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Un peu d’histoire
concernant la défense contre
les inondations de GRENOBLE
et de ses environs

Conférence AMOPA
du mercredi 6 mai 2009
à l’amphithéâtre du lycée Beaumarchais

par Gérard THOMAS,


vice président de l’ASDI

1
Très tôt, les grenoblois durent réparer les préjudices causés par
les caprices des cours d’eau dont ils étaient les riverains : la
rivière « Isère » (le Serpent), associée au torrent « Drac » (le
Dragon).
(illustration) - La fontaine au lion et serpent, place de la Cymaise, symbolisant le combat entre l’Isère et le Drac,
imaginée et réalisée en 1843 par le sculpteur Victor Sappey et le fondeur Crozatier

Plus tôt encore, il a fallu compter avec l’impétuosité des grands


torrents affluents du Drac, à commencer par la Romanche et,
avec un effet moins perceptible, bien que réel, par la Gresse.

Et c’est tout naturellement que l’histoire de la défense contre


les inondations de l’agglomération grenobloise doit commencer
par le résumé de ce qui s’est passé le long des cours inférieurs
de la Romanche et du Drac.
De plus, si l’on se réfère à l’aspect législatif, c’est bien dans ce
périmètre que furent créées les deux premières associations
syndicales de propriétaires riverains intéressés à la défense
contre les inondations de la vallée du sud grenoblois,
respectivement du Saut du Moine au pont de Claix et du pont
de Claix à l’Isère (1).
(1) G. Caillat - président de l’ASDI de 1981 à 1990 - Exposé fait à l’occasion de l’assemblée générale des 3 et 17 avril
1982.

En effet, après la Révolution, les lois des 4 Pluviôse an VI


(1798), Floréal an XI (1803) et 16 septembre 1807 ont permis la
création, en 1819, de deux syndicats pour la défense contre le
Drac, respectivement du Saut du Moine au pont de Claix et du
pont de Claix à l’Isère.
(illustration) - Le calendrier révolutionnaire, depuis le 22 septembre 1792 et pendant 14 ans, jusqu’en 1806.

Cette solution s’étant avérée insuffisante, il fut procédé plus


tard à la fusion de ces deux syndicats, par le décret du 18
octobre 1862, signé par Napoléon III lui-même, suite à une forte
crue enregistrée en 1859.

Nous reviendrons, en temps voulu, à ce décret impérial qui fut


l’acte le plus important de la création de la future ASDI.

2
Durant toute la préhistoire et même au-delà, pour se déplacer
vers le sud, depuis CULARO, (nom du bourg romain mentionné
depuis 43 avant JC jusque vers la fin du 3ème siècle), ou depuis
GRATIANOPOLIS, (nom de la cité gallo-romaine depuis 379,
en l’honneur de l’Empereur Gratien, jusque vers la Révolution),
le Drac, ou peut-être la Romanche d’abord, puis le Drac
ensuite, se franchissaient par un gué probablement situé au
« Saut du Moine » (2), près du confluent de ces deux torrents.
(2) La préhistoire dans le canton de Vif : pour ne pas oublier n°8, bulletin des amis de la vallée de la Gresse

(illustration) - carte « Saut du Moine », IGN 3335 OT 1/25000ème

Jusqu’au 12e siècle, le Drac semble ne pas avoir d’histoire (du


moins pas d’histoire connue). Il coulait librement, sans inquiéter
personne, sans débordement spectaculaire (3). La partie sud
de la cuvette grenobloise n’était pas encore urbanisée.
(3) A. Bouchayer - 1925 - le Drac, histoire d’un torrent - cité par J.C. Michel dans « le pont de CLAIX, merveille du
Dauphiné » - « pour ne pas oublier » n°11, juin 1983, bulletin des Amis de la vallée de la Gresse et des environs, et cité
également par D. Cœur dans « La plaine de Grenoble face aux inondations », éditions Quae, juin 2008.

On peut noter qu’au Moyen Age, un pont existait sur le Drac, le


pont de CLAIX, à peu près à l’emplacement des 2 ponts actuels
et jusqu’en 1219 (4).
(4) J.J.A. Pilot de Thorey - le Dauphiné n°16 et 55 (1864) - cité par J.C. Michel dans « le pont de CLAIX, merveille du
Dauphiné » - « pour ne pas oublier » n°11, juin 1983, bulletin des Amis de la vallée de la Gresse et des environs, et cité
également par J. Barret dans sa conférence « Risques majeurs » du 22 janvier 1991, sur le thème « prévenir et gérer ».

