. Caractéristiques essentielles
de l’ordre juridique communautaire

1.2.1. Sources et portée du droit de l’Union européenne


Il existe plusieurs sources de droit dans l’Union européenne, qui contribuent à la création d’un ordre juridique
communautaire. Ces sources étant de natures différentes, il a fallu établir entre elles une hiérarchie. Au sommet de la
hiérarchie se trouvent le droit communautaire primaire et le droit communautaire non écrit, suivis par les traités
internationaux conclus par la Communauté et le droit communautaire secondaire.

Bases juridiques fonctionnement des institutions, dont la dénomination, la


— Traité sur l’Union européenne structure et les effets juridiques découlent des diverses
dispositions des traités ou des règles arrêtées en application
— Traité instituant la Communauté européenne de ceux-ci. De plus, la nature juridique d’un acte accompli par
— Actes de droit communautaire dérivé ou secondaire une institution de l’Union ne tient pas à la dénomination
(article 49 du traité CE) officielle de l’acte, mais dépend de son objet et de son
contenu matériel. On mentionnera également l’importance,
— Droit communautaire non écrit
en amont de l’adoption d’actes, des livres blancs, des livres
— Accords internationaux verts et des programmes d’action, documents au travers
desquels les institutions de l’Union, et plus précisément la
Objectifs Commission, conviennent le plus souvent d’objectifs à long
terme (par exemple, le livre blanc sur le marché intérieur).
Instaurer un ordre juridique de l’Union permettant la
réalisation des objectifs indiqués dans les traités. 2. Les différents instruments juridiques relevant du droit
communautaire secondaire
Réalisations a. Le règlement

A. Droit communautaire primaire De portée générale, obligatoire dans tous ses éléments et
directement applicable dans tout État membre, le règlement
1.1.1-1.1.3
est la «loi de la Communauté» et doit être intégralement
B. Droit communautaire secondaire respecté par ceux auxquels il s’applique (personnes privées,
1. Généralités États membres, institutions de l’Union). Il s’applique
directement dans tous les États membres sans devoir faire
Aux termes de l’article 249 du traité CE, les modes d’action de
l’objet d’un acte de transposition sur le plan national. Dès son
la Communauté européenne sont le règlement, la directive, la
entrée en vigueur (à la date qu’il fixe ou, à défaut, le vingtième
décision, la recommandation et l’avis, qui sont des créations
jour suivant sa publication au Journal officiel de l’Union
juridiques originales du droit communautaire, distinctes des
européenne), il s’impose dans les ordres juridiques nationaux.
instruments juridiques nationaux et internationaux. Les
institutions de l’Union ne peuvent arrêter de tels actes Le règlement vise à assurer l’application uniforme du droit
juridiques que si une disposition des traités leur en confère la communautaire dans tous les États membres. Il a aussi pour
compétence (principe des compétences d’attribution). Les conséquence de rendre inapplicables les normes nationales
différents actes juridiques (excepté les recommandations et les incompatibles avec les clauses matérielles qu’il contient. Les
avis, dépourvus de caractère obligatoire) doivent se fonder sur mesures d’exécution que prennent les États membres ne
des dispositions concrètes des traités (y compris les doivent ni modifier ni compléter la portée et l’effet utile d’un
compétences dites implicites). En l’absence d’une compétence règlement (principe de la coopération loyale: article 10 du
particulière reconnue par les traités, il est possible de recourir, traité CE).
sous certaines conditions, au principe de la compétence b. La directive
subsidiaire énoncé à l’article 308 du traité CE. L’énumération
d’actes figurant à l’article 249 du traité CE n’est pas limitative; il i. Nature et portée
existe aussi une série de modes d’action, tels les résolutions, les Elle lie les États membres destinataires quant au résultat à
constatations ainsi que les actes relatifs à l’organisation et au atteindre, mais leur laisse le choix de la forme et des moyens.

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Le système de Caractéristiques essentielles
1 fonctionnement de 2 de l’ordre juridique communautaire
l’Union européenne

Une directive peut avoir pour destinataires un État membre, n’accorde aucun droit au particulier et qu’ainsi seules les
plusieurs États membres ou l’ensemble de ceux-ci. Afin que les première et deuxième conditions sont réunies, les autorités de
principes édictés dans la directive produisent des effets au l’État membre ont l’obligation juridique de tenir compte de la
niveau du citoyen, le législateur national doit adopter un acte directive non transposée. La jurisprudence susmentionnée
de transposition (aussi appelé «mesure nationale s’appuie principalement sur les arguments de l’effet utile, de la
d’exécution») en droit interne qui adapte la législation répression des comportements contraires au traité et de la
nationale au regard des objectifs définis dans la directive. protection juridictionnelle. En revanche, un particulier ne peut
Fondamentalement, le citoyen ne se voit conférer des droits et directement invoquer contre un autre particulier (effet dit
imposer des obligations qu’une fois adopté l’acte portant «horizontal») l’effet direct d’une directive non transposée (voir
transposition de la directive dans le droit national. Tenus au la jurisprudence constante, affaire Faccini Dori, Recueil 1994,
seul accomplissement des buts de la directive, les États p. I-3325 et suiv., point 25).
membres disposent, pour la transposition, d’une marge de
iii. Responsabilité pour défaut de transposition
manœuvre leur permettant de tenir compte des spécificités
nationales. La transposition doit s’effectuer dans le délai fixé Selon la jurisprudence de la Cour (affaire Francovich, Recueil
par la directive. En transposant les directives, les États 1991, p. I-5357 et suiv.), un particulier est fondé à demander
membres sont tenus de choisir les formes de droit interne les réparation d’un préjudice subi à un État membre qui n’a pas
plus propres à assurer l’effet utile du droit communautaire transposé ou a insuffisamment incorporé une directive:
(article 10 du traité CE). Les directives doivent être — si la directive a pour but de conférer des droits aux
transformées en des règles contraignantes de droit interne qui particuliers;
satisfassent aux impératifs de la sécurité et de la clarté
juridiques et placent l’individu en position de faire valoir les — si le contenu des droits peut être identifié sur la base des
droits qu’il tire de la directive. Il n’est pas permis d’apporter à dispositions de la directive;
des réglementations adoptées en vertu de directives — s’il existe un lien de causalité entre le manquement à
communautaires des modifications contraires aux objectifs de l’obligation de transposer et le préjudice subi par les
ces directives (effet de «cliquet»). personnes lésées.
ii. Possibilités d’applicabilité directe En pareil cas, la responsabilité de l’État membre peut être
Les directives ne sont, en principe, pas directement engagée sans qu’une faute doive être démontrée dans son
applicables, mais la Cour de justice des Communautés chef. Lorsqu’un État membre dispose d’une marge de
européennes a néanmoins jugé que telle ou telle disposition manœuvre pour la transposition, il faut, en plus des trois
pouvait, exceptionnellement, produire des effets directs dans critères mentionnés, que l’infraction commise pour
un État membre sans que ce dernier ait arrêté préalablement transposition irrégulière ou lacunaire soit suffisamment
un acte de transposition (jurisprudence constante depuis qualifiée, c’est-à-dire qu’elle doit être importante et manifeste
1970: Recueil, p. 1213 et suiv.), lorsque les conditions suivantes (Cour de justice, arrêt du 5 mars 1996 dans les affaires jointes
sont réunies: C-46/93 et C-48/93, Brasserie du Pêcheur/Factortame, Recueil
1996, p. I-1029).
— la transposition dans le droit interne n’a pas eu lieu ou a été
effectuée incorrectement à l’expiration du délai de c. La décision
transposition; Elle est obligatoire dans tous ses éléments. Lorsqu’elle désigne
— les dispositions de la directive sont, du point de vue de leur des destinataires, elle n’est obligatoire que pour ceux-ci. Les
contenu, inconditionnelles et suffisamment claires et destinataires peuvent être des États membres, des personnes
précises; physiques ou des personnes morales. Elle sert à régler des
situations concrètes propres à des destinataires particuliers.
— les dispositions de la directive confèrent des droits aux
Comme les directives, les décisions peuvent comporter
particuliers.
l’obligation pour un État membre de faire bénéficier le citoyen
Lorsque ces conditions sont réunies, le particulier peut se d’une position juridique plus favorable. Dans ce cas, le
prévaloir de la disposition en cause devant tous les particulier ne peut — telle est aussi la règle avec la directive —
dépositaires de l’autorité publique. Sont considérées comme faire valoir ses droits que si l’État membre en cause a pris un
dépositaires de l’autorité publique les organisations et acte de transposition. Les décisions peuvent être directement
institutions qui relèvent de l’État ou sont dotées par lui de applicables dans les mêmes conditions que les dispositions
droits qui vont au-delà de ceux qui découlent des dispositions d’une directive.
régissant les relations entre particuliers (arrêt de la Cour du
d. La recommandation et l’avis
22 juin 1989 dans l’affaire 103/88, Fratelli Costanzo). La
jurisprudence s’appuie principalement sur les principes de Ils ne lient pas, c’est-à-dire qu’ils ne créent aucun droit ni
l’effet utile et de l’application uniforme du droit aucune obligation à leurs destinataires, mais ils peuvent fournir
communautaire. Mais, en vertu de la jurisprudence constante des indications sur l’interprétation et le contenu du droit
de la Cour, même si la disposition en cause de la directive communautaire.

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3. Dispositions régissant les compétences, coopération judiciaire et policière en matière pénale, qui forme
les procédures, la mise en œuvre et l’exécution actuellement le troisième pilier.
des actes juridiques
Comme seule exception demeurent les politiques étrangères,
a. Compétence normative, droit d’initiative et procédures de sécurité et de défense communes, qui continueront à être
législatives: 1.3.6, 1.3.8 et 1.4.1 soumises à des procédures intergouvernementales. En effet,
b. Exécution de la législation les instruments qui peuvent être adoptés pour la réalisation de
ces politiques conserveront leur nature politique, tout en
En vertu de son droit primaire, la Communauté européenne présentant une nouvelle nomenclature: les stratégies
ne jouit en propre que de compétences d’exécution limitées, communes, les actions communes et les positions communes
la mise en œuvre du droit communautaire étant généralement seront ainsi remplacées par les «orientations générales» et par
dévolue aux États membres (obligation de coopération loyale les «décisions qui définissent» les actions et les positions à
énoncée à l’article 10 du traité CE). D’ailleurs, le traité de prendre par l’Union ainsi que les modalités de leur mise en
Lisbonne précise (article 291, paragraphe 1, de la version œuvre.
consolidée du traité FUE), que les États membres sont tenus à
prendre toute mesure de droit interne nécessaire pour la mise D. Droit communautaire non écrit
en œuvre des actes juridiquement contraignants de l’Union. Il s’agit des principes généraux du droit communautaire,
c. Application effective des divers modes d’action notamment:

Dans nombre de cas, les traités imposent la forme d’action — les droits fondamentaux tels que garantis par la convention
requise (cas de la directive, à l’article 94 du traité CE). européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des
Cependant, de nombreuses dispositions ne s’accompagnent libertés fondamentales et les traditions constitutionnelles
pas de la prescription d’un type d’acte précis [l’article 71, des États membres, qui sont reconnus sur le plan de
paragraphe 1, point d), du traité CE, par exemple, évoque l’Union par l’article 6, paragraphe 2, du traité UE, en tant
«toutes autres dispositions utiles»], ou bien proposent au que principes généraux du droit communautaire: droit de
moins une alternative (l’article 40, alinéa introductif, et la défense, droit au respect de la vie privée, etc.;
l’article 83 du traité CE demandent d’agir «par voie de — le principe de la communauté de droit;
directives ou de règlements»). Les institutions communautaires
doivent cependant exercer une telle liberté en respectant les — les principes de proportionnalité, de confiance légitime,
principes de proportionnalité et de subsidiarité (1.2.2). etc.

C. Droit non communautaire de l’Union (hors traité CE) E. Accords internationaux conclus par la Communauté
européenne
Dans le cadre des deuxième et troisième piliers, l’Union ne
s’exprime pas par les instruments juridiques classiques du droit Disposant du droit partiel de contracter des engagements sur
communautaire, mais par des actes juridiques originaux: le plan international, la Communauté peut conclure, dans le
cadre de ses compétences, des accords externes avec des
— dans le deuxième pilier du traité sur l’Union européenne États tiers ou des organisations internationales. Aux termes de
[politique étrangère et de sécurité commune (PESC)], ces l’article 300, paragraphe 7, du traité CE, les accords ainsi
instruments sont de nature essentiellement politique: les conclus par la Communauté lient celle-ci et les États membres.
stratégies communes, les actions communes et les Ils font partie intégrante de l’ordre juridique communautaire.
positions communes;
F. Sources complémentaires du droit communautaire
— dans le troisième pilier [coopération judiciaire et policière
Elles sont constituées par les règles contenues dans les
en matière pénale (JAI)], l’Union agit par le biais de
accords intergouvernementaux conclus entre les États
positions communes, actes de nature plus politique que
membres qui servent les objectifs de la Communauté. La
juridique qui «[définissent] l’approche de l’Union sur une
conclusion de ces accords internationaux est prévue, en partie,
question déterminée», de décisions-cadres, instruments
à l’article 293 du traité CE et, depuis l’introduction du troisième
semblables à la directive communautaire et utilisés aux fins
pilier par le traité de Maastricht, dans le domaine de la
du rapprochement des législations, de décisions «à toute
coopération policière et judiciaire en matière pénale [article 34,
fin» autre que le rapprochement des législations, qui sont
paragraphe 2, point d), du traité UE].
dépourvus d’effet direct ainsi que de l’instrument classique
des conventions internationales entre les États membres. G. Hiérarchie des normes au sein du droit communautaire
Le traité de Lisbonne supprime la structure en piliers de Le droit communautaire primaire occupe le sommet de la
l’Union qui perdure depuis le traité de Maastricht. Par hiérarchie des normes. Les règles constituant le droit primaire
conséquent, quand le traité de Lisbonne entrera en vigueur, sont les unes et les autres fondamentalement de rang égal; le
l’utilisation des actes juridiques mentionnés à l’article 249 du droit communautaire non écrit, à savoir les principes généraux
traité CE (article 288 de la version consolidée du traité FUE) du droit, se situe au même niveau. En revanche, les accords
s’étendra à l’ensemble des politiques de l’Union, y inclus la internationaux conclus par la Communauté viennent après le

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Le système de Caractéristiques essentielles
1 fonctionnement de 2 de l’ordre juridique communautaire
l’Union européenne

droit primaire et le droit non écrit. À un rang inférieur, on Rôle du Parlement européen
trouve le droit communautaire secondaire, c’est-à-dire que les Dans le cadre des procédures visées aux articles 250 et
actes juridiques en question ne sont valides que s’ils suivants du traité CE, le Parlement européen exerce certains
respectent les normes de rang supérieur. droits de participation à la production normative (1.4.1).
Toutefois, malgré l’extension de ses compétences, sanctionnée
Le traité de Lisbonne instaure une hiérarchie des normes du par le traité sur l’Union européenne (1.1.2), son influence
droit secondaire en établissant une distinction précise entre les demeure limitée dans les politiques qui ne relèvent pas de la
actes législatifs, les actes délégués et les actes d’exécution. procédure de codécision. Le traité de Lisbonne étend la
Sont définis comme étant des actes législatifs les actes codécision entre le Parlement et le Conseil de manière
juridiques adoptés par une procédure législative, ordinaire ou considérable, en la nommant désormais «procédure législative
spéciale. En revanche, les actes délégués sont des actes non ordinaire». Quand le traité de Lisbonne entrera en vigueur, le
législatifs de portée générale qui complètent ou modifient Parlement sera colégislateur dans 95 % de la législation de
certains éléments non essentiels de l’acte législatif. Le pouvoir l’Union.
d’adopter ces actes peut être délégué à la Commission
européenne par l’acte législatif, qui délimite les objectifs, le Par ailleurs, soucieux de voir s’améliorer l’application du droit
contenu, la portée et la durée du pouvoir délégué. La de l’Union dans les États membres et progresser chez les
compétence à adopter des actes d’exécution est normalement citoyens l’acceptation de ce droit, le Parlement européen agit
conférée à la Commission par l’acte juridiquement pour la simplification de la procédure législative, l’amélioration
contraignant, lorsque des conditions uniformes d’exécution de de la qualité rédactionnelle des textes normatifs et
cet acte sont nécessaires. Les actes législatifs, délégués et l’application de sanctions plus efficaces à l’encontre des États
d’exécution peuvent être adoptés sous forme de règlement, membres qui ne respectent pas le droit de l’Union.
de directive ou de décision, mais l’adjectif «délégué» ou
«déléguée» et le mot «d’exécution» sont insérés dans l’intitulé g Roberta PANIZZA
de l’acte correspondant. Juillet 2008

1.2.2. Le principe de subsidiarité


Dans le cadre des compétences partagées entre la Communauté et les États membres, le principe de subsidiarité, inscrit
dans le traité instituant la Communauté européenne, définit les conditions dans lesquelles la Communauté dispose d’une
priorité d’action par rapport aux États membres.

Base juridique Réalisations


L’article 5, deuxième alinéa, du traité instituant la Communauté
A. Origine et évolution historique
européenne, auquel renvoient le douzième considérant du
préambule et l’article 2, deuxième alinéa, du traité sur l’Union Le principe de subsidiarité a été formellement consacré dans
européenne. le droit de l’Union européenne par le traité de Maastricht, qui
l’a inscrit à l’article 5, deuxième alinéa, du traité instituant la
Objectifs Communauté européenne. Toutefois, on peut déjà déceler des
traces de ce principe dans l’article 5 du traité CECA (1951), aux
En dehors des domaines qui relèvent de la compétence termes duquel la Communauté «n’exerce une action directe
exclusive de la Communauté européenne, le principe de sur la production et sur le marché que lorsque les
subsidiarité, d’une part, entend protéger la capacité de circonstances l’exigent». L’Acte unique européen de 1987 a
décision et d’action des États membres et, d’autre part, introduit la règle de la subsidiarité dans le domaine de
légitime l’intervention de la Communauté si les objectifs d’une l’environnement (article 130 R du traité instituant la CEE), sans
action ne peuvent pas être réalisés de manière satisfaisante par toutefois le mentionner nommément. Le Tribunal de première
les États membres «en raison des dimensions ou des effets de instance des Communautés européennes a retenu, dans son
l’action envisagée». Son introduction dans les traités arrêt du 21 février 1995 (Recueil, p. II-289, point 331), que le
européens vise ainsi à rapprocher l’exercice des compétences principe de subsidiarité ne constituait pas, avant l’entrée en
au niveau le plus proche possible des citoyens. vigueur du traité sur l’Union européenne, un principe général

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du droit, au regard duquel la légalité des actes C. Champ d’application
communautaires aurait dû être contrôlée. 1. Principe d’application
Sans modifier les termes de la règle de la subsidiarité inscrite De manière générale, l’application du principe de subsidiarité
à l’article 5, deuxième alinéa, du traité CE, le traité peut s’envisager sous deux angles différents. Dans les
d’Amsterdam a annexé au traité CE le «protocole sur domaines pour lesquels le traité confère à la Communauté
l’application des principes de subsidiarité et de une compétence partagée avec les États membres, le principe
proportionnalité». Les règles d’application non inscrites dans de subsidiarité sert de critère pour appréhender cette
les traités, mais convenues dans le cadre de l’approche compétence (limites à l’exercice des compétences). Pour les
globale relative à l’application du principe de subsidiarité domaines dans lesquels le traité ne reconnaît aucune
(1992), arrêtée à Édimbourg, en sont devenues juridiquement compétence à la Communauté européenne, le principe de
contraignantes et contrôlables. subsidiarité ne crée pas non plus de compétence
complémentaire (pas d’attribution de compétences).
Le traité de Lisbonne abroge l’article 5 du traité CE et inscrit le
2. Problème de délimitation
principe de subsidiarité à l’article 5 du traité UE, qui, tout en
préservant les termes de l’article abrogé, ajoute une référence Le principe de subsidiarité s’applique aux seuls domaines
explicite à la dimension régionale et locale du principe de partagés entre la Communauté et les États membres. Il ne vaut
subsidiarité. En outre, le traité de Lisbonne remplace le dès lors pas lorsque sont en jeu les compétences exclusives de
protocole de 1997 sur l’application des principes de la Communauté ou les compétences nationales exclusives.
subsidiarité et de proportionnalité par un nouveau protocole Toutefois, la ligne de partage est fluctuante, car — par
portant le même titre, dont l’innovation principale concerne le exemple — les domaines ressortissant à la Communauté
nouveau rôle des parlements nationaux dans le contrôle du peuvent être élargis en vertu de l’article 308 du traité CE si une
respect du principe de subsidiarité. action de cette dernière apparaît nécessaire pour la réalisation
des objectifs du traité. La délimitation des compétences
B. Définition exclusives de la Communauté demeure problématique,
notamment parce qu’elle s’opère dans les traités non par la
1. La signification et la finalité générales du principe de désignation de domaines précis, mais par la description de
subsidiarité résident dans l’octroi d’un certain degré fonctions.
d’indépendance à une autorité subordonnée vis-à-vis d’une
autorité de niveau supérieur, notamment d’une autorité locale Aussi la Cour de justice des Communautés européennes
envers le pouvoir central. Il y va donc du partage des a-t-elle pris une série de décisions par lesquelles elle dégage
compétences entre les divers échelons de pouvoir, principe des traités et reconnaît comme étant exclusives certaines
qui constitue le fondement institutionnel des États à structure compétences qui n’y sont pas stipulées expressément, sans
fédérale. dresser pour autant un catalogue exhaustif de ces
compétences.
2. Appliqué au cadre de la Communauté européenne, le Le champ d’application du principe de subsidiarité n’étant pas
principe de subsidiarité sert de critère régulateur de l’exercice clairement délimité, ce dernier continue de donner lieu à des
des compétences partagées entre la Communauté et les États divergences d’interprétation. Cependant, la Communauté
membres. D’une part, il exclut l’intervention de la s’emploie de toute évidence à borner son action aux objectifs
Communauté lorsqu’une matière peut être réglementée de des traités et à assurer l’adoption des nouvelles mesures au
manière efficace par les États membres à leur niveau central, niveau le plus proche possible des citoyens. Au demeurant, ce
régional ou local. D’autre part, il implique que la Communauté lien entre le principe de subsidiarité et la règle de proximité est
exerce ses pouvoirs lorsque les États membres ne sont pas en tout particulièrement mis en évidence dans le préambule
mesure de réaliser les objectifs des traités de manière même du traité sur l’Union européenne.
satisfaisante.
Une fois entré en vigueur, le traité de Lisbonne devrait mettre
3. Aux termes de l’article 5, deuxième alinéa, du traité CE, fin aux divergences d’interprétation sur le champ d’application
l’intervention des institutions de l’Union au nom du principe de la subsidiarité. En effet, le nouveau traité définit les
de subsidiarité suppose que soient réunies trois conditions: domaines relevant des compétences exclusives et des
compétences partagées de l’Union. L’article 4, paragraphe 2, de
a. il ne doit pas s’agir d’un domaine relevant de la
la version consolidée du traité FUE contient la liste suivante des
compétence exclusive de la Communauté;
politiques appartenant aux compétences partagées: marché
b. les objectifs de l’action envisagée ne peuvent pas être intérieur, politique sociale, cohésion économique, sociale et
atteints d’une manière satisfaisante par les États membres; territoriale; agriculture et pêche, à l’exclusion de la conservation
des ressources biologiques de la mer; environnement;
c. l’action peut être mieux réalisée, en raison de ses protection des consommateurs; transports; réseaux
dimensions ou de ses effets, par une intervention de la transeuropéens; énergie; espace de liberté, sécurité et justice;
Communauté. enjeux communs de sécurité en matière de santé publique.

38

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Le système de Caractéristiques essentielles
1 fonctionnement de 2 de l’ordre juridique communautaire
l’Union européenne

3. Les destinataires du principe de subsidiarité l’acte juridique mais qu’il ressort globalement de ces
Le principe de subsidiarité concerne toutes les institutions de considérants qu’il a été pris en compte dans l’examen de l’acte.
l’Union et revêt une importance pratique tout particulièrement Le traité de Lisbonne, dans son protocole sur l’application des
à l’égard du Conseil, du Parlement européen et de la principes de subsidiarité et de proportionnalité, précise que,
Commission. Le traité de Lisbonne renforce le rôle dans le cadre du contrôle de la légalité des actes législatifs, la
respectivement des parlements nationaux et de la Cour de Cour de justice est compétente pour se prononcer sur les
justice des Communautés européennes dans le contrôle du recours pour violation du principe de subsidiarité. Un tel
respect du principe de la subsidiarité. recours pourra être introduit par un État membre
éventuellement au nom de son parlement si son ordre
D. Contrôle des parlements nationaux constitutionnel interne le prévoit.
Le traité de Lisbonne introduit un mécanisme d’alerte précoce,
Le même recours sera ouvert au Comité des régions lorsque sa
selon lequel les parlements nationaux disposent de huit
consultation est prévue.
semaines pour adresser des avis à la Commission sur les
projets d’actes législatifs qu’elle doit obligatoirement leur
soumettre en même temps qu’au Parlement européen et au Rôle du Parlement européen
Conseil. Si un tiers des parlements nationaux conteste la 1. Travaux en cours
conformité d’un projet d’acte législatif à la subsidiarité, dans Le Parlement européen défend depuis de nombreuses années
des avis motivés, la Commission doit réexaminer son projet et le principe de subsidiarité. Il a été à l’origine de ce concept en
motiver son maintien éventuel (procédure du «carton jaune»). proposant, le 14 février 1984, lors de l’adoption du projet de
Ce seuil doit être d’un quart des parlements nationaux lorsqu’il traité sur l’Union européenne, une disposition selon laquelle
s’agit d’un projet d’acte législatif relatif à l’espace de liberté, chaque fois que le traité attribue à l’Union une compétence
sécurité et justice. D’ailleurs, si une majorité simple des concurrente avec les compétences des États membres, l’action
parlements nationaux conteste la conformité d’un projet des États membres s’exerce dès lors que l’Union n’a pas pris
d’acte législatif à la subsidiarité («carton orange») et que la d’acte normatif. De plus, la proposition insiste sur le fait que
Commission maintient sa proposition, la question est renvoyée l’Union ne devrait intervenir que pour mener les tâches qui
au Conseil et au Parlement européen, qui se prononceront en peuvent être entreprises en commun d’une manière plus
première lecture. S’ils estiment que la proposition législative efficace que par les États œuvrant séparément.
n’est pas compatible avec le principe de subsidiarité, ils
peuvent la rejeter à la majorité de 55 % des membres du Le Parlement reprendra ces propositions sur le principe de
Conseil ou de la majorité des voix exprimées au Parlement subsidiarité dans de nombreuses résolutions (par exemple, les
européen. résolutions du 23 novembre 1989, du 14 décembre 1989, du
12 juillet 1990, du 21 novembre 1990 et du 18 mai 1995), dans
Ce droit d’alerte est accordé à toute chambre des parlements lesquelles il rappelle son attachement au principe de
nationaux. subsidiarité dans la perspective de l’Union européenne et
demande que s’ouvre un débat sur son interprétation et son
E. Contrôle juridictionnel application.
Le principe de subsidiarité ancré dans l’article 5, deuxième
2. Accord sur la coopération interinstitutionnelle
alinéa, du traité CE est en principe susceptible d’un contrôle
juridictionnel. Sa mise en pratique accorde toutefois aux Appuyé sur les conclusions relatives à la subsidiarité, la
institutions de l’Union une ample marge d’appréciation, que transparence et la démocratie formulées par le Conseil
doit respecter la Cour de justice. D’une manière générale, on européen d’Édimbourg ainsi que sur la résolution adoptée par
peut dire que l’activité de contrôle menée par la Cour de le Parlement le 18 novembre 1992, le débat lancé par ce
justice a d’autant moins lieu d’être que les États membres ont dernier a débouché sur la signature, le 25 octobre 1993, entre
été réellement associés au choix du contenu et de l’étendue le Parlement, le Conseil et la Commission, d’un accord
de l’action envisagée, que la nécessité de cette action a été interinstitutionnel qui exprime clairement la volonté des trois
examinée soigneusement et avec le souci des intérêts en institutions de progresser résolument sur cette voie. Elles
cause et que les organes et sujets de droit concernés (y s’engagent ainsi à respecter le principe de subsidiarité.
compris aux échelons inférieurs à celui des États membres) ont Cet accord a pour objet de définir, par des procédures
été dûment entendus. régissant l’application du principe de subsidiarité, les modalités
de l’exercice des compétences dévolues par les traités aux
Dans ses arrêts du 12 novembre 1996 (affaire C-84/94, Recueil
institutions communautaires de sorte que puissent être
1996, p. I-5755) et du 13 mai 1997 (affaire C-233/94, Recueil
réalisés les objectifs prévus par ceux-ci. Il contient les
1997, p. I-2405), la Cour a précisé que le respect du principe de
dispositions suivantes:
subsidiarité figure parmi les circonstances soumises à
l’obligation de motivation, conformément à l’article 253 du — lorsqu’elle exercera son droit d’initiative, la Commission
traité CE. Cette exigence est donc déjà satisfaite lorsque le prendra en compte le principe de subsidiarité et justifiera
principe n’est pas cité expressément dans les considérants de son respect; il en ira de même pour le Parlement et le

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Conseil dans le cadre des compétences qui leur sont S’agissant des rapports de la Commission sur l’application du
conférées respectivement aux termes des articles 192 et principe de subsidiarité au cours des années 1994, 1995 et
208 du traité CE; 1996, le Parlement européen a souligné, dans sa résolution du
— lorsqu’elle exposera les motifs de ses propositions, la 13 mai 1997, que le principe de subsidiarité constitue une
norme juridique contraignante, soumise dans son application
Commission justifiera la pertinence de celles-ci au regard
concrète à l’interprétation de la Cour de justice et il a rappelé
du principe de subsidiarité;
que la mise en œuvre du principe ne doit pas faire obstacle à
— tout amendement éventuel au texte de la Commission, l’exercice légitime des compétences exclusives dont dispose
qu’il émane du Conseil ou du Parlement, devra l’Union. Enfin, il ne faut en aucun cas que, sous prétexte de
s’accompagner d’une justification sous l’angle de la subsidiarité, on remette en cause l’acquis communautaire.
subsidiarité s’il a pour effet de modifier le champ Dans sa résolution du 8 avril 2003, le Parlement estime que le
d’intervention de l’Union. règlement des différends sur la mise en œuvre des principes
Les trois institutions vérifieront régulièrement, dans le cadre de de subsidiarité et de proportionnalité devrait se faire de
leurs procédures internes, que l’action envisagée est conforme préférence au niveau politique, sur la base de l’accord
aux dispositions relatives à la subsidiarité, tant sous l’angle du interinstitutionnel du 25 octobre 1993, mais prend acte des
choix des instruments juridiques que du point de vue du propositions de la Convention sur l’avenir de l’Europe, qui
contenu de la proposition. Ainsi, le règlement du Parlement envisageaient de confier aux parlements nationaux un rôle
stipule dans son article 34 que, pendant l’examen d’une dans le suivi des questions de subsidiarité grâce à un système
proposition législative, le Parlement accorde une attention d’alerte précoce. Il souligne qu’il revient aux institutions de
particulière au respect des droits fondamentaux ainsi qu’aux l’Union et aux États membres, tant au niveau central qu’aux
principes de subsidiarité et de proportionnalité. niveaux régional et local, d’assurer un suivi permanent de
l’application des principes de subsidiarité et de
Outre cet accord, la Commission s’est engagée, notamment proportionnalité.
lors du Conseil européen d’Édimbourg, à justifier toutes ses
propositions d’actes juridiques eu égard à l’application du Tel système d’alerte précoce a effectivement été repris dans le
principe de subsidiarité, à retirer ou réexaminer diverses traité de Lisbonne, comme décrit au point D de la présente
propositions ainsi qu’à réviser les dispositions réglementaires fiche.
en vigueur. Par ailleurs, il est prévu que la Commission
rédige un rapport annuel sur le respect du principe de g Roberta PANIZZA
subsidiarité. Juillet 2008

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Le système de Les institutions et organes
1 fonctionnement de 3 de l’Union
l’Union européenne

1.3. Les institutions et organes de l’Union

1.3.1. Le Parlement européen: historique


L’Assemblée de la Communauté européenne du charbon et de l’acier devient commune aux trois Communautés et reçoit
le nom de «Parlement européen». Au fil du temps, cette institution connaît de nombreuses évolutions qui en font
notamment, aujourd’hui, un partenaire placé sur un pied d’égalité avec le Conseil dans la procédure législative. Ce rôle
institutionnel sera renforcé de manière significative avec l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne.

Base juridique Les élargissements successifs


— Les traités initiaux (1.1.1) Avec l’adhésion du Danemark, de l’Irlande et du Royaume-Uni
aux Communautés européennes (premier élargissement), le
— L’acte portant élection des représentants au Parlement
nombre des membres du Parlement européen a été porté, au
européen au suffrage universel direct, annexé à la décision
1er janvier 1973, à 198.
du Conseil du 20 septembre 1976, modifié par la décision
du Conseil du 25 juin et du 23 septembre 2002 Lors du deuxième élargissement (adhésion de la Grèce), le
1er janvier 1981, 24 députés ont été délégués par le Parlement
Trois Communautés, une seule Assemblée grec auprès du Parlement européen. Ils ont été remplacés, en
octobre 1981, par des députés élus au suffrage universel. Les
À la suite de la création de la CEE et de l’Euratom, l’Assemblée deuxièmes élections directes ont eu lieu les 14 et 17 juin 1984.
commune de la CECA a été élargie à l’ensemble des trois
Communautés. Elle comptait alors 142 membres et a tenu sa Le 1er janvier 1986 (troisième élargissement), le nombre de
session constitutive le 19 mars 1958 à Strasbourg. Elle a pris le sièges est passé de 434 à 518, avec l’arrivée de 60 députés
nom d’«Assemblée parlementaire européenne» puis, le espagnols et de 24 députés portugais nommés par leurs
30 mars 1962, celui de «Parlement européen». parlements nationaux. Ils ont été remplacés par la suite par des
députés élus au suffrage direct. Les troisièmes élections
directes ont eu lieu les 15 et 18 juin 1989.
De l’Assemblée désignée au Parlement élu
Après la réunification allemande, la composition du Parlement
Avant l’élection directe, les membres du Parlement étaient
a été adaptée afin de tenir compte du changement
désignés par chaque parlement national en son sein. Ils
démographique. Conformément aux propositions avancées
exerçaient tous, de ce fait, un double mandat.
par le Parlement dans une résolution relative à un système de
À la conférence au sommet de Paris des 9 et 10 décembre répartition du nombre de ses membres, le nombre des
1974, il a été décidé que des élections directes «devraient membres élus est passé en juin 1994 de 518 à 567. Après le
intervenir à partir de 1978», et le Parlement a été invité à quatrième élargissement de l’Union européenne, le nombre
présenter de nouvelles propositions pour remplacer le projet total des membres du Parlement est passé à 626, dans le
de convention qu’il avait adopté en 1960. En janvier 1975, le respect, pour les nouveaux États membres, du système de
Parlement adoptait un nouveau projet. Sur la base de ce répartition équitable proposé dans la résolution précitée.
dernier, et après avoir surmonté un certain nombre de
divergences, les chefs d’État ou de gouvernement La Conférence intergouvernementale de Nice a introduit une
parvenaient à un accord lors de leur réunion des 12 et nouvelle répartition des sièges qui a été appliquée lors des
13 juillet 1976. élections européennes de 2004. Le nombre maximal des
députés (auparavant fixé à 700) est alors passé à 732. Le
La décision et l’acte portant élection des représentants au nombre des sièges attribués aux quinze anciens États
Parlement européen au suffrage universel direct ont été signés membres a été réduit de 91 (de 626 à 535). Les 197 sièges
à Bruxelles le 20 septembre 1976. Après ratification par tous les restants (pour atteindre le nombre de 732) ont été répartis
États membres, le texte est entré en vigueur le 1er juillet 1978. entre les anciens et les nouveaux États membres, sur une base
Les premières élections ont eu lieu les 7 et 10 juin 1979. proportionnelle.

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Avec l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie le 1er janvier (1.5.1) a entraîné une première extension des pouvoirs
2007, le nombre de sièges au Parlement a été provisoirement budgétaires du Parlement par le traité de Luxembourg, signé
porté à 785 afin d’accueillir les députés de ces deux pays. le 22 avril 1970. Un second traité portant sur le même sujet et
Après les élections de 2009, le nombre de sièges sera à renforçant les pouvoirs du Parlement a été signé à Bruxelles le
nouveau réduit et passera à 736. Néanmoins, le traité de 22 juillet 1975 (1.1.2).
Lisbonne prévoyait un nombre maximal de 751 députés. L’Acte unique a conféré au Parlement un rôle accru dans
Depuis le 1er janvier 2007, le Parlement européen a certains domaines législatifs (procédure de coopération) et
donc la composition suivante: soumis à son avis conforme les traités d’adhésion et
d’association.
Belgique 24
Le traité de Maastricht, en introduisant la procédure de
Bulgarie 18 codécision pour certains domaines législatifs, tout en étendant
République tchèque 24 la procédure de coopération à d’autres, marque le début de
Danemark 14 l’évolution du Parlement vers un rôle de véritable colégislateur.
Allemagne 99 En lui accordant le pouvoir d’approuver la composition finale
Estonie 6 de la Commission, il lui permet de franchir un pas important
Grèce 24 vers un contrôle politique de l’exécutif européen.
Espagne 54 Le traité d’Amsterdam, en étendant la procédure de codécision
France 78 à la plupart des domaines législatifs et en réformant cette
Irlande 13 procédure, confirme le Parlement en tant que colégislateur, sur
un pied d’égalité avec le Conseil. En soumettant à son
Italie 78
approbation préalable la nomination du président de la
Chypre 6 Commission, il accroît encore son contrôle sur l’exécutif.
Lettonie 9
Le traité de Nice a étendu la portée de la procédure de
Lituanie 13 codécision à sept nouvelles dispositions du traité CE: mesures
Luxembourg 6 de soutien aux actions pour la lutte contre la discrimination
Hongrie 24 menées par les États membres (article 13), certaines mesures
Malte 5 concernant l’octroi de visas [article 62, paragraphe 2, point b),
Pays-Bas 27 ii) et iv)], mesures concernant l’asile et certaines questions
Autriche 18 relatives aux réfugiés (article 63), mesures prises dans le
domaine de la coopération judiciaire en matière civile
Pologne 54
(article 65), mesures de soutien dans le domaine industriel
Portugal 24 (article 157), actions menées dans le domaine de l’économie et
Roumanie 35 de la cohésion sociale (article 159), et règlements relatifs au
Slovénie 7 statut des partis politiques et, en particulier, à leur financement
Slovaquie 14 (article 191). Le traité de Lisbonne représente une nouvelle
Finlande 14 extension importante, à la fois de l’application de la majorité
Suède 19 qualifiée au Conseil (en utilisant un nouveau principe) et de
l’application de la procédure de codécision à quelque
Royaume-Uni 78
45 nouveaux domaines législatifs. La codécision devient par
Total 785 là la procédure de prise de décision la plus courante et couvre
(majorité absolue: 393) des sujets revêtant une importance particulière, tels que la
politique agricole commune et les politiques relatives à la
Accroissement progressif des pouvoirs justice et à la sécurité.
du Parlement européen
Le remplacement des contributions financières des États g Wilhelm LEHMANN
membres par des ressources propres à la Communauté Août 2008

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Le système de Les institutions et organes
1 fonctionnement de 3 de l’Union
l’Union européenne

1.3.2. Le Parlement européen: attributions


C’est à travers l’exercice de ses différentes fonctions que le Parlement joue pleinement son rôle institutionnel dans
l’élaboration des politiques européennes. Le respect des principes démocratiques au niveau européen est assuré à travers
sa participation au processus législatif, ses pouvoirs budgétaires et de contrôle, et son droit d’agir auprès de la Cour de
justice.

Base juridique s’applique à 46 bases juridiques du traité CE permettant


Articles 189 à 201 du traité CE l’adoption d’actes législatifs (1.3.1). On peut donc la considérer
comme la procédure législative normale. Cette procédure met,
en principe, le Parlement sur un pied d’égalité avec le Conseil:
Objectifs en cas d’accord entre les deux institutions, l’acte est adopté dès
Le Parlement, en tant qu’institution représentative des citoyens la première lecture. En cas de désaccord, seule une conciliation
européens, constitue la base démocratique de la réussie permet l’adoption de l’acte envisagé.
Communauté. Afin d’assurer à la Communauté sa pleine
légitimité démocratique, il doit être pleinement associé au B. La consultation
processus législatif communautaire et exercer au nom des La procédure de consultation continue de s’appliquer à
citoyens le contrôle politique sur les autres institutions de la l’agriculture, à la fiscalité, à la concurrence, au rapprochement
Communauté. des législations qui ne sont pas liées au marché intérieur, aux
aspects de la politique sociale et de l’environnement (soumis à
l’unanimité), à certaines matières ayant trait à l’espace de
Pouvoirs de type constitutionnel ou de ratification
liberté, de sécurité et de justice, ainsi qu’à l’adoption de
Depuis l’Acte unique européen, la conclusion de tout traité principes et de règles générales en matière de «comitologie».
d’adhésion d’un nouvel État membre et de tout traité Cette procédure s’applique également à un nouvel instrument
d’association est soumise à l’avis conforme du Parlement. Quant appelé «décision-cadre», qui a été créé par le traité
aux autres traités internationaux, cette procédure s’applique d’Amsterdam dans le cadre du troisième pilier [article 34,
depuis l’Acte unique aux accords ayant des implications paragraphe 2, point b), du traité UE] en vue du rapprochement
budgétaires notables pour la Communauté (en remplacement des dispositions législatives.
de la procédure de concertation instituée en 1975) et, depuis le
traité de Maastricht, elle s’applique également aux accords qui C. La coopération
créent un cadre institutionnel spécifique ou qui impliquent la La procédure dite «de coopération» (article 252 du traité CE)
modification d’un acte adopté selon la procédure de codécision. avait été introduite par l’Acte unique et étendue par le traité de
Sont également soumis à l’avis conforme du Parlement (depuis Maastricht à la plupart des matières législatives pour lesquelles
le traité de Maastricht) les actes relatifs à la procédure électorale. le Conseil statue à la majorité. Obligeant le Conseil à prendre
Depuis le traité d’Amsterdam, son avis conforme est en outre en considération en deuxième lecture les amendements du
requis si le Conseil souhaite déclarer que le risque est réel de voir Parlement européen adoptés à la majorité absolue, dans la
un État membre commettre une violation grave des principes mesure où ils étaient repris par la Commission, elle constituait
fondamentaux de l’Union, avant de notifier ses le début d’un vrai pouvoir législatif pour le Parlement. Son
recommandations ou ses sanctions à l’État membre en question. importance a été amoindrie par la généralisation de la
Par ailleurs, le projet de statut des députés au Parlement procédure de codécision, au titre du traité d’Amsterdam. Elle
européen doit être approuvé par le Conseil. ne subsiste que pour quatre dispositions de la politique
économique et monétaire (article 98 et suivants).
Participation au processus législatif D. L’avis conforme
Le Parlement participe à l’élaboration des actes législatifs Depuis le traité de Maastricht, la procédure de l’avis conforme
communautaires à des degrés divers, en fonction de la base s’applique à quelques domaines législatifs dans lesquels le
juridique pertinente pour chacun de ces actes. Son rôle a Conseil statue à l’unanimité, qui se limitent, depuis le traité
progressivement évolué d’une participation exclusivement d’Amsterdam, aux Fonds structurels et de cohésion (article 161
consultative à la codécision, sur un pied d’égalité avec le du traité CE).
Conseil.
E. Le droit d’initiative
A. La codécision Le traité de Maastricht a également accordé au Parlement un
Depuis l’entrée en vigueur du traité de Nice, la procédure droit d’initiative législative qui se borne à la faculté de
simplifiée dite «de codécision» (article 251 du traité CE) demander à la Commission de soumettre une proposition.

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Pouvoirs budgétaires (1.4.3) C. Questions parlementaires
Le Parlement est l’une des deux branches de l’autorité Les questions parlementaires comprennent les questions
budgétaire, et il a le dernier mot en ce qui concerne les écrites et orales, avec ou sans débat (article 197 du traité CE) et
dépenses non obligatoires (article 272 du traité CE). les questions de l’heure des questions. La Commission et le
Conseil sont tenus d’y répondre.
Il est présent dans le processus budgétaire dès le stade
préparatoire, notamment pour les orientations générales et la D. Commissions d’enquête
nature des dépenses (article 269 et suivants du traité CE). Le Parlement a le pouvoir de créer des commissions d’enquête
temporaires qu’il charge d’examiner les allégations d’infraction
Lors du débat sur le budget, il a le pouvoir de déposer des
ou de mauvaise application du droit communautaire
amendements pour les dépenses non obligatoires alors que,
(article 193 du traité CE).
pour les dépenses obligatoires, il ne peut que proposer des
modifications (article 272 du traité CE). E. Contrôle en matière de politique étrangère, de sécurité
Il arrête définitivement le budget et en contrôle l’exécution commune et de coopération policière et judiciaire
(articles 272, 275 et 276 du traité CE). Dans ces domaines, le Parlement a droit à une information
régulière et peut adresser au Conseil des questions ou des
Il examine le rapport général annuel (article 200 du traité CE). recommandations. Il est consulté sur les principaux aspects et
Il donne décharge sur l’exécution du budget (article 276 du les choix fondamentaux de la politique étrangère et de
traité CE). sécurité commune (PESC) et sur toute mesure envisagée, à
l’exception des positions communes en matière de
Le traité de Lisbonne mettra un terme à la distinction coopération politique et judiciaire (articles 21 et 39
pratiquée entre les dépenses obligatoires et les dépenses non du traité UE). La mise en place de l’accord interinstitutionnel
obligatoires. En outre, il placera le Parlement européen sur le sur la discipline budgétaire et la bonne gestion financière
même plan que le Conseil lors de la procédure budgétaire (2006/C 139/01) a permis d’améliorer les procédures de
annuelle. consultation sur la PESC, du moins sur les questions financières.
Après l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, presque tous
Pouvoirs de contrôle de l’exécutif les aspects de la coopération policière et judiciaire ainsi que les
Le Parlement dispose de plusieurs instruments de contrôle. autres domaines relevant de l’espace de liberté, de sécurité et
de justice seront soumis à la procédure législative générale
A. Investiture de la Commission (codécision). En matière de politique étrangère, la création du
Depuis 1981, le Parlement avait pris l’habitude d’«investir» poste de haut représentant de l’Union pour les affaires
informellement la Commission en se prononçant sur son étrangères et la politique de sécurité permettra d’accroître
programme. Mais il a fallu attendre le traité de Maastricht l’influence du Parlement, car la personne désignée à ce poste
(1992) pour subordonner à son approbation préalable la sera également vice-président de la Commission.
nomination par les États membres du président et des
membres de la Commission, en tant que collège. Le traité Recours devant la Cour de justice des Communautés
d’Amsterdam a été plus loin en soumettant, de surcroît, la
européennes
désignation du président de la Commission à l’approbation
préalable du Parlement, avant la désignation des autres Le Parlement a le pouvoir de présenter des recours devant la
membres du collège. En vertu du traité de Lisbonne, le Cour de justice en cas de violation du traité par une autre
candidat au poste de président de la Commission devra être institution.
choisi en tenant compte des résultats des élections Il dispose d’un droit d’intervention, c’est-à-dire du droit de se
européennes. joindre à une des parties lors d’une affaire. Ce droit a été
exercé notamment dans l’affaire Isoglucose (arrêt du
B. La motion de censure 29 octobre 1980 dans les affaires 138 et 139/79). Dans cet arrêt,
La motion de censure à l’encontre de la Commission la Cour a annulé un règlement du Conseil pour violation de
(article 201 du traité CE) existe depuis le traité de Rome. Elle l’obligation de consulter le Parlement.
nécessite un vote à la majorité des deux tiers des suffrages
Dans le cadre du recours en carence (article 232 du traité CE),
exprimés et à la majorité des membres composant
il peut poursuivre une institution devant la Cour pour violation
l’assemblée. Elle contraint la Commission à démissionner en
du traité, comme dans l’affaire 13/83, dans laquelle le Conseil a
bloc. Depuis l’origine, huit motions de censure seulement ont
été condamné pour avoir omis de prendre des mesures
fait l’objet d’un vote et aucune n’a été adoptée, mais le nombre
relatives à la politique commune des transports (4.6.1).
de voix en faveur de la censure a régulièrement augmenté.
Néanmoins, la dernière motion de censure (vote du 8 juin Dans le cadre du traité d’Amsterdam, le Parlement pouvait
2005) n’a obtenu que 35 voix, contre 589 voix contre présenter un recours en annulation uniquement lorsqu’il
et 35 abstentions. s’agissait de protéger ses prérogatives. Le traité de Nice a

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Le système de Les institutions et organes
1 fonctionnement de 3 de l’Union
l’Union européenne

modifié l’article 203 du traité CE: le Parlement n’est pas tenu de Pétitions


faire état d’une préoccupation particulière; il est désormais à C’est auprès du Parlement que les citoyens de l’Union exercent
même d’engager des procédures au même titre que le Conseil, leur droit de pétition (article 194 du traité CE) (2.5).
la Commission et les États membres. Le Parlement peut être
partie défenderesse en cas de recours contre un acte adopté
selon la procédure de codécision ou lorsqu’un de ses actes est Nomination du Médiateur
destiné à produire des effets juridiques vis-à-vis de tiers. C’est le Parlement qui nomme le Médiateur (article 195 du
L’article 230 du traité CE confirme ainsi la jurisprudence de la traité CE) (1.3.14).
Cour dans les affaires 320/81, 294/83 et 70/88.
Enfin, il est en mesure de solliciter l’avis préalable de la Cour g Wilhelm LEHMANN
de justice sur la compatibilité d’un accord interinstitutionnel Juillet 2008
avec le traité (article 300 du traité CE, tel que modifié par le
traité de Nice).

