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FOCUS CONJONCTURE

FEB – Département économique


Annexe à l’Infor FEB – n° 22 – 11 juin 2009

La nécessaire remise en question des évidences


Principales données macro-économiques

Un choc sans précédent a frappé l’économie 120 Graphique 1 -


mondiale … 110
Production
industrielle
100 dans la zone
La récession que traverse actuellement l’économie mondiale est à euro
90
l’évidence la plus profonde depuis la Seconde Guerre mondiale. Selon les (2005=100 ;
source : Eurostat)
dernières prévisions du FMI, tant la production mondiale que le commerce 80

international connaîtront en 2009 des contractions historiques de res- 70

pectivement 1,3% et 11%. Le contraste avec les prévisions faites en 60


1-01-93
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juillet 2008 (3,9% de croissance mondiale et 6% pour les échanges inter-
Biens d'investissement Biens de consommation durable Biens de consommation non durable
nationaux) est saisissant. La zone euro et la Belgique en particulier sont
aussi fortement touchées par cette récession exceptionnelle. La produc-
tion industrielle dans la zone euro, par exemple, s’est réduite de 20% sur américain, par exemple, est estimé pour 2009 à 13,6% du PIB par le FMI
base annuelle en mars, soit le repli le plus important depuis le début de et la dette de presque tous les pays va aussi fortement augmenter. Pour
la série de données en 1986 (graphique 1). En Belgique, 84% des sec- la Belgique, on s’attend même à ce qu’elle passe à nouveau au-dessus
teurs interrogés par la FEB ont répondu que la totalité ou la grande majo- de la barre symbolique des 100% du PIB.
rité de leurs entreprises sont confrontées au recul de l’activité économique
(graphique 2). Un recul que reflète aussi la baisse inédite du taux Un début de reprise est-il déjà en vue ?
d’utilisation des capacités dans l’industrie, tombé à 70% en avril alors
qu’il était encore à 83,5% un an auparavant. Les interventions des autorités publiques et des banques centrales expli-
quent sans doute les quelques signaux encourageants apparus ces der-
nières semaines. Par exemple, la confiance des consommateurs et des
… et a suscité des interventions de grande
ampleur 50% Graphique 2 -
Combien
Qu'elles aient émané des gouvernements du monde entier ou des autori- 40% d'entreprises de
votre secteur sont
tés monétaires, les interventions visant à inverser la tendance ont, de
confrontées à
% des secteurs

30%
manière générale, été à la mesure de la gravité de la situation. Par une contraction
exemple, les Etats-Unis ont transféré des moyens à hauteur de 6,3% de de l'activité
20%
économique ?
leur PIB vers le secteur financier et le
SOMMAIRE 10%
Royaume-Uni y a même injecté 20,2% de son
1 PRINCIPALES PIB. Couplées aux injections massives de liqui- 0%
Toutes les La majorité Fifty-fifty Une minorité des Aucune
entreprises des entreprises entreprises entreprise
DONNÉES dités par les banques centrales, ces interven-
MACRO-
tions ont ramené une certaine stabilisation sur
ÉCONOMIQUES
les marchés financiers. L’ampleur des plans de entrepreneurs tant aux Etats-Unis qu’en zone euro et en Belgique est en
2 RÉSULTATS DE relance est aussi inédite : les pays du G20 légère hausse depuis avril. L’indice des directeurs d’achats de la zone
L’ENQUÊTE
consacreront en moyenne près de 2% de leur euro remonte également (43,9 points en mai) après avoir atteint son plus
SEMESTRIELLE
PIB aux mesures de relance en 2009. Ceci bas niveau historique en février. Cet indice a même dépassé le seuil cri-
3 QUAND L’ÉCONO-
vient s’ajouter aux stabilisateurs automatiques tique des 50 points en Chine depuis mars, signe que la croissance de la
MIE TOUCHERA-T-
ELLE LE FOND ?
qui jouent, eux aussi, un rôle important dans la production industrielle y est à nouveau positive. Enfin, le marché immo-
plupart des pays industrialisés. Ces mesures bilier américain, à l’origine de la crise, montre quelques timides signaux
QUELLE SERA LA
nécessaires prises par les gouvernements plon- positifs, même si la baisse du prix des logements avoisine encore les 20%
RAPIDITÉ DE
LA REPRISE ? geront les finances publiques dans le rouge sur un an. Il y a donc des lueurs d’espoir à l’horizon, mais sont-elles vrai-
dans les années à venir. Le déficit budgétaire ment le signe qu’une reprise durable est amorcée ?

