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Cancer du testicule
36
ANALYSE
Classification histologique
et pathologie moléculaire
Le cancer du testicule, bien que relativement rare, est le cancer le plus fré-
quent chez les hommes de 15 à 35 ans. L’acquisition de traitements efficaces,
même pour des tumeurs avancées, a permis de porter l’attention sur l’instau-
ration de protocoles de traitements ayant pour objectif de maintenir de bons
résultats en diminuant notablement les effets secondaires.
L’existence de marqueurs spécifiques tels que l’α-fœtoprotéine (AFP) et la
β-gonadotrophine chorionique humaine (βhCG) permet de suivre la
décroissance du cancer sous traitement, et en cas d’élévation des marqueurs
de pouvoir modifier rapidement le schéma de traitement. De plus, la plupart
des cancers du testicule ont pour origine les cellules germinales, qui sont
radio-sensibles et chimio-sensibles à la plupart des drogues proposées.
Classification histologique
La majorité des tumeurs est issue des cellules germinales : il s’agit des tumeurs
germinales ; les tumeurs non-germinales ou « tumeurs sans classification »,
sont très rares. Ces tumeurs sont répertoriées dans la classification de l’OMS
(World Health Organisation) (Mostofi et coll., 1998).
Tumeurs germinales
Il existe deux types anatomopathologiques de tumeurs germinales tant sur le
plan pronostique que thérapeutique. Elles dérivent des spermatogonies
contenues dans les tubes séminifères. Les spermatocytes à 2n chromosomes
donnent les séminomes, alors que la dégénérescence après parthénogenèse
des spermatogonies donne les tumeurs non séminomateuses (chez l’embryon
de 2 semaines, carcinomes embryonnaires ; chez l’embryon plus âgé, chorio-
carcinome, tumeur du sac vitellin) (figure 36.1). 559
Cancer et environnement
n chromosomes 60 % 40 % 2n chromosomes
Cellule extra-embryonnaire :
Sac vitellin : 5 %
Tératome 10 % Chorio-carcinome : 1 %
Tératome immature : 2/3
Tératome mature : 1/3
Chimiothérapie
Tératome cancérisé
Tératome transformé
Sarcome
Carcinome…
Tumeurs séminomateuses
Les tumeurs séminomateuses représentent 30 à 40 % des tumeurs germinales
du testicule, 70 % sont diagnostiquées à un stade précoce, 25 % au stade
d’adénopathie rétropéritonéale et 5 % au stade métastatique. Elles concer-
nent l’homme de plus de 30 ans. Il existe deux grands types de séminome :
• séminome typique (ou classique), représentant 80 % des séminomes.
Macroscopiquement, il s’agit d’une tumeur régulière, homogène, gris rose
avec des traînées fibreuses. En microscopie, elle est caractérisée par la pré-
sence de grandes cellules à cytoplasme clair et stroma lymphoïde. Dans 75 %
des cas, il existe un carcinome in situ dans le parenchyme adjacent ;
• séminome à cellules syncytiotrophoblastiques (SCT), représentant 8 %
des séminomes. Il s’agit de l’association à un séminome classique de cellules
syncytiotrophoblastiques, mais il n’y a jamais de cellules cytotrophoblastiques
(dans ce cas, il s’agit alors d’une association séminome-choriocarcinome).
Ce type à SCT peut sécréter de la β-hCG à des taux modérés. Il a le même
560 pronostic et le même traitement que le séminome classique.
Classification histologique et pathologie moléculaire
ANALYSE
spermatocytaires, ni le séminome anaplasique.
Tumeurs non-germinales
Les tumeurs non germinales représentent moins de 10 % des tumeurs du
testicule. Les tumeurs non germinales sont très nombreuses. Elles dérivent
du stroma testiculaire (tumeur des cordons sexuels : tumeurs à cellules de
Leydig, à cellules de Sertoli, gonadoblastome, androblastome) ou des enve-
loppes (sarcome, lipome, mésothéliome).
Le lymphome testiculaire est la tumeur la plus fréquente chez l’homme de
plus de 50 ans ; c’est une tumeur bilatérale le plus souvent. Sur le plan
pathologique, il s’agit généralement d’un lymphome B à grandes cellules
dont le traitement associe orchidectomie bilatérale et chimiothérapie. Le
pronostic est mauvais avec une survie inférieure à 30 % à 1 an.
