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Introduction

Les nouvelles technologies informatiques


et de télécommunication constituent un phénomène
de société qui bouleversent profondemment de
nombreuses habitudes individuelles et économiques.
A ce titre, la consommation musicale n’y échappe
pas. Accompagnées de multiples débats, des
adaptations législatives s’avèrent indispensables à
ces mutations profondes qui dépassent les frontières
et soulèvent des questions au niveau internationnal.
Internet a fait naître de nouveaux comportements
que la filière musicale essaie de comprendre pour
s’adapter progressivement. Ce document retrace
l’histoire de ces évolutions et présente un état des
lieux du paysage de la musique numérique.

fic h e s
les

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Sommaire

Lexique à l’usage des néophytes p.4


Acteurs de la musique numérique p.4
Technique de diffusion p.4
Concepts majeurs p.5

1.Des évolutions fondamentales p.6


Excluabilité et rivalité p.6
Tous pirates ? p.6
Tous créateurs ? p.7

2. Droits d’auteurs 2.0 p.8


Qaunt il s’agit de droit d’auteur... p.8
... la justice n’est pas loin p.9
Interopérabilité ou incompatibilité ? p.10
Enjeux et capacités des DRM p.10
Les limites des DRM p.11

3. Les tâtonnements de l’industrie musicale p.12


Les nouveaux modes de diffusion p.12
P2P + mp3 = abondance de musique p.12
L’incompréhension de l’industrie culturelle p.13
Des erreurs stratégiques p.13
La non-réactivité p.13
Contenu, contenant et diffusion... p.14
La crise du disque : autre explication p.14

4. L’offre légale p.15


Apple crée la norme... p.15
...et les concurrents s’alignent p.15
Qui gagne quoi? p.16
La diffusion libre et encouragée p.16
Le modèle basé sur la publicité p.17
Problématique de ce modèle p.18
Les offres des acteurs de télécommunication p.18

5.L’influence du Web 2.0 p.19


Les réseaux sociaux p.19
Recommandations audio p.20
La participation de l’internaute p.20
L’avenir de la direction artistique p.21

Sources p.22

Cette fiche est distribuée sous licence Creative Commons cc-by-nc-sa 2.0
Pour plus d’informations, consultez http://fr.creativecommons.org
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Lexique à l’usage des néophytes

Quelques notions qu’il est bon de cerner...

Acteurs de la musique numérique :


• FAI : Fournisseur d’Accès à Internet (en France, Orange, Free, Neuf, Numéricable,
etc.)

• SPRD : Société de Perception et de Répartition des Droits d’Auteurs. En France, dans le


domaine de la musique, ce sont principalement la SACEM pour les auteurs-compositeurs,
l’ADAMI et la SPEDIDAM pour les artistes interprètes, la SCPP et la SPPF pour les
producteurs.

• Majors : Sont appelées majors les firmes internationale comme Universal music, sony-
BMG, EMI ou Warner music. Présente sur l’ensemble du cycle de production et de
distribution, une major détient plusieurs labels intégrés, une branche éditoriale, des
usines de fabrication et des réseaux de distribution. Les quatre majors citées ci dessus
réalisent près des trois quarts du chiffre d’affaires mondial de l’industrie, et plus de 80%
en Europe et aux Etats-Unis.

Techniques de diffusion :
• Streaming : technique permettant l’écoute d’un titre ou d’une web radio en temps réel,
les fichiers musicaux n’étant pas stockés sur le disque dur, si ce n’est dans la mémoire
temporaire.

• MP3 : MPEG 1 layer 3. C’est un format de fichier numérique compressé, c’est-à-dire


une transformation d’un fichier, musical par exemple, identique au niveau du contenu
mais plus léger en terme de taille numérique et plus bas en terme de qualité d’écoute
(perte).

• DRM : Digital Rights Management. La gestion numérique des droits a pour objectif de
contrôler par des mesures techniques de protection l’utilisation qui est faite des œuvres
numériques. La technique se voulant suffisante et nécessaire au contrôle, elle prévoit
par exemple de :

• Blog : le blog permet a tout un chacun de s’exprimer face à une audience potentielle
de millions de personnes. Le blogeur peut proposer des images, des videos, du son et
ainsi devenir un relais pour les industries de contenus . A ce titre, les blogueurs les plus
influents sont intégrés dans les plans médias de ces industries !

• Podcasting : ce procédé permet à un créateur de mettre régulièrement à disposition du


contenu audio ou video de manière automatisée, sous forme d’abonnement quasiment
toujours gratuit. Il suffit à un internaute de s’abonner à un flux RSS ou ATOM pour
télécharger automatiquement tout nouveau contenu du podcast de son choix et le lire
sur son ordinateur ou sur son baladeur numérique. A souligner : il n’existe pas encors de
contrat SACEM pour les podcast.

4
Lexique à l’usage des néophytes

Concepts majeurs :
• Interopérabilité : c’est le fait que plusieurs systèmes concurrents, qu’ils soient similaires
ou radicalement différents, puissent communiquer sans ambiguïté et opérer ensemble.

• Copie privée : la copie privée est une exception au droit d’auteur français. L’exception
de copie privée autorise une personne à reproduire une œuvre de l’esprit pour son usage
privé. L’usage privé implique l’utilisation de la ou des copies dans le cercle privé, notion
incluant la famille, mais aussi les amis, comme l’ont redéfini les tribunaux récemment.

La copie privée peut avoir comme En contrepartie, une partie du prix


source une œuvre achetée par le copiste d’achat de certains consommables et
ou reçue suite à la diffusion (dans le cas appareils multimédia, notamment les CD-R
de la diffusion d’un film à la télévision par et RW vierges, ou la mémoire flash et les
exemple). La question de la licité de la appareils en contenant, telles les clé USB,
source reste en suspens : l’exception de est prélevée sous forme de redevance pour
copie privée suppose-t-elle que le fichier à la rémunération de la copie privée. Cette
partir duquel est fait la copie soit licite? La redevance est ensuite reversée à mesure
Cour de Cassation, dans son arrêt de la moitié de l’argent prélevé pour les
du 30 mai 2006, avait évoqué auteurs, un quart pour les artistes
ce point en reprochant à la interprètes, et un quart pour les
Cour d’Appel de Montpellier sociétés de production. L’obligation
d’avoir relaxé un étudiant de payer cette redevance s’impose
accusé d’avoir copié aux fabricants ou aux importateurs
illégalement 509 films sans installés en France. Les sites
se prononcer sur le caractère Internet européens n’y sont
licite ou non de la source. pas soumis, a rappelé la Cour
L’affaire avait été renvoyé d’Appel de Paris dans un
devant la Cour d’Appel arrêt du 22 mars 2007.
d’Aix-en-Provence. Celle-
ci a éludé cette question en
fondant la condamnation du
jeune internaute sur le fait qu’il prêtait
les CD litigieux à ses amis et dépassait
ainsi le cadre de l’usage privé.