Cette année là, et d’après des documents parfois controversés,


ce pont fut détruit, dans la nuit du 14 au 15 septembre, par une
crue dramatique du Drac et de la Romanche, le gonflement des
eaux de la Romanche ayant de plus entraîné la rupture d’un
barrage naturel issu d’un éboulement considérable de la Petite
Vaudaine, en face de l’Infernet, entre ROCHETAILLEE et
LIVET, éboulement intervenu en 1191 et formant, depuis cette
date, un lac artificiel remontant jusque dans la plaine de
BOURG D’OISANS : la moitié des habitants de GRENOBLE
auraient alors péri (5), l’eau montant à 9 mètres au-dessus de
son niveau habituel.
(5) A. Prudhomme - Histoire de GRENOBLE - cité par J.C. Michel dans « le pont de CLAIX, merveille du Dauphiné » -
« pour ne pas oublier » n°11, juin 1983, bulletin des Amis de la vallée de la Gresse et des environs.

(illustration) - carte localisant la « petite Vaudaine », MICHELIN 333 local 1/150000ème

3
Apparemment, un nouveau pont a été réédifié peu après. Une
transaction du 7 avril 1277 (6) en mentionne l’existence à
l’embouchure du ruisseau de la Suze, ainsi qu’un document
statistique du 31 mai 1921 (7). De nos jours, il n’y a plus trace
de ce ruisseau qui semblait rejoindre le Drac entre le Grand
Rochefort et le Mollard.
(6) Archives départementales de l’Isère B 4281 : transaction entre GONTIER de CLAIX, prieur de RISSET et GIRARD
Bertrand, le 7 avril 1277, au sujet d’une terre près du pont de CLAIX - cité par J.C. Michel dans « le pont de CLAIX,
merveille du Dauphiné » - « pour ne pas oublier » n°11, juin 1983, bulletin des Amis de la vallée de la Gresse et des
environs.

(illustration) - carte « Embouchure de la Suze », IGN 3335 OT 1/25000ème

(7) Louis ROYER : société statistique de l’Isère, séance du 31 mai 1921 : quelques documents relatifs à un ancien pont de
CLAIX - cité par J.C. Michel dans « le pont de CLAIX, merveille du Dauphiné » - « pour ne pas oublier » n°11, juin 1983,
bulletin des Amis de la vallée de la Gresse et des environs.

qui pourraient prouver qu’en 1277, le Drac passait entre le rocher de Mollard
et le rocher du pont de CLAIX, et n’utilisait pas le passage entre le Grand
Rochefort et le Mollard.

L’existence de ce pont dut être brève, car une autre transaction


du 14 juin 1307 fait allusion au pont « détruit naguère » (8).
(8) Archives départementales de l’Isère : cession du bac et du port de CLAIX - cité par J.C. Michel dans « le pont de CLAIX,
merveille du Dauphiné » - « pour ne pas oublier » n°11, juin 1983, bulletin des Amis de la vallée de la Gresse et des
environs.

mais où étaient précisément ce pont et ce port ?

Au cours du 14ème siècle, de nombreux documents attestent que


si la branche mère du Drac allait buter contre le rocher de
COMBOIRE, là où il est repoussé de nos jours, une petite
branche, le Draquet, divaguait à peu de chose près à
l’emplacement de l’actuel cours Saint ANDRE (9) avec de
nombreuses incursions vers le vieux village d’ECHIROLLES en
période de crue. Ce bras se jetait dans l’Isère entre le jardin de
l’Ile Verte (10) et l’actuel pont Marius Gontard (11).
(9) A. Bouchayer - 1925 - « le Drac, histoire d’un torrent », Grenoble, revue de géographie alpine.

(illustration) - copie du plan de A. Bouchayer, page 9 du bulletin n°11, pour ne pas oublier, les amis de la vallée de
la Gresse et des environs
 Le pont et le port étaient-ils bien au point indiqué ?
 Le Drac ne passait-il pas aussi entre le Grand Rochefort et le Mollard ?
(10)J. Barret - président de l’ASDI de 1990 à 2005 - Conférences « Risques Majeurs » du 22 janvier 1991 : protection de
l’agglomération grenobloise contre les crues du Drac et de l’Isère.

(11)G. Caillat - Exposé fait à l’occasion de l’assemblée générale des 3 et 17 avril 1982.

4
C’est à partir de 1378, que les consuls de GRENOBLE
entreprirent la construction de la digue MARCELLINE (12), au
pied des coteaux de CHAMPAGNIER, entre le lieu-dit « le pont
des vannes » et le pont de CLAIX, au pied de la ferme ou
domaine MARCELLUS (13), afin de contraindre le torrent à
abandonner son « petit bras », le Draquet, et à passer
uniquement entre le rocher de GRAND ROCHEFORT et le
rocher de MOLLARD (14) et entre le rocher de MOLLARD et le
rocher du jardin de ville de PONT DE CLAIX, actuellement
coiffé d’un château d’eau désaffecté et à l’époque occupé par la
vigne de Monsieur de la Bâtie.
Mais le Drac a-t-il réellement passé entre le Grand Rochefort et
le Mollard en dehors des grandes crues ?