1 | FEB - FOCUS CONJONCTURE - JUIN 2009


FOCUS CONJONCTURE
Annexe à l’Infor FEB – n° 22 – 11 juin 2009

Résultats de l’enquête
semestrielle Graphique 5 -
Exportations

Cette rubrique commente les résultats d’une enquête semestrielle menée


auprès des secteurs. Tant pour la situation actuelle que pour le futur, il
leur a été demandé de fournir une appréciation des différentes variables
économiques (activité économique, emploi, …), celle-ci pouvant être
négative, neutre ou positive. Dans les graphiques 3, 4, 5, 6 et 7, un sec-
teur peut donc occuper neuf places, à savoir le quadrant supérieur droit,
si la situation tant actuelle que future est jugée positive, le quadrant
supérieur gauche si la situation actuelle est jugée positive mais que les
prévisions sont négatives, etc. En raison de la nature spécifique des acti-
vités dans le secteur bancaire, les réponses de ce dernier ont trait à son
était d’environ 57% ! Ces résultats démontrent clairement que tous les
appréciation de l’économie dans son ensemble, plus qu’au développe-
secteurs sont fortement touchés par le décalage entre, d’une part, un
ment du secteur bancaire à proprement parler.
important recul de la demande intérieure et étrangère et, d’autre part,
un niveau de coûts resté élevé sur les plans des salaires, de l’octroi de
Graphique 3 -
crédits et de l’énergie. L’introduction du chômage temporaire pour les
Climat
économique employés permettra de réduire quelque peu le poids important des
coûts salariaux. Par contre, selon les secteurs, la politique monétaire
expansive ne s’est pas encore vraiment traduite par une diminution du
coût du crédit.

... avec un impact important sur l’emploi et les


investissements…
La détérioration supplémentaire de l’activité économique, des exporta-
tions (graphique 5) et de la rentabilité observée depuis décembre touche
également le marché du travail et les investissements. Alors qu’en

Le climat économique s’est encore dégradé… Graphique 6 -


Emploi
Lors de la précédente enquête conjoncturelle de décembre, 60% des
secteurs jugeaient déjà le climat économique comme négatif. Depuis,
la situation s’est encore dégradée. En effet, aujourd’hui 95% des sec-
teurs se prononcent de manière négative sur le climat économique
(graphique 3). Concernant la rentabilité, nous constatons également un
pessimisme généralisé : 100% des secteurs donnent actuellement une
appréciation négative (graphique 4), alors qu’en décembre, ce chiffre

Graphique 4 -
Rentabilité

décembre, quelque 20% des secteurs restaient confiants quant à


l’évolution de l’emploi, la nouvelle enquête montre que ce chiffre est
retombé à 0%. Dans ce contexte, on comprend mieux pourquoi la dis-
ponibilité d’un personnel qualifié est un facteur moins préoccupant dans
cette enquête-ci, même si pourvoir les fonctions critiques reste toujours
un réel défi. Le tableau est le même du côté des investissements, au
sujet desquels environ 95% des secteurs sont aujourd’hui pessimistes,
contre 50% en décembre.

2 | FEB - FOCUS CONJONCTURE - JUIN 2009


FOCUS CONJONCTURE
Annexe à l’Infor FEB – n° 22 – 11 juin 2009

80% Graphique 8 -
Les princi-
70%
pales raisons
60% des décisions
d'investisse-

% des secteurs
… mais une stabilisation est en vue… 50%
ment pour les
40% 6 prochains
Bien que pratiquement tous les secteurs évaluent négativement la situa- 30%
mois

