Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
B 191
Oreillons
Épidémiologie, diagnostic, évolution, prévention
DR Philippe VIGNERON
Service de pédiatrie, centre hospitalier Bretagne-Sud, 56322 Lorient Cedex.
Points Forts à comprendre sécrétion dans le sérum d’IgA, IgM et IgG spécifiques.
Les premiers anticorps (IgA, IgM, anticorps anti-protéine
HN) apparaissent 5 à 7 j après le début de la phase
• Il s’agit d’une infection virale aiguë d’état, disparaissent en quelques semaines et ne sont pas
de l’enfant, contagieuse, habituellement protecteurs. Les IgM spécifiques peuvent persister 2 à
bénigne, qui se présente souvent 3 mois. Les IgG sont sécrétées dès le 15e j de l’infection,
sous la forme d’une parotidite bilatérale. persistent plusieurs années, et sont protectrices. En cas
• Dans 30 % des cas, la maladie est totalement d’atteinte méningée, il se produit une sécrétion intrathécale
asymptomatique. Dans 20 % des cas, elle survient d’IgM et IgG spécifiques, ainsi que d’interféron γ.
chez l’adulte, où elle donne une forme plus Enfin, il existe une activation de lymphocytes T cyto-
prolongée et plus souvent compliquée. toxiques, responsables d’une mémoire immunologique
• Les localisations extraparotidiennes vis-à-vis du virus.
des oreillons font toute la gravité de la maladie,
notamment la méningite, l’encéphalite
et l’orchite qui peuvent laisser des séquelles. Pathogénie
• Le traitement est préventif. La fréquence La contamination s’effectue par les gouttelettes de
des oreillons a beaucoup diminué avec les salive provenant d’un sujet infecté. Après avoir contami-
recommandations concernant la vaccination né le rhinopharynx et les ganglions de voisinage,
chez les nourrissons et les jeunes enfants. le virus passe dans le sang. Cette virémie est silencieuse
Le vaccin associé rougeole-oreillons-rubéole et dure 5 à 6 j. La symptomatologie des oreillons est
(ROR-Vax) a permis d’améliorer la couverture liée aux manifestations cliniques secondaires à la
vaccinale contre ce virus. diffusion du virus dans l’organisme, qui surviennent
après une incubation silencieuse de 3 semaines (18 à
21 j). Le malade est contagieux (par excrétion du virus
Épidémiologie dans la salive) 3 à 6 j avant l’apparition des premiers
symptômes et jusqu’à 9 j après. L’isolement des
Virus malades est inefficace (ceux-ci étant contagieux avant
l’apparition de la parotidite). Les organes les plus
Le virus des oreillons est un membre de la famille des fréquemment atteints sont les parotides, les méninges
paramyxoviridæ. C’est un virus à acide ribonucléique et les testicules.
(ARN) monocaténaire, enveloppé, de symétrie hélicoï- La parotidite se caractérise par un œdème interstitiel
dale, dont le diamètre moyen est 200 nm. Le génome diffus avec infiltrat de macrophages et lymphocytes et
viral est contenu dans une nucléocapside, elle-même sécrétion d’un exsudat sérofibrineux.
entourée de l’enveloppe virale. Celle-ci est constituée de La méningite ourlienne est secondaire à la contamination
trois feuillets lipidiques dans lesquels sont enchâssés des plexus choroïdes. À partir de cette localisation, le
essentiellement 5 glycoprotéines de structure. Elles ont virus colonise les cellules épendymaires tapissant les
une activité neuraminidase (protéines HN) ou une ventricules. Une atteinte encéphalique est possible.
activité favorisant la fusion cellulaire (protéines F). L’envahissement des testicules par le virus se traduit par
Il n’existe qu’un seul sérotype de virus ourlien. Ce un œdème interstitiel diffus avec infiltrat de lympho-
paramyxovirus est difficile à isoler. Il est très thermo- cytes, qui peut détruire l’épithélium germinal.
sensible. L’antigène S représente la protéine NP
(nucleocapsid-associated protein) et l’antigène V la pro- Épidémiologie clinique
téine HN. Ces 2 protéines sont des constituants de l’en-
veloppe virale. La transmission est directe, interhumaine. Il s’agit d’une
maladie strictement humaine, l’homme étant le seul
Réponse immune réservoir du virus des oreillons. Les épidémies surviennent
surtout dans les collectivités (écoles, casernes).