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1. Des évolutions fondamentales

Excluabilité et rivalité

Lorsqu’il n’existait ni graveur, encore moins Internet, la musique qui a pourtant
un contenu immatériel, n’existait qu’a travers l’objet disque, qui avait un prix. Cet objet, le
phonogramme, dont le contenu ne pouvait se dévoiler si et seulement si l’on s’acquitte du prix
de cet objet : c’est l’excluabilité. Enfin, c’était un bien rival, car la consommation d’un contenu
musical par un individu donné empêche tout autre de le consommer simultanément.

La musique plongé dans l’univers numérique bouleverse tout cela pour faire du
phonogramme exclusif et rival un fichier musical non rival et non exclusif, donc un bien
collectif . Puisque l’on peut reproduire un fichier numérique pour un coût quasi nul, le
numérique abolit effectivement la rivalité attaché au phonogramme. Explication : le fichier
musical est encore souvent comparé à une baguette de pain mais il est absurde de les
assimiler et d’appliquer aux biens numériques les mêmes règles de propriété qu’aux biens
physiques puisque, lorsqu’on donne un fichier numérique, on en garde une copie (ce qui
n’est pas le cas d’un caddie de supermarché).

Quand à l’excluabilité, l’ampleur de la diffusion du MP3


rend très difficilement l’accès non libre à la musique. C’est la
stricte application des droits d’auteurs et les moyens divers de
protections qui pourront rendre de nouveau exclusif le fichier
musical pour recréer un objet limité de par son accès. On touche
ici le coeur de ce que certains ont appelé « la guerre contre le
terrorisme » : Internet, MP3, Peer to peer... « le piratage ».

Tous pirates ?

Le « piratage » n’est pas nouveau. Depuis la fin des
années 80, un quart des CDs vendu dans le monde étaient
des copies. Mais le MP3 et Internet ont changé la donne en
offrant la possibilité de reproduire sans perte de qualité et à
l’identique une oeuvre et ainsi de pouvoir la diffuser à moindre
coût et dans le monde entier. Et, ce fut la première fois qu’une
activité économique fut « attaquée » par un marché de contre
façon devenu une activité non commerciale. La sémantique
employée pour parler du partage de fichier illégal n’est pas
irréfléchie. On parle de piratage, de guerre... Pourquoi sortir
ainsi ce vocabulaire guerrier ?

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1. Des évolutions fondamentales

Avec l’arrivée d’Internet, un gouffre s’est construit sous les pieds de chacun
d’entre nous. Un gouffre qui conjugue la transformation d’oeuvres et d’informations en tout genre en
fichiers numériques et la mise en réseaux à l’échelle planétaire de ces fichiers. Une vraie révolution.
Personne ne mesurait la capacité de ce gouffre à changer notre quotidien, et à modifier la diffusion
des oeuvres : les formes de protections existantes vont changer. L’ordre moral, économique et
culturel aussi. Car il ne faut pas s’y tromper, Internet a fait naître une nouvelle
façon de vivre ensemble, de communiquer, de se représenter
le monde... Mais tant les pouvoirs publics que les forces
capitalistes privés ont mis du temps à réagir a ce gouffre. Plus
de temps que l’utilisateur, l’internaute, qui s’est approprié cet
outil et a rapidement cerné les possibilités de créer un réseau
de partage. Cette évolution est un cas inédit : l’utilisateur a su
s’approprier un outil avant les pouvoirs publics ou privés.

Tous créateurs ?
Début 2007, ce sont et transformer de l’information. lucratif et qui est apte à évoluer
30 millions de Français qui Enfin, il est possible encore très rapidement. On peut aussi
sont abonnés à Internet haut à moindre coût de diffuser parler de la renaissance du
débit. Plus de 50% d’entre le résultat de ces travaux au contre-journalisme : lassé de
eux produisent des contenus monde entier. Qui aurait pu l’allégeance des médias au
(blogs, pages personnelles...) annoncer cela il y a ne serait-ce pouvoir en place, de nombreux
et partagent avec d’autres que 30 ans ? En plus, Internet sites d’informations alternatif
internautes des analyses, des offre la possibilité de créer ont ouvert et offre une sérieuse
infos, des photos, des vidéos, collectivement sans sortir de alternative aux médias
de la musique... La moitié des chez soi. Ainsi, une intelligence traditionnels.
internautes téléchargent des collective peut naître. Le plus connu
films ou de la musique, ce C’est ainsi que des est le réseau
chiffre atteignant plus de 70% logiciels libres tels Indymedia, présent
chez les 12-24 ans. Le plus que les systèmes dans le monde
souvent gratuitement. d’exploitation entier, qui permet a
Récemment, des basés sur Linux chacun de diffuser
enquêtes Médiamétrie montrent sont gratuits et une information.
que ce phénomène s’étend plus efficaces Indymedia a par
malgré un risque de répression. que des payants : exemple eu un rôle
N’importe qui peut télécharger contrairement à une primordial lors du G8
un logiciel de montage vidéo entreprise qui a quelques Genes pour offrir un autre
ou de mixage de musique. salariés qui oeuvre sur un angle de vue , sans doute plus
Ainsi, chacun peut enregistrer produit, dans ce cas ce sont critique et objectif. On le voit,
avec une caméra numérique des milliers d’informaticiens du Internet permet de diffuser
de l’image ou avec un PC et monde entier qui se mettent en masse des contenus auto
une table de mixage du son en en réseaux pour créer avec produits, ce qui semble être une
qualité convenable à moindre leur intelligence individuelle aubaine pour un grand nombre
coût. Il peut aussi récupérer un produit collectif a but non de personnes en tout genre.

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2. Droits d’auteur 2.0

Les exemples des applications changée, surveillance et filtrage donc atteinte


collective, démocratiques et libérée des à la liberté individuelle... Car Internet peut être
contraintes commerciales d’Internet ne un fabuleux outil. Mais si jamais l’industrie et
manquent pas dans un monde qui se veut de l’état ne trouve pas de solutions convenable
plus en plus démocratique, justement, mais qui idéologiquement et économiquement (bien que
en réalité, l’est de moins en moins. Sans vouloir des propositions concrètes et convenables
tomber dans l’utopie (ou l’enfer) de la société existent), il est possible qu’à travers un
de l’information, il semble important de mesurer ensemble de lois restrictives et de surveillance
les changements induits par le net. Mais aussi généralisée, Internet puisse se transformer en
les questions que cela soulève : accès à tous un outil liberticide. L’homme donne tout son sens
et particulièrement aux pays du sud, formations, aux outils suivant l’utilisation qu’il en fait.
solitude face à l’écran et donc relation sociale

Quand il s’agit de droits d’auteur...