1.3.3. Le Parlement Européen: organisation


et fonctionnement
L ’organisation et le fonctionnement du Parlement européen sont régis par son règlement intérieur. Les instances
dirigeantes, les commissions, les délégations et les groupes politiques orientent les activités du Parlement, dont la
composition varie habituellement après les révisions des traités et les élargissements.

Base juridique B. Les commissions et délégations parlementaires


— Articles 189 à 201 du traité CE Les membres sont répartis dans 20 commissions
parlementaires, 2 sous-commissions, ainsi qu’un certain
— Règlement du Parlement européen nombre de délégations interparlementaires et de délégations
aux commissions parlementaires mixtes, auxquelles s’ajoute
Membres l’Assemblée parlementaire paritaire créée dans le cadre de
Le Parlement européen compte actuellement 785 membres l’accord conclu entre les États d’Afrique, des Caraïbes et du
répartis comme suit: 99 pour l’Allemagne; 78 pour la France, Pacifique (ACP) et l’Union européenne.
l’Italie et le Royaume-Uni; 54 pour l’Espagne et la Pologne; Chaque commission ou délégation élit pour deux ans et demi
35 pour la Roumanie; 27 pour les Pays-Bas; 24 pour la Belgique, son propre bureau, composé d’un président et de quatre vice-
la République tchèque, la Grèce, la Hongrie et le Portugal; présidents (trois après juillet 2009).
19 pour la Suède; 18 pour la Bulgarie et l’Autriche; 14 pour
le Danemark, la Slovaquie et la Finlande; 13 pour l’Irlande C. Les groupes politiques
et la Lituanie; 9 pour la Lettonie; 7 pour la Slovénie; Les députés ne siègent pas par délégation nationale, mais se
6 pour l’Estonie, Chypre et le Luxembourg et 5 pour Malte. regroupent suivant leurs affinités politiques en groupes
transnationaux. Selon le règlement du Parlement européen,
Organisation tout groupe politique est composé de députés élus dans au
moins un cinquième des États membres. Après l’adhésion de
A. Les instances dirigeantes la Bulgarie et de la Roumanie, le nombre minimal requis pour
Elles sont constituées par: le bureau (le président et quatorze constituer un groupe politique a été fixé à vingt députés, issus
vice-présidents), la conférence des présidents (le président et d’au moins six États membres (article 29 du règlement du
les présidents des groupes politiques), les six questeurs (cinq Parlement). Après les élections de 2009, ce seuil passera à
après juillet 2009) chargés du traitement des questions vingt-cinq députés, issus d’au moins sept États membres. Les
administratives et financières concernant les députés, la groupes politiques tiennent régulièrement des réunions
conférence des présidents des commissions et la conférence durant la semaine qui précède la période de session et en
des présidents des délégations. Le mandat du président, des marge de celle-ci, ainsi que des journées d’étude au cours
vice-présidents et des questeurs est de deux ans et demi. desquelles ils décident des grands principes de leur action à

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l’échelle de l’Union européenne. Plusieurs familles politiques gouvernements des États membres de respecter l’obligation
ont fondé des partis politiques de niveau européen, comme le que leur assignent les traités de fixer un siège unique pour les
parti populaire européen, le parti des socialistes européens, le institutions. En l’absence de décision des États membres en la
parti vert européen et le parti européen des libéraux matière, le Parlement a pris un certain nombre de décisions
démocrates et réformateurs, dont l’action se déroule en liaison quant à son organisation et à ses lieux de travail (Luxembourg,
étroite avec les groupes politiques correspondants au sein du Strasbourg, Bruxelles).
Parlement. Lors du Conseil européen d’Édimbourg des 11 et
D. Les partis politiques européens 12 décembre 1992, les gouvernements des États membres
La vocation qu’ont les partis politiques européens de sont parvenus à un accord sur les sièges des institutions, aux
contribuer à la formation d’une conscience européenne et à termes duquel:
l’expression de la volonté politique des citoyens de l’Union a — le Parlement a son siège à Strasbourg, où se tiennent les
été consacrée par l’article 191 du traité CE, introduit par le douze périodes de session mensuelles, y compris la session
traité de Maastricht. Le Parlement préconise la création d’un budgétaire;
environnement favorable à leur développement ultérieur, y — les périodes de session plénière additionnelles se tiennent
compris l’adoption de certaines dispositions de législation- à Bruxelles;
cadre. Le traité de Nice a doté l’article 191 d’une base juridique
permettant l’adoption par codécision d’un statut des partis — les commissions parlementaires siègent à Bruxelles;
politiques européens et plus particulièrement des règles — le secrétariat général et ses services restent installés à
relatives à leur financement. Depuis l’entrée en vigueur, en Luxembourg.
2004, du règlement (CE) n° 2004/2003, plusieurs partis
Cette décision a suscité des critiques de la part du Parlement.
politiques nouveaux ont été créés, ce qui a porté leur nombre
Cependant, la Cour de justice (arrêt du 1er octobre 1997 dans
à un total de dix.
l’affaire C-345/95) a confirmé que le siège du Parlement était
fixé conformément à l’article 289 du traité CE. Le contenu de
Fonctionnement cette décision a été inclus dans le traité d’Amsterdam sous la
Dans le cadre défini par le traité, le Parlement organise ses forme d’un protocole annexé aux traités communautaires, ce
travaux de manière indépendante. Il arrête son règlement que le Parlement a déploré.
intérieur à la majorité des membres qui le composent Le calendrier des sessions est fixé chaque année par le
(article 199 du traité CE). Si les traités n’en disposent pas Parlement sur proposition de la conférence des présidents. En
autrement, le Parlement européen statue à la majorité absolue général, le Parlement tient douze périodes de session de
des suffrages exprimés (article 198 du traité CE). Il décide de quatre jours à Strasbourg et six périodes de session de
l’ordre du jour de ses périodes de session, lesquelles sont deux jours à Bruxelles. Pour la première fois, le 18 décembre
consacrées principalement à l’adoption des rapports (élaborés 2006, le Parlement s’est réuni pour une séance plénière
par les commissions parlementaires), aux questions adressées supplémentaire à Bruxelles, aussitôt après le Conseil européen
à la Commission et au Conseil, aux débats d’urgence et aux des 15 et 16 décembre 2006. À l’avenir, cette pratique sera
déclarations de la présidence. Les séances plénières sont renforcée.
publiques.

Siège et lieux de travail g Wilhelm LEHMANN


Juillet 2008
Depuis le 7 juillet 1981, le Parlement a adopté plusieurs
résolutions concernant son siège, demandant aux

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Le système de Les institutions et organes
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l’Union européenne

Composition du Parlement par groupe et par État membre


PPE-DE PSE ALDE UEN Verts/ GUE/ IND/ NI
ALE NGL DEM
Belgique 6 7 6 2 3 24
Bulgarie 5 5 5 3 18
République tchèque 14 2 6 1 1 24
Danemark 1 5 4 1 1 1 1 14
Allemagne 49 23 7 13 7 99
Estonie 1 3 2 6
Grèce 11 8 4 1 24
Espagne 24 24 2 3 1 54
France 18 31 10 6 3 3 7 78
Irlande 5 1 1 4 1 1 13
Italie 24 17 12 13 2 7 3 78
Chypre 3 1 2 6
Lettonie 3 1 4 1 9
Lituanie 2 2 7 2 13
Luxembourg 3 1 1 1 6
Hongrie 13 9 2 24
Malte 2 3 5
Pays-Bas 7 7 5 4 2 2 27
Autriche 6 7 1 2 2 18
Pologne 15 9 6 19 3 2 54
Portugal 9 12 3 24
Roumanie 18 10 6 1 35
Slovénie 4 1 2 7
Slovaquie 8 3 3 14
Finlande 4 3 5 1 1 14
Suède 6 5 3 1 2 2 19
Royaume-Uni 27 19 11 5 1 8 7 78
Total 288 217 100 43 43 41 22 31 785

PPE-DE: groupe du parti populaire européen (démocrates-chrétiens) Verts/ALE: groupe des Verts/Alliance libre européenne
et des démocrates européens GUE/NGL: groupe confédéral de la gauche unitaire européenne/gauche verte nordique
PSE: groupe socialiste au Parlement européen IND/DEM: groupe Indépendance et démocratie
ALDE: groupe Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe NI: non-inscrits
UEN: groupe Union pour l’Europe des Nations

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1.3.4. Le Parlement européen: modalités d’élection
Les procédures électorales relatives au Parlement européen sont régies par la législation européenne, qui définit des règles
communes à tous les États membres, comme celles concernant les incompatibilités ou l’introduction du principe du
scrutin proportionnel, et par des dispositions nationales particulières qui varient d’un État membre à l’autre.

Base juridique général ou de greffier de la Cour de justice, de membre de la


Article 190, paragraphes 1 et 2, du traité CE Cour des comptes, du Comité économique et social européen,
de comités ou d’organismes créés en vertu ou en application
des traités communautaires en vue de l’administration de
Règles communes fonds communautaires ou d’une tâche permanente et directe
A. Principes de gestion administrative, du conseil d’administration, du
Tout en décidant que le Parlement européen (PE) serait comité de direction ou d’employé de la Banque européenne
d’abord composé de membres désignés par les parlements d’investissement, et en général de fonctionnaire ou d’agent en
nationaux, les traités initiaux avaient prévu qu’il serait activité des institutions des Communautés européennes ou
ultérieurement élu au suffrage direct sur la base d’un projet des organismes spécialisés qui leur sont rattachés.
élaboré par l’assemblée elle-même. Mais ce n’est qu’en 1976 La décision du Conseil de 2002 a ajouté de nouvelles
(acte du 20 septembre désormais incorporé au traité CE: incompatibilités: membre du Tribunal de première instance,
article 190, paragraphe 1) que le Conseil a décidé d’appliquer membre du directoire de la Banque centrale européenne,
cette disposition. Médiateur des Communautés européennes et, il faut le
En 1992, le traité de Maastricht a introduit dans le traité CE souligner, député d’un parlement national.
une disposition (article 190, paragraphe 4) prévoyant que
l’élection devait se faire selon une procédure uniforme dans Modalités relevant de la compétence nationale
tous les États membres, à adopter par le Conseil sur la base En dehors de ces quelques règles communes, les modalités
d’un projet élaboré par le Parlement européen. Mais, en dépit électorales sont régies par des dispositions nationales qui sont
de plusieurs projets présentés par le Parlement, le Conseil n’a parfois nettement différentes.
pu parvenir à un accord sur une procédure uniforme.
Pour remédier à ce blocage, le traité d’Amsterdam a introduit A. Système électoral
dans le traité CE la possibilité qu’à défaut de procédure En application de la décision du Conseil de 2002, tous les États
uniforme l’on se contente de «principes communs» de nature membres doivent désormais appliquer un système de
à renforcer la légitimité démocratique du PE et le sentiment représentation proportionnelle. Les listes qui, par exemple,
d’appartenance de citoyen européen à l’Union. Sur cette base, n’ont pas obtenu 5 % des voix en Allemagne et en France, ou
l’acte de 1976 a pu être modifié par la décision du Conseil 4 % des voix en Autriche et en Suède, sont exclues de la
2002/772/CE, Euratom des 25 juin et 23 septembre 2002. Cette répartition des sièges. Jusqu’aux élections de 1994, le
décision a introduit notamment l’incompatibilité entre les Royaume-Uni avait appliqué le système du scrutin majoritaire
mandats nationaux et européens et le principe du scrutin (sauf pour l’Irlande du Nord où s’appliquait aussi le système de
proportionnel. la représentation proportionnelle). La plupart des nouveaux
États membres les plus grands appliquent le seuil de 5 % ou
B. Application: les dispositions communes en vigueur de 4 %.
1. Droit de vote et d'éligibilité des non-ressortissants
B. Découpage en circonscriptions
Selon l’article 19 du traité CE, «tout citoyen de l’Union résidant
dans un État membre dont il n’est pas ressortissant a le droit Jusqu’en 2003, dans 11 États membres (Danemark, Allemagne,
de vote et d’éligibilité aux élections du PE dans l’État membre Grèce, Espagne, France, Luxembourg, Pays-Bas, Autriche,
où il réside». Les modalités d’exercice de ces droits ont été Portugal, Finlande et Suède), l’ensemble du territoire national
arrêtées par la directive 93/109/CE du 6 décembre 1993. constituait une circonscription électorale unique. Dans quatre
États membres (Belgique, Irlande, Italie, Royaume-Uni), le
2. Procédure électorale territoire national était divisé en plusieurs circonscriptions. La
Elle doit être de type proportionnel, la méthode pouvant être plupart des nouveaux États membres ont introduit des
soit le scrutin de liste soit le vote unique transférable (décision circonscriptions uniques (par exemple la République tchèque
2002/772/CE, Euratom du Conseil). et la Hongrie). En Pologne, 13 circonscriptions régionales ont
3. Incompatibilités été créées.
Le mandat de député européen est incompatible avec la À la suite de la décision du Conseil de 2002, un certain nombre
qualité de membre de la Commission, de juge, d’avocat de législations nationales des anciens États membres ont été

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Le système de Les institutions et organes
1 fonctionnement de 3 de l’Union
l’Union européenne

modifiées ou sont en cours de modification. Ainsi, la France a D. Éligibilité


abandonné la circonscription nationale unique au profit de À part l’exigence de nationalité d’un État de l’Union, qui est
huit grandes circonscriptions régionales dénommées: Nord- commune à tous les États membres, les conditions d’éligibilité
Ouest, Ouest, Est, Sud-Ouest, Sud-Est, Massif Central, Île-de- varient d’un État à l’autre.
France, Outre-mer. En Allemagne, tant que la loi électorale
n’aura pas fait l’objet de modifications, les partis ont toujours la 1. Âge minimal
possibilité de présenter des listes de candidats soit à l’échelon
18 ans au Danemark, en Allemagne, en Espagne, au
des Länder, soit à l’échelon national. De même, en Finlande, les
Luxembourg, aux Pays-Bas, en Autriche, au Portugal, en
partis ont la possibilité de présenter leurs listes au niveau de la
Finlande, en Suède et dans la majorité des nouveaux États
zone électorale ou au niveau national.
membres, 21 en Belgique, en République tchèque, en Irlande,
en Grèce, en Lituanie, en Pologne, en Slovaquie et au
C. Droit de vote
Royaume-Uni, 23 en France et 25 en Italie.
1. Vote des non-ressortissants dans le pays d’accueil
2. Résidence
L’âge électoral est de 18 ans dans tous les États membres, sauf
en Autriche où il est de 16 ans. Tout citoyen de l’Union résidant Au Luxembourg, depuis la nouvelle loi électorale du 18 février
dans un État membre dont il n’est pas ressortissant (article 19 2003, une durée de résidence de cinq années (auparavant dix)
du traité CE) a le droit de vote aux élections au PE dans l’État est requise pour permettre à un ressortissant communautaire
membre où il réside dans les mêmes conditions que les d’être candidat aux élections européennes. Par ailleurs, une
ressortissants de cet État. Cependant, les régimes électoraux liste ne peut être majoritairement composée de candidats ne
des États membres diffèrent encore beaucoup sur la notion de possédant pas la nationalité luxembourgeoise.
résidence.
E. Modalités de candidature
Certains pays (France et Finlande) exigent que l’on possède Dans certains États membres (République tchèque, Danemark,
son domicile ou sa résidence habituelle sur le territoire Allemagne, Estonie, Grèce, Pays-Bas, Suède), seuls les partis ou
électoral, d’autres (Belgique, Allemagne, Grèce, Espagne, Italie, organisations assimilables à des partis peuvent déposer des
Luxembourg, Portugal) que l’on y séjourne de manière candidatures. Dans les autres États, les candidatures peuvent
habituelle, d’autres encore (Danemark, Irlande, Hongrie, Pays- être présentées à condition de recueillir un certain nombre de
Bas, Autriche, Pologne, Suède, Royaume-Uni) que l’on soit signatures ou de regrouper un certain nombre d’électeurs et,
inscrit sur le registre de la population. dans certains cas (Irlande, Pays-Bas, Royaume-Uni), le
versement d’une caution est exigé. Les candidats peuvent se
Pour bénéficier du droit de vote au Luxembourg, les
présenter à titre individuel en Irlande et en Italie s’ils réunissent
ressortissants communautaires doivent justifier d’une durée
un certain nombre de signatures.
minimale de résidence. Celle-ci s’est cependant vue réduite
depuis la nouvelle loi électorale du 18 février 2003: dorénavant,
F. Date de l’élection
en effet, la durée de résidence obligatoire sur le territoire du
Grand-Duché est de cinq ans, cette durée ne s’appliquant pas En conformité avec les traditions nationales, le jour de vote est:
à l’égard des électeurs communautaires qui, en raison de leur
— le jeudi au Danemark, en Irlande, aux Pays-Bas et au
résidence en dehors de leur État membre d’origine ou de la
Royaume-Uni;
durée de cette résidence, n’ont pas le droit de vote dans cet
État. — le dimanche dans tous les autres pays.
2. Vote dans les pays d’origine des ressortissants Les dernières élections se sont tenues les 10 et 13 juin 2004.
non résidents Les prochaines auront lieu les 4 et 7 juin 2009.
Au Royaume-Uni, les citoyens résidant à l’étranger n’ont le droit
de vote que s’ils sont fonctionnaires ou membres des forces G. Liberté de l’électeur par rapport à l’ordre des candidats
armées ou s’ils ont quitté le pays depuis moins de cinq années sur les listes
et à condition qu’ils en aient fait la déclaration auprès des Dans certains États (Allemagne, Grèce, Espagne, France et
autorités compétentes. Le Danemark, les Pays-Bas, l’Autriche et Portugal), les électeurs ne peuvent pas modifier l’ordre des
le Portugal n’accordent le droit de vote qu’à ceux de leurs candidats sur la liste. Dans d’autres États (Autriche, Belgique,
ressortissants qui résident dans un État de l’Union. La Belgique, Danemark, Finlande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Suède),
la Grèce, l’Espagne, la France, l’Italie et la Suède accordent le l’ordre des candidats peut être modifié en attribuant des voix
droit de vote à leurs ressortissants quel que soit leur pays de de préférence. Au Luxembourg, il est même possible de voter
résidence. L ’Allemagne accorde le droit de vote aux citoyens pour des candidats appartenant à différentes listes. En Suède,
qui résident dans un autre pays depuis moins de dix ans. En les électeurs peuvent, en outre, ajouter ou supprimer des
Irlande et en Hongrie, le droit de vote est réservé aux citoyens noms sur les listes. En Irlande, à Malte et au Royaume-Uni, les
de l’Union domiciliés sur le territoire national. élections ne se déroulent pas au scrutin de liste.

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H. Méthodes de décompte des voix et en Espagne, en cas d’absence de suppléants, on tient
La majorité des États membres emploient la méthode d’Hondt compte de l’ordre des candidats sur les listes. Au Royaume-Uni,
pour le décompte des voix et l’attribution des sièges. on organise des élections partielles. En Grèce, les sièges
L’Allemagne applique la méthode Hare-Niemeyer et le vacants sont attribués aux suppléants de la même liste; s’ils ne
Luxembourg une variante de la méthode d’Hondt, la méthode sont pas en nombre suffisant, des élections partielles sont
Hagenbach-Bischoff. En Italie, les sièges sont attribués selon la organisées. Le Parlement européen prépare actuellement une
méthode des quotients entiers et des restes les plus élevés, en résolution visant à modifier les dispositions de son règlement
Irlande selon le système du scrutin uninominal préférentiel applicables aux députés en cas de congé de maternité ou de
avec report de voix, en Grèce selon le système de la paternité, compte tenu de la législation nationale relative à
proportionnelle dite renforcée (Enishimeni Analogiki) et, en l’attribution des sièges.
Suède, selon la méthode Sainte-Laguë modifiée (méthode des
nombres impairs où le plus grand commun diviseur est Rôle du Parlement européen
ramené à 1,4). Depuis les années 60, le PE s’est maintes fois prononcé sur les
questions relatives au droit électoral et a présenté des
I. Vérification du scrutin et règles de la campagne
propositions conformément à l’article 138 du traité CEE. C’est
électorale
ainsi qu’il a adopté trois résolutions, en 1991, 1992 et 1993,
La vérification du scrutin par le PE est prévue au Danemark, pour une procédure électorale uniforme, mais le Conseil n’a
en Allemagne et au Luxembourg. La vérification par une pas considéré ces résolutions comme un projet au sens de
instance juridictionnelle est prévue en Belgique, en Irlande, en l’article 138 et il n’a adopté que la proposition concernant la
France, en Italie, en Autriche, en Finlande et au Royaume-Uni. répartition des sièges entre les États membres.
En Allemagne, les deux modes de vérification coexistent. En
Espagne, la vérification du scrutin est faite par la Junta Electoral Sur la base de l’article 190 du traité CE, tel que modifié par le
Central. Au Portugal et en Suède, une commission de traité d’Amsterdam, qui prévoyait que le PE devait élaborer un
vérification est investie de cette tâche. projet pour permettre l’élection selon une procédure uniforme
ou conformément à des principes communs, la commission
Contrairement aux élections nationales, il n’existe pas de règle institutionnelle du PE a élaboré un rapport (1997) qui a abouti
en matière de campagne électorale. Pendant longtemps, les à une résolution sur un projet de procédure électorale
partis politiques européens ne recevaient aucun subside direct uniforme. La décision du Conseil du 25 juin 2002 reprend en
pour leur campagne. Toutefois, un système de financement substance le projet du PE, excepté la proposition d’institution
des partis politiques au niveau européen a été récemment d’une circonscription unique européenne pour l’élection de
créé [règlement (CE) n° 2004/2003]. Ce système autorise 10 % des sièges.
désormais la création de fondations politiques au niveau
européen. L’absence persistante d’une véritable procédure électorale
uniforme pour les élections au PE prouve combien il est
J. Pourvoi des sièges devenus vacants difficile d’harmoniser des traditions nationales différentes. La
en cours de législature possibilité créée par le traité d’Amsterdam d’adopter des
Dans certains États membres (Danemark, France, Italie, principes communs a permis, dans une certaine mesure, de
Pays-Bas, Luxembourg, Autriche, Portugal, Finlande), les sièges surmonter ces difficultés. Le traité de Lisbonne fournirait une
devenus vacants par suite de démission sont attribués aux base juridique pour l’adoption d’une procédure uniforme,
premiers candidats non élus des listes (éventuellement après moyennant l’accord du Parlement européen.
permutation en fonction des voix recueillies par les différents
candidats). En Belgique, en Allemagne, en Irlande et en Suède, g Wilhelm LEHMANN
les sièges vacants sont attribués aux suppléants. En Allemagne Juillet 2008

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Le système de Les institutions et organes
1 fonctionnement de 3 de l’Union
l’Union européenne

1.3.5. Le Parlement européen: relations


avec les parlements nationaux
Les progrès de l’intégration européenne ont entraîné une modification du rôle des parlements nationaux. Divers
instruments de coopération entre le Parlement européen et les parlements nationaux ont été créés afin de garantir un
contrôle démocratique efficace de la législation européenne à tous les niveaux.

Objectifs de 1989: des contacts ont été pris et on a cherché à créer des
instruments susceptibles de remplacer les liens organiques du
A. Motifs de la coopération début. Le traité de Maastricht y a contribué en consacrant au
En transférant à des institutions communes disposant d’un sujet deux «déclarations» (nos 13 et 14) qui prévoient en
pouvoir de décision des compétences jusque-là détenues par particulier:
les États, la construction européenne entraîne en elle-même
une diminution du rôle des parlements nationaux (PN), à la fois — le respect du rôle des PN dans le fonctionnement de
comme législateurs, comme autorités budgétaires et comme l’Union européenne (ils doivent être informés par leurs
contrôleurs des exécutifs. Le transfert des responsabilités de gouvernements respectifs des propositions législatives
l’échelon national à l’échelon européen s’est effectué communautaires «en temps utile» et tenir si nécessaire des
essentiellement en direction du Conseil, et le Parlement conférences communes);
européen (PE) n’a pas acquis tous les pouvoirs qui lui auraient — la coopération PE/PN (par intensification des contacts,
permis de jouer un rôle parlementaire complet dans les échange d’informations, organisation de rencontres
affaires de la Commission. Il y a donc là un «déficit régulières, éventuellement octroi de facilités réciproques).
démocratique» structurel.
Récemment, les PN ont acquis un certain contrôle sur l’action
Le PE et les PN ont déploré cette faiblesse de la démocratie et communautaire de leurs gouvernements, soit à la suite de
se sont efforcés d’y remédier. réformes constitutionnelles, soit en vertu d’engagements
— Les PN, de plus en plus préoccupés par leur perte gouvernementaux, soit grâce à des modifications de leurs
d’influence, en sont venus à considérer un contrôle propres méthodes de fonctionnement. Leurs commissions
national plus efficace des activités européennes de leurs spécialisées en affaires européennes ont joué un rôle majeur
gouvernements ainsi que des relations plus étroites avec le dans cette évolution et dans la coopération avec le PE.
Parlement européen comme un moyen adéquat en vue de Le protocole sur le rôle des parlements nationaux annexé au
restaurer l’influence perdue en même temps que de traité d’Amsterdam encourage une participation accrue des PN
s’assurer que l’Europe est bâtie sur la base de principes aux activités de l’UE et prévoit à cette fin une transmission plus
démocratiques. rapide des documents de consultation et des propositions
— De son côté, le PE a globalement adopté la position selon législatives de la Commission, pour que les PN puissent
laquelle des relations substantielles avec les PN ne examiner ces propositions avant qu’une décision soit prise par
pourraient qu’aider à renforcer sa légitimité et à rapprocher le Conseil. Le rôle des parlements nationaux est approfondi
l’Europe des citoyens. dans une déclaration concernant le traité de Nice (2000) et
aussi dans la déclaration du Conseil européen de Laeken
B. Évolution du contexte de la coopération (2001). Il a également influencé les débats sur la Convention
La diminution du rôle des PN s’est poursuivie avec les progrès sur l’avenir de l’Europe (1.1.4), pendant laquelle il a constitué
de l’intégration européenne: renforcement des compétences le sujet de l’un des 11 groupes de travail. La Convention a
fiscales et budgétaires communautaires en 1970 et 1975, finalement adopté un protocole sur le rôle des parlements
accroissement des votes à la majorité au Conseil et des nationaux dans l’Union européenne, qui a été joint au traité
pouvoirs législatifs du PE réalisé par l’Acte unique en 1987 et le instituant une Constitution pour l’Europe. En mai 2006, la
traité de Maastricht en 1993, apparition avec le même traité de Commission européenne est convenue d’envoyer par voie
la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et de la électronique toutes les nouvelles propositions et les
coopération dans les domaines de la justice et des affaires documents de réflexion aux parlements nationaux.
intérieures (JAI), nouvel accroissement des pouvoirs législatifs Le traité de Lisbonne instaure un nouveau mécanisme
du PE depuis le traité d’Amsterdam d’octobre 1997. permettant aux parlements nationaux de veiller à ce que les
Jusqu’en 1979, le PE et les PN avaient des liens organiques nouvelles propositions législatives respectent le principe de
puisque les parlementaires européens étaient désignés par les subsidiarité. Les nouvelles propositions de la Commission
PN en leur sein. L’élection du PE au suffrage direct a rompu ces pourraient être stoppées par la majorité des chambres.
liens. Pendant une dizaine d’années, il n’y a pratiquement plus Cependant, la décision finale reviendrait aux autorités
eu de relations. Le besoin d’en retrouver s’est fait sentir à partir législatives (Parlement européen et Conseil de ministres). Le

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traité contient également de nouveaux articles qui clarifient le Communauté, les implications pour la CE et les États membres
rôle des parlements nationaux dans le cadre de la nouvelle des propositions relatives à l’Union économique et monétaire
structure institutionnelle de l’UE (articles 10 et 12 du traité CE). et à l’union politique, et plus particulièrement le rôle des
parlements nationaux et du Parlement européen», ces assises
Réalisations: les instruments de la coopération ont réuni 258 participants (173 des PN et 85 du PE). Cette
initiative n’a pas eu de suites jusqu’ici.
A. Conférences des présidents des assemblées
parlementaires de l’Union européenne D. Conférence des commissions des affaires
Après des rencontres organisées en 1963 et 1973, ces communautaires et européennes des parlements
conférences ont été instituées à partir de 1981. Réunissant les de l’Union européenne (COSAC)
présidents des PN et celui du PE, elles ont eu lieu initialement Proposée par le président de l’Assemblée nationale française,
tous les deux ans. Préparées par des réunions des secrétaires cette conférence réunit tous les six mois depuis 1989 les
généraux, elles traitent de questions précises de coopération organes des parlements nationaux spécialisés dans les affaires
entre PN et PE. communautaires et six membres du PE conduits par les deux
vice-présidents chargés des relations avec les parlements
Ces dernières années, les présidents se sont également réunis
nationaux. Convoquée par le parlement du pays qui a la
tous les ans. Récemment, des conférences importantes ont été
présidence de l’Union et préparée en commun par le PE et par
organisées à Athènes (22-24 mai 2003), à propos du rôle des
les parlements de la troïka, chaque conférence traite de
assemblées européennes dans une Europe élargie, et à
thèmes majeurs de l’intégration européenne.
Lisbonne (20-21 juin 2008) à propos de l’UE au-delà du traité
de Lisbonne. La COSAC n’est pas un organe de prise de décision, mais un
organe de consultation et de coordination parlementaire qui
Enfin, depuis 1995, le PE entretient des relations suivies avec
prend des positions par consensus. Le protocole sur le rôle des
les parlements des pays associés et des pays candidats à
parlements nationaux du traité d’Amsterdam stipule que la
l’adhésion. Lors de rencontres régulières entre les présidents
COSAC peut soumettre toute contribution qu’elle juge
du PE et ces parlements, on évoque les stratégies d’adhésion
appropriée à l’attention des institutions de l’UE. Cependant, les
et d’autres questions d’actualité.
contributions soumises par la COSAC ne lient en rien les
B. Le Centre européen de recherche et de documentation parlements ni ne préjugent leur position.
parlementaires
E. Coopération
La «grande conférence» de Vienne (1977) a créé le Centre
La plupart des commissions permanentes du PE se
européen de recherche et de documentation parlementaires
concertent avec leurs homologues nationaux, par le biais de
(CERDP). Le CERDP est un réseau de services de
réunions bi- ou multilatérales et de visites de présidents ou de
documentation et de recherche qui coopèrent étroitement
rapporteurs.
pour faciliter l’accès à l’information (y compris aux bases de
données nationales et communautaires) et coordonner la Les contacts entre groupes politiques du PE et groupes
recherche en évitant notamment les doubles emplois. Il correspondants des PN se développent de manière inégale
centralise et diffuse des études et a créé un site internet selon les partis ou les pays concernés.
destiné à améliorer les échanges d’informations. Son annuaire La coopération administrative se développe, notamment
facilite les contacts entre les différents services de recherche sous forme de stages dans les services du PE et d’échanges de
des assemblées membres. La direction du Centre est assurée fonctionnaires. L’information mutuelle sur les travaux des
conjointement par le PE et l’Assemblée parlementaire du parlements, notamment en matière législative, prend une
Conseil de l’Europe. place grandissante.
C. Conférence des Parlements de la Communauté
L’idée de cette conférence s’est réalisée à Rome en 1990 sous le g Wilhelm LEHMANN
nom d’«Assises européennes». Sur le thème «L’avenir de la Juillet 2008

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Le système de Les institutions et organes
1 fonctionnement de 3 de l’Union
l’Union européenne

1.3.6. Le Conseil
Avec le Parlement européen, le Conseil est l’institution qui adopte la législation communautaire par le biais de règlements
et de directives et prépare des décisions ainsi que des recommandations non contraignantes. Dans ses domaines de
compétence, il prend ses décisions à la majorité simple, à la majorité qualifiée ou à l’unanimité, selon l’importance des
actes requérant son approbation.

Base juridique 4. Politique étrangère et de sécurité commune


et coopération dans les domaines de la justice
Dans le cadre institutionnel unique de l’Union européenne, le
et des affaires intérieures
Conseil exerce les attributions qui lui sont conférées par le
traité UE (articles 3 et 5) et le traité CE (articles 202 à 210). Dans ces domaines de compétence, créés par le traité sur
l’Union européenne, le Conseil agit non pas en tant
qu’institution communautaire mais selon des règles
Rôle spécifiques de type intergouvernemental.
A. Législation communautaire Dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité, il
arrête des positions communes et des actions communes et
Sur la base des propositions présentées par la Commission, le
établit des conventions. La formule de la troïka a changé après
Conseil adopte la législation communautaire, sous forme de
le traité d’Amsterdam: dans le domaine de la politique
règlements et de directives, soit conjointement avec le
étrangère et de sécurité commune, la présidence du Conseil
Parlement européen conformément à la procédure de
est désormais assistée par le secrétariat général du Conseil,
l’article 251 du traité CE, soit seul après consultation du
dont le secrétaire général exerce les fonctions de haut
Parlement européen (1.4.1). Le Conseil arrête également des
représentant pour la politique étrangère et de sécurité
décisions individuelles et des recommandations non
commune, et l’État membre qui occupera la prochaine
contraignantes (article 249 du traité CE) et émet des
présidence. Le Conseil et la présidence sont également assistés
résolutions. Le Conseil établit les modalités pour l’exercice des
par une unité de planification de la politique et d’alerte rapide
compétences d’exécution qui sont conférées à la Commission
créée conformément à la déclaration annexée à l’acte final du
ou réservées au Conseil lui-même.
traité d’Amsterdam.
B. Budget Depuis le traité d’Amsterdam, le Conseil arrête également des
Le Conseil est l’une des deux branches — l’autre étant le décisions-cadres de rapprochement des législations dans les
Parlement européen — de l’autorité budgétaire, qui arrêtent le domaines de la justice et des affaires intérieures (4.12.1).
budget de la Communauté (1.4.3).
Organisation
C. Autres compétences
A. Composition
1. Politique extérieure de la Communauté
1. Membres
Le Conseil conclut les accords internationaux de la Le Conseil se compose d’un représentant de chaque État
Communauté (lesquels sont négociés par la Commission et membre au niveau ministériel «habilité à engager le
requièrent l’intervention du Parlement dans certains cas). gouvernement de cet État membre» (article 203 du traité CE).
2. Nominations 2. Présidence
Le Conseil, statuant à la majorité qualifiée (depuis le traité de Le Conseil, statuant à la majorité qualifiée (depuis le traité de
Nice), nomme les membres de la Cour des comptes, du Nice), est présidé par le représentant de l’État membre qui
Comité économique et social européen et du Comité des exerce la présidence de l’Union: celle-ci change tous les
régions. six mois selon un ordre fixé par le Conseil statuant à
l’unanimité (article 20 du traité CE). Le traité de Nice n’a pas
3. Politique économique et monétaire modifié ce système de rotation semestrielle. Afin de donner
Le Conseil assure la coordination des politiques économiques aux nouveaux États membres le temps de se préparer à leur
des États membres (article 145 du traité CE) et, sans préjudice présidence, l’ordre de rotation établi antérieurement a été
des compétences de la Banque centrale européenne, il prend conservé jusqu’à la fin de l’année 2006. Le 1er janvier 2007, il a
les décisions politiques dans le domaine monétaire. La été décidé que l’Allemagne et le Portugal prendraient la
décision d’admettre un État membre à adopter la monnaie présidence en 2007, la Slovénie et la France en 2008, la
unique est prise par le Conseil réuni au niveau des chefs d’État République tchèque et la Suède en 2009, l’Espagne et la
ou de gouvernement. Belgique en 2010, la Hongrie et la Pologne en 2011, le

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Danemark et Chypre en 2012, l’Irlande et la Lituanie en 2013, la Depuis le 1er novembre 2004, une nouvelle pondération des
Grèce et l’Italie en 2014, la Lettonie et le Luxembourg en 2015, voix a été introduite, et la majorité qualifiée est obtenue si
les Pays-Bas et la Slovaquie en 2016, Malte et le Royaume-Uni (avec vingt-sept États membres):
en 2017, l’Estonie et la Bulgarie en 2018, l’Autriche et la
— la décision recueille au moins 255 voix du nouveau total de
Roumanie en 2019 et la Finlande le premier semestre de 2020.
345 voix (73,91 %),
Le traité de Lisbonne modifierait le système des présidences — la décision est approuvée par une majorité d’États
tournantes. Il officialiserait la pratique d’un trio présidentiel de membres,
dix-huit mois dans un projet de décision du Conseil européen
à adopter après l’entrée en vigueur du traité et créerait une — et si la décision est approuvée par au moins 62 % de la
présidence à long terme pour le Conseil des affaires population de l’UE (l’observation de ce dernier critère doit
étrangères, qui serait présidé par le haut représentant de être sollicitée par un État membre).
l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité Si une proposition n’émane pas de la Commission, l’adoption
pour la fin de son mandat. d’un acte du Conseil doit recueillir au moins 255 voix,
exprimées par au moins deux tiers des membres.
B. Fonctionnement
Le traité de Lisbonne abandonnerait le système des voix
Selon la matière en cause, le Conseil prend sa décision à la pondérées et suivrait une règle simple de double majorité
majorité simple, à la majorité qualifiée ou à l’unanimité (1.4.1 (55 % des membres du Conseil, comprenant au moins 15
et 1.4.3). d’entre eux et représentant au moins 65 % de la population de
1. Majorité simple l’Union.). Cependant, ce nouveau système n’entrerait pas en
vigueur avant le 1er novembre 2014.
La majorité simple signifie qu’une décision est acquise lorsque
le nombre de voix en sa faveur l’emporte sur les voix en sa b. Champ d’application
défaveur, chaque membre du Conseil disposant en Le traité de Nice a étendu le champ d’application du processus
l’occurrence d’une voix. La majorité simple s’applique dans les décisionnel à la majorité qualifiée. 27 dispositions passent
cas où le traité n’en dispose pas autrement (article 205, totalement ou partiellement de l’unanimité à la majorité
paragraphe 1, du traité CE). C’est donc le mode de décision de qualifiée, dont l’article 18 du traité CE (mesures visant à faciliter
droit commun. Mais, en réalité, il ne s’applique qu’à un petit la libre circulation des citoyens de l’Union), l’article 65
nombre de matières: règlement intérieur du Conseil, (coopération judiciaire en matière civile) et l’article 157
organisation du secrétariat général du Conseil et statut des (politique industrielle). La majorité qualifiée est désormais
comités prévus par le traité. requise pour la nomination du président et des membres de la
Commission, pour les membres de la Cour des comptes, le
2. Majorité qualifiée Comité économique et social européen et le Comité des
a. Mécanisme régions (1.4.1 et 1.4.3). Le traité de Lisbonne augmente de 45
le nombre de bases juridiques exigeant la majorité qualifiée,
Dans bon nombre de matières, le traité a prévu que les incluant de nombreux domaines du troisième pilier.
décisions sont prises à la majorité qualifiée, c’est-à-dire qu’elles
requièrent plus de voix que la majorité simple. Mais, dans ce 3. Unanimité
cas, il n’y a plus égalité des droits de vote. Chaque pays dispose L’unanimité n’est exigée par le traité CE que pour un nombre
d’un certain nombre de voix selon sa population (article 205, assez réduit de matières, mais figurant parmi les plus
paragraphe 2, du traité CE). importantes (fiscalité, politique sociale, etc.).

Avant l’adhésion des dix nouveaux États membres, la situation Il faut signaler d’ailleurs la tendance du Conseil à rechercher
était la suivante: Allemagne, France, Italie et Royaume-Uni: l’unanimité même dans les matières où elle n’est pas requise.
dix voix; Espagne: huit voix; Belgique, Grèce, Pays-Bas et Cette tendance remonte au «compromis de Luxembourg»
Portugal: cinq voix; Autriche et Suède: quatre voix; Danemark, de 1966. Cet arrangement concluait le conflit apparu entre la
Irlande et Finlande: trois voix; Luxembourg: deux voix. Soit France et les autres États membres au cours de l’année 1965,
au total 87 voix dont 62 étaient nécessaires pour qu’une la France refusant le passage de l’unanimité à la majorité
décision soit acquise. Lorsque le Conseil prenait une décision qualifiée prévu à cette échéance par le traité de Rome pour
sans proposition de la Commission, une condition un certain nombre de matières. La France avait alors refusé de
supplémentaire devait être remplie: les 62 voix devaient siéger au Conseil pendant six mois. Le texte du compromis est
représenter au moins dix États membres. ainsi libellé: «Lorsque, dans le cas de décisions susceptibles
d’être prises à la majorité sur proposition de la Commission,
Avec l’adhésion des dix nouveaux États membres, le nombre des intérêts très importants d’un ou plusieurs partenaires sont
total de voix au Conseil est passé à 124 au cours de la période en jeu, les membres du Conseil s’efforceront dans un délai
de transition (1er mai 2004-31 octobre 2004). La majorité raisonnable d’arriver à des solutions qui pourront être
qualifiée requise était de 88 voix (70,97 %). adoptées par tous les membres du Conseil dans le respect de

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Le système de Les institutions et organes
1 fonctionnement de 3 de l’Union
l’Union européenne

leurs intérêts mutuels et de ceux de la Communauté, Coreper


conformément à l’article 2 du traité». Il n’a pas de valeur Un comité composé des représentants permanents des États
juridique en ce sens qu’il ne modifie évidemment pas le traité membres (Coreper) prépare les travaux du Conseil et exécute
mais il a entraîné une tendance à rechercher l’unanimité qui a, les mandats qui lui sont confiés par celui-ci (article 207,
par le passé, considérablement ralenti le processus paragraphe 1, du traité CE).
décisionnel.

g Wilhelm LEHMANN
Juillet 2008

1.3.7. Le Conseil européen


Le Conseil européen, composé des chefs d’État ou de gouvernement des États membres, donne à l’Union européenne les
impulsions nécessaires à son développement et définit les orientations politiques générales. Le Conseil européen est lié à la
Commission, puisque le président de celle-ci est membre du Conseil européen. Le président du Parlement européen est
également présent aux réunions du Conseil européen.

Base juridique Le traité de Lisbonne ferait du Conseil européen une


Articles 4, 13, 17 et 40 du traité UE institution de l’Union européenne. Son rôle serait de «donner à
l’Union les impulsions nécessaires à son développement et
d’en définir les orientations et les priorités politiques
Évolution historique générales» (article 15 du traité UE tel qu’amendé).
A. Les sommets
D. Formalisation dans les traités
Le Conseil européen est l’héritier des conférences au sommet
L ’Acte unique (1986) a pour la première fois inséré le Conseil
réunissant les chefs d’État ou de gouvernement des États
européen dans le dispositif des traités communautaires en
membres de la Communauté. Le premier de ces «sommets
fixant sa composition et en lui donnant un rythme de deux
européens» s’est tenu à Paris en 1961. Il y en a eu ensuite
réunions par an.
plusieurs, à intervalles plus ou moins réguliers, plus rapprochés
à partir de 1969. Le traité de Maastricht (1992) a formalisé son rôle dans le
dispositif institutionnel de l’Union européenne.
B. L’apparition de l’appellation
Le traité de Lisbonne ferait du Conseil européen une
C’est le sommet européen de Paris de février 1974 qui a décidé
institution à part entière de l’Union européenne (article 13 du
que ces réunions de chefs d’État ou de gouvernement se
traité UE tel qu’amendé).
tiendraient désormais régulièrement et prendraient le nom de
«Conseil européen» pour permettre une approche globale des
problèmes de la construction européenne et assurer la Organisation
cohésion générale des activités communautaires.
A. Composition
C. Définition des tâches Le Conseil européen réunit les chefs d’État ou de
La déclaration solennelle sur l’Union européenne adoptée par gouvernement des États membres et le président de la
les chefs d’État ou de gouvernement à Stuttgart en 1983 a Commission, assistés par les ministres des affaires étrangères
précisé les tâches du Conseil européen: et par un membre de la Commission.
— il définit les orientations de la construction européenne; B. Fonctionnement
— il donne des lignes directrices à l’action communautaire et Le Conseil européen se réunit au moins deux fois par an. Il est
à la coopération politique; présidé par le chef d’État ou de gouvernement du pays qui
exerce la présidence du Conseil. En principe, il prend ses
— il ouvre de nouveaux secteurs à la coopération;
décisions à l’unanimité. Depuis 2002, pendant la durée de
— il exprime la position commune sur les questions de chaque présidence, une réunion du Conseil européen se tient
relations extérieures. à Bruxelles. À partir du moment où l’Union a compté

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25 membres, toutes les réunions formelles du Conseil Le PE peut toutefois exercer une influence informelle:
européen ont commencé à se tenir à Bruxelles. Les — par la présence de son président aux réunions du Conseil
présidences restent cependant libres d’organiser des réunions européen, qui est devenue coutumière,
européennes informelles où elles le souhaitent.
— par les résolutions qu’il adopte sur les points à l’ordre du
Dans le cadre du traité de Lisbonne, une présidence à long jour des réunions, sur les résultats des travaux et sur les
terme serait introduite. Le président aurait un mandat de rapports formels que lui présente le Conseil européen.
trente mois, renouvelable une fois.
Dans le cadre du traité de Lisbonne, le nouveau haut
représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la
Rôle politique de sécurité deviendrait un élément supplémentaire
A. Place dans le système institutionnel de l’Union proposant de menant une politique étrangère au nom du
Conseil européen.
Conformément à l’article 3 du traité UE, le Conseil européen
appartient au «cadre institutionnel unique» de l’Union. Mais il C. Pouvoirs
impulse une politique globale davantage qu’il n’est un organe 1. Généralités
décisionnel, au sens juridique du terme. Il ne prend de
Le Conseil européen fournit à l’Union «l’impulsion nécessaire à
décisions ayant des conséquences juridiques pour l’Union que
son développement» et définit «les orientations politiques
dans des cas exceptionnels (voir point 2 ci-après). C’est,
générales» (article 4 du traité UE).
essentiellement, un organe intergouvernemental qui prend
des décisions à l’unanimité. 2. Questions de sécurité et de politique étrangère
Le Conseil européen définit les principes et les orientations
Ce n’est pas encore une institution communautaire. Lorsque le
générales de la politique étrangère et de sécurité commune
traité instituant la Communauté européenne confie une
(PESC) et décide de stratégies communes en vue de sa mise
décision aux chefs d’État ou de gouvernement, ceux-ci
en œuvre (article 13 du traité UE).
agissent en tant que Conseil au sens communautaire du mot
et non en tant que Conseil européen. C’est le cas: Il décide s’il convient de recommander aux États membres de
s’orienter vers une politique de défense commune
— des décisions ultimes d’autorisation de coopérations
conformément à l’article 17, paragraphe 1.
renforcées dans le domaine communautaire (article 11,
paragraphe 2, du traité CE); Si un État membre tente de s’opposer à l’adoption d’une
décision pour des raisons sérieuses liées à sa politique
— du choix des États membres qui remplissent les conditions nationale, le Conseil peut décider, par vote à la majorité
d’accès à la monnaie unique (article 121, paragraphe 4, du qualifiée, d’en référer au Conseil européen en vue de
traité CE). l’adoption d’une décision unanime (article 23, paragraphe 2,
Il en va de même lorsque le traité UE (article 7) donne au du traité UE). La même procédure peut être appliquée si les
Conseil, réuni au niveau des chefs d’État ou de gouvernement, États membres décident de mettre en œuvre une coopération
le pouvoir de déclencher la procédure de suspension des renforcée en la matière (article 27 C, alinéa 2, du traité UE).
droits d’un État membre par constatation d’une violation grave 3. Coopération politique et judiciaire
des principes de l’Union. en matière criminelle
B. Relations avec les autres institutions À la demande d’un membre, le Conseil européen décide s’il
convient de mettre en œuvre une coopération renforcée dans
Le Conseil européen prend ses décisions de manière
un domaine connexe (article 40 A, paragraphe 2, du traité UE)
totalement indépendante: à la différence du système
(4.12.1 et 4.12.2). Le traité de Lisbonne introduit plusieurs
communautaire, ces décisions ne supposent ni l’initiative de la
nouvelles clauses passerelles, permettant au Conseil européen
Commission ni la participation du Parlement européen.
de modifier la règle de décision au Conseil de l’unanimité à la
Le traité prévoit toutefois une liaison organique avec la majorité.
Commission, puisque son président fait partie du Conseil
européen, qui est par ailleurs assisté par un autre membre de Réalisations
la Commission. En outre, le Conseil européen demande
souvent à la Commission de lui présenter des rapports A. Appréciation générale
préparatoires à ses réunions. La création du Conseil européen a marqué un progrès du
processus de construction européenne, en ce sens que celle-ci
La seule liaison avec le Parlement prévue par le traité (article 4
était assez avancée pour justifier la réunion régulière des plus
du traité UE) est l’obligation faite au Conseil européen de
hautes instances politiques des États membres.
présenter au Parlement:
Le Conseil européen a été efficace pour arrêter les orientations
— un rapport à la suite de chacune de ses réunions,
générales de l’action de l’Union, mais aussi pour surmonter
— un rapport écrit annuel sur les progrès de l’Union. des blocages dans le système de décision communautaire.

