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Néphrologie - Urologie

B 146

Cancer du rein de l’adulte


Anatomie pathologique, diagnostic, évolution, principes du traitement
DR Pascal ESCHWÈGE, PR Gérard BENOÎT
Service d’urologie, hôpital de Bicêtre, 94275 Le Kremlin-Bicêtre Cedex.

Points Forts à comprendre Carcinomes à cellules rénales de l’adulte

La classification des carcinomes à cellules rénales de


• Les cancers du rein sont des tumeurs malignes l’adulte repose classiquement sur des caractéristiques
primitives du parenchyme rénal, ce qui exclut cytologiques. Sont ici essentiellement décrits : le carci-
les tumeurs secondaires métastatiques, nome à cellules claires, le carcinome tubulo-papillaire,
les tumeurs de la voie excrétrice et les tumeurs le carcinome à cellules chromophobes, le carcinome de
bénignes. Ils représentent 2 à 3 % des tumeurs Bellini et les carcinomes kystiques du rein.
malignes de l’adulte.
• La biologie moléculaire a permis de connaître 1. Carcinomes à cellules claires
certains gènes (maladie de von Hippel-Lindau) Cette tumeur représente 75 % des cancers du rein (voir :
impliqués dans le développement du cancer Pour approfondir 2). Elle se développe à partir des
du rein (voir : Pour approfondir 1). cellules du tube contourné proximal.
• Le cancer du rein est au 3e rang des cancers • Macroscopiquement, la tumeur est ronde et comporte
urologiques après les cancers de la prostate parfois de petits nodules satellites. Elle est de couleur
et de la vessie. Il intéresse préférentiellement jaune-chamois. Elle peut atteindre la capsule rénale,
l’homme de plus de 50 ans (rapport envahir la graisse périrénale, s’étendre dans la veine
de 2 hommes pour 1 femme). Son incidence rénale et plus rarement dans la veine cave inférieure.
est en augmentation : 10 nouveaux cas • Histologiquement, il s’agit d’un adénocarcinome
pour 100 000 habitants. L’augmentation constitué d’une prolifération de cellules au cytoplasme
de son incidence correspond essentiellement clair. La cellule est de grande taille, avec un cytoplasme
aux formes localisées, dépistées grâce chargé de glycogène et de lipides. Le grade nucléaire de
à l’utilisation large de l’imagerie médicale. Fuhrmann permet de reconnaître parmi les patients dont
• Le pronostic est bon à condition que la maladie la tumeur est localisée, ceux dont l’évolution à moyen
soit diagnostiquée de façon précoce. Au stade terme risque d’être péjorative.
local, le traitement est chirurgical ; au stade • Génétiquement, l’identité qui caractérise les carci-
métastatique, il est dominé par l’immunothérapie. nomes à cellules claires est la délétion du bras court du
chromosome 3, présente dans 75 % des cas.
Une double mutation dans une cellule rénale est nécessaire
Anatomie pathologique pour voir se développer un cancer du rein sporadique.
Le gène VHL (suppresseur de tumeur) est situé sur le
L’histoire du cancer du rein commence à l’échelle segment 3p. Ce gène contrôle l’expression du VEGF
moléculaire où plusieurs gènes modifiés vont initier la (vascular endothelial growth factor) dont la surexpression
tumorigenèse. favorise la croissance tumorale.
En 1993, le gène spécifique de la forme la plus fréquente
du cancer du rein familial (maladie de von Hippel- 2. Tumeurs tubulo-papillaires
Lindau) a été identifié et cloné. Elles représentent 10 % des carcinomes à cellules
Le gène VHL est un gène suppresseur de tumeur dont la rénales. Elles sont plus fréquentes chez l’homme que
perte des 2 allèles est responsable des cancers du rein de chez la femme. L’âge moyen se situe dans la sixième
la maladie de von Hippel-Lindau et d’un grand nombre décennie. Les cellules tumorales ont pour origine les
des cancers sporadiques à cellules claires. cellules des tubes contournés distaux. Elles sont souvent
Dans les tumeurs familiales héréditaires, la mutation multiples et parfois bilatérales. Elles représentent le
d’un allèle est héritée de l’un des deux parents. Un seul type histologique le plus fréquemment retrouvé chez les
événement génétique acquis (somatique) est nécessaire hémodialysés.
pour perdre la fonction du 2e allèle. Ce fait explique • Macroscopiquement, il s’agit le plus souvent de
l’âge plus précoce de survenue des cancers familiaux. tumeurs de petite taille. À la coupe, elles peuvent avoir
Dans les tumeurs sporadiques, l’existence de 2 mutations un contenu séreux. Des calcifications peuvent exister.
somatiques, séparément dans le temps, dans la même • Histologiquement, l’architecture tubulo-papillaire
cellule, expliquerait l’âge de survenue plus tardif. dans 95 % des cas est composée de tubes parsemés de