Ces travaux se sont ensuite poursuivis pendant plusieurs


siècles pendant lesquels la passe située entre les rochers
supportant les ponts actuels, sera approfondie.
(12) J. Barret - la digue Marcelline, un ultime rempart contre les crues du Drac, fiche jointe au rôle de 1997.
Les travaux se sont poursuivis pendant plusieurs siècles et ont conduit à une protection pour une crue de fréquence
de 500 à 1000 ans.

(illustration Marcelline 1) - IGN 3335 OT 1/25000ème surchargée.

(illustration Marcelline 2) - coupe de la digue Marcelline, fiche ASDI 1997.

(13)Le nom MARCELLINE semble provenir d’un nom gallo-romain, MARCELLUS, du domaine de MARCELLUS.
J.C. MICHEL : le pont de CLAIX, merveille du DAUPHINE ; pour ne pas oublier, bulletin des amis de la vallée de la
GRESSE, n°11, juin 1983.

(14) Bezegher et Royer : CLAIX et PONT de CLAIX à travers les siècles.

Les premiers travaux d’endiguement, réalisés par un


entrepreneur nommé VIVIAN PELLORCE ne furent pas
suffisants puisque les nouvelles crues entraînent d’importants
débordements dès 1380 puis au cours des 15ème et 16ème
siècles pendant lesquels on trouve une longue suite de
débordements et de travaux de confortement des ouvrages
défensifs (15).
(15) G. Caillat : exposé fait à l’occasion de l’assemblée générale des 3 et 17 avril 1982.

(illustration) – Confluent Drac-Isère : tracé de Maître Le Ligeois, 1494-1676.

5
Au 17ème siècle, on peut noter la construction, entre juin 1608 et
octobre 1610, du vieux pont de CLAIX, dit de LESDIGUIERES,
parce qu’un droit de passage fut instauré sur ce pont pour
dédommager Monsieur de LESDIGUIERES, seigneur de
CLAIX, de la perte du droit qu’il percevait pour l’exploitation du
bac effectuant la traversée du torrent à cet endroit (16), et du
port de CLAIX.

En effet, la vérité historique impose de signaler que l’impulsion


initiale fut donnée par des possesseurs de fonds sur les rives
du Drac et des commerçants du TRIEVES, et que ces
personnalités ont supporté une grosse partie du coût de la
construction du pont, près de 60%, suite à un accord intervenu
dès l’année 1604 avec le « Trésorier Général en Dauphiné »,
François Grattet (16).

Mais une requête dut être présentée au Roi Henry IV, requête
qui permit d’autoriser la levée des fonds par un arrêt du Conseil
d’Etat du 10 novembre 1607, sous réserve d’indemniser le
propriétaire du bac, LESDIGUIERES.
(16) J.C. MICHEL : « le pont de CLAIX, merveille du DAUPHINE » - « pour ne pas oublier » - bulletin des amis de la vallée de
la GRESSE, n°11, juin 1983.

(illustration pont 1) - le pont de CLAIX, vu de ¾ aval, Diodore Rahoult, (1819-1874), 13 octobre 1845,
(bibliothèque municipale de GRENOBLE).

(illustration pont 2) - le pont de Claix, vu de l’amont, Victor Désiré Cassien, lithographié par C. Pégeron, vers 1830,
extraite de l’album du Dauphiné, tome 2 de A. Debelle (ville de Pont de Claix)

(illustration pont 3) - le pont de Claix, montée en direction du sud, Jean Achard (1714-1792) vers 1833-1835,
huile sur toile, 31x39,8 cm (ville de Pont de Claix)

Finalement, les communes intéressées à l’amélioration des


communications locales contribuèrent également aux
dépenses. Au départ les communes invitées à participer allaient
de MENS, CLELLES à SEYSSINS et PARISET, puis devant le
large dépassement du coût estimé, le Gapençais et le Diois
durent se joindre à la liste. L’ensemble de ces communes
participèrent pour une somme de 12600 livres, 41%, sur un
coût total réel du chantier de 30600 livres.

6
La construction du pont fut attribuée à Louis BRUISSET qui,
malheureusement, tomba et se noya dans le Drac dès les
premiers travaux. Sa veuve et ses héritiers ne purent continuer
le chantier qui fut poursuivi par Jehan ALBERT, premier maçon,
et Pierre SALOMON, maître charpentier, de LA MURE, et qui
avaient déjà à leur actif le pont de COGNET, construit en 1605
sur le Drac.