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Le système de Les institutions et organes
1 fonctionnement de 3 de l’Union
l’Union européenne

On peut en revanche se demander si, en raison du caractère Le Conseil européen de Copenhague (12 et 13 décembre
intergouvernemental de son statut et de ses méthodes de 2002) a décidé de l’adhésion de la République tchèque, de
décision, le Conseil européen ne freine pas l’évolution fédérale Chypre, de l’Estonie, de la Hongrie, de la Lettonie, de la
de l’ensemble de la construction européenne et si, même, il ne Lituanie, de Malte, de la Pologne, de la Slovénie et de la
met pas en péril l’acquis supranational du système Slovaquie à dater du 1er mai 2004. La Bulgarie et la Roumanie
communautaire. sont entrées dans l’Union européenne le 1er janvier 2007.
B. Contributions sectorielles Le 3 octobre 2005, à Luxembourg, le Conseil a approuvé le
1. Politique étrangère et de sécurité cadre des négociations avec la Croatie et la Turquie
concernant leur adhésion à l’Union. Les négociations ont
La politique étrangère et de sécurité constitue, depuis le début
débuté juste après cette réunion.
des années 90, un élément primordial des réunions du Conseil
européen. Les décisions qu’il a prises dans ce domaine 3. Réforme institutionnelle
concernent notamment: Les réunions du Conseil européen à Madrid (juin 1989),
— la sécurité internationale, le désarmement et la lutte contre Strasbourg (décembre 1989), Dublin I (avril 1990) et Dublin II
le terrorisme; (juin 1990) ont revêtu une importance majeure dans le
processus qui a conduit à l’Union économique et monétaire et
— les relations transatlantiques; au traité sur l’Union européenne. Ainsi, le Conseil européen de
— les relations avec la Russie; Dublin d’avril 1990 a décidé que la Conférence
intergouvernementale sur l’Union économique et monétaire
— les relations avec les pays méditerranéens;
entamerait ses travaux en décembre 1990 et qu’une seconde
— les relations avec l’Asie et l’Amérique latine; Conférence intergouvernementale serait convoquée sur le
— le règlement des conflits de l’ex-Yougoslavie thème de l’union politique.
et du Proche-Orient. De même, la réunion spéciale de mars 1996 à Turin a marqué
À Helsinki (les 10 et 11 décembre 1999), le Conseil européen a l’ouverture officielle de la Conférence intergouvernementale
décidé de renforcer la politique commune en matière de qui a abouti aux réformes des traités approuvées par le Conseil
sécurité et de défense, en développant les moyens militaires et européen d’Amsterdam en juin 1997. Le Conseil européen de
civils de gestion des crises et en prévoyant en particulier de Tampere (15 et 16 octobre 1999) a décidé des modalités
lancer et de conduire des opérations militaires sous la direction d’élaboration du projet de charte des droits fondamentaux de
de l’Union européenne en réponse à des crises internationales. l’Union européenne (2.1). Celui de Helsinki (décembre 1999)
a convoqué la Conférence intergouvernementale qui a
Une stratégie européenne de sécurité a été approuvée par le préparé le traité de Nice.
Conseil européen à Bruxelles le 12 décembre 2003.
Le Conseil européen de Laeken (14 et 15 décembre 2001) a
2. Élargissement décidé de réunir une Convention sur l’avenir de l’Europe
Le Conseil européen a posé les conditions de chaque série de (1.1.4) dans la perspective de la prochaine Conférence
négociations d’élargissement de l’Union européenne. À intergouvernementale, voulue aussi large et ouverte que
Édimbourg, en 1992, il a décidé d’engager les négociations possible. La Convention a présenté son projet de traité
d’adhésion de plusieurs États membres de l’Association établissant une Constitution pour l’Europe lors du Conseil
européenne de libre-échange (AELE). À Copenhague, en 1993, européen de Thessalonique de juin 2003. Après une brève
il a jeté les bases d’une nouvelle vague d’adhésions (critères de Conférence intergouvernementale, le traité établissant une
Copenhague). Les réunions des années suivantes ont précisé Constitution pour l’Europe a été signé au mois d’octobre 2004
les critères d’admission et les réformes institutionnelles à Rome par les chefs d’État ou de gouvernement (1.1.5).
préalables. Le Conseil européen de Luxembourg de décembre
Après deux ans et demi d’impasse institutionnelle, le Conseil
1997 a pris les décisions permettant le lancement des
européen des 21 et 22 juin 2007 a adopté un mandat détaillé
négociations d’adhésion avec les pays d’Europe centrale et
pour la Conférence intergouvernementale menant à la
orientale et Chypre.
signature du traité de Lisbonne.
Le Conseil européen de Helsinki (décembre 1999) a décidé
d’ouvrir les négociations d’adhésion avec la Bulgarie, la
Lettonie, Malte, la Roumanie et la Slovaquie et de reconnaître g Wilhelm LEHMANN
Juillet 2008
la Turquie comme un pays candidat, marquant ainsi le passage
à une nouvelle étape du processus d’élargissement.

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1.3.8. La Commission
La Commission est l’institution européenne ayant le monopole de l’initiative législative. C’est l’organe exécutif de la
Communauté européenne et elle se compose d’un collège de commissaires, regroupant un commissaire par État membre
jusqu’en 2009. Les comités et les groupes de travail mis en place par le Conseil peuvent être associés aux pouvoirs de mise
en œuvre de la Commission.

Base juridique — après que cette approbation a été donnée, les États
membres ont nommé les autres commissaires, d’un
Articles 211 à 219 du traité CE
commun accord avec le président nommé;

Historique — enfin, après une dernière approbation donnée par le


Parlement, les commissaires ont été nommés.
La Commission est l’organe exécutif unique de la
Communauté. Initialement, chaque Communauté était dotée Le traité de Nice introduit les modifications suivantes:
de son propre exécutif: Haute Autorité pour la Communauté — le Conseil, à la majorité qualifiée, désigne la personne qu’il
européenne du charbon et de l’acier (1951), Commission pour souhaite nommer président de la Commission. Le traité de
chacune des deux Communautés créées par les traités de Lisbonne stipule que la sélection du candidat doit tenir
Rome (1957), CEE et Euratom. Ces trois exécutifs ont été compte des résultats des élections européennes. Cette
fusionnés en un seul, la Commission européenne, par le traité nomination doit être approuvée par le Parlement
du 8 avril 1965, avec effet au 1er juillet 1967 (1.1.2). européen;
— le Conseil, à la majorité qualifiée, et d’un commun accord
Composition et statut avec le candidat désigné à la présidence, approuve la liste
des autres candidats aux postes de membres de la
A. Nombre de membres
Commission, en conformité avec les propositions faites par
La Commission a longtemps compris un à deux commissaires chacun des États membres;
par État membre. La pratique était d’en attribuer deux aux
cinq pays les plus peuplés, un aux autres. — le président et les autres membres de la Commission
doivent être approuvés en tant qu’organe par le Parlement
Depuis le 1er novembre 2004, la Commission compte un européen et nommés par le Conseil, à la majorité qualifiée.
commissaire par État membre. Quand l’Union a atteint le
nombre de vingt-sept États membres le 1er janvier 2007, le C. Personnalité juridique
nombre des commissaires aurait dû être inférieur à celui des 1. Durée du mandat
États membres. Les membres de la Commission seront Depuis le traité de Maastricht, le mandat de membre de la
sélectionnés au moyen d’un système de rotation fondé sur le Commission a été calqué sur la législature du Parlement
principe d’égalité. Ce nouveau système ne sera introduit que européen, soit cinq ans. Il est renouvelable.
lors de la désignation de la nouvelle Commission en 2009.
2. Responsabilité individuelle (articles 213, paragraphe 2,
Le traité de Lisbonne prévoit un nombre de commissaires et 216 du traité CE)
correspondant aux deux tiers du nombre d’États membres. Les membres de la Commission:
Cependant, ce principe n’entrerait en vigueur qu’à partir du
— exercent leurs fonctions en pleine indépendance, dans
1er novembre 2014 et le Conseil européen aurait toujours le
l’intérêt général de la Communauté, en particulier ils ne
droit de décider à l’unanimité de modifier le nombre de
sollicitent ni n’acceptent d’instruction extérieure (venant
commissaires. Les membres de la Commission devraient être
d’un gouvernement comme de tout autre organisme);
sélectionnés parmi les ressortissants des États membres sur la
base d’un système de rotation égale reflétant de manière — ne peuvent exercer aucune autre activité professionnelle,
satisfaisante la taille démographique et géographique de tous rémunérée ou non.
les États membres (article 17 du traité UE, tel que modifié). Un membre de la Commission peut être démis d’office par la
Cour de justice, à la demande du Conseil ou de la Commission
B. Méthode de nomination
elle-même:
Selon les termes du traité d’Amsterdam, la nomination de la
Commission s’est déroulée comme suit: — en cas de violation de ces obligations;

— le candidat des États membres à la présidence de la — s’il ne remplit plus les conditions nécessaires à l’exercice de
Commission a dû d’abord recueillir l’approbation du ses fonctions;
Parlement; — ou s’il a commis une faute grave.

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Le système de Les institutions et organes
1 fonctionnement de 3 de l’Union
l’Union européenne

3. Responsabilité collective nationales. Cette préoccupation était l’un des éléments du


La Commission est collectivement responsable devant le «compromis de Luxembourg» de 1966. Ce document (qui est
Parlement, en vertu de l’article 201 du traité CE. Si ce dernier une déclaration sans valeur juridique; 1.1.2 et 1.3.6) exprime le
adopte une motion de censure à son encontre, l’ensemble de souhait que, pour les propositions les plus délicates (dites
ses membres doivent abandonner leurs fonctions. «d’importance particulière»), la Commission prenne contact
avec les gouvernements des États membres avant de les
élaborer, mais ajoute que cette consultation ne doit pas porter
Organisation et fonctionnement atteinte à son droit d’initiative.
A. Répartition des tâches et organisation administrative
b. Initiative budgétaire
La Commission travaille sous la direction de son président, qui
C’est la Commission qui élabore l’avant-projet de budget, qui
décide de son organisation externe, afin d’assurer la
est soumis au Conseil [article 272, paragraphes 2 et 3, du traité
cohérence, l’efficacité et la collégialité de son action.
CE (1.4.3)].
Le président répartit les secteurs d’activité entre les membres.
Chaque commissaire a ainsi la responsabilité d’un secteur c. Initiative dans la conduite des relations de la Communauté
déterminé et l’autorité sur les services administratifs avec les pays tiers
correspondants. La Commission est chargée de négocier les accords
internationaux (articles 133 et 300 du traité CE), qui sont
Après avoir obtenu l’approbation du collège, le président
ensuite soumis au Conseil pour conclusion.
nomme les vice-présidents, choisis parmi les membres. Un
membre de la Commission devra se démettre, si le président le 2. L’initiative limitée: pouvoir de recommandation
demande, et après que celui-ci a obtenu l’approbation de ses ou d’avis
collègues. Cette forme d’initiative se différencie de la précédente d’abord
La Commission dispose d’un secrétariat général comprenant parce qu’elle ne donne pas toujours l’exclusivité à la
27 directions générales et 19 services spécialisés (notamment Commission, ensuite parce qu’elle ne constitue pas la seule
l’Office de lutte antifraude, le service juridique, Eurostat et base de décision pour l’instance décisionnelle.
l’Office des publications).
a. Dans le cadre de l’Union économique et monétaire (UEM)
B. Méthode de décision La Commission joue un rôle important dans la mise en place
Sauf quelques exceptions, la Commission prend ses décisions de l’UEM: pour le passage à la troisième phase (1999), elle était
à la majorité (article 17 du traité de fusion). Le principe ainsi chargée de présenter un rapport au Conseil sur le respect par
établi est celui de la responsabilité collégiale. les États membres des conditions d’accès ainsi que des
recommandations concernant l’accès de tel ou tel État
(article 121 du traité CE); il en ira de même à l’avenir pour
Pouvoirs
l’accès de nouveaux États.
Dépositaire de l’intérêt commun, la Commission est le centre
d’impulsion de l’action communautaire et la garante de son La Commission joue un rôle dans la gestion de l’UEM. Elle
application. soumet au Conseil:

A. Pouvoirs d’initiative — des recommandations pour l’élaboration d’un projet de


grandes orientations de politique économique des États
La Commission, en règle générale, a le monopole de l’initiative
membres (article 99, paragraphe 2);
des décisions communautaires et élabore à ce titre les
propositions sur lesquelles trancheront les deux institutions — des rapports sur l’évolution économique des États
décisionnelles que sont le Parlement européen et le Conseil. membres (article 99, paragraphe 3);
1. La pleine initiative: le pouvoir de proposition — des recommandations sur l’attitude à adopter à l’égard des
Le pouvoir de proposition constitue la forme complète du États qui s’écartent des orientations établies (article 99,
pouvoir d’initiative en ce sens, d’une part, qu’il est toujours paragraphe 4);
exclusif, d’autre part, qu’il est relativement contraignant pour
— des propositions de mesures en cas de graves difficultés
l’autorité décisionnelle qui ne peut décider sans proposition ni
économiques dans la Communauté ou dans un État
sur d’autres bases que la proposition présentée.
membre (article 100, paragraphes 1 et 2);
a. Initiative législative
— des avis et des recommandations en cas de déficit public
La Commission élabore et présente au Conseil et au Parlement
excessif d’un État membre (article 104, paragraphes 5 et 6);
toutes les propositions législatives (règlements et directives)
que requiert la mise en œuvre des traités (1.4.1). Dans — des propositions pour confier à la Banque centrale
l’élaboration de ces propositions, la Commission tient européenne des missions de contrôle prudentiel des
généralement compte des orientations des autorités établissements de crédit (article 105, paragraphe 6);

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— des propositions (à défaut de celles de la Banque centrale traité CE a même été modifié par l’Acte unique (article 202)
européenne) pour la modification des statuts du Système pour imposer au Conseil l’obligation de conférer ces
européen de banques centrales (article 107, paragraphe 6); compétences, mais en lui permettant:
— des recommandations concernant le taux de change entre — de se réserver le pouvoir d’exécution dans des cas
la monnaie unique et les autres monnaies et pour les spécifiques;
orientations générales de la politique de change
(article 111); — quand il confie ce pouvoir à la Commission, de le
soumettre à certaines modalités.
— des recommandations sur les mesures à prendre en cas de
difficultés dans la balance des paiements d’un État C’est dans le cadre de ces «modalités» que le Conseil a pris
membre (article 119). l’habitude de créer des «comités» composés de fonctionnaires
nationaux qui sont associés au pouvoir d’exécution de la
b. Dans le cadre de la politique extérieure et de défense commune Commission. Certains de ces comités ne sont que consultatifs,
et de la coopération policière et judiciaire mais d’autres permettent de brider (comités de gestion) voire
Dans ces domaines, non seulement la Commission est d’absorber (comités de réglementation) les pouvoirs de la
pleinement associée aux travaux du Conseil, mais elle peut Commission. En ce qui concerne les règles de concurrence
(comme les États membres) saisir ce dernier de toute s’appliquant aux entreprises, comme la pratique concertée et
proposition (articles 22 et 34, paragraphe 2, du traité UE). Le l’abus de position dominante, les actes réglementaires du
haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la Conseil confèrent d’importants pouvoirs de mise en œuvre à la
politique de sécurité prévu par le traité de Lisbonne sera vice- Commission (3.3.1 et 3.3.2).
président de la Commission. Par conséquent, la Commission
jouera un rôle plus important en matière de politique Le Parlement européen a régulièrement dénoncé les
étrangère. En ce qui concerne les domaines couverts conséquences néfastes de cette «comitologie» qui devenait
anciennement par le troisième pilier, la plupart seront soumis à tout à fait inadaptée à la généralisation de la procédure de
la procédure législative générale. codécision (voir en particulier sa résolution du 13 décembre
1990). La décision du Conseil (1999) «instituant les procédures
B. Pouvoirs de contrôle de l’application d’exercice des pouvoirs d’exécution conférés à la Commission»
du droit communautaire a favorisé l’intervention du Parlement européen dans les
Les traités communautaires confient à la Commission le soin procédures de comitologie en lui reconnaissant un droit à
de veiller à leur bonne application et à celle des décisions l’information et au contrôle.
prises pour les mettre en œuvre (droit dérivé). C’est son rôle de
À l’issue de longues négociations entre les trois institutions,
«gardienne des traités». Il s’agit avant tout de la «procédure
une nouvelle procédure de comité («procédure de
en manquement» à l’égard des États membres (article 226 du
réglementation avec contrôle») a été introduite par la décision
traité CE): si la Commission estime qu’un État a manqué à l’une
2006/512/CE du Conseil du 17 juillet 2006. Le Parlement a
des obligations qui lui incombent, elle peut déclencher la
modifié son règlement en conséquence (résolution du
procédure en le mettant en demeure de présenter ses
14 décembre 2006). Cette nouvelle procédure autorise le
observations; si ces dernières ne la satisfont pas, elle émet un
Parlement et le Conseil à contrôler les mesures quasi
avis motivé lui demandant de se mettre en règle dans un
législatives d’exécution d’un instrument adopté par voie de
certain délai; passé ce délai, elle peut demander à la Cour de
codécision et à rejeter ces mesures.
justice de trancher.

C. Pouvoirs d’exécution D. Pouvoirs réglementaires


1. Conférés par les traités eux-mêmes Il est assez rare que les traités aient donné à la Commission un
Il s’agit essentiellement: pouvoir réglementaire propre. On citera:

— de l’exécution du budget (article 274 du traité CE); 1. Les dispositions «obsolètes»

— du pouvoir d’autoriser les États à prendre les mesures de — L ’établissement de prélèvements sur les entreprises dans le
sauvegarde que les traités prévoient, en particulier cadre du traité CECA.
pendant les périodes de transition; — Le rythme de suppression des taxes et mesures d’effet
— de pouvoirs en matière de règles de concurrence, en équivalant à des droits de douane ou à des restrictions
particulier le contrôle des aides d’État (article 88, quantitatives pendant la période transitoire du traité de
paragraphe 2). Rome (mise en place de l’union douanière).

2. Issus d’une délégation du Conseil 2. Les dispositions toujours actuelles


Les traités (article 124 du traité CEEA et article 211 du traité CE) L’application des règles communautaires aux entreprises
prévoient que la Commission exerce les compétences que lui publiques et aux entreprises de service public (article 86,
confère le Conseil pour l’exécution des règles qu’il établit. Le paragraphe 3, du traité CE).

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Le système de Les institutions et organes
1 fonctionnement de 3 de l’Union
l’Union européenne

E. Pouvoirs consultatifs Enfin la Commission est consultée sur le statut des membres
Les traités ont donné à la Commission un pouvoir général de du Parlement européen et sur celui du Médiateur.
recommandation et d’avis (article 211 du traité CE).
Ils prévoient aussi sa consultation pour la prise de certaines g Wilhelm LEHMANN
décisions: c’est le cas en particulier des décisions d’admission de Juillet 2008
nouveaux membres au sein de l’Union (article 49 du traité UE).

1.3.9. La Cour de justice et le Tribunal


de première instance
La juridiction de l’Union européenne est de la compétence de la Cour de justice des Communautés européennes, du
Tribunal de première instance des Communautés européennes et, depuis le 2 novembre 2004, du Tribunal de la fonction
publique de l’Union européenne. Ces organes assurent la bonne interprétation et application du droit primaire et du droit
dérivé de l’Union européenne.

I. La Cour de justice des Communautés B. Caractères du mandat


européennes 1. Durée (article 223 et statut)
Six ans.
Renouvellement partiel tous les trois ans:
Base juridique
— Articles 220, 226, deuxième alinéa, 227, 230, 232, 234 à 237 — alternativement de quatorze et treize juges;
et 300 du traité CE — de la moitié des avocats généraux.
— Article 136 du traité Euratom Les sortants peuvent être nommés à nouveau.
— Protocole, annexé aux traités, fixant le statut de la Cour de 2. Privilèges et immunités (statut)
justice Juges et avocats généraux jouissent de l’immunité de
— Certains accords internationaux juridiction. Pour leurs actes officiels, ils continuent à bénéficier
de cette immunité après la cessation de leurs fonctions.

Composition et statut Ils ne peuvent être relevés de leurs fonctions que par décision
unanime de la Cour.
A. Composition
3. Obligations (statut)
1. Nombre (articles 221 et 222)
Les juges et avocats généraux:
Un juge par État membre, donc vingt-sept actuellement
— prêtent serment (indépendance, impartialité, respect du
Huit avocats généraux, nombre qui peut-être augmenté par le secret) avant d’entrer en fonctions;
Conseil à la demande de la Cour
— ne peuvent exercer aucune fonction politique ou
2. Conditions à remplir (article 223) administrative ni aucune activité professionnelle;
Il faut:
— s’engagent à respecter les obligations découlant de leur
— réunir les conditions requises pour exercer les plus hautes charge.
fonctions juridictionnelles nationales ou être un
jurisconsulte possédant des compétences notoires; Organisation et fonctionnement (article 223
— offrir toutes garanties d’indépendance. et statut)
3. Procédure de désignation (article 223) A. Organisation interne
Juges et avocats généraux sont nommés d’un commun La Cour désigne son président en son sein pour trois ans
accord par les gouvernements des États membres. renouvelables.

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Elle nomme son greffier. est tenue de prendre les mesures que comporte l’exécution de
l’arrêt de la Cour (article 233).
B. Fonctionnement
c. Autres recours directs
La Cour établit son règlement de procédure qui est soumis à
l’approbation du Conseil statuant à la majorité qualifiée. Recours contre les décisions de la Commission infligeant des
sanctions aux entreprises (article 229)
La Cour siège en chambres (de trois ou cinq juges), en grande
chambre (onze juges) ou en assemblée plénière [ces Recours en indemnité pour réparation des dommages causés
différentes formations sont des innovations du traité de Nice par les institutions ou leurs agents (article 235)
( 1.1.4)]. Recours des fonctionnaires et agents communautaires contre
leurs institutions (article 236) — compétence actuellement
Attributions dévolue au Tribunal de la fonction publique (voir ci-après)
Recours relatifs aux contrats conclus par la Communauté
A. Rôle fondamental
(article 238)
Assurer «le respect du droit dans l’interprétation et
l’application» des traités (article 220). 2. Recours indirect: l’exception d’illégalité soulevée
devant une juridiction nationale (article 234)
B. Compétences Le juge national applique normalement le droit
1. Recours directs contre les États membres communautaire lui-même lorsqu’une affaire comporte
ou les institutions communautaires. l’application de ce droit. Mais lorsqu’une question
La Cour se prononce sur les recours dirigés contre les États ou d’interprétation de ce droit est soulevée devant une juridiction
les institutions pour non-respect de leurs obligations au regard nationale, cette juridiction peut demander à la Cour de justice
du droit communautaire. de statuer, à titre préjudiciel, sur cette question. S’il s’agit d’une
juridiction de dernier ressort, la saisine de la Cour est
a. Recours en manquement contre les États membres obligatoire.
Ces recours sont introduits:
3. Compétence de second degré de juridiction
— soit par la Commission, après une procédure La Cour est également compétente pour connaître des
précontentieuse (article 226): mise en demeure de l’État de pourvois limités aux questions de droit dirigés contre les arrêts
présenter ses observations, avis motivé (1.3.8); du Tribunal de première instance. Le pourvoi n’a pas d’effet
— soit par un autre État membre après saisine préalable de la suspensif.
Commission (article 227). La Cour connaît également du réexamen des décisions soit
Rôle de la Cour: rendues par les chambres juridictionnelles (voir ci-après,
Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne), soit
— reconnaître que l’État a manqué à ses obligations, auquel rendues par le Tribunal de première instance sur des questions
cas cet État est tenu de prendre des mesures pour s’y préjudicielles. La procédure de réexamen est une procédure
conformer; exceptionnelle, limitée aux risques sérieux d’atteinte à l’unité
— si la Commission estime que ces mesures n’ont pas été ou à la cohérence du droit communautaire.
prises, elle peut (après procédure précontentieuse comme Dans la mesure où l’arrêt de la Cour peut avoir un impact sur la
prévue plus haut) proposer à la Cour de condamner l’État solution du litige ayant fait l’objet de la décision de première
membre à payer une somme forfaitaire ou une astreinte instance, il ne s’agit toutefois pas d’un pourvoi dit «dans
dont le montant est déterminé par la Cour sur proposition l’intérêt de la loi».
de la Commission (article 228).
b. Recours en annulation ou en carence contre les institutions Réalisations
communautaires
La Cour de justice s’est révélée être un facteur très
Objet: cas où les institutions ont adopté des actes contraires important — certains disent même un élément moteur —
au droit communautaire (annulation: article 230) ou, en de l’intégration européenne.
violation de ce même droit, se sont abstenues d’en adopter
(carence: article 232). 1. En général
Son arrêt du 15 juillet 1964 Costa/Enel a été fondamental pour
Saisine: les recours peuvent être introduits par les États
la compréhension du droit communautaire européen comme
membres, les institutions elles-mêmes et toute personne
ordre juridique autonome, ayant primauté sur les dispositions
physique ou morale lorsqu’il s’agit d’une décision dont elle est
juridiques nationales, et son arrêt du 5 février 1963 Van Gend
la destinataire.
et Loos, pour le principe de l’application immédiate du droit
Rôle de la Cour: la Cour annule l’acte illégal ou constate la communautaire devant les tribunaux des États membres. Il
violation de l’obligation d’agir, auquel cas l’institution fautive faut rappeler certains arrêts significatifs en matière de

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Le système de Les institutions et organes
1 fonctionnement de 3 de l’Union
l’Union européenne

protection des droits de l’individu, tels que l’arrêt du 14 mai Protocole annexé aux traités fixant le statut de la Cour de
1974, dans l’affaire Nold, dans lequel la Cour a affirmé, entre justice (titre IV)
autres, que les droits fondamentaux font partie intégrante des
Le Tribunal de première instance a été créé par décision du
principes généraux du droit dont elle assure le respect (2.1).
Conseil de 1988 prise en application de l’Acte unique (1986),
2. Dans des matières particulières qui prévoyait la possibilité de cette création. Il a été intégré au
traité CE par le traité de Maastricht (1991). Le traité de Nice a
a. D
 roit d’établissement: arrêt du 8 avril 1976 dans l’affaire
supprimé son statut de juridiction «adjointe» à la Cour et a
Royer, dans lequel la Cour a confirmé le droit, pour un
étendu ses compétences.
ressortissant d’un État membre, de séjourner sur le
territoire d’un autre État membre, indépendamment de
tout titre de séjour délivré par l’État d’accueil. Composition et statut (article 224 du traité CE)
b. L ibre circulation des marchandises: arrêt du 20 février 1979 A. Composition
dans l’affaire Cassis de Dijon, dans lequel la Cour a statué 1. Nombre
que tout produit légalement fabriqué et commercialisé Un juge par État membre, donc vingt-sept actuellement.
dans un État membre doit être, en principe, admis sur le
Les juges peuvent être appelés à exercer les fonctions d’avocat
marché de tout autre État membre.
général.
c. C
 ompétences extérieures de la Communauté: arrêt AETR 2. Conditions à remplir
du 31 mars 1971 dans l’affaire Commission/Conseil,
Posséder la capacité requise pour l’exercice de hautes
reconnaissant à la Communauté la compétence de
fonctions juridictionnelles.
conclure des accords internationaux dans les domaines
faisant l’objet de règles communautaires. Offrir toutes garanties d’indépendance.
d. A
 rrêts récents ayant établi l’obligation de 3. Procédure de désignation
dédommagement des États membres n’ayant pas Les juges sont nommés d’un commun accord par les
transposé ou ayant transposé tardivement les directives gouvernements des États membres.
dans la législation nationale.
B. Caractères du mandat
e. D
 ivers arrêts en matière de sécurité sociale et de Identiques à ceux de la Cour de justice.
concurrence.
f. J urisprudence se rapportant aux violations du droit Organisation et fonctionnement
communautaire commises par les États membres, activité
A. Organisation interne
essentielle pour le bon fonctionnement du marché
commun. Le Tribunal désigne son président en son sein pour trois ans
renouvelables.
On ajoutera que l’un des principaux mérites de la Cour a été
Il nomme son greffier.
d’énoncer le principe selon lequel les traités communautaires
ne doivent pas être interprétés de façon rigide, mais B. Fonctionnement
considérés à la lumière de l’état de l’intégration et des objectifs En accord avec la Cour de justice, le Tribunal établit son
fixés par les traités eux-mêmes. Ce principe a en effet permis à règlement de procédure, qui est soumis à l’approbation du
la Communauté de légiférer dans certains domaines qui ne Conseil.
font pas l’objet de dispositions particulières dans les traités, par
exemple celui de la lutte contre la pollution [dans un arrêt du Le Tribunal siège en chambre de trois ou cinq juges. Son
13 septembre 2005 (affaire C-176/03, Commission des règlement de procédure détermine les cas où il peut siéger en
Communautés européennes contre Conseil de l’Union formation plénière, en grande chambre ou à juge unique.
européenne), la Cour a en effet permis à la Communauté Cette dernière solution s’applique notamment aux affaires de
européenne d’édicter des normes dans le domaine pénal dès fonction publique, de contrats passés par la Communauté et
lors que celles-ci paraissaient «nécessaires» pour atteindre de recours des particuliers contre les institutions, lorsque ces
l’objectif poursuivi en matière de protection de affaires ne soulèvent pas de difficultés de droit ou de fait et
l’environnement]. sont d’importance limitée.

II. Le Tribunal de première instance Attributions


A. Compétences du Tribunal de première instance
(article 225)
Base juridique
Le Tribunal connaît en première instance des recours portant
Articles 224 et 225 du traité CE, article 40 du traité Euratom sur les matières suivantes, sauf si ces recours émanent des

63

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États membres, des institutions communautaires ou de la «chambres juridictionnelles chargées de connaître en première
Banque centrale européenne, auxquels cas ils sont de la instance de certaines catégories de recours formés dans des
compétence exclusive de la Cour de justice (article 51 du matières spécifiques». En application de cette disposition, la
statut): décision du Conseil du 2 novembre 2004 institue un «Tribunal
— recours en annulation ou en carence formés contre les de la fonction publique de l’Union européenne» (JO L 333 du
institutions (articles 230 et 232); 9.11.2004, p. 7).

— réparation des dommages causés par les institutions Cette décision précise que les décisions de ce Tribunal sont
(article 235); susceptibles de pourvois devant le Tribunal de première
instance. Ces pourvois sont non suspensifs, limités aux
— litiges relatifs aux contrats conclus par la Communauté questions de droit portant sur les moyens et relatifs à
(article 238). l’incompétence du Tribunal, aux irrégularités de procédure
Le statut peut étendre la compétence du Tribunal à d’autres portant atteinte aux intérêts de la partie concernée ainsi qu’à
matières. la violation du droit communautaire.
Les décisions rendues par le Tribunal en première instance
sont susceptibles de pourvoi devant la Cour de justice, mais Le traité de lisbonne
uniquement sur des questions de droit. L’entrée en vigueur du traité de Lisbonne apporterait des
modifications sur les points suivants:
B. Compétence de premier et dernier ressort
Le Tribunal connaît des questions préjudicielles (article 234) — la nomination des candidats aux fonctions de juge et
dans les matières déterminées par le statut. Toutefois, les d’avocat général pressentis par les États membres sera
décisions qu’il rend à ce titre peuvent exceptionnellement faire préalablement soumise à l’évaluation d’un comité de
l’objet d’un réexamen par la Cour, «en cas de risque sérieux sept personnalités, dont l’une désignée par le
d’atteinte à l’unité ou à la cohérence du droit communautaire». Parlement européen;
Le réexamen n’a pas d’effet suspensif. — les actes du Conseil européen et des organes ou
Il ne s’agit toutefois pas d’un pourvoi dans l’intérêt de la loi organismes (agences, offices, etc) destinés à produire des
dans la mesure où l’arrêt rendu par la Cour est susceptible effets juridiques vis-à-vis des tiers seront désormais soumis
d’avoir un impact sur le règlement du litige ayant fait l’objet de à un contrôle juridictionnel de légalité;
l’arrêt du Tribunal: — prenant en compte l’évolution de la jurisprudence, les
— dans les cas de réexamen des décisions du Tribunal de conditions de recevabilité des recours des personnes
première instance ayant statué sur recours contre les physiques et morales contre des actes réglementaires
décisions des chambres juridictionnelles (voir ci-après), la seront facilitées;
Cour renvoie l’affaire devant le Tribunal, qui est lié par les — le recours en carence est étendu au Conseil européen, à la
points de droit tranchés par la Cour. La Cour statue Banque centrale européenne et aux autres organes et
toutefois définitivement si la solution du litige découle des organismes de l’Union qui s’abstiennent de statuer;
mêmes constatations de fait que celles portées devant le
Tribunal, compte tenu du réexamen par la Cour; — les actes pris dans le domaine de la coopération judiciaire
pénale et de la coopération policière pourront faire
— dans les cas de réexamen des décisions du Tribunal de pleinement l’objet d’un recours juridictionnel, sauf en ce
première instance ayant statué sur des questions qui concerne le contrôle de la validité et de la
préjudicielles, la réponse aux questions apportée par la proportionnalité d’opérations policières, ainsi que l’exercice
Cour se substitue à celle du Tribunal (article 62 du par les États membres de leurs responsabilités en matière
règlement de procédure de la Cour). de maintien de l’ordre public et de sauvegarde de la
C. Compétence d’appel sécurité intérieure;
Si le Conseil décide de faire usage de la possibilité de créer des — si les actes adoptés dans le domaine de la politique
chambres juridictionnelles chargées de connaître en première extérieure et de sécurité commune échappent toujours au
instance de certaines catégories de recours, les décisions de contrôle de la Cour, celle-ci devient compétente pour
ces chambres peuvent être déférées au Tribunal en appel. connaître des recours quant à la légalité des mesures
restrictives prises à l’encontre de personnes physiques ou
III. Le Tribunal de la fonction publique morales.
de l’Union européenne Dans le cadre de l’action en manquement, une importante
avancée est également enregistrée: lorsqu’elle saisit la Cour en
Afin de soulager le Tribunal de première instance d’une partie manquement contre un État membre qui n’a pas
de son contentieux, l’article 225 A du traité CE, introduit par le communiqué ses mesures de transposition d’une directive, la
traité de Nice, prévoyait la possibilité d’instaurer des Commission pourra désormais indiquer à la Cour, dès le

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1 fonctionnement de 3 de l’Union
l’Union européenne

premier recours en manquement, le montant d’une somme l’accident nucléaire de Tchernobyl, la Cour a reconnu au
forfaitaire ou d’une astreinte à imposer à l’État membre. Parlement le droit de former un recours en annulation devant
la Cour (article 230 du traité CE) pour la sauvegarde de ses
Enfin, les modifications au statut de la Cour relèveront de la
prérogatives dans le cadre de la procédure législative.
procédure législative ordinaire et non plus d’une décision du
Conseil à l’unanimité. Le traité de Nice étend cette capacité du Parlement européen
d’ester devant la Cour en annulation, qui n’est dès lors plus
Rôle du Parlement européen limitée à la défense de ses prérogatives.
Depuis un arrêt rendu en 1990 sur un recours du Parlement
européen dans le cadre de la procédure législative sur g Claire GENTA
l’adoption des mesures sanitaires à prendre à la suite de Juillet 2008

1.3.10. La Cour des comptes


La Cour des comptes européenne est chargée de l’audit des finances de l’Union européenne. En tant qu’auditeur externe de
l’Union, elle contribue à l’amélioration de la gestion financière de l’Union européenne et est la gardienne indépendante
des intérêts financiers des citoyens européens.

Base juridique 2. Statut


— Articles 246 à 248, 279 et 280 du traité CE Les membres de la Cour bénéficient des mêmes privilèges et
immunités que ceux dont bénéficient les juges de la Cour de
— Le traité UE a élevé la Cour des comptes au rang
justice.
d’institution communautaire en modifiant en ce sens
l’article 7 du traité CE. 3. Obligations
Les membres «exercent leurs fonctions en pleine
Structure indépendance, dans l’intérêt général de la Communauté».
En particulier:
A. Composition
1. Nombre — ils ne sollicitent ni n’acceptent aucune instruction
Un membre par État membre (le traité de Nice a officialisé ce extérieure;
qui n’était jusque-là que la pratique), soit actuellement 27. — ils s’abstiennent de tout acte incompatible avec le
2. Conditions à remplir caractère de leurs fonctions;
Il faut: — ils ne peuvent exercer aucune autre activité
— appartenir ou avoir appartenu dans son pays aux professionnelle, lucrative ou non;
institutions de contrôle externe ou posséder une — la violation de ces obligations peut aboutir à la démission
qualification particulière pour la fonction; d’office prononcée par la Cour de justice.
— offrir toutes les garanties d’indépendance.
C. Organisation
3. Procédure de désignation
La Cour désigne son président en son sein, pour trois ans
Les membres de la Cour sont nommés:
renouvelables.
— par le Conseil à la majorité qualifiée;
— sur proposition de chaque État membre pour le siège Attributions
qui lui revient;
A. Les audits de la Cour des comptes
— après consultation du Parlement européen.
1. Domaine de compétence
B. Caractéristiques du mandat La compétence de la Cour couvre toutes les opérations de
1. Durée recettes et de dépenses de la Communauté et de tout
Le mandat est de six ans, renouvelable. Celui du président est organisme créé par la Communauté (sauf exclusion prévue par
de trois ans renouvelable. l’acte de fondation de l’organisme en cause). La Cour conduit

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ses audits de manière à obtenir une assurance raisonnable — fixe les modalités et la procédure selon lesquelles les
quant: ressources propres de la Communauté sont mises à la
disposition de la Commission;
— à la fiabilité des comptes annuels des Communautés;
— détermine les règles relatives à la responsabilité des
— à la légalité et à la régularité des opérations sous-jacentes;
contrôleurs financiers, ordonnateurs et comptables;
— à la bonne gestion financière. — arrête des mesures de lutte contre la fraude.
2. Moyens d’investigation
Le contrôle de la Cour est permanent; il peut notamment Rôle du Parlement européen
s’effectuer avant la clôture de l’exercice budgétaire considéré. La Cour des comptes a été créée en 1977 sur l’initiative du
Le contrôle a lieu sur pièces et aussi, si nécessaire, sur place, Parlement européen. Depuis lors, elle assiste le Parlement
c’est-à-dire auprès: européen et le Conseil dans l’exercice de leur fonction de
contrôle de l’exécution du budget.
— des institutions communautaires;
Une pomme de discorde a été l’absence d’une déclaration
— de tout organisme gérant des recettes ou des dépenses au d’assurance positive non qualifiée. La déclaration d’assurance
nom de la Communauté; annuelle de la Cour avait en effet toujours été assortie de
— de toute personne physique ou morale bénéficiaire de réserves ces dernières années et avait été critiquée à maintes
versements issus du budget communautaire. reprises par le Parlement européen, notamment dans ses
résolutions de décharge dans lesquelles il faisait des
Le contrôle dans les États membres se fait en liaison avec les propositions concrètes sur la façon de parvenir à une
institutions ou services nationaux compétents. déclaration d’assurance positive. La Cour des comptes a réagi
Les organismes précités sont tenus de communiquer à la Cour en suggérant d’élaborer un cadre de contrôle interne
tout document ou information qu’elle estime nécessaire à communautaire, fondé sur des normes et des principes
l’accomplissement de sa mission. communs, qui devrait être mis en œuvre à tous les niveaux
d’administration tant dans les institutions que dans les États
3. Principales publications membres (avis n° 2/2004 de la Cour des comptes sur le
À la suite de ses audits, la Cour des comptes fournit au modèle de «contrôle unique»).
Parlement européen et au Conseil une déclaration La Commission a accepté cette proposition et a élaboré la
d’assurance (DAS) annuelle sur la fiabilité des comptes et sur «feuille de route en vue d’un cadre intégré de contrôle interne»
la légalité et la régularité des opérations sous-jacentes. (adoptée par la Commission le 15 juin 2005). Le PE a marqué
Elle établit un rapport annuel qui est transmis aux institutions son approbation dans sa résolution de décharge d’avril 2006
communautaires et publié au Journal officiel de l’Union relative à l’exécution du budget 2004.
européenne, accompagné des réponses de ces institutions aux L’accord interinstitutionnel du 17 mai 2006 sur la discipline
observations de la Cour. budgétaire et la bonne gestion financière (voir cadre financier
La Cour peut présenter à tout moment des observations sur pluriannuel, 1.5.2) dispose sous l’intitulé «Assurer un contrôle
des questions particulières, notamment sous forme de interne intégré et efficace des fonds communautaires»: «Les
rapports spéciaux. institutions conviennent de l’importance d’un renforcement
du contrôle interne sans alourdir la charge administrative, ce
B. Les compétences consultatives qui a pour condition préalable la simplification de la législation
Les autres institutions peuvent demander l’avis de la Cour des de base. Dans ce cadre, priorité sera accordée à une bonne
comptes chaque fois qu’elles l’estiment opportun. gestion financière visant l’obtention d’une déclaration
d’assurance positive pour les crédits en gestion partagée.»
Cet avis est obligatoire pour le Conseil lorsqu’il:
— arrête les règlements financiers (qui fixent les modalités g François JAVELLE
d’établissement et d’exécution du budget ainsi que de Helmut WERNER
reddition et de vérification des comptes); Juillet 2008

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Le système de Les institutions et organes
1 fonctionnement de 3 de l’Union
l’Union européenne

1.3.11. Le Comité économique et social européen


Le Comité économique et social européen est un organe consultatif de l’Union européenne. Il se compose de 344 membres.
Son avis est obligatoire dans les domaines fixés par les traités et facultatif pour les autres domaines; il peut être consulté
par la Commission, le Conseil ou le Parlement. Le Comité peut également émettre des avis de sa propre initiative.

Base juridique Organisation et fonctionnement


Articles 257 à 262 du traité CE (articles 301 à 304 du traité de Le CESE n’est pas une des institutions communautaires telles
Lisbonne) qu’énumérées à l’article 7 du traité CE, mais il jouit d’une large
autonomie d’organisation et de fonctionnement que le traité
UE a renforcée.
Composition
— Il désigne en son sein son président et son bureau (pour
A. Nombre et répartition nationale des sièges deux ans).
(article 258) — Il établit son règlement intérieur.
Le Comité économique et social européen (CESE) se compose — Il peut se réunir de sa propre initiative (en règle générale, il
de 344 membres, ainsi répartis entre les États membres: se réunit à la demande du Conseil ou de la Commission).
— 24 pour l’Allemagne, la France, l’Italie et le Royaume-Uni; — Pour l’aider à élaborer ses avis, il dispose de sections
spécialisées dans les différents domaines d’activité
— 21 pour l’Espagne et la Pologne; communautaire et peut créer des sous-comités pour traiter
— 15 pour la Roumanie; de sujets déterminés.
— Il dispose de son propre secrétariat.
— 12 pour la Belgique, la Bulgarie, la République tchèque, la
Grèce, la Hongrie, les Pays-Bas, l’Autriche, le Portugal et la
Suède; Attributions
Le CESE a un pouvoir consultatif. Son rôle est de
— 9 pour le Danemark, l’Irlande, la Lituanie, la Slovaquie et la
communiquer aux institutions responsables des décisions
Finlande;
communautaires l’opinion des représentants de la vie
— 7 pour l’Estonie, la Lettonie et la Slovénie; économique et sociale.

— 6 pour Chypre et le Luxembourg; A. Émission d’avis à la demande d’institutions


communautaires
— 5 pour Malte. 1. Consultation obligatoire
Dans un certain nombre de domaines, le traité prévoit qu’une
B Mode de désignation (article 259)
décision ne peut être prise qu’après consultation du CESE par
Les membres sont nommés par le Conseil à la majorité le Conseil ou par la Commission:
qualifiée (avant le traité de Nice, c’était à l’unanimité), sur la
— politique agricole (article 37);
base de propositions présentées par les États sous forme de
listes comportant pour chacun d’eux un nombre de candidats — libre circulation des personnes et des services (3e partie,
double de celui des sièges qui lui sont attribués. Ces titre III);
nominations sont soumises à l’avis de la Commission. Elles — politique des transports (3e partie, titre V);
doivent assurer une représentation adéquate des différentes
catégories de la vie économique et sociale. En pratique, les — harmonisation de la fiscalité indirecte (article 93);
sièges sont répartis par tiers entre les employeurs, les salariés — rapprochement des législations dans le domaine du
et les autres catégories (agriculteurs, commerçants, professions marché intérieur (articles 94 et 95);
libérales, consommateurs…).
— politique de l’emploi (3e partie, titre VIII);
C. Caractère du mandat (article 258) — politique sociale, éducation, formation professionnelle
Le mandat, renouvelable, est de quatre ans (cinq ans selon le et jeunesse (3e partie, titre XI);
traité de Lisbonne). Le traité sur l’Union européenne a précisé — santé publique (article 152);
que les membres l’exercent en toute indépendance, dans
l’intérêt général de la Communauté (expression utilisée pour — protection des consommateurs (article 153);
les membres de la Commission et de la Cour des comptes). — réseaux transeuropéens (article 156);

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— politique industrielle (article 157); Relations entre le Parlement européen et le Comité
— cohésion économique et sociale (3  partie, titre XVII);
e économique et social européen
— recherche et développement technologique (3e partie, Le PE et le CESE sont souvent amenés à se prononcer sur les
titre XVIII); mêmes projets législatifs. Dès lors, il était normal que des
contacts se nouent entre eux. Ces contacts, non
— environnement (titre XIX). institutionnalisés, peuvent revêtir plusieurs formes: échanges
2. Consultation facultative de vues réguliers et efforts de coordination des travaux;
Le CESE peut être par ailleurs consulté en toutes matières par rencontres entre les présidents des deux instances ou entre les
la Commission, le Conseil ou le Parlement européen, si ces membres des commissions et des sections; colloques
institutions le jugent opportun. organisés en commun.
Lorsque le Conseil ou la Commission consultent le CESE (à titre
obligatoire aussi bien que facultatif ), ces institutions peuvent g Hélène CALERS
lui fixer un délai (d’un mois au moins), à l’expiration duquel Juillet 2008
elles peuvent passer outre à l’absence d’avis.
B. Émission d’avis sur l’initiative du Comité lui-même
Le Comité peut décider d’émettre un avis dans tous les cas où
il l’estime utile.

1.3.12. Le Comité des régions


Le Comité des régions se compose de 344 membres représentant les autorités régionales et locales des vingt-sept États
membres de l’Union européenne. Il émet des avis dans les cas de consultation obligatoire fixés par le traité, dans les cas de
consultation facultative et de sa propre initiative si cela est jugé opportun.

Base juridique pour l’Europe accorderait effectivement cette possibilité au


Comité.
Articles 263 à 265 du traité CE introduits par le traité de
Maastricht
Organisation
Objectifs A. Composition (article 263)
Le Comité des régions est un organe consultatif de 1. Nombre et répartition nationale des sièges
représentation des collectivités régionales et locales dans Le Comité des régions se compose de 344 membres et d’un
l’Union européenne (UE). Il est le porte-parole des intérêts de nombre égal de suppléants, ainsi répartis entre les États
ces entités territoriales auprès de la Commission et du Conseil, membres:
auxquels il adresse des avis. — 24 pour l’Allemagne, la France, l’Italie et le Royaume-Uni;
La création du Comité des régions a permis de traduire la — 21 pour l’Espagne et la Pologne;
volonté manifestée dès le préambule du traité sur l’Union
— 15 pour la Roumanie;
européenne de poursuivre «le processus créant une union
sans cesse plus étroite entre les peuples de l’Europe, dans — 12 pour la Belgique, la Bulgarie, la République tchèque, la
laquelle les décisions sont prises le plus près possible des Grèce, la Hongrie, les Pays-Bas, l’Autriche, le Portugal et la
citoyens, conformément au principe de subsidiarité». Suède;
Pour mieux remplir ce rôle, le Comité voudrait acquérir le droit — 9 pour le Danemark, l’Irlande, la Lituanie, la Slovaquie et la
de saisir la Cour de justice en cas de non-respect du principe Finlande;
de subsidiarité. Il espère que les prochaines révisions du traité — 7 pour l’Estonie, la Lettonie et la Slovénie;
vont lui accorder ce droit. L’article 8 du protocole sur
l’application des principes de subsidiarité et de — 6 pour Chypre et le Luxembourg;
proportionnalité annexé au traité établissant une Constitution — 5 pour Malte.

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l’Union européenne

2. Mode de désignation 2. Consultations facultatives


Les membres sont nommés pour quatre ans (cinq ans selon le Le Comité peut être par ailleurs consulté en toutes matières
traité de Lisbonne, article 305) par le Conseil statuant à par la Commission, le Conseil ou le Parlement, si ces
l’unanimité sur proposition des États membres (le traité de institutions le jugent opportun.
Lisbonne prévoit que la nomination des membres du Comité Lorsque le Conseil ou la Commission (le traité de Lisbonne
se fasse sur proposition de la Commission). Leur mandat est prévoit que cette disposition soit également valable pour le
renouvelable. Dans la pratique, les membres désignés sont Parlement européen) consultent le Comité (à titre aussi bien
généralement des élus locaux et régionaux. obligatoire que facultatif ), ils peuvent lui fixer un délai (d’un
mois au moins), à l’expiration duquel ils peuvent passer outre à
B. Structure (article 264) l’absence d’avis.
Le Comité désigne parmi ses membres son président et son
bureau pour une durée de deux ans (deux ans et demi selon B. Émission d’avis sur l’initiative du Comité lui-même
les dispositions du traité de Lisbonne). Il établit son règlement 1. À l’occasion d’une consultation du Comité économique
intérieur et le soumet à l’approbation du Conseil. et social européen
Lorsque le Comité économique et social européen est
consulté par le Conseil ou la Commission, le Comité des
Attributions régions en est informé et peut, s’il l’estime opportun pour les
A. Émission d’avis à la demande d’autres institutions intérêts régionaux, émettre lui-même un avis sur le sujet traité.
1. Consultations obligatoires 2. En général
Dans un certain nombre de matières, le Conseil ou la Le Comité des régions peut, de manière générale, émettre un
Commission doivent obligatoirement solliciter l’avis du Comité avis chaque fois qu’il l’estime utile.
des régions avant de trancher: 3. Le Comité a émis des avis d’initiative principalement
— éducation, formation professionnelle et jeunesse dans les domaines suivants:
(article 149); — petites et moyennes entreprises (PME);
— culture (article 151); — réseaux transeuropéens;
— santé publique (article 152); — tourisme;

— réseaux transeuropéens de transports, télécommunications — Fonds structurels;


et énergie (article 156); — santé (lutte contre la drogue);
— cohésion économique et sociale: — industrie;
• actions spécifiques (article 159), — développement urbain;
• d
 éfinition des missions, des objectifs prioritaires et de — programmes de formation;
l’organisation des fonds à finalité structurelle — environnement.
(article 161),
• d
 écisions d’application relatives au Fonds européen de g Claire GENTA
développement régional (article 162). Juillet 2008

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1.3.13. La Banque européenne d’investissement
La Banque européenne d’investissement assure le financement à long terme de l’Union européenne. Elle représente
également une source de financement pour les États ou les groupes d’États avec lesquels l’Union européenne a conclu
un accord. Son capital est souscrit par les États membres et provient également de prêts, principalement sous forme
d’émissions obligataires publiques.