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structures papillaires, recouverts par des cellules au Radiologiquement, il existe à l’échographie de multiples
cytoplasme basophile avec un noyau comportant peu lésions kystiques rénales bilatérales qui peuvent être
d’atypies cytonucléaires ; ce sont souvent des tumeurs associées à des kystes hépatiques et pancréatiques. Cette
de bas grade. maladie est d’origine génétique (gènes PKD1 et PKD2)
• Génétiquement, il existe fréquemment une anomalie
du gène CMET. 2. Tumeurs bénignes solides
• Les oncocytomes représentent 5 % des tumeurs du
3. Carcinomes à cellules chromophobes rein. Cette tumeur est plus fréquente chez la femme.
Ils représentent 5 % des tumeurs à cellules rénales. Ils Elle se développe à partir des cellules de type A du tube
sont plus fréquents chez la femme. La moyenne d’âge collecteur. Il s’agit le plus souvent de tumeur unique.
est la sixième décennie. Ils se développent à partir des L’oncocytome est une tumeur bénigne.
cellules intercalaires de type B du tube collecteur. À la coupe, c’est une tumeur solide, centrée par une
• Macroscopiquement, ils sont souvent volumineux. cicatrice stellaire fibreuse (54 % des cas).
Leur coloration est beige rosé. Elle est composée d’oncocytes constitués d’un cytoplasme
• Histologiquement, leur architecture est compacte. très éosinophile, granuleux, comportant de très nom-
Les cellules tumorales ne contiennent pas de glycogène breuses mitochondries.
ni de lipides. Elles sont colorées par le fer colloïdal • L’angiomyolipome est la plus fréquente des tumeurs
(coloration de Hall). solides bénignes du rein. Il s’agit d’une lésion pluri-
4. Carcinomes des tubes collecteurs tissulaire qui contient des vaisseaux anormaux, des cellules
musculaires lisses et du tissu adipeux. La présence de
(carcinomes de Bellini)
graisse qui n’est pas normalement présente dans le rein
Ces tumeurs sont rares (1 %) et d’évolution péjorative. est pathognomonique et permet le diagnostic en tomo-
Les cellules tumorales dérivent des cellules principales densitométrie ou en imagerie par résonance magnétique.
du tube collecteur. L’angiomyolipome a souvent une consistance molle. À
• Macroscopiquement, elles sont classiquement situées la coupe, la tumeur est fréquemment remaniée par des
dans la région médullaire du rein. Cette tumeur s’étend phénomènes hémorragiques ou nécrotiques.
vers les cavités urinaires. Elle est dure et de couleur Cette lésion intéresse la femme jeune chez laquelle la
blanchâtre. tumeur est unique et isolée dans 90 % des cas. Dans la
• Histologiquement, les cellules sont cubiques et plupart des cas, la tumeur est découverte de façon fortuite.
bombent dans la lumière donnant un aspect en « clou de Elle est remarquable par son caractère hémorragique
tapissier » caractéristique. responsable d’hématurie ou de rupture spontanée.
5. Carcinomes kystiques du rein Quatre-vingt-dix pour cent des lésions symptomatiques
ont un diamètre égal ou supérieur à 4 cm.
• Macroscopiquement, il s’agit de kystes à paroi
L’angiomyolipome peut être associé à d’autres lésions
épaisse, multicloisonnés. Ce sont souvent des lésions
tumorales dans le cadre d’une sclérose tubéreuse de
uni- ou multiloculaires dont le diagnostic est difficile.
Bourneville. Il est alors fréquemment bilatéral et multi-
• Histologiquement, les kystes sont tapissés par une
focal. Il est fréquemment associé à une anomalie des
couche de cellules claires tumorales parfois difficile à
mettre en évidence. gènes TSC1 et TSC2.

Autres tumeurs malignes Diagnostic


Il s’agit des tumeurs neuro-ectodermiques du rein, des
sarcomes du rein, des lymphomes du rein, des tumeurs
Circonstances de découverte
du blastème de l’enfant chez l’adulte et de tumeurs
secondaires. Le cancer du rein peut se manifester sous des formes
diverses.
Tumeurs rénales bénignes liquides 1. Découverte fortuite
et solides
Les patients sont asymptomatiques dans 40 % des cas.
1. Tumeurs bénignes liquidiennes La découverte est alors fortuite, échographique le plus
• Le kyste du rein est une tumeur bénigne fréquente souvent.
n’ayant pas de manifestation clinique. Son diagnostic se Ces tumeurs sont de taille inférieure à celles de tumeurs
fait à l’échographie. Son image est celle d’une masse symptomatiques. Elles sont de faible stade (80 % intra-
liquidienne sans écho, la paroi du kyste est régulière, capsulaires) et de faible grade.
marquée par un renforcement postérieur.
• La polykystose rénale est une maladie autosomique 2. Signes urologiques
dominante qui peut conduire à l’insuffisance rénale La triade classique, hématurie, douleur du flanc, masse
chronique, cliniquement on note la présence de reins lombaire, ne concerne que 10 % des patients.
volumineux. • L’hématurie est le symptôme urologique le plus fréquent.

