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Jacques Morel

Des commandos d’élite français,


prisonniers du FPr !
Après Bisesero où les officiers français, ayant voulu considérer que
les malheureux survivants tutsi étaient des rebelles infiltrés, sont pris
en flagrant délit de complicité avec les tueurs hutu, le commande-
ment de Turquoise, obligé d’admettre – et se gardant de l’ébruiter –
qu’il n’y avait pas d’offensive du FPR vers Kibuye, réalise soudain
que celui-ci est en train d’investir Butare. Il déclenche une opération
vers cette ville. Comme d’habitude, l’objectif déclaré aux médias est
de sauver des orphelins, des prêtres et des chères sœurs. L’objectif
réel est de contenir l’offensive du FPR pour maintenir à Butare l’ar-
mée gouvernementale, l’administration et, bien sûr, les milices, donc
d’inclure la région de Butare dans la zone Turquoise. Il est aussi de
reconnaître la route vers Gitarama et Kigali. Mais les troupes d’élite
françaises vont avoir une mauvaise surprise. Une dizaine de soldats
du 1er RPIMa tombent dans une embuscade et sont faits prisonniers
par l’APR. Ils seront libérés après une négociation où les objectifs –
non avoués – de Turquoise devront être rabaissés. Les troupes du
FPR sont en train d’investir Butare et Kigali mais Ruhengeri, Gisenyi
devront être aussi abandonnées et l’opération Turquoise confinée
dans un réduit au sud-ouest.

1. Les missions de reconnaissance à Butare


L’arrivée officielle des militaires français à Butare, pour une incursion
de quelques heures se fait le 1er juillet, mais cela ne veut pas dire qu’il n’y
sont pas venus avant, l’armée française ne faisant pas, bien sûr, la publicité
de toutes ses opérations. Le 27 juin, les Français arrivent officiellement à
Gikongoro1. Michel Peyrard, journaliste à Paris-Match, quitte Cyangugu le

La Nuit RwaNdaise N°3 1


24 juin en compagnie d’une patrouille commandée par deux lieutenants-
colonels :
Le lendemain [24 juin], à l’aube, sur les indications de Priscille, nous décou-
vrons, en compagnie d’une patrouille commandée par les lieutenants-colo-
nels Collin et Jacque, douze sœurs de l’ordre de saint-François réfugiées dans
un couvent, à une douzaine de kilomètres du camp [de Nyarushishi]. […]
La guerre. elle est là, toute proche, 80 kilomètres tout au plus. Montant vers
le front, nous dépassons des bataillons frais composés de toutes jeunes
recrues qui se dirigent à pied vers la zone des combats.
Butare, la fringante préfecture du sud, s’est transformée en ville de garnison.
atmosphère de débâcle. des soldats épuisés remontent à contrecœur vers des
positions abandonnées, à bord de Jeeps souillées de sang et de boue. a la ter-
rasse de l’hôtel ibis, le colonel Munyengango commandant le secteur, écluse
quelques bières en compagnie d’officiers désœuvrés. Le directeur de la sûreté
extérieure de l’État qui se flatte d’avoir rencontré en novembre dernier à
Paris son homologue de la dgse ne se fait plus d’illusions : « Nous perdons du
terrain. Je ne peux pas vous le cacher. Frappés par l’embargo, nous sommes à court de
munitions. Nous ne pouvons pas contre-attaquer. Nous ne cessons de reculer. Mais
nous ne nous battons pas seulement contre le FPr, nous sommes en guerre contre
l’Ouganda, et l’armée ougandaise est puissante. » incorrigible, le patron des ser-
vices secrets rwandais n’entrevoit qu’une seule issue. « Si, par le plus grand
hasard, Museweni, le président ougandais, disparaissait politiquement ou physique-
2
ment, alors la guerre s’éteindrait d’elle-même. »

Ces deux lieutenants-colonels Collin et Jacque viennent du camp de


Nyarushishi. ils sont donc du 1er RPiMa3. Nous apprenons plus loin que le
lieutenant-colonel Collin s’appelle en réalité Hervé Charpentier, il est l’ad-
joint du colonel tauzin alias thibaut, et nous présumons fort que le lieute-
nant-colonel Jacque s’appelle Étienne Joubert, officier de renseignement
du 1er RPiMa. ils visitent une paroisse où a eu lieu un massacre puis par-
tent vers Butare à 80 km de là. il est donc fort possible que Peyrard et le
groupe de reconnaissance commandé par les lieutenants-colonels
Charpentier et Joubert soient arrivés à Butare le soir du 24 juin, sinon le
25. ils prennent contact avec l’état-major des FaR qui se trouve à l’hôtel
ibis. Le préfet alphonse Nteziryayo y est installé, ainsi que le président des
interahamwe, Robert Kajuga4, ils y rencontrent le colonel Munyengango,
commandant le secteur5 et le directeur de la sûreté extérieure de l’État qui
serait, sauf erreur, le lieutenant-colonel Laurent Rutayisire6.
L’autre reportage à Butare, publié par stephen smith dans Libération le
28 juin, relate des faits qui datent des 26 et 27 juin7. smith ne parle pas de
militaires français, mais en général les journalistes suivent ces derniers8.

2 La Nuit RwaNdaise N°3 • JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS...


Nous concluons de ces deux reportages qu’il y a eu des reconnaissances de
militaires français de l’opération turquoise à Butare au plus tôt le 24 juin
au soir et au plus tard le 26 au soir.
Ceci n’exclut pas la présence d’autres militaires français. en particulier
nous savons qu’alain Bossac, ancien mécanicien de l’armée de l’air qui
tenait un garage automobile à Butare et qui a organisé comme « consul» le
départ des ressortissants français début avril9 est resté pendant tout le géno-
cide et n’a été évacué qu’à la veille de la prise de Butare par le FPR10. il fai-
sait fort probablement du renseignement. tenu compte de ce qui s’est passé
à Butare, le fait que l’armée française – ou un service secret français – dis-
posait d’un agent de renseignement à Butare n’est pas anodin. alors que,
du 7 au 15 avril, la vague de massacres se déploie dans tout le pays, sauf
dans le nord-est où le FPR progresse, la région de Butare reste à l’abri
jusqu’au 19 avril quand le préfet de Butare est destitué par le président inté-
rimaire théodore sindikubwabo. Les tutsi, nombreux dans la région, fai-
sant confiance à leur préfet, n’avaient pas fui au Burundi. Ce fut alors un
carnage. Malheureusement pour la France, il y a des preuves du soutien que
le président de la République, François Mitterrand, a apporté à théodore
sindikubwabo, le président intérimaire qui a déclenché ces massacres11 et
des indices de présence de Français qui se battaient au côté des FaR à la
mi-mai dans la région de Butare.12

2. L’arrivée des Français à Butare


sous Les vivas des assassins
alors qu’ils déclarent vouloir éviter toute confrontation, les Français
arrivent à Butare au moment où le FPR est en passe d’investir la ville.
N’était-ce pas pour tenter de l’en empêcher ? Le Premier ministre, edouard
Balladur qui passait jusqu’alors pour être opposé à toute action « au cœur
même du territoire du rwanda »13, donne son accord à la demande du minis-
tre de la défense, François Léotard, et du représentant d’alain Juppé. il
autorise le 30 juin à 19 heures « une opération de sauvetage d’une quarantaine
de religieuses à Butare, principale ville du Sud du rwanda, à la demande de mon-
seigneur Lustiger. »14 Ces religieuses étaient-elles particulièrement exposées ?
L’opération turquoise prendrait-elle de plus en plus l’aspect d’une croisade
dirigée par le Vatican ? Bernard Lugan fournit d’autres justifications. des
oNG auraient demandé à l’armée française d’intervenir à Butare en raison
d’un état d’urgence humanitaire. Le général Lafourcade, qui paraît avoir à
partir de ce moment-là autorité sur le Cos, explique à Bernard Lugan :

JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS... • La Nuit RwaNdaise N°3 3


« Nous disposons de peu de moyens, nous sommes loin de nos bases, néanmoins, à la
demande insistante d’ONG je décide de déclencher sur Butare une opération risquée
15
d’évacuation de type “va-et-vient”. »
Le colonel Rosier demande au général Lafourcade l’autorisation d’y faire
une reconnaissance et d’y installer l’eMMiR. L’installation de l’eMMiR
dans ces conditions paraît incongrue.16 et qu’est-ce que Monseigneur
Lustiger a à faire avec l’eMMiR ? Le, ou plutôt les prétextes humanitaires
sont utilisés dans cette opération au-delà du vraisemblable.
Vendredi 1er juillet 1994, précédé d’un élément motorisé des Cos, un
avion C-160 atterrit en fin d’après-midi à Butare. il est suivi d’hélicoptères.
Le transall (C-160) du Cos fait un « poser d’assaut à Butare avec des com-
mandos de marine à bord », écrit Éric Micheletti.17
Bernard Lugan, informé par l’état-major, révèle que les commandos de
l’air du lieutenant-colonel duval, précédemment à Kibuye, participent à
l’opération :
Le 1er juillet le détachement tauzin fait mouvement par voie routière. duval18
est héliporté sur la « Plaine » , prairie servant d’« aérodrome » à l’entrée nord
de Butare, afin de la sécuriser. Bientôt le transall qui transporte les médecins
de l’eMMiR y atterrit. La situation est tendue en ville où les massacres des
jours précédents ont été intenses. À la périphérie l’aPR19 commence l’encer-
clement de la cité.20
alors que le FPR se trouve à 16 km de Butare, le préfet de Butare, le lieu-
tenant-colonel alphonse Nteziryayo, organise l’accueil des Français. Les
véhicules officiels, les camions militaires et les barrières gardées par les
milices hutu arborent tous des drapeaux français et des pancartes “Vive la
France”21. il appelle les Français à venir pour stopper l’avance du FPR. Les
Français doivent venir ici pour convaincre le FPR d’arrêter son avance qui
repousse devant lui les civils, déclare le préfet de Butare. il ajoute que le FPR
utilise des civils comme bouclier humain. « Si nous nous défendons contre le
FPr, nous devons tirer sur des civils que les troupes du FPr poussent devant elles ».22
3. L’accrochage du 1er juiLLet
La reconnaissance « humanitaire » sur Butare va tourner court. Le rap-
port du colonel Rosier confirme les détails précédents et évoque un repli
précipité après un « contact » avec le FPR :
L’implantation de l’eMMiR ne convenant pas à cet endroit [Gikongoro], une
reconnaissance vers ButaRe était décidée pour le premier juillet. Précédé
par un élément motorisé qui était chargé de faire le bilan des personnes à éva-
cuer, le C160 Cos atterrissait en fin d’après-midi sur cette petite plate-forme