Base juridique 3. Le comité de direction


— Articles 266 et 267 du traité CE a. Composition
Un président et huit vice-présidents nommés pour six ans
— Protocole annexé au traité CE fixant les statuts renouvelables par le Conseil des gouverneurs sur proposition
de la Banque européenne d’investissement du conseil d’administration.
b. Tâches
Organisation et fonctionnement
Organe exécutif de la Banque, il assure:
A. Statut juridique — la gestion des affaires courantes,
Sans être une institution de la Communauté (au sens de
— la préparation et l’exécution des décisions du conseil
l’article 7 du traité CE), la Banque européenne d’investissement
d’administration.
(BEI) est un organisme financier de droit public, doté de la
personnalité juridique (article 260 du traité CE) et pourvu de 4. Le comité de vérification
structures administratives distinctes des institutions a. Composition
communautaires. Trois membres nommés par le Conseil des gouverneurs pour
trois ans renouvelables.
B. Structure
Les organes dirigeants de la BEI sont: b. Tâches
— Il vérifie la régularité des opérations et les livres de la
1. Le Conseil des gouverneurs Banque en s’appuyant sur les travaux de suivi et d’audit
a. Composition menés par les services internes et par des experts externes;
Vingt-sept ministres nommés par les États membres — Il s’assure de la conformité des opérations de la Banque
(généralement les ministres des finances). avec les procédures statutaires.
b. Fonctions C. Ressources
Elles consistent à: 1. Capital
— définir les directives générales de la politique de crédit, Le capital de la BEI est souscrit par les États membres suivant
une répartition qui reflète leur poids économique respectif. La
— approuver les comptes et le bilan annuels, forte croissance des opérations dans l’Union européenne,
— décider des augmentations de capital, l’arrivée le 1er mai 2004 de dix nouveaux États membres et, le
1er janvier 2007, de deux autres États membres, ont justifié une
— engager la Banque pour les financements en dehors de augmentation de capital de 164 milliards d’euros à compter du
l’Union européenne (UE), 1er janvier 2007. Les douze nouveaux États membres ont
— nommer les membres du conseil d’administration, du souscrit au capital de la Banque selon la clé de répartition
comité de direction et du comité de vérification. appliquée aux actuels États membres.

2. Le conseil d’administration 2. Emprunts


a. Composition Les emprunts constituent la plus grande partie des ressources
de la Banque, essentiellement sous la forme d’émissions
Vingt-huit membres nommés par le Conseil des gouverneurs obligataires publiques.
pour cinq ans: un pour chaque État membre sur proposition
des États et un sur proposition de la Commission. La BEI figure parmi les grands emprunteurs internationaux, ses
titres sont côtés sur les principales bourses de valeurs. Elle
b. Rôle emprunte sur les marchés des capitaux les fonds dont elle a
Siégeant environ dix fois par an, il a compétence exclusive besoin pour accorder ses prêts. Ne poursuivant pas de but
pour décider des prêts, des garanties et des emprunts et des lucratif, elle rétrocède ses ressources à des taux d’intérêt
taux d’intérêt des prêts. reflétant le coût auquel elle les a collectées.

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Le système de Les institutions et organes
1 fonctionnement de 3 de l’Union
l’Union européenne

En 2005, l’ensemble des projets adoptés s’élevait à 51 milliards 3. Soutien aux petites et moyennes entreprises (PME)
d’euros. 52,7 milliards ont été récoltés après échanges par le La Banque soutient les investissements des PME de manière
biais de 330 transactions libellées en 15 monnaies. décentralisée grâce à la formule de prêts globaux consentis
La Banque joue un rôle de premier plan dans le par l’intermédiaire de banques. En 2005, les prêts globaux dans
développement du marché des capitaux des nouveaux et l’UE s’élevaient à 8,9 milliards d’euros, dont 4,2 milliards ont
futurs États membres. profité à quelque 20 000 petites et moyennes entreprises. La
plupart de ces prêts soutenaient également d’autres objectifs
fondamentaux de la Banque. Une part considérable d’entre
Missions et réalisations eux ont été utilisés pour l’investissement dans les PME,
La BEI est l’institution de financement à long terme de l’Union stimulant ainsi la cohésion économique et sociale. La
européenne. En vertu de l’article 267 du traité CE, elle a pour recherche et le développement effectués par des PME
mission de contribuer, en faisant appel au marché des capitaux financées par la BEI ont aidé à mettre en œuvre l’agenda de
et à ses ressources propres, au développement équilibré et Lisbonne.
sans heurts du marché commun dans l’intérêt de la L’initiative «Innovation 2010» (i2i)
Communauté. À cette fin, elle facilite, par l’octroi de prêts et de
Dans le cadre de cette initiative lancée à la suite du Conseil
garanties, sans poursuivre de but lucratif, le financement de
européen de Lisbonne en mars 2000, et qui vise à contribuer à
projets dans tous les secteurs de l’économie.
l’évolution vers une Europe fondée sur la connaissance et
Dans l’accomplissement de sa mission, la BEI facilite le l’innovation, la BEI a prêté quelque 17 milliards d’euros.
financement de programmes d’investissements en liaison avec 20 milliards supplémentaires ont été prévus pour la période
les interventions des Fonds structurels et des autres 2003-2006. Depuis la création de i2i en 2000, la BEI a consenti
instruments financiers de la Communauté. des prêts pour des projets d’investissements à hauteur de
34,8 milliards d’euros, dont 10,4 milliards en 2005 uniquement.
A. À l’intérieur de l’Union européenne L’objectif global quantifié est de prêter au minimum
1. Développement régional et cohésion économique 50 milliards d’euros au titre du programme i2i au cours de
et sociale cette décennie.
En 2005, la Banque a octroyé des prêts à hauteur de près de Amélioration des réseaux transeuropéens
28 milliards d’euros dans les 25 États membres de l’Union et autres infrastructures
européenne pour des projets visant à aider les régions La BEI est la première source de financement des grands
accusant un retard en matière de développement réseaux transeuropéens (RTE) de transport, de
économique (régions de l’objectif n° 1), connaissant des télécommunications, d’énergie et d’infrastructures connexes.
difficultés structurelles (régions de l’objectif n° 2), ou souffrant
des deux, ce qui équivaut à 84 % des prêts totaux individuels Éducation et formation
dans l’UE. Les prêts globaux aux intermédiaires financiers, pour En 2005, 30 prêts pour les investissements dans l’éducation et
la rétrocession en appui aux investissements faibles et moyens la formation au titre du programme i2i ont été accordés pour
dans les régions assistées, ont atteint 5,9 milliards d’euros, ce un montant de près de 2,2 milliards d’euros.
qui amène les prêts totaux pour la cohésion économique et
sociale à quelque 34 milliards d’euros en 2005, soit 80 % de B. À l’extérieur de l’Union
tous les prêts dans l’UE l’année dernière. 1. Champ d’action
2. Protection et amélioration de l’environnement La BEI intervient en faveur d’États ou de groupes d’États avec
lesquels l’Union européenne a conclu des accords.
La Banque intervient dans la protection de l’environnement
soit directement par des investissements spécifiques, soit a. Pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP)
indirectement en s’assurant que les projets qui lui sont soumis et pays et territoires d’outre-mer (PTOM)
pour financement respectent les législations nationales et L’accord de Cotonou, qui remplace la convention de Lomé
communautaires. Elle s’est fixé pour objectif de consacrer entre depuis le 1er avril 2003, sert de cadre pour les financements de
¼ et 1/3 des prêts individuels aux projets de sauvegarde et la BEI. Une «facilité d’investissement» de 2,2 milliards d’euros a
d’amélioration de l’environnement. Les prêts individuels pour été accordée par les États membres pour les cinq années
les projets d’investissements environnementaux se sont élevés suivantes. Viendront s’y ajouter les investissements sur
à 10,9 milliards d’euros dans l’Union européenne, soit 33 % des ressources propres de la Banque (1,7 milliard).
prêts directs. En outre, la plupart des prêts globaux ont de
multiples objectifs, notamment la protection b. Pays d’Amérique latine et d’Asie
environnementale, et la BEI octroie également des prêts Le mandat actuel de la BEI en matière de prêts en Asie et en
globaux consacrés à l’environnement. En 2005, la BEI a accordé Amérique latine (AAL) prévoit des prêts à hauteur de
deux prêts de ce type à l’Allemagne et à l’Autriche, pour un 2,48 milliards d’euros au maximum entre 2000 et janvier 2007.
montant de 210 millions d’euros. Aux termes de ce mandat, 256 millions d’euros ont été prêtés

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en 2005, et il est escompté que les ressources soient donneurs, comme la Commission européenne, l’Agence
totalement utilisées à la fin du mandat. européenne pour la reconstruction et la Banque mondiale.
c. Pays du partenariat euro-méditerranéen (Algérie, Égypte, e. Formes d’intervention
Gaza/Cisjordanie, Israël, Jordanie, Liban, Maroc, Syrie, Les interventions de la BEI prennent la forme de prêts sur
Tunisie, Turquie) ressources propres parfois assortis de bonifications d’intérêt
L’année 2005 a été la première année de fonctionnement du financées par le budget européen. Elles peuvent aussi
fonds fiduciaire de la FEMIP (facilité euro-méditerranéenne consister à gérer, sur mandat, des capitaux de risque provenant
d’investissement et de partenariat). Ce fonds fiduciaire, créé à de ressources budgétaires. Elles se tiennent dans les plafonds
la mi-2004 et disposant jusqu’ici de 33,5 millions d’euros, fixés par les accords en cause.
donnés par les quinze États membres et la Commission C. Le groupe BEI
européenne, complète le Fonds d’assistance technique en se
Constitué à la suite du Conseil européen de Lisbonne (mars
concentrant sur l’assistance technique en amont et les
2000), le groupe BEI est composé de la BEI et du Fonds
opérations de capital-risque dans les pays partenaires de la
européen d’investissement (FEI). Créé en juin 1994, le FEI a
Méditerranée. Au cours de l’année, sept opérations ont été
pour actionnaire majoritaire (60,5 % du capital) la BEI, les autres
approuvées pour un montant total de 3,4 millions d’euros. En
actionnaires étant la Commission européenne (30 %) et divers
termes de répartition géographique, quatre des projets
établissements financiers européens majeurs. Les activités de
approuvés avaient une portée régionale, tandis que les autres
capital-risque sont concentrées au sein du FEI, qui devient
visaient l’Algérie, le Maroc et la Syrie.
ainsi une des premières sources de financement en capital-
d. Pays des Balkans occidentaux (Albanie, ancienne République risque à l’échelle européenne. D’autre part, il continue à
yougoslave de Macédoine, Bosnie-et-Herzégovine) réaliser des opérations de garantie sur ses propres ressources
ou sur celles du budget de l’Union. Le groupe BEI est ainsi à
Les prêts totaux accordés aux Balkans occidentaux ont atteint
même de jouer un rôle prédominant dans le renforcement de
399 millions d’euros. Les prêts à la Bosnie-et-Herzégovine se
la compétitivité de l’industrie européenne.
sont élevés à 211 millions d’euros, alors que 35 millions d’euros
ont été accordés à l’Albanie. Les projets en Serbie et au
Monténégro se sont élevés à 153 millions d’euros. Les prêts de g Wilhelm LEHMANN
la BEI sont accordés en étroite coopération avec d’autres Janvier 2007

1.3.14. Le Médiateur européen


Créé par le traité de Maastricht, le Médiateur européen procède à des enquêtes sur les cas de mauvaise administration
dans l’action des institutions et organes communautaires. Il intervient soit de sa propre initiative, soit sur la base des
plaintes déposées par des citoyens de l’Union européenne. Il est nommé par le Parlement pour la durée de la législature.

Base juridique — et, de cette façon, à renforcer l’ouverture et le contrôle


Articles 21 et 195 du traité CE démocratique dans le processus décisionnel et
l’administration des institutions communautaires.
Objectifs
Réalisations
Créée par le traité de Maastricht (1992) comme élément de la
citoyenneté européenne, l’institution du Médiateur européen Comme prévu par le traité, le statut et les fonctions du
vise: Médiateur ont été précisés par une décision du Parlement
européen du 9 mars 1994 prise après avis de la Commission et
— à mieux assurer la protection des citoyens en cas de approbation du Conseil de ministres. Cette décision a fait
mauvaise administration dans l’action des institutions et l’objet de dispositions d’exécution prises par le Médiateur lui-
organes communautaires, même à compter du 1er janvier 1998. Les modalités de sa
nomination et de sa destitution sont par ailleurs fixées par les
articles 194, 195 et 196 du règlement du Parlement.

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Le système de Les institutions et organes
1 fonctionnement de 3 de l’Union
l’Union européenne

A. Statut — les faits qui n’auraient pas fait l’objet préalablement des
1. Désignation démarches administratives appropriées au sein des
organismes concernés;
a. Conditions à remplir
— Être apte dans son pays à exercer les plus hautes fonctions — les faits ayant trait aux rapports de travail entre les
juridictionnelles ou posséder une compétence et une institutions et organes communautaires et leurs
expérience suffisantes pour honorer la charge de fonctionnaires ou agents, sauf si les possibilités de
Médiateur. demandes ou de réclamations internes ont été épuisées.
— Offrir une totale garantie d’indépendance. 2. Saisine
b. Procédure Conformément à sa mission, le Médiateur procède aux
Les candidatures sont soumises à la commission des pétitions enquêtes qu’il estime justifiées, soit de sa propre initiative, soit
du Parlement pour examen de recevabilité. sur la base des plaintes qui lui ont été présentées, émanant de
tout citoyen de l’Union européenne (UE) ou de toute personne
Une liste des candidatures recevables est ensuite soumise au physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire
vote du Parlement. Il est procédé à un vote à bulletin secret, à dans un État membre, directement ou par l’intermédiaire d’un
la majorité des suffrages. membre du Parlement européen, sauf si les faits allégués font
2. Mandat ou ont fait l’objet d’une procédure juridictionnelle.
a. Durée 3. Pouvoirs dans la conduite des enquêtes
Le Médiateur est nommé par le Parlement après chaque Le Médiateur peut solliciter:
élection et pour la durée de son mandat. Son mandat est
renouvelable. — les institutions et organes communautaires, qui sont tenus
de lui fournir les renseignements qu’il leur demande et de
b. Obligations lui donner accès aux dossiers concernés, sauf obligations
Le Médiateur: de secret dûment justifiées;
— exerce ses fonctions en pleine indépendance dans l’intérêt — les fonctionnaires et agents de ces mêmes institutions et
de l’Union et de ses citoyens; organes, qui sont tenus de témoigner à sa demande, tout
en s’exprimant au nom et sur instruction de leurs
— ne sollicite ni n’accepte, dans l’exercice de ses fonctions,
administrations et en restant liés par le secret professionnel;
d’instructions d’aucun organisme;
— s’abstient de tout acte incompatible avec le caractère de — les autorités des États membres, qui sont tenues de lui
ses fonctions; fournir toutes informations nécessaires, sauf si leur
transmission est interdite par des dispositions législatives
— ne peut exercer aucune autre fonction politique ou ou réglementaires, quoique dans ce cas le Médiateur
administrative ou activité professionnelle, rémunérée ou puisse en prendre connaissance s’il s’engage à ne pas les
non. divulguer.
3. Destitution S’il n’obtient pas l’assistance qu’il souhaite, le Médiateur
Le Médiateur peut être destitué par la Cour de justice, à la informe le Parlement européen, qui entreprend les démarches
requête du Parlement européen, s’il ne remplit plus les appropriées.
conditions nécessaires à l’exercice de ses fonctions ou s’il a
Le Médiateur peut aussi coopérer avec ses homologues des
commis une faute grave.
États membres, dans le respect des législations nationales.
B. Rôle Le Médiateur et son personnel sont tenus de ne pas divulguer
1. Champ de compétence les informations dont ils ont connaissance dans le cadre des
Le Médiateur traite des cas de mauvaise administration dans enquêtes, en particulier celles qui sont de nature à porter
l’action des institutions et organes communautaires. préjudice au plaignant et à toute personne concernée.
a. La mauvaise administration peut consister en irrégularités S’il s’agit toutefois de faits qui lui paraissent relever du droit
administratives, discrimination, abus de pouvoir, refus pénal, le Médiateur en informe immédiatement les autorités
d’information, retards indus, etc. nationales compétentes ainsi que l’institution communautaire
b. Exceptions dont dépend le fonctionnaire ou agent en cause.
En sont exclus: 4. Résultats des enquêtes
— les activités judiciaires de la Cour de justice et du Tribunal Dans la mesure du possible, le Médiateur se concerte avec
de première instance, les faits faisant ou ayant fait l’objet l’institution ou l’organe concerné pour trouver une solution qui
d’une procédure de justice; donne satisfaction au plaignant.

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Dans les cas où le Médiateur a constaté un cas de mauvaise poste de Médiateur européen devant la commission des
administration, il saisit l’institution ou l’organe concerné, qui pétitions les 25 et 26 novembre 2002.
dispose d’un délai de trois mois pour lui faire parvenir son avis.
E. La révision du statut du Médiateur
Le Médiateur transmet ensuite un rapport au Parlement Le 11 juillet 2006, le Médiateur a présenté au président du
européen et à l’institution ou à l’organe concerné avec les Parlement une proposition d’adaptation de son statut du
résultats de ses enquêtes. 9 mars 1994. La commission des pétitions a soutenu cette
Enfin, la personne dont émane la plainte est informée par le proposition dans son rapport sur le rapport annuel du
Médiateur du résultat de l’enquête, de l’avis rendu par Médiateur pour 2005 (résolution du Parlement du
l’institution ou l’organe concerné et de ses propres 16 novembre 2006) et le Parlement a finalement approuvé le
recommandations. rapport d’Anneli Jäätteenmäki proposant des modifications du
statut, le 22 avril 2008. Ces modifications ont été entérinées
À la fin de chaque année législative, le Médiateur présente un
par le Conseil le 12 juin 2008.
rapport au Parlement européen sur les résultats de ses
enquêtes. Il s’agit principalement:
— de permettre au Médiateur de consulter tout document
C. Fonctionnement administratif
qu’il exigerait au cours de son enquête, y compris en levant
Le Médiateur dispose d’un secrétariat composé de personnel l’exception du secret, tout en clarifiant et renforçant les
soumis aux règles de la fonction publique européenne. Il en dispositions exigeant de lui qu’il protège la confidentialité
nomme le principal responsable. des documents qui lui sont rendus accessibles;
D. Activités — d'élargir la coopération du Médiateur européen (déjà en
Le premier Médiateur, M. Jacob Söderman, a exercé deux place avec les médiateurs nationaux) aux organismes ayant
mandats: de juillet 1995 au 31 mars 2003. Pendant son la responsabilité de la promotion et de la protection des
mandat, le bureau du Médiateur a reçu plus de 11 000 plaintes, droits de l’homme dans les États membres;
dont 30 % environ ont été déclarées recevables. Dans plus de — de modifier le libellé de la disposition sur l’audition des
5 000 affaires, soit les plaintes ont été transférées vers un fonctionnaires qui témoignent en tant que fonctionnaires
organe compétent, soit les citoyens ont été réorientés vers les et non à titre personnel (la formulation précédente
personnes appropriées pour obtenir une aide. Près de mentionnait: «conformément aux instructions de leurs
1 500 enquêtes ont été ouvertes, comprenant 19 initiatives administrations»);
propres. Dans plus de 500 affaires, l’institution concernée a
— de demander au Médiateur de notifier à l’Office européen
résolu le problème au profit du plaignant. Plus de 200 affaires
de lutte antifraude (OLAF) si, au cours de ses enquêtes,
ont donné lieu à la publication d’un commentaire critique
il reçoit des informations qui pourraient faire partie
ayant pour but de promouvoir une meilleure administration
du mandat de l’OLAF.
dans des situations ultérieures de même nature. Des accords à
l’amiable, des recommandations et des rapports spéciaux ont
été de plus en plus utilisés. Les institutions n’ont rejeté les Rôle du Parlement européen
propositions du Médiateur que dans un nombre restreint de Bien que totalement indépendant dans l’exercice de ses
cas. Dans 700 affaires environ, le Médiateur a découvert après fonctions, le Médiateur a un caractère de Médiateur
enquête qu’il n’y avait pas eu de mauvaise administration. parlementaire. Il est en rapport étroit avec le Parlement qui a
Parmi les réalisations du Médiateur, il convient de citer le code l’exclusivité de sa nomination et l’initiative de sa destitution,
de bonne conduite administrative (approuvé en 2001 par le détermine son statut, l’assiste dans ses enquêtes et reçoit ses
Parlement européen), un code de procédure pour les rapports.
plaignants ayant déposé une plainte dans le cadre de la Sur la base de plusieurs rapports annuels sur les activités du
procédure d’infraction prévue à l’article 226 (adopté par la Médiateur européen, la commission des pétitions a réitéré son
Commission en 2002), l’abolition des limites d’âge pour le souhait de voir le Médiateur européen et ses homologues aux
recrutement au sein des institutions et des organes niveaux national et régional collaborer avec la Commission
communautaires et le projet de recommandation européenne et le Parlement afin de s’assurer que ce qui
présenté à la Commission européenne concernant la plainte ressortira des modifications actuelles apportées aux traités
n° 116/2005/MHZ relative à l’accès du public aux documents. maximise l’accès, la transparence et la responsabilité de l’Union
Lors de la séance plénière du 15 janvier 2003, M. Nikiforos européenne.
Diamandouros a été élu Médiateur européen par le
Parlement européen jusqu’à la fin de la législature actuelle. g Claire GENTA
Sept candidats ont été entendus lors de l’audition publique au Juillet 2008

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Le système de Les procédures décisionnelles
1 fonctionnement de 4
l’Union européenne

1.4. Les procédures décisionnelles

1.4.1. Les procédures décisionnelles de type supranational


Compte tenu de leur appartenance à l’Union européenne, les États membres sont convenus de transférer certaines de leurs
compétences aux institutions de l’Union pour certains domaines politiques particuliers. Celles-ci prennent dès lors des
décisions contraignantes de type supranational dans leurs procédures législatives et exécutives, dans les procédures
budgétaires, dans les procédures de nomination et dans les procédures quasi constitutionnelles.

Historique (1.1.1 à 1.1.6) s’applique désormais à presque toutes les matières où le


Conseil statue à la majorité qualifiée; y échappent encore la
Le traité de Rome était caractérisé par un pouvoir de proposition
politique agricole commune et la politique commerciale. Elle
et de négociation de la Commission (notamment dans le
ne s’applique pas, en revanche, à plusieurs matières
domaine législatif et les relations économiques extérieures), un
importantes relevant de l’unanimité au Conseil, la politique
pouvoir de décision du Conseil (ou, en matière de nominations,
fiscale par exemple. Le traité de Lisbonne entraînera une
des représentants des gouvernements des États membres) et
extension importante de la procédure de codécision (qui sera
un pouvoir consultatif du Parlement européen.
considérée comme la procédure législative générale) à de
Le rôle du Parlement a été progressivement accru en matière nombreuses bases juridiques anciennes et nouvelles,
budgétaire (réformes de 1970 et de 1975), législative (Acte notamment dans les domaines de la justice, de la liberté et de
unique européen) et de nominations (traité de Maastricht). la sécurité, et de l’agriculture.
L’Acte unique lui a aussi donné le pouvoir d’autoriser la
2. Déroulement de la procédure
ratification des traités d’adhésion et d’association, qui a été
étendu à certains autres traités internationaux par le traité de a. Proposition de la Commission
Maastricht. Le traité d’Amsterdam a réalisé un progrès b. Première lecture du Parlement
considérable sur le chemin de la démocratisation de la Le Parlement rend un avis à la majorité simple.
Communauté par la simplification de la procédure de
codécision, par son extension à de nouvelles matières et par le c. Première lecture du Conseil
renforcement du rôle du Parlement dans la nomination de la Le Conseil adopte une «position commune» à la majorité
Commission. qualifiée, à l’exception des domaines de la culture, de la libre
circulation des citoyens, de la sécurité sociale et de la
Poursuivant dans ce sens, le traité de Nice a considérablement coordination des règles d’exercice des professions, soumis à
accru les pouvoirs du Parlement. D’une part, la procédure de l’unanimité.
codécision (dans laquelle le Parlement a les mêmes pouvoirs
que le Conseil) s’appliquera à presque toutes les nouvelles d. Deuxième lecture du Parlement
matières où le Conseil statuera à la majorité qualifiée, d’autre Après transmission de la position commune du Conseil, le
part, le Parlement reçoit le pouvoir de saisir la Cour de justice Parlement doit se prononcer dans un délai de trois mois. Il
dans les mêmes conditions qu’un État membre. Le traité de peut alors:
Lisbonne constituera une étape importante supplémentaire
pour amener le Parlement sur un pied d’égalité avec le Conseil — approuver expressément la proposition telle que modifiée
dans le domaine de la législation et de la finance de l’Union par la position commune ou ne pas se prononcer dans le
européenne (UE). délai: dans les deux cas, l’acte tel que modifié par la
position commune est réputé adopté;

Procédures législatives — rejeter la position commune à la majorité absolue de ses


membres: l’acte est réputé non adopté et la procédure se
A. La procédure de codécision (article 251 du traité CE) termine;
1. Domaine d’application — adopter, à la majorité absolue de ses membres, des
Depuis l’entrée en vigueur du traité de Nice, cette procédure amendements à la position commune, qui feront l’objet
ne concerne pas moins de 32 bases juridiques (1.1.4). Elle d’un avis de la Commission: le Conseil est saisi à nouveau.

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e. Deuxième lecture du Conseil amendements non pris en considération par la Commission,
— Si le Conseil, statuant à la majorité qualifiée sur les également à l’unanimité. À tout moment, tant que le Conseil
amendements du Parlement, et à l’unanimité sur ceux qui n’a pas statué, la Commission peut modifier, voire retirer sa
ont fait l’objet d’un avis négatif de la Commission, proposition.
approuve tous les amendements du Parlement au plus tard
C. La procédure de consultation
trois mois après réception, l’acte est réputé adopté.
Avant de statuer, le Conseil doit prendre connaissance de l’avis
— Sinon, le comité de conciliation est convoqué dans un du Parlement européen et, le cas échéant, du Comité
délai de six semaines. économique et social européen et du Comité des régions.
f. Conciliation Cette consultation est obligatoire en ce sens que son absence
— Le comité de conciliation, paritairement composé de rend l’acte illégal et annulable par la Cour de justice (arrêt dans
membres du Conseil et de représentants du Parlement les affaires 138 et 139/79). Lorsque le Conseil entend modifier
européen et assisté par la Commission, examine la position substantiellement l’acte proposé, il est tenu de consulter à
commune sur la base des amendements du Parlement. Il nouveau le Parlement (arrêt dans l’affaire 65/90).
dispose de six semaines pour élaborer un projet commun.
D. La procédure d’avis conforme
— S’il n’approuve pas de projet commun dans le délai prévu, (cas où elle est applicable au domaine législatif)
l’acte est réputé non adopté et la procédure est terminée. 1. Domaine d’application
— S’il approuve un projet commun, celui-ci est soumis au Il s’agit en particulier de la législation de base sur les Fonds
Conseil et au Parlement pour approbation. structurels (1.3.2).
g. Fin de la procédure 2. Déroulement de la procédure
— Le Conseil et le Parlement disposent de six semaines pour Le Parlement européen examine un projet d’acte transmis par le
l’approbation; le Conseil statue à la majorité qualifiée et le Conseil; il statue sur son approbation (sans la possibilité de
Parlement à la majorité absolue des voix exprimées. l’amender) à la majorité absolue des voix exprimées. Au cours des
— L’acte est adopté si le Conseil et le Parlement approuvent le phases antérieures de la procédure (examen de la proposition de
projet. la Commission européenne), le traité ne confère au Parlement
aucun rôle formel; de manière informelle, sa participation a été
— Lorsque, à l’expiration du délai, l’approbation d’une des cependant acquise par le biais d’arrangements
deux institutions fait défaut, la procédure se termine par la interinstitutionnels (pour les conditions d’application de cette
non-adoption de l’acte. procédure dans le cadre du traité UE: 1.4.2).
B. La procédure de coopération (article 252 du traité CE)
1. Domaine d’application Procédure budgétaire (1.4.3)
Il se limite désormais à quelques décisions dans le cadre de
l’Union économique et monétaire. Procédures de nomination
2. Déroulement de la procédure A. Le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, nomme:
En première lecture, le Parlement européen émet un avis sur la — le président et les autres membres de la Commission
proposition de la Commission. Le Conseil, statuant à la (article 214 du traité CE) au terme des étapes suivantes:
majorité qualifiée, arrête alors une position commune qui est
transmise au Parlement, accompagnée de toutes les • d
 ésignation du président de la Commission par le
informations nécessaires et des raisons qui ont conduit le Conseil réuni au niveau des chefs d’États ou de
Conseil à l’adopter. gouvernement et statuant à la majorité qualifiée;

Le Parlement dispose d’un délai de trois mois pour statuer. Il • a pprobation de cette désignation par le Parlement
peut adopter, amender ou rejeter la position commune. Dans européen;
les deux dernières hypothèses, il doit le faire à la majorité • d
 ésignation des autres membres de la Commission par
absolue de ses membres. S’il rejette la proposition, le Conseil ne le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, d’un
peut statuer en deuxième lecture qu’à l’unanimité. La commun accord avec le président désigné;
Commission réexamine alors, dans un délai d’un mois, la
• approbation de l’ensemble du collège par le Parlement;
proposition sur la base de laquelle le Conseil a arrêté sa position
commune et transmet au Conseil une nouvelle proposition qui — les membres de la Cour des comptes (article 247 du traité
inclut ou exclut les amendements proposés par le Parlement. CE) après consultation du Parlement et conformément aux
propositions faites par chaque État membre;
Dans un délai de trois mois, éventuellement prolongé d’un
autre mois au maximum, le Conseil peut adopter la — les membres du Comité des régions et du Comité
proposition réexaminée à la majorité qualifiée, modifier la économique et social européen (articles 259 et 263 du
proposition réexaminée à l’unanimité, ou encore adopter les traité CE), sur proposition des gouvernements des États

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Le système de Les procédures décisionnelles
1 fonctionnement de 4
l’Union européenne

membres (pour le CESE après consultation de la D. Adoption du statut des députés au Parlement
Commission européenne). européen et du statut du Médiateur européen
— Proposition: Parlement.
B. Les gouvernements des États membres nomment
d’un commun accord — Rôle de la Commission: avis.
— le président, le vice-président et les autres membres du — Rôle du Conseil: avis conforme (à la majorité qualifiée sauf
directoire de la Banque centrale européenne (réunis au en ce qui concerne les règles ou conditions relatives au
niveau des chefs d’État ou de gouvernement, agissant sur régime fiscal des membres ou des anciens membres pour
recommandation du Conseil et après consultation du lesquelles la règle de l’unanimité s’applique).
Parlement); — Décision: Parlement européen.
— les juges et avocats généraux de la Cour de justice et les E. Modification du protocole sur le statut de la Cour
juges du Tribunal de première instance (articles 223 et 224). de justice
C. Le Parlement européen nomme le Médiateur — Proposition: Cour de justice.
(article 195 du traité CE). — Rôle de la Commission: consultation.
— Rôle du Parlement: consultation.
Procédures quasi constitutionnelles
— Décision: Conseil, statuant à l’unanimité.
A. Conclusion d’accords internationaux
— La Commission présente des recommandations au Conseil Rôle du Parlement européen
et conduit les négociations. Lors de la Conférence intergouvernementale de 2000, le
— Le Conseil définit le mandat pour les négociations. Parlement européen a fait plusieurs propositions pour élargir le
champ d’application de la procédure de codécision. De
— Proposition de conclusion: Commission. surcroît, le Parlement a réitéré à maintes reprises son avis selon
lequel, si un passage de l’unanimité à la majorité qualifiée avait
— Rôle du Parlement:
lieu, la codécision devrait automatiquement être appliquée. Le
• a vis conforme pour les accords de l’article 310 (accords traité de Nice a entériné cette position sans toutefois faire
d’association) ainsi que pour les accords créant un coïncider pleinement majorité qualifiée et codécision.
cadre institutionnel spécifique, les accords ayant des C’est pourquoi la question de la simplification des procédures
implications budgétaires notables ou impliquant une constituait l’un des éléments centraux du mandat adressé à la
modification d’un acte adopté selon la procédure de Convention sur l’avenir de l’Europe. On a ainsi envisagé la
codécision; suppression de la procédure de coopération et de l’avis simple,
• consultation dans les autres cas. la simplification de la procédure de codécision et son
extension à l’ensemble du champ législatif, enfin, la limitation
— Décision: Conseil, statuant à la majorité qualifiée à de la procédure de l’avis conforme à la ratification des accords
l’exception des domaines pour lesquels l’unanimité est internationaux. Nombre de ces améliorations auraient été
requise pour l’adoption des règles internes ainsi que pour mises en œuvre si le traité de Lisbonne était entré en vigueur
les accords de l’article 310. (1.1.6).
B. Système des ressources propres Dans le domaine des nominations, l’entrée en vigueur du
traité de Nice n’a pas mis fin à la regrettable diversité des
— Proposition: Commission.
procédures, au maintien quasi général de l’exigence
— Rôle du Parlement: consultation. d’unanimité toujours susceptible de créer des conflits
politiques, à l’absence d’une vraie légitimation
— Décision: Conseil, statuant à l’unanimité sous réserve de parlementaire. On notera toutefois le petit progrès que
l’adoption par les États membres conformément à leurs constitue le passage de l’unanimité à la majorité qualifiée
règles constitutionnelles respectives. pour la nomination du président de la Commission. Selon le
traité de Lisbonne, cette nomination devrait être effectuée
C. Dispositions en vue de l’élection du Parlement
en tenant compte du résultat des élections européennes,
européen au suffrage universel direct
l’accent étant ainsi mis sur la responsabilité politique de la
— Proposition: Parlement. Commission européenne.
— Décision: Conseil, statuant à l’unanimité, après avis
conforme du Parlement, et sous réserve de l’adoption par g Wilhelm LEHMANN
les États membres. Juillet 2008

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1.4.2. Les procédures décisionnelles de type
intergouvernemental
Dans les domaines de la politique étrangère et de sécurité commune et de la coopération judiciaire en matière pénale
ainsi que dans plusieurs autres matières, la procédure décisionnelle est différente de celle prévue par le traité CE. En l’espèce,
c’est la coopération intergouvernementale qui est généralement de mise, même si cela change les anciennes politiques du
troisième pilier dans le cadre du traité de Lisbonne.

Base juridique — Décision: par le Conseil, statuant à l’unanimité; l’accord


— Articles 7, 11, 23, 24, 34, 43, 44, 48 et 49 du traité UE entre les États membres de l’Union et l’État demandeur,
fixant les conditions de l’admission et les adaptations
— Article 11 du traité CE nécessaires, est soumis à la ratification de tous les États
membres selon leurs règles constitutionnelles.
Description
C. Procédure de sanction pour violation grave
Le traité UE établit quelques règles et procédures de nature et persistante des principes de l’Union
constitutionnelle et il organise, pour la politique étrangère et par un État membre (article 7 du traité UE)
de sécurité commune (PESC) ainsi que pour la coopération
1. Procédure principale
policière et judiciaire en matière pénale, une forme spécifique
de coopération intergouvernementale par le biais de l’action — Proposition de décision constatant l’existence d’une
d’institutions supranationales. Ces procédures se distinguent violation grave et persistante: présentée par un tiers des
de celles applicables dans le cadre du traité CE. États membres ou par la Commission.
— Avis conforme adopté par le Parlement européen à la
A. Procédure de modification des traités (article 48 majorité des deux tiers des voix exprimées, représentant
du traité UE) une majorité de ses membres.
— Proposition: tout État membre ou la Commission.
— Décision constatant l’existence d’une violation: adoptée à
— Rôle de la Commission: consultation et participation à la l’unanimité par le Conseil réuni au niveau des chefs d’État
Conférence intergouvernementale. ou de gouvernement, sans participation de l’État concerné
— Rôle du Parlement européen: consultation avant la mais après avoir invité cet État à présenter toute
convocation d’une Conférence intergouvernementale (le observation en la matière.
Parlement a été associé aux Conférences — Décision de suspendre certains droits de l’État concerné
intergouvernementales selon des formules ad hoc, mais adoptée par le Conseil statuant à la majorité qualifiée (sans
avec une influence croissante: il a longtemps été participation de l’État concerné).
représenté par son président ou par deux de ses membres,
2. Le traité de Nice a complété cette procédure
à la dernière Conférence intergouvernementale, il a envoyé
par un dispositif préventif
trois représentants).
— Proposition de décision constatant l’existence d’un risque
— Rôle du conseil de la Banque centrale européenne: clair de violation grave des principes de l’Union par un État
consultation dans le cas de modifications institutionnelles membre sur l’initiative d’un tiers des États membres, de la
dans le domaine monétaire. Commission ou du Parlement européen.
— Décision: commun accord des gouvernements sur les — Avis conforme: adopté par le Parlement européen à la
amendements aux traités qui sont soumis ensuite à la majorité des deux tiers des voix exprimées, représentant
ratification de tous les États membres selon leurs règles une majorité de ses membres.
constitutionnelles.
— Décision adoptée par le Conseil à la majorité des quatre
B. Procédure d’adhésion (article 49 du traité UE) cinquièmes de ses membres après avoir entendu l’État en
— Demande: tout État européen qui respecte les principes de question.
l’Union (voir article 6 du traité UE).
D. Procédure de déclenchement d’une coopération
— Rôle de la Commission: consultation; elle participe renforcée
activement à la préparation et au déroulement des 1. Coopération portant sur le domaine communautaire
négociations. (article 11 du traité CE)
— Rôle du Parlement: avis conforme, rendu à la majorité — Proposition: prérogative exclusive de la Commission; les
absolue des membres qui le composent. États membres qui se proposent d’instaurer une

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Le système de Les procédures décisionnelles
1 fonctionnement de 4
l’Union européenne

coopération renforcée peuvent adresser une demande en 3. Accords internationaux (article 24 du traité UE)
ce sens à la Commission. — Autorisation d’engager les négociations: le Conseil.
— Rôle du Parlement européen: avis simple ou consentement — Négociations menées par la présidence de l’Union
lorsque la coopération renforcée vise un domaine qui européenne assistée, le cas échéant, par la Commission.
relève de la procédure de codécision.
— Accord conclu par le Conseil sur recommandation de la
— Décision: le Conseil statue à la majorité qualifiée. Toutefois, présidence.
un membre du Conseil peut demander que le Conseil
— Lorsque l’accord porte sur une question pour laquelle
européen soit saisi; après quoi, le Conseil se prononcera à
l’unanimité est requise pour l’adoption de décisions
son tour à la majorité qualifiée.
internes, le Conseil statue à l’unanimité. Dans le cas inverse
2. Coopération portant sur les domaines de la justice ou lorsque l’accord est envisagé pour mettre en œuvre une
et des affaires intérieures (article 40 A du traité UE) action commune ou une position commune, le Conseil
— Demande des États membres concernés adressée à la statue à la majorité qualifiée conformément à l’article 23.
Commission.
F. Procédure décisionnelle applicable à la coopération
— Proposition de la Commission ou d’au moins huit États judiciaire et policière en matière pénale (article 34
membres. du traité UE)
— Consultation du Parlement européen. — Proposition: tout État membre ou la Commission.
— Le Conseil statue à la majorité qualifiée. — Rôle du Parlement européen: consultation avant l’adoption
de décisions-cadres, de décisions (à l’exclusion de positions
— Les modalités de la décision du Conseil et, le cas échéant,
communes) et de conventions; la présidence et la
de la saisine du Conseil européen sont semblables au cas
Commission doivent régulièrement l’informer sur l’état des
précédent.
travaux.
E. Procédures décisionnelles applicables aux affaires — Décision: le Conseil, statuant à l’unanimité, ou à la majorité
étrangères qualifiée lorsqu’il arrête des mesures pour mettre en œuvre
1. En général des «décisions». Les mesures d’application de conventions
— Proposition: tout État membre ou la Commission (article 22 peuvent être adoptées à la majorité des deux tiers des
du traité UE). parties contractantes.
— Rôle du Parlement européen: information régulière par la
présidence et consultation sur les principaux aspects et les Rôle du Parlement européen
choix fondamentaux (l’accord interinstitutionnel Avant la Conférence intergouvernementale de 1996, le
concernant le financement de la PESC précise que cette Parlement européen avait demandé de «communautariser» les
consultation se fera annuellement sur la base d’un deuxième et troisième piliers, donc notamment d’y appliquer
document élaboré par le Conseil). les procédures décisionnelles en vigueur dans le traité CE.
2. Stratégies communes, actions communes et positions Pourtant, le traité d’Amsterdam n’a apporté dans ces domaines
communes (article 23 du traité UE) que des retouches mineures. Il fallait cependant les réformer,
sauf à devoir faire face à une inertie totale de la politique de
— Recommandation de stratégie commune: adoptée à
l’Union dans ces matières et ce, en particulier, dans la
l’unanimité par le Conseil.
perspective de l’élargissement. L’entrée en vigueur du traité de
— Décision de stratégie commune: le Conseil européen Nice, le 1er février 2003, a fait avancer le dossier dans la mesure
(unanimité). où, comme on l’a vu, il a généralisé l’application de la
— Adoption d’actions communes, de positions communes procédure de la majorité qualifiée et l’a étendue notamment
ou d’autres décisions sur la base d’une stratégie commune, aux deuxième et troisième piliers. Cependant, il demeure que
adoption de décisions mettant en œuvre une action celle-ci ne trouve à s’appliquer que dans certains cas bien
commune ou une position commune: le Conseil, statuant à définis.
la majorité qualifiée, sauf si un État membre s’y oppose Le traité de Lisbonne étendrait considérablement le processus
pour des raisons importantes de politique nationale, décisionnel supranational dans l’ancien troisième pilier (justice
auquel cas le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, peut et affaires intérieures) et rendrait la règle de la majorité
saisir le Conseil européen en vue d’une décision à qualifiée et la procédure de codécision applicables, de manière
l’unanimité. générale, dans la législation de l’Union européenne (1.1.6).
— Adoption de positions communes ou d’actions communes
non couvertes par une stratégie commune: le Conseil, g Wilhelm LEHMANN
statuant à l’unanimité. Juillet 2008

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1.4.3. La procédure budgétaire
Depuis les traités de 1970 et de 1975, le rôle du Parlement européen dans la procédure budgétaire s’est renforcé. Le
Parlement et le Conseil sont sur un pied d’égalité pour l’adoption du budget. La distinction actuelle entre les dépenses non
obligatoires, pour lesquelles le Parlement a le dernier mot, et les dépenses obligatoires, pour lesquelles il peut seulement
proposer des modifications, serait éliminée par le traité de Lisbonne.

Base juridique général de 2008); il arrête définitivement le budget, il peut


— Article 272 du traité CE, article 177 du traité CEEA aussi le rejeter globalement.

— Articles 31 à 47 du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 B. Les étapes de la procédure


du Conseil du 25 juin 2002 portant règlement financier
L’article 272 du traité CE organise le déroulement de la
applicable au budget général des Communautés
procédure budgétaire en définissant un enchaînement
européennes (JO L 248 du 16.9.2002), tel que modifié
d’étapes dans des délais fixes que l’autorité budgétaire —
par le règlement (CE, Euratom) n° 1995/2006 du Conseil
constituée de deux branches, le Conseil de ministres et le
du 13 décembre 2006 (JO L 390 du 30.12.2006)
Parlement européen — doit impérativement respecter. La
— Accord interinstitutionnel (AII) du 17 mai 2006 sur la procédure budgétaire, telle qu’elle est définie par le traité,
discipline budgétaire et la bonne gestion financière s’étend ainsi du 1er janvier au 31 décembre de l’année
(JO C 139 du 14.6.2006) précédant l’exercice en question.
— Règlement du Parlement européen, annexe IV — Dans la pratique, depuis 1977, un calendrier «pragmatique» a
Procédure à appliquer pour l’examen du budget général été convenu entre les trois institutions et complété par les
de l’Union européenne et des budgets supplémentaires dispositions de l’accord interinstitutionnel sur la discipline
budgétaire et l’amélioration de la procédure budgétaire. Le
Objectifs déroulement des différentes phases de la procédure est
désormais le suivant:
Le pouvoir budgétaire consiste d’abord à déterminer la nature
des dépenses, ensuite à en fixer chaque année le montant 1. Première étape: l’élaboration de l’avant-projet
ainsi que les recettes nécessaires pour les couvrir et, enfin, à de budget par la Commission
contrôler l’exécution du budget. La procédure budgétaire
proprement dite comprend la préparation et l’adoption du Le Parlement et le Conseil arrêtent des orientations qui sont
budget (1.5.3 pour l’exécution et 1.5.4 pour le contrôle). examinées au cours d’une discussion tripartite sur les priorités
budgétaires et d’une procédure de concertation ad hoc sur les
dépenses obligatoires. La Commission établit l’avant-projet de
Réalisations budget et le transmet au Conseil et au Parlement au plus tard
A. Historique le 1er septembre (avant la fin du mois d’avril selon le calendrier
pragmatique). Depuis 2002, une décision stratégique de
Le Parlement est progressivement devenu la deuxième
politique annuelle (SPA) précède l’adoption de l’avant-projet
branche de l’autorité budgétaire.
de budget.
Avant 1970, le pouvoir budgétaire appartenait exclusivement
au Conseil; le Parlement n’avait qu’un rôle consultatif. L’avant-projet de budget est susceptible d’être modifié
ultérieurement par la Commission par voie de lettre
Les traités du 22 avril 1970 et du 22 juillet 1975 accroissent rectificative pour tenir compte de nouveaux développements.
les pouvoirs budgétaires du Parlement:
2. Deuxième étape: l’établissement du projet de budget
— le traité de 1970, consécutif à l’octroi de ressources propres
par le Conseil
à la Communauté, donne au Parlement le dernier mot sur
les dépenses dites «non obligatoires»; Dans sa première lecture, et après concertation avec une
délégation du Parlement, le Conseil, statuant à la majorité
— le traité de 1975 lui donne le droit de rejeter l’ensemble du
qualifiée, adopte le projet de budget qu’il transmet au
budget.
Parlement au plus tard le 5 octobre (avant la fin du mois de
Désormais, la décision budgétaire appartient conjointement juillet selon le calendrier pragmatique). En marge de cette
au Parlement et au Conseil, avec un rôle déterminant pour le lecture se déroule la procédure de concertation ad hoc sur les
Parlement: il a le dernier mot sur les dépenses non obligatoires, dépenses obligatoires à inscrire au budget, qui donne lieu
désormais prépondérantes (environ 67 % des engagements de préalablement à un trilogue entre les institutions vers la fin du
dépenses et 65 % des crédits de paiement dans le budget mois de juin.