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Elle est totale, macroscopique et isolée dans 20 % des cas. ment vise à préserver le parenchyme rénal par une
• La douleur du flanc est le mode de découverte dans chirurgie conservatrice (tumorectomie, néphrectomie
10 % des cas. partielle). Une néphrectomie totale est proposée si la
• La masse lombaire n’est un mode de découverte que chirurgie conservatrice n’est plus possible.
dans 2 à 5 % des cas. Le rein est palpable. Le contact
lombaire, perçu par la main postérieure, traduit la 3. Tumeurs sur rein unique ou tumeurs
situation rétropéritonéale de la tumeur. Elle est barrée bilatérales
en avant par la sonorité colique. Le cancer bilatéral du rein se développe de façon
• La varicocèle droite est un signe classique qui synchrone dans 2 % des cas. Le traitement repose sur la
témoigne de l’atteinte de la veine gonadique droite. chirurgie conservatrice ou élargie.
3. Signes généraux 4. Autres formes cliniques
L’asthénie, l’amaigrissement, l’anorexie ou la fébricule Il s’agit de l’hématome spontané rétropéritonéal et,
sont le témoin d’une tumeur agressive. en dehors d’une rupture d’anévrisme de l’aorte sous-
rénale, le cancer du rein doit être recherché. La fréquence
4. Syndromes paranéoplasiques de cancer du rein dans ce cas est inférieure à 1 %.
Ils surviennent dans 5 % des cas. Ils sont dus à la
sécrétion par la tumeur d’une hormone ou d’une pseudo- Techniques d’imagerie
hormone ou à la formation d’immuns complexes.
En l’absence de métastases ces syndromes paranéo- L’échographie et la tomodensitométrie sont à l’origine
plasiques peuvent disparaître après néphrectomie. de la découverte de la majorité des tumeurs du rein. La
Ils sont par ordre de fréquence : anémie, perte de poids, forme typique du cancer du rein de l’adulte ne pose pas
hypertension, hypercalcémie, fièvre, syndrome de de problème diagnostique grâce à la tomodensitométrie
Stauffer (cholestase anictérique), polyglobulie, amylose. qui est la technique d’imagerie de référence. Les formes
de petite taille (inférieure à 3 cm) et atypiques posent
5. Métastases révélatrices des difficultés de caractérisation en imagerie.
Les métastases sont synchrones dans 20 % des cas. Le diagnostic d’extension locorégionale est fait avec la
tomodensitométrie, parfois complétée par l’échographie
Examen clinique doppler et l’imagerie par résonance magnétique en cas
de thrombose veineuse.
L’examen est orienté vers la fosse lombaire, les aires
ganglionnaires et la recherche de signes de compression 1. Échographie
veineuse. L’examen clinique permet d’apprécier les Il s’agit d’une imagerie très performante pour l’étude
capacités physiques du patient et d’opposer plusieurs des tumeurs du rein. Cette méthode, non invasive, permet
formes cliniques. d’analyser l’ensemble du parenchyme, les contours du
rein et la graisse périrénale. La tumeur est échogène.
1. Formes cliniques selon l’âge du patient L’échographie a une sensibilité de 85 % pour les lésions de
Une tumeur découverte chez un patient de moins de 50 ans plus de 3 cm, de 60 % pour les tumeurs inférieures à 3 cm.
doit faire envisager une origine familiale. En présence Il s’agit d’une technique dépendant de l’opérateur.
d’autres lésions caractéristiques un avis génétique doit être L’hyperéchogénicité peut correspondre à un angiomyolipome.
proposé à la recherche d’une maladie de von Hippel-Lindau.
2. Tomodensitométrie
2. Formes cliniques selon l’état du patient La tomodensitométrie permet de déterminer la vascula-
• Lors d’une grossesse, si la tumeur du rein est décou- risation des tumeurs et de mieux visualiser les limites
verte en début, après avoir éliminé un angiomyolipome, lésionnelles que l’échographie. Elle est l’examen de
un avortement thérapeutique peut être discuté. référence pour le diagnostic et la recherche d’une extension
Découverte en fin de grossesse, le bilan d’extension sera locorégionale. Elle a une sensibilité de 90 % et une réso-
réalisé après l’accouchement. lution de l’ordre du centimètre. Pour les lésions pleines,
• Chez le patient dialysé, après 3 ans de dialyse, le d’un diamètre supérieur à 3 cm, sa sensibilité est de 98 %.
risque de développer une dysplasie multikystique est de La densité est mesurée en unités Hounsfield (UH). Elle
80%. L’incidence du cancer du rein est alors de 5 %. se rehausse de plus de 20 UH après injection de produit
Cela souligne l’intérêt de la surveillance échographique de contraste .
des dialysés après 3 ans de dialyse. Les tumeurs décou- L’acquisition hélicoïdale permet de détecter des lésions
vertes sont de petit volume, fortuites dans 90 % des cas de 1 à 3 cm dans 98% des cas. Les reconstructions volu-
et le plus souvent tubulo-papillaires. miques permettent une représentation tridimensionnelle
• Dans la maladie de von Hippel-Lindau, le cancer du des lésions observées.
rein est multifocal, souvent bilatéral associé à des La présence de densités négatives (- 20 à - 50 UH)
kystes, ces cancers sont la principale cause de mortalité correspond à une composante graisseuse qui permet
de cette maladie. de faire le diagnostic d’angiomyolipome.
On opère les tumeurs solides de plus de 3 cm. Le traite-
3. Échographie doppler