Chaque innovation technique a donné naissance à de nouveaux modes de
diffusion entrainant une modification du droit d’auteur existant et de ses dispositifs. Au delà
d’une simple adaptation, les technologies nouvelles ont donné naissance à de nouveaux
droits (droits voisins) et à de nouveaux modes de rémunération (copie privée, rémunération
équitable). Voir Fiche Boxson #1 : Droits d’auteurs et droits voisins en musique.

Les nouvelles technologies touchent souvent au sacro-saint droit d’auteur


et son droit moral. Droit moral d’abord, car la re-création des
oeuvres dénature (c’est suivant l’avis de chacun) les oeuvres
originales. Ensuite la qualité de sa diffusion (Internet est le
royaume des différentes sources) pose question car on peut
prendre une oeuvre, la transformer et la diffuser dans une qualité
médiocre. Vient aussi tout simplement le format : tout le monde
ne veut pas forcément que sa musique soit utilisé en sonnerie
pour les portables. Ensuite, la diffusion d’enregistrement
de concert live qui est courante ne peut se faire sans l’autorisation de l’auteur. Enfin, le
contexte d’exposition des oeuvres peut poser problème; nous allons le voir, la diffusion de
contenu est souvent financée par la publicité. L’association aléatoire entre une oeuvre et
une marque est criticable...
Bien entendu, les droits patrimoniaux sont touchés puisque de nombreuses oeuvres sont
diffusées sans autorisation. Deux façon d’aborder cela :

• Ces « problèmes » font parties des règles du jeu : la multiplication des usages et des
modes d’appropriation des oeuvres dans un espace de création mondial et ouvert
comme le net ne peut etre que sujet à de telles atteintes aux droits.

• Mener une bataille contre ces « dérives » à plusieurs niveaux : tout en cherchant à
limiter par des moyens légaux et techniques la circulation illicite de leur oeuvres, elles
cherchent à élargir les possibilités d’exploitation de leur catalogue. c’est le choix de
quasi toute la filière musicale aidé par des lois dont nous allons voir les principaux
contenus.
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2. Droits d’auteur 2.0

... la justice n’est pas loin !


D’abord, ce sont les services qui ont été attaqués
tels que Myspace, Youtube... Mais rapidement les Majors et les
SPRD ont brisé un tabou en s’attaquant aux usagers de ces
services, c’est-à-dire aux consommateurs. D’abord entamé aux
Etats-Unis, les méthodes sont souvent disproportionnées : alors
que jusque là, les affaires étaient résolus à l’amiable, en octobre
2007, Jamie Thomas a été condamnée à payer 222 000 dollars
pour avoir partagé 24 chansons sur le réseau P2P Kazaa.

En France, plusieurs dizaines de procès ont été lancés contre des internautes,
notamment par la SACEM et par les sociétés civiles du secteur phonographique (SCPP
et SPPF). Florent Latrive, dans son ouvrage intitulé « du bon usage de la piraterie » décrit
avec humour une scène de procès :

Tout Hollywood est représenté à ce procès : Warner Bros, Disney,


MGM, Paramount,Tristar, la XXth Century Fox, Universal... Dans le box des
accusés, là où l’on s’attend à voir le chef d’un réseau de DVD contrefaits
écoulant des milliers de pièces sur le marché clandestin, se trouve Claude,
retraité breton de 61 ans. Son délit? Comme des millions d’internautes, il a
utilisé un logiciel d’échange gratuit de fichier peer-to-peer pour récupérer
des films sur son disque dur. La perquisition menée à son domicile a fourni
quelques munitions aux studios décidés à obtenir sa condamnation: les
gendarmes ont trouvé des dizaines de films gravés sur des disques rangés
sur ses étagères. Claude n’a jamais fait commerce de ces œuvres. «C’était
juste pour mon usage personnel, il y avait beaucoup de films que j’avais
enregistrés à la télé sur VHS, mais ça prenait moins de place de les graver
sur CD après les avoir téléchargés sur l’Internet», se défend l’accusé qui
trouve «exagérée» cette mise en scène. Ce n’est pas l’avis des studios.
Le 29 avril 2004, le dangereux pirate breton a été condamné à trois mois
de prison avec sursis et 4 000 euros de dommages et intérêts. «C’est une
première, mais ce n’est qu’un début», a menacé Christian Soulié, l’un des
avocats des parties civiles à la sortie de l’audience 1...

Du bon usage de la piraterie, Florent Latrive.


aux Editions La Découverte. Paris 2007. Egalement disponible gratuitement
sur le net sous licence libre à l’adresse http://www.freescape.eu.org

Le problème reste de savoir qu’elle est la nature du partage de fichiers :


infraction ou copie privée ? 9
2. Droits d’auteur 2.0

Interopérabilité ou incompatibilité ?
Un modèle d’incompatibilité
entre formats de fichiers et baladeurs
qui a été suivie par de nombreuses
industries de l’électronique est celui
mis en place par Apple: des systèmes
de protection et d’incompatibilité entre
les fichiers téléchargés sur Itunes et
les baladeurs autres que Ipod, et le
contraire : une incompatibilité Ipod et
fichiers téléchargés ailleurs que sur
Itunes. Cette politique est claire et tend
Interface Itunes Music Store
à accaparer l’exclusivité d’un circuit
de diffusion. Chacun a son format
: windows, Apple, Sony... Cette absence d’interopérabilité entretien un jeu pervers : il freine les
consommateurs dans l’achat légal puisque restreint l’utilisation des fichiers téléchargés. Ainsi, ce
problème additionné aux DRM (dispositifs de protection des fichiers) favorise le p2p où encore
aujourd’hui l’offre est plus diversifiée et les fichiers, en mp3, peuvent être utilisés sans contrainte.
La loi DADVSI votée début 2006 souhaite au contraire une interopérabilité des plateformes de
musique en ligne. Mais cela reste un souhait et la mise en oeuvre est au libre choix de chacun.
Certaines plateformes ont pourtant fait un choix qui semble être porteur de bien des attentes
des consommateurs : par exemple, le site Emusic fonctionne par abonnement (20€/mois pour 90
morceaux), avec des fichiers au format mp3 sans aucune restriction (on garde les fichiers tant que
l’on veut, on peut les copier, les graver a l’infini...).
La question du prix de vente demeure...

