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QUESTIONS DE COMPRÉHENSION DE TEXTE

1. Q’est-ce que le microcrédit ? Pourquoi est-il novateur ?


2. Quels en sont les enjeux dans les pays en voie de développement ? Et en Europe ?
3. Le microcrédit est-il plus efficace pour lutter contre la pauvreté que l'annulation de la dette ou l'aide
publique ?
4. Quels en sont les limites ?
5. En un paragraphe argumenté (15 lignes min) vous expliquerez si et en quelle mesure le microcrédit peut
avoir un impact positif dans votre pays.
ATTENTION : Tout copiage de phrases entières sera sanctionné.

QUESTIONS DE LEXIQUE
Remplacez les mots soulignés par un synonyme ou une expression de sens équivalent (le cas échéant vous
pouvez modifier la structure de la phrase) :
Ensuite parce qu’elle fait un lien entre l’éradication de cette pauvreté et la paix (doc.1)
Au moment où les pays riches souhaitent bâtir des murs de béton ou des labyrinthes administratifs
pour se protéger des pauvres (doc. 1)
…à des personnes considérées comme non solvables selon les critères marchands habituels (doc. 2)
L'année 2005 sera, sous l'égide des Nations Unies, l'Année Internationale de la microfinance. (doc. 4)

Document 1 – Muhammad Yunus, la Grameen Bank et le prix Nobel de la paix

La nouvelle est tombée sans que personne s'y attende : le prix Nobel de la paix a été attribué à Muhammad
Yunus, le banquier des pauvres. Nouvelle plus révolutionnaire qu'il n'y paraît. D'abord parce qu'elle reconnaît
l'oeuvre d'un économiste qui, abandonnant les rivages rassurants de l'économétrie, s'est attaqué à la réalité
de la pauvreté qui ronge notre planète. Ensuite parce qu'elle fait un lien entre l'éradication de cette pauvreté
et la paix.

Parlons d'abord de l'homme. Je l'avais rencontré, il y a vingt-cinq ans dans une des innombrables
conférences sur le développement. Parmi tous les théoriciens qui parlaient doctement de la façon de
changer le monde, ce fut le seul qui raconta avec des mots simples qu'aucun expert n'oserait employer, ce
qu'il avait fait lui-même dans son pays, le Bangladesh, pour sortir les paysans des griffes des usuriers.
Comment ayant vu les femmes du village se tuer au travail pour rembourser des prêts à 100 % par mois, il
leur prêta d'abord de sa poche, puis en garantissant les crédits qu'il négocia avec la banque locale, puis en
créant sa propre banque rurale : la Grameen Bank. Les experts le regardaient, les yeux ronds : ils n'avaient
pas l'habitude qu'un de leurs pairs s'engage dans la vie réelle. Ils n'avaient jamais fait le lien entre la vision
macroéconomique qui fait du crédit l'un des principaux instruments de la croissance et l'approche
microéconomique où « l'on ne prête qu'aux riches », car les pauvres sont considérés comme incapables de
faire fructifier le capital et moins encore de rembourser le prêt.

Ce message du réel, j'ai vu M. Yunus le défendre avec la même conviction et simplicité à de multiples
occasions : lors des réunions que j'avais essayé d'organiser en France dans les années 1980 où le public
était clairsemé, dans les villages du Bangladesh ou face à des chefs d'Etat.

La rencontre avec M. Yunus et la découverte du microcrédit changèrent ma vie, car d'économiste de


développement je suis devenue moi-même militante d'un secteur financier ouvert à tous. J'allai voir la
Grameen Bank, qui, à l'époque, avait une centaine de milliers de clients et j'écrivis dans mon rapport de
mission de 1988 que la Grameen Bank conjugue une application harmonieuse de la théorie économique, de
la fonction bancaire, de la psychologie, de l'éducation, de « l'art militaire » - par son occupation du terrain - et
de vertus morales telles que la dignité, l'effort, la solidarité, la démocratie. Ce jugement reste toujours vrai, à
ceci près que la banque compte aujourd'hui 6 millions de membres. Dans le cadre de ce qu'elle appelle
Grameen Bank 2, elle a développé l'épargne, assoupli les méthodes, diversifié les produits en créant, par
exemple, des prêts aux étudiants ou aux mendiants.
Son exemple a rayonné autour du Bangladesh en inspirant d'autres actions et en donnant naissance au
mouvement mondial de microcrédit, qui compte aujourd'hui 100 millions de clients. Pour avoir lancé les
premiers programmes de ce type en Afrique de l'Ouest, en Europe centrale et orientale et en France, j'ai pu
constater que, même si les méthodes doivent être adaptées chaque fois au contexte local, les principes
restent toujours les mêmes : confiance aux plus démunis, accès au capital permettant de transformer les
exclus en créateurs de richesse, espoir pour ceux qui n'en avaient pas. Ces principes s'appliquent aussi bien
dans les pays du Sud, où la majorité de la population vit du travail indépendant, que dans les pays du Nord,
dont l'économie se désindustrialise et où le travail indépendant retrouve une nouvelle jeunesse à la faveur
du développement des services et des technologies de communication.