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L’échographie doppler est une technique intéressante doit rechercher la graisse, l’absence de rehaussement
pour apprécier l’état du pédicule vasculaire rénal. Elle pour les kystes et un rehaussement supérieur à 20 UH
peut aussi étudier la vascularisation d’une image atypique pour les lésions malignes.
(sensibilité de 70 %). Elle permet de préciser l’intégrité L’imagerie par résonance magnétique peut apporter des
de la veine cave inférieure. La sensibilité du doppler renseignements utiles. Les séquences en saturation de
couleur rend cet examen complémentaire de la tomo- graisse permettent de distinguer l’hypersignal de la
densitométrie et (ou) de l’imagerie par résonance magné- tumeur en T1, de la graisse et du sang.
tique pour apprécier la perméabilité de la veine rénale. Une petite tumeur se traduit par un signal équivalent ou
légèrement inférieur à celui du parenchyme rénal sur
4. Imagerie par résonance magnétique l’imagerie en T1. Ces petites tumeurs sont mieux
Elle permet une excellente différenciation tissulaire visibles sur l’imagerie en T2 (hyposignal), qui améliore
(cortex, médullaire, cavités), une analyse du rétropéritoine le contraste spontané avec le parenchyme sain.
et des axes vasculaires. Elle est intéressante dans le
cadre des petites lésions (tumeurs homogènes < 3 cm) et 3. Formes kystiques
de lésions hypovasculaires graisseuses. Elle participe au Le diagnostic radiologique d’une masse rénale kystique
bilan d’extension veineuse. est souvent difficile : 1 % des tumeurs kystiques sont
L’imagerie par résonance magnétique est utile en cas malignes.
de grossesse ou d’intolérance aux produits iodés (insuf- L’existence de cloisons épaisses ou de calcifications,
fisance rénale, diabète, intolérance vraie). l’épaisseur de la paroi, la présence d’échos internes, de
végétations endokystiques et la disparition du renforce-
5. Artériographie ment postérieur sont des aspects échographiques suspects.
Elle a perdu de son intérêt en dehors de 2 indications : la Bosniak a proposé une classification tomodensitométrique
cartographie artérielle en cas de chirurgie conservatrice pronostique en 4 types, basée sur l’aspect de la paroi,
et l’embolisation artérielle préopératoire ou palliative. l’existence de cloisons, le nombre et la localisation des
calcifications, la densité du liquide intrakystique et la
6. Urographie intraveineuse présence de végétations.
Elle n’a plus d’intérêt dans le diagnostic des cancers du
parenchyme. 4. Tumeurs multiples
Elle est indispensable si l’on suspecte une tumeur de la En cas de tumeurs multiples du rein, la densité et les
voie excrétrice. localisations peuvent orienter le diagnostic.
• Une densité négative (- 100 à - 20) [graisseuse]
7. Scintigraphie osseuse au technétium évoque un angiomyolipome.
métastable (99mTc) • Une densité tissulaire oriente vers un lymphome ou
Elle n’a pas d’intérêt pour le diagnostic de cancer du des métastases rénales en cas de localisations intra-
rein sans signe d’appel osseux. Elle est utile pour la parenchymateuses, vers un carcinome à cellules rénales
détection de métastases osseuses. si les localisations sont périphériques.
5. Tumeurs hypovasculaires
Aspects radiologiques
Le caractère hypovasculaire de certains carcinomes du
1. Tumeurs solides de plus de 3 cm rein se traduit par un faible rehaussement (< 20 UH),
souvent tardif voire non détectable en tomodensitométrie
Les tumeurs solides du rein de plus de 3 cm apparaissent
après injection de produit de contraste. La réalisation de
lors de 2 examens.
coupes tardives en tomodensitométrie après injection est
• En échographie, les lésions sont isoéchogènes/
essentielle pour démontrer le caractère solide et vascularisé
hétérogènes.
de ces tumeurs.
• En tomodensitométrie, les lésions sont isodenses/
hétérogènes, avec un rehaussement de densité (> 20 UH). 6. Tumeurs à composante graisseuse
Elles sont parfois hypodenses et il est possible d’observer L’existence d’une lésion hyperéchogène en échographie,
des calcifications. la présence de graisse au sein d’une tumeur traduite par
• Les autres examens ne sont pas indispensables. une densité négative (- 120 à - 20 UH) en tomodensito-
2. Tumeurs de taille inférieure à 3 cm métrie fait le diagnostic d’angiomyolipomes (tumeurs
bénignes).
Dans ce groupe, la fréquence des tumeurs bénignes est
de 20 %. 7. Tumeurs hémorragiques
La tomodensitométrie avec injection de produit de Un hématome sous-capsulaire ou périrénal spontané
contraste est supérieure à l’échographie pour la détection doit toujours faire suspecter une origine tumorale. La
des petites lésions. Sa sensibilité est alors de 50 %. Par tumeur, souvent de petite taille, confinée au parenchyme
contre, lorsqu’on associe la tomodensitométrie à l’écho- rénal, est parfois difficile à mettre en évidence.
graphie, la sensibilité est de 95 %.
Après injection de produit de contraste, la tumeur se Certains proposent de répéter l’examen à distance si
rehausse mais reste hypodense. L’analyse densitométrique

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l’état du patient le permet, afin d’éviter une néphrectomie par une augmentation du diamètre (augmentation du
de principe. flux d’une tumeur hypervascularisée) ou une modification
de forme des veines rénale et cave inférieure. L’absence
8. Masses calcifiées du rein de prise de contraste ou un rehaussement hétérogène
Les masses calcifiées du rein sont rares (4 %). évoquent la présence d’un thrombus. L’étude de la veine
Trois causes sont discutées. rénale droite est plus aléatoire car son trajet est court.
• Lors de cancers calcifiés du rein, les calcifications se • Ce thrombus peut atteindre la veine cave inférieure.
retrouvent dans 2 % des kystes et 10 % des cancers du On différencie les thrombus de la veine cave inférieure
rein. Ces calcifications semblent fréquentes dans les selon qu’ils sont rétro-hépatiques sans atteindre le
tumeurs tubulo-papillaires du rein et le carcinome sarco- niveau des veines sus-hépatiques, ou qu’ils dépassent les
matoïde. Ces calcifications ont une spécificité faible, veines hépatiques et atteignent les cavités cardiaques. Ces
puisque 33 % d’entre elles sont en fait des cancers. thrombus peuvent être néoplasiques ou cruoriques. Ils
• La pyonéphrose tuberculeuse est rare. Les antécédents peuvent ou non adhérer à la paroi de la veine cave infé-
du patient et le contexte bactériologique permettent rieure. En cas de suspicion de thrombus au scanner, c’est
d’orienter le diagnostic. l’imagerie par résonance magnétique et l’échographie qui
• Le kyste hydatique du rein est rare. Les antécédents permettent de préciser la topographie du thrombus.
et les réactions immunologiques spécifiques font le
diagnostic. 4. Surrénale
L’incidence des atteintes de la surrénale est de 4 %. Il
Bilan d’extension locorégionale peut s’agir d’une atteinte directe par une tumeur du pôle
supérieur ou d’une atteinte métastatique par voie vasculaire.
L’évaluation de l’extension locorégionale d’un carcino- Lorsque la surrénale est considérée comme normale en
me à cellules rénales est basée sur la tomodensitométrie. tomodensitométrie, la surrénalectomie de principe n’est
En fonction de ses résultats, d’autres techniques d’explo- pas indispensable sauf pour les tumeurs du pôle supérieur
ration (échographie-doppler et imagerie par résonance et les volumineuses tumeurs.
magnétique) peuvent être indiquées. La tomodensitométrie 5. Organes de voisinage
permet l’étude des limites de la tumeur, de son interface
avec la graisse périrénale, la surrénale ou le foie, de L’atteinte par contiguïté d’un organe de voisinage se
l’extension veineuse rénale ou cave et la recherche traduit en tomodensitométrie par des modifications de
d’adénopathies. densité en regard de la zone de contact avec la tumeur.
La sensibilité globale de la tomodensitométrie (coupes Cette appréciation est parfois difficile.
de 10 mm d’épaisseur) pour l’extension locorégionale
est de 90 %. Bilan à la recherche de métastases
1. Extension locale 1. Poumons
L’extension locale est appréciée par la tomodensitométrie. Les métastases thoraciques (poumons et médiastin) sont
Une infiltration néoplasique peut simplement se traduire présentes dans 10 % des cas au moment du diagnostic.
par un œdème péritumoral ou une circulation collatérale. Une tomodensitométrie thoracique est indiquée en cas
2. Extension lymphatique de nodule sur la radiographie thoracique simple, de
symptômes pulmonaires ou de ganglions rétropérito-
Les adénopathies siègent par ordre de fréquence dans la néaux sur la tomodensitométrie abdominale du fait du
région du hile, puis sur les chaînes latéro- et interaortico- risque de dissémination lymphatique médiastinale.
caves. Une possible atteinte médiastinale sera dépistée L’acquisition spiralée thoracique au décours de la tomo-
par la tomodensitométrie. densitométrie abdominale rend la radiographie pulmo-
Les adénopathies sont significatives quand leur diamètre naire inutile dans le bilan d’extension, d’autant que les
atteint ou dépasse 10 mm. Il n’existe pas de critère métastases infracentimétriques ne sont pas visibles sur
morphologique spécifique d’un envahissement gan- la radiographie pulmonaire.
glionnaire métastatique.
Les ganglions régionaux dont le diamètre est supérieur 2. Os
à 2 cm en tomodensitométrie sont presque toujours La scintigraphie osseuse est indiquée lorsqu’il existe des
métastatiques. symptômes ou une anomalie biologique (calcémie,
phosphatases alcalines).
3. Extension veineuse
L’identification d’un thrombus veineux conditionne la 3. Foie
technique chirurgicale. L’extension du thrombus dans la En tomodensitométrie, la métastase hépatique est hyper-
veine cave inférieure se retrouve dans 5 % des cas. vascularisée donc hyperdense. Une échographie hépatique
L’extension veineuse est plus fréquente dans les tumeurs peut être associée pour compléter l’exploration d’une
du rein droit. image tomodensitométrique douteuse.
• Lors d’un thrombus, l’extension veineuse se traduit
4. Cerveau