A ce point de l’exposé, et bien que m’écartant ainsi fortement


du sujet principal, je voudrais dire quelques mots de ce « bac »,
dont on a parlé à plusieurs reprises, et du « port de CLAIX ».

Le port de CLAIX était connu par un certain nombre de pièces


d’archives assez peu précises et étalées sur une période de
près de quatre siècles, de 1270 à 1647.
Or, récemment, en 2006, Monsieur Pierre COING-BOYAT, en
recherche pour « les Amis du Pays Vizillois », a exhumé d’un
dossier des Archives Départementales de l’Isère, un plan
figuratif du port de CLAIX daté de 1754.
Monsieur Robert AILLAUD, président « des Amis du Pays
Vizillois », a transmis ce document à Monsieur Jean-Claude
MICHEL, vice-président « des Amis de la Vallée de la Gresse »,
cité de nombreuses fois dans mon exposé, et rédacteur de
plusieurs articles sur l’histoire du bourg de CLAIX.
C’est de l’un de ces articles (17) que j’ai extrait ce précieux
plan : sur une vue partielle, on comprend bien comment
fonctionnait le bac, fixé à un câble de retenue, lui-même
accroché à un chariot coulissant sur un autre câble tendu d’une
berge à l’autre.
(17) J.C. MICHEL : du nouveau sur le port de CLAIX ; pour ne pas oublier, bulletin des amis de la vallée de la Gresse, n°58,
décembre 2006.

(illustration bac 1) - zoom sur le plan du port de CLAIX, rocher, maison et vigne de Monsieur de la Bâtie

On peut également conclure que, en 1754, le bac et le port de


Claix existaient encore, malgré la présence du pont de CLAIX.

7
Sur la vue élargie, on constate que, en 1754, le Drac ne coulait
plus que par la passe approfondie entre le rocher de Mollard et
le rocher du pont de CLAIX, coiffé par la vigne de Monsieur de
la Bâtie.
(illustration bac 2) - plan figuratif du port de Claix et des environs :
digue Marcelline, passe approfondie en service,
passe Grand-Rochefort / Mollard fermée, le pont rouge sur la Suze.

Pour ne pas continuer à m’écarter du sujet, je m’interdis de


vous parler de Mandrin, histoire vraie et légende associée à ce
pont de CLAIX, ni de bien d’autres faits qui entourent l’histoire
de ce monument classé et usuellement compté parmi les
merveilles du Dauphiné.
Remarque : Depuis le début de l’exposé, je prête beaucoup d’attention à parler du
pont de CLAIX, pont avec un petit « p ».
La commune de PONT DE CLAIX, avec un grand « P », n’est devenue une
commune qu’au 19ème siècle, en 1873 exactement.
Auparavant, il s’agissait d’un hameau de CLAIX, mais cela est une autre histoire.

Il faut reprendre le fil de notre exposé car, en ce temps là, au


17ème siècle, les débordements se multiplient : 1608, dès le
début de la construction du pont, 1612, 1616, 1619, 1650,
année où tous les travaux d’endiguement sont à reprendre,
puis 1652, 1656, 1666, 1673, 1674, 1692.

Une réalisation importante est à signaler sur le Drac au cours


de ce 17ème siècle : la construction du canal Jourdan entre 1675
et 1686, une ligne droite depuis la sortie du torrent après le
rocher de Comboire et jusqu’à sa confluence avec l’Isère.
Ni les dossiers techniques, ni les pièces comptables de cet
important ouvrage n’ont étés retrouvés.
Nous devons quelques illustrations à des mémoires et plans
dressés postérieurement par les services des Pont et
Chaussées et reproduits dans un ouvrage récent de Denis
Cœur, (18) issu d’une thèse présentée en mars 2003.
(18)Denis Cœur : « La plaine de Grenoble face aux inondations, genèse d’une politique publique du 17ème au 20ème siècle »,
éditions QUAE, juin 2008.

(illustration 1) - le cours St André, le Rondeau, le canal Jourdan.

(illustration 2) - schéma du site de Grenoble avec le canal Jourdan.

8
On sait qu’une ordonnance sur requête du 29 janvier 1649 avait
instauré la fourniture d’ouvriers destinés aux ouvrages du Drac
(1 par foyer fiscal) pour 3 fois 30 jours, contre une faible
compensation en argent.
Mais, déjà lourdement imposés pour les affaires militaires et
après une série de mauvaises récoltes, les habitants
considèrent cet impôt supplémentaire comme un abus de
pouvoir.
Cette ordonnance fut cassée en mai 1650 (18).