Pourtant les résultats et enjeux du microcrédit vont au-delà de ces résultats, et le jury du prix Nobel a eu
raison de considérer qu'il était un facteur fondamental de la paix. Au moment où les pays riches souhaitent
bâtir des murs de béton ou des labyrinthes administratifs pour se protéger des pauvres - protections
illusoires compte tenu des déséquilibres démographiques et économiques -, au moment où l'exclusion d'une
partie de la population crée un climat de violence dans les quartiers populaires de notre pays, le prix Nobel
de la paix rappelle que la misère et l'exclusion sont le terreau de la révolte et du terrorisme. Que le seul vrai
moyen d'étendre la paix est d'aider les pays pauvres à se développer et de supprimer les poches de
chômage et de misère, qui sont la honte des pays riches. Le microcrédit est un instrument de la croissance
et un outil de la cohésion sociale. Il ne met pas en cause la distribution actuelle des richesses, mais favorise
une répartition future plus juste en donnant sa chance à chacun. Dans une économie qui se dit mondialisée,
mais où 3 milliards de personnes vivent avec moins de 2 dollars par jour sans avoir accès aux services
financiers, M. Yunus tente d'abattre la frontière entre l'économique et le social et ouvre à la finance un
marché nouveau tout en la dotant d'un supplément d'âme.

Ce prix Nobel de la paix interpelle tous les gouvernements. N'est-il pas temps de changer la dimension et
l'orientation des politiques d'aide et de revoir nos politiques protectionnistes à sens unique qui brident le
développement des pays pauvres ? Il interpelle aussi l'Europe. Dans une interview donnée à l'Association
pour le droit à l'initiative économique (ADIE), quelques jours avant l'attribution du prix, M. Yunus disait : «
Mon seul conseil à l'Europe serait qu'elle accorde autant d'attention au microcrédit qu'aux politiques de
protection sociale. L'Europe devrait mettre en place un environnement institutionnel permettant au
microcrédit de se développer. Il faut élaborer une législation qui permette la création des institutions de
microfinance collectant des dépôts et accordant des prêts sans garantie aux personnes à bas revenus et
aux chômeurs. Les barrières institutionnelles doivent être levées pour permettre au microcrédit de fleurir. »
En dépit des avancées importantes, notamment en France, un long chemin reste à faire.
MARIA NOWAK , Article paru dans l'édition du 24.10.06 du Monde

Document 2 - 500 millions de pauvres disposent d'un microcrédit


La Banque mondiale a dressé, mardi 24 janvier, un bilan positif de l'évolution, depuis dix ans, de ce système
qui consiste à octroyer des petits prêts (80 euros en moyenne) à des personnes considérées comme non
solvables selon les critères marchands habituels. « La microfinance vit une période passionnante », affirme
Elizabeth Littlefield, responsable de ce secteur à la Banque mondiale.

Les experts de l'organisation estiment à 500 millions le nombre de bénéficiaires de cette technique de crédit
dans le monde ; un chiffre à comparer aux 3 milliards de personnes pauvres que compte la planète. « Le
potentiel est énorme et le défi aussi », constatent les économistes de la Banque mondiale.

Parmi les succès qu'ils mettent en avant, le Cambodge, où la microfinance était absente il y a quinze ans et
qui compte aujourd'hui 17 banques étrangères et cambodgiennes, servant environ 400 000 clients pauvres.
Au Kenya, l'Equity Bank ouvre chaque année 18 000 nouveaux comptes pour les démunis.

La Banque mondiale se félicite aussi de la multiplication, en Inde et au Brésil notamment, de partenariats


entre banques commerciales et chaînes de supermarchés qui offrent des services de microfinancement aux
clients. L'organisation cite enfin l'Afrique du Sud, les Philippines et le Kenya où des services bancaires par
téléphone portable permettent aux personnes d'accéder au crédit sans quitter leur village.