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CANCER DU REIN DE L’ADULTE

La tomodensitométrie est l’examen de référence en cas de (lombotomie), soit antérieure (abdominale).


symptômes et elle est systématique avant immunothérapie. • La néphrectomie élargie par cœlioscopie ou par
laparoscopie reproduit les différentes étapes de la
En pratique néphrectomie élargie par chirurgie ouverte. L’artère
rénale est sectionnée. La section de la veine rénale est
Le bilan de la tumeur du rein doit comprendre une écho- réalisée avec une pince vasculaire agrafeuse. Le rein,
graphie et une tomodensitométrie abdominale. placé dans un sac, est extrait par une incision.
S’il existe un problème veineux, il faut faire un écho- Une évaluation est en cours pour préciser les indications
doppler ou une imagerie par résonance magnétique. de cette technique.
S’il existe des symptômes pulmonaires, faire une tomo- 2. Chirurgie conservatrice
densitométrie thoracique.
S’il existe des symptômes osseux ou une hypercalcémie, L’intérêt actuel de cette technique est dû aux résultats
il faut demander une scintigraphie osseuse. des patients traités par néphrectomie partielle.
Enfin, si l’on décide de faire une chirurgie conservatrice ou • La chirurgie conservatrice de nécessité est indiquée
une embolisation, il faut demander une artériographie rénale. en cas de : rein unique, tumeur bilatérale ; maladie de
von Hippel-Lindau, risque d’hémodialyse (si l’on fait
Place de la biopsie percutanée une néphrectomie élargie qui rendrait inévitable le
recours à l’hémodialyse).
La ponction n’a de valeur que positive. La ponction- • Les bons résultats de la chirurgie conservatrice ont
biopsie percutanée des tumeurs rénales est peu utilisée conduit à proposer une chirurgie conservatrice à des
en raison du risque théorique de dissémination tumorale patients dont le rein controlatéral était sain, en cas de
et d’hémorragie. petites lésions rénales (< 3 cm).
Elle se justifie en cas de tumeur métastasée pour faire un Ce sujet est en cours d’évaluation.
diagnostic avant le traitement médical.
Elle peut être proposée en cas de tumeur de moins de Traitement au stade métastatique
4 cm pour améliorer le diagnostic.
Quinze à 25 % des patients ont des métastases lors du
Bilan de l’état du rein controlatéral diagnostic, avec des localisations multiples dans la
majorité des cas.
Il est fondamental de savoir si le rein controlatéral peut Le poumon est l’organe le plus volontiers intéressé.
permettre au malade de vivre normalement après l’exé- La survie de ces patients est sombre avec 10 % de survie
rèse du rein tumoral. On se base sur la fonction rénale à 1 an, 3 % à 5 ans.
jugée sur la créatininémie, l’aspect du rein en échogra- La survie moyenne est de 10 mois.
phie ou au scanner. En règle générale, si la fonction
rénale et le rein controlatéral sont normaux, la néphrec- 1. Immunothérapie
tomie du rein tumoral est bien tolérée ; en cas de doute, Le système immunologique réalise une surveillance
il faut recourir à la scintigraphie rénale quantitative. permanente au sein de notre organisme qui prévient le
développement de cellules tumorales. Ce mécanisme est
efficace car le cancer est reconnu comme étranger à
Traitement notre organisme. Cette reconnaissance est due à l’ex-
pression d’antigènes tumoraux et d’antigènes de classe I
Au stade local déterminants dans le mécanisme de présentation de l’anti-
gène. L’activation des lymphocytes T type cytotoxique
La néphrectomie élargie est le traitement de référence (CD 8) nécessite la présence de cellules de classe I et la
du carcinome localisé à cellules rénales. production de lymphokines par des lymphocytes T (CD 4).
La chirurgie conservatrice a des indications dans les Parmi ces différentes voies thérapeutiques, les traite-
tumeurs bilatérales ou les tumeurs sur rein unique. ments actuels utilisent des cytokines.
• Les interférons ont été largement utilisés dans les
1. Chirurgie élargie 15 dernières années dans le traitement du cancer du
Deux types de techniques chirurgicales peuvent être rein métastatique. L’interféron est commercialisé sous
discutés, la néphrectomie élargie par chirurgie ouverte, 2 présentations : l’interféron 2α et l’interféron 2β. Ces
technique de référence, et la néphrectomie élargie par lapa- molécules inhibent la réplication de nombreux virus et
roscopie en cours d’évaluation (voir : Pour approfondir 3). ont une activité anti-proliférative sur les lignées de
• La néphrectomie élargie par chirurgie ouverte est le cellules cancéreuses à une posologie plus importante.
traitement de référence du carcinome à cellules rénales Ils bloquent la traduction des acides ribonucléiques
localisé. Elle se définie par l’exérèse du bloc surrénalo- messagers (ARNm) et accélèrent leur catabolisme ; ils
rénal et de la graisse périrénale après ligature première activent les lymphocytes natural killers et les macro-
du pédicule rénal. phages assurant ainsi une activité antitumorale.
Ce traitement est fait par une incision soit postérieure • L’interleukine 2 amplifie de façon globale la réponse