Après 1660, le financement des travaux du Drac fait l’objet


d’une autorisation à l’initiative d’un intendant, François Bochart.
Mais ces fonds ont-ils pour autant bénéficié aux ouvrages du
Drac ?
Rien n’est moins sûr, car à cette époque, il y avait de
nombreuses réaffectations (18).

Et alors, pourquoi pas de dossiers techniques et pas de pièces


comptables pour le canal Jourdan ?

Et au 18ème siècle, les inondations continuent : 1711, 1733,


année d’une inondation conjuguée du Drac et de l’Isère, dans la
nuit du 14 au 15 septembre, ayant inspiré au poète BLANC-
LAGOUTTE le texte célèbre « GRENOBLO MALHEROU » (19)
(20).
« Grenoblo t’es perdu ! lo monstro t’engloutit
Mal avisa fut ceu qui si bas te plantit »
(19)Le billet de Paul Dreyfus, « les affiches de Grenoble et du Dauphiné », 9 octobre 1998 : « ces digues dont on parle si
peu » : l’épicier François Blanc, dit Blanc-Lagoutte écrivit en 1733 un poème : « Grenoblo malhérou ». Ce poème fut
illustré plus tard, en 1860, par Diodore Rahoult, à l’occasion d’une réédition.

(illustration 1) - première page de l’assemblée générale de G. Caillat les 3 et 17 avril 1982.

(20)Paul Dreyfus : Grenoble, de l’âge du fer à l’ère atomique, Fayard, 1961


« Le niveau des rivières monta à 5,57 m au-dessus de l’étiage ».

(illustration 2) - dernière page de l’assemblée générale de G. Caillat les 3 et 17 avril 1982.

Puis 1737, 1739, 1740, 1777, année du déluge de la St


CREPIN, 1787, 1788.

9
C’est après la révolution de 1789, par les lois des 12 et 20 août
1790, (lois sur le libre cours des eaux),
(calendrier révolutionnaire intercallé depuis le 22 septembre 1792 et jusqu’en 1806, soit pendant 14 ans)

puis du 16 septembre 1807, (loi sur la protection des


propriétés),

qu’ont été définis les principes à la base de la décision et du


financement des travaux de protection contre les inondations.

L’un de ces principes est : lorsqu’il s’agira de construire des


digues sur les fleuves, rivières, torrents navigables ou non, la
nécessité en sera constatée par le gouvernement et les
dépenses supportées par les propriétaires dans la proportion de
leur intérêt aux travaux (article 33 de la loi du 16 septembre
1807).

Cette loi est toujours en vigueur.

Nous avions signalé, dès le début de cet exposé, que les lois
des 4 Pluviôse an VI (1798), Floréal an XI (1803) et 16
septembre 1807 avaient permis la création, en 1819, de deux
syndicats pour la défense contre les crues du Drac,
respectivement du Saut du Moine au pont de Claix
et du pont de Claix à l’Isère.

Et bien, au 19ème siècle, peu avant la création de ces syndicats,


on enregistre de nouveaux débordements, par exemple celui de
1816, qui fut suivi de travaux importants après lesquels les
dommages furent de moindre effet.
Il y eut ensuite une très forte crue sur le Drac en 1856, puis une
nouvelle inondation conjuguée du Drac et de l’Isère, le 2
novembre 1859 (21), (22), (23), et ceci malgré les efforts des
deux syndicats créés en 1819 et encore bien démunis devant
tant de puissance destructrice.
(21)- 2 novembre 1859 : notice de J.J.A. PILOT de THOREY, Grenoble inondé, Maisonville & Jourdan, 1860..
(22) - G.CAILLAT : assemblée générale de l’ASDI les 3 et 17 avril 1982.
(23) - J. BARRET : conférence « risques majeurs » du 22 janvier 1991, sur le thème « prévenir et gérer ».

10
Les niveaux atteints lors de la crue de 1859 restent aujourd’hui
les références pour la crue bicentenale à GRENOBLE (24).
A la suite de pluies d’automne continues du 26 au 31 octobre,
avec vent du sud ajoutant une fonte rapide des neiges, la crue
maximale et simultanée sur le Drac et sur l’Isère eut donc lieu
les 1er et 2 novembre 1859.
Il a été enregistré 1,85 m d’eau place St François à
GRENOBLE et un immense lac sur plus de 80 km en amont et
en aval de la ville.
Il n’y eut, heureusement que 3 victimes, une à l’Ile Verte et 2 à
St ISMIER.
(24) - la lettre du SYMBHI n°1, mars 2005.