La tumeur à cellules de Leydig (ou leydigiome) s’observe chez l’homme de
25 à 35 ans. C’est une petite tumeur unilatérale, jaune chamois, découverte
soit lors du bilan d’une gynécomastie, soit lors d’un bilan d’infertilité. Sou-
vent bénigne pour les petites tumeurs, elle peut être maligne dans environ
15 % des cas. Seule tumeur du testicule pouvant être traitée par orchidecto-
mie partielle dans sa forme bénigne, l’examen pathologique est souvent
difficile pour mettre en évidence des formes malignes.
ANALYSE
meilleurs résultats de survie ; elle a servi à la mise au point de traitements
combinés pluridisciplinaires. L’augmentation, très importante, de la survie
est la résultante de méthodes diagnostiques performantes, de la présence de
marqueurs tumoraux diagnostiques et pronostiques, de combinaisons de
chimiothérapie efficaces, et de l’amélioration des techniques chirurgicales.
Grâce à cette association, la mortalité a diminué de 66 % entre 1974 et
2004.
BIBLIOGRAPHIE
MOSTOFI FK, SESTERHENN IA, SOBIN LH. Histological typing of testis tumors. World
Health Organization, International Histological Typing of Tumors. Springer-Verlag,
Berlin, Heidelberg, 1998
563
37
ANALYSE
Incidence et évolution
Les tumeurs du testicule sont des tumeurs rares. Cependant, leur incidence
est en augmentation depuis plus de 50 ans dans la plupart des pays industria-
lisés. Ces tumeurs représentent 1 à 2 % des cancers chez l’homme : il s’agit
des tumeurs les plus fréquentes chez l’homme âgé de 20 à 35 ans. Les progrès
thérapeutiques majeurs réalisés au cours des 30 dernières années ont permis
de diminuer considérablement la mortalité.
L’incidence des cancers du testicule n’est pas la même dans les différentes
régions du monde, elle varie aussi en fonction de l’origine ethnique des
populations. L’Australie, l’Amérique du Nord et surtout l’Europe présentent
les taux les plus élevés (généralement supérieurs à 4/100 000, standardisés
sur la population mondiale) (Parkin et coll., 2002). En Asie, Amérique du
sud et Afrique les taux sont généralement inférieurs à 2/100 000. Lorsque
l’origine ethnique des populations est prise en compte, on observe les taux
les plus élevés dans les populations blanches. Aux États-Unis l’incidence est
3 à 4 fois plus faible chez les noirs et les asiatiques que chez les blancs et 2
fois plus faible chez les hispaniques (Ries et coll., 2007) (figure 37.1).
C’est en Europe du Nord et en Suisse que l’on observe les taux les plus
élevés : 9,9/100 000 au Danemark, 8,4/ 100 000 en Suède, 8,2/100 000 en
Norvège, 10,1/100 000 dans le canton de Zürich en Suisse. Mais, il existe
des variations importantes entre des régions géographiquement proches
(2,7/100 000 en Finlande).
La carte de l’Europe (figure 37.2 ; Huyghe et coll., 2007) permet de mettre
en avant la grande disparité dans les taux d’incidence du cancer du testicule
entre les pays européens. Apparaît un gradient Est/Ouest dans les régions
baltiques, et Nord/Sud dans les région de l’Europe de l’Ouest.
565
Cancer et environnement
Blancs
Noirs
Hispaniques
Taux pour 100 000
Âge au diagnostic
Figure 37.1 : Incidence par âge et origine ethnique aux États-Unis (17 registres
du programme SEER de 2000 à 2004)
Incidence en France
En France, en 2000, le taux d’incidence pour l’ensemble des cancers du testi-
cule était de 4,82 pour 100 000, correspondant à environ 1 500 nouveaux
cas diagnostiqués chaque année. L’incidence des séminomes est estimée à
2,46 pour 100 000 et celle des non séminomes à 1,95 pour 100 000 (Hedelin
et Remontet, 2002).
