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Article de feu H. Benhamza mis à jour qui est malheureusement toujours d’actualité.
Au même titre que le 1er novembre 1954, le 20 avril 1980 n’a été ni un coup de tonnerre dans
un ciel serein, ni un complot fomenté par l’étranger bien que les pouvoirs en place aient
employé ces expressions à 50 ans d’intervalle. Le point commun aux deux événements a été
l’aveuglement des gouvernants face à une légitime revendication de liberté dans le premier
cas et d’identité berbère dans le second.
Dès juillet 1962, l’éphémère, Benbella, alors président de la république algérienne cria son
fameux « Nous sommes des Arabes, nous sommes des arabes, nous sommes des arabes. » La
lutte armée du FFS contre le pouvoir personnel de Benbella provoqua une répression
sanglante en Kabylie, la seule région à avoir pris les armes. L’arrestation de Hocine Aït
Ahmed, le chef du FFS, conduisit à la défaite de ce parti qui se reconstitua en France et en
Suisse.
Boumediene qui avait renversé Benbella par un coup d’Etat voulut arabiser l’Algérie en
imposant l’arabisation de l’enseignement, avec la volonté de faire disparaître tous les parlers
berbères. Ce dictateur avait cru réaliser l’unité et la cohésion de l’Algérie en faisant
disparaître la langue kabyle. Il ne tolérait que les collaborateurs, ceux qu’on qualifie de
"Kabyles de service". Il y en eût et il y en a malheureusement encore.
Pendant ce temps, des Kabyles s’organisaient à Paris : Académie berbère en 1967, Agraw
Imazighene en 1969, Groupe d’études berbères à l’université de Vincennes en 1972. Des
militants du FFS poursuivaient, surtout en France, une lutte à la fois politique, pour la
démocratie en Algérie, et culturelle pour la défense de la langue berbère.
En Kabylie, la revendication de l’identité kabyle commença par s’affirmer au sein de la
jeunesse sous l’impulsion de la nouvelle génération de chanteurs. De son côté, l’écrivain
Mouloud Mammeri qui animait une chaire de culture berbère à l’université d’Alger se livrait à
des recherches sur la langue berbère.
En mars 1980, un groupe d’étudiants de l’université de Tizi Ouzou l’invita à donner une
conférence sur la poésie kabyle ancienne. Le préfet de Tizi Ouzou fit interdire la conférence
et cela mit le feu au brasier qui couvait depuis des années et n’attendait qu’un signal. Ce
furent les émeutes d’Avril 1980 suivies d’une répression sauvage dans les locaux même de
l’université de Tizi Ouzou (pas de morts heureusement mais plus de 400 blessés.)
La population des montagnes prit fait en cause pour les étudiants révoltés et descendit en
masse à Tizi Ouzou pour les soutenir. Un bain de sang fut évité de justesse.
Les revendications des émeutiers d’avril 1980 avaient avant tout un caractère culturel. A
l’époque, une espèce de pudeur mal placée interdisait de prononcer le mot « Kabyle ». On
préféra parler de « printemps berbère » bien que la Kabylie fût le seul théâtre de revendication
et on réclama la promotion des parlers populaires car on n’osait pas dénoncer l’arabisation.
S’y ajouta la revendication de la démocratie au plan politique, sans remettre en cause les
options islamiques et socialistes du régime.
Avril 1980 vit la naissance du mouvement culturel berbère [1]. Le 20 avril revêtit en Kabylie
un caractère de fête nationale. Malheureusement, le démon de la division ne tarda à exercer
ses effets corrupteurs. En 1989, des animateurs du MCB décidèrent de créer un parti politique,
le RCD. Ils avaient proclamé « le MCB est mort, vive le RCD ! »
Peu après les deux partis kabyles - FFS et RCD - s’efforcèrent de s’annexer le MCB. [2]
Chaque tendance voulut commémorer le 20 avril à son profit. Des responsables faillirent en
venir aux mains sous l’oeil amusé des responsables du pouvoir algérien.
La dernière décennie du 20e siècle fut marquée par la sanglante révolte des islamistes dans le
but d’imposer la charia en Algérie. On parle de 200.000 morts, sans compter les blessés et la
destruction de biens publics.
Vingt années après avril 1980, la situation économique et sociale des Algériens a continué à
se dégrader. Aux pénuries du règne de Boumediene, à la misère de masse du temps de
Chadli [3] ont succédé la pseudo démocratie et une fausse économie de marché. Chômage,
crise du logement, pollution de l’environnement, injustices, contraintes bureaucratiques sont
allés de pair avec la naissance d’immense fortunes bâties sur l’affairisme et la corruption.
La différence est qu’en Kabylie des gendarmes se conduisaient comme en pays conquis et
utilisaient des propos racistes. C’est ainsi qu’en remettant Matoub, blessé, aux infirmiers de
l’hôpital de Michelet, l’un des pandores leur a dit « Prenez votre chien ! [4] ».
La répression poussa des milliers de gens dans la rue à Tizi Ouzou. En juin 2001, le
déferlement de millions de Kabyles sur Alger ébranla la capitale. Il s’agissait de remettre au
président de la République le texte de la « Plateforme d’El Kseur ». Les archs avaient pris
l’affaire en main. Démocratie à la base. Un immense espoir était né. La violence a cessé mais
ensuite le pouvoir a rusé. Les auteurs de la "Plateforme"
"Plateforme" l’ont confondue avec celles du 1er
novembre et celle du Congrès de la Soummam. Les deux premières avaient des chances
d’aboutir parce qu’elles traduisaient la volonté de la majorité des Algériens. Celle d’El Kseur
prétendait sortir de la crise l’ensemble
l’ensemble des Algériens alors qu’elle n’était soutenue que par les
Kabyles.. Les Archs se sont divisés entre dialoguistes et intransigeants. Ils ont fini par perdre
toute audience.
Cessons d’exiger que la langue berbère soit reconnue comme seconde langue nationale dans
l’ensemble de l’Algérie. Le pouvoir ne le veut pas, les arabophones la refusent.
Unissons nos offerts pour l’autonomie de la Kabylie, dès lors que vouloir lutter pour la
démocratie en Algérie est un leurre. Et pour ne plus avoir à revivre de 20 avril et de printemps
noirs sanglants.
Notes
[1]] MCB, Mouvement pour la Culture Berbère
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