Enjeux et Capacités des DRM


Suivre et contrôler l’usage des oeuvres est une priorité pour la filière musical. C’est même
devenu un point central des stratégies de certains industriels. Les objectifs sont d’identifier l’oeuvre
afin de connaître les ayants droits et payer ces derniers, mais aussi de contrôler et limiter l’usage
fait des oeuvres. Les DRM (Digital Rights Management) peuvent :

1. Limiter le nombre de transferts possibles vers des ordinateurs ou baladeurs;


2. Rendre impossible l’utilisation de matériel concurrent pour consulter une oeuvre (incompatibilité
des verrous appliqués aux formats musicaux) ;
3. Autoriser la gravure ou non sur CD / DVD
4. Rendre impossible la consultation d’une oeuvre selon ses
préférences (désactivation de l’avance rapide sur certains passages
publicitaires de DVD) ;
5. Rendre impossible l’extraction numérique de morceaux de
l’oeuvre ;
6. Numéroter chaque copie de l’oeuvre par un numéro de série
unique (water marquage) ;

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2. Droits d’auteur 2.0

Les DRM sont des artifices qui permettent de recréer le schéma économique
exclusif et rival d’un bien physique sur un bien virtuel. Autrement dit, il s’agit pour les industries de
contenu de recréer la rareté du produit physique dans un univers virtuel ou tout est copiable sans
limites et quasiment sans coût et sans perte de qualité.

Les limites des DRM



L’interdiction légale de contourner ces limitations techniques sans accord du propriétaire
de la technique DRM est de plus en plus largement adoptée (loi DADVSI en France). Ces lois
provoquent d’intenses débats car elles interdisent la production de matériel et logiciel concurrents
pour toute entreprise économiquement incapable de négocier face aux industriels. Elles bloquent
alors l’entrée de nouveaux acteurs indépendants sur le marché qui proposeraient des moyens
d’utiliser les oeuvres innovant et respectant les droits d’auteur.
De plus, l’efficacité du recours aux DRM dans la lutte contre « le piratage » n’a pas été démontrée,
ces systèmes de sécurité sont facilement contournables grâce à des logiciels qui circulent
facilement sur le net malgré l’interdiction.
Mais les DRM posent d’autres problèmes: elles imposent des restrictions que le consommateur ne
rencontre pas avec des méthodes de téléchargement illégales. Il n’existe pas de standard de DRM.
Chaque marque possède sa technologie et son format protégé : Windows a le « wma », Apple le
« aac » ... Cela engendre une absence d’interoperabilité gênante pour le consommateur.
Des expérimentations d’abandonner ces DRM se font en 2008 : avec Itunes, Apple a commencé
à le faire. EMI et Universal s’y mettent aussi...
Ce sont des premiers signes d’acceptation du comportement du consommateur par les majors.

Le débat actuel est proche sur certains


points de ceux qui ont accompagné la
plupart des innovations technologiques
du marché de la musique, allant du piano
mécanique à la cassette audio... Cependant,
la convergence des industries culturelles,
informatiques et de télécommunications en
font un véritable enjeu de société.

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3. Les tâtonnements de l’industrie musicale

Les nouveaux modes de diffusion


Dans « Internet, un séisme dans la culture », Marc le Glatin le
dit bien : « Ceux qui sont qualifiés de pirates par des serviteurs de l’art
qui servent surtout leur actionnaires qui les emploient, peuvent avoir
du goût et du discernement .... et peuvent enrichir la palette de ce qui
se voit et de ce qui s’écoute ». Désormais aussi, n’importe quel groupe
peut diffuser sa musique (tout dépend de la localisation de la société
de gestion et de répartition des droits dont il fait partie). Ainsi, pour le
plus connu d’entre eux, le site communautaire Myspace permet à des
millions d’artistes amateurs ou professionnels (bien que la frontière
devient du coup de plus en plus flou entre auteurs, producteurs professionnels et consommateurs
devenus créateurs auto-produits) de faire connaître leur musique. Certains groupes ont même
pu signer chez des labels ayant auparavant balancé leurs
albums sur leur Myspace, comme c’est le cas pour le groupe
Arctic Monkeys. Tout récemment aussi, le groupe ultra-
mondialisé Radiohead a pu se permettre un pied de nez
(marketing) assez intéressant à l’industrie du disque : alors
que le groupe n’avait plus de contrat chez EMI, Radiohead
a sorti son dernier album sur leur site internet en exclusivité.
Chaque internautes décidé du prix de l’album et on pouvait
même le télécharger pour... 0€ !

P2p + mp3 = abondance de musique


Le Mp3 est né dans les années 1990. plus difficiles a faire fermer car basés sur une
Ce sont essentiellement le site internet MP3. architecture différente, décentralisée. A noter, les
com et le développement du haut débit dès éditeurs de logiciels p2p vivent sur la publicité
1998 aux Etats-Unis qui lancent la machine. En ainsi que sur la revente très polémiques de profils
parallèle Napster est né, en 1999, du cerveau d’internautes a travers des logiciels espions.
d’un jeune américain de 19 ans. le Logiciel est Question musique, Internet et le Peer-to-Peer
basé simplement sur la notion du partage et ont offert aux mélomanes une opportunité
de la mise en commun de ce que l’on aime, qu’aucune entreprise culturelle n’avait jamais
une des base d’internet. Ainsi, les ordinateurs osé proposer : mettre en circulation des oeuvres
communiquent entre eux directement pour rares, des oeuvres anciennes ou introuvables
s’échanger des fichiers mp3. Le Peer to Peer est sur les catalogues des Majors. Naspter a été à la
né. En 2001 le site ferme après une plainte de base d’un vrai réseau de mélomanes qui mettait
l’association de l’industrie de l’enregistrement en ligne ces bootleg (version rares) dans
américaine. Mais le milieu de l’informatique le seul but de partager leur
est un terreau très vivace et rapidement amour de la musique.
se créent de nouveaux logiciels
pour faire vivre des réseaux
p2p plus nombreux encore et

12
3. Les tâtonnements de l’industrie musicale

L’incompréhension de l’industrie culturelle

Les entreprises françaises ou filiales de multinationale ont mis beaucoup de temps


à mettre en place une réelle offre attractive de par le nombre de morceaux proposés, leur prix,
ainsi que la facilité d’utilisation de leur plateforme. Il en est de même pour de nombreuses autres
activités économiques. Sans aucun doute l’évolution qu’offre Internet est difficile à gérer pour toute
une génération aux commandes qui est peu imprégnée par ces nouvelles pratiques. D’autant plus
que les majors sont bien conscientes de ce qui se passe : à la perte des profits s’ajoute l’abandon
des moyens de contrôle sur la production de symboles : les multinationales de l’entertainment
(divertissement) détiennent en effet un pouvoir à ne pas négliger : en finançant les films, les
séries, les jeux vidéos, la musique... Les majors veillent à ce que le système de valeurs morales,
économiques, et politiques portés par leur produit reste en conformité avec le système sur lequel
elles sont assises.