4 La Nuit RwaNdaise N°3 • JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS...


avec quelques médecins de l’eMMiR. Le dispositif était ultérieurement ren-
forcé d’un élément héliporté, l’ensemble de l’opération ayant été déclenchée
après une reconnaissance à vue par HM. Le contact rapidement pris avec le
FPR empêchait d’extraire des religieux retenus à saVe. des religieuses de
ButaRe étaient évacuées le soir même par C160 alors que le reste du dis-
positif décrochait dans la nuit.23
Nous n’en saurons pas plus sur la nature de ce contact. il dût être rude.
Mais justifié par le saint objectif d’extraire des religieux, il sera inscrit au
martyrologue chrétien. alors que les Français prévoyaient sans doute de res-
ter à Butare, l’opération, qui avait tout d’un caractère offensif, avec « posé
d’assaut », se transforme brutalement en opération d’évacuation de reli-
gieuses. La France retrouve là, grâce à François Mitterrand et Édouard
Balladur, son rang de fille aînée de l’Église. Mais probablement le transall
au retour n’a-t-il pas transporté que des religieuses ! il a permis quelques
extractions d’urgence, de religieux très spéciaux... Le colonel Bagosora
aurait été ainsi évacué le 2 juillet, si l’on en croit le journaliste sam Kiley24
mais nous n’en avons pas d’autre preuve.25
allison des Forges relate la reconnaissance du 1er juillet mais ne parle
pas de cet incident :
Le mercredi 29 juin, le FPR était suffisamment proche de la ville [Butare]
pour que le bruit des combats y soit audible. deux jours plus tard, le 1er juil-
let, une petite équipe de reconnaissance française entra dans Butare et éva-
cua, le matin suivant, un certain nombre de personnes par avion et par héli-
coptère. sachant que de nombreux soldats français se trouvaient à
Gikongoro, soit à une trentaine de kilomètres, les politiciens hutu et les FaR
s’accrochaient à l’espoir qu’ils viendraient les secourir. Le préfet Nteziryayo
dit à un journaliste : « Les Français doivent venir ici pour convaincre le FPr de ne
pas avancer en poussant les civils devant lui.26 »
andré Guichaoua qui consacre pourtant toute une étude sur le génocide
à Butare, ne parle pas de l’arrivée des Français.

4. des cos prisonniers du Fpr

4.1 L’embuscade de save le 1er juillet 1994


Le général dallaire retient dans son livre deux incidents entre les
Français et le FPR. un groupe des Cos a été surpris par le FPR à Butare
et des militaires français auraient été faits prisonniers. dallaire écrit : « des
forces spéciales avaient dû négocier la libération des soldats. » Le FPR les aurait
libérés rapidement :

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deux incidents troublants étaient déjà survenus entre les Français et le FPR.
Le FPR avait tendu une embuscade à au moins dix soldats de l’opération
turquoise, qui avaient pénétré loin à l’intérieur de la préfecture de Butare.
Personne n’avait été blessé, mais cet incident avait porté atteinte à la fierté
des Français. des forces spéciales avaient dû négocier la libération des sol-
dats. Le second incident avait eu lieu sur la route de Kibuye à Gikongoro27.
des coups de feu avaient été tirés, et deux soldats français en avaient
réchappé grâce à leur gilet pare-balles. Les deux patrouilles s’étaient fait sur-
prendre par le FPR et en étaient sorties humiliées. Cela ne dissuada aucune-
ment les Français de vouloir appuyer leurs anciens collègues et de remettre le
FPR à sa place.28
Ce passage est inclus entre deux événements datés du 26 juin. Comme
le livre de dallaire suit l’ordre chronologique, nous sommes portés à croire
que les deux incidents relatés ici sont du 26 juin.
Le journaliste Philip Gourevitch dans un entretien avec Paul Kagame
relate un autre incident :
Kagame se rappelait un autre incident29, au cours duquel ses hommes avaient
arrêté des soldats français. des négociations très tendues s’étaient engagées
par le biais du général dallaire. « Les Français ont menacé d’intervenir avec des
hélicoptères et de bombarder nos forces et nos positions. Je leur ai répondu qu’à mon
avis il valait mieux discuter et résoudre cette affaire pacifiquement, mais que s’ils vou-
laient se battre, je n’y voyais aucun inconvénient. » en fin de compte, les Français
supplièrent qu’on leur rendit leurs hommes et il les laissa partir.30
La date n’étant pas indiquée il pourrait s’agir de l’incident du 15 juillet,
au nord de la zone humanitaire, au col de Ndaba ou plus au nord vers
Rambura.
L’existence d’un incident le 1er juillet est attestée par le colonel Rosier
qui note dans son rapport que, après que le transall des Cos ait atterri en
fin d’après-midi à Butare, « le contact rapidement pris avec le FPr empêchait
d’extraire des religieux retenus à SaVe. » et sans fournir d’explications il ajoute
que « le reste du dispositif décrochait dans la nuit ».31
Bernard Lugan relate un incident entre Français et FPR le 1er juillet :
Le soir [du 1er juillet], un prêtre demande que les troupes françaises aillent à
save, grosse mission située à quelques kilomètres au nord de la ville pour en
évacuer des religieuses et des enfants.32 Le colonel tauzin envoie alors une
patrouille légère composée de deux jeeps P4 commandée par son adjoint le
lieutenant-colonel Charpentier. La nuit est particulièrement noire et les deux
véhicules suivent la voiture du prêtre quand, avant d’atteindre save, l’aPR
ouvre le feu sur le véhicule civil. Les consignes étant d’éviter tout contact, le
détachement fait demi-tour. en manœuvrant, une P4 glisse dans le fossé. elle

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en ressort rapidement mais le lieutenant-colonel Charpentier est blessé à la
jambe et il devra être évacué.33
Raphaël Kirenga, un interahamwe qui était sentinelle au home icumbi de
l’évêché de Butare rapporte devant la commission Mucyo :
Le 1/07/1994, le soir vers 17 h 30, j’ai vu encore une fois des militaires fran-
çais dans des jeeps à l’hôtel Faucon. Je crois que c’était même un vendredi.
Nous avions une barrière devant le motel ineza, à 80 mètres de l’hôtel Faucon.
Les soldats du FPR avançaient et combattaient à Mwurire et à save. À cause
de cet affrontement, il y avait beaucoup de voitures des gens qui fuyaient. Les
militaires rwandais avec les interahamwe, moi-même j’étais un interahamwe
et j’avais quitté notre barrière pour donner du renfort, nous nous sommes mis
à empêcher la population à fuir. Nous les avions arrêtées à la barrière devant
l’hôtel Faucon. Nous étions armés, certains de gourdins, d’autres de lances, et
d’autres encore de fusils. entre temps, les militaires français sont arrivés et ont
pris leurs positions à côté des arbres le long de la route devant l’hôtel ibis et
l’hôtel Faucon, de peur d’être attaqués ou agressés.
Vers 19 h 00, les véhicules arrêtés étaient devenus si nombreux qu’ils arri-
vaient jusqu’à l’université nationale du Rwanda. Les militaires ont ouvert la
barrière laissant les véhicules passer en prenant la direction de Gikongoro, le
seul chemin libre. Les Français, eux, étaient en position de tir sur un seul
côté des deux hôtels, observant ce que nous, soldats rwandais et
interahamwe, faisions pendant plus ou moins 30 minutes sans intervenir
avant d’aller chez Mgr Gahamanyi. Je suis retourné à la barrière devant le
motel ineza. en fait, c’est nous qui gardions également l’évêché. il y avait à
peu près 40 mètres entre celui-ci et notre barrière, et j’y faisais souvent des
rondes. Mis à part les interahamwe, l’évêché était aussi gardé par les mili-
taires et d’autres personnes qui étaient chargées de la défense civile qui
étaient armées de fusils.
alors que j’étais à la barrière qui descendait à l’hôtel Faucon devant le motel
ineza, j’ai appris qu’une personne de couleur blanche du nom de Marie
Hutler avait été arrêtée par des soldats du FPR à save le 1/7/1994 et que
Mgr Gahamanyi en a informé les soldats français qui avaient décidé d’aller la
chercher. C’était autour de 19 h 30, 20 h 00. ils ont pris leurs véhicules, sont
passés par l’hôtel Faucon et ont pris la direction du Groupe scolaire vers
Rwasave. Nous les voyions par cette barrière monter vers save, leurs voitures
étaient reconnaissables par leurs phares jaune clair. arrivés au niveau de
Rwagatoki, les soldats du FPR ont tiré sur eux, ils ont rebroussé le chemin et
sont revenus dire à Mgr Gahamanyi qu’il leur a été impossible d’arriver à
save et donc, de ramener Hutler, parce qu’ils n’étaient pas suffisamment
armés pour combattre les inkotanyi. Cette nuit-là, il est venu un grand avion
à Butare qui les a embarqués. ils venaient de se rendre compte qu’ils ne pou-
vaient pas garder la ville de Butare. ils sont retournés à Gikongoro, mais Mgr
Gahamanyi est resté chez lui.34