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Néphrologie - Urologie

immunitaire. Elle transforme notamment les lympho- sont le fait d’une résection incomplète de la tumeur initiale
cytes en cellules activées capables de tuer les cellules ou de la persistance de ganglions régionaux envahis.
cancéreuses. La médiane de survenue est inférieure à 20 mois.
L’interleukine 2 peut être délivrée en ambulatoire. Soixante pour cent des patients sont asymptomatiques,
• Un traitement par interleukine isolée ou associée à ces récidives justifient un suivi par imagerie chez les
l’interféron offre des réponses objectives à 20 % des patients à haut risque.
patients porteurs de cancer du rein métastatique. Une récidive locale doit être considérée comme une
La majorité des réponses obtenues intéresse les sites métastase.
métastatiques pulmonaires et ganglionnaires avec moins • La néphrectomie chez le malade métastatique peut
de réponse sur le foie, la loge rénale et les os. être discutée dans 4 circonstances :
– en cas de métastase unique, le traitement chirurgical de la
2. Chimiothérapie lésion primitive peut être associé à celui du site méta-
Le cancer du rein est une tumeur chimiorésistante. statique unique, si les 2 gestes sont carcinologiques ;
3. Place de la chirurgie dans le traitement – la néphrectomie de réduction tumorale avant immuno-
thérapie a démontré une supériorité en termes de
des formes métastatiques survie par rapport à l’immunothérapie seule ;
L’indication chirurgicale doit tenir compte de l’état – en cas de réponse partielle après immunothérapie, la
général du patient, du pronostic, de l’existence de chirurgie peut faire l’exérèse des tumeurs résiduelles ;
symptômes et de la qualité de vie. – la néphrectomie palliative est d’indication exceptionnelle,
Le traitement chirurgical d’une métastase unique donne elle peut être justifiée en cas d’hématurie invalidante ou
un taux de survie à 5 ans de 40 %. Le traitement est de rétention biliaire, de polyglobulie, d’hypercalcémie.
envisagé en fonction de chaque site métastatique. Elle n’allonge pas la survie des patients métastatiques,
• Les poumons sont le site métastatique le plus fré- elle a une morbidité et une mortalité importantes.
quent. Les métastases pulmonaires sont le plus souvent Ces tumeurs symptomatiques peuvent être aussi contrôlées
sous-pleurales et accessibles à une résection cunéiforme, par traitement médical ou traitées par embolisation artérielle.
éventuellement par thoracoscopie associée à une immuno-
thérapie.
• Les métastases osseuses sont uniques dans 20 % des cas. Évolution
La plupart d’entre elles sont sur le squelette axial et
parfois sur la partie proximale des os longs. L’aspect est L’évolution dépend des facteurs pronostiques et de la
le plus souvent lytique. réalisation ou non d’une néphrectomie.
En cas de risque de fracture, la chirurgie ne se justifie
que s’il s’agit d’un os portant avec une lyse importante Facteurs pronostiques
avec destruction de la corticale.
En cas de fracture, la chirurgie est indiquée si la survie 1. Patients
est supérieure à 6 semaines, en fonction de l’état général • Ceux de moins de 60 ans ont un meilleur pronostic.
et des possibilités de mobilisation précoce. • La conservation de l’état général est un bon critère
La radiothérapie (30 à 40 Gy) a un effet antalgique, elle pronostique.
est choisie s’il s’agit d’un site douloureux unique et si
l’état général n’autorise pas un traitement chirurgical. 2. Tumeur
En cas de compression médullaire, une laminectomie • Le stade pathologique tumoral est le facteur pronos-
avec stabilisation osseuse est indiquée. tique principal.
• Les métastases hépatiques sont isolées dans 5 % des Il existe une relation entre le volume tumoral et l’extension
cas. Un traitement chirurgical peut être proposé, si le métastatique : les métastases sont retrouvées dans 5 % des
nombre de foyers est inférieur à 3 : résection cunéiforme tumeurs de moins de 3 cm, dans 10 % des tumeurs de moins
pour une métastase inférieure à 4 cm, lobectomie si la de 3 à 5 cm, dans 80 % des tumeurs de plus de 10 cm.
métastase est supérieure à 4 cm. Un thrombus néoplasique dans la veine rénale ou dans la
• La métastase cérébrale est unique dans 8 % des cas. veine cave n’affecte pas le pronostic en l’absence d’at-
La chirurgie est le traitement de première intention en teinte de la paroi cave ou d’extension capsulaire ou gan-
cas de métastase unique associée à une radiothérapie glionnaire, si le patient est opéré.
postopératoire (36 Gy) pour améliorer le contrôle local. • La classification de Fuhrmann des tumeurs du rein
En cas de lésion inaccessible, la chirurgie stéréotaxique en 4 grades est basée sur la taille, le contour des noyaux
est indiquée associée à de la radiothérapie. et l’aspect des nucléoles. Le grade le plus élevé est
• Pour les métastases de la région de la tête et du cou, déterminant, même s’il est minoritaire.
les sites métastatiques les plus fréquents sont les sinus • Pour le type histologique, le carcinome à cellules
maxillaires, la glande thyroïde et les glandes salivaires. chromophobes est de meilleur pronostic que le carcinome
La chirurgie est souvent associée à une radiothérapie. à cellules claires; les tumeurs sarcomatoïdes et les
• Pour les métastases cutanées, le pronostic est mauvais carcinomes des tubes collecteurs de Bellini ont un
car elles sont souvent associées à d’autres métastases. pronostic péjoratif.
• Les récidives locales sont de mauvais pronostic. Elles