Des erreurs stratégiques La non-réactivité


On peut expliquer l’essor du p2p
On peut reprocher à au delà de la gratuité : l’industrie
l’industrie du disque plusieurs erreurs du disque n’a ouvertement pas
stratégique. Par exemple, au milieu des années voulu sortir de son schéma normal
1990, les laboratoires allemands Fraunhofer et développer le numérique. Le
sont venus présenter le format MP3 aux Majors retard ainsi pris et la non volonté de
du disque et ces dernières s’en sont tout comprendre les besoins et les attentes
simplement désintéressées ! Les dirigeants des mélomanes ont fait que pour la première
de l’époque le savent bien : leur souhait était fois l’industrie musicale a perdu le contrôle
d’intégrer le numérique dans le modèle d’affaire de la distribution de son catalogue à cause
traditionnel de l’industrie musical. Ainsi, arrivé a de ses propres choix et sa volonté de tout
la fin des années 1990, les labels commencent contrôler. Les Majors n’avaient pas compris à
à être conscient qu’il existe un certain potentiel quel point l’internaute peut saisir l’outil Internet et
avec la musique numérique. Pourtant, alors créer un fabuleux réseaux d’échange. Pourtant
que Napster et MP3.com se développent pour déjà, certaines Majors auraient pu jouer de la
le bonheur des utilisateurs et le malheur des complémentarité de leurs activités (fournisseurs
Majors, ces dernières, plutôt que de mettre en d’accès à internet, fabricant de baladeur mp3...).
place une vente de leur catalogue en MP3, Un acteur inattendu va jouer finement, tant du
propose des échantillons de basse qualité... coté marketing, économique, que stratégique,
Il faut réellement attendre 2001 pour que puisqu’ il vient du marché informatique et
l’industrie musicale proposent une alternative électronique: il s’agit d’Apple. (Le cas de Apple
au p2p avec Musicnet (EMI, AOL-Time warner, est abordé plus loin dans la fiche).
BMG) et press play (Sony, Universal). Fruit de
plusieurs erreurs et manque en tout genre, ces
plates formes légales ne parviendront pas à
s’imposer (l’abonnement était cher, la qualité des
fichiers impensable aujourd’hui, des
catalogues réduits, des restrictions sur
l’usage des fichiers téléchargés
comme l’impossibilité de graver
ou mettre sur un baladeur mp3).
13
3. Les tâtonnements de l’industrie musicale

Contenu, contenant et diffusion...


en parallèle, les majors commençaient à se
Les sites de musique en ligne plaindre du piratage. Ce jeu schizophrénique
vendent du contenu qu’elles achètent à a souvent été dénoncé.
des Majors. Sur le marché physique tout
comme sur le marché numérique, 4 Majors La crise du disque : autre explication
de la musique sont ultra présentes
: Universal Music, Warner Dans l’ouvrage « l’industrie du disque », les
Music, Sony BMG et EMI. auteurs proposent des explications à la
Sur le marché physique, ces baisse des ventes de disque autre que
4 géants réalisent les ¾ du « le piratage » qui semble, du moins
chiffre d’affaires mondial de pour les Majors, n’être que le seul
l’industrie du disque, laissant responsable de tous leurs maux.
le reste à des centaines de D’abord, ceux-ci expliquent que
labels indépendants. Dans l’explosion de la demande de mobilité
la course au numérique, peut conduire le consommateur
tout comme sur le marché à un arbitrage budgétaire entre ces
physique, les Majors ont un dépenses en biens culturels et en
atout indéniable : la plupart sont équipement (baladeur, clé usb,
des multinationales du multimédia téléphone mobile). Autre constat cité
et du divertissement. Ces dernières précedemment, le faible développement
détiennent et maîtrisent une large gamme de l’offre légal attractive a pu encourager les
de contenus (vidéo, musique, jeux vidéo...) échanges illégaux. Aussi, il faut admettre
et dans une certaine mesure leurs moyens que les supports de musique enregistrée
de diffusion/stockage physique à travers les ont un cycle de vie classique, tout comme
filiales des mêmes grands groupes qui sont n’importe quel produit. Dans les années
des FAI (fournisseurs d’accès à Internet), 1980, l’industrie musicale avait traversée
la télévision par câble/adsl/satellite... C’est une crise car le vinyle arrivait à la fin de son
donc pour ces Majors une réelle force de cycle. Aujourd’hui, c’est au tour du CD de
«détenir les tuyaux et ce que l’on envoie dans subir cette fin de vie. Or, le support qui tend
les tuyaux». On a pu ainsi se retrouver dans à être le plus à même de le remplacer est
des situations ou Sony, en tant que Majors le fichier numérique pour lequel le format
du disque, dénonçait à l’époque le gravage n’a pas été introduit par l’industrie du disque
massif de CDs alors que cette dernière mais par le consommateur lui même.
vendait des graveurs avec une promotion Le succès des plates formes payantes
assez tendancieuse sur la musique. Il en aujourd’hui permet un constat : ce n’est pas
est de même pour les FAI : la plupart ont parce que le p2p est vivace (c’est encore
fait dominer dans leur publicité la possibilité le cas aujourd’hui) que cela empêche le
des télécharger des tonnes de contenus développement de l’économie dite légale de
multimédia (alors qu’à l’époque il n’existait la musique numérique. Toutefois, l’évolution
aucune plateforme légale satisfaisante sur de l’année 2007/2008 tend vers... la gratuité
l’offre/prix contrairement à aujourd’hui) et légale!

14
4. L’offre légale

Apple crée la norme...


Cette firme de l’électronique La rémunération
grand public va mettre en place une stratégie versée aux maisons
et un circuit de vente de musique en ligne très de disque sur la vente
efficace mais largement critiquable. A partir de d’album numérique
2003 Apple commence à maîtriser un circuit représente (apres
de vente de par sa plateforme lecteur Itunes prélèvement bancaire
music store, jusqu’à l’écoute avec son baladeur et droits Sacem) en
Ipod. Apple est critiquable sur plusieurs angles. moyenne 70% du prix
D’abord, la firme de Steve Jobs a fixé le prix hors taxe du disque.
de vente d’un morceau (0,99€ le titre); si Apple Pour un album physique, ce chiffre se situe
a décidé de ce prix, c’est parce qu’Itunes est autour de 45%, une fois décomptés les frais
un produit d’appel pour vendre des Ipods ou là, de distribution et de pressage, inexistants en
Apple se fait une marge confortable. Le souci ligne, ainsi que la somme dues aux auteurs et la
est qu’avec le succès d’Itunes, l’ensemble marge moyenne des détaillants. Concrètement,
des plateformes légales se sont abaissées et cela veut dire qu’un album vendu en ligne est
alignées sur ce prix sans critères d’estimation sur largement plus rentable qu’un album physique.
sa pertinence. Ainsi aujourd’hui, le prix universel Nous reviendrons sur les questions de coûts
d’un titre est de 0,99€. Un album, quel que soit plus tard.
le nombre de titre est facturé 9,99€.