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Le témoignage de Raphaël Kirenga semble fiable. Marie Hutler, de natio-
nalité allemande travaille à l’évêché de Butare, elle a fait une déposition au
parquet de Bruxelles en septembre 199535. Raphaël Kirenga raconte plus
loin comment il est parti à Gikongoro le 3 juillet. Là, il dit qu’il a été arrêté
avec trois autres interahamwe au camp de Murambi par les Français qui les
ont torturés puis emmenés en hélicoptères et jetés dans la nature. or nous
avons des images télévisées d’un tel épisode qui sont passées sur France 2
le 4 juillet. Ce témoignage étant admis comme fiable, il lève le doute sur la
date de l’embuscade. il confirme ce que disent Rosier et Lugan. Le but de
la reconnaissance, évacuer Marie Hutler ou des religieuses à save, a dû être
réel mais dans le contexte, le but essentiel était d’aller au contact du FPR
en profitant de la nuit, quitte à se faire précéder par un prêtre, assuré d’être
accueilli illico en Paradis en cas de grabuge. L’objectif d’aller reconnaître les
positions du FPR est clair. d’une part Kirenga dit « les soldats du FPr avan-
çaient et combattaient à Mwurire et à Save », d’autre part le reportage diffusé
sur France 2 le 2 juillet contient ce dialogue :
[un para français à pied aborde une voiture avec deux militaires rwandais]
Journaliste :
Ils s’informent auprès des militaires rwandais.
Le Français :
– Les combats sont où en ce moment ? Les combats sont où ?
Le conducteur :
– ils se trouvent entre... à six kilomètres d’ici.
Le Français :
– à six kilomètres d’ici ? À Save ?
Le conducteur :
– À Save ? Oui.36
Notons que le témoin ne parle pas de blessés ni de prisonniers. il dit :
« ils ont rebroussé le chemin et sont revenus dire à Mgr Gahamanyi qu’il leur a été
impossible d’arriver à Save et donc, de ramener Hutler, parce qu’ils n’étaient pas suf-
fisamment armés pour combattre les Inkotanyi. » L’explication de l’insuffisance
d’armement fait sourire. Paris, qui veut éviter les incidents avec l’aPR, fait
interrompre cette reconnaissance qui évacue de Butare dans la nuit, le 2
juillet à 1 h 30. Le colonel Rosier raconte :
Je suis à l’extrême limite autorisée, et même au delà. Je replie donc le dispo-
sitif dans la nuit, avec une cinquantaine de religieuses dans le transall.37
Le journal Libération confirme la blessure du lieutenant-colonel Hervé
Charpentier :

8 La Nuit RwaNdaise N°3 • JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS...


Renseignement pris, son adjoint [du colonel tauzin alias thibaut] au
Rwanda, le lieutenant-colonel Colin, blessé à la jambe dans un « accident de
voiture », s’appelle en fait Hervé Charpentier. Pourquoi ce jeu de cache-cache
identitaire dans une opération qui, selon le gouvernement, relève de « l’hu-
manitaire pur »38 ?
Charpentier aurait été évacué, selon Péan qui mélange plusieurs accrochages :
or, il n’y a jamais eu de véritable affrontement avec le FPR à Gikongoro,
mais un simple accrochage le 3 juillet. Le groupe tauzin a été rafalé près de
Gikongoro, ce qui a provoqué une réplique des hommes de tauzin. il n’y a
pas eu de morts français, mais un blessé au genou : dans la précipitation, une
jeep s’est retournée sur le lieutenant-colonel Charpentier. Le blessé a été
transporté par hélicoptère vers le Zaïre-Congo avant d’être rapatrié à
Bangui.39
Mel McNulty précise que 18 militaires français ont été faits prisonniers
par le FPR lors de cet accrochage du 1er juillet à Butare :
there are reports that the French and the RPF clashed in early July as the
RPF neared Butare. eighteen French soldiers were said to have been taken
captive by the RPF, and after negociations between the RPF and Paris they
were released the following day. there were no publicity.40
Remarquons que les deux P4 dont parle Lugan ne peuvent contenir que
huit personnes. Comme les Français sont prévenus que le FPR n’est pas
loin il est fort possible que cette mission comptait d’autres véhicules. Mais
il est possible que Mel McNulty fasse la confusion entre cet incident début
juillet près de Butare avec l’accrochage du 15 juillet où 18 soldats français
sont faits prisonniers par le FPR.
Plus intéressant est ce que rapporte Vénuste Nshimiyimana qui était
attaché de presse à la MiNuaR. il parle d’une dizaine de prisonniers et
souligne que pour obtenir leur libération, la France dut revoir à la baisse
ses objectifs :
des sources dignes de foi affirment également que la France avait voulu
empêcher les combattants du FPR de prendre Kigali, ce qu’ils ne purent réa-
liser, une dizaine de militaires français venant d’être capturés par les rebelles.
La libération des otages fut conditionnée par l’abandon des ambitions de la
France à défendre le régime en place. La France s’est donc repliée dans la
zone turquoise et un diplomate a été envoyé auprès de M. Museveni, prési-
dent de l’ouganda.41
quelle est la source d’information de Nshimiyimana ? La MiNuaR pro-
bablement. en effet, suite à cet incident les Français se sont décidés à reve-
nir à Butare mais en négociant un cessez-le-feu via le général dallaire. Celui-

JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS... • La Nuit RwaNdaise N°3 9


ci est prévu entre 12 et 18 heures dimanche 3 juillet. il est probable que
dallaire a servi aussi d’intermédiaire pour négocier dans un premier temps
la libération des Cos prisonniers, samedi 2 au matin. C’est ensuite que
l’envoi d’une mission depuis Paris aurait été décidé. À l’appui de cette thèse
le lecteur notera que la relation que font dallaire et Nshimiyimana est
proche. Les Français s’étaient avancés loin à l’intérieur de la préfecture de
Butare. il y a eu plus de dix prisonniers. il y a eu une négociation entre la
France et le FPR pour les libérer.

4.2 prunier et rufin ont-ils négocié la libération des cos ?


Gérard Prunier et Jean-Christophe Rufin, tous les deux conseillers au
ministère de la défense, ont-ils été envoyés auprès de Paul Kagame pour
négocier la libération de ces prisonniers ? Ce n’est pas la raison qu’ils ont
invoqué. Mais celle qu’ils invoquent semble peu crédible. Kagame avait-il
besoin d’un téléphone satellite ? s’il n’avait pas le numéro de téléphone de
Lafourcade, celui-ci pouvait lui être communiqué via la MiNuaR. Le géné-
ral dallaire est allé rencontrer Lafourcade à Goma le 30 juin et ils ont
échangé des officiers de liaison.
Jean-Christophe Rufin, médecin, vice-président de Médecins sans fron-
tières de 1991 à 1993 est, en 1986, conseiller du secrétaire d’État aux droits
de l’homme, Claude Malhuret. en 1993, il entre pour deux ans au cabinet
de François Léotard, ministre de la défense, comme conseiller spécialisé
dans la réflexion stratégique sur les relations Nord-sud. il se présente
comme spécialiste des libérations d’otages et ne fait pas mystère de ses rela-
tions avec les services secrets. il aurait été envoyé en Bosnie pour obtenir la
libération, le 18 mai 1994, des onze membres de l’oNG Première urgence,
pris en otages par les serbes de Bosnie le 8 avril 199442. d’après ses déclara-
tions à la CeC, il a été appelé un dimanche, le 3 juillet 1994, et expédié en
toute hâte au Rwanda :
Le général Mercier, chef du cabinet militaire du ministre de la défense, m’a
appelé – c’était un dimanche. tout s’est mis en place tout seul. Le jour où il
y a eu des coups de feu, des échauffourées avec le FPR au moment du
déploiement de turquoise, un certain nombre de gens se sont avisés … Je ne
peux pas vous dire qui exactement, parce que je ne sais pas exactement où
s’est prise la décision, mais je sais qui m’en a parlé. C’était donc le général
Mercier, qui était sans doute en bout de la chaîne de décision. il m’a dit :
“Écoutez, on est très embêtés. Tout le monde est prévenu de cette opération
[turquoise], mais en face ils ne le sont pas. donc il faut quelqu’un qui soit capable
d’aller là-bas.” Bon, c’est ce que j’ai fait.43