Le pic d’incidence se situe entre 25 et 35 ans. Il est très rare avant 15 ans
comme après 50 ans. L’âge de survenue présente cependant des variations en
fonction du type histologique. Les tumeurs germinales du testicule non sémi-
nomateuses sont pratiquement toujours des tumeurs de l’adulte jeune (âge
médian au diagnostic 30 ans), alors que les tumeurs germinales du testicule
séminomateuses peuvent également s’observer après la cinquantaine (âge
566 médian au diagnostic 38 ans).
Incidence et évolution
ANALYSE
1. Chiffre : taux d’incidence /100000
2. Couleur : augmentation moyenne
annuelle des taux d’incidence
> 0.20
> 0.10, < 0.20
Non étudié
16,00
mortalité incidence tous types incidence séminomes incidence non séminomes
14,00
12,00
Taux pour 100 000
10,00
8,00
6,00
4,00
2,00
0,00
89
04
09
14
19
24
29
34
39
44
49
54
59
79
84
64
69
74
80
85
55
00
05
10
15
20
25
30
35
40
45
50
60
70
75
65
Âge
Figure 37.3 : Incidence et mortalité en France estimées par âge pour l’année
2000 567
Cancer et environnement
ANALYSE
Toutes races
Blancs
Noirs
Taux pour 100 000
Année de diagnostic
Figure 37.4 : Évolution des taux d’incidence par origine ethnique aux États-Unis
(9 registres du SEER Program de 1975 à 2004, taux standardisé sur la popula-
tion des États-Unis 2000)
d’incidence pour les séminomes augmente plus vite durant les 3 premiers
intervalles de temps, il atteint un plateau, et aucune différence n’est
observée entre les types histologiques pour la population noire (McGlynn et
coll., 2003).
Concernant les tendances de l’incidence pour l’ensemble des tumeurs, bien
que les taux observés dans les différents registres soient hétérogènes, il existe
un même phénomène : un doublement de l’augmentation de tous ces taux,
que ce soit en France ou dans les pays européens, sur les 20 dernières
années. Dans le sud de la France, le taux d’incidence du cancer du testicule
est passé de 1,27 à 3,04 pour 100 000 entre 1980 et 1999 (voir figure 37.5 ;
Walschaerts et coll., 2008). En Italie, le taux d’incidence a augmenté de 2,3
à 3,9 pour 100 000 entre 1976 et 1995 dans la région de Varèse, et de 2,6 à
4,0 pour 100 000 dans la région de Turin entre 1985 et 1995 (Purdue et
coll., 2005). En Finlande, l’incidence est passée d’environ 2,1 à 4,2 pour
100 000 entre 1975 et 1995 (Bray et coll., 2006).
Ces observations suggèrent à la fois une grande hétérogénéité géographique
dans l’incidence mais une faible variation temporelle dans les tendances.
Tumeurs germinales
Année
L’incidence a diminué pour les cohortes nées entre les deux guerres mondiales
ANALYSE
avant d’augmenter en se superposant à celle des séminomes. Cette évolution
qui n’est pas expliquée, ne semble pas être un artefact d’enregistrement ou
de codage des tumeurs testiculaires (Hedelin et Remontet, 2002).
En étudiant la tendance de l’incidence par un modèle âge-période-cohorte,
l’effet cohorte de naissance révèle une diminution du taux d’incidence du
cancer du testicule pour les cohortes nées dans les années 1930 et au cours
de la seconde guerre mondiale (figure 37.6) (Walschaerts et coll., 2008). Ce
phénomène, également observable dans de nombreux pays européens
(Danemark, Suède, Finlande…) ne peut s’expliquer par une meilleure détec-
tion des cancers du testicule, ou un meilleur enregistrement car il n’existe
pas d’effet période.
Cet « effet de cohorte de naissance » souligne un effet générationnel,
c’est-à-dire un changement temporel dans les expositions. Etant donné que
le pic d’incidence du cancer du testicule survient entre les 20-35 ans, il est
alors raisonnable de supposer que ces changements se sont produits au cours
de deux fenêtres d’expositions clés : in utero et durant la puberté.