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Le système de Les procédures décisionnelles
1 fonctionnement de 4
l’Union européenne

3. Troisième étape: la première lecture du Parlement recommencer depuis le début sur la base d’un nouveau
Le Parlement dispose de 45 jours pour se prononcer. projet et, tant que celui-ci n’est pas adopté, la
Communauté fonctionne avec des crédits mensuels
Dans ce délai, il peut soit approuver le projet de budget, soit calculés sur la base d’un douzième du budget précédent
ne pas se prononcer — dans les deux cas, le budget est réputé (régime des douzièmes provisoires).
définitivement adopté —, soit le modifier:
6. Les budgets rectificatifs et supplémentaires
— par des amendements pour les dépenses non obligatoires,
En cas d’événements inévitables, exceptionnels ou imprévus,
adoptés à la majorité absolue des membres composant
la Commission peut être amenée à proposer en cours
l’assemblée (majorité qualifiée);
d’exercice la modification du budget voté, sous la forme
— par des propositions de modification pour les dépenses d’avant-projets de budget rectificatif.
obligatoires, adoptées à la majorité absolue des suffrages
On a également recours à un budget rectificatif pour inscrire
exprimés (majorité simple»).
au budget de l’exercice en cours le solde de l’exercice
Le projet ainsi modifié est alors retransmis au Conseil. précédent.
4. Quatrième étape: la deuxième lecture du Conseil Ces budgets rectificatifs sont soumis aux mêmes règles que le
Le Conseil dispose de 15 jours pour cette deuxième lecture, budget général.
qui a généralement lieu pendant la troisième semaine de
novembre. Il peut: C. Dépenses obligatoires et dépenses non obligatoires
(1.5.1) (Cette distinction serait éliminée par le traité de
— accepter tous les amendements et toutes les propositions Lisbonne.)
de modification du Parlement, auquel cas le budget est
réputé arrêté; 1. Les dépenses obligatoires (DO)
La distinction entre les dépenses obligatoires (c’est-à-dire les
— ou ne pas les accepter, dans ce cas:
dépenses obligatoires qui découlent des traités) et les
• il se prononce définitivement sur les propositions de dépenses non obligatoires (les dépenses restantes) règle le
modification (portant sur les dépenses obligatoires): si partage du pouvoir entre les deux branches de l’autorité
la modification proposée n’a pas pour effet budgétaire. Le Parlement a le «dernier mot» sur les dépenses
d’augmenter le montant global des dépenses d’une non obligatoires (67 % du budget 2008) et le Conseil sur les
institution, il doit prendre, à la majorité qualifiée, une dépenses obligatoires (33 % du budget 2008).
décision expresse de rejet ou de modification, faute de
Le Parlement peut seulement faire des propositions de
quoi la proposition est réputée approuvée; dans le cas
modification sur les dépenses obligatoires, sur lesquelles le
contraire, le Conseil doit prendre, également à la
Conseil a le dernier mot. Cependant, comme on l’a vu, si les
majorité qualifiée, une décision expresse d’approbation,
propositions du Parlement n’ont pas pour effet d’augmenter le
faute de quoi la proposition est réputée rejetée;
montant global des dépenses d’une institution, le Conseil doit
• il peut modifier les amendements (portant sur les trouver une majorité qualifiée en son sein pour les rejeter,
dépenses non obligatoires) adoptés par le Parlement faute de quoi elles sont réputées adoptées. Par ce biais, le
ou les accepter. Parlement peut donc exercer une influence même sur les
Le projet de budget amendé, puis modifié, est de nouveau dépenses obligatoires.
transmis au Parlement vers le 22 novembre. 2. Les dépenses non obligatoires (DNO)
5. Cinquième étape: la deuxième lecture du Parlement Pour cette catégorie de dépenses (67 % du budget 2008), le
et l’arrêt du budget Parlement a le dernier mot puisqu’il est seul à trancher en
Pour achever sa deuxième lecture, le Parlement dispose de dernière lecture sur les amendements qu’il a précédemment
15 jours. adoptés. Cependant, son pouvoir est limité par le taux
maximal d’augmentation des dépenses.
— S’il ne se prononce pas dans ce délai, le budget est réputé
arrêté avec les amendements modifiés par le Conseil. 3. Le taux (maximal) d’augmentation des dépenses
non obligatoires
— Si, statuant à la majorité de ses membres et des trois
L’article 272 du traité CE, qui règle la procédure budgétaire,
cinquièmes des suffrages exprimés, il amende ou rejette
prévoit la possibilité pour le Parlement d’augmenter, dans
les modifications apportées par le Conseil à ses
certaines conditions, le montant des dépenses non
amendements initiaux, ses décisions clôturent la
obligatoires par voie d’amendements apportés au projet de
procédure: le président du Parlement constate que le
budget du Conseil dans la limite d’un taux d’augmentation par
budget est définitivement arrêté et il devient exécutoire.
rapport à l’exercice précédent, calculé par la Commission sur la
— Le Parlement peut aussi, statuant à la majorité de ses base de diverses données macroéconomiques. Le
membres et des deux tiers des suffrages exprimés, rejeter dépassement de ce taux maximal d’augmentation (TMA) est
globalement le budget. Dans ce cas, la procédure doit possible en accord avec le Conseil. Il constitue en fait la marge

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de manœuvre du Parlement au sens du traité. Dans la réalité, dépenses non obligatoires, peut rejeter le budget et donne
depuis l’entrée en vigueur des accords interinstitutionnels, la décharge à la Commission.
limite imposée par le plafond des perspectives financières s’est
L’article 272 est resté inchangé depuis lors; par deux fois, le
substituée au TMA dans le cadre de la procédure annuelle.
Parlement a rejeté le budget (décembre 1979 et décembre
4. La nouvelle procédure budgétaire 1988); la proportion des dépenses non obligatoires est passée
selon le traité de Lisbonne de 8 % du budget en 1970 à 57 % en 2005 et à 67 % des
Le traité de Lisbonne modifie considérablement la procédure engagements de crédit dans le budget 2008.
budgétaire dans le cadre de la nouvelle structure qu’il définit L’octroi par le Parlement de la décharge à la Commission pour
pour la gestion des finances de l’Union. La nouvelle procédure l’année n – 2, conformément à l’article 276 du traité CE (1.5.4),
sera ainsi plus simple et plus transparente. implique l’examen de l’exécution du budget, et les
Les modifications découlent principalement de l’élimination recommandations du Parlement exprimées dans la résolution
de la distinction faite actuellement entre les dépenses relative à la décharge devraient aider la Commission à
obligatoires et les dépenses non obligatoires, qui permettra améliorer l’exécution du budget.
d’appliquer la même procédure à l’ensemble des dépenses.
Le traité de Lisbonne renforce la position du PE en tant que
La procédure sera d’autant plus simplifiée qu’il n’y aura qu’une second bras de l’autorité budgétaire. En raison de l’élimination
seule lecture dans chaque institution, fondée sur le projet de de la distinction entre les dépenses obligatoires et les
budget présenté par la Commission (avant le 1er septembre). dépenses non obligatoires, le Parlement sera sur un pied
Le projet de budget sera d’abord examiné par le Conseil, qui d’égalité avec le Conseil pour les décisions concernant les
devra adopter sa position avant le 1er octobre. Après la dépenses de l’UE. La position du PE sera en fait plus forte que
communication de la position du Conseil au Parlement, ce celle du Conseil, puisque le Conseil ne pourra jamais imposer
dernier disposera de 42 jours pour approuver la position du un budget sans l’accord du PE, alors que le PE pourra, dans
Conseil (faute de quoi il s’agira d’une approbation par défaut) certaines circonstances, avoir le dernier mot et imposer un
ou pour adopter des amendements (à la majorité de ses budget sans l’accord du Conseil (voir le point C.4 ci-dessus).
membres). Cependant, cette situation sera assez exceptionnelle, et il serait
plus approprié de dire qu’en général, la nouvelle procédure
En cas d’adoption par le PE d’amendements à la position du
budgétaire fera l’objet d’une procédure de codécision réelle
Conseil, un comité de conciliation, composé des représentants
(bien que particulière) entre le Parlement et le Conseil, placés
des États membres et du même nombre de membres du PE,
sur un pied d’égalité, et couvrira l’intégralité des dépenses de
sera convoqué sauf si le Conseil informe dans les 10 jours le PE
l’Union.
qu’il accepte ses amendements.
Le comité de conciliation disposera de 21 jours pour adopter B. Les accords interinstitutionnels sur la discipline
un projet commun. Si ce délai est respecté, les deux budgétaire (AII, cadres financiers pluriannuels) (1.5.2)
institutions disposeront alors de 14 jours pour approuver le À la suite des crises budgétaires des années 80 (recours devant
projet commun, faute de quoi il sera réputé adopté. Si les deux la Cour de justice, retards dans l’adoption du budget, rejet du
institutions le rejettent (ou si le comité de conciliation n’est pas budget par le Parlement, recours aux douzièmes provisoires),
parvenu à un accord), la procédure sera arrêtée et un nouveau l’équilibre juridique, politique et institutionnel des années 70
projet de budget devra être présenté à la Commission. Ce sera s’était dégradé. Les institutions ont tenté de surmonter ces
également le cas si le Parlement le rejette et que le Conseil difficultés par la déclaration commune de 1982, préfigurant les
l’approuve. Par contre, si le Conseil le rejette mais que le PE accords interinstitutionnels de 1988 pour la mise en œuvre de
l’approuve, le PE aura toujours la possibilité de confirmer les l’Acte unique (1988-1992), de 1993 pour la période 1993-1999,
amendements qu’il a adoptés lors de la lecture (statuant à la de 1999 pour la période 2000-2006, et de 2006 pour la période
majorité de ses membres et des trois cinquièmes des suffrages 2007-2013.
exprimés) et qui n’ont pas été acceptés par le Conseil, faute de
quoi les sommes prévues dans le projet commun du comité Ces accords successifs ont permis de substituer aux occasions
de conciliation seront maintenues et le budget sera réputé de confrontation récurrentes un cadre de référence
arrêté sur cette base. interinstitutionnel pour les procédures budgétaires annuelles.
Ils ont considérablement amélioré le déroulement de la
Rôle du Parlement européen procédure budgétaire:

A. Les pouvoirs conférés par le traité (article 272 — en formalisant une procédure de collaboration
du traité CE) interinstitutionnelle au moyen de discussions tripartites et
de concertations entre les différentes étapes de
Depuis le traité de Bruxelles de 1975, le Parlement exerce un
l’établissement du budget;
pouvoir de décision budgétaire, au même titre que le Conseil.
Le Parlement et le Conseil constituent les deux branches de — en prévoyant des dispositions particulières dans certains
l’autorité budgétaire. Le Parlement a le dernier mot sur les domaines conflictuels tels que la classification des

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Le système de Le financement
1 fonctionnement de 5
l’Union européenne

dépenses, l’inscription des dispositions financières dans les par le Conseil à l’unanimité après approbation du Parlement (à
actes législatifs, les bases juridiques et les projets pilotes et la majorité de ses membres). Cet article dispose également
actions préparatoires (initiatives parlementaires sans base que, tout au long de la procédure, les institutions «prennent
juridique), les dépenses relatives aux accords de pêche, le toute mesure nécessaire pour faciliter cette adoption», ce qui
financement de la PESC, etc.; renforce le rôle du Parlement par rapport aux procédures
— en limitant le rôle de la règle du taux maximal d’avis conforme traditionnelles et augmente la possibilité de
d’augmentation; parvenir à un accord final.

— en créant des mécanismes de décision en faveur de En outre, ce même article prévoit la possibilité qu’à l’avenir le
ressources supplémentaires tels que l’instrument de CFP soit approuvé par le Conseil à la majorité qualifiée, à
flexibilité, la réserve d’urgence, le Fonds européen condition qu’une décision unanime et préalable du Conseil
d’ajustement à la mondialisation, le Fonds européen de européen l’autorise. En ce qui concerne son contenu, le futur
solidarité ou la révision des plafonds du cadre financier CFP juridiquement contraignant sera en grande partie similaire
pluriannuel (CFP). à l’AII actuel. Il durera au moins cinq ans, ce qui permettra de
faire coïncider la durée du CFP avec le mandat du PE et de la
Même si les cadres financiers pluriannuels ne remplacent pas Commission, comme le requiert le principe démocratique.
la procédure budgétaire annuelle, les accords
interinstitutionnels ont instauré une forme de codécision Le traité de Lisbonne établit également une hiérarchie claire
budgétaire qui permet au Parlement d’affirmer son rôle de entre les actes financiers fondamentaux de l’Union: le CFP doit
branche de l’autorité budgétaire à part entière, de consolider respecter les plafonds fixés lors de la définition de ses
sa crédibilité en tant qu’institution et d’orienter le budget en ressources propres, et le budget annuel doit respecter les
faveur de ses priorités politiques. plafonds fixés dans le CFP.
Le traité de Lisbonne institutionnalisera le CFP (article 312 du
traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, version g Jose-Luis PACHECO
consolidée), qui deviendra un acte juridiquement contraignant Helmut WERNER
adopté via une procédure législative spéciale: il sera adopté Juillet 2008

1.5. Le financement

1.5.1. Les recettes et les dépenses de l’Union


Les recettes sont déterminées par le Conseil après ratification des parlements nationaux des États membres. Les dépenses
du budget sont approuvées conjointement par le Conseil et le Parlement.

Base juridique — Règlement (CE, Euratom) n° 2028/2004 du Conseil du


— Traités: 16 novembre 2004 modifiant le règlement (CE, Euratom)
n° 1150/2000 portant application de la décision 94/728/CE,
• r ecettes fiscales: articles 268 à 280 du traité CE, Euratom relative au système des ressources propres des
article 173 du traité Euratom Communautés (JO L 352 du 27.11.2004)
• e mprunts: article 308 du traité CE, articles 172 et 203 du — Règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil du
traité Euratom 25 juin 2002 portant règlement financier applicable au
— Décision 2000/597/CE, Euratom du Conseil du budget général des Communautés européennes (JO L 248
29 septembre 2000 (JO L 253 du 7.10.2000, p. 42) du 16.9.2002), modifié par le règlement du Conseil (CE,

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Euratom) n° 1995/2006 du 13 décembre 2006 (JO L 390 du E. Le mécanisme de correction
30.12.2006), notamment les articles 40 à 47 La correction des déséquilibres budgétaires entre les
contributions des États membres fait aussi partie intégrante du
Objectifs système des ressources propres. Le «rabais britannique» décidé
en 1984, qui correspond à une réduction des contributions
Assurer à l’Union européenne une autonomie financière dans
TVA et PNB du Royaume-Uni, est financé par tous les autres
le respect de la discipline budgétaire.
États membres, bien que l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Autriche et
la Suède bénéficient d’un abattement à hauteur de 1/4 de leur
Réalisations contribution. La décision du Conseil européen de décembre
Le Parlement et le Conseil autorisent les dépenses, tandis que 2005 a confirmé ces arrangements, bien qu’elle prévoie une
les recettes sont fixées par décision du Conseil après élimination progressive du rabais britannique, ainsi que, pour
ratification par les parlements des États membres. la période 2007-2013 uniquement, une réduction de la
contribution RNB de 605 millions d’euros par an pour les
Pays-Bas et de 150 millions d’euros par an pour la Suède. En
I. Les recettes conséquence, et à la suite de la proposition de la Commission
du 8 mars 2006 [COM(2006) 99], le Conseil a décidé, le 7 juin
A. Les ressources propres traditionnelles 2007, que le système de ressources propres couvrirait ces
Elles ont été créées par la décision de 1970 et perçues depuis arrangements (cette décision est en cours de ratification et
lors. En 2008, elles représentent 16 % du budget. Il s’agit: entrera en vigueur rétroactivement le 1er janvier 2007).
— des prélèvements agricoles et des cotisations sur la F. Les opérations d’emprunts et de prêts
production de sucre; Le traité Euratom donne expressément à la Communauté la
— des droits de douane perçus aux frontières extérieures de possibilité d’emprunter. Ce n’est pas le cas du traité CE mais, en
l’Union. application de son article 308, les emprunts ont pris une
ampleur considérable depuis 1978.
B. La taxe sur la valeur ajoutée (TVA)
Le nouvel accord interinstitutionnel sur la discipline budgétaire
Prévu par la décision de 1970, le prélèvement TVA a dû et la bonne gestion financière de mai 2006 prévoit un recours
attendre l’harmonisation des systèmes de TVA entre États étendu à ces «nouveaux instruments financiers»: il invite la
membres pour être appliqué (1979). Il consiste à transférer à la Commission et la Banque européenne d’investissement (BEI),
Communauté une proportion de la TVA perçue par les États dans leurs domaines de compétence respectifs, à faire des
membres. En 2008, le produit du prélèvement TVA s’élève à propositions visant:
16 % du budget).
— conformément aux conclusions du Conseil européen de
C. «Autres» ressources propres décembre 2005, à porter jusqu’à 10 milliards d’euros la
Les autres revenus comprennent les taxes versées par le capacité de financement de la BEI pour les prêts et
personnel de l’UE sur ses rémunérations, les contributions de garanties en matière de recherche et de développement
pays tiers à certains programmes communautaires et les durant la période 2007-2013, dont une contribution de la
amendes infligées aux entreprises qui enfreignent les règles de BEI pouvant atteindre 1 milliard d’euros, provenant de la
concurrence ou d’autres lois. Ces ressources diverses réserve destinée à l’instrument de financement avec
représentent environ 1 % du budget. partage des risques;
— à renforcer les instruments en faveur des réseaux
D. Les ressources fondées sur le revenu national
transeuropéens (RTE) et des petites et moyennes
brut (RNB)
entreprises, en portant le montant des prêts et garanties
Créée par la décision de 1988, cette quatrième ressource disponibles à ce titre à quelque 20 et 30 milliards d’euros
propre consistait en un prélèvement sur le produit national au maximum, respectivement, dont une contribution de la
brut (PNB) des États membres d’un pourcentage fixé dans le BEI pouvant atteindre 0,5 milliard d’euros, provenant de la
cadre de chaque budget annuel. À ce jour, en 2008, elle réserve (RTE), et 1 milliard d’euros (compétitivité et
représente un taux de 0,5896 % du revenu national brut des innovation), respectivement.
États membres, conformément à l’article 2, paragraphe 1,
point d), de la décision 2000/597/CE, Euratom du Conseil du
29 septembre 2000. À l’origine, elle ne devait être perçue que II. Les dépenses
si les autres ressources propres étaient insuffisantes pour
couvrir les dépenses, mais elle finance aujourd’hui l’essentiel A. Principes
du budget communautaire: en 2008, les ressources fondées Conformément aux articles 3 à 30 du règlement financier, le
sur le revenu national brut représente 67 % du budget général budget communautaire obéit à neuf grands principes: unité,
de l’UE. vérité budgétaire, annualité, équilibre, unité monétaire (l’euro),

84

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Le système de Le financement
1 fonctionnement de 5
l’Union européenne

universalité, spécialité (chaque crédit est affecté à une dépense 3. Cadre financier pluriannuel (1.5.2)
de nature définie), bonne gestion financière et transparence. Depuis 1988, les dépenses de la Communauté se développent
Toutefois, il convient de concilier le principe d’annualité avec la dans un cadre pluriannuel appelé «Perspectives financières»,
nécessité de gérer des actions pluriannuelles qui ont pris une qui compartimente le budget en rubriques avec des plafonds
importance croissante dans le budget. Celui-ci comprend de dépenses. Le cadre financier pluriannuel indique l’ampleur
donc des crédits dissociés, à savoir: et la composition des dépenses prévisibles de la Communauté
et reflète les grandes priorités budgétaires de la période
— des crédits d’engagement qui couvrent pendant l’exercice couverte (généralement sept ans, avec le traité de Lisbonne
en cours le coût total des obligations juridiques «au moins cinq ans», ce qui permettrait de synchroniser le
contractées pour des actions qui s’étendent sur plusieurs délai de la Commission et celui imposé par la loi). Cela est
années; important pour les règlements concernant les différents
— des crédits de paiement destinés à couvrir les dépenses programmes européens qui doivent être conformes au cadre
découlant de l’exécution d’engagements contractés financier pluriannuel. Ces règlements, ainsi que le règlement
pendant l’exercice en cours ou les exercices précédents. financier (1.5.3), sont indispensables à la mise en œuvre du
budget.
De même, le principe d’unité n’est pas entièrement respecté
puisque les crédits du Fonds européen de développement ne Le cadre financier pluriannuel ne se substitue pas aux budgets
sont pas budgétisés. Dans ses résolutions, le Parlement a annuels.
demandé à maintes reprises que le Fonds européen de
développement soit intégré dans le budget général. Rôle du Parlement européen
B. Structure budgétaire par nature des crédits A. Recettes
1. Nature des crédits: dépenses obligatoires/dépenses Dans plusieurs résolutions (notamment sa résolution du
non obligatoires (1.4.3) 11 mars 1999, sa résolution du 8 juin 2005 sur les défis
Le traité CE (article 272) fixe deux types de dépenses: des politiques et les moyens budgétaires de l’Union élargie 2007-
dépenses dites «obligatoires», permettant de respecter les 2013, et sa résolution du 17 mai 2006 sur l’AII), le PE a souligné
obligations découlant du traité ou des actes arrêtés en vertu l’insuffisance des recettes et s’est prononcé en faveur d’une
de celui-ci, et des dépenses «non obligatoires» (les autres), réforme du système des ressources propres. Il a fait des
ainsi que deux procédures différentes. propositions pour garantir l’autonomie budgétaire de l’Union
et pour rendre la perception des recettes plus visible pour les
Les dépenses obligatoires comprennent essentiellement: citoyens et plus démocratique.
— les dépenses de soutien des prix agricoles (FEOGA- La résolution du 29 mars 2007 sur l’avenir des ressources
Garantie); propres de l’Union européenne (basée sur le rapport
— les accords internationaux, y compris les accords de pêche; d’initiative de M. Lamassoure qui a consulté les parlements
nationaux de l’UE en vue de parvenir à un consensus sur une
— les réserves pour garantie de prêts et les réserves d’aide approche cohérente concernant le futur des ressources
d’urgence; propres de l’UE) a fourni des lignes directrices communes pour
— les pensions des fonctionnaires. le travail de révision de la Commission en 2008/2009 et donné
un signal clair aux chefs d’État ou de gouvernement sur la
2. Dépenses opérationnelles/dépenses administratives/ manière dont leurs parlements voient l’avenir. Après avoir
budget par activité mentionné les défauts du système financier actuel, cette
Le budget général comprend une section par institution, soit résolution préconise une approche en deux étapes:
huit au total. Alors que les sections des institutions autres que
la Commission comprennent essentiellement des dépenses — la première étape consiste à faire en sorte que les États
administratives, celle de la Commission (section III) comporte membres soient tous égaux et solidaires;
des dépenses opérationnelles relatives au financement des — la seconde étape de la réforme consiste à créer un
actions et programmes et des dépenses administratives nouveau système de ressources propres basé sur les
nécessaires à leur mise en œuvre (assistance technique, principes suivants: respect intégral du principe de la
agences, ressources humaines). souveraineté fiscale des États membres, neutralité fiscale,
mise en œuvre progressive du nouveau système qui ne
Dans le cadre de sa réforme administrative, la Commission a
doit pas alourdir les dépenses publiques globales ni la
introduit une nouvelle nomenclature budgétaire à travers
charge fiscale qui pèse sur les citoyens.
l’établissement d’un budget par activité regroupant les
dépenses qui concourent à une même action, permettant Le traité de Lisbonne ouvre la voie dans cette direction
ainsi une meilleure évaluation du coût et de l’efficacité de [article 311 du traité sur le fonctionnement de l’UE (version
chaque politique communautaire: «l’établissement du budget consolidée) remplaçant l’article 279 du traité CE]. Il considère
par activités». que le budget doit être entièrement financé à partir de

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ressources propres, prévoit qu’après avoir consulté le mais il constitue aussi la base de l’encadrement des pouvoirs
Parlement, le Conseil adopte à l’unanimité une décision budgétaires du Parlement.
relative au système des ressources propres de l’Union, y
compris la possibilité de créer de nouvelles catégories de Le PE a introduit plusieurs recours devant la Cour de justice.
ressources propres et d’abolir les catégories existantes. Une Cependant, l’accord institutionnel sur la discipline budgétaire
décision de ce genre doit être ratifiée par les États membres. du 17 mai 2006 maintient la distinction entre dépenses
Cependant, les mesures de mise en œuvre doivent être obligatoires et dépenses non obligatoires mais confirme et
adoptées par le Conseil uniquement après approbation du développe le principe de la codécision budgétaire entre le PE
Parlement. On peut considérer cela comme un pas vers une et le Conseil.
méthode communautaire dans le domaine des ressources Comme expliqué plus en détail dans la fiche technique sur la
propres de l’Union. procédure budgétaire (1.4.3), la distinction actuelle entre les
dépenses non obligatoires, pour lesquelles le Parlement a le
B. Dépenses (1.4.3)
dernier mot, et les dépenses obligatoires, sur lesquelles il ne
Dès l’origine, le Parlement a critiqué la distinction entre peut que faire des propositions de modification, serait abolie
dépenses obligatoires et dépenses non obligatoires, qu’il par le traité de Lisbonne.
considère comme limitative de ses compétences. En effet, ce
critère, bien que de caractère technique, a des implications
institutionnelles importantes car il détermine la répartition des g Helmut WERNER
compétences budgétaires entre le Conseil et le Parlement, Juillet 2008

1.5.2. Le cadre financier pluriannuel


Afin d’améliorer la procédure budgétaire, les institutions européennes ont conclu depuis 1988 des accords
interinstitutionnels sur le processus budgétaire et la répartition du budget. Ces accords sont conclus pour plusieurs
années et portent le nom de «perspectives financières». Après les accords «Delors I» et Delors II» et l’«Agenda 2000»,
un quatrième accord a été conclu pour la période 2007-2013.

Base juridique Les institutions de la Communauté ont ainsi été amenées à


Les articles 268 à 274 du traité CE ne constituent que le convenir d’une méthode destinée à améliorer le déroulement
contexte général. Le cadre financier pluriannuel (CFP), ou de la procédure budgétaire, à garantir le respect de la
«perspectives financières», n’est pas mentionné dans les traités, discipline budgétaire, à s’accorder sur une programmation à
mais il est établi par des accords interinstitutionnels du moyen terme des grandes priorités budgétaires de la période
Parlement, du Conseil et de la Commission: à venir et, enfin, à traduire ces priorités dans un cadre financier
pluriannuel sous la forme de «perspectives financières».
— accord interinstitutionnel (AII) du 17 mai 2006 sur la
discipline budgétaire et la bonne gestion financière L’UE pourra ainsi élaborer et appliquer avec plus de cohérence
(JO C 139 du 14.6.2006); son annexe I a été modifiée par les programmes politiques pluriannuels.
décision du Parlement européen et du Conseil le Le traité de Lisbonne reconnaît et confère un statut
18 décembre 2007 (JO L 6 du 10.1.2008). juridiquement contraignant au CFP, qui «absorbera» en grande
partie la substance de l’actuel AII. En effet, l’article 312 du traité
Objectifs sur le fonctionnement de l’Union européenne dispose que le
Depuis les années 80, trois types de difficultés ont été à CFP «vise à assurer l’évolution ordonnée des dépenses de
l’origine de la dégradation de l’équilibre politique et l’Union dans la limite de ses ressources propres» et que «[…] le
institutionnel du régime financier de la Communauté: budget annuel de l’Union respecte le cadre financier
pluriannuel», posant ainsi la pierre angulaire de la discipline
— un climat conflictuel dans les relations entre les institutions; financière.
— la question des déséquilibres budgétaires;
En outre, cet article établit que le CFP «fixe les montants des
— l’inadaptation croissante des ressources aux besoins plafonds annuels des crédits pour engagements par catégorie
communautaires. de dépenses et du plafond annuel des crédits pour

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Le système de Le financement
1 fonctionnement de 5
l’Union européenne

paiements». Il ajoute que le CFP «[…] prévoit toute autre • t otal pour 2007-2013: 864 316 millions d’euros (100,0 %)
disposition utile au bon déroulement de la procédure (crédits d’engagement).
budgétaire annuelle», ce qui correspond en grande partie aux
— La partie II «Amélioration de la collaboration
objectifs de l’actuel AII.
interinstitutionnelle au cours de la procédure budgétaire»
et la partie III «Bonne gestion financière des fonds de l’UE»
Réalisations couvrent les points suivants:
Le premier AII a été conclu en 1988. Il couvrait les premières • les éléments qualitatifs sont au moins aussi importants
perspectives financières 1988-1992, connues sous le nom de que les éléments quantitatifs;
«paquet Delors I», qui avaient pour objectif de dégager les
ressources nécessaires pour accompagner la mise en œuvre • la possibilité pour la Commission de présenter un
de l’Acte unique européen. rapport sur l’AII si elle le juge nécessaire;
Comme le bilan du premier AII et des perspectives financières • la possibilité pour le Parlement nouvellement élu
a été positif, les institutions ont eu recours à la même d’évaluer le fonctionnement de l’AII d’ici à la fin de 2009
démarche en concluant le 29 octobre 1993 un nouvel AII, avec sur la base d’un rapport présenté par la Commission;
des perspectives financières pour la période 1993-1999, le • u
 n meilleur contrôle politique et financier de la
«paquet Delors II», qui a permis le doublement des Fonds politique étrangère et de sécurité commune (PESC):
structurels et l’augmentation du plafond des ressources des réunions à cet effet sont planifiées conjointement
propres (1.5.1). Le troisième AII sur les perspectives entre les commissions des affaires étrangères/des
financières, pour la période 2000-2006, l’«Agenda 2000», a été budgets du Parlement et les présidences du Conseil;
signé le 6 mai 1999; l’un de ses défis majeurs était de concilier
politique agricole commune (4.2.2) et élargissement (6.3.1). • liberté, sécurité et justice: le Conseil et la Commission
acceptent une déclaration unilatérale du Parlement
En février et juillet 2004, la Commission a présenté une visant à examiner le 2e pilier (justice et affaires
proposition pour un nouvel accord et des nouvelles intérieures) à chaque trilogue;
perspectives financières pour la période 2007-2013, qui, après
d’intenses négociations (voir ci-après), a conduit au nouvel AII • c ertification (contrôle interne): le texte de l’AII est un
du 17 mai 2006 prévoyant, pour les dépenses de l’UE, jusqu’à pas important pour assurer la bonne gestion financière
864,3 milliards d’euros pour la période 2007-2013. des fonds de l’UE;
L’accord interinstitutionnel se compose de trois parties. • r èglement financier: insertion dans l’AII d’une référence
à des principes qui devraient simplifier l’accès aux fonds
— La partie I concerne la définition et les modalités
de l’UE pour les bénéficiaires potentiels;
d’application du cadre financier ainsi que le cadre
pluriannuel des dépenses, par rubriques. • p
 rogrammation financière: la déclaration commune de
juillet 2000 est à présent intégrée dans l’AII (partie III).
Répartition sectorielle totale pour 2007-2013 (en
Elle permet à la commission des budgets de suivre de
millions d’euros, prix de 2004, chiffres du 17 mai 2006):
plus près l’impact de la législation en vigueur.
• rubrique 1 «Croissance durable», 382 139 (44,2 %),
Un avantage important des AII sur la discipline budgétaire est
• r ubrique 1a «Compétitivité pour la croissance et qu’ils permettent une programmation pluriannuelle cohérente
l’emploi», 74 098 (8,6 %), (1.4.3). À la suite de l’accord sur l’AII, la Commission a adopté,
• r ubrique 1b «Cohésion pour la croissance et l’emploi», le 24 mai 2006, un ensemble de mesures législatives,
308 041 (35,6 %), comportant 26 propositions révisées et 5 nouvelles
propositions, couvrant la majorité des programmes et
• r ubrique 2 «Conservation et gestion des ressources domaines politiques de l’UE.
naturelles», 371 344 (43,0 %),
La conclusion de ce nouvel AII présente des atouts importants:
• r ubrique 3 «Citoyenneté, liberté, sécurité et justice»,
10 770 (1,2 %), — continuité du processus législatif de l’UE: 90 % des
programmes de la Communauté se terminent à la fin de
• rubrique 3a «Liberté, sécurité et justice», 6 630 (0,8 %), 2009. Le fonctionnement des programmes est garanti;
• rubrique 3b «Citoyenneté», 4 140 (0,5 %), — premier cadre financier pour vingt-sept États membres
• r ubrique 4 «L’UE en tant qu’acteur mondial», 49 463 pour les sept années à venir;
(5,7 %), — juste équilibre des pouvoirs entre les institutions et
• rubrique 5 «Administration», 49 800 (5,8 %), principe de codécision;
• r ubrique 6 «Compensations (aux nouveaux États — il permet d’élaborer des politiques de l’UE et de mobiliser, si
membres)», 800 (0,1 %), nécessaire, des ressources additionnelles;

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— il garantit une marge de manœuvre dans le cadre des — négociations entre le Parlement européen, le Conseil et la
procédures budgétaires annuelles; Commission sur le nouvel AII (trilogues des 23 janvier 2006,
— révision sur la base de l’évaluation de la Commission de l’AII 21 février 2006, 21 mars 2006 et 4 avril 2006, où un accord a
actuel en 2009 et participation totale du Parlement à la finalement été obtenu);
grande révision à mi-parcours; — le Conseil a approuvé l’accord le 15 mai 2006, le Parlement
— il aide à répondre aux demandes du PE visant à améliorer la européen a exprimé un vote favorable le 17 mai 2006, et
qualité de la mise en œuvre du budget; l’accord a été signé le même jour.

— recours actif aux nouveaux instruments financiers grâce au B. Le Parlement européen a renforcé son rôle
cofinancement avec la Banque européenne Pour la première fois, le PE a adopté une position de
d’investissement (BEI); négociation avant les conclusions du Conseil:
— il préserve les prérogatives du Parlement en matière — le PE a insisté, malgré les réticences du Conseil, pour que
budgétaire et législative et renforce le contrôle les éléments qualitatifs soient négociés, afin d’améliorer la
démocratique des programmes externes et de la PESC; qualité de mise en œuvre du budget de l’UE (nouvelle
— assistance dans les cas d’urgence, bien qu’elle soit financée partie III de l’AII);
généralement en dehors du cadre financier; — le PE s’est opposé à l’approche (gouvernementale) du
— il assure la flexibilité et une réaction rapide du Fonds de Conseil sur les plafonds et les pourcentages et a centré ses
solidarité de l’Union européenne, de l’Instrument de efforts sur une approche fondée sur les programmes
flexibilité, du Fonds européen d’ajustement à la (approche des citoyens). Il a obtenu que le montant
mondialisation et de la réserve pour aides d’urgence; additionnel soit affecté à ses priorités et directement aux
programmes;
— il permet de mieux aligner, avec davantage de souplesse,
les actes législatifs et la programmation financière. — le PE a joué un rôle majeur en autorisant les moyens
budgétaires pour le lancement de Galileo, le système
La Commission a été invitée à entreprendre un réexamen européen de navigation par satellite (4.8.6). Par
complet et global couvrant tous les aspects des dépenses de conséquent, la décision du Parlement européen et du
l’UE, y compris la politique agricole commune, ainsi que des Conseil du 18 décembre 2007 (JO L 6 du 10.1.2008) a
ressources, et à faire rapport en 2008-2009. Ce réexamen modifié l’annexe I de l’accord interinstitutionnel du 17 mai
devrait être accompagné d’une évaluation du fonctionnement 2006 (JO C 139 du 14.6.2006);
de l’AII. Le Parlement européen sera associé au réexamen à
tous les stades de la procédure. — la future reconnaissance par le traité de Lisbonne du CFP
comme acte juridiquement contraignant adopté par une
procédure législative spéciale nécessitant le consentement
Rôle du Parlement européen du PE par la majorité de ses membres signifie que son rôle
A. Le processus de négociation du cadre financier en tant que partenaire égal du Conseil dans l’adoption de
pluriannuel 2007-2013 cet acte fondamental programmant l’évolution des
Le processus d’adoption des perspectives financières peut se dépenses de l’Union est formellement reconnu. Le
résumer comme suit: Parlement aurait peut-être préféré une procédure de
codécision au lieu de celle du consentement. Cependant,
— proposition de la Commission (février et juillet 2004); le fait que le nouveau traité précise que, tout au long de la
— en septembre 2004, le Parlement a mis en place une procédure, les institutions «prennent toute mesure
commission temporaire chargée d’examiner les nécessaire pour faciliter cette adoption» renforce son rôle.
perspectives financières; celle-ci a conclu et défini sa
position de négociation par la résolution du 8 juin 2005 sur g Jose-Luis PACHECO
les défis politiques et moyens budgétaires de l’Union Anne VITREY
élargie 2007-2013; Helmut WERNER
Juillet 2008
— position commune du Conseil européen (conclusions du
Conseil européen des 15 et 16 décembre 2005, le sommet
de juin 2005 n’ayant pu aboutir à des conclusions);

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Le système de Le financement
1 fonctionnement de 5
l’Union européenne

Cadre financier 2007-2013 (révisé)


en Mio EUR, prix de 2004
Total
Crédits d'engagement 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013
2007-2013
1.  Croissance durable 51 267 52 913 54 071 54 860 55 379 56 845 58 256 383 591
1a. Compétitivité pour la croissance 8 404 9 595 10 209 11 000 11 306 12 122 12 914 75 550
et l'emploi
1b. Cohésion pour la croissance 42 863 43 318 43 862 43 860 44 073 44 723 45 342 308 041
et l'emploi
2.  Conservation et gestion 53 478 54 322 53 666 53 035 52 400 51 775 51 161 369 837
des ressources naturelles
dont: dépenses de marché et 43 120 42 697 42 279 41 864 41 453 41 047 40 645 293 105
paiements directs
3.  Citoyenneté, liberté, 1 199 1 258 1 380 1 503 1 645 1 797 1 988 10 770
sécurité et justice
3a. Liberté, sécurité et justice 600 690 790 910 1 050 1 200 1 390 6 630
3b. Citoyenneté 599 568 590 593 595 597 598 4 140
4.  L'UE, acteur mondial 6 199 6 469 6 739 7 009 7 339 7 679 8 029 49 463
5.  Administration (1) 6 633 6 818 6 973 7 111 7 255 7 400 7 610 49 800
6.  Compensations 419 191 190 800
TOTAL DES CRÉDITS 119 195 121 971 123 019 123 518 124 018 125 496 127 044 864 261
D'ENGAGEMENT
(en % du RNB) 1,10 % 1,08 % 1,07 % 1,04 % 1,03 % 1,02 % 1,01 % 1,048 %
TOTAL DES CRÉDITS 115 142 119 805 112 182 118 549 116 178 119 659 119 161 820 676
DE PAIEMENT
(en % du RNB) 1,06 % 1,06 % 0,97 % 1,00 % 0,97 % 0,97 % 0,95 % 1,00 %
Marge disponible Plafond 0,18 % 0,18 % 0,27 % 0,24 % 0,27 % 0,27 % 0,29 % 0,24 %
des ressources propres (en % du RNB) 1,24 % 1,24 % 1,24 % 1,24 % 1,24 % 1,24 % 1,24 % 1,24 %
(1) S'agissant des dépenses de pension, les montants pris en compte sous le plafond de cette rubrique sont calculés nets des contributions du personnel au régime
correspondant, dans la limite de 500 millions d'euros aux prix de 2004 pour la période 2007-2013.
Source: Décision du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2007 modifiant l'accord interinstitutionnel du 17 mai 2006 sur la discipline budgétaire et la bonne
gestion financière en ce qui concerne le cadre financier pluriannuel (JO L 6 du 10.1.2008; JO C 139 du 14.6.2006).

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1.5.3. L’exécution du budget
La Commission exécute le budget sous sa propre responsabilité, en collaboration avec les États membres, conformément
aux règles du règlement financier et en tenant compte des principes de bonne gestion financière.

Base juridique il confère à la Commission des compétences pour l’exécution


— Articles 202, 274, 275 et 279 du traité CE des règles que le Conseil fixe à travers la comitologie
[article 202 du traité CE et décision 1999/468/CE du Conseil du
— Article 179 du traité Euratom 28 juin 1999 fixant les modalités de l’exercice des compétences
d’exécution conférées à la Commission (JO L 184 du 17.7.1999),
Objectifs modifiée par la décision 2006/512/CE du Conseil du 17 juillet
La Commission est tenue de se conformer aux traités dont elle 2006 (JO L 200 du 22.7.2006)], autrement dit avec l’aide du
est la gardienne, ainsi qu’aux dispositions et instructions qui comité consultatif, du comité de gestion et du comité de
figurent dans le règlement financier et dans les règlements, les réglementation composés des représentants des États
décisions ou les directives spécifiques. De plus, il importe que membres et dirigés par un représentant de la Commission.
les dépenses soient exécutées dans le cadre d’orientations Les États membres qui exécutent le budget de façon
politiques. La Commission exécute le budget sous sa propre insatisfaisante sont sanctionnés dans le cadre de la procédure
responsabilité (article 274) mais est soumise au contrôle d’apurement des comptes afférents aux dépenses agricoles: à
politique du Parlement européen (PE) (1.5.4) et au contrôle la suite de contrôles effectués par la Commission, les recettes
de la Cour des comptes (1.3.10). Les États membres que les gouvernements nationaux perçoivent du budget sont
coopèrent avec elle pour que les crédits soient utilisés corrigées. Un système identique a été mis en œuvre pour faire
conformément aux principes de la bonne gestion financière, à en sorte que seules les dépenses éligibles soient financées par
savoir économie, efficacité et effectivité. les Fonds structurels.
Cette forme d’exécution peut susciter des difficultés entre le
Fonctionnement Conseil et le PE. En effet, le Conseil peut décider de se réserver
le droit d’engager des dépenses ou, au cas où le comité
A. Mécanisme de base
compétent composé de représentants des États membres
L’exécution du budget comporte deux opérations principales, rendrait un avis contraire à une décision d’engagement prise
l’engagement et le paiement: en premier lieu, l’engagement des par la Commission, de modifier cette décision.
dépenses. Une décision est prise en vue d’affecter un certain
montant d’une ligne budgétaire déterminée pour financer une La Cour des comptes a souvent critiqué l’exécution du budget
activité spécifique, puis, une fois les engagements légaux dans certains secteurs (1.3.10). Depuis la démission de la
correspondants (comme des contrats) déterminés et le contrat Commission en mars 1999 à la suite du premier rapport du
de services, de travaux ou de fournitures exécuté, interviennent comité d’experts indépendants, qui avait dénoncé des
l’ordonnancement des dépenses et le paiement des sommes dues. dysfonctionnements et des exemples de mauvaise gestion,
une chaîne de responsabilité administrative et politique ainsi
B. Organismes d’exécution que des normes de gestion financière ont été instaurées au
Le budget peut être exécuté par gestion centralisée (par les sein de la Commission.
services de la Commission), gestion partagée (par la
C. Règles d’exécution
Commission et les organismes nationaux), gestion commune
(avec les organisations internationales) et gestion déléguée 1. Le règlement financier
(via des agences exécutives créées par décision de la Le processus de refonte du règlement financier, dans lequel le
Commission), en vertu de l’article 54 du règlement financier. Parlement a joué un rôle majeur à travers ses prérogatives
budgétaires, a constitué un élément clé de la réforme
Dans la pratique, une grande proportion du budget est administrative de la Commission. Le précédent règlement
exécutée au jour le jour par les États membres, surtout pour ce (datant de 1977) reposait sur le système du contrôle préalable
qui est des sections du budget afférentes à l’agriculture de chaque institution par le contrôleur financier central. Ce
(FEOGA: 4.2.6) et aux Fonds structurels et de cohésion (Fonds système a fait place à un système décentralisé de contrôles ex
européen de développement régional: 4.5.2; Fonds social ante et a posteriori, qui permet à l’ordonnateur de procéder,
européen: 4.9.2; Fonds européen de la pêche: 4.4.3; Fonds dans le cadre du directorat général, à la dépense sans devoir
de cohésion: 4.5.3), et par les États candidats dans le cadre recourir à une approbation préalable du contrôleur financier,
des aides de préadhésion (6.3.1). mais elle sera soumise par la suite à différents types de
Dans certains cas spécifiques, le Conseil peut exercer contrôles, y compris ceux relevant de l’audit interne. Le
directement des compétences d’exécution mais, généralement, règlement financier [règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du

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Le système de Le financement
1 fonctionnement de 5
l’Union européenne

Conseil du 25 juin 2002 portant règlement financier applicable et recommandations adressées à la Commission — dont
au budget général des Communautés européennes (JO L 248 l’exécution est surveillée dans des rapports de suivi.
du 16.9.2002), tel que modifié par le règlement (CE, Euratom) De plus, dans presque tous les domaines stratégiques, le PE
n° 1995/2006 du Conseil du 13 décembre 2006 (JO L 390 du influence l’exécution du budget par ses activités législatives et
30.12.2006)] devrait être lu parallèlement à ses modalités non législatives, par exemple par des rapports et des
d’exécution [règlement (CE, Euratom) n° 2342/2002 de la résolutions ou simplement en adressant des questions
Commission du 23 décembre 2002 établissant les modalités orales ou écrites à la Commission.
d’exécution du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du
Conseil (JO L 357 du 31.12.2002) tel que modifié par le Au cours des dernières années, le Parlement a renforcé son
règlement (CE, Euratom) n° 1261/2005 de la Commission du contrôle politique sur la Commission à travers la mise en place
20 juillet 2005 (JO L 201 du 2.8.2005)]. d’instruments permettant un échange d’informations sur l’état
d’exécution des crédits et le niveau des restes à liquider, à
Le principal instrument dont dispose la Commission pour savoir les engagements légaux qui n’ont pas encore été
l’exécution du budget et la surveillance de son exécution est le honorés. Les restes à liquider peuvent poser problème s’ils
système comptable informatisé ABAC (comptabilité s’accumulent sur des durées plus longues. Le PE incite donc la
d’exercice). La Commission a adapté le système aux obligations Commission à les garder sous contrôle.
stipulées dans le nouveau règlement financier. Cela implique
le passage d’une comptabilité «de caisse» à une comptabilité De nouveaux outils mis au point devraient permettre un
moderne «d’exercice», qui permet d’enregistrer les meilleur contrôle de l’exécution et l’amélioration du rapport
événements comptables (comme contracter un engagement qualité/prix des programmes de l’Union européenne (UE). À cet
légal) lorsqu’ils se produisent plutôt que lorsque l’argent est effet, le PE soutient les déclarations d’activité de haut niveau
reçu ou payé. En outre, la Commission a pris des mesures pour (préparées par la Commission dans les documents de travail de
satisfaire aux plus hautes normes comptables internationales, l’avant-projet de budget général) et les analyses régulières
en particulier aux normes comptables internationales pour le d’efficacité des coûts des programmes communautaires.
secteur public (IPSAS) établies par la Fédération internationale Enfin, il convient de mentionner que le Parlement européen a
des experts-comptables (IFAC). largement influencé et contribué à la nouvelle révision du
règlement financier ainsi qu’à l’accord interinstitutionnel du
2. Les règles de passation des marchés
17 mai 2006 sur la discipline budgétaire et la bonne gestion
Le respect de la législation communautaire applicable à la financière (cadre financier pluriannuel: 1.5.2). Les éléments
passation des marchés publics (fourniture, travaux et services: clés sont l’amélioration de l’exécution du budget,
3.4.1) constitue un aspect important de l’exécution l’accroissement de la visibilité et des avantages du
budgétaire. financement de l’Union européenne pour les citoyens et la
réalisation d’un juste équilibre entre la protection des intérêts
Rôle du Parlement européen financiers, le principe de proportionnalité des coûts
administratifs et la convivialité des procédures. En vertu de
Le PE, en tant qu’un des deux bras de l’autorité budgétaire,
l’article 44 de l’accord interinstitutionnel susmentionné,
influence «préalablement» l’exécution du budget
priorité sera accordée à une bonne gestion financière visant
communautaire par les amendements et les décisions
l’obtention d’une déclaration d’assurance positive par la Cour
d’allocation de crédits qu’il prend dans le contexte de la
des comptes (1.3.10 et 1.5.4).
procédure budgétaire (1.4.3). Le PE peut demander à
recourir au mécanisme budgétaire de la réserve: au cours Comme mentionné ci-dessus, la décision de comitologie
de la procédure budgétaire, la Commission peut proposer de 1999/468/CE du 28 juin 1999 a été modifiée par la décision
transférer dans une réserve certains crédits afférents à des 2006/512/CE du Conseil du 17 juillet 2006 (JO L 200 du
dépenses dont la justification, la suffisance ou les conditions 22.7.2006). La nouvelle procédure de réglementation avec
d’exécution ne lui semblent pas convaincantes (titre contrôle autorise le Parlement à examiner les mesures quasi
«Dispositions», article 43 du règlement financier). Les législatives d’implémentation d’un instrument adopté en
virements de crédits proposés par la Commission requièrent codécision et à rejeter lesdites mesures à la majorité absolue
l’approbation du Parlement européen et du Conseil (article 24 des députés européens. Cette nouvelle procédure consolide
du règlement financier). donc le pouvoir de contrôle du Parlement.
En outre, la procédure de décharge (1.5.4), bien qu’elle L’article 317 du traité de Lisbonne (version consolidée)
concerne l’exercice financier clos deux ans plus tôt, permet au souligne, plus clairement que l’article 274 du traité CE qu’il
PE de contrôler et d’influer sur l’exécution budgétaire courante. devrait remplacer, les obligations de contrôle et d’audit des
Beaucoup de questions posées par la commission du contrôle États membres dans le cadre de l’exécution du budget de l’UE.
budgétaire à la Commission dans le cadre de la procédure de
décharge concernent l’exécution du budget, et la résolution g Anne VITREY
relative à la décharge, qui fait partie intégrante de la décision Helmut WERNER
concernant la décharge, contient de nombreuses obligations Juillet 2008

91

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1.5.4. Le contrôle budgétaire
Le contrôle budgétaire s’opère au sein de chaque institution européenne et au niveau des États membres. La Cour des
comptes et le Parlement européen assurent un important travail de contrôle. Chaque année, ce dernier examine
l’exécution du budget, en vue de donner décharge à la Commission européenne.