10 La Nuit RwaNdaise N°3 • JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS...


Jean-Christophe Rufin parle de coups de feu, et d’échauffourées entre les
soldats français et le FPR. il ne dit pas qu’il est allé là-bas négocier une libé-
ration de prisonniers. Mais pourquoi donc le général Mercier avoue-t-il
qu’ils sont très embêtés ?
Rufin dit plus loin qu’il était accompagné de Gérard Prunier, bon
connaisseur de l’ouganda et du FPR44. Prunier, lui, écrit que cette rencon-
tre avec Kagame avait pour but de lui remettre un « téléphone rouge.»45 il
ne parle pas de la présence de Rufin et ce dernier ne parle pas de téléphone
rouge mais raconte qu’il a déployé son téléphone satelitte chez Kagame,
qu’il a appelé Lafourcade et lui a passé Kagame, ceci précise-t-il, le 4 juillet.
Rufin souligne que l’opération devait être secrète : « c’était une opération
défense –- Premier ministre. c’étaient les seules administrations, à ma connais-
sance, qui étaient au courant de notre mission.46 »
Le jour de la prise de Kigali, j’ai rencontré Kagame, avec qui je me suis tout
de suite très bien entendu : il y a eu une espèce de… je ne sais pas, une espèce
de contact très personnel qui s’est très bien passé. donc là, il y a eu une réu-
nion qui a duré 3 heures. il ne comprenait rien à ce qui se passait. il disait [à
propos de la ZHs] : “Qu’est-ce que c’est ? c’est le terrain que vous voulez réserver
pour l’ancien régime ? c’est quoi, c’est la zone au-delà de laquelle vous ne voulez pas
qu’on aille ? Qu’est-ce que c’est que ce truc ?” il ne comprenait pas… »47
Kigali est prise le 4 juillet. donc ce 4 juillet, Rufin a négocié pendant
trois heures avec Kagame. Celui-ci s’étonne devant Rufin à propos de l’ar-
mement lourd emmené par les Français pour leur opération humanitaire :
Paul Kagame m’a posé des questions : “Mais ils ont un armement très lourd, tous
ces gars-là ?” J’ai dit : “Oui.” de bonne foi. 48
Rufin doit expliquer à Kagame que tout cet armement lourd est destiné
à une opération humanitaire :
Kagame disait : “Pourquoi vous opposez-vous à notre progression puisque nous allons
les libérer ?” Je répondais que notre but n’était pas d’arrêter leur offensive,
mais simplement de sécuriser, d’un point de vue humanitaire, une certaine
zone sans la soustraire à leur autorité. Puisque c’était la consigne qui nous
était donnée. Parce que la consigne, l’idée, n’était pas de faire de cette zone
une enclave de statut politique spécifique. L’idée, c’était : “Vous pouvez y venir,
mais on entre pour protéger les gens qui sont dedans.” C’était ça la logique.49
Rufin se targue d’avoir fait baisser la tension, d’avoir fait causer entre eux,
par son téléphone satellite « deux personnes qui auraient pu être des belligérants » :
Je suis venu voir Kagame. Je lui ai demandé de discuter de tout ça. Je lui ai
demandé si je pouvais déployer une antenne pour appeler les gens de

JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS... • La Nuit RwaNdaise N°3 11


turquoise. et j’ai appelé le général Lafourcade depuis la cour de Kagame.
tous ceux qui ont voulu me donner des leçons dans cette salle devraient se
dire que, à mon niveau, j’ai fait ce que j’ai pu. et j’ai fait certainement beau-
coup pour faire baisser une certaine forme de tension. tout à coup, il y a eu
un lien entre ce que nous faisions et des gens qui étaient en face. des gens
qui étaient tenus, d’une certaine manière, à l’écart de l’information. J’ai
passé l’appareil entre deux personnes qui auraient pu être des belligérants, il
y a eu un lien entre les deux, et je suis très fier de ça. C’était le 4 juillet au
soir…Je suis très fier de ça, et quiconque me le reprocherait me plongerait
dans une grande perplexité. qu’est-ce qu’il fallait faire ? il fallait les dresser
les uns contre les autres ? Le lendemain, j’ai eu un nouveau rendez-vous avec
Kagame, très chaleureux. enfin, quelque chose de très bon… J’ai beaucoup
apprécié cet homme. Cet homme m’a paru, à la fois, tout à fait clairvoyant…
calme. Bon, on s’est bien entendu. Je l’ai rencontré près de Byumba. […]50
si tension il y avait et que Rufin se targue d’avoir réussi sa mission de
médiation ce n’est peut-être pas seulement parce que ce brillant humani-
taire aime s’envoyer des fleurs. d’ailleurs il se congratule un peu vite car il
y a eu plusieurs affrontements durant turquoise entre les soldats de
Lafourcade et ceux de Kagame. Mais pour l’instant, Rufin a peut-être bien
des raisons légitimes de se féliciter. aurait-il réussi une négociation diffi-
cile ? Nous apprenons que celle-ci s’est déroulée « près de Byumba » proba-
blement à Mulindi, quartier général de Kagame.
La négociation se poursuit le lendemain mardi 5 juillet. Nous décou-
vrons, grâce à notre homme de lettre, que Kagame manie excellement la
langue française. il prie Rufin d’aller dire à ceux qui ne jouent pas le jeu,
« qu’ils déconnent »51 :
il m’a engueulé, en me disant : « J’ai discuté avec vous toute la soirée d’hier, vous
avez vu la déclaration qui a été faite par l’un de vos gars ? » L’un des officiers de
turquoise avait traité les tutsi, le FPR, de Khmers noirs. […] « Vous vous fou-
tez de ma gueule ! » et j’ai bien compris qu’à ce moment-là, il y avait un cer-
tain nombre de cisaillements. Je voyais bien, je sentais bien ce qui se passait :
on a mis en place cette opération avec des gens qui probablement ne jouaient
pas le jeu, ou jouaient à un autre jeu, c’est possible. il se trouve que le res-
ponsable de ça a été viré. J’ai dit à Kagame : « Qu’est-ce qu’on fait ? On coupe les
relations, on s’arrête ? » il dit : « Non, pas du tout, je vous crois, mais dites leur quand
même qu’ils déconnent.52»
il s’agit là des déclarations menaçantes pour le FPR proférées par le colo-
nel tauzin à Gikongoro la veille. Le lecteur pourra juger par ce compte
rendu, si Kagame est bien l’homme sanguinaire décrié par d’aucun. Rufin
en donne un autre exemple. deux journalistes français, isabelle staes et
José Nicolas, ont été grièvement blessés par des soldats du FPR près de

12 La Nuit RwaNdaise N°3 • JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS...


Butare lundi 4 juillet :
et puis il me dit : « Je voudrais vous demander quelque chose. Voilà, je suis très
embêté, vous êtes médecin. Il y a des journalistes français qui ont été pris dans une
embuscade. Nos gens, nos troupes, leur ont tiré dessus. ce sont des journalistes de
France 2, la fille est très gravement blessée. Ils sont dans un petit camion, ils vont arri-
ver à Kigali. Personne ne sait où ils sont, mais ils sont chez nous. est-ce que vous vou-
lez bien les voir ? » alors, mettez vous à ma place. Je suis en mission, on me
demande de pas me montrer, et en même temps on me dit : « Il y a deux per-
sonnes qui ont besoin de toi. » J’y suis allé avec Kagame. C’était près du stade.
J’ai accueilli cette fille qui était très gravement touchée. Le caméraman avait
une balle dans le genou. il y avait des journalistes qui étaient-là. Je leur ai dit
de ne pas en parler. Mais le quai d’orsay l’a su et on m’a demandé de ren-
trer. illustration du fait qu’il y avait double commande : « Quoi ? Vous avez
envoyé quelqu’un sur place ? On n’était pas au courant… » Mais moi, j’avais fait
mon boulot.53
C’est ainsi qu’en raison du souci de Kagame pour des victimes inno-
centes, alain Juppé va apprendre que cette mission diplomatique a été déci-
dée à son insu.
Jean-Christophe Rufin a semblé contrit de ne pas avoir été invité à témoi-
gner devant la Mission d’information parlementaire. L’armée française
aurait-elle voulu garder secret cet épisode ?
Gérard Prunier fait un premier récit de cette mission qui s’étend selon
lui du 2 au 7 juillet54 :
À Paris, l’opinion publique s’était émue et la presse, un moment seule-
ment sensible à l’horreur du génocide, revenait peu à peu sur les responsabi-
lités politiques françaises. désireux de “faire quelque chose”, le Président de
la République décidait le 14 juin d’entreprendre une intervention “humani-
taire”. dès qu’elle fut annoncée, cette intervention provoqua une levée de
boucliers de la part de nombreuses associations humanitaires et d’oNG […]
La réaction du FPR fut également très hostile car le Front était persuadé que
Paris masquait derrière son opération “humanitaire” tardive l’intention de
venir en aide aux FaR qui semblaient en voie de perdre la guerre.
Le 23 juin, les troupes françaises pénétraient au Rwanda. L’envoi d’une mis-
sion du Ministère de la défense auprès du Commandement du FPR au
moment de la chute de Kigali permit de faire baisser le ton des échanges poli-
tiques et de mettre sur pieds des moyens de concertation destinés à éviter des
affrontements sur le terrain entre l’armée française et les forces du FPR qui
s’approchaient alors de Butare.
dans son livre, Gérard Prunier brode le scenario dont il est le héros en
oubliant Rufin. impolitesse ou nécessité de garder le secret ?

JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS... • La Nuit RwaNdaise N°3 13


il [emmanuel Bagambiki, préfet de cyangugu] demande en fait aux
troupes françaises de reconquérir les territoires occupés par les rebelles.
Car la guerre continue de faire rage et personne ne sait exactement ce qui
se passerait en cas de clash entre turquoise et le FPR. Je suis très inquiet
d’une telle éventualité, car, malgré le débroussaillage minutieux du géné-
ral Mercier, il y a à mon avis, des officiers extrémistes chez les Français, qui
rêvent d’en découdre avec le FPR et de venir au secours de leurs vieux
amis. en l’absence d’accord sur une procédure pour désamorcer une crise
éventuelle, j’insiste sur la nécessité d’installer un “téléphone rouge”, qui
relie rapidement l’état-major du FPR au ministre de la défense à Paris et
au général Lafourcade. L’idée ne plaît ni aux partisans acharnés du Hutu
Power à Paris ni à certains des éléments du FPR, persuadés que nous utili-
serons le téléphone par satellite pour les espionner électroniquement. Je
dois finalement demander à un technicien de leur expliquer que nous
n’aurions aucun mal à installer ce genre d’équipement à partir de Goma,
sans avoir besoin de leur mettre un appareil entre les mains.
Nous avons finalement le feu vert le 2 juillet, et pouvons nous rendre à
entebbe, dans la zone du FPR, pour rencontrer son commandement. Le
téléphone s’avère très utile, et un bon prétexte pour entrer en contact au
niveau politique, ce qui fait cruellement défaut depuis le début de l’opé-
ration. Notre délégation rencontre une partie du bureau politique du
Front à Mulindi. Puis, nous nous rendons par la route à Kigali, qui vient
de tomber aux mains du FPR. Le général Kagame accueille positivement
cette idée de “téléphone rouge” (nous avons emporté un inmarsat complet
avec son générateur) et nous acceptons de poursuivre la discussion le len-
demain à Mulindi. […] au début de la réunion, le lendemain, le général
Kagame reçoit une dépêche, qui l’informe des préparatifs militaires du
“colonel thibaut” à Gikongoro. “Le colonel thibaut” a déclaré publique-
ment qu’en cas d’affrontement avec le FPR les ordres seront : “pas de quar-
tier”. un aide de camp bilingue doit traduire l’expression au général
Kagame, qui ne la connaît pas, car il comprend bien le français mais pas
dans toutes ses nuances. il lui dit : “Monsieur, cela signifie qu’ils achèveront
les blessés.” Kagame fronce les sourcils, se tournent vers nous et dit calme-
ment : “c’est une déclaration hostile, n’est-ce pas ? “ Je suis plutôt mal à l’aise.
J’ai du mal à convaincre le leader du FPR que les colonels français parlent
parfois bêtement, sans réfléchir, et sans vérifier avec Paris qu’ils ne contre-
viennent pas à leurs instructions. enfin, Kagame promet de ne pas atta-
quer les troupes françaises. Pour lui rendre la politesse, à Paris, le prési-
dent Mitterrand et l’amiral Lanxade déclarent : “Le FPr n’est pas notre
ennemi.” La prise de Kigali a sans doute permis au Front d’obtenir cette
tardive semi-reconnaissance.55