2.5
2
Contraste
1.5
0.5
1927
1932
1937
1942
1947
1952
1957
1962
1967
1972
1977
Cohorte de naissance
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38
ANALYSE
Mortalité et évolution
Tableau 38.I : Effectif et taux de décès par cancer du testicule selon l’âge
entre 1974 et 2004 en France métropolitaine (d’après CépiDc-Inserm)
Hommes
1974 210 0,9 172 0,8 38 1,4
1984 183 0,8 130 0,6 53 1,9
1994 110 0,4 79 0,3 31 1,0
2004 74 0,3 62 0,3 12 0,3
a Taux pour 100 000 standardisés par âge (population de référence : France 1990)
36. Les données de mortalité française ont été fournies par le Centre d’épidémiologie sur les causes
médicales de décès (CépiDc) de l’Inserm. 573
Cancer et environnement
Tableau 38.II : Évolution des effectifs et des taux de décès par cancer du
testicule selon l’âge entre 1974 et 2004 en France métropolitaine (d’après
CépiDc-Inserm)
Hommes
1974-1984 –12,9 –11,1 –24,4 –25,0 39,5 35,7
1984-1994 –39,9 –50,0 –39,2 –50,0 –41,5 –47,4
1994-2004 –32,7 –25,0 –21,5 0,0 –61,3 –70,0
1974-2004 –64,8 –66,7 –64,0 –62,5 –68,4 –78,6
a Taux pour 100 000 standardisés par âge (population de référence : France 1990)
300
250
200
150
100
50
1,2
ANALYSE
1
0,8
0,6
0,4
0,2
Figure 38.3 : Répartition géographique des taux de décès standardisés par cancer
des testicules, tous âges, entre 2002 et 2004 en France (d’après CépiDc-Inserm) 575
39
ANALYSE
Facteurs de risque débattus
ANALYSE
limites (taux de couverture de seulement 75 % de la population agricole,
évaluation des niveaux d’engrais utilisés faite par des mesures indirectes,
identification d’une majorité des cas de cancer du testicule parmi les mem-
bres les plus âgés de la cohorte alors que les données du recensement portent
sur les populations plus jeunes…), le nombre de cas identifiés, la qualité
méthodologique et des données font de cette étude une base solide de
réflexion sur l’interaction potentielle entre les expositions liées au condi-
tions de travail en milieu agricole et le cancer du testicule (Kristensen et
coll., 1996).
Toutefois, en 2000, la même équipe a analysé les cancers hormono-dépen-
dants (dont le cancer du testicule) chez les populations agricoles de Norvège
(définies à partir des données des recensements agricoles et faisant mention
du type d’exploitation et de la période d’utilisation) nées entre 1925 et
1971. Aucune association n’a été retrouvée entre la profession d’agriculteur
et le cancer du testicule (Kristensen et coll., 2000).
Aux États-Unis, une étude de grande ampleur, a permis de comparer le ratio
d’incidence standardisée (SIR) du cancer du testicule chez 33 658 applica-
teurs de pesticides travaillant en Floride, par rapport à celui observé dans la
population générale de Floride (période allant de 1975 à 1993 ; données de
cancers obtenues à partir du registre de cancers de Floride) (Fleming et coll.,
1999). Ce paramètre (SIR), ajusté sur l’âge, pour « tous types de cancers »
était significativement moindre dans la population des 33 658 applicateurs
de pesticides par rapport à la population générale de la Floride (SIR = 0,71 ;
IC 95 % [0,67-0,76]). Toutefois, on note une majoration significative dans
cette population d’applicateurs de pesticides pour le cancer du testicule
(SIR = 2,48 ; IC 95 % [1,57-3,72]) et aussi pour le cancer de la prostate
(SIR = 1,91 ; IC 95 % [1,72-2,13]), qu’il s’agisse d’applicateurs travaillant
dans le domaine privé ou public. Pour le cancer du testicule (mais non pour
le cancer de la prostate), on retrouve un effet dose avec une majoration du
taux d’incidence standardisé avec le nombre d’années d’exposition.
