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 Q ui va là ? Le Chameau !!!

Raymond me salua d’un éclat de rire tonitruant, laissant entrevoir tous ses chicots,
pas bien nombreux il est vrai. On ne l’appelait pas Grande Bouche pour rien. Maître
incontesté de l’extempo, il pouvait vous débiter à tout bout de champ deux trois
couplets fort bien troussés sur les sujets les plus incongrus ou faire mordre la
poussière de quelques traits acérés à l’impudent qui se risquerait à le défier en un
picong impromptu. Mais c’était surtout l’une des plus belles descentes de Trinidad
– à croire que le terme carrousseau avait été inventé tout exprès pour lui – wtandis
que sa turne, le Calinda, était un havre de paix dès lors qu’il me prenait l’envie
de vérifier si mes bleus à l’âme étaient ou non toujours solubles dans le rhum.

- Tu comptes tout de même pas rester planté là jusqu’à Jouvet. Viens donc te rincer
le gosier et tu m’expliqueras ce qui t’est arrivé.
Et joignant le geste à la parole, il m’invita à prendre place à ses côtés et nous
servit deux godets bien tassés.

- Alors mon salaud, qui t’as arrangé le portrait ainsi ?

- C’est Anita, l’autre soir. J’étais descendu en ville limer avec quelques collègues
dans l’une de ces tentes qui n’ont plus de tentes que le nom, mais où se produit
toujours la fine fleur des calypsoniens. Il y avait là Whitie, Lord Inferior, the
Duke of Steel, the Mighty Hammer et quelques autres. On sirotait quelques verres
au bar lorsque le taulier s’empara du crachoir pour faire une annonce : “Ladies &
Gentlemen, je vous demande d’accueillir comme il se doit la reine du calypso, la
grande, l’unique, l’incomparable… CALYPSO !!! ROSE !!!” Je m’approchais de la scène
pour lui présenter mes hommages quand – BAM ! – voilà-t-y pas que je me mange son
escarpin sur le cigare. J’avais oublié – erreur fatale ! – qu’elle avait la fâcheuse
habitude d’envoyer valser ses pompes dès le début du second morceau…
- Ca c’est pour la première bosse, mais pour la seconde ?
- Quand je suis rentré chez moi, complètement noir, Anita m’est tombée sur l’colback.
Rien qu’à ses chasses, j’ai compris que j’allais pas y couper.

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 - Alors, c’est à c’t’heure-là qu’on rentre ? Avec qui t’étais encore fourré ?
- J’étais avec Rose…

Que n’avais-je dit là. Avant même que je n’aie le temps de terminer ma phrase,
j’avais fait la connaissance de son rouleau à pâtisserie – charmant enfant, au
demeurant.

- Mais mon trésor, c’est une affreuse méprise, laisses-moi t’expliquer.

Il me fallut pas moins de trois quarts d’heures pour venir à bout de l’ouragan
Anita.

- C’est une vieille copine. On s’est rencontré sur les bancs de la communale. Son
daron était pasteur à Tobago. Il avait 13 morpions et toutes les peines du monde
à leur assurer le casse-croûte quotidien, si bien qu’il avait confié la petite
McCartha Linda Sandy Lewis – comme on l’appelait alors – à une parente qui habitait
Trinidad. La pauvrette n’était pas plus grosse qu’une crevette – les choses ont
bien changées depuis, j’en conviens. Quelques années plus tard, en 1956, j’eus la
surprise de la retrouver sous la tente de la Young Brigade. Elle y chantait ses
premiers calypsos sous le sobriquet de Crusoe Kid. Je perdis à nouveau sa trace,
pour ne la retrouver qu’en 1963, aux côtés de Lord Kitchener. C’était devenu une
vraie pro, qui désormais se faisait appeler Calypso Rose. Ce nouveau blaze allait
lui porter chance, même si elle échoua d’une voix derrière Kitch pour le titre de
Calypso King en 1975. Elle prit sa revanche en devenant en 1977 la première femme
à remporter la Road March avec “Tempo”, avant de remettre ça l’année suivante avec
“Come Leh We Jam” et de remporter en prime la couronne de Calypso Monarch avec “Her
Majesty “ et “I Thank Thee”.

De tout ça, Anita se foutait comme de l’an quarante :

- Me raconte pas de salade. Ta Rose, c’est plutôt l’genre plante carnivore. Une
mangeuse d’homme que j’te dis. Y’a qu’à voir les paroles de ses chansons…

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 - Mais non mon cœur, pas du tout, c’est une bonne chrétienne, comme toi et moi, une
honnête femme, que dis-je, une vertu !
- Ah oui ? Alors peux-tu m’expliquer pourquoi Sparrow chantait à son propos : “Rose
girl ah want yuh bad…”
- Mais tu n’y es pas du tout, ce n’est pas d’elle qu’il parlait, mais de la petite
Rose du Laventille, la fille de Lloydie “le nettoyeur” et de la reine Maribone. Ma
pauv’ Anita, tu vois vraiment le mal partout.