...et les concurrents s’alignent


La firme à la pomme est le leader de la vente de musique numérique payante (La
plateforme iTunes Store compte désormais 50 millions de clients et a vendu plus de 4 milliards de
chansons, avec un catalogue qui compte plus de 6 millions de chansons
collectées auprès des Majors et de plusieurs milliers de labels indépendants).
Sont aussi présents sur le marché (pour les principaux) : FnacMusic,
Virginmega, E-compil (Universal music), SonyConnect (Sony BMG), Napster, O2. Récemment,
le site Emusic, qui fut le premier à mettre en ligne des MP3 payant (sans DRM), a mis en service
sa plate forme en Europe. Cette dernière a la particularité de ne diffuser
que des artistes provenant de labels indépendants et est ouvertement
faite pour les mélomanes avertis. Début 2006, il existe 335 services de
téléchargement payant dans le monde contre 50 en 2003. Toutefois, au
prix actuel, les marges des plateformes sont comprimées à l’extrême et
ainsi, leur pérennité est menacée. Il ne serait donc pas surprenant de voir
une concentration des plateformes de téléchargement, la survie d’une
centaine de plateformes ne semblant pas être économiquement possible
à long terme.

En 2005, la vente de musique en ligne (internet et mobile)


représente 5,5% des ventes. En 2007, alors qu’une nouvelle baisse des
ventes en gros (entendez par là les livraisons des labels aux distributeurs)
devrait être comprise entre 15 % et 20 % ; les ventes de musique en ligne
dépassent les 30% des ventes de musique enregistrée! Un chiffre que
les plus optimistes pensaient atteindre en 2010...

15
4. L’offre légale

Qui gagne quoi ?

Concrètement, sur une plateforme légale de téléchargement


où un titre est vendu 99 centimes d’euros :

• un artiste-interprète gagne en moyenne 3,5 centimes. Ce chiffre


correspond aux royalties de l’artiste ( reversées par le producteur du
disque) qui dépendent du contrat (contrat de distribution, de licence, ou
d’enregistrement),
• le producteur empoche en moyenne 70 centimes,
• la SACEM récolte ici 7,5 centimes. Après soustraction des frais de
fonctionnement de cette dernière (environ 15%), elle redistribue environ 6,4
centimes aux auteur-compositeur-éditeur.
Histogramme de répartition des sommes
pour un titre à 0,99€

Producteur
P roducteur
Frais
F ra is
Promotion
P romotion
Fabrication
F a brica tion
TVA
T VA
C olonne E
SACEM S a cem
Frais Fbancaires
ra is ba nca ire
DRMDR M
Plateforme
P la te forme
ArtisteArtis
Interprête
te interprète

0
0 10
10 20
20 30
30 40
40 50
50 60
60 70

Pour les web radios, se rapporter à la


fiche boxson N°1 sur les droits d’auteur.
Concernant les sites de musique à la demande
du type deezer, il s’agit de contrats spécifiques.

La diffusion libre et encouragée


De nombreux groupes de musique ont compris en observant la vague du P2P le
potentiel que le net leur offrait en terme de diffusion. Bien avant l’industrie musicale qui comme nous
l’avons vu a tâtonné un moment avant de trouver ses repères, ils ont abordé le net en acceptant les
règles du jeu que les internautes avaient créé : échange et partage d’oeuvres favorisant la découverte
artistique . Des contrats spécifiques à cette nouvelle donne se sont développés ( licences Art Libre,
Creative Commons...) invitant l’internaute à copier et diffuser l’oeuvre pour aggrandir son public.
Boxson.net ou Dogmazic.net accueillent dans cet esprit des milliers d’auteurs-interprètes sur leurs
plateformes, qui se créent ainsi des réseaux locaux de fans prêts à les suivre sur scène. Jamendo.
com a misé sur la constitution d’un répertoire international pour doper ses visites et financer son
activité par la publicité.
16
4. L’offre légale

Le modèle basé sur la publicité

La nouvelle ces sites ont su mettre en place téléchargement), mis en valeur


des accords avec les majors et par un site très simple d’emploi.
ère de croissance de la les Sociétés de Perception et Mais Deezer peut surtout
publicité sur Internet, alliée à de Redistribution des Droits s’enorgueillir du premier accord
des difficultés chroniques à (comme la SACEM) afin d’être signé entre un site de ce type
vendre du contenu en ligne, étiquetés légaux. et la Sacem. En gagnant ainsi
a engendré l’apparition de le statut de plateforme légale,
nombreux services gratuits, ou il a pu se développer en toute
plus exactement payés par le « Ainsi on trouve quiétude.
temps de cerveau » disponible des sites comme Qtrax qui
LastFM.fr est quant à lui un mix
du consommateur. Le but de ces revendiquent le titre de «
entre webradio personnalisable
services est simple : attirer vers premier site de téléchargement
et réseau de recommandation
une offre légale les utilisateurs de musique gratuit et légal ».
musicale. Récemment, LastFM.
qui n’achètent pas ou plus de Ce site américain est censé
fr vient d’ajouter une corde
contenu, qu’elle qu’en soit la proposer plus de 25 millions
à son arc (expérimentation
raison. Naturellement, l’offre de chansons, téléchargeables
au Etats-Unis, en Grande-
est d’abord apparue via le par le biais d’un lecteur maison
Bretagne et en Allemagne) :
streaming, proche des diffusions (en réalité c’est un système de
l’écoute illimitée gratuite, avec
télé ou radio traditionnellement Peer to Peer légal). Les titres
la bénédiction des Majors du
financées par la publicité. sont en effet protégés par des
disque. Cela sans publicité,
Petit à petit, on voit donc se DRM, pour s’assurer que des
mais le système sera toutefois
dessiner plusieurs modèles publicités soient bien diffusées
limité à trois écoutes par titre
finalement compatibles entre lors du téléchargement : le
pendant la phase de rodage.
eux. Dernièrement, ce sont les prix à payer pour bénéficier
MusicMe, Airtist, Radio blog...
Web radio, les sites d’écoute de la gratuité. Autre service
de nombreux sites gratuits sont
à la demande ou les sites de gratuit : Deezer.com qui a su
donc en marche.
musique communautaire qui se faire un nom grâce
se développent. à son service d’écoute
D ’ a b o r d musicale illimitée et
marginaux, gratuite (sans

Les modèles comme Qtrax montrent aussi que les réseaux


peer to peer ne sont pas que synonyme d’illégalité et que ces derniers
réseaux présentent des caractéristiques très intéressantes et apparaissent
comme un modèle de référence en matière de diffusion. Les services de p2p
marchands existent depuis un certains temps et offrent une opportunité en matière de
rémunération pour les ayants droits des droits d’auteurs (auteurs/compositeurs) ou droits
voisins (artistes-interprètes). De plus, le modèle de p2p offre des économies de distribution.
La plus connue fonctionnant sur cette base est Playlouder (réseau fermé dont l’accès est
payant). une fois le droit d’entrée au réseau payé, tout est gratuit.