Base juridique — le rapport annuel sur l’exécution du budget général, y


— Articles 274, 275, 276, 279 et 280 du traité CE compris les budgets de toutes les institutions et organes
satellites;
— Articles 180b et 183 du traité Euratom
— des rapports spéciaux sur des dossiers particuliers;

Objectifs — des rapports annuels spécifiques relatifs aux agences et


organes de l’Union européenne.
Vérifier le caractère licite, l’exactitude et la solidité financière
des opérations budgétaires au sens large. La Cour fait rapport également sur les opérations d’emprunts
et de prêts, ainsi que sur le Fonds européen de
Réalisations développement.
3. Contrôle au niveau politique: par le Parlement
A. Contrôle au niveau national
européen
Le contrôle initial des recettes du budget de l’Union
Au sein du Parlement, la commission du contrôle budgétaire
européenne (UE) et des dépenses est exercé en partie par les
est chargée:
instances nationales. Celles-ci ont gardé leurs compétences,
surtout en matière de ressources propres traditionnelles — du contrôle de l’exécution du budget de l’Union;
(1.5.1), car elles disposent des instruments nécessaires à la
— de la clôture, de la présentation et de l’audit des comptes
perception et au contrôle desdites sommes. Les États
et des bilans de l’Union, de ses institutions et de tous les
membres retiennent 25 % des ressources propres
organes qu’elle finance;
traditionnelles pour couvrir les frais de perception (cette part
s’élevait à 10 % avant la décision 2000/597/CE, Euratom du — du contrôle de la rentabilité des différentes formes de
29 septembre 2000 sur les ressources propres, entrée en financement communautaire dans la mise en œuvre des
vigueur le 1er mars 2002). La collecte des ressources propres politiques de l’Union;
traditionnelles n’en revêt pas moins une grande importance
— de l’examen des fraudes et des irrégularités dans
pour les institutions de l’Union européenne. Aussi le Parlement
l’exécution du budget de l’Union, de l’adoption de mesures
européen (PE) a-t-il institué une commission d’enquête sur la
visant à prévenir et à poursuivre ces cas de fraudes et
fraude dans le transit communautaire (voir ci-après). Les
d’irrégularités, et de la protection des intérêts financiers
dépenses opérationnelles à la charge du Fonds européen
généraux de l’Union.
d’orientation et de garantie agricole (FEOGA) et des Fonds
structurels sont également contrôlées en premier lieu par les Elle prépare également les décisions de décharge.
autorités des États membres qui, souvent, doivent supporter
La procédure de décharge
une partie du coût de ces interventions.
Une fois par an, le Parlement, sur recommandation du Conseil,
B. Contrôle au niveau communautaire donne décharge à la Commission sur l’exécution du budget de
1. Contrôle interne l’année n – 2, après avoir examiné le rapport annuel de la Cour
des comptes et les réponses de la Commission et d’autres
Au sein de chaque institution, le contrôle est effectué par les
institutions à ses propres questions (article 276 du traité CE). La
ordonnateurs et les comptables, puis par l’auditeur interne de
Commission et les autres institutions sont tenues de donner
l’institution concernée.
suite aux observations faites par le Parlement dans sa
2. Contrôle externe: par la Cour des comptes (1.3.10) résolution de décharge (article 147 du règlement financier).
Le contrôle externe est effectué par la Cour des comptes
De même, le Parlement donne décharge annuellement aux
européenne (CCE), qui présente chaque année à l’autorité
autres institutions ainsi qu’aux agences. Le Parlement donne à
budgétaire des rapports détaillés conformément aux
la Commission une décharge séparée concernant la mise en
dispositions de l’article 248 du traité, à savoir:
œuvre des mesures relatives au Fonds européen de
— une déclaration d’assurance (DAS) concernant la fiabilité développement, celles-ci n’étant pas encore intégrées dans le
des comptes ainsi que la légalité et la régularité des budget général. La décision de décharge du Parlement et sa
opérations sous-jacentes; résolution relative à l’exécution du budget général,

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Le système de Le financement
1 fonctionnement de 5
l’Union européenne

section I — Parlement européen, sont adressées au président pouvoir de donner décharge conjointement avec le Conseil.
du Parlement. Depuis le 1er juin 1977, date à laquelle le traité du 22 juillet
1975 est entré en vigueur, il est seul à donner décharge sur les
Le Parlement étudie les rapports de décharge lors de
comptes, après que le Conseil a émis sa recommandation.
l’assemblée plénière du mois d’avril.
Ainsi, l’octroi de la décharge est voté lors de la période de B. Recours à la décharge
session du mois d’avril et, si celle-ci est reportée, lors de la Le PE peut décider de reporter la décharge s’il estime que la
période de session du mois d’octobre. manière dont la Commission a exécuté le budget laisse à
Si la proposition d’octroi de la décharge n’est pas soutenue par désirer sur certains points. Le refus de la décharge peut être
une majorité, ou si le Parlement décide de différer sa décision assimilé à une demande de démission de la Commission. La
de décharge, le Parlement informe les institutions ou les menace a été mise à exécution en décembre 1998: le rejet, par
agences concernées des raisons du refus de la décharge. Elles un vote en assemblée plénière, de la proposition de décharge
sont tenues de prendre sans tarder les mesures nécessaires à a été suivi de la constitution d’un groupe de cinq experts
l’élimination des obstacles à la décision de décharge. indépendants qui a enquêté sur des accusations de fraude, de
mauvaise gestion et de népotisme visant la Commission
Ensuite, la commission du contrôle budgétaire soumet dans européenne; le collège des commissaires a démissionné
les six mois un nouveau rapport contenant une nouvelle collectivement le 16 mars 1999.
proposition d’octroi ou de refus de la décharge.
Les différents membres de la commission du contrôle
4. Mesures antifraudes: par l’OLAF budgétaire se spécialisent dans telle ou telle politique
L’Office de lutte antifraude (OLAF) a été institué en 1999 communautaire et préparent la réponse du PE aux rapports
(décision 1999/352/CE, CECA, Euratom de la Commission). Il spéciaux de la Cour des comptes relatifs à leurs domaines de
est compétent pour mener des enquêtes indépendantes de la compétence respectifs, généralement sous la forme de
Commission. Il a été renforcé à l’instigation du PE. Son rôle documents de travail qui fournissent des orientations au
concerne la protection des intérêts financiers de l’Union; il est rapporteur général de la décharge.
investi de la responsabilité de la lutte contre les fraudes
Comme cela a déjà été précisé, la Commission, les autres
commises au détriment des fonds de l’Union européenne
institutions et les agences font rapport sur les mesures prises
dans toutes les institutions et de la coordination des organes
pour faire suite aux observations accompagnant les
compétents dans les États membres.
résolutions de décharge. Les États membres informent la
Dans le cadre des règlements (CE) n° 1073/1999 et (Euratom) Commission des mesures prises à la suite des observations du
n° 1074/1999 relatifs aux enquêtes menées par l’OLAF, le Parlement, et la Commission en tient compte dans son propre
Parlement, le Conseil et la Commission ont signé, le 25 mai rapport de suivi (article 147 du règlement financier).
1999, un accord interinstitutionnel relatif aux enquêtes
internes. Cet accord stipule que chaque institution établit des Comme indiqué dans la fiche technique sur la Cour des
règles internes communes visant à assurer le bon déroulement comptes (1.3.10), après plusieurs années consécutives sans
des enquêtes menées par l’OLAF. Certaines de ces règles, qu’une déclaration d’assurance positive non assortie de
désormais intégrées dans le statut des fonctionnaires des réserves ait été émise par la Cour des comptes, le Parlement
Communautés européennes, obligent le personnel à coopérer européen a encouragé le développement d’un cadre de
avec l’OLAF et prévoient une certaine protection des membres contrôle intégré qui comprend également la gestion partagée
du personnel qui divulguent des informations concernant une avec les États membres.
fraude ou une corruption éventuelle. Ce système est C. Autres instruments
également connu sous le nom de «dénonciation des
Les commissions spécialisées du PE contribuent également à
dysfonctionnements».
garantir que les crédits communautaires sont dépensés de
L’article 280 du traité CE concerne la fraude et les intérêts manière efficiente, au mieux des intérêts du contribuable
financiers de l’UE; il prévoit une coopération étroite et régulière européen.
entre les États membres et la Commission ainsi que la
possibilité de mesures spécifiques du Conseil visant à offrir une En outre, des membres de la commission du contrôle
protection effective et équivalente des intérêts financiers de la budgétaire ont rencontré, à plusieurs occasions, des
Communauté dans les États membres. représentants des commissions homologues des parlements
des États membres, les autorités nationales de contrôle ainsi
que des représentants des services des douanes. Des députés
Rôle du Parlement européen ont également effectué un certain nombre d’enquêtes sur le
A. Évolution des compétences terrain afin de vérifier les faits à l’origine de problèmes
particuliers.
Entre 1958 et 1970, le PE était seulement tenu informé des
décisions quant à la décharge donnée par le Conseil à la En décembre 1995, le PE a exercé pour la première fois le droit
Commission sur l’exécution du budget. En 1971, il a obtenu le que lui a conféré le traité de créer une commission d’enquête.

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Cette commission a fait rapport sur des allégations de fraudes du Parlement européen a suggéré à la Commission une
et de mauvaise administration sous le régime de transit révision de ces règles.
communautaire. Les 38 recommandations de la commission
Le traité de Lisbonne renforce les mécanismes de contrôle
d’enquête ont recueilli une large approbation. La commission
axés sur les résultats obtenus par les programmes de l’Union
du contrôle budgétaire a suivi leur mise en œuvre. C’est dans
européenne mis en œuvre avec les finances de l’Union.
ce contexte qu’a été développé le nouveau système de transit
L’article 318 du traité de Rome (version consolidée, remplaçant
informatisé (NSTI).
l’article 275 du traité CE) oblige la Commission à soumettre au
Parlement et au Conseil, en tenant compte de leurs
Plusieurs fonctionnaires des institutions européennes qui
indications, un rapport d’évaluation complet tel qu’indiqué
avaient divulgué des informations concernant de possibles cas
dans la procédure de décharge annuelle.
de fraude, de corruption ou de mauvaise gestion n’ayant pas
fait l’objet d’une protection adaptée dans le cadre des règles
de protection prévues par le système de dénonciation des g Helmut WERNER
dysfonctionnements, la commission du contrôle budgétaire Juillet 2008

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Le système de

2
1 fonctionnement 4 Les politiques communes
de l’Union européenne
L’Union économique
2 L’Europe des citoyens 5 et monétaire

Les relations extérieures


3 Le marché intérieur 6 de l’Union européenne

L’Europe des citoyens


L’Europe des citoyens englobe divers aspects tels que les droits fondamentaux, la citoyenneté
de l’Union, la libre circulation des personnes au sein de l’Union, le droit de vote et d’éligibilité
aux élections européennes et locales, ainsi que le droit de pétition devant le Parlement
européen.

2.1. Le respect des droits fondamentaux


dans l’Union, 97
2.2. Les citoyens de l’Union
et leurs droits, 100
2.3. La libre circulation
des personnes, 102
2.4. Le droit de vote et d’éligibilité, 107
2.5. Le droit de pétition, 108

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L’Europe des citoyens Le respect des droits
2 1 fondamentaux dans l’Union

2.1. Le respect des droits fondamentaux


dans l’Union
La base juridique des droits fondamentaux de l’Union européenne réside principalement dans la convention européenne
de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, à laquelle se réfère le traité UE. La charte des droits
fondamentaux de l’Union européenne ne sera, elle, juridiquement contraignante qu’une fois que le traité de Lisbonne sera
entré en vigueur. La jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes a aussi grandement contribué au
respect des droits de l’homme au sein de l’Union européenne.

Base juridique Objectifs


La garantie des droits fondamentaux est l’un des acquis du Assurer la protection des droits fondamentaux dans la création,
droit communautaire européen. Cependant, les traités ne l’application et l’interprétation du droit communautaire. Dans
comportent pas de catalogue écrit de ces droits. Seul le leur fonction classique de droits de défense, les droits
principe de l’égalité de rémunération entre les hommes et les fondamentaux communautaires protègent l’individu contre les
femmes a été inscrit, dès l’origine, à l’article 19 du traité. ingérences de puissance publique des institutions
communautaires.
La Cour de justice a reconnu très tôt l’existence de droits
fondamentaux au niveau communautaire et a développé en Réalisations
permanence cette notion. Selon sa jurisprudence constante, ils
font partie des principes généraux du droit et équivalent, dans A. La jurisprudence de la Cour de justice
la hiérarchie des normes communautaires, au droit 1. Énoncé des droits
communautaire primaire. Dès 1974, la Cour de justice a décidé que les droits
fondamentaux feraient partie des principes généraux du droit
La source de ces principes généraux du droit est désormais
qu’elle se devait de sauvegarder et qu’elle s’inspirerait, pour ce
l’article 6, deuxième alinéa, du traité UE, selon lequel l’Union
faire, des traditions constitutionnelles communes aux États
européenne (UE) a l’obligation de respecter les droits
membres. En conséquence, une mesure incompatible avec les
fondamentaux tels qu’ils sont garantis par la convention
droits fondamentaux reconnus et protégés par les
européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des
constitutions de ces États ne saurait être légitime (Cour de
libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et tels qu’ils
justice, ERT, Recueil 1991, p. I-2925, point 41). Les droits
résultent des traditions constitutionnelles communes aux États
fondamentaux individuels les plus importants reconnus à ce
membres en tant que principes généraux du droit
jour par la Cour sont les suivants:
communautaire.
— la dignité humaine (Casagrande, Recueil 1974, p. 773);
Le traité d’Amsterdam a introduit l’article 13 du traité CE pour
combattre les discriminations ainsi qu’un article 7 du traité UE — le principe d’égalité (Klöckner-Werke AG, Recueil 1962,
prévoyant que le Conseil, réuni au niveau des chefs d’État ou p. 653);
de gouvernement et statuant à l’unanimité sur proposition — la non-discrimination (Defrenne/Sabena, Recueil 1976,
d’un tiers des États membres ou de la Commission et après p. 455);
avoir pris l’avis conforme du Parlement européen, peut
— la liberté d’association (Confédération syndicale, Massa e.a.,
constater l’existence d’une violation grave et persistante par
Recueil 1974, p. 917 et 925);
un État membre des principes de l’article 6. Dans ce cas, le
Conseil, statuant à la majorité qualifiée, pourrait décider de — la liberté de religion et de croyance (Prais, Recueil 1976,
priver temporairement l’État membre en question de certains p. 1589 et 1599);
droits des traités. Le traité de Nice a complété ce dispositif par — la protection de la vie privée (National Panasonic, Recueil
une procédure visant un risque clair de violation grave de ces 1980, p. 2033 et 2056 et suiv.);
principes par un État membre (article 7, paragraphe 1, du
traité UE). — le secret médical (Commission/Allemagne, Recueil 1992,
p. I-2575);
Le traité de Lisbonne consacre la valeur juridique de la charte
— le droit de propriété (Hauer, Recueil 1979, p. 3727, 3745 et
des droits fondamentaux et prévoit une nouvelle base
suiv.);
juridique pour l’adhésion de l’UE à la convention européenne
des droits de l’homme. — la liberté professionnelle (Hauer, Recueil 1979, p. 3727);

97

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— la liberté du commerce (arrêt Internationale instance ad hoc composée de représentants de différents
Handelsgesellchaft, Recueil 1970, p. 1125, 1135 et suiv.); corps constitués (réunion de Tempere d’octobre 1999).
— la liberté économique (Usinor, Recueil 1984, p. 4177 et Cette instance, qui s’est donné le nom de «Convention», a
suiv.); innové en publiant ses documents de travail et ses débats.
— la liberté de la concurrence (France, Recueil 1985, p. 531); La charte a été proclamée par le Parlement européen, le
Conseil et la Commission le 7 décembre 2000, lors du Conseil
— le respect de la vie familiale (Commission/Allemagne,
européen de Nice.
Recueil 1989, p. 1263);
2. Contenu
— le droit à une protection judiciaire efficace et à une procédure
équitable (Johnston/Chief Constable of the Royal Ulster a. Les droits énoncés par la charte se répartissent en trois
Constabulary, Recueil 1986, p. 1651 et suiv. et 1682; «corbeilles»:
Pecastaing/Belgique, Recueil 1980, p. 691 et suiv. et 716); — les droits civils: droits de l’homme et droits de la
— l’inviolabilité du domicile (Hoechst AG/Commission, procédure juridique, tels que garantis par la convention
Recueil 1989, p. 2919); européenne des droits de l’homme établie par le Conseil
de l’Europe;
— la liberté d’opinion et de publication (VBVB, VBBB, Recueil
1984, p. 9 et suiv. et 62). — les droits politiques qui sont propres à la citoyenneté
européenne créée par les traités;
2. Portée de la protection
— les droits économiques et sociaux, qui reprennent ceux
Si une violation d’un droit fondamental est constatée, la Cour
énoncés par la charte communautaire des droits sociaux
de justice prononce à titre rétroactif la nullité de l’acte ou de
des travailleurs, adoptée le 9 décembre 1989 au sommet
l’action attaqué(e). Sa décision lie toutes les parties.
de Strasbourg, par les chefs d’État ou de gouvernement
Cependant, la jurisprudence de la Cour impose des limites à la des onze États membres, sous la forme d’une déclaration.
protection des droits fondamentaux:
Ces droits ne représentent pas une innovation: la charte a été
— ces droits doivent s’insérer dans la structure et les objectifs établie «à droit constant», c’est-à-dire qu’elle regroupe les
de la Communauté. Ils doivent donc être envisagés droits fondamentaux déjà reconnus par les traités
toujours au regard de la fonction sociale de l’activité communautaires, les principes constitutionnels communs aux
protégée (Internationale Handelsgellschaft, Recueil 1970, États membres, la convention européenne des droits de
p. 1125); l’homme et les chartes sociales de l’UE et du Conseil de
— autre limitation: le principe de proportionnalité et de la l’Europe. Toutefois, le texte donne une place particulière aux
garantie de l’essence du droit. Il signifie que la problèmes découlant du développement actuel et futur des
Communauté, lorsqu’elle intervient dans un domaine technologies de l’information ou du génie génétique lorsqu’il
protégé par un droit fondamental, ne peut ni violer le consacre des droits comme la protection des données
principe de proportionnalité ni porter atteinte au contenu personnelles ou les droits liés à la bioéthique. Il répond aussi
essentiel du droit (Schräder/Hauptzollamt Gronau, Recueil aux demandes contemporaines de transparence et
1989, p. 2237, point 15). d’impartialité dans le fonctionnement de l’administration
communautaire en reprenant le droit d’accès aux documents
C’est la Communauté européenne qui est dans l’obligation administratifs qui synthétise la jurisprudence de la Cour en la
de respecter les droits fondamentaux. Les États membres ne matière.
sont liés par les normes minimales que contiennent ces
droits que lorsqu’ils appliquent le droit communautaire b. Présentation des droits
(article 10, paragraphe 5, du traité CE) (voir l’arrêt du 29 mai La charte rassemble dans un même texte tous les droits des
1997 dans l’affaire Kremzow/Autriche, Recueil 1997, p. I-2629, personnes. Elle met ainsi en œuvre le principe d’indivisibilité
points 15 à 19). des droits fondamentaux. Rompant avec la distinction, jusque-
là observée dans les textes européens et internationaux, entre
Lorsqu’elles édictent des actes relevant du droit
droits civils et politiques, d’une part, et droits économiques et
communautaire dérivé portant sur les droits fondamentaux,
sociaux, d’autre part, elle énumère l’ensemble des droits
les institutions de la Communauté doivent tenir également
autour de quelques principes majeurs: la dignité humaine, les
compte des dispositions internationales relatives aux droits de
libertés fondamentales, l’égalité entre les personnes, la
l’homme et respecter en particulier les normes de la
solidarité, la citoyenneté et la justice.
convention européenne des droits de l’homme.
c. Destinataires
B. La charte des droits fondamentaux Dans le respect du principe d’universalité, les droits énumérés
1. Procédure d’élaboration dans la charte sont, pour la plupart, donnés à toute personne,
Le Conseil européen a décidé le principe d’une charte indépendamment de sa nationalité ou de son lieu de
européenne des droits fondamentaux à élaborer par une résidence. Il en va différemment des droits liés directement à la

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L’Europe des citoyens Le respect des droits
2 1 fondamentaux dans l’Union

citoyenneté de l’Union, qui sont donnés aux seuls citoyens Rôle du Parlement européen
(comme la participation aux élections du Parlement européen 1. Attitude générale
ou aux élections municipales), ou des droits qui sont liés à une
Le Parlement européen a constamment accordé une grande
qualité particulière (droits des enfants, droits des travailleurs
importance au respect des droits fondamentaux dans l’Union.
pour certains droits sociaux, par exemple).
Depuis 1993, il organise chaque année un débat et adopte une
La charte vise uniquement à protéger les droits fondamentaux résolution sur le sujet sur la base d’un rapport de sa commission
des personnes à l’encontre des actes pris par les institutions de des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures.
l’UE et par les États membres en application des traités de
2. Actions particulières
l’Union.
Le Parlement s’est préoccupé surtout de la codification de ces
3. Portée droits dans un document ayant force juridique.
La question s’est posée de la valeur juridique de la charte pour
Il a été à l’origine de la déclaration de principe sur la définition
les États membres et les institutions communautaires bien que
des droits fondamentaux adoptée par les trois institutions
la Commission et le Parlement européen aient déclaré lui
politiques de l’Union (Parlement, Conseil et Commission), le
reconnaître une force contraignante et que la Cour de justice
5 avril 1977, et élargie en 1989.
ait déjà invoqué certaines de ses dispositions. Le projet de
traité établissant une Constitution pour l’Europe intégrait la En 1994, il a élaboré un catalogue des droits fondamentaux
charte dans sa partie II. garantis par l’Union.
Un article du traité de Lisbonne fait référence à la charte — qui Il a accordé une importance essentielle à l’élaboration de la
n’est pas incorporée dans le traité lui-même — et la rend charte en en faisant «une de ses priorités de nature
juridiquement contraignante. Un protocole introduit constitutionnelle» et en précisant ses exigences, en particulier
des mesures dérogatoires en faveur de la Pologne et du que le document:
Royaume-Uni. — soit doté pleinement d’un caractère juridique contraignant
C. Adhésion de l’UE à la convention européenne par le biais de son incorporation au traité sur l’Union («une
de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés charte qui ne constituerait qu’une déclaration non
fondamentales contraignante et se bornerait à énumérer des droits
existants décevrait les attentes légitimes des citoyens»);
Le projet de traité établissant une Constitution pour l’Europe
c’est ainsi qu’il a demandé qu’elle soit incorporée au traité
prévoyait que l’Union adhère à la convention (article I-9).
de Nice et qu’il demande maintenant à ce qu’elle le soit
Le traité de Lisbonne consacre cette adhésion. dans le nouveau traité FUE;
D. L’Agence des droits fondamentaux de l’UE — ne soit amendable que par la même procédure que celle
L’Observatoire européen des phénomènes racistes et de son élaboration, respectant donc le droit formel d’avis
xénophobes, créé à partir de 1997 et établi à Vienne, est conforme du Parlement;
transformé en Agence des droits fondamentaux, à la suite de — contienne une clause exigeant l’assentiment du Parlement
la décision du Conseil européen de décembre 2003. pour toute restriction sur les droits fondamentaux;
Toutefois, les compétences de l’Agence seront limitées au seul — reconnaisse l’indivisibilité des droits fondamentaux, en
volet communautaire. étendant son champ d’application à toutes les institutions
Concernant son rôle dans les domaines de la coopération et à tous les organes de l’UE, ainsi qu’à toutes ses
policière et judiciaire en matière pénale (titre VI du traité UE), le politiques, y compris celles relevant des deuxième et
Conseil est convenu que les institutions de l’Union et les États troisième piliers dans le cadre des compétences et
membres pourraient, selon les besoins et sur une base fonctions qui lui ont été confiées par les traités;
volontaire, faire appel aux compétences de l’Agence. Le — lie les États membres lorsqu’ils appliquent ou transposent
Conseil réexaminera, avant la fin de 2009, la possibilité des dispositions du droit communautaire (résolutions du
d’autoriser l’Agence à exercer ses activités dans les domaines 16 septembre 1999 et du 23 octobre 2002).
du titre VI.
Il a enfin régulièrement demandé que l’UE adhère à la
Le règlement du Conseil du 15 février 2007 portant création de convention européenne des droits de l’homme, soulignant
l’Agence est entré en vigueur le 1er mars 2007. que cette adhésion ne ferait aucunement double emploi avec
une charte communautaire ayant valeur contraignante.
Le 28 février 2008, le Conseil a adopté une décision instituant
un cadre pluriannuel de l’Agence qui définit ses domaines Il a demandé, à plusieurs reprises, la création d’une Agence des
d’action et priorités pour 2007-2012 (décision 2008/203/CE du droits fondamentaux de l’Union européenne. Dans une
Conseil, JO L 63 du 7.3.2008). Le danois Morten Kjærum a été résolution du 26 mai 2005, constituant une demande
nommé directeur de l’Agence en mars 2008 et a pris ses d’initiative législative selon l’article 192 du traité CE, il souligne
fonctions le 1er juin 2008. que l’Agence doit suivre l’évolution de la mise en œuvre de la

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charte et des dispositions du traité. Elle doit garantir la qualité Le Parlement européen a souligné la nécessité que l’Agence
et la cohérence de la politique de l’UE en matière de droits de puisse exercer ses activités dans les domaines relevant du
l’homme. L’Agence doit être indépendante. Un trilogue titre VI du traité UE, coopération policière et judiciaire en
informel entre Parlement européen, Conseil et Commission a matière pénale.
été mis en place pour définir la structure et le mandat de
l’Agence.
g Jean-Louis ANTOINE-GRÉGOIRE
Juillet 2008

2.2. Les citoyens de l’Union et leurs droits


Consacrée par le traité CE dans son article 17, la citoyenneté européenne est le premier levier de la formation de l’identité
européenne. Elle se différencie principalement de la citoyenneté des États membres, qu’elle vient compléter, par le fait que
les droits qu’elle confère aux citoyens ne sont pas assortis de devoirs.

Base juridique Réalisations


Articles 17 à 22 du traité CE 1. Définition de la citoyenneté de l’Union
Aux termes de l’article 17 du traité CE (le traité de Lisbonne
Objectifs prévoit également d’introduire cette définition à l’article 8 du
traité sur l’Union européenne), est citoyen de l’Union toute
Dans l’esprit de la liberté de circulation des personnes inscrite personne ayant la nationalité d’un État membre, laquelle
dans les traités, les années 60 ont vu naître l’idée d’instaurer découle de l’application des dispositions propres à cet État. La
une citoyenneté européenne assortie de droits et de devoirs citoyenneté de l’Union, qui complète la citoyenneté nationale
précisément définis. À la suite des travaux préparatoires mais ne la remplace pas, se compose d’un ensemble de droits
accomplis depuis le milieu des années 70, le traité sur l’Union et de devoirs venant s’ajouter aux droits et aux devoirs
européenne, adopté à Maastricht en 1992, donne comme attachés à la citoyenneté d’un État membre.
objectif à l’Union de «renforcer la protection des droits et des
intérêts des ressortissants [des États membres] par 2. Contenu de la citoyenneté
l’instauration d’une citoyenneté de l’Union». Une nouvelle Le statut de la citoyenneté de l’Union signifie pour tout citoyen
partie (articles 17 à 22) du traité CE est consacrée à cette de l’Union:
citoyenneté.
— le droit à la libre circulation et le droit de séjour sur le
Par référence à la citoyenneté attachée à un État, la territoire des États membres (2.3);
citoyenneté de l’Union européenne (UE) désigne un rapport
— le droit de vote et l’éligibilité aux élections du Parlement
entre le citoyen et l’Union caractérisé par des droits, des
européen et aux élections municipales dans l’État membre
devoirs et la participation à la vie politique. Ce lien doit
où il réside dans les mêmes conditions que les
permettre d’effacer la coupure due au fait que les citoyens de
ressortissants de cet État (2.4);
la Communauté sont de plus en plus largement concernés par
les mesures communautaires, tandis que l’exercice des droits — le droit de recevoir sur le territoire d’un pays tiers
et l’accomplissement des obligations, ainsi que la participation (n’appartenant pas à l’Union européenne) la protection
aux processus démocratiques, se situent presque diplomatique ou consulaire de la part des autorités d’un
exclusivement sur le plan national. Il s’agit de faire en sorte que autre État membre, si son pays n’y est pas représenté, dans
les citoyens s’identifient davantage à l’Union européenne et la même mesure que les ressortissants de l’État membre
que se développent une opinion publique, une conscience concerné;
politique et une identité européennes.
— le droit de pétition devant le Parlement européen et le
Il importe aussi de renforcer la protection des droits et des droit de faire appel à un médiateur désigné par le
intérêts des ressortissants des États membres (article 2, Parlement européen pour connaître des cas de mauvaise
troisième tiret, du traité UE). administration des institutions et organes communautaires.

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L’Europe des citoyens Les citoyens de l’Union
2 2 et leurs droits

Ces procédures sont régies par les articles 194 et 195 du une proposition appropriée sur des questions pour
traité CE (1.3.14 et 2.5); lesquelles ces citoyens considèrent qu’un acte juridique de
— le droit d’écrire à toute institution ou organe de la l’Union est nécessaire aux fins de l’application des traités».
Communauté dans l’une des langues des États membres
et de recevoir une réponse dans la même langue Rôle du Parlement européen
(article 21, troisième alinéa, du traité CE);
— En élisant le Parlement européen au suffrage direct, les
— le droit d’accès aux documents du Parlement européen, du citoyens de l’Union exercent l’un des droits essentiels de
Conseil et de la Commission, sous réserve de la fixation de l’Union européenne, à savoir la participation démocratique
certaines conditions (article 255 du traité CE). au processus de décision politique en Europe.
— Le traité de Lisbonne souligne davantage les principaux — Dès l’origine, le Parlement européen a souhaité que le
droits des citoyens de l’Union en les énumérant à concept de citoyenneté de l’Union soit assorti de larges
l’article 17, paragraphe 2, du traité CE. droits. Il a plaidé pour que la citoyenneté de l’Union soit
3. Portée définie de manière autonome par la Communauté, en
À ce jour, le contenu de la citoyenneté de l’Union ne va pas, sorte que les citoyens de l’Union jouissent d’un statut
pour l’essentiel (le droit électoral faisant exception), au-delà de spécifique. En outre, il a très tôt demandé tout
la systématisation de droits déjà reconnus (notamment la particulièrement que les droits de l’homme et les droits
liberté de circulation, le droit de séjour et le droit de pétition), à fondamentaux soient inscrits dans le droit primaire et que
cela près que ces droits ont été désormais inscrits, au nom les citoyens de l’Union puissent saisir la Cour de justice en
d’un projet politique, dans le corpus du droit primaire. cas de violation de ces droits par des institutions de l’Union
ou par un État membre (résolution du 21 novembre 1991).
Au contraire de l’orientation constitutionnaliste qui a cours
dans les États européens depuis l’adoption en France, en 1789, — Dans le cadre des négociations du traité d’Amsterdam, le
de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, la Parlement européen a réitéré sa demande d’élargissement
citoyenneté de l’Union ne va pas de pair avec la garantie de la des droits liés à la citoyenneté de l’Union et a déploré que
jouissance des droits fondamentaux. L’article 6, paragraphe 2, le traité ne fasse aucun progrès significatif sur le contenu
du traité UE stipule certes que «l’Union respecte» les droits de la citoyenneté de l’Union ni dans le domaine des droits
fondamentaux garantis par la convention européenne de individuels ni dans le domaine des droits collectifs. La
sauvegarde des droits de l’homme et des libertés réalisation du principe de l’égalité et de l’interdiction de
fondamentales et par les «traditions constitutionnelles discrimination par l’adoption de mesures à la majorité
communes aux États membres» en tant que principes qualifiée est une demande du Parlement encore restée
généraux du droit communautaire, mais ne précise pas le sans réponse (résolution du 11 juin 1997). Il faut toutefois
statut juridique de la citoyenneté de l’Union [sur les droits noter que, depuis le traité d’Amsterdam, c’est la procédure
fondamentaux de l’Union (2.1)]. de codécision qui s’applique aux mesures, ce qui facilite
l’exercice des droits de citoyenneté de l’Union (article 18,
Jusqu’à présent, la citoyenneté de l’Union n’impose pas — paragraphe 2).
malgré la formule contenue à l’article 17, paragraphe 2, du
traité CE — de devoirs aux citoyens de l’Union; c’est là une — En conformité avec les demandes du Parlement européen,
différence tout à fait fondamentale avec la citoyenneté au sein le projet de traité établissant une Constitution pour
des États membres. l’Europe du 18 juillet 2003, élaboré par la Convention sur
l’avenir de l’Europe, prévoyait que toute personne physique
— L’article 22, second alinéa, du traité CE et l’article 48 du
ou morale peut former un recours contre les actes dont
traité UE offrent des perspectives pour le développement
elle est le destinataire ou qui la concernent directement et
progressif de la citoyenneté de l’Union et l’amélioration du
individuellement ainsi que contre les actes réglementaires
statut juridique, sur le plan européen, des citoyens de
qui la concernent directement et qui ne comportent pas
l’Union. Le traité de Lisbonne prévoit d’ailleurs, dans
de mesures d’exécution. Cette disposition est reprise dans
l’article 8 B du traité sur l’Union européenne, un nouveau
le traité de Lisbonne.
droit pour les citoyens de l’Union, «au nombre d’un million
au moins, ressortissants d’un nombre significatif d'États
membres, de prendre l’initiative d’inviter la Commission g Claire GENTA
européenne, dans le cadre de ses attributions, à soumettre Juillet 2008

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2.3. La libre circulation des personnes
La libre circulation des personnes au sein de l’Union européenne implique la suppression des contrôles aux frontières
intérieures. Elle est régie par les accords de Schengen incorporés dans le traité CE et par la directive 2004/38/CE du
Parlement européen et du Conseil. Plusieurs directives réglementent le cadre juridique applicable aux ressortissants
extracommunautaires.

Base juridique Les règles de Schengen s’appliquent dans la plupart des


pays européens, couvrant une population de plus de
— Article 14 du traité CE établissant le marché intérieur: libre 400 millions de personnes sur une surface totale de
circulation des personnes 4 268 633 km².
— Article 18 du traité CE: droit des citoyens de l’Union de a. Intégration dans le «pilier communautaire» du système
séjourner et de circuler librement sur le territoire des États Schengen et d’autres volets de la coopération dans
membres les domaines de la justice et des affaires intérieures
— Partie IV du traité d’adhésion signé le 16 avril 2003: À l’origine, la convention d’application Schengen constituait
dispositions temporaires un volet de la coopération dans les domaines de la justice et
des affaires intérieures dans le cadre de l’Union européenne.
— Titre IV (articles 61 et suivants) du traité CE: «Visas, asile,
Elle ne constituait donc pas un volet du droit communautaire,
immigration et autres politiques liées à la libre circulation
mais revêtait seulement la forme d’une coopération
des personnes» (4.11.2 et 4.11.3 pour les mesures
intergouvernementale. Un protocole du traité d’Amsterdam
concernant les ressortissants de pays tiers)
prévoit la reprise de l’acquis de Schengen dans un nouveau
titre IV, comprenant les articles 61 et suivants du traité CE,
Objectifs intitulé «Visas, asile, immigration et autres politiques liées à la
libre circulation des personnes». Une grande partie des
La liberté de circulation des personnes et la suppression des matières couvertes par Schengen sont donc
contrôles aux frontières intérieures font partie d’un concept «communautarisées». Comme bon nombre des domaines
plus vaste, celui du marché intérieur, dans lequel il ne peut y couverts par les accords de Schengen font désormais partie de
avoir de frontières intérieures et la liberté de circulation des l’acquis de l’Union européenne, lors du dernier élargissement
personnes ne peut être entravée. Le concept de la liberté de de l’Union européenne, le 1er mai 2004, les pays adhérents
circulation des personnes a subi un changement sémantique n’ont plus eu la possibilité de ne pas y participer (article 8 du
depuis ses origines. Il s’agissait d’abord simplement de la protocole Schengen).
liberté de circulation d’individus considérés comme des sujets
économiques, soit en tant que travailleurs soit en tant que b. Pays participants
prestataires de services (3.2.2 et 3.2.3). Le concept s’est élargi
À ce jour, 24 pays participent de plein droit à l’espace
progressivement pour englober l’ensemble des citoyens de
Schengen, ainsi que la Principauté de Monaco (considérée
l’Union, indépendamment de leur activité professionnelle, et
comme faisant partie de la France): la Belgique, la République
également les ressortissants des pays tiers, étant donné qu’à
tchèque, le Danemark, l’Allemagne, l’Estonie, la Grèce,
l’issue de la suppression des contrôles aux frontières
l’Espagne, la France, l’Italie, la Lettonie, la Lituanie, le
intérieures, il ne peut plus y avoir de vérification de la
Luxembourg, la Hongrie, Malte, les Pays-Bas, l’Autriche, la
nationalité.
Pologne, le Portugal, la Slovénie, la Slovaquie, la Finlande et la
Suède, ainsi que l’Islande et la Norvège. Pour les 9 États
Réalisations membres qui ont adhéré en mai 2004 (Chypre ne remplissait
pas les critères), les contrôles des personnes aux frontières
A. Changements apportés par le traité d’Amsterdam intérieures terrestres et maritimes ont été abolis le
1. L’espace Schengen 21 décembre 2007, tandis que les restrictions aux frontières
aériennes ont été levées le 30 mars 2008.
L’élément majeur pour l’instauration d’un marché intérieur
dépourvu d’obstacles à la libre circulation des personnes a été Tous les membres de l’espace Schengen ne font pas partie de
la conclusion des deux accords de Schengen (accord de l’Union européenne. Par ailleurs, L’Irlande et le Royaume-Uni
Schengen du 14 juin 1985 et convention d’application de ne sont pas membres de l’espace Schengen mais peuvent
l’accord de Schengen du 19 juin 1990, cette dernière étant choisir de participer à l’application de certains volets de la
entrée en vigueur le 26 mars 1995). législation Schengen.

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L’Europe des citoyens La libre circulation des personnes
2 3

Le 1er janvier 2007, deux nouveaux pays (la Bulgarie et la poursuivre les criminels en fuite sur le territoire d’un
Roumanie) ont adhéré à l’Union européenne. Ces deux État limitrophe signataire de la convention de
nouveaux États membres ne sont pas devenus Schengen.
automatiquement des membres pleinement opérationnels de
l’espace Schengen. Il faut pour cela une procédure en deux Le système d’information Schengen (SIS) revêt une importance
étapes. Pendant les négociations d’adhésion, les nouveaux essentielle pour l’efficacité de la convention: il fournit des
États membres ont accepté l’acquis Schengen. La levée des informations relatives à l’entrée de ressortissants de pays tiers,
contrôles aux frontières intérieures nécessite une vérification à la délivrance de visas et à la coopération policière. L’accès au
et une décision spécifique du Conseil européen. SIS est réservé en priorité aux services de police et aux
autorités chargées des contrôles frontaliers. De plus, l’actuel
La Suisse a signé la convention Schengen le 26 octobre 2004. système d’information Schengen a une capacité limitée. Un
Elle deviendra membre à part entière du système Schengen nouveau système (le SIS II) devrait être mis en place d’ici au
lorsqu’une décision du Conseil européen donnera le feu vert, 31 décembre 2008. Compte tenu des retards constatés dans le
dans le cadre d’une procédure similaire à celle qui a vu les pays déploiement du SIS II, le Portugal a proposé une version
nordiques devenir membres à part entière de l’espace modifiée de son système SIS 1+, baptisé «SIS one4all».
Schengen. «SIS one4all» constitue une solution temporaire censée
Chypre et la Suisse, qui ne fait pas partie de l’UE, espèrent permettre aux États membres qui ont adhéré à l’UE en 2004
adhérer cette année, et la Roumanie et la Bulgarie d’ici à (la République tchèque, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie,
2011. la Hongrie, Malte, la Pologne, la Slovénie et la Slovaquie)
c. Portée d’adhérer à l’espace Schengen.
— Suppression des contrôles aux frontières intérieures pour d. Conséquences institutionnelles
toutes les personnes.
— Avec l’entrée en vigueur du traité d’Amsterdam, le Conseil
— Renforcement et harmonisation de la surveillance des
s’est substitué au comité exécutif de la convention de
frontières extérieures:
Schengen. En outre, en vertu des dispositions du titre IV du
• t ous les citoyens de l’Union européenne peuvent traité CE, il était tenu d’édicter, dans un délai de
pénétrer dans l’espace Schengen sur simple cinq années, des mesures «afin de mettre en place
présentation de leur carte d’identité ou de leur progressivement un espace de liberté, de sécurité et de
passeport; justice» dans le domaine des visas, de l’asile, de
• p
 olitique commune des visas: les ressortissants des l’immigration et des autres politiques liées à la libre
pays tiers figurant sur la liste commune des pays non circulation des personnes, pour garantir que les citoyens de
membres dont les nationaux sont tenus de produire un l’Union et les ressortissants des pays tiers ne fassent pas
visa d’entrée ont droit à un visa unique valable pour l’objet de contrôles lorsqu’ils franchissent les frontières
tout l’espace Schengen; cependant, les États membres intérieures. Le Conseil était également chargé d’assurer
peuvent exiger un visa des ressortissants d’autres pays l’uniformité des contrôles effectués sur les personnes aux
tiers; frontières extérieures et de fixer des règles uniformes pour
la délivrance de visas et l’octroi de la liberté de circulation
• h
 armonisation du traitement des demandes d’asile: ce sur le territoire des États membres aux ressortissants de
principe a été repris par la convention de Dublin, qui pays tiers. Ces mesures d’accompagnement, qui relèvent
est entrée en vigueur le 1er septembre 1997 pour les du droit dérivé, ont été identifiées par le Conseil dans sa
douze signataires originaux, le 1er octobre 1997 pour résolution du 18 décembre 1997 sur les priorités.
l’Autriche et la Suède et le 1er janvier 1998 pour la
Finlande. Depuis le 1er septembre 2003, le règlement — Avec la communautarisation de certains volets de la JAI, la
«Dublin II» constitue la base juridique établissant les Cour de justice s’est vu attribuer de nouvelles
critères et mécanismes de détermination de l’État compétences, car les mesures prises dans le cadre du
membre responsable de l’examen d’une demande nouveau titre IV du traité CE peuvent donner lieu à la
d’asile présentée dans l’un des États membres de l’UE (à saisine de la Cour, dans la mesure où, conformément à
l’exclusion du Danemark, mais y compris l’Islande et la l’article 68, paragraphe 2, elles ne concernent pas la
Norvège) par un ressortissant d’un pays tiers. suppression des contrôles aux frontières, le maintien de
Cependant, depuis cette date, la convention de Dublin l’ordre et de la sécurité publics, ainsi que la sauvegarde de
reste en vigueur entre le Danemark et les autres États la sécurité intérieure.
membres de l’Union européenne (ainsi qu’avec l’Islande
et la Norvège); 2. Territoire de l’Union européenne
• c oopération policière et judiciaire: les forces de police La convention de Schengen n’étant pas encore appliquée dans
se prêteront assistance mutuelle dans la détection et la tous les États membres de l’Union, il convient de dissocier
prévention de la criminalité et seront habilitées à l’ensemble du territoire de l’Union de l’espace Schengen.

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a. Ressortissants de l’Union et leurs familles partenariat enregistré, si, conformément à la législation de
Pour transformer la Communauté en un espace de vraie liberté l’État membre d’accueil, les partenariats enregistrés sont
et de vraie mobilité pour tous ses citoyens, le Conseil a garanti équivalents au mariage, les descendants directs qui sont âgés
le droit de séjour aux personnes autres que les travailleurs: de moins de 21 ans ou qui sont à charge et ceux du conjoint
ou du partenaire tel que visé plus haut, les ascendants directs
— retraités: travailleurs salariés et non salariés ayant cessé leur à charge et ceux du conjoint ou du partenaire.
activité professionnelle (directive 90/365/CEE);
Cette directive a été transposée dans le droit national et a
— étudiants: faisant valoir leur droit à la formation
commencé à être mise en œuvre par tous les États membres à
professionnelle (directive 90/366/CEE);
compter du 30 avril 2006. Elle a désormais remplacé toutes les
— autres: toutes les personnes ne bénéficiant pas encore du mesures législatives précitées.
droit de séjour (directive 90/364/CEE);
c. Période de transition pour les travailleurs des nouveaux États
— les membres de la famille (conjoint et enfants de moins de membres
21 ans, quelle que soit leur nationalité) ont le droit de Le traité d’adhésion signé le 16 avril 2003 (acte
résider avec un ressortissant d’un État membre qui travaille d’adhésion, partie IV — Dispositions temporaires) permet
sur le territoire d’un autre État membre [règlement (CEE) aux quinze «anciens» États membres d’instaurer les mesures
n° 1612/68, directive 73/148/CEE, directive 90/364/CEE, dites «transitoires» pour les ressortissants des dix nouveaux
directive 90/365/CEE, directive 93/96/CEE]. États membres, à l’exception des cas particuliers de Chypre et
Ces directives font obligation aux États membres d’accorder le de Malte. Le traité d’adhésion signé le 25 avril 2005 permet aux
droit de séjour à ces personnes ainsi qu’à certains membres de 25 États membres d’appliquer ces mesures aux ressortissants
leur famille (y compris, dans certains cas, les ascendants), des deux États membres ayant adhéré en 2007.
pourvu qu’ils disposent de ressources suffisantes pour ne pas
Les périodes transitoires se répartissent en trois phases.
être à charge des régimes nationaux de protection sociale et
qu’ils soient protégés par un régime d’assurance-maladie. Pour la République tchèque, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la
Cependant, les droits des membres de la famille sont des Hongrie, la Pologne, la Slovénie et la Slovaquie (8 États
droits dérivés et ils dépendent du droit du ressortissant de membres), elles se dérouleront comme suit:
l’Union européenne auquel la famille considérée se rattache; il
— au cours de la première étape, entre 2004 et 2006, la libre
faut que ce dernier ait exercé effectivement son droit à la libre
circulation des travailleurs a relevé exclusivement des États
circulation. Si les membres de la famille ne sont pas des
membres de l’EU-15. L’Irlande, la Suède et le Royaume-Uni
citoyens de l’Union européenne, l’État membre de résidence
sont les trois seuls membres de l’Union qui n’ont pas fermé,
peut leur demander d’être titulaires d’un visa d’entrée.
à titre provisoire, leurs portes à la mobilité sur leurs
En 2004, l’Union a adopté une directive relative au droit des marchés du travail respectifs. Comme le demandait le traité
citoyens de l’Union de circuler et de séjourner librement sur le d’adhésion, la Commission a élaboré un rapport sur la
territoire des États membres: la directive 2004/38/CE du première étape des dispositions provisoires, qui a été
Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au soumis au Conseil de ministres le 8 février 2006. Après
droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles examen, par le Conseil, du rapport de la Commission, les
de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États États membres de l’EU-15 avaient jusqu’au 30 avril 2006
membres, modifiant le règlement (CEE) n° 1612/68 et pour faire savoir à la Commission s’ils avaient l’intention, ou
abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, non, de maintenir les barrières à la libre circulation des
73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et travailleurs originaires des nouveaux États membres, ou s’ils
93/96/CEE. comptaient continuer à appliquer les accords bilatéraux
b. La législation actuelle durant trois années supplémentaires (c’est-à-dire jusqu’en
2009). À l’heure actuelle, dix des États membres de l’EU-15
La directive 2004/38/CE regroupe les mesures parcellaires
ont aboli toutes les restrictions d’accès à leur marché du
présentes dans la législation complexe qui, jusqu’à présent,
travail: la Belgique, l’Irlande, la Grèce, l’Espagne, la France, le
régissait cette matière. Les nouvelles mesures sont conçues
Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal, la Suède et le
entre autres pour encourager les citoyens de l’Union à exercer
Royaume-Uni. Le Danemark et l’Allemagne ont simplifié
leur droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire
leurs procédures ou réduit les restrictions concernant
des États membres, pour réduire à l’essentiel les formalités
certaines professions.
administratives, pour apporter une meilleure définition du
statut de membre de la famille et pour limiter les possibilités La Hongrie continue d’appliquer des mesures de
de refus d’entrée ou de suppression du droit de séjour. De réciprocité. La Slovénie a cessé d’appliquer la réciprocité le
même, elle élargit la définition de la famille pour inclure les 25 mai 2006 et la Pologne le 17 janvier 2007. Aucun des 8
partenaires non mariés. Selon les termes de la directive nouveaux États membres de l’UE n’a sollicité la permission
2004/38/CE, les membres de la famille incluent le conjoint, le de restreindre l’accès aux travailleurs originaires d’autres
partenaire avec lequel le citoyen de l’Union a contracté un nouveaux États membres;

104

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L’Europe des citoyens La libre circulation des personnes
2 3

— enfin, en 2009, toute législation nationale imposant des l’affaire Vander Elst (C-43/93), la Cour de justice a dit que les
mesures transitoires pour limiter l’accès au marché du ressortissants de pays tiers participant à la libre prestation
travail devrait cesser de s’appliquer. Cependant, tout État de services dont jouit leur employeur ont effectivement le
membre qui, en raison de difficultés particulières, «subit ou droit d’entrer dans d’autres États membres de manière à
est menacé de subir des perturbations graves» du marché accomplir leur contrat de travail].
du travail peut demander à la Commission une
Les principales mesures juridiques communautaires
prolongation supplémentaire de deux ans sur la base de
destinées à étendre les droits de libre circulation
circonstances exceptionnelles ou imprévues.
aux ressortissants de pays tiers sont les suivantes:
Dès lors, pendant une période pouvant durer jusqu’à sept ans
— la directive 2003/86/CE du Conseil du 22 septembre 2003
(période «2 + 3 + 2»), c’est-à-dire éventuellement jusqu’en
relative au droit au regroupement familial (JO L 251 du
2011, il n’y aura pas de grands changements pour les
3.10.2003, p. 12-18);
travailleurs et les prestataires de services originaires des huit
nouveaux États membres et souhaitant exercer pleinement — la directive 2003/109/CE du Conseil du 25 novembre 2003
leur droit de libre circulation et leurs libertés fondamentales. relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents
de longue durée (sur la base de l’article 63, paragraphe 4,
Au cours d’une période transitoire qui peut aller jusqu’à
du traité CE) (JO L 16 du 23.1.2004, p. 44-53);
sept années après l’adhésion de deux États membres le
1er janvier 2007 (Bulgarie et Roumanie), certaines conditions — la directive 2004/114/CE du Conseil du 13 décembre 2004
peuvent être d’application, restreignant la liberté de circulation relative aux conditions d’entrée et de séjour des
des travailleurs: ressortissants de pays tiers à des fins d’études, d’échanges
d’élèves, de formation non rémunérée ou de volontariat
— premièrement, entre 2007 et 2009, l’accès au marché du
(JO L 375 du 23.12.2004);
travail des 25 États membres dépendra des mesures et
politiques mises en œuvre à l’échelon national, ainsi que — une directive du Conseil et deux propositions de
des accords bilatéraux éventuellement conclus avec les recommandations visant à faciliter l’admission des
nouveaux États membres; ressortissants de pays tiers aux fins de recherche
— deuxièmement, d’ici à 2009, la Commission européenne scientifique dans l’Union européenne [COM(2004) 178 du
élaborera un rapport en fonction duquel le Conseil de 16 mars 2004];
ministres évaluera le fonctionnement des dispositions — la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du
transitoires. Les États membres doivent faire savoir à la Conseil du 7 septembre 2005 sur la reconnaissance des
Commission s’ils ont l’intention de maintenir les mesures qualifications professionnelles (JO L 255 du 30.9.2005);
nationales pour une nouvelle période de trois ans au
— la directive 2005/71/CE du Conseil du 12 octobre 2005
maximum ou d’autoriser la libre circulation des travailleurs;
relative à une procédure d’admission spécifique des
— enfin, d’ici à 2012, tous les travailleurs devraient pouvoir ressortissants de pays tiers à des fins de recherche
circuler librement. Toutefois, tout État membre peut scientifique (JO L 289 du 3.11.2005);
demander à la Commission l’autorisation de continuer à
appliquer les dispositions nationales pour une période — le règlement (CE) n° 635/2006 de la Commission du 25 avril
supplémentaire de deux ans s’il se trouve confronté à des 2006 abrogeant le règlement (CEE) n° 1251/70 relatif au
perturbations graves de son marché du travail. Il apparaît droit des travailleurs de demeurer sur le territoire d’un État
donc que, à compter de 2014 — soit sept années après membre après y avoir occupé un emploi (JO L 112 du
l’adhésion —, la liberté de circulation sera totale pour les 26.4.2006);
travailleurs originaires des nouveaux États membres. — la directive 2006/100/CE du Conseil du 20 novembre 2006
d. Ressortissants de pays tiers portant adaptation de certaines directives dans le domaine
de la libre circulation des personnes, en raison de
Avec le traité d’Amsterdam, les ressortissants de pays tiers ont
l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie (JO L 363 du
finalement trouvé leur place dans le droit communautaire.
20.12.2006);
Celui-ci protégeait déjà certaines catégories de ressortissants
de pays tiers. Il s’agissait: — la décision du Conseil du 18 décembre 2006 portant
nomination des membres titulaires et suppléants italiens,
— des membres de la famille d’un ressortissant de l’Union
maltais et suédois du comité consultatif pour la libre
européenne;
circulation des travailleurs (JO C 320 du 28.12.2006);
— des ressortissants d’États liés à l’Union européenne par un
— le règlement (CE) n° 1430/2007 de la Commission du
accord d’association ou de coopération;
5 décembre 2007 modifiant les annexes II et III de la
— des travailleurs d’une entreprise établie dans un État directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil
membre fournissant des services, pour le compte de cette relative à la reconnaissance des qualifications
entreprise, dans un autre État membre [dans son arrêt dans professionnelles (JO L 320 du 6.12.2007);

105

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— la décision 2007/172/CE de la Commission du 19 mars — l’article 63 du traité CE, pour l’immigration clandestine et le
2007 instituant le groupe des coordinateurs pour la rapatriement des résidents clandestins.
reconnaissance des qualifications professionnelles (JO L 79
du 20.3.2007); Rôle du Parlement européen
— une proposition de directive du Conseil établissant une Le Parlement européen veut le plus grand degré possible de
procédure de demande unique en vue de la délivrance liberté de circulation pour toutes les personnes se déplaçant à
d’un permis unique autorisant les ressortissants de pays l’intérieur de l’Union. C’est pour lui une condition
tiers à résider et à travailler sur le territoire d’un État fondamentale du fonctionnement du marché intérieur.
membre et établissant un socle commun de droits pour les
travailleurs issus de pays tiers qui résident légalement dans Le Parlement se réjouit vivement de la nouvelle directive
un État membre [SEC(2007) 1393; SEC(2007) 1408]. 2004/38/CE, car sa mise en œuvre correcte par les États
membres apportera des améliorations très bénéfiques. Les
— une proposition de directive du Conseil établissant les entraves auxquelles les citoyens continuent à se heurter
conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays lorsqu’ils souhaitent exercer leurs droits seraient quasiment
tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié [SEC(2007) éliminées. En outre, le Parlement estime qu’on ne doit faire
1382; SEC(2007) 1403]. aucune différence entre la liberté de déplacement des
e. Restrictions à la libre circulation ressortissants de la Communauté et celle des ressortissants de
La liberté de circulation des personnes est sujette à des pays tiers à l’intérieur des frontières. La liberté de circulation est
limitations justifiées par l’ordre public, la sécurité publique ou l’un des droits fondamentaux de l’homme, et toute limitation
la santé publique (article 39, paragraphe 3, article 46, de cette liberté entrave l’accès de ressortissants de pays tiers
paragraphe 1, et article 55 du traité CE). Ces exceptions font au marché intérieur. La suppression des frontières intérieures
l’objet d’une interprétation stricte et leur champ d’application exige bien sûr des mesures d’accompagnement, mais celles-ci
ainsi que leur exercice sont circonscrits par les principes ne doivent pas servir de prétexte à l’introduction de contrôles
généraux du droit, tels que les principes de systématiques dans les territoires frontaliers ou à la mise en
non-discrimination, de proportionnalité et de protection place d’un verrouillage des frontières extérieures.
des droits fondamentaux. Le Parlement est catégorique sur le fait que, dans le cadre de
l’après-Nice, il conviendrait d’étendre la procédure de
B. Changements apportés par le traité de Nice codécision à tous les domaines relevant de la justice et des
Le traité de Nice prévoit que la politique en matière de visas, affaires intérieures, y compris les droits des ressortissants de
d’asile et d’immigration est arrêtée essentiellement selon la pays tiers. Il estime qu’il est vital d’assurer un équilibre entre les
procédure de codécision. Le passage au vote à la majorité objectifs de liberté, de sécurité et de justice, dans le respect
qualifiée est prévu à l’article 63 du traité CE pour les questions des droits fondamentaux et des libertés des citoyens. À cette
d’asile et de protection temporaire mais il est subordonné à fin, le Parlement européen soutient vivement les évolutions
l’adoption préalable et unanime d’un cadre législatif commun que la Constitution, en particulier son article III-396 apporterait
en matière d’asile. au domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice, par
La déclaration signée par les chefs d’État ou de gouvernement exemple les compétences de codécision dans la quasi-totalité
prévoit le passage au vote à la majorité qualifiée et à la des matières relevant de l’espace de liberté, de sécurité et de
procédure de codécision à compter du 1er mai 2004 (sans justice (ELSJ). En outre, la plupart des décisions du Conseil
qu’une décision unanime soit nécessaire) pour: seraient prises à la majorité qualifiée, ce qui accélérerait la mise
en place de l’ELSJ.
— l’article 62 du traité CE, dans le cas de mesures fixant les
conditions de libre circulation des ressortissants d’États
non membres qui résident légalement sur le territoire g Joanna APAP
de l’UE; Juillet 2008

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L’Europe des citoyens Le droit de vote et d’éligibilité
2 4

2.4. Le droit de vote et d’éligibilité


Le traité de Maastricht reconnaît aux citoyens européens le droit de vote et d’éligibilité aux élections européennes et aux
élections municipales dans l’État membre où ils résident. Ces droits sont régis par la directive 94/80/CE pour ce qui est des
élections municipales et par la directive 93/109/CE pour ce qui est des élections au Parlement européen.