Devant sa mine suspicieuse, je crus malin d’ajouter :

- Et quand bien même j’aurais winé avec la reine du Calypso, où serait le
problème ?

Je n’évitais une nouvelle rencontre fortuite avec le rouleau à pâtisserie d’Anita

que d’extrême justesse, mais fus contraint de mettre les bouts pour ne pas terminer
en charpie sous les coups de cette harpie. Et voilà comment j’ai atterri ici.

Raymond m’envoya une grande bourrade dans le dos.

- Bouge pas, j’ai ce qu’y t’faut, un remontant maison dont tu me diras des
nouvelles.

Il enquilla du côté des artistes, mais alors que je m’attendais à le voir réapparaître
avec une roteuse tirée de sa réserve privée, il me tendit un carré cartonné.

- Quézaco ?
- La nouvelle galette de Calypso Rose.
- (désignant mon godet) Remets moi la même chose.

J’allais m’abandonner à une étude attentive de la chose lorsque Anita rappliqua

sans s’annoncer. Lassé d’une promiscuité devenue par trop pesante avec son rouleau
à pâtisserie, je mis les bouts sans me faire prier, laissant derrière moi l’objet
que vous tenez entre les mains. Bande de veinards…

* Smokey

PS : Prière de me rapporter ce disque quand vous l’aurez dégusté. Promis je ne

porterai pas plainte…
* The Mighty Smokey anime le programme-vedette de WMAS 1340-AM, la station favorite
de tous les mascaraders, chantwells, bâtonniers, jamettes et autres nègres jardin.

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 A, a, look who! Camel!

Raymond greeted me with a dazzling smile, revealing a glimpse of all his stumpy
little teeth, few though they were. They didn’t call him Big Mouth for nothing. As
the undisputed extempo king he could deliver two or three well-phrased verses on the
most ungodly of subjects or chop you down to size with a few cutting strokes if you
were so out of place as to challenge him to a round of some freestyle picong. But
he was one of the biggest rumbos in Trinidad and his joint, the Calinda, was a safe
haven whenever I needed to see if I could still drown my battered soul in rum.

- “Yuh goin to stand up there like a lamppost till Jouvert? Come wet yuh throat and
tell meh what happen to you.”

He made good on his offer, inviting me to sit next to him and serving up two good
stiff drinks.

- “So who mash up yuh face so old boy?”

- “Is Anita who do that the other night. I come in town to lime with some friends in
one of the old tents that only have the name now but where you could still hear the
best calypsonians. It had Whitie, Lord Inferior, the Duke of Steel, Mighty Hammer
and some others. We was havin a few drinks by the bar when the boss man come out on
stage and announce: “Ladies and gentleman, I now invite you to warmly welcome the
Calypso Queen, the one, the only, the undisputed… CALYPSO!!! ROSE!!!” I was going
up to the stage to pay my respects when -BAM!- one shoe to face! Stupid me forget
that she has the annoying habit of flinging off her shoes just as she starts the
second song.”

- “So that explains the first bump, what about the second one?”

When I got home, drunk like a fish, Anita grabbed me by the collar. Just from the
way she was looking at me I knew I wasn’t going to get away.

- “This is the hour you will look to come home? Who you was out limin’ with again?”
- “I was with Rose…”

Well who tell me to say that? Before I could even finish my sentence I was face to
face with her rolling pin, apart from that, she is a sweetheart.

-“ But darling, yuh doh understand, leh meh explain.”

It took at least three quarters of an hour for Hurricane Anita to blow over.

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 - “She’s ah ole friend. We went primary school together. Her father was a pastor in
Tobago. He had thirteen hungry mouth to feed and was ketchin his ass to make ends
meet so he end up sending McCartha Linda Sandy Lewis –that’s what they called her
back then- to stay with a relative in Trinidad. Poor thing, she was thin like a pin
.Look how things change, eh? A few years later, in 1956, I was surprised to find her
in the Young Brigade tent. She sing her first calypsoes there under the name Crusoe
Kid. Then we lost toucht again until I find her with Lord Kitchener in 1963. She had
become a real pro and people were calling her Calypso Rose now. This new name brought
her luck, even though she lost the Calypso King title by one point to Kitchener in
1975. She took her revenge in 1977 when she became the first woman to take the Road
March with “Tempo”, and then winning it again the following year with
“Come Leh We Jam” and to top it all off the Calypso Monarch with “Her Majesty” and
“I Thank Thee”.