Nous observons dans ce récit que c’est le général Mercier qui a organisé
la mission, qu’un technicien des transmissions en a fait partie, qu’ils ont

14 La Nuit RwaNdaise N°3 • JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS...


atteri à entebbe puis sont allés au quartier général du FPR à Mulindi.
après des entretiens, ils sont allés à Kigali qui venait d’être libérée donc
toujours le 4. Le lendemain il y a eu de nouvelles discussions à Mulindi où
nous observons que Kagame ne parle pas aussi bien le français que Rufin
veut nous le faire acroire. il ne connaît pas la signification de « pas de quar-
tier » ! Prunier explique à Kagame que nos diplômés de saint Cyr parlent
bêtement. qu’au grand jamais ils n’ont fait achever des blessés. au lecteur,
Prunier fait remarquer qu’il y a un lien entre sa mission auprès de Kagame
et le soudain changement de ton de Mitterrand et Lanxade. et tauzin sera
renvoyé dans ses quartiers. Comment Kagame et ses hommes ont-ils fait
pour obtenir l’abandon des déclarations bellicistes faite la veille par une
grande puisance membre permanent du Conseil de sécurité et dotée
d’armes nucléaires ? Mystère ! À moins qu’ils aient eu quelques cartes dans
leur jeu, quelques prisonniers que deux émissaires, tels les bourgeois de
Calais, venaient les supplier de libérer.
Colette Braeckman, qui a entendu Jean-Christophe Rufin à la CeC,
déclara après le départ de celui-ci :
une chose m’a interrogée dans l’exposé de Jean-Christophe Rufin. À
Butare, un incident s’est produit, sur lequel je n’ai pas beaucoup d’infor-
mations, mais dont je suis sûre qu’il s’est produit : des soldats français qui
s’y étaient rendus en avant-garde peu avant turquoise sont tombés dans
une embuscade. ils sont entrés dans la ville comme si elle était vide,
comme si personne ne les empêchait d’avancer. et le FPR a surgi, les a fait
prisonniers. Puis il y a eu négociation, ils ont été autorisés à quitter les
lieux… ils sont sortis au milieu d’une haie de soldats du FPR dans des
conditions probablement humiliantes, on leur avait retiré leurs uniformes
… il y a eu une démarche d’humiliation… Ma question : est-ce que Jean-
Christophe Rufin a participé à la négociation pour libérer ces soldats fran-
çais ? qui a négocié la libération ? quels ont été les termes de l’accord ? est-
ce que, pour la libération de cette avant-garde de soldats français, la condi-
tion n’a pas été le retrait de turquoise sur un périmètre plus restreint ?56
Le journaliste rwandais Vénuste Nshimiyimana donne la réponse, le pro-
jet d’une intervention militaire française in extremis sur Kigali est aban-
donné. Y a-t-il eu une opération sur Kigali parallèle à celle de Butare ?
un article relativement bien informé de Libération laisse entendre, lundi
4 juillet, que des soldats français sont tombés dans un piège en fin de
semaine et que des émissaires français ont été envoyés à Kagame pour lui
remettre des moyens de transmission radio sûrs et secrets afin de commu-
niquer avec le général Lafourcade :

JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS... • La Nuit RwaNdaise N°3 15


La fin de la semaine a été très agitée pour les autorités françaises en charge
de l’opération turquoise, à commencer par edouard Balladur et alain Juppé
qui, de Varsovie où ils se trouvaient en visite officielle, ont dû consacrer pas
mal de temps à « piloter » téléphoniquement une intervention humanitaire
entrée dans une phase critique.
dimanche soir [3 juillet], on ne respirait toujours pas mieux dans les cercles
officiels après un premier accrochage entre un contingent français et des élé-
ments du Front patriotique rwandais (FPR). […]
Ces développements, jugés particulièrement inquiétants à Matignon, ne per-
mettaient pas d’exclure à plus ou moins brève échéance, s’ils dégénèrent, un
repli sur le Zaïre de tous les éléments du contingent français présents au
Rwanda. […]
si la crise a peut-être été évitée dans l’immédiat, il est clair que l’inquiétude
des autorités françaises demeure. Vouloir rester neutre dans une situation de
génocide relève de la gageure. La crainte principale est qu’une confrontation
militaire générale avec le FPR ne puisse pas, finalement être évitée. C’est
pourquoi le corps expéditionnaire français a fait parvenir au cours des der-
nières heures au chef militaire du FPR, Paul Kagame, des moyens de trans-
mission radio sûrs et secrets qui lui permettent d’être en contact direct avec
le général Lafourcade, le commandant des forces françaises. Force est de
constater que cette mini-ligne rouge n’a pas été suffisante pour empêcher l’in-
cident de dimanche après-midi, dans la région sensible de Butare.57
L’expression « intervention humanitaire entrée dans une phase critique »
pourrait correspondre aux événements de Bisesero. Mais le « sauvetage » de
tutsi est-il la cause de tout ce temps passé par Balladur et Juppé à « piloter »
téléphoniquement ?
L’amiral Lanxade évoque cette rencontre de représentants français avec
le FPR de manière très vague :
L’amiral Jacques Lanxade a par ailleurs indiqué que «des représentants des auto-
rités françaises avaient rencontré des représentants du FPr à Kigali, afin de leur expli-
quer clairement que l’opération Turquoise répondait à des objectifs strictement huma-
nitaires qui conduisaient à interdire la zone humanitaire sûre aux combattants. »58
Le Monde note une rencontre entre des émissaires du ministère français
de la défense – et non du quai d’orsay – et Paul Kagame le 5 juillet :
Le Front patriotique rwandais (FPR), qui s’est emparé de Kigali, la capitale
du Rwanda, continue d’exprimer son désaccord avec la France au sujet de
l’opération « turquoise ». après avoir rencontré, mardi 5 juillet, des émis-
saires du ministère français de la défense, Paul Kagamé, l’« homme fort » de
la rébellion tutsie, a fait preuve d’une relative modération, paraissant écarter
les risque d’affrontement avec les forces françaises. il a en outre annoncé que

16 La Nuit RwaNdaise N°3 • JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS...


des consultations étaient en cours, notamment avec une personnalité hutue,
pour la constitution d’un gouvernement d’union nationale.59
Mais l’article de Jacques isnard laisse transparaître qu’il y a pu y avoir
une négociation. il note en préambule la volonté de la France d’enterrer la
hache de guerre :
« Le Front patriotique rwandais n’est pas notre adversaire. Nous ne cherchons
pas à retenir son éventuel succès », a expliqué François Mitterrand à l’is-
sue de son séjour en afrique du sud. « Il n’y a pas de volonté d’affronte-
ment, ni d’une part ni de l’autre», a commenté, de son côté, le ministre
des affaires étrangères, alain Juppé, en assurant que la France était
« en contact permanent » avec le FPR. […] en une journée, mardi 5 juil-
let, les dirigeants français ont unanimement voulu calmer le jeu au
Rwanda, en assurant de leur bonne volonté à son égard un FPR qui
était encore, juste avant l’assassinat, le 6 avril dernier, du président
Juvénal Habyarimana, la faction contre laquelle furent engagées, en
d’autres temps, des unités françaises en appui des forces armées rwan-
daises (FaR).60
après avoir rappelé l’intensité de l’engagement français auprès des FaR,
le correspondant militaire du Monde prend note de cette volonté réci-
proque d’éviter l’affrontement :
en affirmant que le dispositif « turquoise » n’est en rien agressif et en cher-
chant, au lendemain de la chute de Kigali, à tendre « une main secourable»
comme le dit M. Mitterrand après avoir affirmé que « le sort des rwandais
dépend des rwandais», la France en appelle indirectement au FPR pour qu’il
maîtrise, en quelque sorte, son succès sur le terrain.
tout se passe comme si le FPR donnait l’impression d’avoir entendu le
message. Face à une France qui vient d’infléchir sa propre trajectoire, le
FPR, qui a un légitime besoin de se faire reconnaître sur la scène interna-
tionale, a lui aussi corrigé le tir : le même général Paul Kagamé, qui a com-
mandé la lutte armée contre les FaR, promet la constitution prochaine
d’un « gouvernement d’unité nationale» et, par la suite, la proclamation par le
FPR d’un « cessez-le-feu unilatéral ».61
Le même jour Frédéric Fritscher donne quelques précisions sur la rencontre :
Paul Kagamé, insaisissable chef d’état-major du Front patriotique rwandais
(FPR), est sorti de l’ombre. il a rencontré un groupe de journalistes, mardi 5
juillet, en début d’après-midi, dans une résidence de Kanombé, un quartier
périphérique de Kigali. il s’était entretenu plus tôt dans la journée au quar-
tier général du FPR à Mulindi, près de la frontière ougandaise, avec cinq mili-
taires et hauts fonctionnaires français du ministère de la défense venus lui
expliciter les intentions de Paris. […]

JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS... • La Nuit RwaNdaise N°3 17


au moment où ses troupes s’arrêtaient à une dizaine de kilomètres seule-
ment des lignes françaises, Paul Kagamé s’interrogeait : « Un affrontement avec
les Français ? Mais pourquoi et sur quels différends ? Ils viennent pour secourir les
populations. Mais ils doivent en parler avec nous, avec les gens d’ici. ceux qu’ils veu-
lent protéger ne sont ni des ressortissants français ni des citoyens des Nations unies. »
Le jeune chef militaire déplore qu’il n’y ait pas eu plus de communication
avec les Français. « Nous devons remédier à tout cela », dit-il, comme s’il avait
encore en tête ses entretiens du matin avec les émissaires de Paris62.
on a vu que cette mission de Rufin et Prunier auprès de Kagame est
écourtée. d’après Rufin, Kagame lui demande d’aller avec lui à Kigali pour
examiner les deux journalistes de France 2, isabelle staes et José Nicolas
blessés la veille par des soldats du FPR63. Rufin accepte, il voit les blessés
près du stade à Kigali mais des journalistes sont là et le quai d’orsay sera
prévenu et fera suspendre la mission64. un article du Figaro relate cette mis-
sion de Rufin et comment elle a été suspendue par le quai d’orsay :
début juillet, un avion spécial affrété par le gouvernement, avec à son bord
Jean-Christophe Rufin, chargé de mission auprès du ministre de la défense,
atterrit à Kampala. « Sur instruction du premier ministre Édouard Balladur, et du
ministre de la défense, François Léotard, je suis arrivé peu après à Kigali, qui venait de
tomber, raconte aujourd’hui Jean-Christophe Rufin. J’ai immédiatement rencontré
le commandant Kagame, le chef de la rébellion, et aussitôt averti le général Mercier
[chef d’État-major de l’armée de terre, NdLR] et le général Lafourcade [comman-
dant de l’opération « turquoise », NdLR.] » Le quai d’orsay n’est pas au cou-
rant de cette mission. Lorsqu’il apprend par hasard son existence, il y aurait eu
un tollé au ministère des affaires étrangères … qui annulle la mission.65
Le quai d’orsay n’a pas été tenu au courant de cette mission parce que
les militaires français ont voulu la garder secrète. Voilà encore un indice
qu’il y a eu négociation pour faire libérer des prisonniers. Nous en voyons
une preuve dans la note du général quesnot du 6 juillet :
intervenant quelques heures après votre conférence de presse du Cap, les
déclarations de M. Kagame, chef militaire du F.P.R., exprimant sa volonté de
“ne pas chercher d’affrontements avec les forces françaises”, de renoncer à la
conquête totale du pays et de préparer un cessez-le-feu pourraient constituer
un tournant dans le conflit rwandais et faciliter notre action.
La zone humanitaire a été approuvée hier doir par le Conseil de sécurité (pro-
cédure dite de silence ou de non-objection). Le secrétaire général a appuyé
publiquemnt notre initiative.
Les forces françaises sont redéployées dans la zone humanitaire au sud-ouest
et continuent d’évacuer les tutsis menacés.66
Le général quesnot parle de redéploiement des forces françaises dans la
zone humanitaire au sud-ouest. il y a donc un repli. Comme les journaux

18 La Nuit RwaNdaise N°3 • JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS...


nous apprennent qu’il y a eu une négociation, c’est qu’il y a eu une contre-
partie. selon quesnot, Kagame renonce à la conquête totale du pays. C’est
exact dans la mesure où il n’essaiera pas d’attaquer la « zone humanitaire ».
Mais pourquoi cette négociation n’a-t-elle pas été faite par des diplomates
du quai d’orsay ?
Bruno delaye et le général quesnot, dénonçant l’empressement du gou-
vernement à prendre contact avec le FPR, signalent au Président l’envoi par
François Léotard d’une délégation auprès de Kagame. ils paraissent ne pas
être au courant de l’objet de la mission :
dans cette course au FPR, M. Léotard a pris de l’avance en dépêchant sur
place à Kigali auprès de M. Kagamé et sans en avertir personne, cinq mili-
taires et fonctionnaires de haut rang.67
Les mêmes conseillers signalent au Président, le 7 juillet, la composition
de la délégation envoyée auprès de Kagame pour installer un « téléphone
rouge » :
ii Le cabinet de M. Léotard a précisé, lors d’une réunion interministérielle
que la délégation du Ministère de la défense envoyée au Rwanda n’avait pour
but que d’installer un “téléphone rouge” avec le chef militaire du FPR,
M. Paul Kagame. Cette délégation était composée d’un membre du cabinet
du ministre [Jean-Christophe Ruffin], d’un colonel et de trois sous-officiers.
seul Matignon avait été informé.68

C f. Tableau . page s uivanTe

La mission Rufin-Prunier semble bien durer du 2 au 5 juillet, en raison


des faits concomittants cités par Prunier et Rufin (journalistes français bles-
sés, prise de Kigali et déclaration du colonel thibaut), voir la chronogie des
événements dans les deux tableaux page suivante. L’emploi du temps de
Prunier a été reconstitué à partir des dates d’interview qu’il indique en note
dans “Rwanda : La crise rwandaise : structures et déroulement (Juillet
1994)”. Nous remarquons que Prunier rencontre Museveni le 6 juillet à
Kampala ce qui correspond à l’affirmation qu’un « diplomate a été envoyé
auprès de M. Museveni » faite par Vénuste Nshimiyimana, cité plus haut.
a propos du « téléphone rouge » , Prunier note les réticences du FPR à
accepter un tel téléphone. Nous constatons que les hommes de Kagame
sont des gens prudents. Les services secrets français n’ont-ils pas fait le coup
du téléphone à des rebelles algériens en leur faisant parvenir un appareil
qui leur a explosé à la figure ? dans l’hypothèse où c’est pour négocier une
libération de prisonniers que Rufin et Prunier sont allés rencontrer

JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS... • La Nuit RwaNdaise N°3 19


taBLeau : L’accrochage cos-Fpr du 1er juiLLet
et La mission prunier-ruFin

date Heure Événement source

Jeudi 30 juin 19 h Feu vert de Balladur pour Note delaye-


une opération sur Butare quesnot
30/6/94
Vendredi après-midi arrivée des Cos à Butare Rosier, annexes
1er juillet MiP, p. 397

Vendredi soir accrochage entre Butare et save Lugan [9, p. 221]


1er juillet

samedi 1 h 30 Retrait Cos Rosier ibidem,


2 juillet Lugan [9, p. 221]

samedi Négociation via dallaire C. Lesnes,


2 juillet d’un cessez-le-feu le 3 à Butare Le Monde,
5/7/94
samedi Feu vert pour mission Prunier p. 349
2 juillet Prunier-Rufin

dimanche Rufin est envoyé en urgence CeC,


3 juillet auprès de Kagame [2, p. 398-405]

dimanche 12 h 15 2e intervention Cos à Butare C. Lesnes,


3 juillet ibidem
dimanche 13 h 20 accrochage Cos-FPR à la sortie C. Lesnes,
3 juillet nord-ouest de Butare ibidem

Lundi 4 juillet 4 h du Les derniers FaR quittent Kigali


matin
Lundi 4 juillet soir à Rufin négocie pendant 3 heures CeC,
Mulindi avec Kagame la libération des Cos ibidem, p. 403
capturés. il le met en communica-
tion téléphonique avec le général
Lafourcade.

20 La Nuit RwaNdaise N°3 • JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS...


Lundi 4 juillet quatre journalistes français tom- F. Fritscher,
bent dans une embuscade du Le Monde
FPR, deux sont blessés. 8 juillet 1994
Lundi 4 juillet Le colonel thibaut déclare que Le Figaro
si le FPR vient à Gikongoro, 5 juillet 1994
il lui fait tirer dessus.

Lundi 4 juillet soir Rufin appelle par téléphone CeC,


Lafourcade depuis la cour de ibidem, p. 403
Kagame
Mardi 5 juillet déclarations apaisantes de isnard, Le Monde,
Mitterrand, Juppé, Lanxade 7/7/1994

Mardi 5 juillet matin à Rencontre avec Kagame qui pro- Fritscher,


Mulindi teste contre les déclarations du Le Monde, 7/7/1994
colonel thibaut CeC, ibidem, p. 404

Mardi 5 juillet isabelle staes et José Nicolas, Libération,


blessés, sont transportés à Kigali 7 juillet 1994

Mardi 5 juillet Rufin se rend avec Kagame à CeC,


Kigali pour examiner les deux ibidem, p. 404
journalistes de France 2 blessés.

Mardi 5 juillet début Kagame fait une conférence de Fritscher,


d’après presse à Kigali Le Monde, 7/7/1994
midi
Mardi 5 juillet Prunier s’entretient avec seth
sendashonga à Mulindi

Mercredi Prunier s’entretient à Kampala G. Prunier, [14, p.