Par sa méthodologie, le nombre de personnes recrutées et l’utilisation des
registres de cancer et des recensements agricoles, cette étude constitue
(comme celle effectuée en Norvège) certainement une base solide mettant
en avant un rôle potentiel des pesticides sur la survenue du cancer du testi-
cule. Toutefois, cette étude souffre également de plusieurs limites. D’une
part, la caractérisation de la variable « exposition aux pesticides » est très
globale ayant été faite via l’obtention d’une licence d’achat de pesticides ne
permettant aucunement de s’assurer de l’utilisation effective des pesticides
par le détenteur de la licence. D’autre part, cette licence concernait plus de
125 produits et aucune mesure individuelle n’ayant été réalisée, il est diffi-
cile d’extrapoler systématiquement la liaison entre les variables « détenteur
d’une licence » et « exposition réelle aux pesticides ». Par ailleurs, certains 579
Cancer et environnement
facteurs de confusion importants (usage du tabac par exemple) n’ont pas été
collectés. Enfin, le nombre important d’individus perdus de vue concernant
les premières années de la cohorte, l’absence de mesure de prise en compte
de la possibilité d’expositions antérieures à la période considérée et la sélec-
tion probable opérée par le « healthy worker effect » limitent considérable-
ment la validité générale de cette étude faisant état d’une relation entre
« exposition aux pesticides » et incidence du cancer du testicule (Fleming et
coll., 1999).
ANALYSE
cien, fraiseur, fondeur…) n’objective aucune différence significative entre
les cas et les témoins selon le type de poste de travail occupé. Par ailleurs, on
note une fréquence de fumeurs significativement plus élevée parmi les cas,
mais le faible nombre d’individus inclus dans l’échantillon n’a pas permis
d’ajuster sur cette variable dans l’analyse. Les auteurs mettent en avant le
rôle potentiel de l’exposition au zinc et au cadmium dans la survenue du
cancer du testicule chez les ouvriers métallurgistes, sans toutefois apporter de
précisions sur les niveaux d’exposition précis à ces deux produits dans le
cadre de cette étude.
Une étude menée à partir du registre national de cancer de Suède, a analysé
les ratios d’incidences standardisées (ajustés sur l’âge) pour le séminome et le
non-séminomes selon le type de profession enregistrée lors du recensement
de 1970 (analyse de type log-linéaire de Poisson) (Pollan et coll., 2001). Les
taux globaux standardisés étaient de 2,57 cas pour 100 000 personnes-années
pour les séminomes et de 1,90 cas pour 100 000 personnes-années pour les
non-séminomes, avec des différences notables selon le type de profession.
Concernant les séminomes, on note un excès de risque pour les professions
suivantes : enseignants, journalistes et éditeurs, emplois administratifs, tra-
vailleurs dans les chemins de fers, typographes, ouvriers métallurgistes, coif-
feurs. Pour les non-séminomes, une majoration du risque a été observée pour
les managers, travailleurs de la construction, opérateurs de saisie. Il convient
de noter dans cette étude le très faible nombre de cas de cancer du testicule
collectés selon le type de profession (souvent inférieur à 5), la multiplicité
des professions à risque ainsi que l’absence de caractérisation précise du type
d’exposition rendant particulièrement difficile toute conclusion solide.
En 1991, une étude cas-témoins incluant 223 cas de cancer du testicule et
212 témoins indemnes de cette pathologie, s’est intéressée aux professions
exercées par les parents dans l’année ayant précédé la naissance (Kardaun et
coll., 1991). Les auteurs notent pour les tumeurs séminomateuses, un excès
de risque chez les mères ayant travaillé dans le secteur de la santé
(OR = 4,6 ; IC 95 % [1,1-19,1]) au cours de l’année ayant précédé la nais-
sance. Outre le fait que la caractérisation du type de travail précis effectué
par la mère soit absente, il convient de mentionner le faible nombre de
personnes concernées (5 cas et 6 témoins) par cette exposition.
jour, de la plus importante étude sur les relations entre expositions environ-
ANALYSE
nementales à des produits chimiques et le cancer du testicule. Toutefois, la
multiplicité probable de certaines expositions (insecticides versus herbicides
et fongicides en milieu agricole), la pluralité des produits considérés comme
des « hydrocarbonés », ou encore l’identification comme « à risque élevé »
de certaines catégories socioprofessionnelles à priori peu enclines à être
exposées à des produits délétères pour la fonction reproductrice masculines
(enseignants universitaires) n’autorisent pas de réelles conclusions sur
l’implication directe de certains produits, voire familles de produits, sur la
survenue du cancer du testicule.