(illustration) - la place Ste Claire, lors de l’inondation du 2 novembre 1859, dessin de Diodore Rahoult, 1860, repris sur le
livre de Denis Cœur : « la plaine de Grenoble face aux inondations », éditions QUAE, juin 2008.

De nos jours, les barrages hydroélectriques étant pleins à cette


période de l’année, un risque persiste, malgré les ouvrages de
défense sophistiqués dont nous disposons.
Nous pourrons parler de ces points techniques en dehors de
cet exposé orienté vers les aspects historiques de la naissance
de l’ASDI.

Après 1807, l’état n’avait cessé de favoriser, voire de forcer la


création d’associations syndicales destinées à réaliser des
travaux de protection contre les inondations et intégrant tous les
propriétaires situés dans les périmètres inondables (25), afin de
parvenir à une masse suffisante pour faire face à l’ampleur des
problèmes posés.
(25) - J. BARRET : fiche jointe au rôle de 1991.

En effet, on vient de voir que la loi du 16 septembre 1807 étant


toujours en vigueur, en droit français, la protection contre les
inondations d’un bien immobilier quelconque est de la
responsabilité de son propriétaire.
Ce devoir de conservation a des limites faciles à concevoir :
faire une digue au droit de sa propriété bordant un cours d’eau
n’est pas sans conséquence sur celle des voisins à l’amont ou
à l’aval.

11
D’où la nécessité de coordonner les actions, et c’est l’Etat qui
se doit de jouer son rôle de fédérateur, en favorisant ou en
créant d’autorité s’il le faut, des associations de propriétaires
intéressés à la protection contre les inondations d’un cours
d’eau dangereux, par secteurs homogènes (26).
(26) - J. BARRET : fiche jointe au rôle de 1999.

J’ai trouvé une confirmation de la constitution d’un « Syndicat


régulier des intéressés à l’endiguement de la rive droite du
Drac » le 4 août 1819 (27), dans le procès verbal d’une
transaction intervenue le 24 juillet 1861,
entre Monsieur le Préfet de l’ISERE, représentant l’état,
et le Syndicat de la rive droite du Drac, représenté par Monsieur
GUEYMARD, directeur, et Monsieur GAILLARD, maire de la
ville de GRENOBLE et président de la commission syndicale.
(27)- J. BARRET : fiche jointe au rôle de 1998, copie de l’ordonnance du Roi, Louis XVIII, à St Cloud, le 4 août 1819.
L’ordonnance commence par : « Louis, par la grâce de Dieu, Roi de France et de Navarre … »

(illustration) – copie de l’ordonnance.

La transaction en question portait sur la cession à l’état, de


terrains gagnés par le Syndicat sur le lit initial du Drac, entre
Drac et Isère, ces terrains étant ni plus ni moins que ceux ayant
ensuite abrité le polygone d’artillerie, et puis, maintenant, les
plates-formes de recherche que l’on connaît.

Le « Syndicat régulier des intéressés à l’endiguement de la rive


droite du Drac du pont de CLAIX à l’Isère » a été réorganisé par
décret impérial du 18 octobre 1862 (28) : en plus des articles
portant sur la formation du syndicat, sur le mode de mise en
oeuvre et de paiement des travaux, le mode de rédaction des
rôles et la perception des taxes, la réorganisation contient
également la décision de fusion avec le Syndicat du Saut du
Moine au pont de CLAIX, qui avait été créé lui aussi en 1819.
(28)- Charles Louis Napoléon BONAPARTE, NAPOLEON III, commence ce décret par :

« NAPOLEON par la grâce de Dieu et la volonté nationale, Empereur des


Français, à tous présents et à venir salut » .....

12
L’ASSOCIATION SYNDICALE DRAC ISERE (ASDI) a ensuite
été constituée par fusion avec d’autres syndicats (29) puis
adaptée par l’application des arrêtés préfectoraux des 26
octobre 1933, 09 février 1953, 1er juillet 1974 et 25 février 1983.
(29) - Syndicat des marais de St MARTIN d’HERES, POISAT, EYBENS ;
syndicat de la Grande MOGNE ; syndicat du ruisseau d’EYBENS ;
syndicat du VERDERET ; syndicat de l’ABBAYE ;
syndicat de GIERES à GRENOBLE.

En particulier, l’année 1974 a marqué un tournant important


dans la protection de l’agglomération grenobloise contre les
crues de l’Isère puisque l’ASDI, créée d’office par l’Etat, a pris
la relève de la ville de GRENOBLE, sur la rive gauche de
l’Isère, en vertu de l’arrêté préfectoral du 1er juillet 1974 (30).