Anita didn’t give a damn about all that.

- “Doh tell meh no rubbish. Your precious Rose is nothing but a man-eater! Just
listen to the lyrics of her songs…
- “No, no, no, darling. She’s a good Christian like you and me, ah honest woman, ah
tellin yuh, ah real saint!”
- “Oh really?! Well yuh want to explain to me why it is Sparrow sing and say: “Rose
girl ah want yuh bad…”
- “But that’s not it at all! He wasn’t talkin bout her, is Rose from Laventille,
Lloydie “the cleaner” and Queen Maribone daughter. My poor Anita, you does really
see everything for the worst, yes.”

Seeing the look of suspicion on her face I couldn’t think of anything better to
say than:

- “And even if I take ah wine with the Calypso Queen, what is the problem?”
I narrowly escaped another blow from Anita’s rolling pin and had to take to my heels

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 so that she wouldn’t beat me to a pulp. And that’s how I ended up here.

Raymond hit me a hard thump in the back.

- “Doh move. Ah have just de ting for you. Ah homemade tonic, you’ll tell meh how
it work.”
He ran off backstage, but while I was expecting to see him reappear with a beer from
his private stash, he handed me a cardboard square.

- “What the hell is that?”
- “Rose latest record.”
- “(Pointing at my glass) Gimme the same.”

I was about to really study the thing when Anita appeared out of nowhere. Weary of
my encounters with her rolling pin I took in front and made a run for it, leaving
behind the object you hold in your hands. Lucky buggers…

*Smokey

P.S. Please return this record when you’ve finished savouring it. I won’t lay
charges, I promise.

* The Mighty Smokey hosts the leading programme on WMAS 1340-AM, the favourite
radio station of all masqueraders, chantwells, stickfighters, jamettes and other
nèg jardins.

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Booklet479022.indd 8 15/09/08 16:33:03
 Produced & Mixed by Gordon Cyrus

Recording Sessions:
Third Degree Studio, Port of Spain, Trinidad & Tobago
on board M/J Stjernorp, Stockholm Sweden
L.U.V. studio, Paris France
Recorded by Mark Wright & Gordon Cyrus

Gordon Cyrus: Programming & everything

Desmond Foster: Additional Production & Arrangements
Bass, Guitar, Keyboards, Percussion & Backing vocals

Anthony Voisin: Guitar

Ralph Davis: Piano
Harold Richards: Double bass
Emah: Double bass
Sean Thomas: Drums
Laurent Di Carlo: Drums
Philippe Monrose: Percussion
Shuba-K: horn section
Sylvain Bardiau: Trumpet & Trombone
Fabien Kisoka: Sax & Flute

on “Summertime”:
Fred Deshayes: Guitar & Vocals
Vincent De Leon: Programming
Daniel Burgess: Keyboards
Peter Noel: Bass
Monique Lewis: Backing Vocals

“Rhum & Coca-Cola” Alternate Version From “Calypso @ Dirty Jim’s”

Produced & Mixed by Sodi
Studio Zarma, Paris
Patrick Goraguer: Keyboards & Percussion
Hayen Robin: Trumpet

A&R: Thierry Planelle for Maturity Music

Executive Producer: Jean Michel Gibert

Original Art & Design: Jay One

Photos: Pascale Obolo
Liner Notes: Smokey
Special thanks: Pascal Bussy

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 1-Back to Africa
(Mc Cartha Lewis) Ice Music
2-Summertime feat. Soft/Fred Deshayes
(Mc Cartha Lewis/Arr.Deshayes) Maturity Music
3-Calypso Blues
(Cole/George) Crestview Music/EMI
4-Israel by Bus
(Mc Cartha Lewis) Ice Music
5-Sweet Brown Sugar
(Mc Cartha Lewis) Ice Music
6-Underneath the Mango Tree
(Norman) Unart Music
7-I Say A Little Prayer
(David/Bacharach) Universal/MCA Music
8-A Man Is a Man
(Mc Cartha Lewis) Ice Music
9-How Long
(Mc Cartha Lewis) Hakataka Music
10-Voodoo Lay Loo
(Mc Cartha Lewis) Ice Music
11-Rhum and Coca-Cola *Bonus Track
(Amsterdam/Baron/Sullivan) EMI Music Publishing

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 1-Back to Africa
2-Summertime feat. Soft/Fred Deshayes
3-Calypso Blues
4-Israel by Bus
5-Sweet Brown Sugar
6-Underneath the Mango Tree
7-I Say a Little Prayer
8-A Man Is a Man
9-How Long
10-Voodoo Lay Loo
11-Rhum and Coca-Cola *Bonus Track

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