Base juridique élections municipales — peuvent être accordées aux États


Articles 19, 189, 190 et 191 du traité CE membres dans lesquels la proportion des ressortissants de
l’Union non nationaux par rapport à l’électorat total dépasse
20 %; en bénéficient actuellement le Luxembourg et certaines
Objectifs communes de Belgique. Cependant, la Belgique n’a jamais fait
Depuis 1976 (acte du 20 septembre 1976, modifié par la usage de cette dérogation.
décision 2002/772/CE, Euratom du Conseil du 25 juin 2002 et Il existe au niveau national des débats sur le droit de vote pour
du 23 septembre 2002), les citoyens européens ont le droit les ressortissants des États tiers. Depuis le traité de Maastricht,
d’élire leurs représentants au Parlement européen dans l’État deux situations coexistent au niveau de l’Union: des pays où
dont ils sont ressortissants. Le traité de Maastricht y a ajouté le les ressortissants des pays tiers ont le droit de vote aux
droit de vote et d’éligibilité aux élections au Parlement élections municipales (Danemark, Irlande, Pays-Bas, Finlande,
européen et aux élections municipales pour tout ressortissant Suède) et des pays où ce droit n’est pas reconnu (Belgique,
d’un État membre de l’Union européenne (UE) dans l’État où il Allemagne, Grèce, Espagne, France, Italie, Luxembourg,
réside — qu’il en possède la nationalité ou non —, aux mêmes Autriche, Portugal, Royaume-Uni).
conditions que les ressortissants de cet État. En levant la
condition de nationalité, dont la plupart des États membres B. Les élections au Parlement européen (pour les règles
faisaient dépendre, jusqu’alors, l’exercice du droit de vote et communes et les dispositions propres à chaque État:
d’éligibilité, ce droit favorise l’intégration des citoyens de 1.3.4)
l’Union dans leur pays d’accueil. La directive 93/109/CE du 6 décembre 1993 fixant les
modalités de l’exercice du droit de vote et d’éligibilité aux
Réalisations élections au Parlement européen permet à tous les citoyens
de l’Union de participer aux élections au PE (activement et
A. Le droit de vote aux élections municipales passivement) dans leur État d’origine ou dans leur État de
1. Principe résidence dans l’Union européenne lorsque l’État d’origine
La directive 94/80/CE du 19 décembre 1994 (modifiée par la n’est pas identique à l’État de résidence. La candidature aux
directive 96/30/CE du Conseil du 13 mai 1996) relative au droit élections au PE dans l’État de résidence est régie par les
de vote aux élections municipales accorde à tout citoyen de mêmes dispositions que celles qui sont applicables aux
l’UE le droit de vote et d’éligibilité aux élections municipales ressortissants de l’État de résidence. Des dérogations peuvent
dans l’État membre où il réside, sans que ce droit se substitue être adoptées par les États membres dans lesquels la
au droit de vote dans son pays d’origine, ce qui élargit proportion d’étrangers à l’UE est sensiblement supérieure à la
évidemment sa liberté. moyenne (proportion de quelque 20 % par rapport à
l’ensemble de l’électorat). Une durée de résidence plus longue
2. Limitations
que celle qui est réclamée aux autochtones peut alors leur être
Afin de protéger leurs intérêts souverains, les États membres demandée.
peuvent disposer que seuls leurs ressortissants sont éligibles
aux fonctions de l’exécutif d’une collectivité locale de base. En
vertu de certains systèmes électoraux nationaux, une telle Rôle du Parlement européen
participation aux fonctions de l’exécutif couvre également les A. Le droit de vote aux élections municipales
votes relatifs à certaines consultations populaires, lesquelles
Dans ses résolutions sur le projet de directive relative au droit
sont à distinguer des élections municipales. La possibilité pour
de vote aux élections municipales, le PE s’est efforcé de limiter
les ressortissants d’autres États membres d’exercer leur
autant que possible les dérogations à l’égalité de traitement
éligibilité ne peut toutefois pas être affectée exagérément.
des ressortissants tant au regard du droit de vote que de
S’agissant de l’accès aux élections municipales, tous les
l’éligibilité.
citoyens de l’Union sont considérés fondamentalement
comme des ressortissants nationaux. B. Élections au Parlement européen
Par ailleurs, des dérogations — telles que l’allongement de la Dans plusieurs résolutions, le PE avait déploré de ne disposer
durée minimale de résidence comme condition d’accès aux que d’un droit de consultation et non d’un pouvoir de

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codécision sur l’acte juridique à adopter en vertu de l’article 19, Par ailleurs, depuis longtemps déjà, le Parlement demande la
paragraphe 2, du traité CE. La situation n’a pas changé depuis. mise en place d’une procédure électorale uniforme pour les
Cependant, le traité de Lisbonne permettrait d’adopter «une élections européennes, procédure qui devrait se substituer aux
procédure uniforme dans tous les États membres, ou une législations électorales nationales correspondantes (1.3.4).
procédure conforme à des principes communs à tous les États
membres», après avoir été approuvée par les États membres
conformément à leurs règles constitutionnelles respectives g Wilhelm LEHMANN
(article 223 du traité CE, tel que modifié). Juillet 2008

2.5. Le droit de pétition


En vertu du traité de Maastricht, tout citoyen de l’Union européenne a le droit d’adresser une pétition au Parlement
européen, sous la forme d’une plainte ou d’une requête, au sujet d’une question relevant d’un domaine de compétence
de l’Union européenne. Les pétitions sont examinées par la commission des pétitions du Parlement européen, qui statue
sur leur recevabilité et est chargée de leur traitement en collaboration avec la Commission européenne

Base juridique rédigées dans une des langues officielles de l’Union


Articles 21 et 194 du traité CE, dispositions introduites par le européenne.
traité de Maastricht (1993) 2. Recevabilité matérielle
Les pétitions remplissant ces conditions sont renvoyées à la
Objectifs commission des pétitions qui décide d’abord si la pétition est
L’instauration du droit de pétition vise à offrir au citoyen recevable. Pour ce faire, elle vérifie que le sujet relève des
européen et à ceux qui résident dans l’Union européenne (UE) domaines d’activités de l’Union européenne. Lorsque tel n’est
un moyen simple de s’adresser aux institutions de l’Union pour pas le cas, la pétition est déclarée irrecevable. La décision
formuler des vœux ou des doléances. d’irrecevabilité, motivée, est notifiée au pétitionnaire,
accompagnée souvent de la suggestion de s’adresser à tel ou
Réalisations tel autre organe national ou international.

A. Principes (article 194) Au cours de l’année 2005, la commission a déclaré recevables


628 pétitions et irrecevables 318.
1. Titulaires du droit
Le droit de pétition est ouvert à tout citoyen de l’Union 3. Examen
européenne et à toute personne physique ou morale résidant La commission des pétitions demande ensuite généralement
ou ayant son siège statutaire dans un État membre, à la Commission européenne de lui fournir des informations
individuellement ou en association. pertinentes ou son avis sur les points soulevés par le
2. Champ d’application pétitionnaire. Elle s’adresse aussi parfois à d’autres
Pour être recevables, les pétitions doivent porter sur des sujets commissions parlementaires, notamment dans les cas de
relevant des compétences de l’Union européenne et pétitions visant à modifier des dispositions législatives en
concernant directement leurs auteurs: cette dernière condition vigueur. La commission des pétitions peut encore organiser
est appliquée de façon très large. des auditions ou envoyer des membres sur place pour
constater les faits (en 2005, deux fact-finding missions ont été
B. Modalités de traitement organisées — à Malte, à Madrid et en Pologne).
Elles sont fixées par le règlement du Parlement européen
Lorsque suffisamment d’informations ont été rassemblées, la
(articles 191 à 193) qui donne compétence à une commission
pétition est inscrite à l’ordre du jour d’une réunion de la
parlementaire, qui est actuellement la «commission des
commission des pétitions à laquelle la Commission
pétitions».
européenne est conviée à participer. Lors de la réunion, cette
1. Recevabilité formelle dernière expose son point de vue oralement et commente la
Les pétitions doivent mentionner le nom, la nationalité et le réponse écrite fournie aux questions soulevées par la pétition.
domicile de chacun des pétitionnaires. Elles doivent être Les membres de la commission des pétitions ont alors

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L’Europe des citoyens Le droit de pétition
2 5

l’occasion de poser des questions au représentant de la cette société. Les pétitionnaires allèguent que les autorités du
Commission européenne. Royaume-Uni n’ont pas appliqué de façon satisfaisante la
4. Aboutissement législation européenne relative aux compagnies d’assurance.
Il varie selon la nature du cas: Ces pétitions ont conduit à la constitution d’une commission
d’enquête au sein du Parlement.
— si la pétition concerne un cas particulier, qui exige un
traitement individuel, la Commission européenne peut 3. Le tunnel ferroviaire Lyon-Turin
prendre contact avec les autorités compétentes ou Les citoyens du Val di Susa, soutenus par les autorités locales,
intervient par le truchement de la représentation ont présenté une pétition faisant part de leurs préoccupations
permanente de l’État membre concerné, cette démarche quant aux effets sur l’environnement et sur la santé de la
pouvant aboutir à une solution du problème. Il arrive construction de la ligne ferroviaire à grande vitesse Lyon-Turin.
également que la commission des pétitions invite le À la suite de la visite d’une délégation de la commission des
président du Parlement européen à prendre contact avec pétitions, les députés ont encouragé l’élaboration
les autorités nationales; d’évaluations d’impact indépendantes plus détaillées. Ces
— si la pétition touche un sujet d’intérêt général, par exemple évaluations ont été par la suite examinées lors d’une réunion
si la Commission européenne constate que la législation conjointe de la commission des pétitions et de celle des
communautaire a été enfreinte, elle peut introduire une transports et du tourisme, en la présence du commissaire
procédure en manquement, qui peut aboutir à un Barrot et des pétitionnaires. Le gouvernement italien a ensuite
jugement de la Cour de justice sur lequel le pétitionnaire été saisi des conclusions de ces évaluations. Le dossier reste
pourra s’appuyer; ouvert et le travail se poursuit au sein de la commission des
— la pétition peut donner lieu à une initiative politique du pétitions, en collaboration avec la commission des transports
Parlement ou de la Commission. et du tourisme et celle de l’environnement, de la santé
publique et de la sécurité alimentaire.
Dans tous les cas, le pétitionnaire reçoit une réponse exposant
les résultats des démarches entreprises. 4. Violation de la loi d’aménagement urbain de Valence,
Espagne
C. Quelques exemples Plusieurs pétitions, signées par plus de 15 000 personnes, ont
1. Le rapport sur la sclérose en plaques contesté une loi en matière d’urbanisme adoptée par la région
En août 2001, dans une lettre au président du Parlement autonome de Valence (loi dite «LRAU») et qui, selon eux, violait
européen, Mme Louise McVay a fait état de la disparité des leurs droits en tant propriétaires de biens immobiliers. La
traitements qu’offrent les États membres de l’Union commission des pétitions a envoyé deux missions d’enquête
européenne aux personnes atteintes de la sclérose en plaques. sur place. L’action de la commission des pétitions a poussé les
Elle entendait ainsi obtenir une certaine reconnaissance de sa autorités de la région autonome de Valence à modifier la
situation personnelle et de celle de milliers d’autres personnes législation, et le Parlement s’est même vu inviter à proposer
victimes d’une telle inégalité de traitement et dont la majorité des recommandations en la matière. Ces recommandations
se voit toujours refuser l’accès à des soins médicaux adéquats, ont fait l’objet d’une résolution en décembre 2005.
qui est pourtant un de leurs droits humains fondamentaux.
5. Projet autoroutier de la M30 à Madrid, Espagne
Bien que la Commission européenne ait indiqué que cette
affaire ne relevait pas de la législation européenne, la La mission d’enquête organisée à Madrid en juin 2006 s’inscrit
commission des pétitions a invité la pétitionnaire à exposer dans le cadre de plusieurs pétitions relatives à un projet de
son affaire lors d’une de ses réunions à laquelle différentes prolongement de l’autoroute traversant la ville de Madrid (la
associations et d’autres malades étaient également présents. À M30). Les pétitionnaires contestent essentiellement l’absence
la suite de cette rencontre, la commission des pétitions a d’études d’impact auxquelles aurait dû être soumis un projet
rédigé un rapport, en étroite coopération avec la commission de cette nature et de cette taille au regard de sa localisation.
de l’emploi et des affaires sociales, pour fournir un ensemble En effet, la conduite de telles études est exigée par la directive
de réponses précises à la pétitionnaire et pour exposer ce 97/11/CE du Conseil modifiant la directive 85/337/CEE
qu’elle considère comme une stratégie européenne claire et concernant l’évaluation des incidences de certains projets
nécessaire destinée à combattre cette maladie incurable. publics et privés sur l’environnement (pétition toujours
2. L’affaire «Equitable Life», Royaume-Uni ouverte en juillet 2008).
Il s’agit de deux pétitions dans lesquelles des clients de la
compagnie d’assurance vie Equitable Life relataient les pertes g Claire GENTA
subies à la suite des difficultés financières rencontrées par Juillet 2008

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Nombre annuel de pétitions reçues par le Parlement
Année parlementaire Nombre total Recevables Irrecevables
2000 908 578 330
2001 1 132 812 320
2002 1 601 1 186 415
2003 1 315 858 457
2004 1 002 623 379
2005 1 032 628 318
2006 1 021 667 354
2007 1 506 980 526

Les dix thèmes généraux les plus fréquents, visés par les pétitions reçues en 2007
Environnement, gestion de l’eau, etc. 288
Droits fondamentaux 226
Affaires sociales et discrimination 207
Marché intérieur et consommateurs 192
Urbanisation 131
Santé 105
Éducation et culture 103
Justice 99
Transport et infrastructures 88
Droit de propriété et restitution 72

110

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Le système
How the European
de

3
1 Community works
fonctionnement 4 Les politiques communes
de l’Union européenne
L’Union politique
L’union économiqueet
2 L’Europe des citoyens 5 monétaire
et monétaire

Les relations
rélations extérieures
3 Le marché intérieur 6 de l’Union européenne

Le marché intérieur
En 1993, le marché unique a été la plus grande réalisation de l’Union européenne. Pour qu’il
devienne réalité, les institutions de l’Union et les États membres ont fourni des efforts
considérables afin de rédiger et d’adopter les centaines de directives nécessaires à l’élimination
des barrières techniques, réglementaires, juridiques et culturelles qui entravaient le libre-
échange et les mouvements au sein de l’Union. La création du marché unique a incité les pays
membres de l’Union à libéraliser les marchés monopolistiques jusqu’alors protégés dans des
secteurs d’utilité publique. Par le biais du rapprochement des législations nationales, les États
membres ont procédé à l’harmonisation des normes et standards au sein de l’Union.

3.1. Principes et réalisation générale 3.3.2. Les abus de position dominante


du marché intérieur, 113 et le contrôle des concentrations, 133
3.3.3. Les aides d’État, 136
3.2. Les grandes libertés du marché
intérieur, 116 3.3.4. Entreprises publiques et services
3.2.1. La libre circulation d’intérêt général, 139
des marchandises, 116 3.4. Le rapprochement
3.2.2. La liberté de circulation des législations, 144
des travailleurs, 120 3.4.1. Marchés publics, 144
3.2.3. La liberté d’établissement, la liberté 3.4.2. Le droit des sociétés, 146
de prestation de services
3.4.3. Services financiers: le processus
et la reconnaissance mutuelle
Lamfalussy — Genèse et mise
des diplômes, 124
en application pratique, 151
3.2.4. La libre circulation des capitaux, 127
3.4.4. Services financiers: législation
3.3. Les règles de concurrence, 130 importante, 153
3.3.1. Politique générale de concurrence 3.4.5. La propriété intellectuelle, industrielle
et ententes, 130 et commerciale, 156

111

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Le marché intérieur Principes et réalisation générale
3 1 du marché intérieur

3.1. Principes et réalisation générale


du marché intérieur
L’idée de marché unique a été précédée par celle de marché commun, inscrite dans le traité de Rome. Il s’agissait déjà,
alors, de libéraliser les échanges entre les États membres. L’Acte unique européen de 1986 a renforcé l’objectif de
l’élimination des frontières intérieures en intégrant la notion de marché intérieur dans le traité CE.

Base juridique — l’élimination des restrictions quantitatives (contingents) et


Article 3, point c), et articles 14, 18, 94 et 95 du traité CE des mesures d’effet équivalent.
La réalisation de cet objectif était étayée par la compétence
Objectifs exclusive de la Communauté dans le domaine de la
concurrence.
Le marché commun lancé par le traité de Rome en 1958
consistait déjà à libéraliser les échanges entre les États 2. Mise en œuvre
membres dans le double but d’accroître la prospérité L’union douanière, achevée le 1er juillet 1968 (3.2.1), la
économique et de contribuer à «l’union sans cesse plus étroite suppression des contingents, la liberté de tout ressortissant de
entre les peuples». l’Union européenne d’accéder à un emploi dans un autre État
L ’Acte unique européen de 1986 a intégré dans le traité CEE membre dans les mêmes conditions que les nationaux (3.2.2)
l’objectif du marché intérieur en le définissant comme «un et une certaine harmonisation fiscale avec la généralisation de
espace sans frontières intérieures dans lequel la libre la TVA (1970) (3.4.5) sont des objectifs qui ont été réalisés
circulation des marchandises, des personnes, des services avant la fin de la période de transition (1er janvier 1970).
et des capitaux est assurée». En revanche, la libéralisation des échanges de marchandises et
Aujourd’hui, la majeure partie du cadre juridique relatif au de services et la liberté d’établissement sont restées limitées
marché intérieur est en place, et le débat se concentre sur par la persistance de pratiques anticoncurrentielles imputables
l’efficacité et l’impact de la réglementation européenne dans aux autorités publiques [droits exclusifs de production ou de
les secteurs couverts et implique la majorité des politiques prestation, aides d’État, visant à maintenir les frontières sous
mentionnées par le traité CE. Ce débat demande une leur forme physique (contrôle des personnes et des biens aux
approche axée sur la transposition complète, la mise en postes de douane intérieurs), technique (réglementations
œuvre et l’application des règles du marché intérieur, ne nationales de toutes sortes), fiscale (maintien de taxes
se limitant plus au débat portant sur les procédures indirectes de taux très divers obligeant à des formalités
normatives et d’infraction pour avancer dans le sens de ce que transfrontalières lentes et coûteuses) ou simplement
l’on pourrait appeler la «gestion» du marché intérieur et le administrative]. La réduction des mesures d’effet équivalant
«partenariat» entre les institutions européennes et les aux restrictions quantitatives et des réglementations
autorités nationales, une coopération permanente en techniques nationales relatives aux produits (3.2.1) et la libre
matière de stratégies et de décisions, afin de partager ces circulation des services ou le libre établissement (sauf
«responsabilités communes» à l’égard des citoyens européens. exceptions pour certaines professions comme les médecins)
n’avaient toujours pas été complètement atteints au milieu
des années 80.
Réalisations
A. Le marché commun de 1958 B. Le lancement du marché intérieur dans les années 80
et l’Acte unique européen
1. Objet du marché commun
1. Le marché intérieur
Le marché commun, objet principal du traité de Rome, visait à
unifier autant que possible les économies des États membres L’insuffisance des résultats atteints et la stagnation du
par: processus de réalisation du marché commun, largement
imputables au choix de la méthode de l’harmonisation
— la réalisation d’une union douanière avec un tarif extérieur législative trop détaillée et à la règle de l’unanimité requise
commun; pour l’adoption des décisions du Conseil, avaient un coût
— la libre circulation des marchandises, des personnes, en économique considérable, le «coût de la non-Europe»
particulier des travailleurs salariés, des services et, dans une expliqué dans le rapport Cecchini de mars 1988, estimé entre
certaine mesure, des capitaux; 4,25 et 6,5 % du PIB.

113

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Le débat politique a amené la CEE, vers le milieu des Certaines déficiences sérieuses persistaient:
années 80, à reprendre l’objectif de libéralisation des échanges
— les 10 % de mesures législatives non encore adoptées
de manière plus complète, sous l’appellation de «marché
portaient sur des sujets très importants, notamment la
intérieur». Le feu vert a été donné en mars 1985 à Bruxelles,
suppression totale des contrôles sur les personnes, le statut
lorsque le Conseil européen a fixé à la fin de 1992 la date
de la société européenne, la libéralisation complète des
d’achèvement du marché intérieur et demandé à la
services de transport et l’harmonisation fiscale. De plus,
Commission d’établir un programme assorti d’une liste d’actes
certaines propositions non prévues par le programme de
à adopter et d’un calendrier de mise en œuvre.
1985 mais ajoutées par la suite (en particulier pour la
La Commission a adopté en 1985 son livre blanc, approuvé par libéralisation des secteurs de service public,
le Conseil européen à Milan, dans lequel la plupart des télécommunications, électricité, gaz, postes, et pour
mesures législatives à prendre, environ 300, ont été énumérées l’établissement de réseaux transeuropéens) n’avaient pas
et regroupées sous trois objectifs fondamentaux qui sont été adoptées;
l’élimination: — une partie significative des directives adoptées n’avaient
— des frontières physiques: supprimer les contrôles des pas été transposées correctement;
marchandises et des personnes aux frontières intérieures; — enfin, même transposés correctement, les textes étaient
— des frontières techniques: se libérer des entraves nationales souvent mal appliqués par les administrations nationales
relatives aux produits et aux services, soit par leur (rapport Sutherland d’octobre 1992).
harmonisation soit par leur reconnaissance mutuelle; 3. Les nouveaux efforts
— des frontières fiscales: surmonter les obstacles créés par la Depuis 1993, la Commission a présenté régulièrement des
disparité des taxes indirectes, en harmonisant ou en rapports faisant le point des résultats obtenus et lancé des
rapprochant les taux de TVA et d’accises. actions et des programmes pour la réalisation des projets en
suspens. Outre les rapports annuels sur l’état d’avancement et
La nouvelle approche, qui visait à ne plus rechercher
de fonctionnement du marché intérieur, on rappellera surtout:
systématiquement l’harmonisation technique des règles
nationales — cette méthode devant être réservée aux seules — la communication du 2 juin 1993 concernant le
exigences essentielles (de sécurité et de santé notamment) —, renforcement de l’efficacité du marché unique et le
a instauré le principe de la reconnaissance mutuelle. programme stratégique du 22 décembre 1993;
L’Acte unique européen (entré en vigueur le 1er juillet 1987) a — la communication du 30 octobre 1996 sur l’impact et
intégré dans le traité CEE la notion de marché intérieur, fixé l’efficacité du marché unique et le plan d’action en faveur
un délai précis pour sa réalisation, le 31 décembre 1992 du marché unique du 4 juin 1997. Le «tableau d’affichage»
(article 18 du traité CE) et insufflé une certaine force au continue à être publié deux fois par an;
mécanisme décisionnel du marché intérieur en introduisant — la stratégie pour le marché intérieur européen, lancée le
la règle de la majorité qualifiée pour des sujets tels que le 24 novembre 1999. Ce plan d’action associait des
tarif douanier commun, la libre prestation des services, la perspectives à court et à moyen terme, fixant les objectifs
libre circulation des capitaux et le rapprochement des stratégiques à atteindre pour 2004 au moyen de «mesures
législations nationales (articles 26, 49, 60, 94 et 95 du traité ciblées» revues chaque année;
CE, respectivement).
— le document de la Commission «Marché intérieur —
2. La situation en 1993 Dix ans sans frontières» du 7 janvier 2003;
Au terme fixé, plus de 90 % des mesures prévues par le livre
— la communication de la Commission «Stratégie pour le
blanc de 1985 avaient été adoptées, dans une large mesure
marché intérieur — Priorités 2003-2006».
grâce au recours à la règle de la majorité. Citons, parmi les plus
importantes: En même temps que ce rôle d’impulsion, la Commission a agi
par la voie «répressive» en application de l’article 226 du traité
— la libéralisation des mouvements de capitaux (3.2.4);
CE afin de poursuivre les infractions commises par les États
— la suppression quasi totale du contrôle des marchandises membres pour transposition tardive des directives,
aux frontières intérieures (3.2.1); transposition incorrecte ou mauvaise application.
— la suppression des contrôles systématiques des C. Vers une responsabilité partagée pour la réalisation
ressortissants nationaux aux frontières intérieures (2.3); du marché intérieur
— de grands progrès dans la réalisation des libertés Le marché intérieur européen, le plus grand espace commun
d’établissement et de prestation de services par du monde avec près de 500 millions de consommateurs, a
l’harmonisation et la reconnaissance mutuelle (banque et fortement contribué à la prospérité et à l’intégration de
assurance, diplômes pour l’accès aux professions l’économie européenne en accroissant les échanges
réglementées) et par l’ouverture des marchés publics. intracommunautaires (d’environ 15 % par an sur dix ans), en

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Le marché intérieur Principes et réalisation générale
3 1 du marché intérieur

augmentant la productivité et en réduisant les coûts (grâce à de la reconnaissance mutuelle, de la monnaie unique et de la
la suppression des formalités douanières, à l’harmonisation ou concurrence loyale, à savoir:
à la reconnaissance mutuelle des réglementations techniques
— un système fiscal harmonisé;
et à la baisse des prix induite par le jeu de la concurrence); il a
généré un gain de croissance de 1,8 % au cours des dix — un espace unique fondé sur la liberté et la sécurité, avec
dernières années et créé environ 2,5 millions d’emplois une liberté de circulation totale pour les personnes et un
supplémentaires, tout en réduisant les écarts de revenus entre droit de séjour inconditionnel sur tout le territoire de
les États membres. l’Union, un système réglementé dans le domaine des
marchés publics et des services d’intérêt public ainsi que,
Sur la période 2003-2006, une nouvelle stratégie pour le
dans les domaines des médias et de la société de
marché intérieur s’est centrée sur la nécessité de faciliter la
l’information, du commerce électronique, du droit des
libre circulation des marchandises, d’intégrer les marchés des
sociétés et du droit des contrats, de la gouvernance
services, de réduire l’impact des obstacles fiscaux, de simplifier
d’entreprise, des marchés financiers, de la propriété
l’environnement réglementaire et de relever le défi
intellectuelle, de la protection des données et de la
démographique.
reconnaissance mutuelle, des instruments juridiques
On retiendra en particulier les progrès très importants dans la permettant aux entreprises d’agir efficacement à l’échelle
réalisation du programme législatif [la législation de l’ensemble du marché;
communautaire a ouvert les services de transport et de
télécommunications, provoqué une ouverture significative des — l’achèvement des réseaux transeuropéens de transport,
autres secteurs de «service public» (électricité, gaz et postes) et d’énergie et de télécommunications;
renforcé le contrôle des fusions d’entreprises] ainsi que dans la — la création d’un marché libre dans le domaine des services
transposition, mesurés par le «déficit de transposition» qui est (3.2.3).
le pourcentage de directives non transposées dans tous les
États membres. Ce déficit est tombé à 1,6 % en 2005. Rôle du Parlement européen
Le nombre de poursuites en cours (aux différents stades de la Le Parlement européen a joué un rôle moteur dans le
procédure d’infraction qui commence par la mise en demeure, processus qui a conduit au lancement du marché intérieur. On
peut se poursuivre par un avis motivé, puis par la saisine de la rappellera en particulier à cet égard sa résolution du 9 avril
Cour de justice) est cependant passé d’environ 700 en 1992 à 1984. Il a soutenu vigoureusement le livre blanc de 1985 et a
plus de 1 600 en mai 2005. régulièrement appuyé les efforts de la Commission. On notera
Il reste des carences importantes. En effet, des projets législatifs en particulier son appui à l’idée de transformer le marché
essentiels sont toujours en suspens: libre circulation complète intérieur en un marché domestique complètement intégré à
des personnes, harmonisation fiscale et certaines directives l’horizon 2002 (résolution du 20 novembre 1997).
non encore transposées dans tous les États membres dans les Dans un grand nombre de résolutions récentes (dont celles
domaines des marchés publics, des transports et de la des 12 et 14 février 2006, du 16 mai 2006 et du 6 juillet 2006),
propriété intellectuelle. le Parlement a appuyé l’idée selon laquelle le marché intérieur
Le débat sur la réalisation effective du marché intérieur se est un cadre commun et un point de référence pour un grand
centre aujourd’hui sur sa transposition et son application nombre de «politiques» communautaires et demandé
complètes ainsi que sur la nécessité que toutes les politiques l’ouverture d’un débat qui ne se limite pas à aborder les règles
européennes soient finalisées et exécutées en tenant compte communes concernant les quatre libertés, les droits
de leur interdépendance et de leur complémentarité dans la fondamentaux et la concurrence. Le Parlement a notamment
perspective du «marché domestique européen». En d’autres souligné la nécessité:
termes, le débat sur le marché domestique européen se
— d’améliorer l’efficacité du contrôle exercé par la
centre, à l’heure actuelle, sur le meilleur moyen d’adapter
Commission sur la transposition et la mise en œuvre
toutes les politiques européennes à la perspective d’un espace
correctes du droit communautaire, notamment l’examen
domestique unique, et toutes les discussions et décisions
préventif des projets nationaux de réglementation, ainsi
portant sur les différents objectifs, les politiques et leur mise en
que les procédures ouvertes à la suite du dépôt d’une
œuvre doivent s’inscrire autant que possible dans le cadre
plainte ou d’une pétition;
d’une coopération entre les institutions européennes et les
autorités nationales, au titre du principe de la responsabilité — pour les États membres, de veiller à ne pas créer de
partagée. nouveaux problèmes de mise en œuvre en imposant des
exigences supplémentaires (surréglementation ou «gold-
Les exigences de l’intégration européenne invitent à envisager
plating»);
le parachèvement du marché intérieur en un marché
domestique complètement intégré: un «marché domestique — d’améliorer le rôle central du Parlement dans le contrôle de
européen», qui se caractériserait par un grand nombre l’application et du respect du droit communautaire par les
d’objectifs et de politiques allant au-delà des quatre libertés, États membres, ainsi que de la surveillance exercée à cet

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égard par la Commission, notamment via la nouvelle notamment sur les droits des travailleurs et des
procédure de réglementation avec contrôle; consommateurs, sur la cohésion sociale, la concurrence
équitable, la stimulation de la croissance et la compétitivité
— de renforcer profondément l’implication des parlements
de l’UE, de même que des objectifs clairs et des dates
nationaux;
butoirs de mise en œuvre, ainsi que des sanctions en cas
— d’une approche commune pour améliorer la législation, de défaillance (accords institutionnels du 16 décembre
basée sur des principes de législation: subsidiarité, 2003 «mieux légiférer» et du 22 décembre 1998 sur la
proportionnalité, responsabilité, cohérence, transparence qualité de la législation communautaire);
et ciblage, ainsi que de la création de groupes de travail
«mieux légiférer» veillant à ce que toutes les propositions — de mettre en place une consultation plus transparente et
soient accompagnées d’une liste de contrôle «mieux plus efficace des parties prenantes, compte tenu de
légiférer» comportant une référence aux études afférentes l’importance de la démocratie participative;
et aux analyses d’impact, notamment lorsqu’il s’agit de la — que la Commission continue de consolider, de simplifier et
législation relative au marché intérieur; de codifier la législation communautaire afin d’en améliorer
— que, dans la mesure où la méthode classique de régulation l’accessibilité et la lisibilité;
n’est pas toujours la plus appropriée, la Commission fasse
— que les rapports d’exécution présentés par la Commission
figurer dans son programme de travail annuel la liste des
ne se limitent pas à une simple analyse juridique mais
propositions susceptibles de faire l’objet d’une régulation
évaluent également l’application concrète de la législation
alternative. Le Parlement doit disposer de la liste des
en question.
mesures politiques où la Commission a eu recours à des
modes de régulation alternatifs, comportant une
évaluation du succès ou de l’échec de tels modes de g Azelio FULMINI
régulation alternatifs, de leurs effets sur la situation réelle, Juin 2006

3.2. Les grandes libertés


du marché intérieur

3.2.1. La libre circulation des marchandises


La libre circulation des marchandises est garantie par la suppression des droits de douane et des restrictions quantitatives
aux échanges, ainsi que par l’interdiction des mesures d’effet équivalent. Le principe de la reconnaissance mutuelle,
l’élimination des barrières physiques et techniques et la normalisation y ont été ajoutés pour parachever le marché
intérieur.

Base juridique Au départ, la libre circulation des marchandises était


Article 3, paragraphe 1, points a) et c), et articles 14, 23 à 31 et considérée comme s’inscrivant dans le cadre d’une union
90 du traité CE douanière entre les États membres, comportant la suppression
des droits de douane, des restrictions quantitatives aux
échanges et des mesures d’effet équivalent, ainsi que la
Objectifs création d’un tarif douanier commun pour la Communauté.
La libre circulation de marchandises originaires des États
membres ou en provenance de pays tiers et qui se trouvent en Puis, l’accent a été mis sur la suppression de tous les obstacles
libre pratique dans les États membres constitue un des à la libre circulation restants dans l’objectif de la création du
principes fondamentaux du traité CE (article 23, paragraphe 2). marché intérieur, un espace sans frontières intérieures, dans

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Le marché intérieur Les grandes libertés
3 2 du marché intérieur

lequel les marchandises (entre autres) pourraient circuler aussi produits importés sont pénalisés en étant contraints de subir
librement que sur un marché national (3.1). des adaptations tarifaires. L’absence d’harmonisation
communautaire ne peut servir à justifier cette attitude, si elle
entrave effectivement la liberté de circulation. Aussi la Cour a-t-
Réalisations
elle établi le principe selon lequel tout produit fabriqué et
La suppression des droits de douane et des restrictions commercialisé légalement dans un État membre conformément
quantitatives (contingents) entre les États membres, qui devait aux règles traditionnelles et équitables de cet État et à ses
se concrétiser au terme de la période transitoire, a en fait été processus de fabrication doit être autorisé sur le marché de
accomplie au 1er juillet 1968, soit un an et demi plus tôt que n’importe quel autre État membre. Il s’agit du principe de la
prévu. Ce délai n’a pas été respecté en ce qui concerne les reconnaissance mutuelle par les États membres de leurs
objectifs supplémentaires, à savoir l’interdiction des mesures règles respectives en l’absence d’harmonisation.
d’effet équivalant à des droits de douane ou à des restrictions
quantitatives et l’harmonisation des législations nationales Afin d’empêcher l’apparition de nouveaux obstacles, une
afférentes. Ces objectifs ont ensuite été situés au cœur des directive a été adoptée en 1983 (remplacée par la directive
efforts consentis pour faire de la liberté de circulation une 98/34/CE du 22 juin 1998) pour contraindre les États membres
réalité. Les projets de création d’un marché unique ont insufflé à informer la Commission de tous leurs projets de
un nouvel élan. réglementations techniques. Les organismes nationaux de
normalisation sont quant à eux tenus de transmettre leurs
A. Interdiction des taxes d’effet équivalant à des droits programmes de travail et leurs projets de normes.
de douane: article 23, paragraphe 1, et article 25
du traité CE C. Exceptions à l’interdiction des mesures d’effet
équivalant à des restrictions quantitatives
Étant donné l’absence de définition de ce concept dans le
traité, la jurisprudence a dû en fournir une. La Cour de justice L’article 30 du traité CE permet aux États membres de prendre
(CJCE) considère que toute taxe, quelles que soient son des mesures d’effet équivalant à des restrictions quantitatives
appellation ou son application, frappant un produit importé sous réserve que celles‑ci soient justifiées par des
d’un État membre à l’exclusion du produit national similaire a considérations non économiques à caractère général
pour résultat, en altérant son prix, d’avoir la même incidence (moralité publique, ordre public ou sécurité publique, protection
sur la libre circulation des produits qu’un droit de douane et de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou
qu’elle peut dès lors être considérée comme une taxe d’effet préservation des végétaux, protection des trésors nationaux et
équivalent, indépendamment de sa nature et de sa forme protection de la propriété industrielle et commerciale). Le
(affaires 2/62 et 3/62 du 14 décembre 1962 et affaire 232/78 contrôle du recours à cette possibilité est bien sûr exercé par la
du 25 septembre 1979). Cour de justice. Une telle exception à un principe doit faire
l’objet d’une interprétation stricte et les mesures nationales ne
B. Interdiction des mesures d’effet équivalant doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni
à des restrictions quantitatives: articles 28 et 29 une restriction déguisée dans le commerce entre les États
du traité CE membres. Dans l’affaire C‑421/04, point 28, la CJCE a déclaré
qu’«[i]l est en effet de jurisprudence constante que, dans le
La notion de mesure d’effet équivalant à une restriction
cadre de l’application du principe de la libre circulation des
quantitative est vague. C’est ainsi que, dans l’arrêt
marchandises, le traité n’affecte pas l’existence des droits
Dassonville, la Cour de justice a déclaré que toute
reconnus par la législation d’un État membre en matière de
réglementation commerciale des États membres susceptible
propriété intellectuelle, mais limite seulement, selon les
d’entraver directement ou indirectement, effectivement ou
circonstances, l’exercice de ces droits». Les exceptions ne sont
potentiellement, le commerce intracommunautaire est à
plus justifiées si une législation communautaire est entrée en
considérer comme mesure d’effet équivalant à des restrictions
vigueur dans le même domaine et qu’elle ne les permet pas.
quantitatives (affaires 8/74 du 11 juillet 1974 et C‑320/03 du
Enfin, les mesures doivent avoir une incidence directe sur les
15 novembre 2005, points 63 à 67).
intérêts publics à protéger et ne doivent pas dépasser le niveau
Les mesures en question sont généralement celles qui affectent nécessaire (principe de proportionnalité).
davantage les produits importés que les produits nationaux
La Cour de justice a reconnu (affaire Cassis de Dijon) que,
(affaire C-441/04 du 23 février 2006, point 23). Toutefois, dans
au‑delà des règles énoncées à l’article 30, les États membres
l’arrêt Cassis de Dijon (affaire 120/78 du 20 février 1979), la
peuvent établir des exceptions à l’interdiction des mesures
Cour a élargi cette notion en déclarant qu’une mesure pouvait
d’effet équivalent sur la base d’exigences impératives
être considérée comme une mesure d’effet équivalent même
(tenant, notamment, à l’efficacité des contrôles fiscaux, à la
en l’absence de discrimination entre les produits importés et
loyauté des transactions commerciales, à la défense des
nationaux. En particulier, la réglementation technique de l’État
consommateurs et à la protection de l’environnement).
importateur imposée aux produits provenant d’autres États
membres peut être considérée comme une mesure d’effet Les États membres sont tenus de notifier les mesures
équivalent, si elle n’est pas justifiée, dans la mesure où les d’exemption nationales à la Commission. Afin de faciliter la

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supervision de telles mesures, des procédures d’information concerne la santé animale et végétale, à l’intérieur d’un État
mutuelle et un mécanisme de contrôle ont été établis, membre, sans discrimination fondée sur l’origine des
conformément aux dispositions des articles 95 et 97 du traité marchandises ou le mode de transport, selon les mêmes
CE, à la décision n° 3052/95/CE du Parlement européen et du modalités que les contrôles portant sur des produits
Conseil du 13 décembre 1995 et au règlement (CE) n° 2679/98 nationaux.
du Conseil du 7 décembre 1998.
2. Suppression des barrières techniques
D. Harmonisation des dispositions nationales À la suite de la suppression des formalités douanières et des
Depuis la fin des années 70, la Communauté a consenti des contrôles aux frontières, les barrières techniques sont
efforts considérables à cet égard: plus de 250 directives devenues le principal obstacle restant pour parvenir à une
portant sur une grande variété de sujets liés au marché liberté totale de circulation. Ces barrières sont nombreuses,
intérieur ont été adoptées. L’adoption d’actes législatifs très diverses et en constante évolution. Il existe deux grands
d’harmonisation communautaire a permis de supprimer les moyens pour supprimer ces barrières.
obstacles créés par les dispositions nationales jugées a. Contrôle du respect du principe de la reconnaissance mutuelle
inapplicables et d’établir des règles communes visant à des règles nationales (article 28 du traité CE)
garantir à la fois la libre circulation des marchandises et le b. Harmonisation législative
respect des autres objectifs du traité CE, notamment dans les
La nouvelle approche et l’approche globale ont été basées sur
domaines de l’environnement, de la protection des
la résolution du Conseil du 7 mai 1985, confirmée par la
consommateurs et de la concurrence.
résolution du Conseil du 21 décembre 1989 et la décision
L’harmonisation a souvent été extrêmement ardue au départ, 93/465/CEE du Conseil.
dans la mesure où les directives abordaient toutes les
Ces approches ont pour principe directeur la
spécifications techniques et nécessitaient l’unanimité au
reconnaissance mutuelle des règles nationales.
Conseil. Leur impact a tout de même été positif. Dans l’affaire
L’harmonisation communautaire doit se limiter aux
C‑421/04, la CJCE a déclaré que «selon une jurisprudence
exigences essentielles et est justifiée lorsque les règles
constante, une mesure nationale dans un domaine qui a fait
nationales ne peuvent être jugées équivalentes et qu’elles
l’objet d’une harmonisation exhaustive au niveau
créent des restrictions.
communautaire doit être appréciée au regard des dispositions
de cette mesure d’harmonisation et non pas de celles du droit Les directives adoptées dans le cadre de cette nouvelle
primaire» (point 20). approche ont pour objectif de garantir la libre circulation des
marchandises par l’harmonisation technique de secteurs tout
L’harmonisation a ensuite été facilitée par l’introduction de la
entiers, d’une part, et de garantir un niveau de protection
règle de la majorité qualifiée, requise pour la plupart des
élevé des objectifs d’intérêt public visés à l’article 95,
directives relatives à l’achèvement du marché unique
paragraphe 3, du traité CE, d’autre part. Par exemple, ces
(article 95 du traité CE tel que modifié par le traité de
directives portent sur les récipients à pression simple, les
Maastricht) et par l’adoption d’une nouvelle approche
jouets, les matériaux de construction, les machines, les
destinée à éviter une harmonisation onéreuse et détaillée,
appareils à gaz et les équipements de terminaux de
proposée dans le livre blanc de juin 1985 de la Commission.
télécommunications.
E. Achèvement du marché intérieur 3. Normalisation
La création du marché unique implique la suppression de tous La nécessité de normes européennes découlant de la
les obstacles qui subsistent à la libre circulation. Le livre blanc nouvelle approche a grandement fait évoluer le système de
de juin 1985 de la Commission énonçait les obstacles normalisation européen. La normalisation est un processus
physiques et techniques à supprimer ainsi que les mesures à volontaire qui repose sur le consensus des différents acteurs
prendre par la Communauté pour ce faire. La plupart de ces économiques et qui est dirigé par des organismes
mesures ont désormais été adoptées. indépendants, intervenant aux niveaux national, européen ou
1. Suppression des contrôles aux frontières intérieures international. Relativement inactif, le système de normalisation
(barrières physiques) européen, qui reposait initialement sur deux organismes — le
Comité européen de normalisation (CEN), créé en 1961, et le
a. Formalités douanières
Comité européen de normalisation électrotechnique
Celles-ci ont été simplifiées entre 1985 et 1992 (document (Cenelec), créé en 1962 —, a été réactivé au début des
administratif unique, banalisation des postes-frontières, années 80, à la suite de l’adoption de la directive 83/189/CEE
simplification des procédures de transit communautaire), (remplacée par la directive 98/34/CE). Il existe aujourd’hui trois
avant d’être supprimées le 1er janvier 1993. organisations: le CEN, le Cenelec et l’ETSI (Institut européen de
b. Contrôles aux frontières normalisation des télécommunications).
Ces contrôles ont été supprimés le 1er janvier 1993. Des Au départ, les directives d’harmonisation avaient trait aux
contrôles peuvent être effectués, notamment en ce qui normes industrielles non obligatoires car non établies par les

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Le marché intérieur Les grandes libertés
3 2 du marché intérieur

autorités nationales. C’est ainsi que la production de normes Rôle du Parlement européen
européennes s’est avérée tout à fait adaptée. Le processus était Le Parlement a soutenu l’achèvement du marché intérieur
toujours entravé par sa lenteur et la transposition des normes (3.1) ainsi que le rôle des organismes de normalisation
européennes sur le plan national. européens et a toujours apporté un soutien particulier à la
Au cours des années 90, des discussions plus approfondies ont «nouvelle approche» dans le domaine de la libre circulation
amélioré la qualité et l’efficacité de la normalisation des marchandises, en clarifiant sa définition dans un rapport
européenne, notamment en remplaçant la règle du consensus en 1987. Il a apporté une contribution législative significative
par le vote à la majorité pour l’adoption des normes et en aux directives d’harmonisation.
supprimant la nécessité de la transposition nationale au profit Le Parlement a également été favorable au renforcement de la
de l’application directe des normes européennes. coopération entre les autorités nationales et européennes en
Les fabricants se réfèrent aujourd’hui aux normes vue d’améliorer la qualité de la législation européenne et
européennes, établies par les organismes de normalisation d’identifier la législation nécessitant une simplification ou une
européens. La validité des normes nationales restantes est codification, conformément à l’objectif visant à redoubler
couverte par le principe de la reconnaissance mutuelle. d’efforts pour une meilleure réglementation, une transposition
rapide et une application correcte. Le Parlement a souvent
F. Le principe de la reconnaissance mutuelle invité les autres institutions à soutenir autant que possible la
Le raisonnement de la Cour a donné lieu à la jurisprudence corégulation et les accords volontaires afin de respecter le
«Cassis de Dijon» établissant le principe selon lequel tout même principe «mieux légiférer».
produit légalement fabriqué et commercialisé dans un État
Cependant, pour le Parlement, «mieux légiférer» ne signifie pas
membre conformément à ses règles traditionnelles et
nécessairement «ne pas légiférer». Il a ainsi modifié plusieurs
équitables et à ses processus de fabrication doit être autorisé
actes législatifs instaurant des règles visant à éviter le risque
sur le marché de n’importe quel autre État membre. Tel est le
que les consommateurs soient encouragés à tort à acheter des
raisonnement fondamental ayant animé le débat qui a conduit
produits meilleur marché sans être informés de la possibilité
à la mise en place du principe de la reconnaissance mutuelle,
d’acheter en plus petite quantité. À cet égard, le Parlement
même en l’absence d’harmonisation.
s’est toujours ouvertement déclaré pour une information claire
Par conséquent, les États membres sont tenus, même en et complète des consommateurs sur tous les produits
l’absence de mesures d’harmonisation européenne (droit préemballés en libre circulation, ainsi que pour la certification
communautaire dérivé), de permettre la circulation et la mise de leur origine, une indication claire des prix, des quantités
sur leur marché de produits qui ont été légalement fabriqués nominales ou un format d’emballage obligatoires pour la
et commercialisés dans un État membre, à moins que des plupart des produits préemballés, des indications de poids et
exigences impératives ne subsistent. Dans ce cas, toute de volume lisibles sur les étiquettes et le respect des règles
mesure prise doit être contrôlée en application des principes nationales pour les produits typiques.
de nécessité et de proportionnalité.
Le Parlement a apporté à cet égard un soutien sans réserve en
Le plan d’action pour le marché unique, adopté en juin 1997, a faveur d’une stratégie européenne en vue d’une politique
fait de l’application du principe de la reconnaissance mutuelle globale et de qualité en matière d’évaluation de l’impact de la
la pierre angulaire de l’amélioration de l’efficacité du marché législation européenne.
intérieur.

g Azelio FULMINI
Mai 2007

119

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3.2.2. La liberté de circulation des travailleurs
L’une des quatre libertés dont bénéficient les citoyens européens est la liberté de circulation des travailleurs. Elle a trait au
droit de déplacement et de séjour des travailleurs, au droit d’entrée et de séjour des membres de leur famille et au droit
d’exercer une activité professionnelle dans un autre État membre de l’Union européenne. Néanmoins, ces droits sont
assortis de restrictions, notamment en ce qui concerne les droits d’entrée et de séjour et le droit d’occuper des emplois dans
l’administration publique et les nouveaux États membres pour certains pays.