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CANCER DU REIN DE L’ADULTE

• Lors de l’infiltration vasculaire microscopique, (gamma-GT, phosphatases alcalines, transaminases).


l’atteinte de l’endothélium des veines péritumorales a une Les métastases osseuses et cérébrales sont souvent
valeur pronostique. symptomatiques. La scintigraphie, la tomodensitométrie
La survie à 5 ans sans récidive est de 35 % en cas cérébrale ne sont justifiées qu’en cas de symptômes.
d’infiltration vasculaire microscopique et de 90 % en La consultation postopératoire à 1 mois nécessite un
l’absence d’infiltration vasculaire. dosage de la créatinine ; à 6 mois, une tomodensitométrie
abdominale sert de document de base pour préciser
3. Extension ganglionnaire et métastatique l’état du lit tumoral.
• Les métastases s’effectuent par l’extension veineuse Le rythme et les modalités du suivi seront fonction de
et l’extension lymphatique. groupes pronostiques.
L’extension dans la veine rénale est retrouvée dans 10 à • Pour les tumeurs rénales pT1-2 N0 M0, le suivi est
15 % des cas. L’extension dans la veine cave survient annuel avec un bilan biologique (vitesse de sédimentation,
dans 5 % des cas. créatininémie, phosphatases alcalines, gamma-GT), une
Lors du diagnostic, 20 à 30 % des patients ont des méta- image par radiographie pulmonaire et échographie
stases ganglionnaires et 10 à 20 % des métastases viscérales. abdominale.
Le siège des métastases viscérales est pulmonaire (75 %), • Pour les tumeurs rénales pT2-3, N1, M0, le suivi est
osseux (20 %), hépatique (18 %) ou neurologique (7 %). annuel et comprend un bilan biologique (créatininémie,
Il existe d’autres voies de dissémination moins fréquentes : phosphatases alcalines, gamma-GT) et une tomodensito-
dans 5 % des cas, extension à la surrénale homolatérale. métrie abdomino-thoracique.
Les métastases surrénales controlatérales sont dues à • Pour les tumeurs pT4, N2, grade 3, M+, le suivi est
une dissémination hématogène. semestriel avec un bilan biologique (vitesse de sédimen-
• L’évolution des lésions métastatiques est imprévisible tation, créatinine, phosphatases alcalines, gamma-GT),
et déroutante. Les métastases peuvent apparaître 10 à une tomodensitométrie abdomino-thoracique.
15 ans après la néphrectomie élargie. La scintigraphie osseuse et la tomodensitométrie cérébrale
L’extension métastatique lors du diagnostic existe dans sont demandées en cas de signes d’appel.
20 % des cas.
Le pronostic dépend du délai d’apparition des méta- 2. Surveillance du patient non opéré
stases, de leur siège, du nombre de sites métastatiques. • La découverte fortuite de tumeurs < 3 cm de dia-
Les métastases asynchrones ont un meilleur pronostic mètre chez un sujet âgé ou à haut risque anesthésique
que les métastases synchrones. peut faire envisager une surveillance, d’autant que 10 %
La métastase unique est de meilleur pronostic et ce d’entre elles sont des oncocytomes et que les techniques
d’autant qu’elle est pulmonaire. actuelles d’imagerie ne permettent pas de les différencier.
En cas d’atteinte ganglionnaire, la survie à 5 ans est de La croissance de ces tumeurs est lente.
15 % et la survie à 10 ans est de 2 %. Le but de la chirurgie est d’enlever la tumeur avant
La survie à 5 ans est de 40 % en cas d’envahissement qu’elle ne métastase. Ce risque est de 2,5 % pour les
ganglionnaire microscopique et de 2 % en cas d’envahis- tumeurs inférieures à 3 cm. Pour ces raisons, une sur-
sement macroscopique. veillance peut être envisagée chez certains patients âgés
ou en cas de risque anesthésique majeur si la tumeur
rénale est inférieure à 3 cm.
Suivi • Les patients à risque sont :
Le cancer du rein opéré nécessite un suivi en fonction du – le dialysé porteur de dysplasie multikystique dont la
stade pathologique initial. Le suivi est aussi nécessaire surveillance nécessite une échographie annuelle après
du fait du risque d’apparition d’une deuxième tumeur 3 ans de dialyse ;
non urologique (8 %). – le transplanté rénal avec la survenue possible de cancer
sur les reins propres ou le transplant qui justifie une
1. Suivi du patient opéré par néphrectomie
échographie annuelle ;
partielle ou élargie – ceux atteints de maladie de von Hippel-Lindau où la
La plupart des métastases surviennent dans les 3 ans qui surveillance est proposée dès l’âge de 16 ans chez les
suivent la néphrectomie élargie. Les tumeurs pT2N0 peu- patients asymptomatiques lorsque le diagnostic géné-
vent avoir des métastases après un délai moyen de 30 mois. tique a été posé par la mise en évidence de la mutation
Les tumeurs pT3N0 peuvent avoir des métastases après du gène VHL. Les tumeurs rénales dans la maladie de
un délai moyen de 20 mois. von Hippel-Lindau sont multifocales et fréquemment
La tomodensitométrie thoracique permet de préciser bilatérales.
le nombre et le degré d’extension des métastases Après chirurgie le risque de récidive locale justifie un
pulmonaires. suivi rapproché d’autant qu’une chirurgie itérative peut
Les récidives ganglionnaires rétropéritonéales sont être indiquée lorsque la tumeur dépasse 3 cm.
rarement isolées. Contrairement aux formes sporadiques, le risque méta-
Les récidives abdominales (métastases hépatiques ou statique à 5 ans est faible. Le suivi est annuel avec un
récidives locales) sont en général symptomatiques ou bilan biologique (créatininémie) et une tomodensitométrie
entraînent des anomalies de la biologie hépatique abdominale en coupes fines. ■