6 juillet avec Museveni 255] ; G. Prunier,
“rwanda : La crise rwan-
daise : structures et dérou-
lement (Juillet 1994)”,
note 89

Mercredi Prunier s’entretient à Byumba G. Prunier “rwanda :


6 juillet avec Roger Rutikanga, cadre La crise rwandaise :
FPR et sixbert Musamgamfura, structures et déroulement
journaliste membre du MdR (Juillet 1994)”,
note 46, 83

JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS... • La Nuit RwaNdaise N°3 21


Kagame, le téléphone inmarsat devait servir en premier lieu à eux-mêmes
pour communiquer avec Paris les conditions exigées par Kagame en
échange de la libération des soldats des Cos. Nous observons que Bernard
Kouchner disposait d’un téléphone satellite analogue quand il a été envoyé
à Kigali par l’Élysée en mai 1994.
Nous tenons pour certain que des membres des Cos ont été faits pri-
sonniers et libérés par une négociation menée par Prunier et Rufin.
Reste qu’il n’est pas certain que des Cos ont été faits prisonniers lors
de cet accrochage près de Butare, qui a eu lieu le soir du 1er juillet. Le
témoin Raphaël Kirenga ne parle pas de Français faits prisonniers. on a
remarqué que le général dallaire date l’événement avant le 26 juin et
Colette Braeckman parle « des soldats français qui s’y étaient rendus [à Butare]
en avant-garde peu avant Turquoise sont tombés dans une embuscade. » or nous
avons deux récits de journalistes, stephen smith69 et Michel Peyrard70 qui se
rendent à Butare avant l’arrivée « officielle» des militaires français. Nul
doute que ces journalistes accompagnaient ou suivaient des avant-gardes
françaises. stephen smith était à Butare entre le 25 et le 27 juin probable-
ment. une avant-garde française est à Gikongoro le 27 juin.
Michel Peyrard quitte Cyangugu le 24 juin en compagnie d’une
patrouille commandée par les lieutenants-colonels Collin et Jacque. Nous
savons que Collin est le pseudonyme de Hervé Charpentier et que Jacque
est celui d’Étienne Joubert. il est donc fort possible que Peyrard était à
Butare le soir du 24 juin, accompagné des lieutenant-colonels Hervé
Charpentier alias Collin et Jacque. un autre accrochage avec le FPR a pu
avoir lieu avant le 1er juillet.
Nous savons que lors de l’évacuation du dimanche 3 juillet à Butare, il y
aura un accrochage entre Français et FPR. est-ce à ce moment-là que des
membres des Cos auraient été faits prisonniers ? C’est très improbable
pour deux raisons. d’abord parce que l’accrochage du 3 s’est passé en plein
jour devant beaucoup de témoins – bien qu’on manque de témoignages
d’observateurs indépendants sur cet incident – ensuite, parce que la mis-
sion Prunier-Rufin a été déclenchée samedi 2 juillet.
en conclusion nous tenons pour certain qu’un groupe de reconnais-
sance des Cos se dirigeant vers la paroisse de save le 1er juillet au soir a été
accroché par un élément du FPR. Le lieutenant-colonel Hervé Charpentier
fut blessé. au moins une dizaine de militaires auraient été faits prisonniers
à cette occasion. Mais il est possible que des militaires des Cos aient été
fait prisonniers avant cette date du 1er juillet. deux négociateurs furent

22 La Nuit RwaNdaise N°3 • JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS...


envoyés depuis Paris dans le plus grand secret pour, les 4 et 5 juillet, négo-
cier avec Paul Kagame leur libération. L’effet immédiat fut le changement
de ton de Paris à l’égard du FPR qui « n’est pas notre adversaire » déclara
Mitterrand le 5 juillet. en contrepartie de la libération des membres de ses
troupes d’élite, la France s’engagea à ne pas chercher à contrôler la région
de Kigali – ville qui fut prise le 4 juillet par le FPR –, Butare, Ruhengeri,
Gisenyi, à se limiter à une zone « humanitaire » entre Kibuye-Gikongoro et
Cyangugu et à ne pas chercher à se maintenir au delà du mandat de l’oNu.
Nous n’avons cependant aucune information sur la teneur réelle des négo-
ciations, Prunier et Rufin ayant prétendu qu’ils étaient allés porter un télé-
phone satellite inmarsat dit « rouge » à Kagame. Ce que nous disons de ces
négociations se déduit simplement de ce qui s’est passé ensuite.

réFérences
[1] Commission Nationale indépendante chargée de rassembler les
preuves montrant l’implication de l’État Francais dans le génocide perpé-
tré au Rwanda en 1994 : Rapport. République du Rwanda, 15 novembre
2007.
[2] Laure Coret et François-Xavier Verschave : L’horreur qui nous prend au
visage. Karthala, 2005. Rapport de la Commission d’enquête citoyenne.
[3] Roméo dallaire : J’ai serré la main du diable - La faillite de l’humanité au
rwanda. Libre expression, 2003.
[4] alison des Forges : aucun témoin ne doit survivre. Le génocide au
rwanda. Karthala, Human Rights watch, Fédération internationale des
droits de l’homme, avril 1999.
[5] Philip Gourevitch : Nous avons le plaisir de vous informer que,
demain nous serons tués avec nos familles. denoël, 1999. Mai 1995-avril
1998, Farrar, straus and Giroux, New York, 1998.
[6] Jean-Paul Gouteux : La nuit rwandaise. L’implication française dans le der-
nier génocide du siècle. izuba editions, L’esprit frappeur, 2002.
[7] andré Guichaoua : Rwanda 1994 - Les politiques du génocide à
Butare. Karthala, 2005.
[8] ian Linden : christianisme et pouvoir au rwanda (1900-1990). Karthala,
1999.
[9] Bernard Lugan : François Mitterrand, l’armée française et le rwanda.
editions du Rocher, mars 2005.
[10] Monique Mas : Paris-Kigali 1990-1994 ; Lunettes coloniales, politique du

JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS... • La Nuit RwaNdaise N°3 23


sabre et onction humanitaire pour un génocide en afrique. L’Harmattan, 1999.
[11] Linda Melvern : a people betrayed - The role of the West in rwanda’s
genocide. Zed Books, 2000.
[12] eric Micheletti : Le cOS, commandement des Opérations spéciales.
Histoire et collections, 1999.
[13] Vénuste Nshimiyimana : Prélude du génocide rwandais - enquête sur les
circonstances politiques et militaires du meurtre du Président Habyarimana.
quorum, editions quorum 32, rue du Viaduc B-1340 ottignies LLN,
1996.
[14] Gérard Prunier : rwanda : le génocide. dagorno, 1997.
[15] Pierre Péan : Noires fureurs, blancs menteurs. Rwanda 1990-1994.
enquête. Mille et une nuits, novembre 2005.
[16] Paul quilès : enquête sur la tragédie rwandaise 1990-1994. assemblée
Nationale. Rapport 1271, http://www.assemblee-
nationale.fr/dossiers/rwanda/, 15 décembre 1998. Mission d’information
de la commission de la défense nationale et des forces armées et de la
commission des affaires étrangères, sur les opérations militaires menées
par la France, d’autres pays et l’oNu au Rwanda entre 1990 et 1994.

Notes
1. Michel Cariou, rwanda : l’accueil « spontané » des soldats français, Le Figaro, 28 juin 1994,
p. 5 ; M. Mas [10, p. 434] ; Hutu villagers cheer French, the times, 28 June 1994 ; Jean
Chatain, Les Mirage et le ministre Léotard arrivent, L’Humanité, 29 juin 1994.
2. Michel Peyrard, « Je ne veux voir ni arc, ni lance, ni machette et surtout pas d’effusion », martèle
le colonel, Paris-Match, 7 juillet 1994, p. 46.
3. Le pseudonyme des Cos est souvent choisi à partir de la 1re lettre du patronyme, diego
pour duval, thibaut pour tauzin,...
4. aucun témoin ne doit survivre, [4, p. 595].
5. Le colonel François Munyengango est directeur des anciens combattants et des affaires
sociales au ministère de la défense. Cf. République Rwandaise, Ministère de la défense
nationale, armée rwandaise, État-major, G1, Kigali le 05 mars 1994, objet : situation offi-
ciers armée rwandaise arrêtée au 01 mars 1994, p. 2. il est nommé commandant de l’eso
à Butare le 6 juin. Cf. a. Guichaoua [7, p. 300-301].
6. Le Lieutenant-colonel de gendarmerie Laurent Rutayisire est directeur de la sûreté exté-
rieure de l’État. Cf. ordre de bataille offrs et el offrs arrêté au 15 fev 1993 GdN, p. 1.
7. stephen smith, À Butare, l’espoir se conjugue en français, Libération, 28 juin 1994, p. 15. il
évoque la visite du cardinal etchegaray à Butare, qui a eu lieu le 24 juin, en disant « vendredi
dernier ». L’article a donc été écrit lundi 27. Comme il écrit qu’il a passé la nuit à la Procure,
en face de la cathédrale de Butare, il était donc arrivé le dimanche 26 au soir. L’article précé-
dent de smith, publié le 27, est écrit depuis Cyangugu, donc probablement le 26.
8. toutefois, smith écrit dans l’article que les Français se font attendre.

