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Le SIHH 2010, une édition anniversaire aux accents de

sincérité

Lors de la vingtième édition du Salon International de la Haute Horlogerie, les marques


exposantes ont fait preuve de retenue, d’un retour à leurs valeurs fondamentales, non sans
ce brin de folie qui les distingue dans les métiers d’art et les grandes complications.

Christophe Roulet

Pour son édition anniversaire fêtant ses vingt ans, le Salon International de la Haute
Horlogerie (SIHH) a pu renouer avec un brin d’optimisme, contrairement à l’an dernier où le
marasme financier qui se propageait à travers la planète commençait à laminer le moral des
plus aguerris. La hausse de fréquentation de 10% à 12’500 visiteurs, dont 1200 représentants
des médias internationaux, en est un signe évident. Changement d’ambiance donc et regain
d’intérêt pour des réalisations qui, cette année, étaient clairement placées sous le signe de la
retenue, du classicisme et des savoir-faire de la branche. « On observe clairement un état
d’esprit plus positif, résume Stéphane Belmont, directeur ventes et marketing de Jaeger-
LeCoultre. Alors que l’an dernier, la plupart des Maisons horlogères se sont repliées sur elles-
mêmes comme des huîtres, elles sont aujourd’hui à nouveau prêtes à s’enthousiasmer dans la
mesure où le pire est certainement passé. Mais si nous devions retenir une leçon de ces dix-
huit derniers mois, je dirais qu’il s’agit maintenant de reprendre conscience de la valeur des
choses. »

Retour sur terre

Jaeger-LeCoultre vient ainsi cette année avec sa toute nouvelle Master Compressor Extreme
LAB 2, une montre « laboratoire » qui réinterprète les codes du chronographe pour CHF
52’400.- (€ 35’600.-). La manufacture propose également une nouvelle Duomètre à
Quantième Lunaire et seconde foudroyante pour CHF 34’000.- (€ 23’100.-). « La crise a peut-
être eu ceci de bon que l’ensemble de la profession est revenu aux vraies valeurs, loin de
l’exubérance de ces années passée, poursuit Stéphane Belmont. Un bon point pour Jaeger-
LeCoultre qui excelle dans la belle horlogerie classique avec un niveau de technicité qui
s’exprime dans l’innovation mécanique sans jamais avoir cédé à la surenchère. » Les
exagérations de ce dernier lustre semblent ainsi définitivement faire partie du passé. « Avec
des consommateurs qui, de nos jours, réfléchissent trois fois avant d’acheter une montre de
luxe, il nous faut rester réalistes, explique Philippe Merck, patron d’Audemars Piguet. Les
trois derniers mois ont certes été meilleurs qu’il y a un an mais il est encore trop tôt de parler
de reprise. » C’est certainement une des raisons qui a guidé la Maison du Brassus à revoir son
entrée de gamme. Au SIHH 2010, Audemars Piguet est ainsi venu avec une Royal Oak
Offshore Diver positionnée largement en dessous des CHF 20’000.- (€ 13’500.-), une
première pour la marque.
Rien d’étonnant dans ces conditions à ce que les Maisons redécouvrent les vertus de la « ligne
claire » comme diraient les auteurs de bandes dessinées. En conséquence, elles se sont quasi
toutes livrées à cet exercice d’introspection consistant à faire ressortir le meilleur d’elles-
mêmes au sein de collections clairement empreintes des vertus du passé. Chez Vacheron
Constantin, la démarche a pris la forme des Historique Ultra-fine 1955 et Historique Ultra-
fine 1968 ou « l’extra-plat en héritage, et des Patrimony Traditionnelle et Patrimony
Contemporaine Date et Jour Rétrograde. « Nous sommes revenus à des évocations plus
poétiques, à notre maîtrise de l’élégance dans le domaine des montres extra-plates, commente
sobrement Juan Carols Torres, patron de la marque. » Même constat chez Piaget avec son
Altiplano 43mm automatique avec petite seconde à 5h qui vient célébrer le cinquantième
anniversaire de son mouvement extra-plat, le 12P lancé en 1960, ou encore chez IWC avec sa
Portugaise à remontage manuel et Girard Perregaux avec sa 1966 Petite Seconde. Sans oublier
la dernière née de Cartier, la Calibre avec petite seconde à 6h et quantième à guichet qui
célèbre les codes de la marque ou encore la Mare Nostrum 52 mm de Panerai, fidèle aux
pièces réalisées en 1943 pour la marine italienne, l’Aquascope de JeanRichard, inspirée d’un
modèle de la marque datant des années 60 et les deux nouvelles interprétations de la
légendaire Memovox par Jaeger-LeCoultre, les Master Memovox et Master Memovox
International.

Maîtrise des grandes complications

Cette sagesse dans la mécanique des formes n’a toutefois pas envahi l’entier du Salon, tant
s’en faut. La recherche sur les matériaux continue d’occuper les laboratoires des Maisons
horlogère avec quelques nouvelles réalisations à la clé comme la Montblanc Nicolas Rieussec
Chronographe avec échappement en silicium, la Royal Oak Offshore Grand Prix qui exprime
l’audace d’Audemars Piguet dans un alliage de carbone forgé et de céramique ayant nécessité
deux ans de développement ou encore la Radiomir Composite Marina Militare 8 Jours de
Panerai, dont le boîtier représente une première dans la Haute Horlogerie, fruit d’un procédé
électrochimique de céramisation de l’aluminium qui rend ce matériau composite plus dur que
la céramique, l’acier ou le titane et nettement plus léger. Après la ID One de Cartier, présentée
en décembre dernier comme la première « concept watch » ne nécessitant aucun réglage grâce
à l’utilisation de matériaux de haute technologie, ces pièces continuent de défricher de
nouveaux territoires, à l’instar de la RM 017 de Richard Mille qui équipe désormais tout ses
modèles tourbillons d’une platine en nanofibres de carbone

Côté grandes complications, les marques exposantes au SIHH n’ont pas davantage bridé leur
imagination sans toutefois tomber dans la course aux réalisations les plus ébouriffantes
observées ces dernières années. A noter toutefois le lancement de modèles originaux comme
la Rotonde de Cartier Astrotourbillon, le Double Tourbillon technique de Greubel Forsey, le
Pont des Amoureux de Van Cleef & Arpels à affichage rétrograde des plus poétiques ou la
Piaget Polo Tourbillon Relatif. La combinaison des complications représente également une
prouesse réalisée par plusieurs marques comme Vacheron Constantin et sa Patrimony
Traditionnelle « Calibre 2755 » qui réunit un tourbillon, un quantième perpétuel et une
répétition à minutes. Audemars Piguet n’est pas en reste avec sa Millenary Carbon One alliant
un tourbillon et un chronographe. Roger Dubuis réaffirme également son savoir-faire dans
l’Excalibur Double Tourbillon, tout comme IWC avec sa Portugaise Tourbillon Mystère
Rétrograde et A. Lange & Söhne avec la seconde édition de son Tourbographe Pour le Mérite
doté d’un tourbillon une minute, chronographe à rattrapante et transmission fusée-chaine.
A n’en pas douter, ce vingtième anniversaire du SIHH a largement fait honneur aux Maisons
de Haute Horlogerie.

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