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Néphrologie - Urologie

POUR APPROFONDIR

1 / Facteurs favorisants Fonction rénale


La créatininémie moyenne postopératoire est supérieure à la créati-
Sujet obèse et (ou) hypertendu ninémie préopératoire : 130 µmol/L versus 100 µmol/L. Il existe un
risque théorique mais faible de détérioration de la fonction rénale à
Le rôle de l’obésité et d’un régime trop riche en graisse animale est long terme par hyper-filtration glomérulaire (syndrome de Brenner),
un des facteurs de risque du cancer du rein. qui n’est pas retrouvé en dehors de conditions médicales prédispo-
santes (diabète, hypertension).
Environnement professionnel
Le travail dans les hauts fourneaux ou les industries utilisant des fours Récidives locales après néphrectomie élargie
à coke, dans l’industrie sidérurgique sont considérés comme facteurs Le taux de récidives locales après néphrectomie élargie est de 3 %
favorisants. pour des tumeurs supérieures ou égales à pT2, avec un délai moyen
de survenue de 20 mois. Cette récidive locale doit être considérée
Maladies génétiques comme une métastase.
La maladie de von Hippel-Lindau, maladie à transmission autosomique
Survie après néphrectomie élargie
dominante, est caractérisée par une évolution tumorale polymorphe
et multifocale : hémangioblastomes du système nerveux central et La survie du carcinome à cellules rénales localisé après néphrectomie
de la rétine, kystes et cancers du rein, phéochromocytomes, kystes élargie dépend du stade pathologique local.
et tumeurs du pancréas. Elle est en rapport avec la perte du gène Les patients porteurs de tumeurs sans extension ganglionnaire ni
suppresseur VHL. Elle se caractérise par la présence de cancer du rein métastatique (N0 M0) ont une survie à 5 ans de 90 % pour les
tumeurs pT1a et T1b, 80 % pour les tumeurs pT1c, de 70 % pour les
dans 25 à 45 % des cas.
tumeurs pT3a, de 60 % pour les tumeurs pT3b-pT3c.
Dysplasie multikystique acquise du dialysé
Le cancer du rein a des particularités : un âge précoce de survenue
(45 ans), l’ancienneté de dialyse (80 % des cas après 3 ans), un rapport
entre les sexes à nette prédominance masculine (7/1).

Points Forts à retenir


2 / Classification TNM (Tumour node metastasis)
• Le cancer du rein représente 3 % de l’ensemble
Tumeur locale des cancers. Le mode de révélation des tumeurs
T1a 0 à 4 cm du rein est fortuit dans près de la moitié des cas
T1b 4 à 7 cm grâce à l’apport de l’échographie.
T2 > 7 cm La tomodensitométrie est l’examen de référence
T3a atteinte de la graisse pour le diagnostic et l’extension locorégionale.
T3b atteinte de la veine rénale Les différents facteurs pronostiques, cliniques
T3c atteinte de la surrénale et biologiques déterminent l’évolution des
Ganglions (N) tumeurs du rein. Les facteurs pronostiques
N0 pas de ganglions classiques (âge, état général, stade, grade,
N+ métastases ganglionnaires fonction rénale) représentent les bases
Nx statut ganglionnaire non connu des indications thérapeutiques.
• La néphrectomie élargie est le traitement
Métastases à distance de référence du cancer du rein localisé.
M0 pas de métastase La chirurgie conservatrice de nécessité
M+ métastases à distance, pulmonaires/osseuses/hépatiques a des indications reconnues dans les tumeurs
Mx statut métastatique non connu
bilatérales ou les tumeurs sur rein unique.
La découverte fortuite de tumeurs de petite
taille est un argument pour une chirurgie
3 / Résultats de la néphrectomie élargie conservatrice de principe même lorsque
le rein controlatéral est sain.
Mortalité • Au stade métastatique, l’immunothérapie
La mortalité périopératoire est inférieure à 3 %. Elle dépend de l’âge représente un aspect du traitement d’un cancer.
des patients et de la comorbidité. • L’apport de la biologie moléculaire a permis
Pour les patients sans facteur de risque, elle est inférieure à 1 %. de connaître certains gènes impliqués
dans le développement du cancer du rein.
Morbidité
Cet aspect fondamental, qui permet
La morbidité périopératoire est de 5 %. une approche diagnostique, est la base
Les principales complications sont représentées par les hématomes,
de nouveaux concepts thérapeutiques.
les lymphocèles et les plaies spléniques. La nécessité d’une ou de
plusieurs transfusions concerne moins de 10 % des patients.

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