Le périmètre de compétence de l’ASDI s’est ainsi vu étendu


pour des raisons de continuité et de globalité du système de
défense (31).

Il faudra attendre jusqu’en 1983, le 25 février 1983, pour que


l’ASDI reçoive également la mission de s’intéresser à la rive
droite de l’Isère entre la TRONCHE et PIQUE PIERRE (32).
(30) - André Chabert : cinq siècles de lutte contre les inondations, almanach du Vieux Dauphinois, 1990.
(31)- J. BARRET : fiches jointes au rôle de 1998, 1999.
(32) - J. BARRET : fiche jointe au rôle de l’année 2000.

Et enfin, lors de l’assemblée générale du samedi 17 novembre


2007, un vote a validé les statuts actuels de l’ASSOCIATION
SYNDICALE DRAC ISERE.

Ces nouveaux statuts mettent l’ASDI en conformité : avec


l’ordonnance n°2004-632 du 1er juillet 2004, relative aux
Associations Syndicales de Propriétaires (ASP) (33) et avec
son décret d’application n°2006-504 du 03 mai 2006 (34).
(33) - J.O. du 2 juillet 2004
(34) - J.O. du 5 mai 2006

Et l’on arrive ainsi à une association syndicale forte bien sûr,


mais évidemment lourde à piloter par les bénévoles que nous
sommes.

13
Le champ des compétences de l’ASDI, très ancienne
association syndicale de propriétaires créée d’office, ainsi que
les dispositions énoncées dans le décret du 18 octobre 1862,
puis complétées par les arrêtés préfectoraux des 26 octobre
1933, 9 février 1953, 1er juillet 1974 et 25 février 1983 restent en
vigueur.

Ce sont essentiellement certaines modalités concernant les


assemblées de propriétaires qui ont été alourdies.

Périodicité des réunions :

Tous les 2 ans au lieu de tous les 6 ans, donc les frais
associés sont multipliés par 3 (toutefois, les membres du
syndicat restent élus pour 6 ans et sont rééligibles :
rappelons qu’ils sont bénévoles).

Représentation des membres et redevance syndicale :

Contrairement à ce qui se passe pour la taxe foncière, en


cas de donation d’un bien avec usufruit, la nouvelle loi
prévoit que ce n’est pas l’usufruitier qui reçoit l’avis de
paiement, mais le nu propriétaire, ce qui n’est
généralement pas bien perçu dans les familles.

Ce point peut être réglé par convention (35) à passer


entre nu propriétaire et usufruitier, en vertu du texte
de l’article 3 des dispositions communes de
l’ordonnance n°2004-632 du 1er juillet 2004 relative
aux ASP.

Il en est de même pour la représentation des


membres aux assemblées générales et au sein du
syndicat.
(35)- Modèle de texte sur papier libre disponible au secrétariat de l’ASDI , 2 chemin des Marronniers 38100 GRENOBLE
tél : 04 76 96 64 22, ou détachable de la fiche d’information jointe au rôle de 2008.

14
Ce texte emprunte énormément aux documents écrits par les
responsables ASDI précédents :

• J.CAILLAT : assemblée générale de l’ASDI des 3 et 17 avril 1982.


• J.BARRET : conférence sur les risques majeurs, prévenir et gérer, du 22
janvier 1991.
• J.BARRET : assemblée générale des 27 septembre et 11 octobre 2003.
• J.BARRET : fiches jointes aux rôles de 1990 à 2005.

Il emprunte également beaucoup à l’excellent travail d’historien de J.C.


MICHEL :

• « le pont de CLAIX, merveille du DAUPHINE » ; bulletin des amis de la


vallée de la GRESSE, n°11, juin 1983 ; pour ne pas oublier.
• et « du nouveau sur le port de CLAIX » ; bulletin des amis de la vallée de
la GRESSE, n°58, décembre 2006 ; pour ne pas oublier.

au travail de thèse et à un ouvrage publié récemment par Denis Cœur :

• « la plaine de GRENOBLE face aux inondations, genèse d’une politique


politique du 17ème siècle au 20ème siècle », éditions QUAE, juin 2008.

au talent de chroniqueur de Paul Dreyfus :

• GRENOBLE, de l’âge du fer à l’ère atomique, Fayard, 1961.