Dans une étude complémentaire menée à partir de cette cohorte, les mêmes
auteurs ont analysé les conséquences de l’exposition aux vapeurs de diesel et
d’essence sans toutefois mettre en évidence de relation significative avec le
cancer du testicule (Guo et coll., 2004).
Concernant les PVC (Polyvinyl Chloride), une première étude de type cas-
témoins, menée en 1997, avait montré une multiplication par 6,6 (IC 95 %
[1,4-32]) du risque de cancer de testicule (essentiellement les séminomes)
chez les personnes exposées aux PVC (Hardell et coll., 1997). Toutefois,
pour le Circ (Centre international de recherche sur le cancer), le chlorhy-
drate de vinyle, qui est un monomère du PVC, n’est pas considéré comme un
facteur de risque de cancer du testicule. Deux études de cohortes menées chez
des hommes exposés au chlorhydrate de vinyle n’ont pas noté d’augmenta-
tion du risque de cancer du testicule (Hagmar et coll., 1990 ; Langard et coll.,
2000). Par ailleurs, dans une étude cas-témoins (n = 3 745 cas) menée au
Danemark, aucune association n’a été retrouvée entre les personnes exposées
au chlorhydrate de vinyle et le cancer du testicule (Hansen et coll., 1999).
En 2004, l’équipe de Hardell et coll. a mené une nouvelle étude cas-témoins
(981 cas de cancer du testicule collectés via le registre suédois du cancer,
comparés à 981 témoins randomisés à partir des données du registre de popu-
lation suédois et ajustés sur l’âge) avec une mesure de l’exposition via un
questionnaire et un entretien téléphonique (matrice emploi-exposition) ;
exposition validée dans un second temps par un technicien hygiéniste
(Hardell et coll., 2004a). Les auteurs rapportent un odds ratio de 1,35 (IC
95 % [1,06-1,71]) pour l’exposition aux plastiques de type PVC. Toutefois,
les auteurs trouvent une relation dose-effet inverse de celle attendue, avec
les plus hautes valeurs des odds ratios correspondant aux valeurs les plus
basses de l’exposition aux PVC. Finalement, les auteurs concluent à une
erreur probable d’interprétation dans leur première étude menée en 1997
(cluster de cas de cancers du testicule) et à une absence de relation entre
l’exposition aux PVC et le risque de survenue du cancer du testicule.
Concernant les PCB (poly chloro bi-phénols), Hardell et coll. ont montré
que la concentration de PCB, de pp’-dichloro diphenyl-dichloroethylène
(pp’-DDE), d’hexacholobenzène (HCB) et de chlordanes étaient plus élevés 583
Cancer et environnement
chez les patients présentant un cancer du testicule par rapport à une popula-
tion témoin (Hardell et coll., 2003). En 2004 puis 2006, les mêmes auteurs
ont analysé les prélèvements de sang des mères des cas et des témoins pour
ces mêmes produits (Hardell et coll., 2004b et 2006). Chez les mères des cas,
on retrouve une augmentation significativement plus importante des con-
centrations pour les produits suivants : PCB (OR = 3,8 ; IC 95 % [1,4-10]),
HCB (OR = 4,4 ; IC 95 % [1,7-12]), éthers diphényl poly bromés (OR = 2,5 ;
IC 95 % [1,02-6,0]) et non significatif pour les chlordanes et les pp’-DDE.
Une analyse plus détaillée des types de PCB selon leurs activités (œstrogé-
nique, dioxine like) montre des odds ratios significatifs pour ces différents
types de PCB. En conclusion, les auteurs mettent en avant le rôle potentiel
de l’exposition aux PCB, en particulier des expositions de la mère au cours
de la période in utero de l’enfant.
Dans une revue récente de la littérature sur le cadmium, classé comme pro-
duit cancérogène depuis 1993, il semble que l’exposition professionnelle au
cadmium puisse être considérée comme un facteur de risque du cancer de la
langue et du cancer du poumon, de manière moins évidente pour le cancer
de la prostate mais sans relation avec le cancer du testicule (Waalkes, 2000).
ANALYSE
les auteurs, l’hypothèse serait une l’exposition répétée aux éthers de glycol
très largement utilisés dans les combustibles des avions (Ryder et coll.,
1997).