17
4. L’offre légale

Problématique de ce modèle
Le modèle basé sur la publicité comme mode de financement soulève bien
des questions à long terme : la publicité est-elle un puit sans fond capable de financer toutes ces
plateformes et réseaux ? Les économistes sont divisés sur la question et il semble que c’est le temps
qui y répondra. Ces systèmes tendent donc à privilégier des DRM plus orienté vers l’identification
plutôt que la protection des fichiers pour ainsi rémunérer les ayants droits.
La question est finalement de savoir dans quelle mesure les internautes vont accepter
d’être encore et toujours exposés à la publicité pour consommer des contenus. Il est vrai que les
habitudes de consommation avec l’audiovisuel nous ont habituées à voir des spots à tout va (c’est
dire, aujourd’hui, les patrons de certaines chaînes avouent ouvertement : les programmes sont
créés pour les espaces publicitaires qui les jalonnent). Mais il est certainement plus perturbant
d’avoir 10 secondes d’extrait audio pour la lessive X au début d’un morceau des Pink Floyd. On peut
donc affirmer que certains préfèreront des offres sans publicité, quel qu’en soit le modèle. C’est
pourquoi les services financés par la publicité peuvent être considérés comme complémentaires
plus que concurrentes des offres payantes.

Les offres des acteurs de télécommunication

Neuf a innové durant l’été 2007. maximum de 3 transferts vers des périphériques
Les abonnés ADSL du FAI peuvent accéder externes (baladeurs, téléphones mobiles), et
par Internet à un service de téléchargement renouvellement de la licence tous les mois sous
illimité, gratuit pour l’offre de base (1 seul des 9 peine de destruction des fichiers. Offre différente
genres musicaux du catalogue), et vendu 4,99€ : Le groupe Lagardère Active et le FAI Orange
par mois pour un accès complet. Gros bémol : lancent fin janvier 2008 MusiLine.orange.
seul le catalogue d’Universal est disponible fr , un portail d’écoute en streaming
pour le moment. Autre offre dans cette exlusivement réservés aux abonnés
lignée : Intégré dans son offre AliceBox Orange. Au menu, accès gratuit,
à 29,95 €, l’abonnement donne droit flux musicaux personnalisables,
au catalogue complet d’EMI, soit et création de profils. musiLine
environ 7500 artistes. Mais si l’accès n’est pas présenté par Orange
au catalogue n’est pas limité au comme son moyen d’investir le
genre, comme dans l’offre de Neuf, créneau mais l’opérateur n’exclue
elle reprend en revanche le système pas la possibilité à l’avenir de
de DRM made in Microsoft utilisé déployer un catalogue de titres
par Universal : restriction de lecture en téléchargement gratuit, à
au seul Windows Media Player, l’instar de Neuf.

Ces nouveaux services dit illimités sont donc pour l’instant limités au catalogue
d’une seule maison de disques et reposent tous sur un système de DRM qui limite dans le temps
la licence des titres téléchargés. S’ils s’ouvriront vraisemblablement à d’autres catalogues dans le
courant de l’année 2008, la suppression des DRM dans ces offres sur abonnement n’est cependant
pas au programme. On le voit, l’intégration des nouveaux usages dans les offres licites est en place.
SI les ayants droit et l’ensemble de la filière musicale semblent décidés à mieux tirer parti des
pratiques des internautes, ils conservent une stratégie visant à une régulation de la circulation illicite
des oeuvres, avec en parallèle une politique plus ouverte sur des modes innovants de diffusion.

18
5. L’influence du web 2.0

De nouvelles pratiques diffusion. Et ceci est une véritable révolution


très intéressantes naissent sur Internet des rapports marchands. Avant le web, les
concernant la diffusion, mais aussi la création relations étaient globalement basées sur un
ou la production de contenus, dans lequel schéma vertical classique entre un service
l’internaute joue un rôle croissant. Comme qui émet et les utilisateurs qui consomment.
nous avons pu le décrire au début de cette Aujourd’hui, le podcasting est monnaie
fiche, l’essor actuel d’Internet tient au fait courante, les blogs, les sites communautaire
que l’internaute est à la fois consommateur fleurissent (avec leurs avantages et leurs
et acteur de la chaîne de production et de inconvénients...).

Les réseaux sociaux

Les sites communautaires actifs répondent même directement à leur


dits réseaux sociaux tels que Facebook ou fans! l’artiste peut autoriser d’autres membres
Myspace unissent des millions de personnes à reprendre sa musique sur sa propre page,
à travers le monde. Ces sites constituent une ce qui constitue un outil promotionnel des
des plus importantes évolutions d’Internet plus efficaces.
ces dernières années. Prenons l’exemple Récemment, myspace a innové en créant
de Myspace pour comprendre quelques le « me, myspace and my band » organisé
changements induits sur la diffusion de la dans la France entière, des concerts gratuits
musique : Fondé en 2003, Myspace est avec les jeunes groupes qui créent le buzz
au départ un service permettant dans leur région grâce à leur page sur le
à chacun de ses membres réseau. Ces concerts, qui couvrent
de disposer d’une page de tous les genres musicaux ont donné
profil personnalisé et surtout l’occasion à plus de 50 groupes
d’interagir avec les français de se produire
autres membres. sur scène dans 15 villes.
Le site est depuis Aujourd’hui, 15 de ces groupes
très connu pour sa ont été sélectionnés pour
section Myspace faire partie de la compilation «
music (plus de 200 millions d’inscrits) où Me, MySpace & My Band ». En lançant la
aujourd’hui, tout musicien amateur ou première compilation digitale avec Itunes et
professionnel ou label «se doit» d’avoir sa Believe Digital, MySpace permet aux jeunes
page. Ce service permet aux musiciens groupes de percevoir un pourcentage des
de fédérer une communauté autour d’eux, ventes générées. Voilà un exemple concrès
d’informer les fans de leur actualité musicale, de ce qu’internet change dans les pratiques
de mettre en ligne leurs dates de concerts, et les modes de production et diffusion de
leurs videos, des chansons en streaming ou musique, en s’exportant au delà du net.
en téléchargement.... les artistes les plus

19
5. L’influence du web 2.0

En terme éthique quant aux réseaux sociaux, on peut légitimement se demander


si ces systèmes ne vont pas uniformiser encore plus les cultures locales pour mettre en
avant une culture mondiale aseptisée. En 2006 l’entreprise CustomCore a fait une enquête
mondiale sur le contenu et l’utilisation de ces sites. Les chiffres prouvent exactement le
contraire. A chaque région du globe semble se dessiner un MySpace local qui enrichie la
possibilité pour chacun d’exprimer sa singularité. Bonne nouvelle !