« Les services financiers pour les pauvres ne peuvent résoudre tous les problèmes causés par la pauvreté,
soulignent les experts de la Banque mondiale , mais ils peuvent aider à fournir des ressources et un certain
pouvoir aux pauvres eux-mêmes pour leur permettre de prendre des décisions quotidiennes. Comme
assurer les frais de scolarité, acheter des livres, envoyer de l'argent à des membres de la famille encore plus
démunis habitant dans les zones rurales éloignées... » « Et ainsi s'engager eux-mêmes sur la voie de sortie
de la pauvreté », ajoutent-ils.
C'est en Asie et dans le Pacifique que le microcrédit est le plus répandu. Ces deux régions totalisent 83 %
des comptes ouverts dans les pays en développement, soit 17 comptes pour 100 habitants. Viennent
ensuite les régions du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord (8 %), l'Afrique subsaharienne (4 %), l'Europe et
l'Asie centrale (3 %) et enfin l'Amérique latine et les Caraïbes (2 %).
Pierre-Antoine Delhommais, Article paru dans l'édition du 27.01.06 du Monde

Document 3 - Jacques Attali réclame un plan en faveur du microcrédit dans les banlieues
ACQUES ATTALI, l'ancien conseiller de François Mitterrand devenu, en 1998, le président de PlaNet Finance, une
organisation non gouvernementale centrée sur le soutien au microcrédit, s'est invité dans le débat sur le malaise des
quartiers en réclamant un plan de développement national de cette forme de prêts qui permette aux exclus bancaires,
aux chômeurs ou aux RMistes, de créer leur entreprise. Estimant que « l'accès au crédit contribue à l'intégration
économique et sociale », M. Attali demande au gouvernement de « faire une priorité de la mise à disposition de prêts
pour créer des entreprises dans les banlieues ».

Outre des moyens supplémentaires pour accroître les capacités de prêt des organismes distributeurs de microcrédits -
essentiellement l'Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE) et France-Active, présidée par l'ancien ministre
des finances Christian Sautter -, il souhaite une politique publique en faveur du microcrédit.

« L'argent existe, mais rien d'efficace ne peut se faire en l'état actuel de la réglementation, estime M. Attali. Les crédits
doivent être disponibles plus rapidement et les organismes de microcrédit autorisés à pratiquer des taux d'intérêt en
rapport avec leurs frais. C'est à ces conditions qu'ils se développeront dans les cités. » Ces recommandations font partie
d'un plan d'action global que PlaNet Finance vient de déposer auprès du Fonds de cohésion sociale.

EXCLUSION FINANCIÈRE

« Nous avons besoin d'un signal fort », estime M. Attali. La présidente de l'ADIE, Maria Nowak, approuve l'initiative et
milite pour que soit « davantage prise en compte l'initiative économique des habitants ». Environ 11 000 microcrédits ont
été accordés en 2004 en France, pour un montant de 144 millions d'euros.

La suppression, en 2003, des aides aux créateurs d'entreprise accordées dans le cadre du Fonds de revitalisation
économique (FRE) a porté un rude coup aux institutions de microcrédit. « On a laissé la priorité à la rénovation urbaine
et à la sécurité, reprend Maria Nowak, il faut réorienter la politique de la ville sur l'action sociale. » Depuis sa création en
1997, l'ADIE a permis la création de 34 000 entreprises, dont 12 % dans les quartiers difficiles.

Pour François-Xavier Bordeaux, président de la Caisse sociale de Bordeaux, une banque solidaire, le problème de
l'exclusion financière dans les zones urbaines sensibles dépasse celui du microcrédit. Il prône la création d' « un service
public de crédit social qui accueillerait tout le monde, sans condition d'âge ou de garantie, avec des crédits de 100 à 10
000 euros ».

Face à ces propositions, le gouvernement fait savoir qu'il « n'a pas attendu pour donner une impulsion au microcrédit »,
renvoyant au Fonds de cohésion sociale, doté de 73 millions d'euros. Selon ses calculs, les mesures incitatives prévues
par la loi Borloo de cohésion sociale de janvier pourraient permettre la création de 10 000 entreprises individuelles à
l'horizon 2006 dans les zones urbaines sensibles.
Anne Michel, Article paru dans l'édition du 23.11.05

Document 4 - Espoirs et limites de la microfinance en Afrique


Les succès des expériences de microfinance conduites en Asie ont fait naître des espoirs pour le développement
économique et social du continent africain à partir de ce type d'outil. Ces espoirs sont-ils fondés et le continent le plus
pauvre dispose-t-il d'atouts en la matière ?
La microfinance est considérée comme un outil très important de lutte contre l'exclusion des services bancaires, mais
aussi contre la pauvreté et les inégalités. L'année 2005 sera, sous l'égide des Nations Unies, l'Année Internationale de la
microfinance. Mais le sujet fait l'objet de controverses. Celles-ci portent sur sa définition (ce qui explique que les
statistiques peuvent être très variables selon les sources et selon la date d'apparition retenue), sur son véritable impact
(certains pensent que c'est quelque chose de relativement secondaire qui donne bonne conscience et qui permet aux
pauvres de survivre) et sur les principaux défis actuels et à venir. (…)