À partir d’une cohorte incluant 22 197 officiers employés dans 83 départe-
ments de police de l’Ontario (avec l’utilisation du registre de cancer de
l’Ontario), il a été noté un ratio d’incidence standardisée de 0,90 (IC 95 %
[0,83-0,98]) pour toute tumeur confondue et de 1,3 (IC 95 % [0,9-1,8]) pour
le cancer du testicule (n = 23). Les auteurs évoquent la possibilité d’un rôle
des émissions radars mais aucune donnée spécifique sur ce type d’exposition
n’est fournie dans cette étude (Finkelstein, 1998).
Enfin, notons une étude qui a concerné les 8 750 hommes impliqués dans les
missions des Nations-Unies dans les Balkans entre 1989 et 1999, avec une
légère augmentation du nombre de cas observés de cancer du testicule
(n = 8) comparés au nombre attendus (4,6) avec un ratio standardisé d’inci-
dence de 2,2 ; IC 95 % [0,8-4,9] (Gustavsson et coll., 2004).
Interactions gènes-environnement
Les polymorphismes décrits pour être associés au cancer du testicule
concernent essentiellement des gènes codant pour des facteurs impliqués
dans le maintien de l’intégrité du génome. Il s’agit du gène PARP-1 codant
pour une poly(ADP-ribose) polymérase impliquée dans la réparation de
l’ADN, l’apoptose et la différenciation cellulaire. Deux SNPs au niveau de
ce gène ont été retrouvés dans des tumeurs germinales testiculaires (TGT)
(Shiokawa et coll., 2005). De même, une association entre polymorphisme
du gène XRCC1 (Arg399Gln), codant pour un facteur impliqué dans la
réparation des cassures simples brins de l’ADN, et les TGT a été rapportée
(Tsuchiya et coll., 2006). Les individus avec au moins un allèle Arg ont un
risque augmenté de TGT par rapport à ceux présentant le génotype Arg/Arg
(OR = 1,775 ; IC 95 % [1,045-3,016] ; p = 0,034). De plus, le risque associé
avec l’allèle Gln par rapport au génotype Arg/Arg est plus prononcé chez les
patients présentant un séminome pur (OR = 2,242 ; IC 95 % [1,149-4,374] ;
p = 0,018) ou des métastases (OR = 2,481 ; IC 95 % [1,267-4,862] ; p = 0,008).
La présence du résidu Gln399 est associée à une diminution des capacités de
XRCC1 à réparer l’ADN (Lei et coll., 2002).
Parmi les lésions de l’ADN dont la réparation implique XRCC1, figurent les
dommages dûs à l’arsenic. L’exposition à l’arsenic a été associée à un risque
accru de cancer de la prostate, mais pas du cancer du testicule. Toutefois, il
n’existe pas encore d’études associant le polymorphisme Gln399 au niveau
de XRCC1, l’exposition à l’arsenic et un risque plus important de cancer de
586 la prostate.
Facteurs de risque débattus
ANALYSE
récente augmentation de l’incidence du cancer du testicule dans les pays
industrialisés, l’analyse de la littérature sur les facteurs de risque environne-
mentaux et/ou professionnels du cancer du testicule ne permet pas de dégager
d’hypothèses fortes et cohérentes dans ce domaine. On retiendra toutefois
une relation potentielle entre « exposition aux pesticides » et cancer du
testicule, hypothèse qui demande cependant à être validée par d’autres
études incluant de bien meilleures caractérisations des types et modalités
d’expositions aux différents pesticides. Quant aux expositions professionnelles
liées au monde industriel (métallurgie, fonderie, chimie…) et susceptibles
de jouer un rôle dans la survenue du cancer du testicule, les résultats, soit
trop discordants, soit portant sur de très faibles effectifs, ne permettent
aucunement, à ce jour, de conclure à un effet majeur. À cet égard, une étude
cas-témoins hospitalière très récente (Walschaerts et coll., 2007), portant
sur la comparaison de 229 cas et de 800 témoins, a analysé les facteurs de
risque environnementaux, professionnels ainsi que les antécédents person-
nels et familiaux du cancer du testicule. Pris isolément (analyse univariée)
certaines expositions environnementales (activités régulières de jardinage
avec utilisation de pesticides) ou professionnelles (métallurgie, chimie) sont
positivement associées au cancer du testicule (avec des odds ratio entre 1,6 et
2,8) mais lorsque ces mêmes facteurs environnementaux, et/ou professionnels
sont analysés avec les antécédents personnels et familiaux (antécédent de
cryptorchidie, de cancer personnel et/ou dans la famille), aucun ne ressort
significatif, attestant par là même, de la très faible voire de l’absence d’impli-
cation des facteurs environnementaux et/ou professionnels (chez l’homme à
l’âge adulte) sur la survenue du cancer du testicule. Par ailleurs, il n’existe
pas actuellement de données démontrant un lien entre des polymorphismes
génétiques, l’exposition à un facteur environnemental et un risque augmenté
du cancer du testicule.