Base juridique l’État membre d’accueil, sans discrimination pour raisons de


nationalité.
En général:
Article 3, paragraphe 1, point c), article 14 et articles 39 à 42 du Ce droit est reconnu indifféremment aux travailleurs
traité CE permanents, saisonniers, frontaliers, ou à ceux qui exercent
leur activité à l’occasion d’une prestation de services.
En particulier:
1. Droit de déplacement et de séjour du travailleur
Règlement (CEE) n° 1612/68 du 15 octobre 1968 [modifié par
a. Déplacement
les règlements (CEE) n° 312/76 et (CEE) n° 2434/92] et directive
2004/38/CE D’après la directive concernant le droit de séjour des citoyens
de l’UE (directive 2004/38/CE), la seule formalité imposée aux
citoyens de l’Union est la possession d’un document d’identité
Objectifs ou d’un passeport en cours de validité pour les séjours
La liberté de circulation des travailleurs, un des principes inférieurs à trois mois. L’État membre d’accueil pourra leur
fondateurs de la Communauté européenne en 1957, est demander de signaler leur présence sur son territoire dans un
exposée dans l’article 39 du traité CE et constitue par délai raisonnable et non discriminatoire.
conséquent un droit fondamental des travailleurs. Elle autorise
La directive 2004/38/CE introduit la citoyenneté européenne
les ressortissants d’un État de l’Espace économique européen
comme statut de base pour les ressortissants des États
(EEE) à travailler dans un autre État de l’EEE, aux mêmes
membres, lorsque ceux-ci exercent leur droit à se déplacer et à
conditions que les citoyens nationaux de cet État membre.
séjourner librement sur le territoire de l’UE. Auparavant,
Les chiffres actuels montrent que très peu d’Européens différents instruments communautaires visaient séparément
travaillent à l’étranger. Le pourcentage des Européens résidant les travailleurs salariés, les non-salariés, les étudiants et autres
dans un État membre de l’Union européenne (UE) autre que personnes sans emploi. Par conséquent, les droits des
leur pays d’origine s’est durablement inscrit autour de 1,5 % au membres de la famille du travailleur sont désormais intégrés
cours des trente dernières années. En ce qui concerne la dans cette nouvelle logique.
mobilité professionnelle, il apparaît que, dans neuf pays de
l’Union européenne, 40 % des travailleurs ont occupé le même b. Séjour
emploi pendant plus de dix ans. La mobilité des travailleurs, Le droit de séjour pour les travailleurs migrants, pour une
qu’elle soit géographique ou professionnelle, a été période supérieure à six mois, reste soumis à certaines
spécifiquement montrée du doigt comme étant un des conditions:
instruments qui permettraient de réaliser les objectifs du traité
— exercer une activité économique en qualité de travailleur
de Lisbonne. En matière d’emploi, les lignes directrices les plus
salarié ou non salarié;
récentes soulignent que la mobilité des travailleurs contribue
au renforcement des marchés du travail en Europe et qu’elle — ou disposer de ressources suffisantes et de l’assurance
constitue un instrument permettant d’anticiper les effets de la maladie nécessaire afin de ne pas devenir une charge pour
restructuration économique. l’assistance sociale de l’État membre d’accueil pendant son
séjour. À ce propos, les États membres ne pourront pas
Réalisations fixer le montant des ressources qu’ils considèrent comme
suffisantes, mais ils doivent tenir compte de la situation
A. Le régime général actuel de la liberté de circulation personnelle de la personne concernée;
Tout ressortissant d’un État membre a le droit de chercher du — ou suivre une formation professionnelle en tant
travail dans un autre État membre, conformément à la qu’étudiant;
réglementation nationale pertinente applicable aux travailleurs
nationaux. Il ou elle recevra, de la part des bureaux de main- — ou être membre de la famille d’un citoyen de l’Union qui
d’œuvre nationaux, les mêmes aides qu’un ressortissant de entre dans une des catégories susdites.

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Le marché intérieur Les grandes libertés
3 2 du marché intérieur

Tout citoyen de l’Union acquiert le droit de séjour permanent Tous les membres d’une famille, quelle que soit leur
dans l’État membre d’accueil après y avoir légalement résidé provenance, acquièrent le droit de séjour permanent après
durant une période ininterrompue de cinq ans, pour autant une période ininterrompue de cinq ans. Ce droit se perd en
qu’il n’y ait pas de mesure d’éloignement. cas d’absence de l’État d’accueil d’une durée supérieure à
deux ans. Ils ont également droit à une prestation d’assistance
Le droit de séjour permanent n’est plus soumis à aucune sociale et le droit d’exercer une activité économique salariée
condition. La même règle sera applicable aux membres de la ou non salariée.
famille qui n’ont pas la nationalité d’un État membre et qui ont
résidé cinq ans avec un citoyen de l’Union. Une fois acquis, le 3. Exercice de l’activité professionnelle
droit de séjour permanent ne se perd qu’en cas d’absence de a. Accès à l’emploi et traitement dans l’exercice de l’emploi
l’État membre d’accueil d’une durée supérieure à deux ans Le travailleur ressortissant d’un État membre ne peut être traité
consécutifs. différemment des travailleurs nationaux sur le territoire de
Certains avantages spécifiques aux citoyens de l’Union l’État membre d’accueil en raison de sa nationalité, et cela pour
exerçant une activité salariée ou non salariée et aux membres toutes les conditions d’emploi et de travail (notamment pour
de leur famille, pouvant leur permettre d’acquérir le droit de ce qui relève de l’accès à l’emploi, du licenciement et de la
résidence permanente avant d’avoir vécu pendant cinq ans rémunération). L’égalité de traitement s’applique aussi à toutes
dans l’État membre d’accueil devraient être conservés, car ils les mesures de formation, réorientation ou réadaptation
constituent des droits acquis [règlement (CEE) n° 1251/70]. professionnelles.
Il bénéficie des mêmes avantages sociaux et fiscaux que les
Le droit de séjour permanent, une fois obtenu, ne devrait être
travailleurs nationaux.
soumis à aucune condition, afin qu’il soit un authentique
véhicule d’intégration au sein de la société de l’État membre Le travailleur ressortissant d’un État membre travaillant sur le
dans lequel réside le citoyen de l’Union. La carte de séjour territoire d’un autre État membre bénéficie de l’égalité de
permanent a une durée illimitée et est renouvelable de plein traitement en matière d’exercice des droits syndicaux, y
droit tous les dix ans. Elle doit être délivrée dans les trois mois compris le droit de vote et l’accès aux postes d’administration
suivant le dépôt de la demande. Le citoyen peut prouver la ou de direction d’une organisation syndicale. Il bénéficie, en
continuité de sa résidence par tout moyen de preuve en usage outre, du droit d’éligibilité aux organes de représentation des
dans l’État membre d’accueil. travailleurs dans l’entreprise. Il peut cependant être exclu de la
participation à la gestion d’organismes de droit public et de
2. Droit d’entrée et de séjour des membres de la famille l’exercice d’une fonction de droit public.
En ce qui concerne les dispositions relatives au regroupement
b. Droit de demeurer dans le pays d’accueil après l’exercice
familial, la directive 2004/38/CE a modifié le règlement (CEE)
de l’emploi
n° 1612/68.
Se fondant sur le traité CE, ce droit a été prévu par le
En premier lieu, elle élargit la définition de «membre de la règlement (CEE) n° 1251/70 qui permet au travailleur de rester
famille», qui, auparavant, était limitée au conjoint, aux à titre permanent dans l’État où il a exercé son dernier emploi
descendants de moins de 21 ans ou à charge et aux s’il y a travaillé et résidé pendant trois ans, ou s’il a atteint l’âge
ascendants à charge, pour comprendre également les de la retraite, ou encore s’il souffre d’une incapacité
partenaires enregistrés, si la législation de l’État membre permanente de travail. La même règle s’applique aux
d’accueil considère le partenariat enregistré comme équivalant membres de sa famille résidant avec lui.
à un mariage.
B. Les restrictions à la liberté de circulation
Pour les périodes inférieures à trois mois, les membres d’une
1. Restrictions au droit d’entrée et de séjour
famille en provenance d’un État membre peuvent ainsi exercer
leur propre droit fondamental et séjourner librement sur le Le traité permet aux États membres de refuser à un
territoire d’un autre État membre. Pour les périodes ressortissant de l’UE l’entrée ou le séjour sur leur territoire pour
supérieures à trois mois, leur droit de séjour découle du fait des raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé
d’être membre de la famille d’un travailleur, citoyen de l’Union. publique.
Ils n’ont plus besoin d’une carte de séjour, mais doivent Toute mesure concernant la liberté de circulation et de séjour
néanmoins s’inscrire auprès des autorités compétentes. devra être fondée sur le comportement personnel du sujet.
L’existence de condamnations pénales ne pourra pas
Les membres d’une famille en provenance d’un pays tiers
automatiquement justifier une telle mesure.
bénéficient du même droit que le citoyen de l’Union qu’ils
accompagnent, mais ils peuvent être soumis à l’obligation de Le comportement devra représenter une menace
visa de court séjour ou équivalent. Pour les périodes dépassant suffisamment grave et actuelle touchant les intérêts
trois mois, ils doivent demander une «carte de séjour de fondamentaux de l’État. La péremption du document ayant
membre de la famille d’un citoyen de l’Union», valable pour permis l’entrée du sujet intéressé n’est pas une raison qui
cinq ans au moins, et en principe non retirable. justifie l’éloignement.

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En tout état de cause, avant de prendre une décision 3. Restrictions à la liberté de circulation
d’éloignement, l’État membre d’accueil devra évaluer certains des ressortissants des nouveaux États membres
éléments tels que la durée de la résidence de l’intéressé, son Pendant une période de transition allant jusqu’à sept ans après
âge, sa santé, son intégration sociale, sa situation familiale dans l’accession de dix États membres le 1er mai 2004 (République
le pays d’accueil ainsi que ses liens avec son pays d’origine. tchèque, Estonie, Chypre, Lettonie, Lituanie, Hongrie, Malte,
C’est seulement dans des circonstances exceptionnelles Pologne, Slovénie, Slovaquie) et de deux États membres le
impliquant des raisons impératives de sécurité publique 1er janvier 2007 (Bulgarie, Roumanie), il est possible d’appliquer
qu’une mesure d’éloignement pourra être prise contre des certaines conditions limitant la libre circulation des travailleurs
citoyens de l’Union qui ont séjourné dans l’État d’accueil depuis, vers et entre ces États membres. Ces restrictions
pendant dix années ou plus, ou qui sont mineurs. concernent seulement la liberté de circulation pour l’accès à
l’emploi; elles peuvent varier d’un État membre à l’autre.
Des garanties procédurales devraient être spécifiées de
manière détaillée, afin d’assurer un niveau élevé de protection Trois phases de la période de transition autorisent les États
des droits aux citoyens de l’Union et aux membres de leurs membres de l’EU-15 à ouvrir leur marché du travail aux
familles, dans le cas où ils se verraient refuser le droit d’entrée travailleurs des pays susmentionnés. Les dispositions
ou de séjour dans un autre État membre. La décision doit être provisoires ne peuvent cependant être prolongées au-delà
accompagnée des raisons qui l’ont motivée et d’informations d’un maximum absolu de sept ans.
sur les moyens de recours et les délais à respecter. Sauf en cas Pour les nouveaux États membres de l’EU-10, après la
d’urgence justifié, le délai pour quitter le territoire ne devrait première phase allant du 1er mai 2004 au 30 avril 2006, la
pas être inférieur à un mois à compter de la date de Commission a publié un rapport sur les dispositions
notification. provisoires (février 2006), d’où il ressortait que les restrictions
nationales ont peu d’effet sur le contrôle des mouvements
En aucun cas, la mesure d’interdiction du territoire ne sera migratoires qui dépendent davantage de facteurs associés aux
prise à vie. L’intéressé pourra introduire une demande de conditions de l’offre et de la demande. Les États membres de
réexamen de sa situation après un maximum de trois ans. De l’EU-15 ont dû faire part de leur intention concernant la
plus, la directive prévoit toute une série de garanties deuxième phase (du 1er mai 2006 au 30 avril 2009). Les
procédurales. mesures nationales peuvent être prolongées pendant
deux années supplémentaires (du 1er mai 2009 au 30 avril
2. Restrictions à l’accès aux emplois dans l’administration 2011), mais uniquement si le marché du travail d’un des États
publique membres de l’EU-15 connaît de sérieuses perturbations.
D’après l’article 39, paragraphe 4, du traité CE, la libre Le calendrier pour la Bulgarie et la Roumanie est différent
circulation des travailleurs ne s’applique pas aux emplois du puisque la première phase commence le 1er janvier 2007 et la
secteur public. L’accès à l’administration publique peut être troisième se termine le 31 décembre 2013.
limité aux ressortissants de l’État membre d’accueil.
C. Les mesures destinées à favoriser l’exercice
Cette dérogation a cependant été interprétée de manière très de la liberté de circulation
restrictive par la Cour de justice. Par conséquent, seul l’accès 1. La reconnaissance mutuelle des formations
aux postes impliquant l’exercice de l’autorité publique et la Le fait que tout citoyen de l’UE doit pouvoir pratiquer
responsabilité de préservation de l’intérêt général de l’État librement sa profession dans n’importe quel État membre
peut être limité (par exemple, la sécurité intérieure ou constitue un principe fondamental. Mais la mise en œuvre
extérieure de l’État). Ces critères doivent être évalués au cas concrète de ce principe est souvent entravée par les exigences
par cas, eu égard à la nature des tâches et des responsabilités nationales conditionnant l’accès à certaines professions dans
inhérentes aux postes en question (affaire 66/85 du 3 juillet le pays d’accueil.
1986).
Dans le passé, l’UE avait mis en place un système de
reconnaissance mutuelle des titres et diplômes à des fins
La Commission a énuméré les activités faisant partie, selon
professionnelles entre les États membres, afin de surmonter
elle, de «l’administration publique» (déclaration du 5 janvier
les différences. Une distinction fut établie entre professions
1988): d’une part, des «fonctions spécifiques de l’État et des
réglementées (pour lesquelles certaines qualifications sont
collectivités assimilables, telles que les forces armées, la police
juridiquement exigées) et professions non réglementées du
et les autres forces de l’ordre, la magistrature, l’administration
point de vue juridique dans l’État membre d’accueil.
fiscale et la diplomatie», d’autre part, des «emplois relevant des
ministères de l’État, des gouvernements régionaux et autres Récemment, le système de reconnaissance des qualifications
organismes assimilés, des banques centrales dans la mesure professionnelles a été réformé afin de rendre les marchés du
où il s’agit de personnel (fonctionnaires et autres agents) travail plus flexibles et d’encourager la reconnaissance
exerçant des activités autour d’un pouvoir juridique public de automatique des qualifications. La nouvelle directive relative
l’État ou d’une autre personne morale de droit public». à la reconnaissance des qualifications professionnelles

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Le marché intérieur Les grandes libertés
3 2 du marché intérieur

(directive 2005/36/CE, entrée en vigueur en octobre 2007) — les échanges de jeunes travailleurs, pour que les États
(3.2.3) renforce et modernise quinze directives existantes membres encouragent la libre circulation dans le cadre de
couvrant toutes les règles de reconnaissance, sauf celles programmes communs (programme PETRA de 1988 à
s’appliquant aux avocats, aux activités dans le domaine des 1994, aujourd’hui intégré dans le cadre plus large du
substances toxiques et aux agents commerciaux. La directive programme Leonardo da Vinci d’éducation et de formation
fait la distinction entre la «liberté de fournir des services» et la tout au long de la vie, de 2007 à 2013) (4.17.1).
«liberté d’établissement», en se fondant sur des critères
comme la durée, la fréquence, la régularité et la continuité de Rôle du Parlement européen
l’offre de services.
Le Parlement européen, qui considère tous les sujets liés à
La reconnaissance peut se faire par le biais du système l’emploi comme l’une des priorités les plus importantes de
général de reconnaissance des qualifications professionnelles l’Union européenne, a toujours fait valoir que l’Union et ses
ou du système de reconnaissance automatique des États membres devaient coordonner leurs efforts et
qualifications attestées par une expérience professionnelle promouvoir la libre circulation des travailleurs. La libre
(artisanat, secteurs du commerce et de l’industrie), ou bien circulation des travailleurs s’inscrit dans les objectifs du marché
encore par le biais du système de reconnaissance intérieur achevé. Le Parlement européen a toujours joué un
automatique des qualifications concernant des professions rôle dynamique dans la mise en place et l’achèvement du
déterminées (médecins, infirmières, dentistes, sages-femmes, marché intérieur. Il a toujours soutenu vigoureusement les
vétérinaires, pharmaciens et architectes). efforts de la Commission dans ce domaine.
2. Le réseau EURES (European employment services) Les travailleurs des autres États membres devraient être traités
La Commission vise à renforcer et à consolider EURES en tant de la même façon que ceux du pays d’accueil, et en particulier
qu’instrument fondamental par la mise en réseau des services recevoir à travail égal un salaire égal. Ce principe fondamental
pour l’emploi au sein des pays de l’EEE. La mobilité a été contesté par la Cour de justice européenne dans une
professionnelle et géographique devient ainsi un élément clé série de jugements récents concernant la directive 96/71/CE
de la stratégie européenne pour l’emploi (SEE) et du plan relative au détachement des travailleurs, pour des affaires
d’action en matière de compétence et de mobilité (4.9.3). connues sous les noms d’affaires Viking, Laval et Rüffert.
3. Autres activités permettant de renforcer la mobilité En 2006 déjà, le Parlement avait exprimé sa préoccupation au
des travailleurs sujet de la résolution de l’application de la directive 96/71/CE
L’Union européenne a consenti des efforts importants pour relative au détachement des travailleurs [P6 TA(2006)0463],
créer un environnement favorable à la mobilité des travailleurs: cette directive n’étant pas correctement appliquée dans
— un plan d’action sur les compétences et la mobilité, de certains États membres, cela afin d’empêcher le dumping
2002 à 2005; social. De nombreuses difficultés viennent des différences
d’interprétation de concepts clés comme travailleur, salaire
— une carte européenne d’assurance maladie, depuis 2006; minimal ou sous-traitance. La Commission a pris en
— la coordination des systèmes de sécurité sociale s’est considération les informations fournies et les préoccupations
accélérée avec l’adoption du règlement (CE) n° 883/04 exprimées par le Parlement dans la communication sur le
(4.9.4); détachement des travailleurs dans le cadre de l’offre de
services [COM(2007) 304].
— une proposition de directive sur la portabilité des droits à la
pension supplémentaires; Avec l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, les articles 39,
40 et 41 du traité CE sur la liberté de circulation des travailleurs
— l’Année européenne de la mobilité des travailleurs (2006) a
ne seront pas modifiés. Ils deviendront, respectivement,
eu pour but d’accroître la sensibilisation aux droits des
les articles 45, 46 et 47.
travailleurs en matière de libre circulation des personnes,
aux opportunités qui existent en la matière et aux
instruments qui ont été mis en place pour les promouvoir g Christa KAMMERHOFER
(EURES); Août 2008

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3.2.3. La liberté d’établissement, la liberté de prestation de
services et la reconnaissance mutuelle des diplômes
Prévues par le traité CE, la liberté d’établissement et la liberté de prestation de services sont renforcées par la jurisprudence,
notamment les arrêts Ryners et van Binsbergen. Des dispositions du traité CE et diverses décisions européennes sur
l’harmonisation et la reconnaissance mutuelle des diplômes et des qualifications ont également été exploitées dans le but
de faciliter l’exercice effectif de ces deux libertés.

Base juridique n’auront pas été levées, chaque État membre applique ces
restrictions sans distinction de nationalité ou de résidence à
Article 3, paragraphe 1, point c), article 14 et articles 43 à 55 du
toutes les personnes fournissant des «services». La personne
traité CE
fournissant un «service» peut, à cet effet, exercer
temporairement son activité là où le service est fourni, aux
Objectifs mêmes conditions que celles imposées par l’État à ses propres
Le traité CE énonce le principe selon lequel les indépendants ressortissants.
(qu’ils relèvent du secteur commercial, industriel, artisanal ou Les activités comme les transports, les assurances et les
libéral) et les opérateurs économiques établis sur le territoire activités bancaires sont également concernées par cette
d’un État membre sont autorisés à exercer une activité liberté, mais elles sont abordées dans d’autres fiches
économique dans tous les États membres de deux manières. techniques (3.4.2, 3.4.3 et 4.5.1).
Les indépendants, les professions libérales ou les personnes
morales visés à l’article 48 du traité CE qui opèrent légalement Ces dispositions exercent un effet direct depuis la fin de la
dans un État membre peuvent exercer une activité période de transition, c’est-à-dire depuis le 1er janvier 1970
économique dans un cadre stable et continu dans un autre [arrêt Reyners du 21 juin 1974 (2/74) sur la liberté
État membre (liberté d’établissement à l’article 43) ou proposer d’établissement et arrêt van Binsbergen du 3 décembre 1974
et fournir temporairement leurs services dans d’autres États (33/74) sur la liberté de prestation des services]. L’effet direct
membres tout en demeurant dans leur pays d’origine (liberté des deux articles du traité CE est que les ressortissants
de prestation de services à l’article 49). Cela suppose non communautaires ont le droit d’être traités comme des
seulement la suppression de toute discrimination selon la ressortissants nationaux et qu’ils peuvent demander aux
nationalité mais encore, si l’on veut que cette liberté soit juridictions nationales compétentes d’appliquer les articles 43
effectivement utilisée, l’adoption des mesures propres à en et 49 du traité CE. Toute discrimination fondée sur la
faciliter l’exercice, avant tout l’harmonisation des règles nationalité est interdite. Autrement dit, les États membres sont
nationales d’accès ou leur reconnaissance mutuelle. tenus de modifier leurs dispositions nationales qui limitent ces
deux libertés, y compris les dispositions nationales qui
s’appliquent indistinctement aux opérateurs nationaux et
Réalisations étrangers si ces dernières gênent ou rendent moins attrayant
A. Le régime de la libéralisation dans le traité l’exercice de ces libertés en occasionnant des retards et des
frais supplémentaires.
1. Deux «libertés fondamentales»
Les articles 43 et 49 du traité CE ne peuvent être interprétés
Le droit d’établissement couvre le droit d’avoir accès et de
comme conférant aux entreprises le droit de transférer leur
s’adonner à des activités indépendantes et celui de créer et de
direction centrale et de gérer leur siège central dans un autre
gérer des entreprises en vue d’exercer une activité permanente
État membre tout en préservant leur statut d’entreprise
dans un cadre stable et continu, aux mêmes conditions que
constituée au sens de la législation de l’État membre d’origine.
celles énoncées par le droit de l’État membre d’établissement
pour ses propres ressortissants. La Commission européenne et la Cour de justice des
Communautés européennes ont pour mission de garantir
Les restrictions à la liberté de fournir des services dans la
l’application et le respect des dispositions communautaires. La
Communauté sont interdites pour les ressortissants d’un État
Commission est habilitée à entamer des procédures
membre qui sont établis dans un État de la Communauté
d’infraction à l’encontre des États membres qui ne satisfont pas
autre que celui de la personne à laquelle les services sont
à leurs obligations, conformément à l’article 226 du traité CE
destinés. Sont considérés comme des «services» tous les
(3.4.2 et 3.4.3).
services généralement fournis contre rémunération, pour
autant qu’ils ne soient pas régis par les dispositions relatives à 2. Les exceptions
la libre circulation des biens, des capitaux et des personnes. Le traité exclut de la liberté d’établissement et de prestation de
Tant que les restrictions à la liberté de prestation de services services les activités participant à l’exercice de l’autorité

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Le marché intérieur Les grandes libertés
3 2 du marché intérieur

publique (article 45, paragraphe 1, du traité CE). Cette ressortissant d’un État membre de la CE» est délivrée et ne
exclusion est limitée toutefois par une interprétation restrictive: peut être retirée qu’à la condition que cette personne n’ait plus
les exclusions ne couvrent que les activités et fonctions d’emploi. La durée du droit de séjour des personnes
spécifiques participant à l’exercice de l’autorité publique; toute prestataires et destinataires de services correspond à la
une profession ne peut être exclue que si elle est consacrée à période au cours de laquelle les services sont fournis.
l’exercice de l’activité publique ou si la partie qui y est
Le règlement (CE) n° 2157/2001 relatif au statut de la société
consacrée n’est pas détachable des autres.
européenne, complété par la directive 2001/86/CE, constitue
Les exceptions permettent aussi aux États membres d’en une étape importante dans le sens d’un exercice effectif de ces
écarter la production et le commerce de matériel de deux libertés fondamentales.
guerre [article 296, paragraphe 1, point b), du traité CE] et de
maintenir un régime propre aux non-nationaux pour des C. Harmonisation et reconnaissance mutuelle
raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé des titres et diplômes
publique (article 46, paragraphe 1, et article 55 du traité CE). L’article 47, paragraphe 1, du traité CE dispose que la
reconnaissance mutuelle des diplômes et autres titres requis
B. La mise en œuvre des articles 43 et 49 du traité CE dans chaque État membre pour l’accès aux professions
Deux programmes généraux, adoptés le 18 décembre 1961, réglementées peut servir à faciliter la liberté d’établissement et
prévoyaient les directives nécessaires à la suppression des la liberté de prestation de services (décision 85/368/CEE du
restrictions à la liberté d’établissement et de prestation de Conseil et résolution du Conseil du 28 octobre 1999). Ce
services pour les différentes activités. Bien que le Conseil ait paragraphe prévoit la coordination des règles nationales
adopté bon nombre de directives, le travail était loin d’être d’accès et d’exercice, c’est-à-dire un minimum d’harmonisation
achevé en 1974, lorsque la Cour a décidé qu’en dépit de cette de ces règles, en particulier des formations qui conduisent aux
carence et de l’absence de droit communautaire dérivé titres et diplômes. Le paragraphe 3 subordonne la
(principalement sous la forme de directives et de règlements), reconnaissance mutuelle, lorsqu’une telle harmonisation est
les deux libertés avaient, aux termes mêmes du traité, un effet difficile, à la coordination des conditions d’exercice dans les
direct dès la fin de la période de transition, soit à partir du États membres.
1er janvier 1970: ce sont les arrêts Reyners du 21 juin 1974
À partir du milieu des années 70, le processus d’harmonisation
(2/74) pour la liberté d’établissement et van Binsbergen du
a débouché sur l’adoption d’un certain nombre de directives.
3 décembre 1974 (33/74) pour la libre prestation de services.
Sur ces bases, la législation de reconnaissance mutuelle s’est
L’effet direct des deux libertés signifie que les ressortissants de donc adaptée aux différentes situations. Elle est plus ou moins
la Communauté ont droit au traitement national. Un État complète selon les secteurs professionnels et a été récemment
membre doit permettre aux ressortissants des autres États adoptée au titre d’une approche générale.
membres de s’établir ou de prester leurs services sur son 1. L’approche sectorielle (par profession)
territoire dans les mêmes conditions que ses propres
ressortissants. Toute discrimination en raison de la nationalité a. Reconnaissance mutuelle après harmonisation
est donc proscrite. Mais les conditions nationales relatives à C’est dans le secteur de la santé que l’harmonisation a été la
l’accès aux activités et à l’exercice de celles-ci continuent de plus rapide, pour l’évidente raison que les conditions
constituer autant d’obstacles pour les non-nationaux, obligés d’exercice, en particulier les formations, variaient peu d’un pays
en fin de compte d’entreprendre de nouvelles études pour à l’autre (par rapport à d’autres professions) et que
obtenir les titres et diplômes nationaux requis ou de supporter l’harmonisation préalable de ces conditions, prévue par le
des coûts ou des charges supplémentaires. Les mesures traité, n’a donc pas été trop difficile à réaliser. Cette
communautaires destinées à faciliter l’exercice des deux harmonisation s’est développée à travers plusieurs directives,
libertés gardent donc toute leur valeur; elles visent à garantir la entre le milieu des années 70 et le milieu des années 80,
reconnaissance mutuelle des règles nationales et régissant de nombreuses professions en ce qui concerne la
éventuellement leur harmonisation. Dans certains cas, elles liberté d’établissement et de prestation de services (pour les
lèvent d’autres restrictions collatérales à la liberté de médecins: les directives 75/362/CEE et 75/363/CEE du 16 juin
circulation, notamment la directive 73/148/CEE du Conseil 1978, codifiées par la directive 93/16/CEE du 5 avril 1993 et
(abrogée par la directive 2004/38/CE) et la directive 93/96/CEE modifiées par la directive 97/50/CE du 6 octobre 1997; pour les
sur le droit de séjour, ou la directive 96/71/CE sur le dentistes: les directives 78/686/CEE et 78/687/CEE du 24 août
détachement des travailleurs dans le cadre de la prestation de 1978; pour les infirmiers: les directives 77/452/CEE et 77/453/
services. La directive 2004/38/CE dispose que les États CEE du 27 juin 1977; pour les vétérinaires: les directives
membres accorderont le droit de séjour permanent aux 78/1026/CEE et 78/1027/CEE du 23 décembre 1978; pour les
ressortissants d’autres États membres qui s’établissent sages-femmes: les directives 80/154/CEE et 80/155/CEE du
eux-mêmes sur leur territoire en vue d’y poursuivre leurs 21 janvier 1980, complétées et modifiées par les directives
activités indépendantes lorsque les restrictions applicables à 81/1057/CEE et 89/594/CEE du Conseil; pour les pharmaciens:
ces activités auront été levées. Une «carte de séjour de les directives 85/432/CEE et 85/433/CEE; pour les agents

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commerciaux indépendants: la directive 86/653/CEE du directive 77/796/CEE du 12 décembre 1977), les agents et
18 décembre 1986). courtiers d’assurance (directive 77/92/CEE du 13 décembre
1976), les coiffeurs (directive 82/489/CEE du 19 juillet 1982) et
Le Conseil européen de Lisbonne des 23 et 24 mars 2000 a
les architectes (directive 85/384/CEE du 10 juin 1985).
lancé des réformes économiques visant à faire de l’UE
l’économie basée sur la connaissance la plus dynamique et la 2. L’approche générale
plus compétitive du monde à l’horizon 2010. Cela a conduit la L’établissement d’une législation de reconnaissance mutuelle,
Commission à adopter une communication intitulée «Une secteur par secteur, accompagnée parfois d’une
stratégie pour le marché intérieur des services» en décembre harmonisation plus ou moins poussée des règles nationales
2000 et, le 7 mars 2002, à proposer une directive sur la est toutefois long et fastidieux. C’est la raison pour laquelle un
reconnaissance des qualifications professionnelles. La directive système général de reconnaissance de l’équivalence des
proposée visait à clarifier, à simplifier et à moderniser les diplômes, valable pour toutes les professions réglementées qui
directives existantes et à les combiner en une seule directive. n’étaient soumises à aucune législation communautaire
Cela a débouché sur la directive 2005/36/CE du 7 septembre spécifique, a fait son apparition. La nouvelle approche
2005, à transposer au plus tard le 20 octobre 2007, combinant générale a changé la donne (voir la dernière résolution du
les professions réglementées des médecins, dentistes, Conseil du 10 novembre 2003). Avant la nouvelle approche, la
infirmiers, vétérinaires, sages-femmes, pharmaciens et «reconnaissance» était subordonnée à l’existence de
architectes en un seul texte législatif. dispositions communautaires concernant l’«harmonisation» en
La directive mentionne, entre autres, la manière dont l’État vigueur dans la profession ou l’activité réglementée
membre «d’accueil» doit reconnaître les qualifications concernée. Après, la «reconnaissance mutuelle» est devenue,
professionnelles obtenues dans un autre État membre selon les dispositions en vigueur, presque automatique pour
(«d’origine»). La reconnaissance des professions comprend un toutes les professions réglementées concernées sans référence
système général de reconnaissance ainsi que des systèmes nécessaire à une quelconque législation dérivée sectorielle.
spécifiques pour chaque profession mentionnée ci-dessus. La Depuis lors, les méthodes d’harmonisation et de
reconnaissance porte entre autres sur le niveau de reconnaissance mutuelle ont perduré en parallèle avant d’être
qualification, la formation (générale et spécialisée, exploitées dans le cadre d’un système complémentaire faisant
respectivement) et l’expérience professionnelle. appel à la fois à un règlement et à une directive (voir les
La directive s’applique également aux qualifications résolutions du Conseil du 3 décembre 1992 et du 15 juillet
professionnelles dans le secteur des transports et à celles des 1996 sur la transparence des qualifications et des certificats de
intermédiaires d’assurance et des contrôleurs légaux des formation professionnelle).
comptes. Ces professions étaient auparavant régies par Ce nouveau système a été mis sur pied en trois temps:
d’autres directives.
— en 1990: reconnaissance des diplômes de l’enseignement
b. Reconnaissance mutuelle sans harmonisation supérieur sanctionnant des formations professionnelles
Pour les autres professions, lorsque les différences entre les d’au moins trois ans (directive 89/48/CEE du 21 décembre
règles nationales n’ont pas permis l’harmonisation, la 1988);
reconnaissance mutuelle a été moins poussée. La diversité des
— en 1992: élargissement du système aux diplômes,
systèmes et des formations juridiques des États membres a
certificats et titres ne relevant pas de l’enseignement
empêché la reconnaissance mutuelle complète des diplômes
supérieur de longue durée, avec deux niveaux:
et titres d’accès qui aurait assuré le libre établissement
immédiat sur la base du titre de l’État d’origine. La directive • c ycle court d’études post-secondaires ou d’études
77/249/CEE du 22 mars 1977 a autorisé la liberté de prestation professionnelles,
de services occasionnels pour les avocats. Pour le libre
• c ycle d’études secondaires (directive 92/51/CEE du
établissement, il fallait le titre du pays d’accueil. Avec la
18 juin 1992);
directive 98/5/CE du 16 février 1998, on a franchi un pas
important: les avocats titulaires d’un titre professionnel d’un — en 1999: introduction d’un mécanisme de reconnaissance
État membre pouvaient désormais s’établir dans un autre État des qualifications pour l’accès à certaines activités
membre pour y exercer leur profession avec la réserve que commerciales, industrielles et artisanales non encore
l’exercice de la représentation et de la défense en justice couvertes par les directives précédentes (textile,
pouvait être soumis par cet État à l’exigence de l’assistance habillement, cuir, bois, etc.) (directive 99/42/CE du 7 juin
d’un avocat du pays; après trois ans d’activité sous ce régime, 1999).
l’avocat acquiert (s’il le souhaite), sans examen d’aptitude, le
Dans les trois cas, l’État d’accueil ne peut refuser l’accès à
droit à la plénitude de l’exercice sous le titre de l’État d’accueil.
l’activité considérée si le demandeur dispose de la qualification
D’autres directives ont appliqué le principe à d’autres lui ouvrant cet accès dans le pays d’origine. Toutefois, il peut
professions, notamment les opérateurs de transport routier exiger, si la formation reçue est d’une durée inférieure à celle
(directives 74/561/CEE et 74/562/CEE du 12 novembre 1974 et dispensée dans le pays d’accueil, une expérience

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Le marché intérieur Les grandes libertés
3 2 du marché intérieur

professionnelle d’une certaine durée ou, si la formation est très 1985) condamnant le Conseil pour s’être abstenu, en violation
différente, un stage d’adaptation ou une épreuve d’aptitude, du traité, d’assurer la libre prestation de services en matière de
au choix du demandeur, sauf dans le cas où l’activité requiert transports internationaux et de fixer les conditions d’admission
la connaissance du droit national. des transporteurs non résidents aux transports nationaux dans
un État membre. En conséquence, le Conseil a été contraint
Rôle du Parlement européen d’adopter la législation nécessaire (4.5.1).
Le Parlement européen (PE) a joué un rôle moteur dans la On notera que le rôle du Parlement s’est accru avec
libéralisation des activités non salariées. Il a veillé entre autres à l’application (depuis le traité de Maastricht) de la procédure de
la stricte délimitation des activités qui peuvent rester réservées codécision à la plupart des aspects de la liberté
aux nationaux (par exemple celles qui participent à l’exercice d’établissement et de la liberté de prestation de services.
de l’autorité publique). On signalera aussi son recours en
carence auprès de la Cour de justice contre le Conseil en
matière de politique des transports: ce recours, introduit en g Azelio FULMINI
janvier 1983, a abouti à un arrêt de la Cour (13/83 du 22 mai Septembre 2006

3.2.4. La libre circulation des capitaux


Au début des années 60, avant même que le marché unique soit créé, les États membres des Communautés européennes
ont adopté des mesures en faveur d’une libre circulation des capitaux. En 1988, la directive 88/361/CEE a permis de mettre
en place une libéralisation générale entre les États membres. L’Union économique et monétaire a poursuivi cette
libéralisation en obtenant l’abolition de la clause de sauvegarde au sein de la zone euro.

Base juridique — les crédits à court ou à moyen terme relatifs à des


opérations commerciales;
Articles 56 à 60 du traité CE
— les achats de titres négociés en bourse.
Objectifs 2. Les mesures nationales unilatérales
Sans attendre les décisions communautaires, certains États
Lever toutes les restrictions aux mouvements de capitaux
membres ont supprimé presque complètement leurs
entre les États membres, puis entre les États membres et les
restrictions aux mouvements de capitaux:
États tiers (avec, dans ce dernier cas, la possibilité de mesures
de sauvegarde dans des circonstances exceptionnelles). — la République fédérale d’Allemagne dès 1961;
La libéralisation doit contribuer à l’établissement du marché — le Royaume-Uni en 1979;
intérieur en favorisant les autres libertés (personnes, biens et — les pays du Benelux entre eux en 1980.
services).
B. La reprise et l’achèvement de la libéralisation
Elle doit aussi favoriser le progrès économique en permettant dans le cadre du marché intérieur
une affectation optimale des capitaux.
1. La reprise de la libéralisation
Il a fallu attendre le lancement du marché unique, presque
Réalisations vingt ans plus tard, pour reprendre le mouvement amorcé en
1960-1962. Deux directives de 1985 et 1986 ont étendu la
A. Premiers efforts de libéralisation (avant le marché libéralisation inconditionnelle:
intérieur)
— aux crédits à long terme relatifs à des transactions
1. Les premières mesures communautaires
commerciales;
Elles ont porté sur des opérations limitées.
— aux achats de titres non négociés en bourse.
Une directive de 1960, modifiée en 1962, a libéralisé
2. La libéralisation générale
inconditionnellement:
Elle a été réalisée par la directive 88/361/CEE du 24 juin 1988,
— les investissements directs; qui décidait de la suppression de toutes les restrictions

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subsistantes aux mouvements de capitaux entre résidents des — de mesures justifiées par des motifs d’ordre public ou de
États membres pour le 1er juillet 1990. La libéralisation sécurité publique.
s’étendait ainsi aux opérations à caractère monétaire ou quasi
L’article 226 du traité CE stipule que «si la Commission estime
monétaire, celles qui sont susceptibles d’avoir la plus grande
qu’un État membre a manqué à une des obligations qui lui
incidence sur la politique monétaire des États, telles que les
incombent en vertu du présent traité, elle émet un avis motivé
prêts financiers, les dépôts en devises ou les opérations sur
à ce sujet, après avoir mis cet État en mesure de présenter ses
titres.
observations. Si l’État en cause ne se conforme pas à cet avis
Certes, le texte comportait une clause de sauvegarde dans le délai déterminé par la Commission, celle-ci peut saisir
permettant aux États membres de prendre des mesures de la Cour de justice». L’exécution des arrêts de la Cour est régie
protection lorsque des mouvements de capitaux à court terme par l’article 228 du traité CE.
d’une ampleur exceptionnelle perturbent gravement la 2. Les infractions récentes concernent les droits spéciaux
politique monétaire. Mais ces mesures ne s’appliquaient qu’à des autorités publiques dans les entreprises/secteurs
des opérations limitativement énumérées et ne pouvaient privés
durer plus de six mois.
a. Procédure d’infraction à l’encontre de l’Espagne concernant
Il permettait aussi à certains États de maintenir des la législation modifiant les fonctions du régulateur espagnol
restrictions permanentes, essentiellement sur les de l’électricité et du gaz
mouvements à court terme, mais pour un certain temps La législation en question prévoit des dispositions requérant
seulement: jusqu’au 31 décembre 1992 pour l’Espagne, une autorisation du régulateur concernant les acquisitions de
l’Irlande et le Portugal, et jusqu’au 30 juin 1994 pour la Grèce. plus de 10 % du capital ou de tout autre pourcentage
confèrant une influence importante dans une société ayant
C. Le régime définitif des activités directement ou indirectement régulées. La
1. Le principe législation explique les raisons sur lesquelles se base le
Il a été fixé par les nouvelles dispositions introduites dans le régulateur pour accorder ou refuser ces acquisitions. Toutefois,
traité de Rome par le traité UE. Le principe (article 56) est la Commission estime que ces raisons sont vagues et
l’interdiction totale des restrictions aux mouvements des confèrent dès lors au régulateur de vastes pouvoirs
capitaux et des paiements. discrétionnaires, ce qui pourrait indûment limiter la libre
circulation des capitaux (article 56).
Les exceptions sont essentiellement limitées aux
mouvements avec les pays tiers et, dans ce domaine, elles b. Lois hongroises sur la privatisation
sont soumises à une décision communautaire. À part la La Commission européenne a décidé de demander
possibilité de maintenir les mesures nationales ou officiellement à la Hongrie de modifier sa législation‑cadre sur
communautaires en vigueur au 31 décembre 1993 à propos la privatisation de 1995, qu’elle estime incompatible avec le
des investissements directs et de certaines autres opérations, droit européen. Au cours des négociations en vue de
le Conseil peut: l’adhésion à l’UE, la Hongrie a convenu de modifier sa
législation en matière de privatisation à la date de son
— prendre des mesures nouvelles à propos des mêmes
adhésion et un projet de loi a été présenté au parlement
opérations;
hongrois au printemps 2004. Toutefois, depuis lors, rien ne s’est
— prendre des mesures de sauvegarde pour six mois au plus passé. Grâce à ses actions privilégiées, l’État peut apposer son
en cas de difficultés graves pour le fonctionnement de veto à certaines décisions stratégiques de gestion et dissuader
l’Union économique et monétaire; des entreprises d’autres États membres d’investir dans les
entreprises concernées.
— prendre des mesures urgentes en cas de réduction des
relations économiques avec un pays, décidée dans le cadre c. Procédures d’infraction à l’encontre de la Suède et de la Grèce
de la politique étrangère et de sécurité commune; La Commission européenne a intenté une action contre la
Suède et la Grèce afin de garantir que ces deux États
— avaliser des mesures nationales prises contre un pays pour
appliquent correctement la législation relative au marché
des raisons politiques graves et des motifs d’urgence.
intérieur. La Commission demandera officiellement à la Suède
Comme restrictions applicables aux mouvements de de modifier un élément de sa législation fiscale, qui oblige les
capitaux en général, donc aussi à l’intérieur de l’Union, les institutions financières étrangères non officiellement établies
États membres ne peuvent décider que: en Suède à fournir aux autorités fiscales suédoises des
informations annuelles sur leurs activités avec des résidents
— de mesures nécessitées par la lutte contre les infractions,
suédois. La Commission estime que cette obligation tend à
notamment fiscales, et par le contrôle prudentiel des
dissuader les institutions financières étrangères de fournir des
services financiers;
services transfrontaliers en Suède et est donc incompatible
— de procédures de déclaration à des fins administratives ou avec les dispositions du traité CE relatives à la libre circulation
statistiques; des capitaux. La Commission demandera également

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Le marché intérieur Les grandes libertés
3 2 du marché intérieur

officiellement à la Grèce de modifier sa législation sur le droit Rôle du Parlement européen


des sociétés, qui autorise le gouvernement grec à décider des Le Parlement a soutenu vigoureusement les efforts de la
augmentations de capital dans les sociétés à responsabilité Commission en faveur de la libéralisation des mouvements de
limitée. La Commission estime que cela est contraire au droit capitaux. Il a toutefois toujours estimé que cette libéralisation
européen des sociétés, qui veut que ces décisions soient prises devait être plus marquée à l’intérieur de l’Europe qu’entre
lors d’une assemblée générale. l’Europe et le reste du monde pour que l’épargne européenne
se dirige en priorité vers les placements européens. Il a
D. Impact de l’Union économique et monétaire
également souligné que cette libéralisation devait
1. Suppression de la clause de sauvegarde s’accompagner de la libéralisation complète des services
Depuis le 1er janvier 1999 et le début de la troisième phase de financiers et de l’harmonisation des législations fiscales si l’on
l’Union économique et monétaire, les articles relatifs aux voulait créer un véritable espace financier européen. C’est
clauses de sauvegarde en cas de crise de la balance des grâce à sa pression politique que la Commission a lancé sa
paiements (articles 119 et 120 du traité CE) ne sont plus législation sur l’harmonisation des paiements domestiques et
applicables aux États membres ayant adopté la monnaie transfrontaliers (résolution du 17 juin 1988).
unique. En revanche, ils restent applicables aux États membres
Dans sa dernière résolution non législative du 7 juillet 2005
ne faisant pas encore partie de la zone euro.
(T6-0301/2005), le Parlement a souscrit à l’objectif de la
2. Paiements réalisation d’un marché efficace, intégré et sûr pour la
a. Harmonisation des frais des paiements nationaux compensation et le règlement-livraison des titres dans l’Union.
et transfrontaliers Il est d’avis que la création de systèmes européens de
compensation et de règlement-livraison efficaces sera un
Le règlement (CE) n° 2560/2001 du 19 décembre 2001 a processus complexe; il fait observer qu’un véritable processus
procédé à l’harmonisation des frais des paiements nationaux d’intégration et d’harmonisation européennes nécessitera les
et transfrontaliers au sein de la zone euro. efforts combinés des différents acteurs et que le débat
b. Nouveau cadre juridique pour les paiements