tion actuelle, quelques lueurs d’espoir se profilent pour les six prochains 20%

mois. Ce résultat est en rupture nette avec les enquêtes conjoncturelles 10%

précédentes où, chaque fois, une détérioration encore plus importante 0%


Remplacement Rationalisation Innovation Extension
de l’activité économique était attendue pour les 6 mois à venir. Ainsi,
près de 58% des secteurs s’attendent à ce que la production se stabi-
lise au cours du prochain semestre. Pour les exportations et la rentabi- recherche et développement, parce qu’elles veulent continuer à assu-
lité, ce chiffre atteint même 65%. Ces tendances pourraient laisser rer leur croissance sur le long terme.
penser que le recul économique est en train de ralentir et que le niveau
le plus bas sera atteint dans le courant des six prochains mois. Mais Légende :
Al : alimentation ; Au : automobile ; B : banques ; Bo : bois ; Ch : chimie ;
nous devons faire preuve d’une certaine prudence, car 30% des sec- Co : construction ; D : distribution ; E : électrotechnique et électronique ;
teurs prévoient toujours une dégradation de l’activité économique pour En : gaz et électricité ; G : industrie graphique ; H : habillement ; TIC : technologies de
l'information et de la communication ; I : intérim ; Mch : mécanique et mécanotronique ;
la même période. Il pourrait s’agir de secteurs plus vulnérables à cer- Mm : métaux et matériaux ; Mp : produits métalliques ; P : papier ; S : sidérurgie ;
taines menaces ou qui réagissent avec un effet retard au redressement T : textile ; Ve : verre.

économique.

Graphique 7 -
Investissements Quand l’économie touchera-
t-elle le fond ? Quelle sera
la rapidité de la reprise ?
 Le creux conjoncturel est en vue…
Les indicateurs conjoncturels évoqués ci-dessus et les réponses des sec-
teurs montrent que le recul de l’activité économique amorce un ralen-
tissement. Ainsi, le creux devrait être atteint durant le quatrième
trimestre de 2009. A partir de ce moment, l’activité économique ne
devrait donc plus se contracter. Environ un tiers des secteurs sont
d’avis qu’une croissance positive se dessinera à nouveau à partir du qua-
… sauf sur le marché de l’emploi et au niveau
des investissements 100 Graphique 9 -
Pourcentage
L’emploi et les investissements constituent deux exceptions de taille à des secteurs
80
qui prévoient
cette tendance à la stabilisation. Ainsi, environ 80% des secteurs
une croissance
s’attendent à une détérioration supplémentaire de la situation de 60 de l'activité
économique
l’emploi (graphique 6). Du côté des investissements, ils sont 75% (gra-
40
phique 7). Ce pessimisme en matière d’investissements constitue un
signal de plus que les secteurs n’envisagent pas à court terme un redé- 20

marrage rapide de la croissance économique. En outre, les quelques


0
investissements qui sont réalisés servent principalement à remplacer T2 2009 T3 2009 T4 2009 T1 2010 T2 2010 T3 2010 T4 2010 2011

l’appareil de production existant ou à adapter les coûts au recul de la


demande. Le fait que différents secteurs déclarent que l’innovation trième trimestre de 2009. Cette proportion atteint déjà presque 60%
continue à jouer un rôle important dans les décisions d’investissement pour le premier trimestre de 2010 (graphique 9). Sur base de ces
(graphique 8) est toutefois rassurant. Cela pourrait signifier que, mal- réponses, la FEB estime que la croissance économique belge se chif-
gré la crise, les entreprises ne réduisent pas leurs efforts en matière de frera à -3,3% pour l’année 2009.

3 | FEB - FOCUS CONJONCTURE - JUIN 2009


FOCUS CONJONCTURE
Annexe à l’Infor FEB – n° 22 – 11 juin 2009

7 Graphique 10 -
Parmi les risques
6 baissiers suivants,

 .… mais rien n’est encore


lesquels pour-
5 raient entraver

Score moyen
une relance
rapide ?
définitivement acquis 4

3
Un certain nombre de risques importants subsistent et
s’ils devaient se réaliser, le scénario ci-dessus devien- 2

drait moins probable et devrait être revu à la baisse. Les


1
secteurs craignent surtout une nouvelle vague dans la Une nouvelle La faillite de Un Les pays qui Déflation Hyperinflation Autres
vague de la quelques grandes protectionnisme rencontrent des
crise financière entreprises croissant problèmes de paiement
crise financière, la faillite de quelques grandes entre-
prises et une augmentation du protectionnisme (gra-
phique 10). Les analyses du FMI démontrent que cette
crainte n’est en effet pas dénuée de fondement. Ainsi, Graphique 11 -
7
selon les prévisions, le secteur bancaire européen pour- Parmi les facteurs
6 suivants, lesquels
rait encore se trouver confronté à des dépréciations contribueront le
d’actifs et des augmentations de capital plus élevées 5 plus à la relance
Score moyen