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ANALYSE
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Cancer et environnement
590
Principaux constats et propositions
ANALYSE
Bien que relativement rare (1 à 2 % des cancers chez l’homme), le cancer du
testicule est le cancer le plus fréquent chez les hommes de 15 à 35 ans. Il
s’agit de la tumeur solide présentant les meilleurs résultats de survie.
La plupart des cancers du testicule ont pour origine les cellules germinales.
Les tumeurs séminomateuses représentent 30 à 40 % des tumeurs germinales
du testicule. Les tumeurs non séminomateuses représentent 60 à 70 % des
tumeurs germinales du testicule. Il existe de nombreuses formes de tumeurs
non germinales. Les deux principales sont le lymphome testiculaire et la
tumeur à cellules de Leydig.
Incidence en augmentation
Recommandations
ANALYSE
La problématique du cancer du testicule, à l’instar des autres pathologies de
la sphère reproductrice masculine, a beaucoup évolué au cours des dernières
décennies, baisse notable de la mortalité mais, en parallèle, augmentation
importante de son incidence avec l’émergence d’hypothèses d’ordre envi-
ronnemental susceptibles d’expliquer la survenue croissante du nombre de
nouveaux cas de ce cancer.
Les nombreuses études réalisées en milieu professionnel n’ont pas permis, à
ce jour, d’identifier des facteurs de risque patents ; dans ce contexte, l’expo-
sition aux pesticides restant toutefois une voie de recherche privilégiée,
devant amener à promouvoir des recherches spécifiques, ciblées sur des
populations pouvant être considérées comme plus « à risque » (arboriculteurs,
serristes) avec une meilleure caractérisation des types et modalités d’exposi-
tions aux pesticides.
Cependant, l’analyse de la littérature montre que les divers facteurs d’exposi-
tions professionnelles, même s’ils peuvent jouer un rôle dans la survenue du
cancer du testicule, ne peuvent aucunement expliquer l’augmentation
récente et majeure de l’incidence. Si plusieurs hypothèses peuvent être
évoquées (modifications de l’alimentation, du mode de vie…), le seul élé-
ment tangible et bien documenté à notre disposition reste la relation forte
qui existe entre « cryptorchidie » et « cancer du testicule ».
De nombreuses études internationales montrent que cette pathologie mal-
formative est en nette et récente augmentation suivant en cela une courbe
d’incidence assez parallèle à celle du cancer du testicule. La cryptorchidie,
avec un taux d’incidence actuellement estimée entre 2 et 5 % des naissances,
pourrait contribuer à expliquer une partie des nouveaux cas de cancer du
testicule.
Cette hypothèse étiopathogénique amène à concevoir des études plus « en
amont » sur le suivi de l’incidence de la cryptorchidie et aussi sur l’identifi-
cation des facteurs de risque de survenue de cette pathologie malformative.
La cryptorchidie est un modèle intéressant dans la mesure où la survenue de
l’événement « présence d’une cryptorchidie à la naissance » est très vraisem-
blablement liée à une modification/perturbation dans la mise en place des
divers éléments constitutifs de l’appareil reproductif masculin.
De plus, dans un contexte d’inter-relations probables entre environnements
(personnel, domestique ou professionnel) et déroulement de la grossesse,
l’identification et la mesure des diverses expositions per-gravidiques (surve-
nues au cours des 9 mois de gestation) pourraient/devraient constituer un
champ de recherche pour la cryptorchidie et le cancer du testicule.
La constitution d’une cohorte de femmes enceintes représente l’option
méthodologique la plus appropriée (impliquant la constitution d’une 593
Cancer et environnement
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