Les impacts de la microfinance

C'est un secteur qui a pris une vraie ampleur puisqu'il compte 54 millions de clients dans le monde, ce qui n'est pas si
éloigné de l'objectif fixé en 1997 au Sommet Mondial du Microcrédit qui était de 100 millions de pauvres touchés en
2005.
Malheureusement, l'Afrique qui ne représente que 10 à 13% du total est défavorisée. Mais de plus en plus, les systèmes
de microfinance sont pris en charge par les politiques nationales, en particulier dans plusieurs pays africains, ce qui
montre qu'ils ont un impact global.

Mais ce qui est intéressant, c'est de regarder l'impact auprès des clients par une approche microéconomique, qui fournit
des résultats si on l'applique au cas par cas à une institution ou à une zone particulière. Par exemple, en Mauritanie, le
Gret a fait une étude sur une institution qui travaille dans les quartiers de Nouakchott. Elle montre que pour les familles
très pauvres, le microcrédit est un outil formidable pour réguler leur trésorerie et ne plus recourir à l'usurier. Les familles
qui ont un capital un peu plus important peuvent très rapidement développer leur activité en recourant à plusieurs cycles
de crédit. L'impact est donc positif pour ces familles et s'apprécie dans la durée.
L'impact social est plus difficile à mesurer faute d'analyses socio-anthropologiques suffisantes. Il a été constaté dans des
villages au Cambodge que dans un système social très déstructuré, d'autres activités se greffent sur l'objectif commun
de la microfinance. La question de savoir qui est réellement touché par la microfinance est posée. Au Cambodge les
trois-quarts des clients sont très pauvres et les riches ne sont pas intéressés par les montants très faibles des crédits.
Mais il a été également constaté qu'une frange très pauvre s'auto excluait des systèmes de solidarité villageoise
existants.

Enfin, la microfinance est un secteur qui globalement a un impact sur la réflexion quant à l'efficacité de l'aide. C'est un
secteur qui a eu très tôt une volonté de transparence et de mise en place de critères, d'indicateurs de performance, de
rentabilité, où la sanction est rapide ce qui permet d'apprécier ce qui peut être fait ou non.

Les défis

Les moyens mis à disposition sont trop modestes au regard des besoins colossaux qui existent. Le second défi est le
refinancement permettant le développement des réseaux et la mise en oeuvre d'outils permettant une bonne
gouvernance et la pérennité laquelle n'est jamais définitivement acquise. Enfin, pour demain, la concurrence avec les
établissements commerciaux risque de s'exacerber compte tenu du poids pris par les réseaux de la microfïnance, ce qui
risque d'entraîner une dégradation des relations entre les deux secteurs.
Les besoins ne sont pas couverts en particulier en zones rurales, et on a tendance à répliquer ce qui marche. Le risque
est que les bailleurs de fonds se recentrent sur les secteurs les plus faciles et les plus rentables comme le milieu urbain
et la petite entreprise. Il y a par ailleurs des besoins de refinancement pour des institutions matures qui ne représentent
que 1 à 2% des institutions. Mais le besoin de subventions sur la durée est indispensable aux premiers cycles de
développement des institutions afin qu'elles puissent répondre aux besoins d'innovation. Cependant, les bailleurs de
fonds sont de moins en moins prêts à intervenir sur la durée.
Il est important de faire ressortir l'impact pédagogique de ces systèmes qui apprennent aux gens à devenir des citoyens
et des responsables. Peu de programmes sont capables d'arriver à ce résultat.

Question : Quelle est l’influence de l'ambiance culturelle sur les fondements des systèmes de microfinance. Ce qui a fait
le succès de la Grameen Bank dans le contexte culturel du Bengladesh n'a pu être reproduit avec succès au Vietnam. Il
en est de même pour les Self made groups, en Inde, qui se basent sur des systèmes de solidarité traditionnels à forte
dynamique sociale et qui bénéficient du soutien de l'Etat à travers un réseau bancaire rural sous-utilisé. Leur réplication
en Birmanie a été un échec. Il y a cependant des fondements communs qui consistent à analyser, préalablement à la
mise en place d'un système de microfinance, les formes de solidarité qui existent pour s'appuyer dessus.

La Lettre de la Cade n°75 - Octobre 2004

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