Le virus des oreillons confère une immunité solide et L’isolement des malades est inefficace. L’infection se
durable, humorale et cellulaire. L’infection induit la rencontre toute l’année, avec une prédominance à la fin
de l’hémadsorption. Il est retrouvé dans la salive et pic de survenue est 5 ans. Il existe une prédominance
l’oropharynx une semaine avant et jusqu’à 9 j après masculine (3 hommes pour 1 femme). Elle survient en
l’apparition des premiers symptômes. Il a aussi été isolé moyenne 2 jours après la parotidite. Mais, dans 50 % des
dans les urines et le liquide céphalo-rachidien (LCR) où méningites ourliennes, il n’y a pas de parotidite. Il s’agit
il est présent pendant une dizaine de jours. Enfin, la d’une méningite habituellement bien supportée. Des
polymerase chain reaction (PCR) détectant l’ARN viral céphalées, une fièvre, un état léthargique, des vomisse-
peut être utilisée pour mettre en évidence le génome ments sont possibles. Le liquide céphalo-rachidien est
viral dans un prélèvement. clair avec une pléiocytose (< 1 000/mm3) à prédominance
de lymphocytes (parfois panaché ou à prédominance de
2. Sérologie polynucléaires neutrophiles au début de la maladie),
La méthode de référence est la réaction de fixation du avec une glycorachie normale et une protéinorachie
complément pour les anticorps dirigés contre les anti- normale ou peu augmentée. Les IgM spécifiques puis les
gènes S et V (voir chapitre « Épidémiologie, le virus »). IgG sont augmentées dans le liquide céphalo-rachidien.
Les anticorps anti-S apparaissent 3 à 7 j après le début L’isolement du virus y est difficile. L’évolution spontanée
de la maladie et disparaissent en 6 mois. Les anticorps est rapidement favorable sans séquelles, mais les signes
anti-V s’élèvent 2 à 4 semaines après les premiers symp- cliniques de début sont d’autant plus intenses que l’âge
tômes et persistent des années. La technique la plus de survenue de la maladie est tardif.
spécifique et la plus sensible est le dosage des IgM et
IgG spécifiques du virus des oreillons par ELISA. Les 2. Encéphalite
anticorps neutralisants apparaissent après quelques Elle est beaucoup plus rare que la méningite. Il s’agit
semaines et persistent indéfiniment. Eux aussi sont spé- plus souvent d’une encéphalite post-infectieuse (par
cifiques de l’infection ourlienne. réaction immune au virus) que d’une encéphalite primi-
tive (où le virus se réplique dans les cellules cérébrales).
3. Autres méthodes diagnostiques non spécifiques Cette deuxième forme est beaucoup plus sévère et induit
• La numération formule sanguine peut être normale de graves séquelles. En moyenne, elle survient 7 à 9 j
ou montrer une discrète hyperlymphocytose, parfois une après l’apparition de la parotidite. L’encéphalite post-
neutropénie. Un purpura thrombopénique peut survenir infectieuse se manifeste par une fièvre souvent modérée,
au décours des oreillons. avec céphalées, vomissements et troubles de la conscience.
• L’élévation de l’amylasémie et de l’amylasurie est Dans 20 % des cas, il s’y associe des convulsions. Une
constante en cas de parotidite, et plus franche en cas de ataxie d’origine cérébelleuse n’est pas rare. D’autres
pancréatite associée. L’étude des iso-enzymes de l’amylase manifestations sont possibles : vertiges, troubles psy-
permet de préciser l’origine pancréatique de celle-ci. chiatriques. L’évolution est habituellement favorable.
• Une cytolyse hépatique, uniquement biologique, est L’étude du liquide céphalo-rachidien montre les mêmes
possible. anomalies que lors d’une méningite. L’électroencéphalo-
gramme (EEG) objective un tracé lent d’encéphalite,
sans signe spécifique.
Évolution 3. Autres anomalies neurologiques
Une myélite aiguë transverse, un syndrome de Guillain
Les complications sont soit immédiates, soit retardées, à et Barré (0,1 p. 1 000), une labyrinthite (0,1 p. 1 000)
type de séquelles. Les complications immédiates les peuvent survenir au décours des oreillons.
plus fréquentes sont la méningite et l’orchite. Les
séquelles sont dominées par la stérilité et la surdité. 4. Orchite
Grâce aux campagnes de vaccinations, les complications Il s’agit habituellement d’une orchi-épididymite. Le
ne se rencontrent plus que dans 1 % des cas d’oreillons. virus envahit directement le testicule. Le risque est
surtout important chez les jeunes adultes de 15 à 29 ans.
Elle est rare avant la puberté. Elle se rencontre dans
Parotidite isolée 2 cas d’oreillons pour 1 000 après 12 ans mais chez 20 à
L’évolution de la forme classique avec atteinte paroti- 30 % des garçons atteints d’oreillons après leur puberté.
dienne isolée est en règle simple, avec régression pro- L’atteinte est unilatérale dans 75 % des cas. Les symp-
gressive et guérison spontanée et définitive en 4 à 10 j. tômes apparaissent 4 à 8 j après la parotidite, à type
d’augmentation du volume testiculaire très douloureuse
avec fièvre, malaise, vomissements, douleurs hypogas-
Complications immédiates triques. L’épididyme est souvent palpé comme un gros
cordon sensible. Les signes persistent 3 à 7 j. La douleur
1. Méningite peut être plus prolongée. L’orchite nécessite une immo-
Il s’agit de la localisation extrasalivaire la plus fréquente. bilisation des bourses associée à des antalgiques forts.
Elle représente environ 8 % des méningites virales de Un traitement corticoïde est parfois proposé sans que
l’enfant. Elle complique 3 cas d’oreillons pour 1 000. Le son efficacité n’ait jamais été prouvée. Il s’agit de la