Enfin, il ne néglige pas certaines informations pertinentes parues dans la


presse locale :

• Paul Dreyfus : Grenoble, de l’âge du fer à l’ère atomique, Fayard, 1961


• « Cinq siècles de lutte contre les inondations : le Syndicat DRAC-ISERE »,
André Chabert, l’almanach du Vieux Dauphinois, 1990, p78.
• « Si GRENOBLE était sous les eaux », les Affiches de GRENOBLE et du
Dauphiné, 16 octobre 1992.
• « Ces digues dont on parle si peu », le billet de Paul DREYFUS, les
Affiches de GRENOBLE et du Dauphiné, 9 octobre 1998.
• La lettre du SYMBHI n°1, mars 2005.
• « L’endiguement de l’agglo est quasiment achevé », le Dauphiné Libéré du
vendredi 3 novembre 2006.
Il s’agit de l’achèvement, en rive gauche, des digues du verrou de
GIERES, que nous visiterons cet après midi.

15
Récapitulatif
13ème Siècle :
1219, rupture d’un barrage naturel sur la Romanche, créé par un
éboulement de la Petite Vaudaine en 1191.

14ème Siècle :
1378, début des travaux concernant la digue MARCELLINE en rive
droite du Drac, entre « le Saut du Moine » et « le pont de CLAIX ».

15ème , 16ème et 17ème Siècles :


suite de débordements et confortements des systèmes défensifs
du Drac.

18ème Siècle :
1790, 1ères lois sur l’eau.

19ème Siècle :
1807, lois sur la participation des riverains aux travaux de défense
contre les inondations.

1819 : création du « Syndicat régulier des intéressés à


l’endiguement de la rive droite du Drac ».

18 octobre 1862 : décret impérial de réorganisation du Syndicat et


fusion avec celui du Saut du Moine.

20ème Siècle :
Constitution de l’ASDI par fusion avec les Syndicats de la plaine
de GRENOBLE, et suivant les arrêtés préfectoraux de 1933, 1953,
1974 et 1983.

21ème Siècle :
17 novembre 2007 : mise en conformité des statuts de l’ASDI avec
l’ordonnance n°2004-632 du 1er juillet 2004, relative aux ASP, et
avec le décret d’application n°2006-504 du 3 mai 2006.

16
Liste des présidents de l’ASDI et de quelques adjoints
depuis la création du « Syndicat des intéressés à
l’endiguement de la rive droite du Drac »,
par le décret impérial du 18 octobre 1862

1862 à 1874 (12 ans) : Mr CHAPER, Préfet

1874 à 1883 (9 ans) : Mr PIOLLET, Président de la chambre


à la cour impériale

1883 à 1885 (2 ans) : Mr FERLIN

1885 à 1910 (25 ans) : Mr TARTARI

1910 à 1911 (1 an) : Mr THOUVARD

1911 à 1936 (25 ans) : Mr BONNETON

1936 à 1950 (14 ans) : Mr DOURNON

1950 à 1963 (13 ans) : Mr DELACHENAL

1963 à 1979 (16 ans) : Mr CHION

1979 à 1981 (2 ans) : Maître G. NALLET, notaire


Adjoint : Mr BLANC, société HLM

1981 à 1990 (15 ans) : Mr G. CAILLAT, industriel en retraite


Adjoint : Mr J. PERRIN, société Rhône-Poulenc

1990 à 2005 (15 ans) : Mr J. BARRET, ingénieur divisionnaire des TPE


Adjoints : Mr G. CAILLAT puis Mr P. BONNET-MACHOT,
industriel

Depuis 2006, Mr F. DIAFERIA, gestionnaire de biens


Adjoint : Mr G. THOMAS, ingénieur en retraite
La direction, les membres du Syndicat, les conseillers sont bénévoles
Personnel salarié : Marylène MUNOZ, responsable administrative
Laurence INTHANAVONG, collaboratrice
Joséphine TABITA, collaboratrice
Personnel salarié à temps partagé : Yvan GLENAT, conducteur de travaux

17
Liste des « Illustrations hist. des AS », dossier de fichiers,
et des « Diapos hist. des AS. ppt »

Titre ou repère N° de diapo N° de fichier


Titre et combat 1 1-0

Calendrier républicain 2 1-1

Carte Saut du Moine 3 2

Carte Petite Vaudaine 4 5

Carte embouchure de la Suze 5 6

Plan A. Bouchayer 6 9

Carte digue Marcelline 7 12-1

Coupe digue Marcelline 8 12-2

Confluent Drac-Isère le Ligeois 9 15

Pont 1 aval 10 16-1

Pont 2 amont 11 16-2

Pont 3 montée 12 16-3

Bac 1 extrait du plan 13 17-1

Bac 2 plan élargi 14 17-2

Figuratif du canal Jourdan 15 18-1

Schéma du canal Jourdan 16 18-2

Inondation 1 en 1733 17 19

Inondation 2 en 1733 18 20

Place Ste Claire en 1859 19 24

Ordonnance 1819 20 27

Récapitulatif 21 Page 16 du texte

Liste Présidents 22 Page 17 du texte

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