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Transrural
N° 354
25 MAR
2 0 0 8
urgent de faire connaître et de mettre en débat traitements, rotations minimales, maintien des haies, etc.
Contacts: Réseau agriculture durable 02 99 77 39 25
ces résultats. Gradel 02 40 79 32 93
FNCIVAM 01 44 88 98 58
Dossier réalisé en partenariat avec la FNCIVAM
TRANSRURAL Initiatives • 25 MARS 2008 • II
Dossier
1. Sources : « Productivité et rémunération du travail dans les exploitations laitières du Nord de l’Europe » étude Institut Élevage-RICA, janvier 2007. Etude comparative systèmes laitiers
intensifs et à base d’herbe dans l’Ouest, Réseau agriculture durable, 2004. GRADEL résultats économiques 2005.
2. Unité de mesure de la quantité de travail humain fourni sur l’exploitation agricole. UTAF : UTA familiale.
TRANSRURAL Initiatives • 25 MARS 2008 • III
Dossier
plus solides face aux évolutions du marché
AU DANEMARK : « Travailler énormément, vivre pauvre
et très endetté pour espérer mourir riche »
Le modèle d’exploitation laitière danois fascine stratégie est ici celle d’un endettement de fuite
> Mais les éleveurs qui adoptent ces la filière productiviste française qui cherche à le en avant, dans la perspective d’une «rémunéra-
systèmes autonomes ont « l’inconvé- montrer à la fois comme une menace et comme tion différée» par la vente de l’exploitation en fin
un exemple à suivre. Ce modèle est aujourd’hui d’activité.
nient » pour le système capitaliste de
marqué par la fin de la coexistence de deux Dans le nouveau modèle, le taux d’endettement
moins solliciter les industries des types d’élevage, également « familiaux » : moyen est de quasi 100 % en phase d’installa-
intrants, de l’équipement, et le sys- – l’élevage traditionnel, en voie de disparition tion, de 85 % en régime de croisière et espéré
tème bancaire. avec 40 à 50 vaches laitières (VL) sur 30 à 40ha, vers les 60-70 % en fin de carrière. Une dyna-
– le nouveau modèle, de 100 à 200 VL, sur 80 à mique visiblement davantage subie qu’assumée
INCIDENCES DE L’ÉVOLUTION 200 ha, les animaux ne sortant jamais, nourris de manière positive et sereine.
DES PRIX AGRICOLES ET DE LA avec une ration comportant une part impor- Malgré un prix du lait nettement supérieur à la
RÉORIENTATION DES AIDES tante d’aliments achetés et recherche de la pro- moyenne européenne, le revenu courant était en
ductivité maximale du travail. 2003 très faible (< de 14 000 €/UTAF) et infé-
L’évolution des marchés des produits Les éleveurs sont très lourdement endettés pour rieur au montant des aides directes perçues: les
laitiers en 2008 ne permettrait pas de financer un actif très élevé : en moyenne, charges totales sont supérieures au produit agri-
prolonger l’augmentation du prix du 1122800€/UTAF comprenant le foncier, les bâti- cole! Cependant, ce résultat comptable est biaisé
lait payé au producteur observée ments et équipements, souvent surdimensionnés par le choix d’amortir les investissements sur des
depuis le 2 e semestre 2007. En (en vue de croissance ultérieure), les quotas et durées beaucoup plus courtes que celles des
revanche celles des céréales, des tour- frais d’établissements. Le recours à l’emprunt est emprunts. Les marges d’erreur sont ici très
teaux et du pétrole risquent de se permanent, pour non seulement financer tout faibles, avec une intensité et une quantité de tra-
poursuivre. Dans ce contexte, on se nouvel investissement, mais aussi pour vivre. La vail très élevées.
rend compte que l’augmentation du
prix du lait ne compensera pas les tème de production? Si on évalue ces ont un endettement en moyenne
secondes au Danemark, en Alle- facultés selon l’impact sur l’endette- beaucoup plus faible. D’où
magne ni au Nord de la France. Elle ment d’une dévaluation de l’actif pro- les propositions de l’industrie laitière
reste en revanche nettement profi- voquée par l’arrêt de la production lai- française pour une politique de
table aux systèmes herbe et en agri- tière pour faire autre chose sur contrats de longue durée afin de
culture durable, moins gourmands en l’exploitation, on se rend compte sécuriser ses approvisionnements.