de l'économie
que, par exemple, aux Etats-Unis. Il se pourrait dès lors belge ?
4
que l’impact négatif de la crise financière sur
3
l’économie réelle (et inversement) soit plus lent à
s’estomper que prévu, ce qui aurait pour effet de retar- 2

der le moment où le point le plus bas sera atteint.


1

 La reprise ne sera que très


La stabilisation Les plans Les baisses de Le plan de L'aide internationale Un accord Autres
des marchés de relance taux des banques relance belge aux pays en international dans
financiers étrangers centrales difficulté le cycle de Doha

progressive
La particularité de la récession actuelle réside dans son caractère nous ne pouvons pas commettre ce genre d’erreur. Il est donc urgent
mondial et dans le fait qu’elle a été causée par une crise bancaire. que, comme aux Etats-Unis, une solution forte soit mise en place pour
L’expérience nous apprend que, dans ce cas, les exportations ne suf- le secteur bancaire européen.

 Le gouvernement et les partenaires sociaux


firont pas à nous sortir de la crise et que le rétablissement de la
consommation et des investissements sera plus lent que dans le cadre
d’une récession classique. L’enquête de la FEB le confirme. Selon les
doivent agir énergiquement
secteurs, il y a en effet plus de 50% de chances que la reprise de
l’activité économique prenne une forme de U plutôt que la classique La crise et la lente reprise de l’activité économique auront un impact
forme de V. Les scénarios d’une reprise en L (stabilisation à long ter- important sur le chômage et les finances publiques. Contrairement à
Graphisme et production : The Mailshop – tél. 03 771 12 30 – mail@themailshop.be
me à un très bas niveau) ou en W (avenir très volatil, avec une suc- une récession plus classique, la crise actuelle connaîtra non seulement
cession de crises et de reprises) sont évalués par les secteurs à un taux de chômage plus élevé, mais qui de plus se résorbera aussi
respectivement 23% et 14% de réalisation. Sur la base de cette infor- beaucoup plus lentement. Le gouvernement et les partenaires sociaux
mation, la FEB prévoit une croissance économique de 0,2% en 2010. sont donc confrontés à un défi de taille. Il s’agit, d’une part, de main-

 Nous devons éviter les situations à la japonaise


tenir à niveau les compétences de ces nouveaux chômeurs, et même
de les développer davantage, et, d’autre part, de veiller à une évolu-

Selon les secteurs, ce sont surtout la stabilité des marchés financiers, tion modérée des coûts salariaux, de sorte que la faible croissance futu-

les plans de relance étrangers et belge et la politique monétaire expan- re soit la plus intensive possible en main-d’œuvre. Sur le plan des
sive qui contribuent au redressement économique (graphique 11). finances publiques, il faudra également s’adapter à cette nouvelle réa-
Ces résultats sont en phase avec les leçons que nous pouvons tirer de lité. La Belgique doit se débarrasser du fardeau que représentent les
la crise japonaise des années 1990. A l’époque, il avait fallu plus de inefficiences des pouvoirs publics et les institutions superflues. Les
dix ans pour que les marchés financiers retrouvent leur stabilité. Les mécanismes légaux qui permettent à certaines dépenses publiques
plans de relance avaient été annulés prématurément, avant même que d’évoluer de manière totalement indépendante de la croissance éco-
l’économie ne se soit complètement rétablie. De ce fait, l’économie nomique doivent être revus. Il s’agit là en effet de la seule manière pos-
japonaise a été confrontée durant toutes les années 1990 à une faible sible d’assainir le budget et d’apporter une réponse adaptée aux
croissance économique et à un taux de chômage élevé. Aujourd’hui, nombreux défis structurels auxquels notre pays se trouve confronté.

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