24 La Nuit RwaNdaise N°3 • JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS...


9. témoignage de Maryln donge, strasbourg ; témoignage de Michel Campion. Cf.
Rapport Mucyo [1, annexes, témoin 70].
10. témoignage de Pierre Galinier Cf. [6, p. 436] ; de Raphaël Kirenga. Cf. Rapport Mucyo
[1, annexes, témoin 80].
11. dr théodore sindikubwabo, Président de la République à son excellence Monsieur
François Mitterrand, Kigali le 22 mai 1994. Lettre transmise par le général quesnot à l’at-
tention de Monsieur le Président de la République. objet : Correspondance du docteur
théodore sindikubwabo Président par interim du Rwanda, 24 mai 1994. Note manuscrite :
« Signalé/HV». Le fac-simile d’une lettre datée de juin 1992 du Président du Conseil
National de développement signée sindikubwabo permet d’authentifier sa signature.
12. Patrick de saint-exupéry, France-rwanda : des mensonges d’État, Le Figaro, 2 avril 1998, p.
4, colonne 7.
13. une des conditions de réussite de l’opération turquoise précisée par le Premier minis-
tre est : « Limitation des opérations à des actions humanitaires (mettre à l’abri des enfants, des
malades, des populations terrorisées), et ne pas nous laisser aller à ce qui serait considéré comme une
expédition coloniale au cœur même du territoire du rwanda. Toute occupation durable d’un site ou
d’une partie du territoire rwandais présenterait de très grands risques, compte tenu de l’animosité
qu’elle susciterait et de l’interprétation politique qui lui serait donnée ; ». Cf. Lettre d’Édouard
Balladur à François Mitterrand, 21 juin 1994, enquête sur la tragédie rwandaise 1990-1994, [16,
tome ii, annexes, p. 375].
14. Note de Bruno delaye et du général quesnot à l’attention de Monsieur le Président de
la République, 30 juin 1994. objet : Rwanda - Réunion à Matignon.
15. B. Lugan [9, p. 221].
16. eMMiR : il ne s’agit pas de l’émir abdelkhader mais de l’Échelon médical mobile d’in-
tervention rapide !
17. Éric Micheletti, [12, p. 130]. Ces commandos de marine sont-ils ceux du commando
trepel commandé par Marin Gillier ? Celui-ci est encore à Gishyita, à côté de Bisesero, le
1er juillet, il y reçoit l’ordre de rejoindre incessamment Gikongoro. Cf. enquête sur la tragé-
die rwandaise 1990-1994 [16, annexes p. 406]. L’unité de Marin Gillier n’intervient que le 3
juillet à Butare pour évacuer 1000 personnes dont 700 orphelins vers le Burundi. Cf. ibidem
[16, Rapport, p. 311]. il est possible qu’une fraction du détachement de Gillier soit allé à
Butare dès le 1er juillet. on a vu qu’il avait laissé des hommes au camp de Kirambo alors
qu’il s’installait avec le reste à Gishyita.
18. il s’agit du lieutenant-colonel Jean-Rémy duval, alias diego, commandant les éléments
du CPa 10 basés antérieurement à Kibuye. Ce dernier ne parle pas de cette mission à Butare
le 1er juillet dans son audition. a l’entendre il se trouve toujours dans le secteur Kibuye-
Kivumu est Cf. audition du lieutenant-colonel duval, 17 juin 1998, MiP, [16, tome iii, Vol.
2, p. 119].
19. L’aPR, armée patriotique du Rwanda, est l’armée du FPR.
20. B. Lugan [9, p. 221].
21. « Government vehicles, army lorries and road-blocks manned by the Hutu militia have been festoo-
ned with French flags and signs reading “Vive la France”.» Cf. Lindsey Hilsum, “Rwandan Rebels
advance as French Forces Hang Back”, Guardian, July 2, 1994, p. 17.
22. « The French must come here to convince the rPF not to advance, pushing civilians in front of
them,” the prefect of Butare, Lieutenant-colonel alfonse Nzeriyayo, said. He said the rPF was using
civilians as a human shields. “If we defend ourselves against the rPF, we have to shoot at civilians
whom the rPF has forced between us.» Cf. Lindsey Hilsum, ibidem.
23. Rapport du Colonel Rosier, NMR 001/tuRquoise/det Cos, 27/07/1994,

JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS... • La Nuit RwaNdaise N°3 25


enquête sur la tragédie rwandaise 1990-1994 [16, tome ii, annexes, p. 397].
24. « French troops rescued among others, colonel Theoneste Bagosora (chef de cabinet in the Hutu
government and the evil genious behind the genocide) in July 1994 as the Tutsi rebels closed in on
Butare. » Cf. sam Kiley, « a French Hand in Genocide », The Times (Londres), 9 avril 1998, p. 24.
25. Bagosora pour sa part déclare devant le tPiR : « Je suis rentré au rwanda le 22 juin 1994
et je suis rentré par la frontière de Goma/Gisenyi, et je suis resté à Gisenyi à partir du 22 juin.
Jusqu’au 14 juillet, j’étais à Gisenyi et j’ai fui le rwanda le 14 juillet vers le Zaïre.» Cf. tPiR,
affaire N° iCtR-98-41-t, Bagosora ..., audience du 10 novembre 2005, interrogatoire prin-
cipal de la défense de théoneste Bagosora, par M Constant.
26. aucun témoin ne doit survivre [4, p. 684].
27. s’agit-il de l’incident du 3 juillet sur la route de Butare à Gikongoro? Non car dallaire
en parle p. 568. il s’agirait donc là d’un troisième incident, ou d’une erreur.
28. R. dallaire [3, pp. 552-553].
29. il vient de parler de l’accrochage du 3 juillet à la sortie de Butare vers Gikongoro.
30. Philip Gourevitch [5, p. 182]. Le livre ayant été rédigé de 1996 à 1998, l’interview de
Kagame est à situer entre ces dates.
31. Rapport du Colonel Rosier, NMR 001/tuRquoise/det Cos, 27/07/1994, enquête
sur la tragédie rwandaise 1990-1994 [16, tome ii, annexes, p. 397].
32. save est un lieu hautement symbolique pour les Français. C’est là que Mgr Hirth, né en
alsace, obtint en 1900 l’accord du Mwami Musinga pour y créer le premier poste de mis-
sion dirigé par le père blanc, alphonse Brard, originaire de Normandie. Cf. i. Linden [8,
pp. 55-56].
33. B. Lugan [9, p. 221].
34. Rapport Mucyo, [1, annexes, témoin 80, p. 189].
35. a. Guichaoua [7, p. 422].
36. France 2, 2 juillet 1994, Journal de 20 h : Butare.
37. B. Lugan [9, p. 221].
38. stephen smith, Jean Guisnel, L’impossible mission militaro-humanitaire, Libération, 19 juil-
let 1994, pp. 12-13.
39. P. Péan, [15, p. 486].
40. selon certaines sources, il y aurait eu un incident entre les Français et le FPR début juil-
let, alors que le FPR s’approchait de Butare. dix-huit soldats français auraient été faits pri-
sonniers par le FPR, et après des négociations entre le FPR et Paris, ils auraient été relâchés
le jour suivant. Cela n’a pas été rendu public. Mel McNulty, “France’s Rwanda débâcle”,
War studies, Vol. 2. 2, spring 1997, p. 16 ; Linda Melvern [11, p. 214].
41. V. Nshimiyimana [13, p. 56].
42. Communiqué du Ministère des affaires étrangères, 18 mai 1994 ; entretien avec Jean-
Christophe Rufin, Le Parisien, 29 mars 2007.
43. audition de Jean-Christophe Rufin par la CeC, 25 mars 2004, [16, pp. 398-405].
44. CeC, ibidem, p. 399.
45. G. Prunier [14, p. 349].
46. CeC, ibidem, p. 399.
47. CeC, ibidem, p. 400.
48. CeC, ibidem, p. 401.
49. CeC, ibidem, p. 401.
50. CeC, ibidem, p. 403.
51. Bien sûr, nous ne croyons pas aux propos mot à mot que Rufin prête à Kagame. ils ont
certainement discuté en anglais. La présence de Gérard Prunier a dû être précieuse aussi

26 La Nuit RwaNdaise N°3 • JaCques MoReL, LeS cOMMaNdOS...


pour cela. La famille de Kagame a fui le Rwanda en 1960 alors qu’il avait deux ans. ayant
été à l’école en ouganda, il est parfaitement anglophone.
52. CeC, ibidem, p. 404.
53. CeC, ibidem, p. 404.
54. G. Prunier “Rwanda : La crise rwandaise : structures et déroulement (Juillet 1994)”, p. 32.
55. G. Prunier [14, pp. 348-350].
56. CeC, ibidem, p. 406.
57. Jacques almaric et Jean Guisnel, Le piège se referme sur les soldats français, Libération, 4 juil-
let 1994.
58. enquête sur la tragédie rwandaise 1990-1994 [16, tome i, Rapport, p. 316].
59. Jacques isnard, La rébellion rwandaise n’entend pas affronter les forces françaises - Paris calme
le jeu, Le Monde, 7 juillet 1994, pp. 1, 3.
60. Ibidem.
61.Ibidem.
62. Frédéric Fritscher, L’homme fort du FPr prévoit la formation d’un gouvernement d’unité natio-
nale, Le Monde, 7 juillet 1994, p. 3.
63. Frédéric Fritscher, deux journalistes français blessés dans une embuscade, Le Monde, 8 juil-
let 1994, p. 3. selon Fritscher, l’incident a eu lieu lundi 4 juillet. Le FPR aurait mis 3 jours
pour les remonter sur Kigali, ce qui voudrait dire qu’ils y arrivent mercredi 6. il précise qu’ils
ont été opérés à l’hôpital du CiCR mercredi, donc le 6 et qu’ils devaient regagner Paris
jeudi, donc le 7. selon Rufin, ils seraient arrivés à Kigali mardi 5. Ce qui ferait un délai de
2 jours pour les remonter à Kigali, de 3 pour les opérer.
64. CeC, ibidem, p. 404.
65. Patrick de saint-exupéry France-rwanda : le temps de l’hypocrisie, Le Figaro, 15 janvier
1998, p. 5.
66. Note du général quesnot à l’attention de Monsieur le Président de la République, 6 juil-
let 1994, objet : Votre entretien avec le Premier ministre, mercredi 6 juillet - situation. Note
manuscrite : « Vu ».
67. Bruno delaye, Général quesnot, “Note à l’attention de Monsieur le Président de la
République (s/C de Monsieur le secrétaire général)”. objet : Rwanda, 6 juillet 1994.
68. Bruno delaye, Général quesnot, “Note à l’attention de Monsieur le Président de la
République (s/C de Monsieur le secrétaire général)”, objet : Rwanda, 7 juillet 1994. Note
manuscrite : signalé HV.
69. stephen smith, À Butare, l’espoir se conjugue en français, Libération, 28 juin 1994, p. 15.
70. Michel Peyrard, « Je ne veux voir ni arc, ni lance, ni machette et surtout pas d’effusion », mar-
tèle le colonel, Paris-Match, 7 juillet 1994, p. 46.

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