Recommandations audio

Autre système, autres pratiques, se fait sur les oeuvres consommées par
ce sont les outils de recommandations. chaque usagers, monitoring des oeuvres
Face à l’abondance des oeuvres disponibles écoutées sur notre ordinateurs mais aussi
sur Internet, l’émergence de filtres de de celles qui y sont stockées, notation
personnalisation dans les flux proposés personnelle des oeuvres... Aujourd’hui
à l’utilisateur sont devenus courants. A la même, des projets comme le music genome
base, on pouvait lire « les internautes ayant project analyse intelligemment la musique
acheté ceci ont également acheté cela ». pour la classer suivant les goûts de chacun
Aujourd’hui, ces recommandations (plus ou : le music genome project est un algorithme
moins critiquable puisqu’il s’agit ni plus ni intégré au service pandora qui analyse les
moins de pistage de nos pratiques) face à caractéristiques intrinsèques d’une oeuvre
nos goûts vont plus loin : filtrage collaboratif, audio (tempo, mode, tonalité...).
comme sur lastFM, où un travail statistique

La participation de l’internaute
On constate aujourd’hui et piratage quand ce sont les internautes
que le statut de l’internaute est multiple eux mêmes qui diffusent des oeuvres
: prescripteur, diffuseur, distributeur, co- protégées.
producteur... Avec les blogs personnels, les
mega blogs tels que Facebook ou myspace, Assez récemment, l’internaute peut
l’internaute a aujourd’hui des moyens contribuer au financement d’une oeuvre. Ce
innombrables pour diffuser de n’est pas très nouveau: ça s’appelle
l’information et recommander des la prescription. C’était le cas en
contenus. A ce titre, comme cité 2006 par exemple pour l’album
dans la définition du blog dans le de Mano solo « in the garden »,
lexique de cette fiche, les blog les dans le but d’avoir assez d’argent
plus influents sont intégrés dans pour promouvoir le disque. Les
les plans médias des industries de prescripteurs donnent une somme
contenus. Concrètement, ces blogs d’argent et ont en retour l’album
deviennent des supports de pub voir de gratuitement et en avant-première
diffusion et de distribution. D’ailleurs, dans mais aussi accès a des infos en exclusivité
ce cas la frontière est floue entre promotion sur la production de l’album...

20
5. L’influence du web 2.0

D’autres sites tels que artistshare aux Etats-Unis, sellaband aux Pays-Bas
ou spidart, no major company ou my major company en France, mettent en place des
systèmes de « co-production » pour lancer des artistes inconnus. Ils suscitent l’engouement
de nombreux observateurs et d’artistes. Ces sites veulent mettre entre les mains
de l’internaute lambda et des «communauté web 2.0» le pouvoir
d’une maison de production, ou plutôt, de ses actionnaires.

L’avenir de la direction artistique


Les mécanismes où les prétendants à une le risque pris par la maison
divergent selon les services signature pourraient publier de disque. Le parti pris
mais le principe reste toujours leurs morceaux. Aujourd’hui, disparait, on préfère faire
le même : vous misez sur un EMI fait de même. Il confiance au buzz
artiste auquel vous croyez n’est plus vraiment plutôt que d’avoir
et si vous tapez juste, vous n é c e s s a i r e le courage de
pouvez escompter un retour de travailler croire en un projet
sur investissement. Sur le suffisamment incertain. Que
papier, ça paraît prometteur. le terrain ou devient cet espoir
Plutôt que des directeurs de connaître de découverte que
artistiques au service personnellement l’on plaçait dans
d’actionnaires, c’est à vous le directeur artistique d’une les labels ? Rien du tout. Les
de faire le pari de la réussite maison de disque pour artistes n’ont plus besoin de
d’un artiste. C’est un peu espérer décrocher une maisons de disque pour sortir
la star academy du net...... signature. Tout le monde a de l’ombre. D’ailleurs, ont-ils
Mais c’est avant tout une sa chance. Mais le revers encore réellement besoin
marche de plus que gravit le de la médaille, c’est qu’il de maisons de disque ? Si
Web 2.0 dans le processus renforce cette espèce la tendance se confirme, les
de sélection des talents. d’inutilité que l’on projette de dénicheurs de talent, ceux
Rappelons que les directeurs plus en plus sur les maisons qui ont parfois misé sur des
artistiques s’appuient de disque. Le travail d’un projets auxquels personne
déjà sur des plateformes bon directeur artistique, c’est ne croyait et qui ont été à la
communautaires pour faire bien de dénicher la petite base de véritables révolutions
leurs choix : La direction perle inconnue et bourrée musicales disparaitront au
artistique de Sony BMG de talent pour la porter aux profit du plébiscite populaire.
refuse l’envoi de démos yeux du public. Mais celui-ci Pour le meilleur, ou pour le
CD pour mettre en place se perd maintenant au profit pire ?
deux blogs communautaires du Web 2.0 et baisse encore

21
Sources

Dans les ouvrages :


• L’industrie du disque, Nicolas Curien et François Moreau. Editions La Découverte.
• Internet : un seisme dans la culture, Marc Le Glatin. Editions de l’Attribut.
• Du bon usage de la piraterie, Florent Latrive. Editions la decouverte. (ouvrage sous
licence creative commons (by-nc-sa) et aussi disponible en téléchargement libre et
gratuit sur Internet)

Auprès des organismes :


• Sacem
• Adami
• Spedidam

Dans les textes de loi et autres publications institutionnelles :


• Rapport Olivenne et Rapport Attali
• loi dadvsi
• Filière de la musique enregistrée : quels sont les véritables revenus des artistes
interprètes? rapport Adami.
• Le destin d’une oeuvre a l’ere du numerique, rapport man media pour l’Adami.

Dans la presse et sur le web :


• Les Inrockuptibles
• Midem 2008
• Numerama.com
• Liberation
• Le Monde
• Le Monde Diplomatique

Création de la fiche Boxson #2 :

Rémi Sabonnadière, Paul Bucau (contenu rédactionel)


Louis Moncouyoux (conception graphique)

BOXSON GRENOBLE
www.boxson.net
2, rue Gustave Flaubert
38000 Grenoble
contact@boxson.net
06 88 24 30 27

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