aliments achetés et en coûts de cul- qu’une telle option ferait L’attrait pour les céréales
ture. L’augmentation du prix du lait passer le taux moyen Des systèmes et oléoprotéagineux
depuis fin 2007 n’aurait-elle pas aussi
pour objet de freiner les abandons de
d’endettement des éle-
vages laitiers au Dane-
durables (dont les fortes hausses
des prix abaissent le seuil
production chez des éleveurs attirés mark de 64 à 172% et aux transmissibles, de surface à partir
par la conjoncture céréalière ? Pays-Bas de 25,7 à plus de rémunérateurs, duquel un revenu satis-
Et si, dans le cadre du bilan de Santé 56%. (pour une dévalua- faisant peut être obtenu)
de la PAC, l’union européenne tion d’actif uniquement
respectueux va très certainement ren-
s’oriente vers des Droits à paiement appliquée aux bâtiments de l’environnement forcer la spécialisation
unique (DPU), aide forfaitaire et aux frais d’établisse- « grandes cultures » de
par exploitation, uniformes sur ments). Ainsi peut-on considérer que territoires entiers encore diversifiés
l’ensemble des surfaces fourragères la quasi-totalité des éleveurs laitiers (Poitou-Charentes, Sud-Ouest, Nord
atténuant la discrimination existant danois et une majorité des éleveurs et Est de la France), avec le risque
depuis 1992 envers les systèmes four- hollandais sont contraints de conti- d’une déprise industrielle dans le sec-
ragers à base d’herbe, à nouveau, le nuer à produire, avec l’espoir d’un teur laitier. La production laitière
système danois serait fortement péna- prix du lait élevé pour faire face à risque donc de se concentrer dans les
lisé et, bien évidemment, les systèmes l’augmentation prévisibles des charges régions maritimes déjà spécialisées
à base d’herbe plus ou moins favori- (aliments achetés, engrais, énergie, du grand Ouest de la France. Mais
sés. À titre indicatif, un montant uni- etc.). Dans un système très spécialisé, l’agrandissement des exploitations
taire de DPU de 230 €/ha de SAU l’endettement s’avère donc un moyen qui s’y observe déjà préserve la
modifierait le revenu par UTAF de - privilégié pour la filière laitière de faculté de choix de nombreux éle-
4492 € au Danemark, de + 1603 € sécuriser sur le long terme ses appro- veurs pour d’autres productions, au
aux Pays-Bas et de + 4600 € pour le visionnements. motif de se dégager de la contrainte Pour
aller plus loin :
système type GRADEL, … Ces facultés de choix (et de négocia- laitière, ou à l’occasion d’un évène- cette analyse est
Les paysans, nous dit-on, doivent tion ?) sont plus grandes et d’un ment particulier (séparation de disponible dans sa
« réagir aux signaux du marché »… impact possible plus important sur GAEC, départ à la retraite d’un asso- version intégrale
Or, on peut d’autant mieux négocier le potentiel de production dans les cié), ou par refus de réinvestir à sur le site ruralin-
fos, à l’adresse
avec un partenaire économique que autres pays européens, notamment quelques années de la retraite. www.ruralinfos.org
l’on n’y est pas contraint. Qu’en est-il en France : où les exploitations /spip.php?article2
des producteurs de lait selon leur sys- laitières sont plus diversifiées et Paul Bonhommeau 541.
TRANSRURAL Initiatives • 25 MARS 2008 • IV
Dossier
Les systèmes laitiers durables favorisent l’installation
Efficacité économique, qualités environnementales et meilleures conditions de travail placent les systèmes laitiers
durables parmi les plus attractifs.
Si l’on fait référence aux finalités exprimées Les données technico-économiques issues jeune agriculteur.
par la majorité des jeunes éleveurs laitiers des systèmes durables sont donc plus sécu- Des données plus qualitatives nous incitent
dans les stages préparatoires à l’installation risantes. En effet on observe, à niveau de aussi à promouvoir ces systèmes pour ins-
(temps libre, revenu comparable aux autres production constante et prix du lait taller des jeunes dans de bonnes condi-
professions, une bonne image du métier, constants, un lissage des charges opération- tions. Le travail en groupe, tout d’abord,
autonomie), les systèmes laitiers intensifs nelles et de structure sur les premières fréquent en système durable, est synonyme
ne sont pas les mieux placés pour atteindre années et un revenu qui progresse. d’échanges entre agriculteurs, mais aussi
ces objectifs de vie. Par ailleurs l’image environnementale des de dynamiques locales en matière d’emploi
En effet, la part d’actif (capital sous forme systèmes durables est plus valorisante pour local. Soulignons que ces systèmes assu-
d’équipements, bâtiments, un jeune qui s’installe. La rent 50% d’emplois en plus à l’hectare cul-
terres1, troupeau) ramené Le coût de reprise d’une prairie conduite de façon tivé. Par ailleurs, la baisse des pointes de
à l’unité de travail varie en ferme en système laitier extensive est à la base travail et du stress face aux échéances tech-
France de 100000€ en sys- de leur système de produc- niques financières et liées à l’organisation
tème durable à 240 000 € durable est de 70 000€ tion: elle génère moins de du travail permettent d’offrir des condi-
en moyenne en système en moyenne pollutions par les intrants tions de travail nettement plus acceptables
intensif. Le coût de reprise (nitrates, phosphates, pesti- que les modèles intensifs.
d’une ferme en système laitier durable est cides, etc.) parce que les apports et le lessi- Tous ces éléments ont permis au GRADEL
ainsi de 70000€ en moyenne. Alors qu’en vage sont moindres, elle préserve la qualité d’installer, sur 12 reprises, quatre per-
système durable 160 000 L de lait sont des sols et généralement la biodiversité sonnes en dehors du cadre familial.
nécessaires pour obtenir 23 000 € de locale. Au regard d’une société rurale qui
revenu, ailleurs il faut 300 000 L pour le s’urbanise et où les conflits d’usage entre Alain Daneau (FNCIVAM)
même résultat, donc plus de vaches lai- éleveurs et « rurbains » sont monnaie cou- 1. 25 ha en moyenne par actif en système durable contre
tières, de bâtiments, de matériel, de terre. rante, voilà des atouts certains pour un 50 en système classique.
Ce dossier est issu de Transrural initiatives, revue d’actualité rurale et agricole publiée par l’ADIR
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